SERIE B - Économie

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Ega Akoété AGBODJI (Université de Lomé –
Togo)
Directeur de Publication :
Fulbert Géro AMOUSSOUGA
d’Abomey-Calavi – Bénin)
(Université
Gilbert-Marie Aké N’GBO (Université FHB,
Cocody – Côte d’Ivoire)
Rédacteur en chef :
Bédia François AKA (UAO, Bouaké – Côte
d’Ivoire)
Zié BALLO (Université FHB, Cocody – Côte
d’Ivoire)
Rédacteurs associés :
Nestor Tiéhi TITO (Université FHB, Cocody –
Côte d’Ivoire)
Alexandre ASSEMIEN (INP-HB, Yamoussoukro
– Côte d’Ivoire)
Alexandre ASSEMIEN (INP-HB, Yamoussoukro
– Côte d’Ivoire)
Angbonon Eugène KAMALAN (UAO, Bouaké –
Côte d’Ivoire)
Denis Joël Tongnivi FOADE (Université FHB,
Cocody – Côte d’Ivoire)
Boniface KOMENAN (UAO, Bouaké – Côte
d’Ivoire)
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Libreville – Gabon)
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Mamadou KOULIBALY
Cocody – Côte d’Ivoire)
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d’Ivoire)
(Université
FHB,
Bédia François AKA (UAO, Bouaké – Côte
d’Ivoire)
Secrétaires de rédaction :
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Christophe TAVERA (Université Rennes 1 –
France)
Adèle KORE ([email protected])
Loesse ESSO (ENSEA, Cocody – Côte d’Ivoire)
Julia N’ZO ([email protected])
Yaya KEHO (ENSEA, Cocody – Côte d’Ivoire)
Comité Scientifique :
Willy Ruffin MANTSIE (Université Marien
N’GOUABI, Brazzaville – Congo)
Fulbert Géro AMOUSSOUGA
d’Abomey-Calavi – Bénin)
(Université
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d’Ivoire)
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Saint-Louis – Sénégal)
Aly Amadou MBAYE (Université Cheikh Anta
Diop, Dakar – Sénégal)
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Côte d’Ivoire)
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Cameroun)
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Ouagadougou – Burkina Faso)
Ouaga
Auguste KOUAKOU (Université FHB, Cocody –
Côte d’Ivoire)
Clément KOUAKOU (Université FHB, Cocody –
Côte d’Ivoire)
Kimseyenga SAWADOGO (Université Ouaga II,
Ouagadougou – Burkina Faso)
Wautabouna
Cocody
OUATTARA (Université FHB,
–
Côte
d’Ivoire)
II,
1
Sommaire
EDITORIAL ............................................................................................................................ 3
L’estimation de la demande de monnaie de long terme : une illustration pour le cas de
l’économie ivoirienne
Denis Joël Tongnivi FOADE ................................................................................................. 4
Approches comparatives de la dépendance du Congo à l’égard de la France et de la
Chine
Julien BOKILO .................................................................................................................... 23
L’impact de l’aide publique au développement sur la croissance économique et
l’épargne intérieure : le cas de la Côte d’Ivoire entre 1970 et 2010
Muhamed Sylla N’GOMORY ............................................................................................. 63
Excès de capital, croissance du crédit bancaire et cycle conjoncturel : cas de l’Union
Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA)
Salifou OUEDRAOGO, ....................................................................................................... 89
Analyse empirique du lien entre croissance économique et chômage en Côte d’Ivoire
Nahoussé DIABATE .......................................................................................................... 117
L’hypothèse du revenu permanent extérieur et l’investissement : le cas de la Côte
d’Ivoire
Denis Joël Tongnivi FOADE ............................................................................................. 134
La socio-histoire de l’action publique africaine : cas des processus de construction des
politiques sociales au Congo de 1382-1991
Julien BOKILO .................................................................................................................. 162
Protection des droits de propriété et diversification économique dans l’espace CEDEAO
Moussa SANGARE............................................................................................................ 185
Déterminants de la participation des populations riveraines à la protection des retenues
d’eau en milieu urbain : cas des barrages no 1, 2 et 3 de la ville de Ouagadougou au
Burkina Faso
Tibi Didier ZOUNGRANA et Olivier COMBELEM ........................................................ 215
Approches-prix des biens et services et approches-quantité de main d’œuvre comme
facteurs de croissance dans l’UEMOA : analyse sur données de panel
Yao Séraphin PRAO et Angbonon Eugène KAMALAN .................................................. 241
2
EDITORIAL
On attend d’une nouvelle revue scientifique qu’elle définisse dans son premier éditorial ce qui
fonde la légitimité de son existence et plus encore quand cette revue se veut le support d’un
domaine scientifique mixte : Economie et Gestion.
La Revue Internationale de Gestion et d’Economie (RIGE) cherche à encourager la
production de connaissances pluridisciplinaires et offre une plateforme pour faire émerger
des synergies entre les Sciences de Gestion, les Sciences Economiques et les autres Sciences.
La RIGE se veut une revue internationale avec pour caractéristique de traiter de thématiques
transversales en utilisant des approches innovantes afin d’assurer la qualité et la rigueur
scientifique dans la diversité épistémologique et méthodologique.
Son ouverture et son implantation internationale se traduisent par la diversité des pays
d’origine des auteurs et par la variété des membres des comités scientifiques. Ainsi, près de
cinquante (50) prestigieux chercheurs de dix (10) pays sont impliqués dans le processus
d’évaluation des articles de la revue.
La RIGE s’adresse à la communauté scientifique, aux professionnels ainsi qu’aux étudiants.
Elle publie des travaux scientifiques réalisés dans les domaines de la gestion et de l’économie.
Une Série est dédiée à chacun des deux domaines : Série A pour la Gestion et Série B pour
l’Economie.
Revue semestrielle, la RIGE publie chaque année deux numéros. Cependant, des numéros
spéciaux entièrement thématiques pourront être publiés.
Enfin la RIGE positionne sa ligne éditoriale sur les articles ayant une réelle contribution à la
connaissance scientifique. Pour la série A, la RIGE privilégie les soumissions qui présentent
les implications managériales de l’étude réalisée après l’application des approches qualitatives
et quantitatives. Pour la série B, sont privilégiées les soumissions qui présentent les
implications de politique économique après l’application des méthodes d’analyse
quantitatives.
Professeur Augustin Anassé Adja ANASSE
3
REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE B - ECONOMIE / NUMERO 1 - VOLUME 2 - Décembre 2016 / pp. 4-22.
L’estimation de la demande de monnaie de long terme : une illustration pour le cas de
l’économie ivoirienne
Denis Joël Tongnivi FOADE
Université Félix HOUPHOUET-BOIGNY, Abidjan (Côte d'Ivoire)
08 BP 1716 Abidjan 08 (Côte d’Ivoire)
[email protected]
Résumé
Une fonction de monnaie stable conduit nécessairement à une formulation d’une politique
monétaire adéquate. Plusieurs études théorique et empirique menées dans les pays développés
comme dans les pays en développement ont évalué les déterminants et la stabilité de la
fonction de demande de monnaie. En s’appuyant sur certains travaux existant dans ce
domaine, nos investigations porteront sur l’estimation d’une fonction de demande de monnaie
d’une petite économie ouverte sur l’extérieur qu’est la Côte d’Ivoire.
Mots-clés : demande de monnaie, modèle d’ajustement partiel, masse monétaire.
JEL. Classification : E 41
4
Abstract
A function of stable currency necessarily leads to a formulation of an adequate monetary
policy. Several theoretical and empirical studies conducted in developed countries as in
developing countries have assessed the determinants and stability of money demand function.
Building on existing work in this field, our investigations will focus on estimating a money
demand function of a small open economy on the outside that is Côte d'Ivoire.
Key words : money demand, partial adjustment model, money.
JEL : Numbers: E 41
5
Introduction
Une fonction de demande de monnaie stable a un effet positif sur la croissance économique,
le taux d’intérêt et par conséquent on assiste à une bonne régulation du taux d’inflation. Le
concept de monnaie n’est pas facile à cerner pour la simple raison que la monnaie est
multiforme. Différents auteurs ont donné de différentes définitions de la monnaie selon leurs
préoccupations. Ainsi, pour Aristote, la monnaie est un bien qui est à la fois moyens de
paiement, unité de compte et réserves de valeur.
La monnaie est l’ensemble des actifs acceptés partout, par tous et tout temps pour les
règlements des dettes issues de l’échange. Elle est fondée sur la confiance (André Chaïneau).
Fisher a été le premier à avoir formulé l’équation des échanges afin de rendre plus complète
l’analyse de la monnaie comme intermédiaire des échanges. Pour lui, la monnaie n’est qu’un
voile et son unique rôle est de déterminer le niveau général des prix. Son analyse est basée sur
une simple identité comptable et met l’accent sur la vitesse-transaction de la monnaie. La
valeur totale des ventes doit être égale à la valeur totale des recettes dans toute l’économie. La
demande de monnaie de Fisher, à des fins de transactions pose quelques problèmes. En effet,
Fisher suppose certains éléments constants : habitude de l’individu, système de paiement dans
la communauté, densité de la population et rapidité des transactions.
La demande de monnaie dans l’analyse keynésienne, suggère que la monnaie est un actif
financier. En effet, la monnaie n’est pas seulement détenue par les particuliers ou les
entreprises à des fins de transactions mais la monnaie est détenue pour d’autres motifs : motif
de précaution et motif de spéculation. Pour lui la monnaie n’est pas neutre et elle possède son
utilité spécifique qui la distingue des autres biens. Keynes fit l’extension de l’approche de
Cambridge pour y inclure de nouvelles variables telles le taux d’intérêt par exemple. Keynes a
doté la monnaie d’une fonction de demande qui est la fonction d’encaisses monétaires. La
monnaie entre dans la logique des choix des individus. C’est en cela que l’analyse de Keynes
est qualifiée de révolutionnaire. Cette révolution s’est réalisée grâce à l’introduction de la
préférence pour la liquidité qui est devenue un facteur explicatif de la demande de monnaie.
L’analyse dichotomique des classiques a été rompue par Keynes en y introduisant le taux
d’intérêt.
6
La situation du sous-emploi est l’apport nouveau de Keynes car chez les classiques, il y a
toujours équilibre du marché. Keynes a monétisé l’économie sur la base monétaire. Cette
monétisation pose le problème de la liquidité générale de l’économie qui est absente chez les
néo-classiques. Ainsi, tout agent économique perçoit un revenu monétaire dont une partie est
affectée à la consommation et l’autre à l’épargne. Celle-ci peut être placée (encaisses actives)
ou thésaurisées (encaisses passives). La monnaie dans sa fonction de réserves de valeur est
une excellente assurance contre les aléas économiques de la vie. Le taux d’intérêt pour
Keynes, résulte de la confrontation entre l’offre et la demande de monnaie. L’offre de
monnaie est une variable exogène déterminée par les autorités monétaires. Ainsi, la demande
de monnaie est une variable endogène déterminée par les motifs précités. Keynes s’est limité
à une seule variable, le taux d’intérêt et les anticipations du taux d’intérêt sur la demande de
monnaie. C’est en cela que réside la contribution majeure de Keynes à la théorie monétaire.
La révolution keynésienne commence par la prise en compte de l’incertitude. Keynes a fait
l’hypothèse que les individus ne pouvaient détenir leur patrimoine que sous deux formes : (i)
encaisses actives ; (ii) titres financiers (placements). Cette deuxième forme de détention du
patrimoine a donné le nom de demande spéculative de la demande de monnaie. Cette
spéculation n’est qu’un arbitrage incessant entre la monnaie d’une part et les actifs réels ou
financiers d’autre part. Ce motif est lié à « l’incertain certain » parce qu’il dépend des
anticipations que les agents économiques font relativement aux variations futures du taux
d’intérêt qui sont déterminées a priori.
L’approche keynésienne de la demande de monnaie aussi remarquable soit-elle, n’a pas
échappé aux critiques surtout au niveau de la demande monnaie spéculative et
transactionnelle de monnaie.
Au niveau de la demande spéculative, les économistes contemporains n’ont pas tous les
mêmes points de vue quant à l’importance du facteur monétaire. Pour certains (James et
Rueff) le facteur monétaire n’est pas important ; pour d’autres (Friedman et Samuelson) le
facteur monétaire est important. Ces divergences d’appréciation proviennent du fait que
Keynes a formulé trop simplement la fonction de liquidité de monnaie qui dépend uniquement
du taux d’intérêt. En effet, outre le taux d’intérêt, la demande de monnaie est fonction du
niveau général des prix, des encaisses réelles existantes, du niveau de revenu global, etc.
7
Contrairement à l’analyse keynésienne, les agents économiques ne gardent pas tous leurs
richesses soit sous forme d’obligations soit sous forme liquide mais quelquefois sous forme
d’une combinaison des deux.
Au niveau de la demande de monnaie à des fins de transaction, les critiques sont plus
constructives que précédemment et apparaissent comme étant un approfondissement de la
demande transactionnelle de la monnaie. Ainsi, les auteurs comme Baumol, Tobin ont mis
l’accent sur la demande transactionnelle de la monnaie en rendant estimable la théorie
keynésienne de la demande de monnaie en laissant apparaître la possibilité d’existence
d’économie d’échelle.
La demande de monnaie dans l’analyse contemporaine (Lydall, Friedman, Don Patinkin,
Louis-Philippe Rochon et Sergio Rossi) considère la monnaie comme l’une des formes sous
laquelle un agent économique peut détenir sa richesse. En un mot, la vision keynésienne ou
postkeynésienne est une vision intégrée de l’économie c’est-à-dire une vision dans laquelle, la
monnaie joue un rôle déterminant dans le fonctionnement de l’économie.
Pour les monétaristes, avec Milton Friedman en tête, la demande de monnaie est fonction de
trois séries de facteurs : (i) la richesse totale d’un individu ou son patrimoine ; (ii) les prix et
les rendements respectifs des différentes formes de son patrimoine ; et (iii) les goûts et les
préférences des individus.
En se fondant sur les différentes préoccupations des différents auteurs en ce qui concerne la
demande de monnaie, peut-on estimer une fonction stable et dynamique pour une petite
économie comme celle de la Côte d’Ivoire ?
Objet et méthodologie
L’évolution économique de la Côte d’Ivoire justifie pleinement l’intérêt de cette étude. Le
taux remarquable de croissance économique réelle de 9,4 % en moyenne par an de 1960 à
2007, la mise en place d’une structure financière dynamique sont significatifs à ce point de
vue. Ces résultats, sont le couronnement des effets consacrés à l’accumulation du capital
grâce au développement de l’agriculture et au financement extérieur. La monétisation de
l’économie est devenue une réalité même si elle évolue faiblement dans le secteur rural.
L’explication de ce phénomène trouve son explication dans l’efficience sociale de la monnaie
donc de l’encaisse monétaire dont la constitution pour les agents économiques est nécessaire
pour soutenir le développement de l’activité économique. La masse monétaire détenue par les
8
agents économiques s’estime à plus de 80 % de la masse totale. Ce sont les déterminants des
encaisses de ces agents économiques que nous essaierons d’expliciter dans le cadre de
l’estimation de la fonction dynamique de la demande de monnaie.
L’approche méthodologique dans le cadre de ce papier est fondée sur une équation
communément admise dans la détermination de la fonction dynamique de demande de
monnaie. Elle est de la forme :
Md


