René Barbier et Christian Verrier La joie d`être grand-père

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René Barbier et Christian Verrier
La joie d’être grand-père
« Dans un monde où les couples n’ont plus la solidité d’antan, les grands-parents sont devenus des
repères importants, d’autant qu’ils accompagnent en général plus longtemps la vie de leurs petits-
enfants.
En commençant à écrire ce livre, j’ai pris conscience de la valeur symbolique que je pouvais lui
donner : celle d’un testament spirituel »
Hubert Reeves
(L’univers expliqué à mes petits-enfants, Seuil, 2011)
À Lou
2012
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Sommaire
Introduction p. 4
Chapitre 1. Pourquoi et comment ce livre ? p. 8
Chapitre 2. Mes grands-parents p. 17
Chapitre 3. Attachement et perte p. 39
Chapitre 4. Profondeur et reliance p. 50
Chapitre 5. La gravité p. 62
Chapitre 6. Lamour et le mal p. 74
Chapitre 7. Le sens de la vie poétique p. 88
Chapitre 8. Le jeu p. 99
Chapitre 9. Gronder p. 110
Chapitre 10. La tendresse, le câlin, le corps p. 123
Conclusion p. 135
Postface p. 143
Adresse du site-miroir p. 147
Mini-biographies et bibliographies des auteurs p. 148
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INTRODUCTION
Le livre que vous allez lire tente de sortir des sentiers battus. Il ne s'agit pas de délivrer un recueil
de recettes ou de trucs pour devenir un « bon grand-père » comme le proposent analogiquement
maints ouvrages destinés aux entreprises et à destination des cadres pour asseoir leur autorité et
pour correspondre à l'état d'esprit du « manager efficace ».
Je suis parti d'un autre point de vue. Non donner des conseils pratiques plus ou moins codés par
un imaginaire social structuré par le néolibéralisme, mais m'interroger et tenter de répondre aux
questions posées par le problème de la transmission de valeurs entre un grand-père incarné et une
petite fille qui grandira et comprendra la vie pour le meilleur et pour le pire. Il se peut alors
qu’elle ait envie de savoir ce que pensait son grand-père qui l’aura si tendrement aimée. Il n’est
pas impossible également que les considérations qui vont suivre suscitent quelques
retentissements chez des contemporains soucieux d’éducation familiale.
Je rédige ce livre avec la collaboration d'un ami expérimenté en histoire de vie et en
autoformation Christian Verrier. Il m'aide par ses questions et ses retentissements à aller plus
avant dans ma réflexion.
Transmettre devient la question cruciale aujourd'hui en ces temps de changement accéléré des
valeurs, des attitudes et des comportements individuels et sociaux. Qui doit transmettre et que
transmettre ? L'école ou la famille ? Au sein de cette dernière, le père, la mère ou les grands-
parents ?
Mais surtout que transmettre ? Sur le plan professionnel les jeunes générations vivent une
transformation radicale du savoir qui devient trop vite obsolète. Les grands-parents qui
appartiennent à deux générations antérieures sont largement dépassés et n'ont plus guère
l'occasion de parler de leur expérience de travail. Apparemment nous sommes loin du proverbe
africain « quand un vieillard meurt, c’est une bibliothèque qui flambe ».
Sur le plan des valeurs et du sens de la vie, ils sont également tout aussi handicapés. Leur
expérience de vie, encore liée à des us et coutumes pas trop démantelés, est ressentie comme d'un
autre âge par leurs petits enfants et même par leurs propres enfants. Ce fait devient évident
lorsqu'ils n'ont pas su ou pu en tant que parents donner une éducation affective, sensible,
généreuse, réfléchie et ouverte à la solidarité humaine, à leurs propres enfants.
On le comprend bien à travers l'enquête menée par Marie de Hennezel et son fils Edouard sur le
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thème de la grande dépendance entre générations1.
La génération 68, à laquelle j'appartiens en partie puisque je suis en 1939, a largement profité
des bienfaits d'une période d'accalmie économique et sociale en France. Elle a eu la chance de
vivre dans sa maturité sans le sida mais avec la liberté sexuelle et morale, une relative ouverture
professionnelle, une scolarisation plus sûre et plus longue, une possibilité de voyager et de
rencontrer d'autres cultures, enfin une retraite garantie même si elle n'est pas toujours confortable
pour certaines catégories sociales. Il est normal que les enfants et petits enfants des parents des
trente glorieuses et soixante-huitards interpellent leurs ascendants sur l'état de l'économie et de la
planète qu'on leur laisse en héritage, en leur demandant, en plus, de subvenir aux besoins de
dépendance des grands vieillards dont nombreux sont ceux à avoir mené leur existence dans la
foulée d'un individualisme jouissif et inconscient des enjeux du vieillissement.
Certes je ne veux pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Beaucoup de personnes de cette génération
68 ont éduqué les enfants avec un humanisme débarrassé des vieilles idoles, une curiosité saine à
l’égard de la spiritualité humaine pour laquelle le corps n’était plus tabou, une perspective d’une
autre socialité ouverte à un sens de la vie partagé entre les citoyens du monde. Mais leur
ouverture, justement, a permis à leur progéniture d'aller de l'avant, de devenir curieux de la vie
des autres, d'être exigeants sur leur propre besoin de liberté et parfois de partir loin de leurs
parents. L'assomption de la solitude est le lot des personnes de ma génération et la possibilité de
la dépendance physique, un horizon dramatique compte tenu de l'allongement du vieillissement.
Dès lors la personne âgée qui n'a pas fait depuis longtemps un travail intérieur
d'approfondissement sur le sens de la vie et de la mort, de la finitude de la puissance d'agir et du
rétrécissement des relations sociales et de pouvoir, risque d'être bien dépourvue le moment venu.
Aujourd'hui le sens de la sagesse devient une exigence évidente, avec son lot inexorable de
lucidité et d'acceptation de la complexité existentielle. Lors d'un ultime entretien avec un
journaliste anglais, le psychologue Carl Gustav Jung répondait à la question suivante : quel
conseil donneriez-vous à un vieillard sur son avenir ? De continuer à vivre comme s’il avait
l'éternité devant lui, assurait le psychologue. Aujourd'hui, nous savons que nous n'avons plus
l'éternité devant nous mais plutôt le risque de l'invalidité et de l'extinction progressive des
souvenirs qui s'estompent comme un voilier englouti par l'horizon. Mais alors que transmettre à
1 Marie et Edouard de Hennezel, Qu’allons-nous faire de vous ?, Carnets nord, 2011.
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