 kY  1    1  i 
P
Avec 
0; 
0; 
[1]
0 et P indique le niveau général des prix ; Y le produit intérieur brut déflaté
ou le revenu réel ;  le taux d’inflation ; k représente une constante, i le taux d’intérêt et
Md
P
l’encaisse réelle désirée. Sur le plan économique,  ,  , et  sont respectivement les élasticités à long
terme de la demande de monnaie par rapport au revenu réel, au taux d’inflation et au taux d’intérêt. Un
lissage de ces données statistiques sera effectué avant de procéder à la spécification économétrique.
Une analyse du comportement ivoirien face à la monnaie est nécessaire. La méthode de travail porte
sur la recherche documentaire, publications, rapports collectés au niveau des statistiques de la BCEAO
et des annuaires du Fonds Monétaire International (FMI).
Nos préoccupations s’articuleront autour des points suivants : (1) Analyse du comportement de l’agent
économique ivoirien face à la monnaie ; (2) Analyse empirique de la demande de monnaie ; (3)
Analyse économétrique et résultats.
1. Analyse du comportement de l’agent économique ivoirien face à la monnaie
L’économie ivoirienne est assimilée au secteur monétaire moderne du fait que dans le contexte actuel
de l’UEMOA, il est impossible d’analyser l’économie en terme dualiste malgré la coexistence d’un
secteur moderne monétisé et d’un secteur traditionnel ou informel dont les statistiques d’activités sont
difficiles à obtenir. Les relations monétaires et financières seront appréhendées globalement.
L’économie ivoirienne est également caractérisée par une insuffisance du capital. Mais les ressources
d’exportation constituent les principales sources qui sont parfois fluctuantes à cause de l’instabilité des
9
marchés et des cours de matières premières. Ce qui rend également le revenu quasi instable du fait
qu’il est composé en grande partie du revenu d’exportation. La monnaie est considérée en tant que
bien de production, facteur de consommation, de croissance. En effet, chez Keynes la monnaie créée
par les banques finance la production car il n’y a donc pas de production sans monnaie et cela n’a
aucun sens de parler de production réelle ; la production est d’emblée monétaire.
1.1. Demande de monnaie en tant que bien d’investissement
Les déterminants institutionnels
de la formation des encaisses monétaires résultent de la
transformation des structures économiques de la Côte d’Ivoire, de la nature de structures de production
et de la dynamique de la croissance économique. Ces facteurs expriment l’effet de structure et de
croissance. L’absorption progressive du secteur traditionnel dans un secteur moderne plus dynamique
et plus homogène grâce à la modernisation et la diversification croissantes des secteurs d’activité.
Cette politique a été mise en place par le développement des cultures industrielles et par l’effort
d’industrialisation. Tout cela est possible grâce à l’expansion de l’activité et des emprunts du système
financier. Ces fonds financent l’accumulation du capital par l’investissement net, contribuent à
l’accroissement des encaisses monétaires dans une certaine mesure à l’accumulation des actifs
financiers (achats d’obligations et d’actions). Le passage de l’industrie de substitution de type artisanat
à l’industrie de substitution moderne s’est accompagné de profondes mutations dans les structures
techniques de production, d’échanges, sociales et culturelles. Ces modifications ont engendré en
amont comme en aval des effets très importants, un accroissement du revenu monétaire dans le secteur
industriel. L’Etat intervient par une politique fiscale active pour renforcer le revenu national.
Le secteur agricole constitue ses encaisses avant la campagne agricole pour soutenir les dépenses
d’exploitation des cultures d’exportation.
1.2. Demande de monnaie en tant que pouvoir de choix
La Côte d’Ivoire disposant d’un système monétaire et financier le plus dense de l’UEMOA, favorise
l’octroi de crédits à l’économie dans les secteurs agricole, industriel et commercial. Les agents
économiques ont une forte propension à conserver la monnaie sous forme de billets et cette conversion
nécessite une demande de monnaie centrale à la banque centrale par les banques commerciales. Le
financement du développement a pour fondement conceptuel la croissance économique par
l’expansion de la masse monétaire qui peut éventuellement entrainer l’inflation. Ainsi, le système
d’évolution des prix a une influence importante sur la constitution des encaisses. Et par ce biais, les
10
tensions inflationnistes sont fortes (inflation importée) puisqu’elles sont en partie liées à des
importations massives des pays occidentaux : inflation structurelle due aux causes internes fiscale,
budgétaire, monétaire et sociologique.
L’inflation réduit les encaisses réelles donc le pouvoir d’achat des ménages qui luttent cependant pour
maintenir des encaisses nominales importantes. Les taux d’inflation élevés, favorisés en partie par la
situation créée par la rébellion du 19 septembre 2002 ont généré un comportement d’anticipation car
les agents économiques s’attendent toujours à des hausses des prix. Ces anticipations devenant
importantes multiplient les sources d’inflation qui se diffusent rapidement dans l’ensemble de
l’économie. De fortes anticipations de prix réduisent le pouvoir d’achat des ménages et la demande
supplémentaire va gonfler leurs encaisses nominales. Ainsi la dépréciation de la monnaie pousse les
agents économiques à préférer les actifs non monétaires. La demande de biens durables, voitures,
équipements ménagers, construction d’immeubles, augmente et crée davantage de tensions. La réalité
ivoirienne est telle que les actifs physiques sont assez proches de la monnaie dans la mesure où la
préférence pour le présent est ancrée dans l’esprit des agents économiques. Il est courant qu’un salarié
peut être à la fois commerçant, transporteur ou propriétaire foncier. La demande de monnaie des
ménages est cause de déséquilibre mais aussi cause de dynamique de croissance. La consommation
devient le soutient de l’activité économique.
L’agent économique qui ne satisfait pas tous les besoins de la famille étendue est un incapable. Le
cas d’insolvabilité est un cas social et par conséquent la monnaie est demandée comme réserve de
valeur pour éviter les surprises désagréables. L’insuffisance de la demande est comblée par le recours
au crédit ou à l’aliénation de biens physiques.
2. Analyse empirique de la demande de monnaie
Compte tenu de l’importance de la monnaie dans la détermination de l’équilibre économique, des
fonctions de la demande de monnaie ont été estimées par de nombreux économistes.
Domowitz et Elbadawi (1987) ont estimé une demande de monnaie au sens strict de l’économie
soudanaise. Les données annuelles utilisées et explicatives, sont le revenu réel, le taux d’inflation et le
taux de change officiel de Soudan. Elles portent sur une période de 1956-1982. Le taux d’intérêt a été
négligé du fait qu’il est resté constant et le système financier soudanais n’est pas trop développé. Avec
la méthode de cointégration doublée d’un modèle à correction d’erreurs (MCE), Domowitz et
Elbadawi ont identifié une fonction stable de demande de monnaie d’une petite économie ouverte dont
11
les variables explicatives sont celles que beaucoup de chercheurs (Laidler, 1977, 1993 ; Goldfeld,
1973, 1987 ; Boorman, 1976 ; Feige et Pearce, 1976 ; Goldfeld et Sichel,1990) ont suggérées dans
leurs demandes de monnaie : on peut citer le taux d’inflation, le coût variable d’opportunité, le taux
d’intérêt, le revenu réel, …
Adams (1992), dans ses travaux montre l’importance d’une correcte spécification d’une fonction de
demande de monnaie qui permet d’appliquer une politique macroéconomique adéquate.
Simons (1992) a estimé des fonctions de demande de monnaie au sens strict pour cinq pays africains
(Congo, Côte d’Ivoire, Maroc, Mauritanie et Tunisie). Les résultats montrent que dans trois pays, le
taux d’intérêt joue un rôle important ; les taux d’inflation et de change ont un degré de significativité
élevé sur la demande de monnaie.
Cependant, d’autres études, ont indiqué la possibilité d’utiliser le taux d’inflation, le taux de
dépréciation comme une alternative pour mesurer le coût de détenir la monnaie. Avec Fielding
(1993), pour des données trimestrielles sur une période 1978-89, a estimé la fonction de demande de
monnaie au sens large M2 de certains pays africains : Kenya, Nigéria, Cameroun et Côte d’ Ivoire. Les
variables exogènes sont le produit intérieur brut (PIB), le taux préférentiel de la banque centrale, le
taux d’intérêt des usuriers pratiqué sur le marché parallèle et l’indice des prix à la consommation.
Chaque pays est spécifique ; les études empiriques de demande de monnaie montrent qu’il existe une
différence entre les différents pays. Fielding conclut qu’il est impossible de formuler une même
politique monétaire applicable à tous les pays du fait que la difficulté éventuelle est due à l’union
monétaire. L’auteur, indique la nécessité d’estimer pour chaque pays, une fonction de demande de
monnaie.
Choudry (1995) a étudié la demande de monnaie en Argentine. Il a estimé une fonction de demande de
monnaie de long terme, stable, où le taux intérêt n’est pas significatif. Miller montre qu’il existe une
relation de long terme entre la masse monétaire M2, le revenu et le niveau général de prix.
En résumé, toutes les estimations de demande de monnaie décrites dans les pays développés comme
dans les pays en voie de développement ont en général pour variables exogènes le revenu réel, le taux
12
d’intérêt, le taux d’inflation anticipée. Les banques centrales de tous ces pays réalisent que la stabilité
de la demande de monnaie est la pierre angulaire de toute bonne conduite de politique monétaire.
3. Analyse économétrique
La méthode économétrique choisie découle du comportement de l’agent économique ivoirien face à la
demande de monnaie et de l’analyse empirique. Pour estimer la fonction dynamique de demande de
monnaie de l’économie ivoirienne, on s’appuie sur l’approche d’ajustement partiel et d’adaptation des
anticipations. Ce modèle d’ajustement partiel (MAP) a été introduit par Chow (1966) et par Goldfeld
(1973). Dans cette approche, on tient compte d’une part de l’introduction des rigidités de
comportement, technologiques, institutionnelles, de l’incertitude et d’autre part des fonctions
économiques. Dans cet ordre, la Côte d’Ivoire est considérée comme un agent économique qui
prévoit un niveau donné d’encaisses monétaires réelles à la période t comme le montre l’équation [1].
Il s’agit d’une demande de monnaie d’équilibre de long terme sur un marché à information parfaite.
Dans cette section, nos préoccupations porteront sur les points suivants : (4.1) spécification du modèle
; (4.2) données et résultats économétriques.
En linéarisant l’équation [1] par le logarithme népérien, on a :
M 
Log  d   Log (k )   Log  y    Log 1      Log 1  i  [2]
 P 
Ainsi, la mesure de l’encaisse réelle de long terme à date t est la variable :
Md
)t  Log  M d t  Log  P t ; le revenu réel est représenté par la variable
P
PIB
yt  Log (
)t  Log  PIB t  Log  P t ; la mesure du taux d’inflation anticipé est retenue par :
P
P P 
P P
P
 t   t t 1  et 1   t   1  t t 1  t ;
Pt 1
Pt 1
 Pt 1 
mt  Log (
 Pt 
  Log  Pt   Log  Pt 1  ;
 Pt 1 
Ce qui implique t  Log (1   t )  Log 
Le taux de progression du taux d’intérêt dépend des réalités institutionnelles et est représenté par la
variable rt  Log 1  it  . L’équation [2] peut s’écrire encore :
mt     yt   rt  t
[2]
13
3.1. Spécification du modèle
L’économétrie des anticipations spécifie deux types de modèles dynamiques dits respectivement
d’ajustement partiel et d’adaptation des anticipations (Bourbonnais R., 1993).
(a)
Modèle d’ajustement partiel
Les autorités monétaires ou l’Etat fixent une masse monétaire désirée mt* . L’équation [2] devient :
mt*     yt   rt   t   t
[3]
où   Log (k ) , une constante ;  t est une erreur aléatoire à la période t ;  ,  et  sont les
élasticités de long terme de la demande de monnaie par rapport au revenu réel, au taux d’intérêt et au
taux d’inflation.
L’ajustement partiel permet de corriger de période en période la valeur effective c’est-à-dire observée
de la masse monétaire mt d’une proportion (d = coefficient d’ajustement) de l’écart entre sa valeur
attendue ou programmée dans la période t, mt* et sa valeur observée dans la période précédente (t-1),
mt 1 . Il vient :
mt  mt 1  d  mt*  mt 1 
[4]
En combinant les équations [3] et [4], on obtient :
mt  d   d yt  d  rt  dt  1  d  mt 1  d t [5]
où  d    b0 ;  d   b1;  d    b2 ;  d   b3 ;  d t   ut et 0 1  d
1
L’équation (5) peut s’écrire sous cette forme :
mt  b0  b1 yt  b2rt  b3t  1  d  mt 1  ut [6]
14
où b0 est une constante ; b1; b2 et b3 sont les élasticités de court terme de la demande de monnaie par
rapport respectivement au revenu réel, au taux d’intérêt et au taux d’inflation. L’équation (6) explique
que la demande de monnaie mt dépend de la demande de monnaie de la période antérieure (t-1), du
revenu réel, du taux d’intérêt et du taux d’inflation. Dans un pays en développement comme la Côte
d’Ivoire, membre de l’UEMOA, la masse monétaire est planifiée et son importance est déterminante
pour la croissance économique. Nous attendons que le coefficient de mt 1 soit positif. En effet, si les
conditions économiques sont telles que la demande de monnaie à la date (t-1) s’est accrue en fonction
du revenu réel, il existe de fortes chances qu’elles soient maintenues et que la demande de monnaie
ultérieure évolue dans le même sens. Quant au revenu réel qui dépend essentiellement des revenus
d’exportations, s’impose à la Côte d’Ivoire comme une variable instrumentale non maîtrisable. Ainsi,
l’Etat ne peut qu’anticiper dans ce cas sur les revenus.
(b)
Modèle d’adaptation des anticipations
On part de l’équation [2]. Dans celle-ci, le revenu réel est celui attendu par l’Etat, agent économique
qui corrigera ses anticipations. Soit yt* ce revenu attendu. La correction des anticipations se fait en
proportion de la différence entre les valeurs observées yt et le niveau attendu yt*1 de la période
précédente t-1 de sorte que :
yt*  yt*1  d  yt  yt*1  avec 0
d  1 [7]
L’équation (2) devient à cet effet : mt     yt*1   rt   t   t
[8]
avec  t une variable aléatoire additive.
En combinant [7] et [8] on obtient une demande de la monnaie de la forme :
mt  d   1  d  mt 1   dyt   rt   d  1  rt 1  t    d  1t 1   t   d  1  t 1
L’équation obtenue devient :
mt  a0  1  d  mt 1  a1 yt   rt  a2 rt 1  t  a3t 1  ut
[9]
où a0  d ; a1  d ; a2   d  1  ; a3    d  1 ; ut   t   d  1  t 1
15
d est le coefficient de correction des anticipations ou vitesse d’adaptation ; a0 est une constante ;
 ;  ;  sont des élasticités de long terme alors que a1 ; a2 ; a3; a4 sont des élasticités de court
terme et 0
1 d 1
Les deux modèles [6] et [9] convergent vers la même formulation mais n’ont pas la même
signification économique. Toutefois, on peut combiner les deux modèles pour avoir l’équation [10]
traduisant la demande de monnaie :
mt  0  1mt 1  2 yt  3 yt 1  4 rt  5 rt 1  6t  7t 1  ut
[10]
Nous aurons à estimer les équations [2], [6], [9] et [10]. L’équation [2] représente le modèle 1,
l’équation [6] le modèle 2, l’équation [9] le modèle 3 et l’équation [10] le modèle 4. Les différents
coefficients s’interprètent comme des élasticités par rapport à la demande de monnaie.
3.2. Données et résultats économétriques
Les données couvrent la période 1962-2007. L’analyse des données porte sur les statistiques
descriptives des variables, les tests nécessaires à la validation de l’estimation économétrique. A cet
effet, on effectuera le test de stationnarité, le test de multicolinéarité.
16
a-Statistiques descriptives
Tableau 1 : Statistiques descriptives
Variables
T
Moy
SD
SK
KUR
JB
5,098
(0,007)
1,441
(0,048)
4,229
(0,12)
7,889
(0,019)
mt
46
6,202
1,315
-0,710
2,199
yt
46
3,039
0,479
0,322
2,420
rt
46
0,081
0,031
-0,363
1,704
t
46
0,015
0,013
0,933
2,206
Autocorrélations
Rho1
Rho2
Rho3
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
0,000
Notes : T, MOY, SD, SK, KUR, J B, sont respectivement la taille de l’échantillon, la moyenne, l’écart-type, la
skewness, la Kurtosis, la Statistique de Jarque Bera. Les Rhos représentent les autocorrélations d’ordre 1, 10, 20. Les valeurs
entre parenthèses sont les p-values.
En se référant au tableau 1, les variables ( mt , yt , rt , t ) dont la taille est égale à 46 (T = 46
observations annuelles), ont respectivement leurs moyennes autour de
6, 202 , 3,039, 0,081 et
0,015. Les p-valeurs des coefficients d’auto corrélation sont toutes inférieures à 5 %, signifiant ainsi
que les séries ont une présence de corrélation sérielle. Il sera de même pour l’autocorrélation Rho(  t
).
b-Tests de racine unitaire
Les modèles sont spécifiés suivant les variables stationnaires. Les tests de racine unitaire de DickeyFuller Augmenté (ADF), Dickey-Fuller GLS (ADF-GLS), Phillips- Perron (PP) et KwiatkowskiPhillips-Schmidt-Shin (KPSS) sont effectués sur chaque série statistique pour savoir si cette dernière
est intégrable d’ordre zéro I(0), d’ordre un I(1) ou deux I(2). Les tests sont menés suivant deux
alternatives : l’une en rapport avec les fluctuations autour d’une moyenne constante  u , l’autre avec
des fluctuations stationnaires autour d’une tendance linéaire déterministe avec un trend  t .
Les variables sont stationnaires pour les premières différences au seuil de 1 % et parfois à 5 %. Nous
retenons que les séries en présence sont intégrées d’ordre 1.
17
Tableau n°2 : Résultats de stationnarité
Variables
En différence première
ADF-GLS
PP
ADF
t
u
mt
5.736
yt
6.542a
1.624
5.138a
t
rt
a
t
u
5.784
a
5.396
a
5.824
KPSS
t
u
a
5.429
a
5.784
t
u
a
b
0,080a
0.094a
6.437a
6.646a
6.559a
4.O85b
3.039a
1.599
0.377
0.187
3.735b
3.089b
4.085b
0.458b
0.100a
5.080a
5.167a
5.192a
5.169a
5.118a
0.059a
0.062a
6.559a
Note : a, b, c indiquent le seuil de significativité à 1 %, 5 % et 10 % respectivement. Pour le test KPSS : 0,739 (1
%) ; 0,463 (5 %) et 0,347 (10 %).
c-Corrélation entre les régresseurs
La multicolinéarité est une situation caractérisée par une liaison positive ou non entre deux ou
plusieurs variables explicatives. En cas de multicolinéarité parfaite, il est impossible de déterminer les
coefficients estimateurs des paramètres du modèle et les variances de ces coefficients estimateurs sont
individuellement infinies. En présence de multicolinéarité moins que parfaite, les estimateurs des
paramètres obtenus par la Méthode des Moindres Carrés Ordinaires (MCO) sont certes sans biais mais
leurs variances sont inefficaces. A cet effet, la matrice de corrélation permet de détecter une éventuelle
multicolinéarité entre les régresseurs.
Le coefficient de corrélation simple indique la nature et le degré de liaison linéaire entre deux
variables. Il est déterminé par la formule suivante :
ˆ x , y 
covˆ  x, y 
ˆ xˆ y
ˆ y 
avec ˆ x 
1  n

X t  X t Yt  Y   ;



n  1  t 1

ˆY 
2
1 n
Xt  X  ;


n  1 t 1
2
1 n
Yt  Y 


n  1 t 1
Covˆ( x, y) est la covariance entre les variables X t et Yt ; ˆ x , l’écart-type de la variable X t de
l’échantillon et ˆ y représente l’écart-type de la variable Yt d’un échantillon de taille n. La matrice de
corrélation présente les coefficients de corrélation entre les différentes variables explicatives du
modèle. Lorsque la corrélation linéaire entre une variable exogène et une combinaison linéaire des
autres régresseurs est élevée, on parle de colinéarité. Le test de Klein est fondé sur la comparaison du
2
coefficient de détermination Rmt calculé sur le modèle à k (k = 3 dans notre cas) variables exogènes et
18
les coefficients de corrélation simple rxi , y j entre les variables explicatives pour i  j . Si Rmt
2
2
rx2i , y j ,
il y a présomption de multicolinearité (critère de présomption de multicolinéarité). Dans le cas de ce
travail, nous allons procéder à l’estimation des différents modèles tout en vérifiant leur robutesse.
d- Résultats économétriques
Les résultats des estimations économétriques des modèles 1, 2, 3 et 4 sont consignés dans le tableau 3 :
Tableau 3 : Résultats des estimations économétriques
Régresseurs
Modèle 1
Constante
**
Variable dépendante : mt
Coefficients estimateurs
Modèle 2
Modèle 3
**
1,91
**
2, 021**
4, 080
1, 052**
0, 783
0,585**
0,599
t
mt 1
yt 1
rt 1
t 1
64,556**
29,956**
-
0, 495**
32, 2**
0, 499**
-
-
-
-
-
1, 686
-
-
3,368
0, 449**
0,128
1, 690
2,140
R2
F  Fisher
0,99
1463,68
0,99
1549,76
0,99
1004,82
0,99
847,59
 0, 000 
 0, 000 
 0, 000 
 0, 000 
1,16
1,98
1,99
1,82
yt
rt
D-W
1,855
0,589**
1,857
Modèle 4
0,520*
2, 010
29, 461
Notes : * (**) indique que le paramètre est significatif à 1% (5%). Les probabilités p-values sont entre
parenthèses. DW est la statistique de Durbin-Watson
Les données du tableau 3, indiquent une bonne qualité des estimations économétriques. En effet, tous
les paramètres sont individuellement significatifs au seuil de 5% à l’exception de celui du taux
d’intérêt ( rt ). Les p-values de la statistique de Fisher sont largement inférieures à 5% et enseignent
que les régressions sont globalement significatives au seuil de 5% . Le coefficient de détermination
montre que 99% des variations de la demande de monnaie en économie ivoirienne sont expliquées
par les variations des variables explicatives (exogènes) en prenant en compte les degrés de liberté
associés aux variables exogènes et endogène. Les statistiques de Durbin-Watson des différents
19
modèles sont toutes proches de 2, traduisant ainsi une absence de corrélation sérielle des résidus
d’ordre 1.
Conclusion
Nous avons tenu compte du comportement d’ajustement partiel et d’adaptation des anticipations des
agents économiques pour estimer l’équation de la demande de monnaie. La stabilité de celle-ci permet
à la BCEAO de mieux contrôler l’évolution de la masse monétaire pour maîtriser les prévisions en
matière de production, prix et emploi. Les effets de politique monétaire sur ces différents pôles se font
à travers les mécanismes de transmission que constituent les divers balanciers monnaie-revenu,
monnaie-prix, monnaie-taux d’intérêt.
En effet, toute variation de la demande de monnaie a un impact soit sur le revenu, soit sur le prix ou
l’inflation soit sur le taux d’intérêt. Ceci montre une fois de plus que dans la vision keynésienne la
monnaie joue un rôle déterminant dans le fonctionnement de l’économie où l’équilibre est atteint grâce
à un mécanisme d’ajustement qui dépend de la variable d’ajustement choisie.
La demande de monnaie en Côte d’Ivoire s’appuie en partie sur le modèle keynésien et sur le néolibéralisme Mac Kinnon (1973). En effet, la monnaie est demandée pour ses services mais à la limite
pour elle-même. Son utilité dépend des transactions qu’elle permet grâce à son existence en encaisses.
La thésaurisation qui résulte d’un motif de précaution permanente, des structures financières mentales
également, est cause de chômage, de rigidité de l’offre donc des déséquilibres sur le marché des biens
et services. Ces déséquilibres initiaux engendrent une pression sur les prix. Les anticipations induites
accroissent la pression qui créera une tension sur le marché monétaire. La prise en compte des
relations extérieures améliorera certainement le modèle de la demande de monnaie.
20
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22
REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE B - ECONOMIE / NUMERO 1 - VOLUME 2 - Décembre 2016 / pp. 23-62.
Approches comparatives de la dépendance du Congo à l’égard de la France et de la
Chine
Julien BOKILO
Université Marien NGOUABI (République du Congo)
[email protected]
Tél : (00242) 06 500 03 16 / 05 631 51 74
Résumé
Souvent présentées comme une des facettes du néo-colonialisme, les relations Nord-Sud qui
se caractérisent par la dépendance des pays périphériques à l’égard de l’ancienne puissance
colonisatrice, peuvent être aussi le fait des Etats du Sud eux-mêmes, comme en témoigne
celles du Congo-Brazzaville vis-à-vis de la Chine.
L’intérêt de la présente réflexion est d’analyser l’évolution de la dynamique dépendantiste en
terre africaine, pour déterminer l’hypothèse d’une érosion ou d’une refonte de la théorie de la
dépendance - alors que les pays comme le Brésil, malgré leur dépendance à l’égard de
l’Occident, ont pu mettre en œuvre des stratégies d’accès à l’émergence à partir de
l’affaiblissement de la dépendance Nord-Sud corrélatif à l’ambition à l’émergence de certains
pays africains, tel le Congo-Brazzaville.
Mots-clés : Théorie de la dépendance, érosion du paradigme « Centre-Périphérie », ouverture,
intégration, commerce international, hégémonie, transfert de technologie, Allié traditionnel,
coopération, pays émergents.
23
Introduction
Bien que la présence de la Chine en Afrique était principalement justifiée par des raisons
idéologiques, elle proposait déjà des prêts à taux zéro aux pays africains dans le but inavoué
de les maintenir sous son influence. Toutefois, la tentative chinoise d’imprimer la marque de
sa révolution sur le continent noir n'a pas eu l’effet escompté à cause, probablement, des
barrières culturelles et de la langue. La relance de cette coopération interviendra quelques
années plus tard après l’organisation par Pékin de la Conférence des ambassadeurs chinois en
Afrique en 1995. C’est à partir de cette date que la relation sino-africaine a commencé à
s’intensifier et a pris une nouvelle forme. Cet élan a été renforcé par l’adhésion de la Chine à
l’Organisation mondiale du commerce en 20011. Cet acte a aussi consacré l’ouverture au
monde de ce pays qui est devenu, au début du XXIe siècle, la deuxième puissance
économique du monde, avec un statut d’« atelier du Monde » attirant chaque année
50 milliards de dollars d’investissements étrangers2. En un temps record, la Chine est passée
d’un système économique fondé sur l’autarcie et la planification centrale à un système de
marché.
Ce travail a pour objet de comprendre le fonctionnement du système des mécanismes qui
rendent le Congo dépendant de ses partenaires qui sont les pays industriels.
Cette étude aura pour tâche de montrer que d’un côté la stratégie d’enracinement chinoise au
Congo a beaucoup évolué avec l’arrivée des nouveaux acteurs, qui sont des entreprises
privées chinoises dans le paysage de la coopération sino-congolaise (même si les grandes
sociétés sont pour la plupart à capitaux d’état). Et cette évolution avec la présence des autres
pays émergents comme le Brésil a entre autres contribué à non seulement à renforcer la
dépendance du Congo vis-à-vis de ces pays, le cas de la Chine, mais aussi de limiter
paradoxalement celle du Congo à l’égard de la France. Par ailleurs, elle permettra d’établir les
causes endogènes de celle-ci.
Ainsi, on se demande historiquement, dans quelle circonstance la Chine et la France malgré
l’indépendance du Congo en 1960, réussissent-elles à rendre ce pays dépendant d’elles ?
1
2
LAMY P. (2010), « La Chine membre de l’OMC – tout le monde y gagne », OMC, Allocution du 22 juillet.
BELLO W. (2009), « Pékin est à genoux, mais pas K.O. », Courrier international, n° 961, p. 68.
24
Si le Congo veut sortir de la dépendance tout en se développant, alors l’Etat congolais devrait
d’abord imposer le transfert de technologie dans ces échanges (l’ONU estime que la
redistribution géographique des activités industrielles à l’échelle planétaire dépend de la
généralisation des activités de transfert de technologie3) et ensuite mettre fin à des causes
endogènes qui le condamnent à la dépendance puis pérenniser son ouverture envers les pays
émergents et son intégration sur le marché mondial.
L’orientation théorique pour ce travail veut que cette réflexion soit dans des approches néomarxistes de la dépendance (Gramsci, Cox, Cardoso) et celles qui pratique la politique
économique contraire de celle qu’aurait dû inspirer la théorie de la dépendance. Il s’agit de la
théorie institutionnaliste-libérale des négociations internationales (Keohane et Martin, 1995)
et celle du commerce international notamment de l’avantage comparatif de David Ricardo et
de la théorie du comportement coopératif de Robert Axelrod.
Cependant l’approche historique nous a permis d’aller chercher dans l’histoire entre la Chine,
la France et le Congo, les éléments qui intéressent l’objet de notre étude, dans le but de
trouver les éléments d’explication aux problématiques qui s’imposent suite à la présence
actuelle de la Chine sur le continent.
La méthodologie retenue privilégie les approches empirique et historique ou dynamique, dans
le but d’exploiter plusieurs indicateurs et données disponibles sur notre terrain de recherche.
Cette étude se répartit en deux parties, la dépendance du Congo à l’égard de la France et de la
Chine (1) et l’érosion de la dépendance Nord-Sud grâce l’entrée explosive des pays émergents
dans les pays du Tiers comme la Chine (2).
1. La dépendance du Congo à l’égard de la France et de la Chine
La description et l’analyse de ces dépendances vis-à-vis du Congo permettent de mesurer la
dépendance de Brazzaville envers certains de ses alliés, notamment la France et la Chine,
alors que Brazzaville était autrefois la chasse gardée de la France (Marseille, 1984). Il y a lieu
3
C’est dans cette perspective que l’Assemblée générale des Nations unies avait recommandé en 1974, lors de sa
VIe session extraordinaire, l’adoption du Code international de transfert de technologie et qu’elle a renouvelée à
la VIIe session de septembre 1975.
25
de se demander dans quelle mesure la dépendance envers la Chine limite celle du Congo à
l’égard de la France.
1.1. La dépendance du Congo vis-à-vis de la France : origine et contexte actuel
L’émergence de la dépendance des pays du Tiers monde se confond avec l’apparition de la
politique d’expansion coloniale appelée impérialisme. Cette politique apparait en France au
XIXe siècle. Elle tire son origine à partir de l’idée de supériorité raciale et idéologique de
l’occident qui avait pour objectif de préserver l’ordre social dans les pays les plus
industrialisés, en garantissant le commerce, l’exportation des capitaux et l’accès aux marchés
(Zorgbibe, 1996 ; Marseille, 1984).
La France est l’ex-pays colonisateur du Congo. Dans un accord de coopération, il y a des
agents spécialisés, tout est issu de la colonisation française. Le français est la langue de travail
au Congo. La France est tellement impliquée dans ce continent qu’aucun État de sa zone
d’influence, même pour les raisons idéologiques, ne peut la remplacer totalement. En guise
d’illustration, Sékou Touré avait rompu ses relations avec la France, mais l’enseignement en
Guinée continuait d’être dispensé en français, il fallait donc bien que tôt ou tard ce dernier
puisse traiter avec son homologue français.
Comme ancien pays colonisateur, la France est impliquée dans le système financier congolais.
Elle est membre de la zone franc. Le franc CFA fait partie de l’instrument monétaire de la
zone franc. Les accords que la France a passés avec le Congo sont autrement plus importants
dans la mesure où structurellement toute modification de la parité entre FCFA et franc
français (l’euro) a automatiquement une influence sur l’économie congolaise. Les transferts
de fonds, d’État à État, s’opèrent à travers le Trésor public français puisque le Congo est
membre de la zone franc.
La France est l’un des membres fondateurs de la Communauté européenne, et l’Union
européenne à des relations particulières avec les ACP dont fait partie le Congo. De fait, les
deux pays ont des relations économiques particulières aussi bien dans le cadre de l’ACP-UE
que dans le cadre des relations bilatérales.
26
Les ACP ont des avantages commerciaux par rapport aux États membres de la Communauté
européenne. Il y a des obstacles qui peuvent être d’ordre douanier, d’ordre tarifaire, qui
peuvent être d’ordre administratif, dans le cadre du commerce mondial. Ces obstacles ont été
réduits et ont pris une tournure particulière, dans la mesure où les pays européens et le bloc
des pays africains ACP ont des relations particulières entre eux.
Les autres États tels que les USA, la Russie et les pays émergents le cas de la Chine n’ont pas
d’avantages particuliers au Congo comme la France. Ce qui renforce la dépendance de
Brazzaville. Mais, ils peuvent avoir des relations d’État à État sans relation particulière.
Nous avons par exemple relevé que sur le plan diplomatique et non plus monétaire, lorsque
nous posons par exemple la question de savoir comment les ambassades du Congo et de la
France accompagnent la diversification de la relation franco-congolaise ?
Nous nous rendons compte qu’il y a beaucoup de questions consulaires entre les deux pays
qui nécessitent donc un consulat important. De fait, ce consulat n’a pas les mêmes dimensions
que celui qui se trouve aux USA, alors que les États-Unis sont bien plus grands que la France.
Mais, comme le Congo n’a pas beaucoup de ressortissants aux USA, l’Ambassade ne peut pas
avoir un conseiller spécial pour gérer ce consulat.
Pour ce qui est de la formation administrative, les Congolais sont formés en majorité selon le
système français. Même quand certains cadres sont formés en Chine dans le domaine
financier par exemple, cette formation ne peut remettre en question le système de base
financier congolais qui s’inspire du système ou du modèle français.
Même si le Congo a son histoire, sa géographie, le partenaire privilégié pour les questions
académiques et de formation reste la France. C’est un pan entier de la coopération que le
Congo ne peut solder au profit de la Chine, quand bien même cette dernière s’y implanterait et
y investirait massivement.
En revanche, il y a des choses que le Congo peut traiter avec des Chinois en toute
indépendance. Si les Congolais veulent construire un chemin de fer, ils peuvent faire appel
aux Chinois. Les ingénieurs qui ont été formés en France traiteront les questions selon les
normes de l’union des chemins de fer structurée sur le modèle français.
27
En dépit, de la relation particulière entre la France et le Congo, Brazzaville bénéficie
pleinement de sa souveraineté. Ce qui explique que le Congo a été l’un des premiers pays,
sinon le premier État, après l’indépendance, à refuser une base militaire de l’armée française
sur son territoire. Ainsi, bien que cette présence ait pu profiter au Congo, car les Français
participaient à l’économie, autrement il n’était pas important pour les Congolais qu’ils restent
au Congo. Pour les Congolais, la France aurait gêné dans une certaine mesure Brazzaville
dans sa stratégie d’indépendance, parce que les Congolais voulaient aller vers l’indépendance
totale. Sauf sur les questions monétaires auxquelles ils n’étaient pas préparés. Par exemple,
les étapes de la dépense, le fonctionnement du Trésor sont de tradition française, c’est un état
de procédure conformément au dispositif qui est là depuis la colonisation.
Il y a donc des pans entiers de la coopération pour lesquels la France sera encore longtemps le
partenaire privilégié du Congo. Toutefois, il y a une grande différence entre la France et la
Chine, puisque les accords entre le Congo et la Chine ne peuvent concerner que deux États
indépendants, n’ayant pas de relation particulière.
Ainsi, on peut penser que la présence de la Chine ne peut pas changer la relation particulière
de la France avec les pays africains, le cas du Congo. Mais, la dépendance du Congo vis-à-vis
de Pékin peut contribuer à la limitation de celle de Brazzaville face à Paris.
1.2. La dépendance du Congo à l’égard de la Chine
Le Congo dans ses relations avec la Chine a réussi à signer un partenariat stratégique, lequel a
permis la signature d’un accord sur la promotion et la protection des investissements. Alors
qu’en réalité, les intérêts à protéger pour ce cas, sont en grande partie ceux des chinois parce
que les Congolais n’ont pas investi en Chine tandis que les Chinois continuent d’investir dans
ce pays, d’où il convient de reconnaitre que nous sommes dans la logique d’un partenariat
asymétrique et non gagnant-gagnant. Ainsi, on peut penser que cette coopération permet plus
de renforcer la dépendance du Congo envers la Chine.
Dans ce contexte, la logique de la coopération qui veut que chaque Etat a un comportement
qui obéi à la logique de sa puissance et pour son propre intérêt s’impose (Battistellas,
Petiteville et Smouts, 2014). De telle sorte que l’Etat devient un instrument voué à servir les
intérêts de la classe dirigeante chinoise et des acteurs privés sur le pays d’accueil (Max,
28
Engels et Lénine) et cette situation entraine la relation de dépendance du pays d’accueil vis-àvis de la Chine (Cardoso, 1960 ; Gunder, Arghiri et Amin, 1966).
De plus, ce partenariat a été signé dans un contexte où l’économie congolaise demeure
dépendante du secteur pétrolier et des importations de produits manufacturés. Il intervient
dans une période où l’économie réelle congolaise est peu diversifiée et la main-d’œuvre
congolaise peu qualifiée.
En effet, les tailles économique et technique de la Chine sont considérées comme un facteur
majeur du degré d’asymétrie entre le Congo et la Chine. Cette situation de déséquilibre, place
le Congo dans une position de dépendance à l’égard de la Chine (Gunder, Cox) malgré son
potentiel en termes des matières premières. Ainsi, à chaque fois que ces deux partenaires sont
en négociation, la Chine est en position de force, car elle a le pouvoir d’imposer ses vues sans
contrepartie réelle.
En regardant l’envergure territoriale dont dispose la République populaire de Chine, il est
clair que l’Empire du milieu fait plus de dix fois le Congo. Ceci peut donc être considéré
potentiellement comme un motif d’une grande influence. Mas la taille que nous évoquons ici,
est d’ordre économique ou technique.
La dépendance du Congo vis-à-vis de la Chine prend plusieurs formes :
1.2.1. La dépendance technologique
La dépendance technologique constitue depuis toujours un sujet de préoccupation pour la
majorité des pays en voie de développement. C’est un sujet de discorde entre pays
industrialisés et pays sous-développés, car la moyenne de transfert international de
technologie vers ces pays est très faible, tandis que des flux internationaux de technologie se
réalisent sans obstacles entre pays riches, citons par exemple le cas de la France et la Chine.
Il apparaît de façon claire que la notion de transfert de technologie ne s’inscrit pas comme
modalité particulière de la relation sino-congolaise. Malgré le nouveau partenariat, le Congo
reste toujours dépendante de l’Empire du milieu dans le domaine par exemple des
infrastructures de base.
29
Les analyses de la dépendance entre la Chine et le Congo se fondent sur la reconnaissance des
effets asymétriques du mode opératoire de la Chine. Ces derniers perpétuent le caractère
inégal de cette coopération. Lorsque nous analysons les caractéristiques de la dépendance par
rapport à la théorie classique de Ricardo, nous remarquons que les conclusions s’opposent.
Quand Ricardo parle des bienfaits de l’échange pour deux pays qui se commercialisent, les
résultats de l’analyse de la dépendance technologique veulent que les relations internationales
soient inégales, avec des effets asymétriques occasionnés par le dominant.
L’État congolais doit énormément donner, pour que ce processus d’apprentissage vers
l’innovation puisse aboutir à un développement (économique et industriel) durable. Ce n’est
qu’à ce prix que le Congo pourra tirer au maximum bénéfice de la stratégie d’enracinement
chinoise. A ce propos, Claude Rochet écrit : « L’État ne peut se contenter de recommander et
d’ordonner. Il est aussi lui-même acteur et, par sa position, doit contribuer fortement à
l’engagement collectif vers un développement durable »4.
Le passage du transfert de technologie à celle de sa maîtrise apparaît comme une condition
nécessaire pour accéder au processus de développement. L’investissement immatériel
représente une part moins significative de l’investissement chinois au Congo par rapport à la
part des prêts financiers, alors que l’innovation et le progrès technique occupent une place
décisive dans la croissance et le processus de développement d’un pays, comme l’a souligné
Schumpeter (1934) repris par Carré Dubois et Malinvaud dans leurs travaux sur la croissance
pendant
la
période
des
Trente
glorieuses
en
France.
Pour
ces
deux
économistes « L’innovation est à l’origine des cycles longs de croissance et elle est liée au
montant des investissements consentis par l’économie »5.
On peut donc penser que le Congo ne peut pas se développer sans le transfert de technologie,
sans l’innovation. Or, nous pouvons affirmer que le transfert de technologie dans la stratégie
chinoise au Congo est presque nul. Car depuis l’établissement des relations diplomatiques
entre ces deux pays en 1964, ils n’ont jamais eu de véritable programme d’ensemble de
transfert dans le secteur industriel, sauf quelques ouvriers avec passage clé en main des trois
sociétés mentionnées ci-dessus (comme NKinsoundi).
4
ROCHET C. (2007), L’innovation, une affaire d’État, gagnants et perdants de la 3e révolution industrielle,
Paris, L’Harmattan.
5
« Abrégé de croissance française », 1972, Carré-Dubois-Malinvaud.
30
Le seul secteur qui ait bénéficié d’un transfert de technologie est le secteur de la médecine, à
travers des échanges de coopération avec les hôpitaux de Makélékélé, Talangaï et Loandjili
(Bokilo, 2012).
Ainsi, à travers cette étude, nous allons démontrer comment la Chine réussit à maintenir le
Congo dans la dépendance, alors que l’échange entre ces deux partenaires peut être démontré
« gagnant-gagnant » grâce à la théorie des jeux.
1.2.2. Le « gagnant-gagnant » pérennise la dépendance du Congo à l’égard de la Chine
La coopération sino-congolaise est asymétrique et donne un avantage à la Chine sur le Congo.
Mais, malgré cet aspect inégal, cette coopération est à somme non nulle.
Cette analyse démontre, à présent, comment la coopération entre ces deux pays a évolué vers
la négociation qui constitue un jeu à somme non nulle (stratégie dite « gagnant-gagnant ») à
travers les accords économiques et diplomatiques et leur application, négociation qui apporte
un surplus de considération à la Chine (Hirschman, 1945), alors que le gouvernement chinois
a toujours réaffirmé son attachement au principe « gagnant-gagnant » (Axelrod, 1984).
Pour soutenir son économie, la Chine a besoin de diversifier ses débouchés pour acquérir les
matières premières, du bois et de l’énergie fossile. Nous estimons présentement que la
dépendance énergétique est devenue une préoccupation majeure pour Pékin. C’est ainsi que le
Congo délaissée par les occidentaux, est un marché idéal pour que la Chine achète et vende.
Elle devient le deuxième importateur de pétrole africain, après les États-Unis.
L’approvisionnement en pétrole de l’Afrique vers la Chine représente 25 %, contre 15 % au
milieu de la décennie 1980. Elle est le premier producteur mondial de blé (91 millions de
tonnes en 2004) devant la Russie, les USA et la France. Elle est aussi le premier producteur de
riz (176 millions de tonnes) devant l’Inde et l’Indonésie6, ces deux denrées étant beaucoup
consommées en Afrique. La Chine est le troisième partenaire commercial des Africains, après
les Etats-Unis et l’Europe.
6
LAFARGUE F. (2005), « La Chine, une puissance africaine », Perspectives chinoises, n° 90.
31
La théorie des jeux nous aidera à démontrer dans quelle situation les choix de ces deux pays
en termes de du « donnant-donnant » (Axelrod, 1994) ont des conséquences pour l’un comme
pour l’autre. En d’autres termes, elle nous permettra d’étudier les comportements stratégiques
de la Chine et du Congo dans les situations de recherche de gains.
Dans ce jeu coopératif, le Congo et la Chine signent entre eux des accords contraignants qui
peuvent être sous forme de contrat dans lequel il s’agira d’achat de pétrole contre la
construction par exemple d’un édifice public « donnant-donnant » (Axelrod). Ce concept de
« matières premières contre services » renvoie à un jeu à somme non nulle. Lorsque la Chine
gagne en surplus, après la transformation des matières premières venant de Brazzaville,
conséquence, cet échange profite également au développement du Congo dans le domaine par
exemple des infrastructures.
En revanche, ce qui est gênant dans cet échange c’est que lorsque la Chine construit les usines
et les infrastructures, elle ne propose jamais le service après-vente. La durée de vie de ces
usines est très courte. Cette situation démontre qu’il y a un déséquilibre dans le jeu. Car à
cause du choix de la Chine de ne pas transmettre la technologie dans l’échange, ce que le
Congo gagne est incomplet. On remarque que sur ce point, la Chine ne souhaite pas modifier
son comportement, car depuis 1964 date de l’établissement des relations entre les deux pays,
elle n’a jamais transmis sa technologie au Congo.
On voit
ici à quel point l’expérimentation de la théorie des jeux sur la coopération
économique entre République populaire de Chine et République du Congo nous a permis de
comprendre que l’interaction stratégique entre ces deux pays peut se formuler sous forme
d’un jeu. Elle révèle également comment la Chine a maintenu le Congo dans une situation de
dépendance dans un jeu à somme non nulle. Ainsi, que peut-on dire de la puissance
structurelle de la Chine dans le jeu de la dépendance ?
1.2.3. Le Forum Chine-Afrique et le droit de veto comme instrument de négociation
favorisant la dépendance du Tiers monde à l’égard de la Chine
Le Congo comme d’autres pays en développement est aussi dépendant structurellement de la
Chine à travers le sommet Chine-Afrique. Cette puissance structurelle, c’est le pouvoir qu’a la
32
Chine de façonner et de déterminer les structures de l’économie politique globale au sein
desquelles les Etats africains, les institutions politiques, les entreprises, les scientifiques et les
experts de l’Afrique et de la Chine doivent opérer. La Chine bénéficie de cette puissance
structurelle pour rendre dépendant ses partenaires Africains (Strange, 1986).
Une petite rétrospective des rendez-vous traditionnels entre les Etats du Nord et du Sud, ces
sommets traditionnels entre la France, l’Union européenne, le Japon et l’Afrique donne à
comprendre que la Chine préparait en parallèle depuis longtemps un plan sur le même
modèle. La Chine était persuadée qu’à la longue elle devait avoir besoin d’un soutien
politique sur le plan international ainsi que des matières premières pour entretenir sa
puissance.
En effet, elle a d’abord créé les conditions, avant le déploiement de sa stratégie consistant à
pérenniser sa présence dans tous les secteurs de l’économie de la plupart des pays africains et
à mettre en place un cercle de réflexion en vue de favoriser un partenariat de type nouveau
axé sur le commerce. Dans ces conditions, elle avait à gagner en approfondissant ses relations
avec les pays africains.
Pour raffermir et pérenniser ses relations avec le continent africain, l’empire du Milieu a mis
en place des forums sur la coopération, qui sont autant des plates-formes pour les
consultations et dialogues collectifs entre la Chine et les pays africains, en vue d’établir un
nouveau partenariat stratégique dynamique. Ces sommets, regroupant des chefs d’Etat et des
entrepreneurs chinois et africains. Ils ont lieu tous les trois ans, alternativement en Chine et en
terre africaine. Le premier sommet Chine-Afrique s’est tenu à Beijing en 2000, il rassemblait
49 pays africains sur les 54 recensés. À l’issue de ce forum, Pékin a annulé et réduit la dette
de 32 pays africains pour un montant de 1,2 milliards de dollars (soit 840.000.000 euros). De
2000 à 2003, la Chine a pu installer plus de 600 entreprises en Afrique, et le commerce a
augmenté de 50 % au cours de cette période.
La régularité des tenues des sommets entre les pays africains et la Chine atteste de la volonté
de Pékin de se positionner sur le continent et de devenir l’interlocuteur incontournable des
dirigeants africains. Ainsi, pour renforcer et pérenniser cette coopération, Pékin a créé un
poste de représentant spécial pour les affaires africaines à l’occasion des sommets.
33
Cependant, le grand inconvénient du déroulement de ces forums demeure la procédure que
proposent les Chinois aux Africains. A chaque fois qu’il y a des sommets, ce sont les Chinois
qui proposent l’ordre du jour des discussions et ils sont aussi les seuls à écrire les résultats
finaux, c’est de la puissance structurelle (Strange, 1987). Cette stratégie ne permet pas aux
Africains d’y inscrire leurs préoccupations. Ils sont presque réduits à participer à une réunion
où tout leur imposer. Cela fausse clairement le principe du « gagnant-gagnant » dans un
rendez-vous censé être du donner et du recevoir (Kernen, 2007).
Ensuite, la Chine joue sur le niveau d’incertitude de ses partenaires et de sa position
stratégique à l’ONU dans les négociations, comme dans le cas du Soudan qui est sur la sellette
de l’opinion internationale. Ainsi, elle coopère avec les Africains dans une position de
supériorité. Elle promet le plus souvent aux pays africains, comme le Congo, son soutien et sa
solidarité – en tant que pays du Sud – dans les questions internationales. C’est ainsi qu’on
peut remarquer que les implications de la stratégie d’enracinement chinois créent un décalage
qui révèle une asymétrie dans le pouvoir de négociation des contrats et le niveau de
dépendance du Congo vis-à-vis de la Chine.
Ces indicateurs suffisent pour qualifier la coopération sino-congolaise d’asymétrique. Pour
que cet échange soit «gagnant- gagnant », l’alliance entre ces deux pays devrait se dérouler
sur des bases égalitaires. Les Africains, dont les Congolais, devraient se protéger et mettre en
valeur leurs atouts en matières premières, car le pouvoir de négociation dépend étroitement de
l’importance stratégique que l’on accorde à ces ressources, à la table de négociation. Eu égard
aux faits analysés, que peut-on dire de la dynamique de la dépendance du Congo vis-à-vis de
ses Alliés historiques ?
1.3. Constances ou ruptures sur les dépendances du Congo à l’égard de la Chine et de la
France
La réflexion sur la confrontation des dépendances du Congo vis-à-vis de la France et de la
Chine nous amène à analyser ce qui se joue dans la dépendance de ce pays en développement
vis-à-vis de ces deux grandes puissances à savoir quelles sont les constances et ruptures dans
cet échange multi-bilatéral.
34
1.3.1. Constances
Les coopérations de la France et de la Chine à l’égard du Congo ne varient pas simplement
parce que ce qui prime dans les relations internationales sont les intérêts. Donc, chaque Etat
travaille pour son propre intérêt. L’intérêt est considéré comme unique justificatif à l’action
internationale et sert de ligne de conduite dans les rapports mutuels des Etats (Morgenthau,
1985). De fait, l’intérêt a une valeur utilitaire de telle sorte qu’aucune référence à un droit
naturel qui ne puisse s’imposer aux Etats. C’est ainsi que Jean-Jacques Roche écrit : « Cette
référence constante aux utilitaristes nie donc l’existence de valeurs supérieures à l’intérêt des
Etats »7.
La constance dans la dépendance du Congo à l’égard de la France se caractérise par plusieurs
dépendances. Celle économique qui permet à la France de garder ses anciennes colonies dans
son giron, de pérenniser une zone franc qui forme un sous-ensemble géopolitique qui touche à
la souveraineté des Etats d’Afrique noire unis autour de la mère patrie. Cette coopération
monétaire permet à Paris de contrôler l’émission de monnaie dans les pays de la zone et qui
les rendent dépendant de la France (Agbohou, 2008 ; Bourmaud, 1997).
La dépendance industrielle se manifeste dans le secteur pétrolier avec Total qui est le premier
investisseur étranger au Congo. Face une économie moins diversifier, l’or noir représente plus
de 70% du budget de Brazzaville, ce qui rend ce pays de la périphérie de plus en plus
dépendant de ce groupe français ; celle culturelle avec l’utilisation de la langue française.
C’est dans cette perspective que Bourmaud écrit : « La francophonie constitue certes la pierre
d’angle de l’influence française8 ». La dépendance militaire avec des accords de défense.
C’est ainsi que Bourmaud dit : « Ces accords vont de la simple assistance technique aux
accords de défense proprement dits aux termes desquels la France est conduite à s’immiscer
dans les affaires des Etats dès lors que ceux-ci en font la demande. On ne peut non plus passer
sous silence les accords secrets, jamais publiés au Journal Officiel de la République, mais
liant la France à un certain nombre d’Etats africains et permettant à ces derniers de faire appel
à la France en cas de troubles internes relevant normalement de la seule souveraineté de l’Etat
concerné.
7
8
ROCHE J. J. (2010), Théories des relations internationales, Paris, Montchrestien.
BOURMAUD D. (1997), La politique en Afrique, Paris, Montchrestien.
35
A cela s’ajoutent des interventions plus ponctuelles destinées à protéger les ressortissants
étrangers selon l’appellation officielle menacés par des troubles internes. Au total, la France
maintient quelque 10 000 hommes en Afrique, basés à Djibouti, au Sénégal, la Centrafrique,
le Gabon ou la Côte d’Ivoire, lui permettant d’assurer le rôle de gendarme… »9. Cependant, la
dépendance du Congo à l’égard de la Chine est très marginale. On la rencontre faiblement
dans le domaine économique et technique. Le sommet Chine-Afrique est l’instrument
permettant à mettre sur pied cette dépendance qui devient structurelle.
Au total, la dépendance du Congo à l’égard de la France est plus significative que celle avec
la Chine. Mais, après la confrontation de ces dépendances, il ressort que la petite part de
dépendance du Congo envers la Chine entraine des tensions entre l’Allié traditionnel et la
Chine.
1.3.2. Ruptures
La rupture dans la coopération sino-congolaise se fait voir grâce à la valeur utilitaire où
désormais l’économie prime avant tout, la dépendance du Congo envers la Chine cesse d’être
idéologique et devient économique comme celle du Congo à l’égard de la France.
Cette rupture touche même le symbole de la dépendance des pays de la zone CEMAC à
l’égard de la France avec le lancement du processus de convertibilité Yuan/Franc-CFA. Ce
projet est une initiative qui amorce une réflexion nouvelle sur la limitation de la dépendance
monétaire des pays de cette zone qui souhaitent au fond éviter leur passage par la place de
Paris pour diminuer le seigneuriage de Paris. Pour soutenir ce projet, la Chine vient de créer
une banque sino-congolaise pour l’Afrique et pour le développement qui a son siège social à
Brazzaville.
Désormais, cette question de dépendance permet de montrer que, d’un côté, la stratégie
d’enracinement chinoise au Congo a beaucoup évolué avec l’arrivée des nouveaux acteurs,
qui sont des entreprises privées chinoises dans le paysage de la coopération sino-congolaise,
même si les grandes sociétés sont pour la plupart à capitaux d’Etat (Julien Bokilo, 2012) et
9
Daniel Bourmaud, op. cit., p.106.
36
l’instauration d’un modèle de financement économique avec les pays de la CEMAC à travers
le projet de la convertibilité, à côté du modèle commercial traditionnel français, de l’autre.
La particularité aujourd’hui sur la question de la dépendance est que la France devrait
désormais faire face à l’entrée explosive des pays émergents dans le marché congolais, d’une
part, et être comprise comme une logique, d’autre part :
Dynamique, car, on est passé de la personnalisation des rapports (il s’agit, ici, de la nature
spécifique des liens qui se tissent entre dirigeants français et africains) à la conditionnalité;
historique, en s’appuyant sur le fait que la France en tant qu’ancien colonisateur reste l’Etat
occidental le plus présent en Afrique. Et, toute cette dépendance est relayée par l’Etat français
(Henrique et Enzo, 1969) et les firmes multinationales françaises, comme Total et Areva.
La stratégie de l’enracinement chinois permet de limiter la dépendance du Congo à l’égard de
la France. Après l’accession du Congo à la nouvelle République, le Président Denis Sassou
Nguesso a effectué son premier voyage en Chine. Celui-ci était marqué par des questions
économiques.
La République Populaire de Chine est passée de l’Etat-Providence, qui était basé sur sa
politique d’assistance et d’octroie des biens et services (dons et prêts à des taux préférentiels),
à l’Etat compétitif. Cela justifie également le fait que la Chine, aujourd’hui, se présente
comme une alternative à la Banque mondiale et au FMI, grâce à de nouvelles méthodes, tant
sur l’investissement porté par les sociétés privées chinoises (des prêts octroyés par ses
banques et projet de création d’une banque d’investissement conjointe entre le Congo et la
Chine) que sur les emprunts financiers directs à l’Etat congolais à faible taux.
Ainsi, la stratégie d’hégémonie chinoise (qui s’appuierait sur le nouveau partenariat «
gagnant-gagnant ») a permis au Congo d’obtenir les capitaux nécessaires – à partir des
échanges commerciaux, de l’Aide publique au développement (APD) et de l’IDE chinois –
pour améliorer les secteurs de base, ce que la France ne fait plus.
1.4. Les causes endogènes de la dépendance du Congo envers ses alliés
Eu égard à ce qui vient d’être présenté, on peut penser que la contribution de la coopération
au développement et à la modernisation du Congo passerait par le développement des
37
mécanismes de contrôle et de suivi pouvant aider à mettre fin à la corruption qui est l’un des
facteurs qui condamne Brazzaville à la dépendance.
De ce fait, l’émergence des pays tels que le Brésil, l’Inde et l’Afrique du Sud s’est opérée
grâce entre autres au libéralisme et à la lutte contre la corruption qui ont contribué à la refonte
du paradigme de la dépendance.
2. L’érosion du paradigme « Centre-Périphérie » occasionnée par l’ouverture et l’intégration
des pays émergents dans le commerce international
L’analyse sous le prisme de la théorie d’« avantage comparatif » de Ricardo, laquelle voudrait
que chaque pays tire parti du commerce de ses biens et services, permet de démontrer que la
Chine et le Congo dans leur échange sont tous deux gagnants, quand bien même si cet
échange est beaucoup plus favorable à la Chine qu’au Congo. Mais, cet échange gagnantgagnant affaibli la dépendance du Congo à l’égard des Alliés traditionnels.
Par ailleurs, la coopération multilatérale avec la présence des Organisations internationales
comme l’OMC qui est un espace d’échange et avec l’existence des altermondialistes
contribue à l’érosion de la dépendance Nord-Sud. On peut remarquer à travers cette nouvelle
situation, que grâce l’approche libérale les pays comme le Brésil ont pu s’émanciper.
Qu’en est-il de l’avantage comparatif par rapport à la coopération sino-congolaise ?
David Ricardo explique que, dans la situation d’un échange inégal où un des deux pays qui
coopèrent a un avantage absolu, et bien les deux pays peuvent malgré tout commercer à partir
de l’avantage comparatif.
En analysant les échanges entre le Congo et la Chine à partir de la grille de lecture de la
théorie d’Adam Smith, nous remarquons que la Chine et le Congo produisent tous deux du
pétrole et du bois. Néanmoins, quand on regarde l’activité industrielle de ces deux pays, on
constate que la productivité de la Chine est supérieure à celle du Congo, même si elle est
obligée d’importer pour couvrir ses besoins.
38
En effet, la Chine a par exemple produit, pendant l’année 2009, 189 millions de tonnes de
pétrole. Sa production de placage (bois) a atteint 4.4 millions de m3 et 750 000 m² de
contreplaqués en 2005. En même temps, le Congo n’a produit que 13 millions de tonnes de
pétrole en 2009 (contre 189) et 671,8 millions de m3 de bois.
L’ensemble des chiffres de placage et de contreplaqués de la Chine est, donc, supérieur à
toute la production du bois de Congo. Dans la même logique, nous pouvons également citer le
cas des produits manufacturés chinois. Aujourd’hui, au Congo, les produits chinois sont
mieux appréciés que ce dont les producteurs nationaux congolais mettent sur le marché. Dans
la période de 2002 à 2007, le Congo a exporté vers la Chine des produits manufacturés qui
représentent en volume 5,51 (soit 0,020 %) et en valeur 6 (soit 0,169), tandis que le Congo
reçoit de la Chine en volume 952,38 (soit 33,704 %) et en valeur 181.
Cette comparaison montre encore la nette supériorité de la Chine dans cet échange. Cela
pousse à penser que la stratégie d’enracinement chinois n’avantage pas le Congo, puisque les
chiffres avancés montrent que la Chine possède un avantage absolu (un avantage productif,
prix plus bas, du fait de dotations initiales en ressources naturelles favorables ou d’une avance
technologique) par rapport au Congo. Aussi, en se spécialisant dans les secteurs cités, comme
le veut la théorie, la Chine aura un gain d’efficacité. Ainsi, d’après la théorie de l’avantage
absolu d’Adam Smith, les deux pays n’ont pas intérêt à commercer.
Toutefois, Ricardo explique que, dans cette situation, les deux pays peuvent malgré tout
commercer à partir de l’avantage comparatif. Il a démontré au début du 19ème siècle que
même si un pays est plus désavantagé qu’un autre, il devrait se spécialiser dans la production
où il est moins bien placé. C’est la théorie de l’avantage comparatif. Elle présente
l’inconvénient d’exclure de l’échange international les pays qui ne disposent d’aucun
avantage absolu. Elle démontre que le libre-échange permet à tous les pays d’en tirer des
bénéfices. C’est ainsi que Ricardo affirme dans Des principes de l’économie politique et de
l’impôt que :
« Le commerce extérieur est très profitable à un pays, puisqu’il accroît la
quantité et la variété des biens dans lesquels le revenu peut être dépensé, et
39
puisque l’abondance des marchandises et leur bas prix stimulent la
réalisation d’économies et l’accumulation du capital »10.
Ainsi, l’ouverture et l’intégration des pays émergents sur le marché mondial a
contribué à la limitation du clivage Nord-Sud.
2.1. Affaiblissement de la dépendance Nord-Sud dû à la présence des pays Emergents
La nouvelle architecture mondiale qui eut pour conséquence l’irruption des pays émergents
sur marché mondial et elle a progressivement laminé la domination occidentale en Afrique, le
cas du Congo.
L’affaiblissement de la dépendance du Nord-Sud à partir du déficit de la balance commerciale
des pays comme la France au Congo dû à l’impact de la conquête des marchés africains par
les pays émergents comme la chine dans les pays du continent, notamment dans les Etats,
comme le Congo, qui autrefois étaient la chasse gardée de la France. Ainsi, la confrontation
en termes d’échanges commerciaux entre la France et la Chine avec le Congo se présente de
la manière suivante :
Le Tableau n°1 ci-dessous sur les «Principaux échanges commerciaux du Congo entre 2002 et
2007» permet de voir que l’Union européenne et l’Asie représentent les principaux
partenaires du Congo sur ladite période, en termes de volumes et de valeur commerciale des
échanges. Les échanges commerciaux du Congo avec ces deux zones représentent sur
l’ensemble des échanges avec le reste du monde 78,18 %, soit (68 303 402 tonnes). En termes
de valeur commerciale, c’est 71,60 % (soit 10 976 milliards de FCFA).
En observant ce même tableau, nous remarquons que dès les années 2002 à 2007, la Chine a
occupé le premier rang des cinq partenaires principaux du Congo, en volume (tonnes) et en
valeur d’échange (milliards de FCFA), alors que la France n’y figure plus. Elle est, en effet,
derrière Taïwan, les USA, la Corée du Sud et la Corée du Nord.
10
DAVID R. (1992), Des principes de l’économie politique et de l’impôt, Paris, Flammarion.
40
Tableau n°1: Rangs occupés par la Chine en volumes (tonnes) et en valeur d’échange
(milliards de FCFA) exportés au Congo de 2002 à 2007.
PAYS CONCERNES
VOLUMES ECHANGES
(en tonnes)
VALEUR EN MILLIARDS DE
FCFA
CHINE
27 243 140,42
3 803
TAIWAN
17 043 209,86
2 351
USA
7 499 669,32
1 100
COREE DU SUD
5 935 684,94
855
COREE DU NORD
3 912 114,91
507
France
2 360 532,96
343
ISLANDE
1 912 492,09
298
PAYS BAS
1 838 084,73
280
BRESIL
1 669 894,32
263
CAMEROUN
1 197 766,11
238
Source : Données statistiques de la Douane du Congo.
De plus, deux choses viennent raviver l’inquiétude des Occidentaux. Il s’agit du rôle que veut
mener la Chine sur la scène internationale et le peu de transparence dans les affaires militaires
chinoises qui augmente l’incompréhension et les incertitudes de l’Administration américaine.
Il est vrai que l’influence française est en constant recul en Afrique, au profit semble-t-il d’un
duopole USA-Chine. Cependant, il est à noter que les cartes ne sont pas encore jouées car tout
dépendra de la manière dont la France redéfinira son partenariat avec l’Afrique.
Comme pays leaders de ces deux zones, nous pouvons citer la France pour l’Europe et la
Chine pour l’Asie. Ces deux Etats constituent des premiers partenaires du Congo de ces deux
zones respectives. Ils représentent en moyenne sur la période de 2002-2007, respectivement
45,98 % et 48,29 % de la valeur commerciale des échanges entre le Congo et ces deux zones.
Pour les mêmes périodes, ces deux pays représentent à eux seuls plus de 34,15 % de
l’ensemble des échanges du Congo en termes de valeur commerciale, soit plus de 5 235
milliards de FCFA. En termes des échanges entre le Congo et ses dix premiers partenaires
commerciaux sur la période de 2002-2007 en millions de FCFA, on remarque que la Chine est
en première position avec 3 950 993 contre 1 284 742 pour la France qui occupe le quatrième
rang en termes de valeur.
Le Tableau n 2 montre, maintenant, quels types de produits font l’objet de cette masse
d’échanges du Congo vers la France :
41
Tableau n°2: Exportations des différents groupes des produits vers la France (en pourcentage)
de 2002-2007.
Produits
Produits alimentaires et animaux vivants
Matières brutes non comestibles carburants
Non compris
Combustibles minéraux, lubrifiants et
Produits connexes
Articles manufacturés classés d’après la
matière première
Machines et matériels de transport
Articles manufacturés divers
Articles et transaction non classés par
Catégories
Total
Volume
%
29,25
169,45
Valeur
%
10
29
Volume
%
1,2389
71784
Valeur
%
2,9958
84339
2 158,95
294
914603
857362
0,75
1
00316
02698
1,79
0,18
0,16
6
2
1
00759
00077
00067
16144
06982
02407
2 360,53
343
100 %
100 %
Source : Julien Bokilo Lossayi, La Chine au Congo-Brazzaville : Stratégie de l'enracinement
et conséquences sur le développement en Afrique, Paris, L'Harmattan, 2012 p.
Le Tableau n° 2 permet de réaliser que les principaux produits exportés vers la France sont :
les huiles brutes de pétrole (1 927 millions de tonnes), le propane et le butane liquéfié
(227 500 tonnes), le sucre brut de canne (28 960 t) ainsi que le bois brut et le bois scié (plus
de 105 710 t). On constate par ailleurs que les exportations vers la Chine sont presque
identiques avec celle de la France.
Le pétrole brut et ses dérivés représentent la plus grande part des exportations congolaises
vers la Chine avec plus de 26,555 millions de tonnes. En deuxième position vient le bois brut
et du bois scié pour 622 640 tonnes.
42
Tableau n°3 : Exportations des principaux produits congolais vers la France et la Chine
(en T et V) entre 2002-2007.
Produits
Pays
France
CHINE
Volume
(en tonnes)
Valeur
(milliards
FCFA)
251
Huiles brutes de pétrole
1 927,28
Propane liquéfié
183,23
36
Butanes liquéfiés
44,27
7
Sucres bruts de canne
28,96
10
Bois bruts et bois scié
105, 71
18
Huiles brutes de pétrole
26 540,91
3 676
Propane liquéfié
14,29
1
Bois bruts et bois scié
622,64
109
de
Source : Julien Bokilo Lossayi, La Chine au Congo-Brazzaville : Stratégie de l'enracinement
et conséquences sur le développement en Afrique, Paris, L'Harmattan, 2012 p.
Quand nous faisons l’analyse de l’évolution comparée des exportations du Congo vers ces
deux pays entre 2002-2007, nous remarquons que la Chine est la première destination des
produits congolais en volumes et en valeur, avec 27 243 140,42 tonnes pour 3 803 milliards
de FCFA. La France n’est qu’en sixième position avec 2 360 532 tonnes pour 343 milliards de
FCFA. Pékin représente ainsi 32,45 % de la valeur totale des exportations entre le Congo et
ses différents partenaires commerciaux contre, seulement, 2,92 % pour la France. Cette
nouvelle architecture commerciale permet de démontrer qu’il y a une érosion de la
dépendance du Congo à l’égard de la France due à la part qu’occupe la Chine dans ses
échanges avec Brazzaville.
Plus de vingt ans après la fin de la guerre froide, ce continent suscite de nouveau l’intérêt des
grandes puissances, car elles voient dans l’Afrique un véritable réservoir de matières
premières et un marché potentiel pour la vente de leurs produits. Au Congo, des pays comme
la Corée du sud, la Malaisie, l’Inde et le Brésil sont également actifs dans le domaine de la
coopération.
Du coup, il y a un climat de concurrence entre les partenaires qui contribue à la limiter la
dépendance du Congo à l’égard des Occidentaux.
43
2.2. La déstabilisation des Occidentaux comme moyen d’affaiblissement de la dépendance
Les pays émergents pour s’enraciner en Afrique, ils ont dû employer les méthodes telle que la
déstabilisation des concurrents comme les alliés traditionnels, s’appuyer sur l’assistance et
faire face aux des Organismes Internationaux. C’est dans cette perspective que les Chinois ont
dû contourner les institutions internationales telles que le FMI – c’est dans ce sens que Roland
Marchal rétorque : « Le FMI a été obligé de plier bagages en Angola, deuxième producteur de
pétrole d’Afrique subsaharienne, après la signature d’un prêt de plus de 2 milliards de dollars
entre la Chine et Luanda »11.
Les méthodes de déstabilisation permettent à ces pays émergents d’affaiblir les puissances
occidentales sur le continent africain en écartant entre autres les grands groupes comme
AREVA12 des courses aux marchés. Cette situation contribue en même temps à limiter la
dépendance des pays comme le Congo vis-à-vis de la France, ce qui suscite un tollé de la part
des Occidentaux13.
Contrairement à ses concurrents occidentaux qui se caractérisent par une attitude paternaliste,
l’Empire du Milieu a su saisir l’opportunité sur un terrain délaissé par les premiers, et a vu
dans les terres africaines des perspectives, des promesses nécessitant de l’investissement.
Ainsi, il a dû également séduire les Africains par des moyens plus subtils, tout en refusant de
s’interposer dans les affaires des États. Cela participe à sa stratégie consistant à préparer,
justifier et approfondir son enracinement qui limite également l’hégémonie occidentale.
2.2.1- Les mécanismes de déstabilisation
Les Chinois particulièrement utilisent parfaitement l’information comme levier principal dans
leur stratégie et la technique de désinformation qui est une arme dans la compétition
économique (Bokilo, 2012). C’était une des tactiques de la guerre froide et elle a fait son
11
MARCHAL R.(2008), « Faut-il avoir peur de la Chine en Afrique ? », La Tribune.fr, Google consulté le
24.4.2008.
12
BORDIER J. (2006), « La Chine écarterait AREVA », L’Express.fr, Google consulté le 15 mars.
13
SACHWALD F. (2004), « L’émergence de la Chine, menace et opportunité pour les pays avancés », Politique
étrangère, n° 2, pp. 253-267.
44
apparition dans la sphère économique. La cible de sa désinformation, c’est l’opinion publique
africaine14.
Ils exercent également une séduction basée en grande partie sur les désillusions de l’Afrique
vis-à-vis de l’Occident. Les Africains sont exaspérés par le caractère versatile et « donneur de
leçons » des Occidentaux, surtout lorsque ces derniers lient les échecs des Africains à la
culture qui est la leur, sans la moindre autocritique. Les Chinois s’appuient par exemple sur
l’assistance occidentale à l’endroit de l’Afrique, pour dire que les Occidentaux ne réalisent
pas le plus souvent leurs promesses, et ils s’attaquent également au manque de transparence
au sein de la Banque mondiale (avec par exemple, l’affaire scandaleuse de Paul Wolfowitz15).
La Chine a fait une entrée explosive dans l’arène africaine et le rapport de forces qui était
autrefois favorable aux Occidentaux est en train de s’étioler.
Sur l’assistance de Pékin, de nombreux produits africains ont été exemptés de droits de
douane en Chine, ce que les concurrents occidentaux de la Chine ne font pas. C’est ainsi que
le président rwandais, Paul Kagamé, dit :
440 catégories d’articles en provenance d’au moins 30 pays en
développement sont autorisées à entrer sur le marché chinois sans aucune
taxe.
Pékin emploie aussi la stratégie de contournement des puissances occidentales au sein des
Nations unies, le cas de la résolution contre le Soudan, c’est ainsi que Valérie Niquet dit :
La politique africaine de la RPC s’inscrit également dans le cadre plus large
d’une stratégie de contournement ou d’affaiblissement des puissances
occidentales ou assimilées, et principalement des États-Unis, dans une
situation internationale décrite à Pékin comme complexe16.
Les Chinois, pour gagner les marchés contre les Occidentaux, passaient par un autre mode de
lien entre les secteurs formel et informel. En effet, certaines entreprises chinoises du bâtiment
14
POMES E. op.cit., p. 10.
HOWARD F. (2007), « la Tchadienne Thérèse Mekkois : La Banque mondiale n‘est pas un partenaire du
développement et ne pourra jamais être un partenaire de notre développement ». Et : « Le président Wade
exhorte les pays du G8 à investir en Afrique, comme le font l’Inde et la Chine », in « Pourquoi les Chinois
séduisent les Africains, contrairement à leurs concurrents occidentaux, un peu trop condescendants ? Pékin
semble avoir su saisir les opportunités qui se présentent du nord au sud de l’Afrique », Courrier International, n°
868, du 21-27, p. 10.
16
NIQUET V. op.cit.
15
45
confiaient la réalisation des travaux en sous-traitance à certaines entreprises chinoises
informelles, en vue de réduire les prix et de proposer au client des prix bas.
Cette situation a permis à des sociétés chinoises officielles de se mettre dans une position
avantageuse pour remporter les marchés par rapport à la concurrence.
2.3. L’investissement des pays émergents comme moyen de limitation de la dépendance des
pays du Nord à l’égard de l’Afrique
Les relations commerciales s’est ’intensifiées en Afrique et elle se heurte non seulement à
l’ambition sinon l’hostilité des acteurs traditionnels comme la France et les USA, mais
également de nouveaux pays comme le Brésil et l’Inde qui s’invitent aussi à la conquête de
l’énergie, des matières et des marchés africains.
2.3.1. Le renforcement des relations pays émergents-Afrique
Face à la nouvelle situation de concurrence, les pays émergents tendent d’adopter une
nouvelle stratégie telle que l’organisation des Forums avec les pays africains. Le cas de l’Inde
qui organise son premier sommet Inde-Afrique, alors que la Corée du sud venait d’organiser
son second forum. Ainsi, l’on remarque que les pays émergents ne veulent pas laisser à la
Chine le monopole des relations commerciales, politiques et diplomatiques. Néanmoins, la
présence de ces pays émergents limite la dépendance des Africains vis-à-vis des Occidentaux.
- L’Inde-Afrique
La présence indienne en Afrique est moins explosive que celle de la Chine sur le continent,
mais elle reste considérable.
Pour confirmer sa volonté d’augmenter le volume de ses échanges avec le continent et
d’étendre le partenariat Inde-Afrique, New Delhi a organisé son premier sommet avec les
Africains en 2008. Il s’appuie sur un accord intitulé « Cadre de coopération entre l’Afrique et
l’Inde », qui a été adopté au sommet Inde-Afrique.
46
La part du commerce entre l’Inde et l’Afrique représente le tiers du volume du commerce
sino-africain. Elle était évaluée, entre 2000 et 2001, à 3 milliards de dollars par an. Entre 2006
et 2007, elle a fait un bond à 25 milliards de dollars pour atteindre, entre 2007 et 2008, 36
milliards de dollars.
Les nouveaux acteurs indiens dans cet échange bénéficient aujourd’hui du soutien de
l’ancienne diaspora indienne, installée principalement en Afrique du Sud et à l’île Maurice. Ils
sont très actifs économiquement et ils sont 2 millions d’individus.
- Le Brésil-Afrique
A l’occasion du sommet de l’organisation des Nations Unies pour l’agriculture et
l’alimentation (FAO), ouvert le 16 novembre (année) en Italie. Le Président brésilien a réussi
à regrouper autour de lui des chefs d’Etat africains comme Denis Sassou N’Guesso du CongoBrazzaville dans le but de renforcer ses relations de coopération et d’amitié avec le Congo.
En encourageant le président Lula, le directeur général de la FAO, M. Diouf, a salué son
initiative en incitant la coopération Sud-Sud dans le vaste domaine agricole et de la réduction
de la faim dans le monde – selon le même esprit que l’accord signé entre le Congo et le Brésil
le 16 octobre à Brazzaville.
Ils ont signé des protocoles d’accord qui venaient également consolider la coopération entre
ces deux pays situés au cœur des deux grands massifs forestiers du monde. Il s’agit du Bassin
du Congo et du Bassin d’Amazonie. Ils devraient permettre au Congo de bénéficier de
l’expérience brésilienne en ces domaines. Elle marquait une nouvelle ère dans les relations
entre ces deux pays.
Ces deux pays ont établi des relations diplomatiques en 1980. Déjà, dans le cadre du plan
quinquennal de 1982-1986, cette coopération avait permis aux Brésiliens de construire la
route vitale Impfondo-Dongou-Epéna d’une longueur de 134 km. Ces travaux se sont réalisés
en pleine vasière, dans la région marécageuse du département de la Likouala (au Nord du
Congo), par la société brésilienne Endrade Gutierrez.
47
Les échanges commerciaux entre le Brésil et le continent ne cessent de progresser. Même la
crise financière mondiale n’a pas freiné cette progression. Par exemple, la République
Fédérale du Brésil a accentué sa coopération avec l’Angola. Ce pays devient l’eldorado
africain des Brésiliens, car ils sont attirés par les opportunités économiques. Ils sont plus de
200 000 à s’y être installés.
Le commerce entre le Brésil et l’Angola a évolué de 500 % entre 2004-2007, de janvier à août
2008. Les exportations brésiliennes vers l’Angola ont dépassé 1 milliard de dollars, soit 778
millions d’euros, montant équivalant aux exportations pour l’ensemble de l’année 2007. Le
nombre d’entreprises dirigées par les Brésiliens en Angola est proche de la centaine. Les
produits proposés par les Brésiliens sont variés : jus de fruits, vêtements, shampooings,
médicaments sans oublier les telenovelas (feuilletons télévisés).
2.3.2. La gouvernance des terres arables au Congo : la prééminence des firmes agroindustrielles des pays émergents
Les affectations postcoloniales commencent timidement en 2008 comme nous le montre le
tableau n° 4 avec Eni Congo, filiale de l’entreprise italienne Eni. Actuellement, les firmes des
pays émergents ont pris de l’ascendance sur celles des
pays européens, en termes de
superficies obtenues, de montant investi et en nombre de firmes (voir tableau ci-dessous). Les
superficies acquises par les firmes des pays émergents au Congo sont passées de 59 000 ha en
2009 à 779 000 hectares en 2013 (tableau n° 4) de terres agricoles cultivables au Congo pour
une durée moyenne de 25 ans, alors qu’elles ne respectent pas toujours les clauses figurant
dans les contrats de concession comme l’a déclaré la Coordination Nationale des
Organisations Paysannes.
48
Tableau N° 4 : Différentes firmes et structure des pays émergents ayant obtenues des terres
agricoles arables au Congo
Années
05/7/200 9
17/12/2010
10/03/20
11
14/05/2013
11/06/20
13
13/07/2013
Total
Sociétés ou structure
Structure chinoise
Atama
Plantations
Sarl
Agri SA
CONGO
Asperbras
Eco-Oil
Energie
Lexus
Agric
Sarl
5
Pays d’origine
Chine
Malaisie
Afrique
du Sud
Brésil
Malaisie
MalaisieSri Lanka
1 000 000
1 000 000
40 000 ha
50 000
50 000 ha
4
Capital
59 000 ha
470 000 ha
1 000
000
80 000 ha
Durée du Contrat
15 ans
30 ans
30 ans
-
-
25 ans
Redevance annuelle à
partir de la 7eme année
pour 10 ans par hectare
exploité
-
2500
FCFA/ha
25000
FCFA/ha
25000
FCFA/ha
25000
FCFA/ha
2500
FCFA/ha
Pool (Banlieue
Brazzaville)
2 000 00
0 000
Niari et
Bouenza
1 000 000
000
Région retenue
11 750 000
000
Cuvette et
Sangha
Sangha(
Mokeko)
1 250 000
000
Lekoumou
(Mbila)
Complexes
agroindustriels
de palmier
à huile
Complex
es agroindustriel
s
de
cultures
vivrières
(maïs,
soja)
Superficies obtenues
Activités spécifiées
de
L’expérimentation et la
démonstration
des
techniques culturales
du maïs, du manioc,
des légumes, d’autres
cultures et la sélection
des semences.
Loudima
et OYO
extraits le
sucre :
extrait de
l’éthanol et
maïs, soja
Biomasse
et
Biocarbu
rant
749 000
ha
La
moyenne
est de 25
ans
-
6
Complexes
agroindustriels
d’hévéas et
de palmier
à huile
Sources : Julien Bokilo Lossayi, « Firmes internationales et hégémonie des Etats d’origine : le
cas des firmes agro-industrielles des pays émergents au Congo-Brazzaville de 2008-2013 »,
Polis/R.C.S.P./C.P.S.R. Vol. 18 & 19, n° 1 & 2, 2013-2014, p.159.
Pour la Chine, l’Académie d’Agriculture Tropicale de Chine qui en est l’opérateur. La
particularité de l’accord bilatéral entre ces deux pays, à la différence des accords entre ces
deux pays dans le secteur du bâtiment, est que la Chine met l’accent sur le transfert du savoirfaire agricole. Ce Centre n’obtient pas la terre en tant qu’une société qui doit mener les
activités libres comme le cas des autres firmes. 59 000 ha agricoles alloués à ce centre,
appartiennent au Ministère de l’Agriculture et de l’Elevage du Congo; alors que d’autres pays
d’Afrique Centrale comme le Cameroun allouent des terres aux sociétés Chinoises soit 55200
ha13. Par contre, on ne trouve pas de firmes chinoises au Gabon dans le domaine agricole. La
politique agricole chinoise au Congo se différencie de celle des autres pays émergents qui
installent plutôt des sociétés privées sur le terrain.
49
Les implantations des entreprises des pays émergents datent de 2006 pour le Cameroun et
2010 pour le Gabon comme le montre le tableau n° 5 suivant :
Tableau n° 5 : Comparaison de la dynamique des compagnies d’origine des pays
émergents dans trois pays membres de la CEMAC
Compagnie
Année
Contrat/
Protocole
d’accord
Pays
d’origine
Montant
Investissement
Superficie
Acquise
Prévisions
emplois
directs/
indirects
Atama
Plantation
Sarl
2010
Malaisie
372 000 000 000 FCFA
470 000 ha
20 000
Agri Sa Congo
Asperbras
CIB Olam
Eco-Oil
Lexus Agric Sarl
2011
2011
2012
2013
2013
105 355 636 000 FCFA
195 000 000 FCFA
33 157 000 000 FCFA
351 000 000 000 FCFA
80 000 ha
40 000 ha
30 000 ha
50 000 ha
240
620
6 Firmes
Sime Darby
Sud Cameroun
Hevea
Biopalm
(Filiale SIVA)
Sino-Cam Iko Ltd
2011
Brésil
Singapour
Malaisie
Malaisie – Sri
Lanka
6
Malaisie
28 343 000 000 FCFA
890 050 636 000 FCFA
1000 000 000 000 FCFA
50 000 ha
779 000 ha
300 000 ha
7 183
33 043
2011
2011
Chine
Inde
200 000 000 000 FCFA
45 200 ha
-
900 000 000 000 FCFA
200 000 ha
-
60 000 000 000 FCFA
100 000 000 000 FCFA
2260 000 000 000 FCFA
216 000 000 000 FCFA
216 000 000 000 FCFA
10 000 ha
6 000
561 200 ha
300 000 ha
300 000 ha
-
Pays
Congo
Total
Cameroun
Total
Gabon
Total
Afrique du Sud
2006
2012
2010
-
Goodhope
5 Firmes
Olam Gabon
1 Firme
Chine
Malaisie
3
Singapour
1
5000
11 200
11 200
Sources : Julien Bokilo Lossayi, « Firmes internationales et hégémonie des Etats d’origine : le
cas des firmes agro-industrielles des pays émergents au Congo-Brazzaville de 2008-2013 »,
Polis/R.C.S.P./C.P.S.R. Vol. 18 & 19, Numéros 1 & 2, 2013-2014, p.160.
Tableau N° 6: Evolution comparative des volumes des exportations vers la Chine et vers les
autres pays de l’Asie (en milliers de tonnes)
Pays asiatiques
CHINE
Autres pays
2002
977,34
7 276,20
2003
1 780,58
4 142,11
2004
1 983,47
4 614,07
2005
1 910,06
1 620,29
2006
13 941,35
8 569,90
2007
6 650,34
2 634,54
Source : BEAC.
Malgré ce statut de leader, en 2009, la Corée du sud devenait le deuxième fournisseur du
Congo derrière la France (19 %), avec 15 % devant la Chine, avec 13 % sur le tableau des
cinq principaux fournisseurs du Congo17. Tous les pays de l’Asie qui ont des relations de
coopération avec les pays africains sont en concurrence avec la Chine en terre africaine.
17
Impact Afrique, op.cit., p. 27.
50
Même le Brésil (sa devise est le real), qui est uni avec la Chine au sein du groupe BRIC, est
en compétition avec Pékin sur le continent africain, dans les pays lusophones comme
l’Angola – en dehors du fait même que ces deux pays sont de véritables alliés en Amérique
Latine. Depuis 2000, il a vu ses exportations en valeur vers la Chine se multiplier par quinze.
Il vend à Pékin des minerais de fer, du pétrole et des cargaisons de soja.
Eu égard aux faits qu’on vient de décrire, il est clair que la présence d’un contrepoids grâce à
la concurrence entre pays industrialisés et émergents permet aux Africains d’avoir une
approche plus critique de ses échanges avec ses partenaires et contribue également à la
limitation de la dépendance du Congo à l’égard des Alliés traditionnels.
Les cas du Cameroun et du Congo, montrent qu’entre 2011 et 2012, plus de dix compagnies
se sont installées. L’indice de capacité d’attraction des IDE dans ces deux pays est élevé
comme le montre le rapport de doing business de la Banque Mondiale : l’indice du Congo est
passé de 177en 2011 à 181en 2012 ; alors que dans le temps celui du Cameroun est passé de
168 à 161. Les flux d’investissement en provenance des pays émergents s’élèvent à 672 355
636 000 FCFA en 2011 contre 705 512 636 000 FCFA en 2012, pour le Congo ; et de 1260
000 000 000 FCFA en 2011 contre 1360 000 000 000 en 2012 pour le Cameroun. Par ailleurs,
on observe qu’en termes de valeur d’investissement et de superficies obtenues, les
compagnies d’origine malaise occupent la première place au Congo, au Cameroun et au
Gabon avec 1851 343 000 000 FCFA et 876 000 ha de superficie. Le groupe Olam adopte,
quant à lui, une stratégie de diversification au Congo et au Gabon. Elle a commencé par le
bois avant de s’orienter dans le domaine agro-industriel et cette dynamique représente aussi
un motif d’affaiblissement du clivage Nord-Sud.
-L’hégémonie des firmes internationales des pays émergents
Les firmes internationales concentrent leurs moyens et amènent des stratégies autonomes,
indépendantes du pays d’accueil. Elles exercent une forte domination dans le domaine social
et environnemental sur l’état d’accueil perd son influence (Chavagneux, 1997). Ainsi, face à
l’apparition de ce nouveau marché, les pays africains se retrouvent dans une nouvelle forme
de partenariat, dans laquelle, les firmes des pays du Sud émergents, ne se contentent plus de
jouer la défensive à l’égard des firmes d’origine occidentale (tableau n°4). Elles déploient de
façon préférentielle leurs activités au Congo et leur domination dans le domaine agricole.
51
5
6
Lexus
Agri Sarl
CIB-Olam
Total
40,96
7 020 001.8
470 000,00
372 000 000 000
43,41
791 488.9
80 000,00
105 355 636 000
12,30
40 000,00
195 000 000
50 000,00
Pays
351 000 000 000
(%)
50 000,00
Emplois crées
Date
Investissements
FCFA/ha
4
(%)
3
11/06/1
3
17/12/1
0
10/03/1
2
14/05/1
3
13/07/1
3
00/00/1
2
Investissements
CFA
2
Eco-Oil
Energie
Atama
Plantation
Agri Sa
Congo
Asperbras
Superficie
1
Entreprises
N°
en
en
Tableau n 7: Firmes des pays émergents de 2010 à 2013
15,13
Malaisie
60,53
Malaisie
1 316 943
5 000,0
0
20 000,
00
240,00
0,73
0,02
4 873.2
620,00
1,88
Afrique
Sud
Brésil
28 343 000 000
3,31
566 863.2
21,74
Malaisie
30 000,00
33 157 000 000
-
1 105 233.9
7183,0
0
-
-
Singapour
720 000,00
1084 855 636 000
-
1 236 181.5
Soit
33 063,
00
100,00
5
du
Soit
1 887.30€€
1 358 855 932,54€
Sources : Julien Bokilo Lossayi, « Firmes internationales et hégémonie des Etats d’origine : le
cas des firmes agro-industrielles des pays émergents au Congo-Brazzaville de 2008-2013 »,
Polis/R.C.S.P./C.P.S.R. Vol. 18 & 19, Numéros 1 & 2, 2013-2014, p.166.
Sur le marché des terres agricoles du Congo, les firmes des pays émergents développent une
stratégie de conquête des parts de marché en cherchant à dominer les firmes des pays
occidentaux. En investissements directs étrangers, le montant pour les pays émergents au
Congo est de 890 050 636 000 FCFA contre 617 404 310 000 FCFA pour les firmes
occidentales. En nombre de sociétés, les pays émergents ont six sociétés au Congo contre trois
seulement pour les pays occidentaux. Quant à la superficie occupée, les firmes des pays
émergents occupent 779 000 ha contre 134.000 ha seulement pour les firmes occidentales. Les
firmes des pays émergents sont dans une logique expansionniste pour assurer l'hégémonie
politique de leur pays d'origine sur le pays d'accueil et cette situation contribue entre autres à
faire oublier de la domination autrefois occidentale, surtout celle des concessionnaires au
Congo.
Pour le cas du Congo, les entreprises de l'Occident (anciennes puissances coloniales en
Afrique) investissent plus (7032,82€ par ha) en achetant moins de terre. Elles ont une stratégie
capitaliste.
52
Investissement en FCFA
Investissement FCFA/ha
Activités
Pays
Superficie
Date
Entreprises
N°
Tableau n°8: Firmes des pays occidentaux de 2008-2013.
176 850 000 000
FCFA
Soit
270 000 000 €
98 250 000 000
FCFA
Soit
150 000 000 €
342 304 310 000
FCFA
Soit
522 602 000 €
2 456 250 FCFA
Soit
3750,00€
Agro-carburant
à base de l’huile
de palme
Italie
1 637 500 FCFA
Soit
2500,00 €
Produits dérivés
d’huile de
Palme
et
le
biocarburant
Agropastoral
617 404 310 000
FCFA
Soit
942 602 000,00 €
460 71 52,1
FCFA
Soit
7 033,82 €
1
Eni Congo
2
3
Total
19/05/200
8
Biocongo
Global
Trading
23/02/201
3
Mosaic
-
3,00
72 000 ha
60 000 ha
-
2810 ha
134 010 ha
170 300 655
FCFA
Soit
260 001,00€
Espagne
France
-
3,00
Sources : Julien Bokilo Lossayi, « Firmes internationales et hégémonie des Etats d’origine : le
cas des firmes agro-industrielles des pays émergents au Congo-Brazzaville de 2008-2013 »,
Polis/R.C.S.P./C.P.S.R. Vol. 18 & 19, Numéros 1 & 2, 2013-2014, p.168.
Alors que les entreprises des pays émergents achètent davantage de terre, mais investissent
moins 1 887,30 € par ha. Elles ont une stratégie de colonisation. Dans ce sens, le processus
hégémonique commence par la colonisation et évolue vers le capitalisme, en passant par le
néocolonialisme.
D’où, la firme internationale est un vecteur de ce processus pour son pays d’origine.
2.4. Affirmation des puissances émergentes comme moyen de limitation la dépendance du
Sud vis-à-vis du Nord.
L’OMC devenu quasi-universelle en raison d’adhésions des pays émergents comme la Chine
(2001) a favorisé la mise en œuvre et l’affirmation de plusieurs pays en coalitions, malgré
que les militants altermondialistes dénoncent le « pouvoir invisible » de l’OMC qui contribue
à l’implantation du libéralisme.
53
La montée en puissance des pays émergents et la multiplication des coalitions des pays en
développement ont contribué à la transformation profonde des conditions de négociations ou
une capacité de s’opposer efficacement contre des pays occidentaux, malgré que la plupart
des accords conclus n’ont toujours pas abouti et ont entrainé l’OMC dans l’engrenage des
crises.
On peut citer le cas de la constitution d’une grande coalition appelé G20 à la conférence de
Cancun en septembre 2003. Dans celle-ci, un accord transatlantique (euro-américain) sur
l’agriculture a été signé, mais il a rencontré une opposition féroce du G20. Il s’agissait du
clivage Nord-Sud sur la question du coton où quelques pays africains exportateurs de coton
notamment le Bénin, le Burkina Faso, le Mali et le Tchad, soutenus par Oxfam qui a déclaré
que ces pays étaient victimes de l’industrie cotonnière américaine qui a subventionnée 25 000
fermiers américains qui dépassait entre 2004-2005 le montant du produit national brut du
Burkina Faso (Hoekman et Kostecki, 2009).
Et cette situation d’affirmation de ces pays dans les organisations internationales comme
l’OMC contribue entre autres à limiter la dépendance des pays du Sud vis-à-vis du Sud, car on
négocie de manière plus multilatérale avec cette institution qu’avec le FMI et Banque
mondiale
Les pays émergents souhaitent être mieux représentés dans ces institutions dont ils contestent
par ailleurs la légitimité ou le mode de fonctionnement. Mais ils se servent aussi de ces
institutions comme l’OMC, cas de la Chine.
Le poids économique grandissant de ces pays provoque des tensions politiques et
économiques, sur la question en particulier de l’augmentation du prix des matières premières
et de l’énergie. Aujourd’hui, leur nouveau poids sert de dessein stratégique pour chercher à
s’installer en Afrique, car ils savent que le nombre des États africains compte pour les votes
au sein des institutions internationales (FMI, Banque mondiale, ONU…).
2.5. L’affaiblissement de la dépendance Nord-Sud et son importante sur les alliés historiques
Cette entrée explosive de la Chine en Afrique, le cas du Congo n’a pas de conséquences très
importantes sur les alliés historiques comme la France. Au Congo, au Gabon et au Cameroun
54
c’est la France, pays colonisateur, qui avait créé et initié l’économie concurrentielle et l’aspect
culturel.
En tant que capitale de l’AEF (Afrique équatoriale française), Brazzaville rappelons-le
succinctement, fut le centre stratégique et capitale de la France libre pendant la Deuxième
Guerre Mondiale. C’est sur ce territoire que le Général De Gaulle prononça son discours sur
la Libération. Aussi, la France a toujours été le premier et principal client du Congo, mais a
perdu du terrain au fil du temps. Par exemple, en 2007, elle ne figurait même pas parmi les
cinq premiers de ses clients, notamment les États-Unis avec 39 %, la Chine 36 %, Trinidad et
Tobago 6 %, Taïwan 5 % et la Corée du Sud 2 %.
Face à cet état de fait, que peut-on dire de ce changement à partir duquel les Occidentaux
perdent petit à petit le continent sur lequel ils exerçaient une mainmise et un total contrôle ?
Néanmoins, lorsqu’il y a des votes à l’assemblée générale des Nations Unies, la France peut
encore compter sur les voix des pays de sa zone d’influence ou de son aire linguistique (pays
francophones d’Afrique). Il convient de préciser que la France ne domine plus l’Europe,
comme l’Allemagne qui est dans un certain sens son concurrent et avec laquelle elle forme
l’axe Paris-Berlin.
Berlin s’est renforcé du côté de l’Europe de l’Est en établissant des relations étroites avec les
anciens satellites de l’ex-URSS. En effet, ces Etats commercent plus avec l’Allemagne et sont
presque devenus ses propres satellites. De ce point de vue, la France n’a d’autre choix que de
coopérer avec l’Afrique ; elle doit trouver un avantage comparable à celui de l’Allemagne
dans les domaines économique, politique, diplomatique et militaire avec des pays africains,
pour que les deux pays continuent à être le moteur de l’Union européenne.
Cependant, la France pour mener ce combat, doit prendre en compte des éléments nouveaux,
car l’Afrique a complètement changé. Elle devient un des pôles de l’équilibre économique
mondial.
A l’arrivée de la démocratie en 1990, et lors des crises récurrentes dans certains pays
d’Afrique, la France a été quasiment absente. Ce fut le cas pour le Congo Démocratique, l’un
des plus grands pays d’Afrique par sa superficie, sa population, ses richesses, abandonné par
55
ses partenaires historiques dont la France. La signature d’un important contrat entre la Chine
et la RDC ainsi que la volonté des Américains d’installer Africom en RDC fait que ce pays
occupe aujourd’hui une position stratégique pour les pays industrialisés.
Dans ces conditions, pour que la France revienne à sa place, elle doit prendre toute la mesure
des nouveaux enjeux économiques et politiques, du fait de la présence grandissante sur le
continent africain de ces deux puissances (Chine et Etats-Unis), qui veulent compenser les
difficultés qu’ils rencontrent aux Proche et Moyen-Orient.
En fait, le manque d’innovation sur la politique africaine de Paris commençait à se faire
remarquer depuis la dévaluation du FCFA en 1994, avant même que la Chine ne soit passée à
l’offensive. Car la politique africaine décidée par le Premier ministre de l’époque, Édouard
Balladur, était de confier le sort de l’Afrique aux mains du FMI et de la Banque Mondiale.
C’est à partir de là que la France a commencé à perdre ses positions. Dans les mêmes
perspectives, Glaser A. et Smith S. écrivent : « La France a perdu son Afrique… ».
Aujourd’hui, la France traverse une mauvaise période, ses moyens financiers sont devenus
insuffisants pour qu’elle parvienne à déloger la Chine et d’autres pays émergents qui
s’installent en Afrique. Paris est particulièrement confronté au manque énorme de moyens
humains, matériels et budgétaires nécessaires pour accompagner une nouvelle politique
africaine face à des concurrents de la Chine, l’Inde, le Brésil, la Corée du Sud, Taïwan qui
pour la plupart négocient sans condition et mettent beaucoup de moyens sur la table. La
France ne dispose plus d’universitaires, analystes et politiques dont elle aurait besoin pour
étudier correctement les problèmes africains pays par pays, comme elle le faisait avant. A cela
s’ajoute le fait que les hommes d’affaires français et les banques françaises ne s’intéressent
plus à l’Afrique comme par le passé, les uns et les autres se sont quasiment désengagés pour
s’orienter beaucoup plus vers l’Asie et l’Europe de l’Est.
De surcroît, la presse française qui servait de pont entre le continent africain et Paris ne s’est
pas renouvelée, et elle n’a pratiquement plus de correspondants permanents en Afrique.
Le moins que nous puissions dire c’est que la France a perdu sa capacité à comprendre et
suivre l’Afrique. Même la langue française connaît depuis quelques années un net recul au
profit de l’Anglais à cause d’un manque d’accompagnement pour entretenir la langue, et ce
malgré l’élection d’Abdou Diouf à la tête de la Maison de la francophonie.
56
L’affaire de la Maison de la francophonie qui a éclaté à l’été 2007 pour illustrer cette réalité.
Qu’en est-il ?
Le président Jacques Chirac avait proposé un immeuble à Paris, avenue de Ségur, où devaient
être regroupés les bureaux de la Maison de la francophonie. Cette affaire avait pris une autre
tournure au Sénat, avec la contestation par le rapporteur de la commission d’enquête du Sénat,
lequel avait déclenché une polémique sur le poids financier des travaux de réhabilitation du
bâtiment.
Les opposants au projet n’ont pas pesé le pour et le contre de ce que la France pouvait gagner
de la francophonie. Et, ironie du sort, au moment où cette affaire était discutée dans les
milieux politiques parisiens, les Chinois étaient en tractation pour l’achat de l’immeuble
historique de la rue Monsieur, qui héberge le ministère de la Coopération.
Tous ces éléments nous amènent à croire qu’il est difficile pour la France d’avoir les moyens
financiers de payer sa présence en Afrique, contrairement à la Chine qui, elle paie ce qu’il
faut pour y prendre place et s’installer d’autant plus qu’elle a au même titre que les
Occidentaux besoin de matières premières, d’énergie et de nouveaux marchés pour vendre ses
produits.
La situation se complique de jour en jour pour la France, avec l’arrivée d’autres pays
émergents comme le Brésil et l’Inde qui ont augmenté leurs investissements. A titre
d’illustration, la valeur des exportations brésiliennes vers l’Afrique est passée de 2,4 à 7,5
milliards de dollars (soit 1,68 à 5,25 milliards d’euros), alors que les importations agricoles
notamment le sucre, les produits laitiers et céréales, en provenance du même pays ont aussi
augmenté de 3,1 %, jusqu’à représenter 7,7 % de la production brésilienne.
Au même moment, dans le cadre du partenariat Inde-Afrique, les Indiens ont présenté à
travers le sixième forum des modalités d’investissement de 9 milliards de dollars US (soit
6,30 milliards d’euros) en cinq ans en Afrique. Et les U.S.A se préoccupent de plus en plus
d’être aussi présents en Afrique pour leur approvisionnement en pétrole.
57
C’est dans cette perspective que le 16 juin 2010, les officiels américains ont ouvert à
Washington avec des responsables de l’Union africaine, un mini-sommet dans le but de
renforcer la coopération de travail avec cette institution africaine. A l’issue de cette rencontre,
l’administration américaine a accordé 170 millions de dollars (119 milliards d’euros) aux
Africains dans le cadre de la mission de maintien de la paix de l’UA. L’Union Européenne
n’est pas non plus restée à la marge. Elle a organisé une réunion annuelle avec les Africains,
exactement sur le modèle chinois.
Cela pousse à se demander si nous ne sommes pas entrés dans une configuration où la Chine
ne revalorise-t-elle pas un continent délaissé par la France et les Occidentaux ?
Cette interrogation est d’autant plus légitime que la nouvelle stratégie qu’elle propose aux
pays africains n’est pas conditionnée par la bonne gouvernance ou le respect des droits de
l’homme, sujet qui met profondément en contradiction les Occidentaux et les Chinois, comme
dans le cas du conflit soudanais.
Contrairement à la France, la Chine a innové une politique africaine. En échange des produits
du sous-sol africain, elle finance à coups de milliards de dollars la réhabilitation ou la création
d’infrastructures qui font cruellement défaut aux Africains.
En d’autres termes, elle fait du troc avec les Africains. Par ailleurs, les actions des Chinois ont
aussi beaucoup d’inconvénients en comparaison avec la politique menée par les Occidentaux,
surtout dans le fait que leurs investissements ne sont pas socialement responsables et la mise à
l’écart de la société civile dans leurs relations avec l’Afrique.
En tout état de cause, l’influence de la Chine est sans cesse grandissante en Afrique que dans
l’affaire du Darfour par exemple, la Chine a plus d’influence que la France.
2.4.1. L’impact de la politique du troc chinois sur les alliés traditionnels
L’impact économique de la présence chinoise en Afrique est défavorable aux partenaires
historiques les plus importants du continent africain, comme la France, malgré le profond
niveau d’enracinement français dans certains pays africains sur le plan économique, culturel
et politique, suite à la colonisation. La pratique du troc par les Chinois sur le continent est un
58
choc pour la politique monétaire africaine de la France. Quinze pays africains utilisent le franc
CFA. Pékin échange des matières premières, de l’énergie fossile contre la réalisation des
travaux ou la construction d’infrastructures avec la plupart des pays africains de la zone franc
(PAZF). La Chine n’utilise pas des devises pour commercialiser avec les Africains ; du coup,
il n’y a pas de convertibilité entre le yuan ou le dollar américain qu’utilisent les Chinois dans
leurs transactions internationales. De ce fait, la stratégie chinoise met à mal la politique ou la
coopération monétaire franco-africaine, l’autonomie monétaire de la métropole. Cette position
donne à la France une place de choix pour exercer ses pouvoirs de gestion et de contrôle qui
lui sont reconnus statutairement par les PAZF, sur les centres de décisions stratégiques des
économies de l’Afrique francophone. A travers les principes de fonctionnement de la zone
franc, la France tire beaucoup de profit sur les commissions, la convertibilité des euros ou
dollars en FCFA, et le principe des comptes d’opérations de dépôt des devises africaines au
Trésor public français.
En effet, dans le cadre de la coopération entre la Chine et les PAZF, Pékin devrait par
exemple acheter les matières premières et du pétrole avec des dollars. Et, lorsque le paiement
est effectué, les devises doivent être versées au Trésor public par le biais des Banques
centrales, qu’il s’agisse de la BCEAO (pour la zone de l’UEMOA), de la BEAC (zone de
l’Afrique centrale) ou de la BCC (pour la République fédérale islamique des Comores). Leurs
fonctionnements sont quasiment identiques. C’est dans cette perspective que la Convention
franco-africaine de la zone franc stipule que :
« Les États membres conviennent de mettre en commun leurs avoirs extérieurs dans un fonds
de réserves de change. Ces réserves feront l’objet d’un dépôt auprès du Trésor Français, dans
un compte courant dénommer : compte d’opération »18.
La France perçoit des commissions (pour garantie) de la convertibilité des devises que payent
les Chinois aux PAZF. Ces commissions fixées unilatéralement par la France sont versées par
les PAZF qui sont les bénéficiaires des prestations de services financiers. Ces pays sont
contraints de déposer 65 % au moins de leurs réserves de change. Pour la BEAC par
exemple :
18
Article 2 de la Convention de comptes d’opérations entre la France et les pays africains de la zone franc.
59
« Les avoirs en comptes d’opérations ont augmenté de 47, 5 %, se situant à 4 311,7 milliards
FCFA à fin mars 2007 contre 2 922,9 milliards à fin mars 2006 »19.
Avec le jeu de fixité entre le FCFA et l’euro, l’Europe voulait protéger ses marchés africains
captifs contre son concurrent américain. Mais, malheureusement pour l’Europe, ses vrais
concurrents sont sortis d’ailleurs, ce sont finalement les pays émergents avec, en tête, la
Chine. Chaque année, Pékin annule les dettes de plusieurs pays africains et prête d’énormes
sommes d’argent à des taux zéro à ces pays, mais pour l’utilisation de ces milliards de dollars,
ces pays ne versent jamais ces sommes à leurs Banques centrales. De fait, le principe de la
libre transférabilité des capitaux financiers de la zone franc et le principe des comptes
d’opérations qui oblige les Africains à déposer au minimum 50 % de leurs devises au Trésor
Public.
Conclusion
Les résultats de cette réflexion permettent de confirmer que la présence d’un contrepoids
venant des pays émergents et la constitution d’un bloc des pays du Tiers monde ne peut
qu’être bénéfique pour les pays comme le Congo et ne peut que permettre d’éviter à ces pays
de n’être qu’un instrument pour les pays industriels et à être toujours dépendants.
Les hypothèses avancées sont corroborées par l’ensemble des analyses qui doivent nous
permettre de tirer la conclusion selon laquelle le transfert de technologie ne doit pas être un
simple objectif pour le Congo. Car, le transfert devrait être un élément fondamental qui doit
être considéré comme un processus de transformation du système administratif du Congo. En
plus, les Congolais devraient prendre leur destin en main en innovant.
Les résultats de cette analyse démontrent que la dépendance du Congo à l’égard de ces
partenaires ne contribue pas efficacement au développement du Congo. Nous pensons que cet
argumentaire devrait normalement permettre d’établir les nouveaux fondements théoriques de
stratégies de développement pour les pays en voie de développement qui devraient, par
ailleurs, être axés sur l’ouverture et l’intégration de ces pays à l’économie internationale avec
des nouvelles exigences.
19
Situation monétaire de la CEMAC au 31 mars 2007.
60
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REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE B - ECONOMIE / NUMERO 1 - VOLUME 2 - Décembre 2016 / pp. 63-88.
L’impact de l’aide publique au développement sur la croissance économique et
l’épargne intérieure : le cas de la Côte d’Ivoire entre 1970 et 2010
Muhamed Sylla N’GOMORY
Université Alassane OUATTARA, Bouaké (Côte d’Ivoire)
[email protected]
Résume
L’objectif de cet article est de déterminer l’impact de l’aide publique au développement sur la
croissance économique et l’épargne intérieure en Côte d’Ivoire à l’aide d’un modèle de
croissance à équations simultanées et de séries temporelles portant sur la période 1970-2010.
Les résultats montrent que, de 1970 à 2010, l’aide publique au développement a eu un impact
positif significatif sur la croissance économique et l’épargne intérieure. De plus, les effets
directs de l’aide, des investissements directs étrangers et des exportations surestiment leurs
effets totaux sur la croissance économique et sous-estiment leurs impacts totaux sur l’épargne
intérieure. Bien que l’aide au développement exerce un effet positif significatif sur la
croissance, apporte une contribution relative significative à la croissance et accroît l’efficacité
du capital en Côte d’Ivoire, l’étude révèle que la meilleure façon de promouvoir l’épargne
intérieure et d’augmenter le produit marginal du capital est de relever le revenu par tête et
d’accroitre les exportations et les investissements directs étrangers.
Mots clés : aide publique au développement, épargne intérieure, effet direct, effet total,
produit marginal du capital.
63
Abstract
This article attempts to assess the impact of official development aid on economic growth and
domestic saving in Côte d’Ivoire using a simultaneous equation growth model and time series
data collected over the 1970-2010 period. It is found that official development aid positively
and significantly affected economic growth and domestic saving between 1970 and 2010.
Moreover, the direct effects of official development aid, foreign direct investment and exports
overestimate their total impact on growth and underestimate their total effects on domestic
saving. Although official development aid has a significant positive effect on growth, brings a
relative significant contribution to economic growth and raises the marginal product of capital
in Côte d’Ivoire, the results show that the best way to promote the domestic saving rate and
increase the incremental capital output ratio is to increase the level of real per capita income
and to raise exports and foreign direct investment.
Key words : official development aid, domestic saving, direct effect, total effect, marginal
product of capital
64
Introduction
Contrairement à la théorie économique qui soutient que l’aide publique au développement
exerce généralement un effet favorable sur la croissance et un effet négatif sur l’épargne
intérieure du pays aidé, les études empiriques aboutissent souvent à des résultats
contradictoires quant au signe et à l’importance de l’impact de l’aide sur la croissance et
l’épargne. Or, l’appartenance de la Côte d’Ivoire à l’Union Economique et Monétaire Ouest
Africaine excluant la mise en œuvre d’une politique monétaire et de taux de change
indépendante, le gouvernement ivoirien a largement utilisé l’aide publique au développement
pour financer le déficit budgétaire et la croissance économique et pallier l’insuffisance de
l’épargne intérieure20. L’aide publique au développement représentait 56,6 %, 30,4% et
48,4% de la dette publique extérieure en 1970, 1980 et 1988 respectivement (Assemien, 1994)
contre 11,2% en 201121. De plus, les flux nets de l’aide au développement ont atteint 7,5% de
l’investissement brut domestique en 1980 contre 70,7%, 56,9% et 35,8% en 1995, 1998 et
2010 respectivement (Banque Mondiale, 2013). L’aide au développement a représenté en
moyenne 4,8 fois les investissements directs étrangers en Côte d’Ivoire durant la période
1970-2010. La question essentielle qui se pose ici est celle-ci : ce recours massif à l’aide
publique au développement se justifie-t-il au regard de ses effets sur les performances de
l’économie ivoirienne et l’épargne intérieure ?
Cette étude vise à déterminer l’impact de l’aide au développement sur la croissance du produit
intérieur brut et l’épargne intérieure en Côte d’Ivoire durant la période 1970-2010. Il s’agira
d’évaluer, à l’aide de séries temporelles et d’un modèle de croissance à équations simultanées,
les effets directs et indirects de l’aide au développement sur la croissance et l’épargne
intérieure, d’une part, et de déterminer la contribution de ces flux de ressources financières à
l’amélioration de l’efficacité du capital, d’autre part.
20
Jusqu’en 2003, le financement monétaire du déficit budgétaire était plafonné à 20 pour cent des recettes
fiscales de l’année antérieure (Beaumont, 1987; Kouassi, 1994a et 1994b; Parmentier et Tenconi, 1996; Sylla,
1999). Ces avances de trésorerie accordées par la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest aux Etats
membres de l’UEMOA ont été supprimées en Janvier 2003.
21
La dette publique extérieure, en fonction de ses sources, est subdivisée en une dette commerciale et une aide
publique au développement. Elle est passée de 222,9 milliards de francs CFA (soit 11,9% du PIB) en 1975 à
3.542 milliards, 7.133,9 et 5.685,6 milliards (65%, 106,2% et 50,1% du PIB) en 1984, 1995 et 2010
respectivement (Banque Mondiale, 2013).
65
Après l’introduction, la section 1 présente une brève revue de la littérature théorique et
empirique sur les effets de l’aide sur la croissance économique et l’épargne intérieure.
La section 2 présente le modèle et les résultats empiriques obtenus pour l’économie
ivoirienne.
1. Revue de la littérature
L’évaluation de l’impact de l’aide au niveau macroéconomique consiste essentiellement à
déterminer ses effets sur la croissance économique et l’épargne intérieure du pays
récipiendaire. L’accent est mis, dans cette section, sur les mécanismes par lesquels l’aide au
développement affecte les taux de croissance du PIB et d’épargne intérieure et les
déterminants de l’efficacité de ces flux de ressources extérieures.
1.1. Relation entre l’aide et la croissance
Le premier cadre théorique de référence a été le modèle des deux déficits basé sur le modèle
de croissance de Harrod-Domar. Le modèle de Harrod-Domar, d’inspiration keynesienne,
transpose “dans un cadre dynamique les concepts de la Théorie Générale en dépassant la
problématique du court terme, à capital fixe, par l’adjonction d’une équation d’accumulation
du capital et d’ une explication en termes d’accélérateur de l’investissement désiré” (Schubert,
1996). Harrod (1939) et Domar (1946) soutiennent que dans un pays et pendant une période
donnée, le coefficient de capital est fixe ; il en résulte qu’une augmentation de capital
contribue directement à la croissance économique.
Le modèle des deux déficits est une théorie de goulots d’étranglement selon laquelle
l’insuffisance de capital est la contrainte majeure qui pèse sur la croissance. Selon ce modèle,
l’aide augmente l’investissement du pays récipiendaire en résorbant le déficit en devises ou le
déficit d’épargne, accélérant ainsi la croissance (Chenery et Strout, 1966 ; White, 1992). Le
déficit d’épargne est l’écart entre l’investissement nécessaire pour réaliser l’objectif de taux
de croissance du gouvernement et l’épargne intérieure. Quant à la contrainte de devises
étrangères, elle opère lorsque les recettes d’exportation sont insuffisantes pour payer les
66
importations requises comme compléments au capital accumulé au plan national dans la
production. Plus précisément, l’épargne intérieure est inférieure aux opportunités
d’investissement et les devises étrangères disponibles sont insuffisantes pour financer les
besoins d’importation de biens d’équipement et de produits intermédiaires nécessaires pour
réaliser un taux de croissance donné (Brasseul, 1993). L’aide au développement correspond
alors à des transferts de biens de consommation et de biens de production ou d’équipement
qui enrichissent le pays bénéficiaire et créent des effets de complémentarité et des économies
externes (Penouil, 1979).
Si le déficit en devises est égal au déficit d’épargne ex post, ex anté l’aide doit être suffisante
pour combler le déficit le plus grand. De plus, si la propension marginale à épargner est
supérieure à la propension moyenne et la propension marginale à exporter est élevée,
l’épargne domestique et les capacités d’exportation croîtront de telle sorte que les transferts de
capitaux nécessaires pour maintenir un taux de croissance donné baisseront graduellement et
finiront par s’annuler (Mackinnon, 1964).
1.2. Relation entre l’aide et l’épargne intérieure
Si dans le modèle des deux déficits, les flux d’aide augmentent de façon non équivoque le
taux de croissance de l’économie du pays récipiendaire, ils peuvent exercer un effet négatif
sur l’épargne intérieure. En effet, les critiques (Griffin, 1970 ; Griffin et Enos, 1970) ont
indiqué que les prévisions de flux d’aide seront considérées comme des augmentations de
revenu et, à moins que la propension marginale à épargner soit égale à 1, reparties entre la
consommation et l’épargne. Par conséquent, l’épargne totale augmente d’un montant inférieur
à l’aide qui a évincé une partie de l’épargne intérieure publique22.
22
Une formulation alternative de la critique soutien que “le taux d’épargne est en partie fonction des
opportunités d’investissement et les capitaux étrangers ont un droit de préemption sur certaines opportunités
d’investissement” [Houthakker (1965) cité par Levy (1984)]. Dans ce cas, face à un afflux d’aide au
développement, le gouvernement réduira son épargne d’un montant équivalent. Weisskopf (1972) montre que
l’impact des flux de capitaux étrangers dépend du déficit qui prévaut. Plus précisément, quand le déficit
d’épargne est le plus grand, l’épargne ex anté est égale à l’épargne ex post et les flux de ressources financières
extérieures ont un effet négatif sur l’épargne intérieure; lorsque le déficit en devises prévaut, l’épargne
intérieure ex post devient une fonction croissante des flux de capitaux extérieurs.
67
Pour montrer la fongibilité de l’aide, Heller (1975) utilise une version des modèles qui ont
servi à la fin des années 1960 à expliquer le comportement fiscal des pouvoirs publics au
niveau des Etats et des collectivités locales aux Etats Unis23. L’effet des flux d’aide sur le
comportement fiscal du gouvernement est analysé en postulant comme fonction objectif une
fonction d’utilité quadratique des écarts des arguments aux valeurs correspondantes fixées
comme cibles, avec les taxes, l’emprunt intérieur, l’aide publique et les différentes formes de
dépenses publiques –investissements publics, dépenses de consommation socioéconomique,
dépenses de consommation civile- comme arguments. Le modèle économétrique dérivé par
Heller met l’accent sur les interactions entre les différentes catégories de dépenses et de
recettes publiques internes et externes. Les résultats obtenus par Heller –portant sur 11 pays
africains- confortés par ceux de Khan et Hoshino (1992) –basés sur 5 pays d’Asie du Sudconfirment que non seulement l’aide accroît l’investissement et la consommation publique,
mais facilite aussi la réduction des taxes et des emprunts intérieurs publics.
Cependant, White (1992, op. cit.) et Reichel (1995) ont noté que l’effet négatif de l’aide sur
l’épargne publique peut être plus que compensé par son impact positif sur le revenu, et
l’épargne intérieure peut augmenter pour trois raisons principales. D’abord, l’aide peut
contribuer à améliorer la qualité du travail (par le financement de l’éducation, l’assistance
technique et une meilleure santé) et du capital accroissant ainsi la productivité des facteurs de
production. Ensuite, les projets financés par l’aide génèrent des effets externes bénéfiques
stimulant les entrepreneurs locaux. Enfin, même dans un modèle statique, le multiplicateur de
l’aide peut entraîner une augmentation du revenu si forte que l’on observe à la fois une hausse
de la consommation et des niveaux d’épargne publique et privée futures plus élevés ou un
accroissement de l’épargne privée supérieur à la baisse de l’épargne publique. Au total, l’aide
au développement peut évincer ou accroître l’épargne intérieure. Seule une étude empirique
peut trancher la question.
1.3. Efficacité de l’aide au développement
L’efficacité de l’aide dépend directement de la performance économique du pays
récipiendaire. La productivité d’un montant additionnel d’aide à court terme peut être mesurée
par l’augmentation du produit résultant principalement de la mise en œuvre de ressources
oisives qu’il permet. Or les capitaux extérieurs (dont l’aide) contribuent à la croissance
économique si leur coût unitaire –le taux d’intérêt payé- est inférieur au ratio du produit par le
23
Voir Gramlich (1969) et Krishnamurty (1968).
68
capital (Caceres, 1995)24. A long terme une croissance plus rapide accroît l’efficacité de l’aide
en élevant le taux marginal d’épargne et le taux de croissance des exportations, en rendant les
investissements privés étrangers plus attrayants, en favorisant la stabilité politique et
l’efficacité de l’action gouvernementale (Chenery et Strout, op.cit.).
Mosley et al (1987) expliquent les différences dans l’efficacité de l’aide entre pays en utilisant
une version élargie du modèle de Heller qui décompose l’effet de l’aide sur la croissance
économique en trois parties : un effet direct représenté par la contribution du projet financé
par l’aide ; un effet indirect imputable à la modification induite de la structure des dépenses et
des recettes publiques qui, à son tour, affecte toute l’économie à travers les variations
subséquentes du taux de change et de la structure des taux d’intérêt ; un effet indirect
représenté par l’impact sur le secteur privé – l’investissement privé- des changements induits
du prix relatif des biens non échangés. Etant donné que le taux de rendement moyen du projet
augmente avec sa taille absolue (Campbell, 1999) l’effet direct sera faible dans les petites
économies africaines faiblement intégrées où la plupart des projets ont une taille absolue
réduite. Les deux derniers effets impliquent que la contribution à la croissance et à l’épargne
intérieure d’un montant donné d’aide au développement sera différente en général d’un pays à
un autre.
Cette différence d’efficacité peut aussi résulter ou être renforcée par les différences dans
l’allocation sectorielle de l’aide dans les pays récipiendaires. En effet, la maximisation de la
croissance n’est pas le seul objectif immédiat des pays en développement aidés et une partie
plus ou moins importante de l’aide peut être affectée à la réalisation d’infrastructures
routières, hospitalières ou éducatives –qui exercent un effet positif substantiel sur la
croissance future mais négligeable sur la performance courante de l’économie- plutôt qu’à des
investissements directs dans la production de biens et services. L’allocation sectorielle de
l’aide reflète donc un arbitrage entre la croissance présente du produit et les performances
futures de l’économie.
24
Dans une vision dynamique, les dépenses publiques financées par les emprunts extérieurs contribuent
efficacement à la croissance si le taux de croissance du PIB (interprété comme le taux de rentabilité de
l’investissement) est supérieur au taux d’intérêt moyen payé sur la dette extérieure ou au service de la dette
extérieure en pourcentage du PIB (Assemien, 1994). Le coût de l’aide peut s’exprimer aussi de diverses
manières : sous forme d’obligation d’acheter parfois à un prix supérieur dans le pays aidant, sous forme de
contraintes politiques, sous forme de dépendance technologique ou culturelle.
69
En règle générale, le transfert de capital est affecté à un projet précis. Même si cette
affectation est souvent perçue comme un élément de domination du pays aidant, elle
représente une condition du contrôle de l’efficacité de l’aide (Penouil, op. cit). De plus, au
delà de l’effet positif de l’aide sur la croissance, l’expertise technique et les conseils des
organisations internationales peuvent aider à identifier à priori les projets qui sont
économiquement et techniquement non viables permettant ainsi au pays bénéficiaire de l’aide
d’éviter de supporter des fardeaux inutiles ou de gaspiller des ressources économiques rares
(N’Guessan, 1987).
En Afrique, l’insuffisance de capitaux et l’inefficacité relative de l’aide au développement à
promouvoir la croissance économique reflètent les choix de politiques économiques
inappropriées (Younger, 1992) ou l’inadaptation des institutions politiques et économiques
(Adam et O’connell, 1997). Selon Younger, une politique fiscale plus restrictive visant à
réaliser un surplus budgétaire de quatre pour cent du produit intérieur brut et une politique
monétaire plus laxiste auraient amélioré les performances économiques du Ghana suite à
l’afflux massif d’aide au développement dont le pays a bénéficié dans le cadre de
l’ “Economic Recovery Programm” des années 1960. Dans le modèle intertemporel de Adam
et O’connell, basé sur cinq faits stylisés relatifs aux économies africaines, l’investissement
privé total est reparti entre un projet d’investissement à faible rendement non taxé et un projet
d’investissement à haut rendement frappé par une taxe proportionnelle, t. Le gouvernement
utilise l’aide et les recettes fiscales pour réaliser un arbitrage entre les transferts (T) à une
fraction (f) favorisée de la population et la croissance économique25. Dans ce cas, le rôle des
conditionnalités selon Adam et O’connell est de favoriser des changements institutionnels
capables d’accélérer la croissance26.
25
Le fait que le gouvernement soit l’“otage” d’une fraction f de la population introduit dans le modèle des
conflits d’intérêt entre le secteur privé domestique et le gouvernement d’une part, et entre le pays aidant qui
prend en compte le bien être de la totalité de la population du pays récipiendaire et le gouvernement du pays
aidé qui choisit le taux de taxe, t, et les transferts, T, qui maximisent le bien être de la fraction f favorisée de la
population d’autre part. Médard (1982) confirme l’existence en Côte d’Ivoire d’un arbitrage entre la
“distribution particulariste de ressources publiques contre des soutiens politiques” et la croissance.
26
Selon Adam et O’connell (1997) dans les années 1980 en Afrique les pays fournisseurs de l’aide ont considéré
f comme prédéterminée et utilisé les conditionnalités pour restreindre les choix de politiques économiques t et
T –politiques d’unification du taux de change, libéralisation des échanges, privatisation,… Au cours de la
décennie suivante les conditionnalités ont aussi tenté de remodeler le processus politique, f, en préconisant
des réformes constitutionnelles, judiciaires, la liberté de la presse et la liberté syndicale….
70
Les institutions efficaces remplissent trois fonctions essentielles (Banque Mondiale, 2002) :
-une meilleure circulation de l’information sur les conditions du marché, sur les biens
et les participants; ceci facilite l’identification des partenaires, des activités à hauts
rendements, une meilleure évaluation des risques et la baisse des coûts de transaction;
-une définition et une protection renforcée des droits de propriété; ceci peut entraîner
un accroissement du niveau de l’investissement privé et faciliter l’adoption de nouvelles
technologies;
-une promotion de la concurrence; ceci entraîne la baisse de la rente des producteurs et
des prix plus faibles aux consommateurs, d’une part, et une redistribution des droits de
propriété aux agents économiques les plus efficients permettant ainsi l’augmentation de la
productivité et l’accélération de la croissance, d’autre part.
1.4. Etudes empiriques
De nombreuses études empiriques ont été réalisées pour mettre en évidence l’effet de l’aide
au développement sur l’épargne et la croissance. Les résultats portant sur différentes zones
géographiques et différentes périodes ne sont pas souvent concordants.
Reichel (1995) utilise un modèle à équations simultanées, la méthode des moindres carrés et
les données en coupe transversale représentant les moyennes des variables par pays sur la
période 1980-89. Pour 83 pays considérés comme représentatifs de l’ensemble des pays en
développement, il a trouvé que l’aide a eu un effet négatif significatif important sur l’épargne
intérieure sans affecter de façon significative le taux de croissance. Plus précisément, pendant
les années 1980 un dollar d’aide a évincé environ 0,80 dollar d’épargne intérieure sans
exercer un effet perceptible sur le revenu.
Caceres (1995) postule une fonction translog comme une représentation acceptable de la
croissance économique dans les pays d’Amérique Centrale (Costa Rica, El Salvador,
Guatemala et Honduras)27. Les régressions portant sur les données de panel sur la période
1971-86 ont mis en évidence: a) une contribution de l’épargne intérieure à la croissance
supérieure à celle des ressources extérieures; et b) une relation positive entre le niveau de
27
La fonction de production “transcendantale logarithmique” dite translog exprime le logarithme de la
production comme une fonction quadratique des logarithmes des facteurs de production.
71
développement, exprimé par le produit intérieur brut par tête à prix constant, et les élasticités
de la croissance par rapport à l’épargne intérieure et aux ressources extérieures.
Rana (1987) met l’accent sur la distinction entre l’effet direct et l’effet total des capitaux
extérieurs sur la croissance et l’épargne. Les coefficients du modèle structurel de croissance
représentent les effets directs des variables exogènes correspondantes sur la croissance et
l’épargne. Les coefficients du modèle réduit, appelés effets multiplicateurs, représentent les
effets totaux des variables exogènes sur les variables endogènes dans chaque équation.
L’effet total d’une variable exogène sur la croissance (l’épargne) comprend, en plus de l’effet
direct, l’effet indirect de cette variable sur la croissance (l’épargne) imputable à son effet sur
l’épargne (la croissance). L’effet direct et l’effet total peuvent être de signes opposés si l’effet
indirect fait plus que compenser l’effet direct.
Rana applique la méthode des moindres carrés indirects à un modèle de croissance à
équations simultanées en utilisant les données de panel sur 14 pays asiatiques entre 1965 et
1982. Il montre que pour ces pays les effets directs surestiment les effets favorables de l’aide
et des investissements privés étrangers sur la croissance et le produit par unité de capital, et
leurs effets négatifs sur l’épargne intérieure. Ses résultats indiquent que a) les investissements
privés étrangers et l’aide accroissent non seulement les ressources nécessaires à la formation
de capital mais aussi leur efficacité; et b) même si les exportations et les capitaux étrangers
contribuent à la croissance des pays asiatiques, la main-d’œuvre et l’épargne intérieure ont été
les facteurs les plus déterminants de la croissance économique.
La relation empirique entre l’aide au développement, l’épargne intérieure et la croissance
économique dans les six pays membres de la Banque Centrale du Caraïbe Orientale (BCCO)
au cours de la période 1980-95 a été analysée par Campbell (1999)28. Il forme neuf
échantillons en considérant trois groupes de pays –les pays dont le revenu par tête est inférieur
à 10.000 $ EC, les pays à revenu par tête supérieur à 10.000$ EC et l’ensemble des pays
membres de la BCCO- et en définissant trois périodes –1980-95, 1980-90 et 1985-95. La
régression de l’épargne intérieure sur l’aide au développement par la méthode des moindres
carrés généralisés montre que pour les pays à revenu par tête supérieur à 10.000$ EC le
coefficient de l’aide n’est pas statistiquement significatif et varie entre –1,5 et 0,89, tandis que
pour le groupe de pays à faible revenu et l’ensemble des pays de la zone l’aide a un effet
28
Ces pays comprennent Antigua et Barbuda, Dominique, Grenade, Saint-Kitts and Nevis, Sainte-Lucie, SaintVincent et les îles Grenadines.
72
négatif significatif plus que proportionnel sur l’épargne . L’épargne et l’aide exercent des
effets positifs significatifs sur la croissance économique pour tous les échantillons, exceptés
ceux se rapportant au groupe de pays à revenu par tête élevé où les signes des coefficients
changent d’une période à l’autre.
Les études empiriques portant sur les économies africaines utilisent généralement les données
en coupe transversale et donnent des résultats contradictoires sur l’importance et le signe des
effets de l’aide sur la croissance et l’épargne intérieure.
Levy (1988) montre que l’aide au développement exerce un effet positif significatif sur la
croissance économique par l’intermédiaire de l’investissement intérieur. Ses résultats
empiriques, obtenus à partir de modèles à équation unique, déterminent successivement l’effet
de l’aide sur l’investissement, de l’investissement sur la croissance économique, et de l’aide
sur la croissance économique dans 28 pays d’Afrique Subsaharienne ayant une population
supérieure à un million d’habitants en 1982 et dont 22 ont un revenu par tête inférieur à 600$
US au prix de 1970. Chaque dollar d’aide additionnelle entraîne une augmentation de
l’investissement compris entre 0,92 et 1,23 dollars. De plus, les données de panel sur les 28
pays donnent un taux de rendement moyen de l’investissement de 13 pour cent sur la période
1968-82 et de 16 à 17 pour cent entre 1974 et 1982. Au total, pour les 22 pays à faibles revenu
par tête, l’aide a un effet significatif positif et identique sur la croissance des secteurs de
production des biens échangés et non échangés. Plus précisément, un accroissement de l’aide
de un dollar entraîne une hausse de revenu de 0,44 dollar.
Des résultats similaires sur l’investissement sont obtenus par Levy (1987) où l’auteur montre
que le niveau de développement du pays récipiendaire a un impact positif sur le lien entre
l’aide et l’investissement d’une part, et que l’effet d’éviction de l’aide sur l’épargne intérieure
n’est pas important dans les pays africains d’autre part. Ces résultats contrastent avec les
effets directs positifs mais faibles et non significatifs de l’aide sur la croissance obtenus par
Gupta et Islam (1983) à partir d’un modèle à équations multiples. De plus, Mosley et al (1987,
op. cit) en utilisant un modèle de croissance à équation unique ont trouvé que le coefficient de
l’aide était négatif et non significatif pour les pays africains au cours des périodes 1960-70,
1970-80 et 1980-83.
73
Cet échec de la littérature empirique à apporter des réponses claires et unanimes sur le sujet
est imputable à l’utilisation de méthodologies inappropriées dans la plupart des cas et à des
modèle simplistes (Mavrotas et Kelly, 2001); à l’absence de test de spécification conduisant à
l’omission de variables pertinentes; à l’instabilité des paramètres de régression obtenus à
partir de données en coupe transversale ou de données de panel (White, op. cit.). Face à ces
difficultés des études par pays basées sur les séries temporelles ont été recommandées.
2. Relations aide-épargne-croissance en Côte d’Ivoire
Dans cette partie un modèle de croissance à équations simultanées est appliqué à l’économie
ivoirienne.
2.1. Présentation du modèle
La relation aide-épargne-croissance en Côte d’Ivoire peut être analysée à l’aide du modèle à
deux équations ci-dessous utilisé par Ahmed (1992) pour déterminer les effets de l’aide sur
l’épargne et la croissance au Bangladesh29. Ce modèle permet de déterminer les effets directs
de l’aide et des investissements directs étrangers sur l’épargne et la croissance et les effets
indirects de ces flux de ressources extérieures sur le taux de croissance (le taux d’épargne) en
passant par le taux d’épargne (le taux de croissance). Une telle spécification est conforme au
développement théorique ci-dessus selon lequel la croissance dépend de l’épargne intérieure
et l’épargne intérieure est influencée par la croissance. Ainsi le modèle formé par les
équations (1) et (2) sont exempts de biais de spécification dont souffrent les modèles à
équation unique étudiant les relations aide-croissance et aide-épargne (Gupta et Islam, op.cit. ;
White, op.cit.).
1
yt  a0  a1aidet  a2idet  a3et  a4vext  a5vmoet  a6tet  1t
29
Voir Ahmed (1992) chapitre IV. Voir aussi Rana (1987). Reichel (1995) ajoute une troisième équation qui
détermine l’aide de façon endogène par le revenu par tête considéré comme reflétant les indicateurs sociaux
et la taille du pays mesurée par le revenu total ou la population totale. En plus des deux équations déterminant
les effets de l’aide sur la croissance et l’épargne, Gupta et Islam (1992) présentent un modèle comprenant sept
équations décrivant les facteurs démographiques. Ces trois dernières études utilisent les données
transversales.
74
 2
et  b0  b1aidet  b2idet  b3 yt  b4vext  b5 pibptt  b6tet  2t
où yt est le taux de croissance du PIB réel à la date t, aide est le rapport du flux net de l’aide
publique au développement au PIB, ide est le ratio investissements directs étrangers sur PIB, e
est le ratio épargne intérieure sur PIB, vex est le rapport de la variation absolue des
exportations au PIB, vmoe est la variation absolue de la population active, te représente les
termes de l’échange, pibpt est le PIB réel par tête, 1 et 2 représentent les termes d’erreurs à
moyennes nulles et à variances constantes.
L’équation (1) est la fonction de production néoclassique traditionnelle, “augmentée” des
exportations et des termes de l’échange, dans laquelle la variation du stock de capital
(l’investissement total) est désagrégée en fonction de ses sources de financement interne
(épargne intérieure) et externes (aide au développement et investissements directs étrangers).
Cette désagrégation repose sur l’hypothèse que les diverses composantes identifiées exercent
des effets différents sur l’épargne et la croissance (Gupta et Islam, op.cit.; Islam, 1992).
L’introduction des exportations s’explique par le fait qu’elles permettent au pays de profiter
de son avantage comparatif; de mettre en œuvre des ressources oisives dans la production; de
déplacer la frontière des possibilités de production vers l’extérieur à travers la concurrence et
l’acquisition de nouvelles connaissances et technologies; une croissance rapide des
exportations peut aussi combler le déficit en devises (Ahmed, op.cit.). De plus, en Côte
d’Ivoire l’accent a été mis sur la diversification et la promotion des exportations qui ont eu un
effet favorable sur la croissance durant la période 1960-1980 (Foadé, 1999). Les termes de
l’échange décrivent l’évolution du pouvoir d’achat des exportations sur le marché
international (Sylla, 1999).
L’équation (2) est une fonction d’épargne de type keynesien dans laquelle le produit intérieur
brut par tête reflète le niveau de développement économique du pays. Selon Papanek (1972)
et Rahman (1984) les exportations de produits primaires génèrent des revenus hautement
concentrés (highly concentrated) qui ont de fortes chances d’être épargnés et représentent une
source importante de revenu fiscal et partant de l’épargne publique. Par ailleurs, une
accélération de la croissance économique accroît plus rapidement le revenu transitoire que le
revenu permanent et entraîne une augmentation du taux d’épargne (White, op.cit.).
75
La plupart des auteurs considèrent que le montant de l’aide reçue est déterminé de façon
exogène par les variables politiques et non par les besoins intrinsèques des pays récipiendaires
(Ancot et Paelinck, 1990)30. L’accent a été mis sur les variables de politique internationale
comme les alliances stratégiques, le vote aux Nations Unis; les variables
politiques
concernant le pays aidé telles que la dictature, la corruption, l’instabilité politique etc; les
motifs humanitaires et moraux comme la solidarité entre tous les hommes, mais aussi les
motifs égoïstes comme le maintien d’une zone d’influence politique, la stratégie militaire, les
intérêts économiques (accès aux matières premières, débouchés industriels, liquidation des
stocks).
Plus récemment, Lahiri et Raimondos-Mller (2000) ont présenté un modèle dans lequel la
répartition de l’aide entre les pays bénéficiaires reflète les rapports de force entre les groupes
de pression altruistes actifs dans le pays aidant. La part de l’aide allouée à un pays aidé
dépend directement de l’importance du groupe de pression qui lui est favorable dans le pays
aidant. Cette importance relative est déterminée entre autres par les niveaux relatifs de
richesse - humaine et matérielle - et d’utilité par tête, le degré d’altruisme et le nombre
d’individus favorables dans le groupe de pression.
2.2. Résultats empiriques
Les données annuelles sur l’aide au développement de 1970 à 2010 ont été collectées de
“Geographical Distribution of Financial Flows to Aid Recipients” de l’OCDE. Les autres
données proviennent des publications successives de “African Development Indicators” de la
Banque Mondiale, et des “Statistiques Financières Internationales” du Fonds Monétaire
International.
La variable indicatrice (dummy) Dt a été introduite pour déterminer l’impact de la crise
sociopolitique que la Côte d’Ivoire a connue entre 2000 et 2010. Dt est une variable
30
Une exception est le modèle de Reichel (1995). Voir note 11.
76
indicatrice de saut qui est égale à 0 pour toutes ses observations avant 2000 et 1 pour toutes
ses observations à partir de cette date. Autrement dit :
Dt  0 si t <2000
Dt  1 si t  2000.
Les équations (1) et (2) sont exactement identifiées. Leurs paramètres peuvent par conséquent
être estimés par la méthode des triples moindres carrés (Ramanatthan, 1989 ; Dor, 2009)31.
Les coefficients du modèle réduit sont ensuite calculés à partir des coefficients de la forme
structurelle selon la transformation appropriée indiquée à l’annexe 1. Le tableau 1 ci-dessous
montre que le signe des coefficients estimés est le même que celui que la théorie propose à
priori à l’exception de ceux de l’épargne et des variations de la population active dans
l’équation (1). Les variations de la population active exercent un effet indirect positif qui ne
fait que compenser partiellement leurs effets directs négatifs sur la croissance, de sorte que
l’effet total de cette variable exogène sur la croissance est négatif. Par ailleurs, les variables
exogènes du modèle ont généralement des effets indirects positifs sur l’épargne et négatifs sur
la croissance. L’effet direct et l’effet indirect sur l’épargne sont de même signe et se
renforcent, tandis que l’effet indirect négatif sur la croissance implique que l’effet total sur
cette variable endogène est inférieur à l’effet direct. Autrement dit, l’effet direct des variables
exogènes sur la croissance en Côte d’Ivoire surestime leur impact sur cette variable endogène
tandis qu’il sous-estime leur effet total sur l’épargne intérieure.
Ces résultats sont qualitativement identiques à ceux trouvés par Sylla (op.cit.) portant sur la
période 1974-95 et relatifs à l’économie ivoirienne. L’aide au développement a un impact
positif significatif sur la croissance économique et l’épargne intérieure.
Plus précisément, une hausse de 1 pour cent du ratio aide sur PIB entraîne à court terme une
augmentation du taux de croissance économique de 0,52 pour cent et une hausse du taux
31
Le test portmanteau permet d’accepter l’hypothèse d’absence d’autocorrélations des perturbations à 10, 5 et
1%.
77
d’épargne de 0,46. A long terme, ces variations s’élèvent à 0,29 et 0,50 pour cent pour la
croissance et l’épargne respectivement. Ces résultats contrastent avec ceux trouvés par
Ahmed pour le Bangladesh où l’aide a un effet direct négatif sur la croissance et l’épargne
intérieure, et un effet total positif (négatif) sur le taux de croissance (d’épargne) 32. Levy
(1984) a aussi trouvé que les flux de capitaux étrangers –dont l’aide- ont réduit l’effort
d’épargne du gouvernement et l’investissement en Egypte entre 1960 et 1978.
32
Ahmed (1992). Taslim et Weliwita (1998) ont aussi découvert une relation inverse entre l’épargne intérieure
et les flux d’aide au Bangladesh.
78
Tableau1 : Effet total et effet direct
Variables
équations de la forme structurelle
Indépendantes
(effet direct)
y=f(…)
Constantes
aide
ide
e=g(…)
-7,8123
(0,401)
(-1,112)
0,5199*
0,4607*
(4,384)
(3,731)
2,2823**
1,1121***
(2,123)
(1,917)
-
0,1303
-
vex
vmoe
e=j(…)
4,1589
-7,2704
0,2882
0,4983
1,6642
1,3289
-
-
(1,569)
-
-
-
-
-
(-2,393)
-
-
-
0,4310*
0,2663*
0,2896
0,3040
(5,677)
(4,963)
-1,311E-05
-1,708E-06
-1,057E-05
2,272E-05
-0,0260
0,2066
-
-
-1,39E-05***
-
(-1,907)
-
-
2,41E-05
-
D
y=h(...)
-0,4651**
Pibpt
te
(effet total)
0,7776
y
e
équations de la forme réduite
(0,957)
0,0701***
0,2099*
(1,655)
(6,675)
-1,1884*
2,2182
(-2,696)
(1,113)
2
R  0,8666
R  0,7901
2
t de student entre parenthèse; seuils de signification: *1%, **5%, ***10%; n=41.
En Côte d’Ivoire les investissements directs étrangers ont un effet direct et un effet total sur la
croissance et l’épargne plus importants que ceux de l’aide au développement. Les tableaux 2
et 3 indiquent que les investissements directs étrangers, suivie par les exportations et l’aide au
développement, ont le plus grand impact sur le produit marginal du capital et la plus forte
79
contribution à la croissance33. De plus, le produit intérieur brut par tête a une contribution
relative à l’épargne intérieure supérieure à celle qu’apportent collectivement l’aide, les
investissements directs étrangers et les exportations à cette variable endogène; ces variables
exogènes exercent toutes un effet positif sur la productivité moyenne du capital (tableau 3 et
annexe 2). La croissance économique a été aussi alimentée par les exportations, une
composante de la demande globale qui participent au financement des dépenses publiques
(investissements publics et dépenses courantes) par les ressources fiscales et parafiscales
qu’elles génèrent, et par des investissements directs étrangers favorisés par un code
d’investissement généreux et un espace monétaire adapté. La meilleure façon de promouvoir
l’épargne intérieure et d’accroitre l’efficacité du capital en Côte d’Ivoire consiste à relever le
revenu par tête, à accroître les exportations et le recours aux investissements directs étrangers.
Dans un contexte de faible taux d’épargne (Assemien, 1996), il est normal que la croissance
soit tirée par l’accumulation du capital (Pegatienan, 1994) dont l’accélération exige le recours
aux ressources financières extérieures (aide étrangère et emprunt commercial) et aux
investissements directs étrangers. Enfin, la chute des investissements directs étrangers entre
1979 et 1995, la faiblesse du taux d’épargne intérieure entre 1985 et 1994, et la dégradation
continue du revenu par tête entre 1979 et 1993 reflètent les difficultés économiques que le
pays a connues durant la période 1980-98. La crise sociopolitique a eu un effet négatif
significatif sur la croissance économique et un impact positif sur l’épargne intérieure.
33
La contribution relative d’une variable exogène X à la croissance (Cy) et à l’épargne (Ce) est l’élasticité des
y
X
y
et X représentent les moyennes des variables correspondantes et
et
X
variables endogènes y et e par rapport à X. Plus précisément on a
Cy 
X
e X
et Ce 
où y, e
X e
y
e
sont les dérivées par rapport
X
à X de y et e respectivement dans le modèle réduit.
80
Tableau 2 : contribution relative des variables exogènes à la croissance et à l’épargne
(elasticity multiplier)
Variables exogènes
Variables
Dépendantes
y
e
aide
ide
vex
vmoe
pibpt
0,4019
0,7388
0,3410
-0,5686
-1,0614
(2)
(1)
0,0960
0,0306
(3)
(5)
(3)
(4)
0,0495
-0,0102
(4)
(6)
te
-0,6676
(6)
(5)
0,3153
0,7341
(2)
(1)
Les chiffres entre parenthèses représentent l’ordre d’apport de la variable exogène
correspondante à la croissance et à l’épargne domestique.
Tableau 3 : Effet des capitaux étrangers et des exportations sur le produit marginal du capital
(PMK).
Variables
Effet sur le PMK
aide
ide
0,01370
0,07823
(3)
(1)
vex
te
0,01533
0,00179
(2)
(4)
Les chiffres entre parenthèses représentent l’ordre d’apport de la variable exogène
correspondante à la productivité marginale du capital.
81
Conclusion
Cette étude a déterminé l’effet de l’aide au développement sur la croissance économique et
l’épargne intérieure en Côte d’Ivoire, à l’aide d’un modèle de croissance à équations
simultanées et de séries temporelles sur la période 1970-2010. Etant donné que l’efficacité de
l’aide au développement varie d’un pays à l’autre, une telle étude permet d’éclairer et
d’orienter les décisions de politique économique. En Côte d’Ivoire, l’aide publique au
développement a eu des impacts positifs significatifs sur la croissance économique et
l’épargne intérieure entre 1970 et 2010. Les effets directs de l’aide, des investissements
directs étrangers et des exportations sous-estiment leurs impacts totaux sur l’épargne
intérieure et surestiment leurs effets totaux sur la croissance. Bien que l’aide au
développement exerce un effet positif significatif sur la croissance, apporte une contribution
relative significative à la croissance et accroît l’efficacité du capital en Côte d’Ivoire, l’étude
révèle que la meilleure façon de promouvoir l’épargne intérieure et d’accroitre le produit
marginal du capital est de relever le revenu par tête et d’accroitre les exportations et les
investissements directs étrangers.
Pour des recherches futures, l’aide publique au développement pourrait être décomposée
selon ses sources en une aide bilatérale et une aide multilatérale afin de savoir si ces
différentes composantes ont des effets identiques sur l’épargne intérieure et les performances
de l’économie ivoirienne. En outre, en plus de l’aide publique au développement et des
investissements directs étrangers, les sources extérieures de financement de l’investissement
comprennent l’aide privée, les autres emprunts publics auprès d’organismes bilatéraux et
multilatéraux obtenus à des taux non concessionnels, et les emprunts auprès des banques
commerciales privées. Enfin, ces sources de financement identifiées se rapportent à
l’investissement brut, et non à l’investissement net. La prise en compte de toutes ces sources
de financement et de la consommation brute de capital fixe rendrait le modèle de croissance
utilisé dans la présente étude plus réaliste.
82
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86
Annexe 1 : détermination des coefficients du modèle réduit.
A partir des équations (1) et (2) du modèle structurel, la forme réduite s’écrit:
yt   0   1aidet   2idet   3vext   4vmoet   5 pibptt   6tet  u1t
et  0  1aidet  2idet  3vext  4vmoet  5 pibptt  6tet  u2t
Avec :
0 
a0  b0 a3
a b a
a  b2 a3
a  b4 a3
a5
ba
; 1  1 1 3 ;  2  2
;3  4
;4 
;5  5 3 ;
1  a3b3
1  a3b3
1  a3b3
1  a3b3
1  a3b3
1  a3b3
6 
a6  b6 a3
b  a0 b3
b  a1b3
b  a 2 b3
b  a 4 b3
ab
; 0  0
; 1  1
; 2  2
; 3  4
; 4  5 3 ;
1  a3b3
1  a3b3
1  a3b3
1  a3b3
1  a3b3
1  a3b3
5 
b5
b  a6 b3
; 6  6
.
1  a3b3
1  a3b3
Annexe 2 : Effet des capitaux étrangers sur le produit marginal du capital (PMK).
En termes de moyennes des variables, les équations du modèle structurel (1) et (2) s’écrivent:
y  a0  a1 aide  a2 ide  a3 e  a4 vex  a5 vmoe  a6 tet
e  b0  b1 aide  b2 ide  b3 y  b4 vex  b5 pibpt  b6 tet
où barre au dessus d’une variable désigne sa moyenne. De plus, on a
87
Y
Y
Y
y
où K représente le stock de capital, Y est le PIB, y
PMK 
 Y  Y 

K
I
K
e  aide  ide
Y
Y
représente le taux de croissance du PIB, et I=ΔK  (e  aide  ide) représente les investissements
nets. En calculant la dérivée de PMK par rapport aux variables pertinentes, on obtient:
PMK

 aide
PMK

ide
PMK

 vex
PMK

te
e  aide  ide 
 e

y 
  y


1

  aide  e  aide  ide a  y (b  1)

aide




1
1
2
2
e  aide  ide
e  aide  ide



e  aide  ide   y   y




e
 1
 ide 
 ide   e  aide  ide a 2  y (b2  1)
2
2
e  aide  ide
e  aide  ide



e  aide  ide 
 e 
y 
  y


  vex 

vex




e  aide  ide 
2
e  aide  ide   y   yb
 te 
e  aide  ide 
2
6





e  aide  ide a  yb
e  aide  ide 
4
4
2
e  aide  ide a  yb
e  aide  ide 
6
6
2
88
REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE B - ECONOMIE / NUMERO 1 - VOLUME 2 - Décembre 2016 / pp. 89-116.
Excès de capital, croissance du crédit bancaire et cycle conjoncturel : cas de l’Union
Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA)
Salifou OUEDRAOGO,
Université Ouaga II, Ouagadougou, Burkina Faso
12 BP 417 Ouagadougou 12,
[email protected]
Résumé
Cette étude examine la relation entre le cycle conjoncturel et l’excès de capital bancaire dans
les pays de l’UEMOA. Nous évaluons les effets de l’activité économique sur le capital
bancaire et l’impact de ce dernier sur l’activité de crédit bancaire. Nous examinons aussi la
manière dont ces effets varient en fonction du cycle économique. Nous utilisons des données
de panel cylindré des banques de sept (07) pays de l’UEMOA entre 2001 et 2013 pour estimer
des équations dynamiques de l’excès de capital bancaire et du taux de croissance de crédit
bancaire. Nos résultats suggèrent que le cycle économique affecte négativement le surplus
bancaire. Ces résultats ont des implications importantes sur les discussions concernant les
règlementations du capital bancaire et sur les propositions de contra-cyclicité contenues dans
Bâle II et III que les pays de l’UEMOA doivent mettre en œuvre à partir du 01 janvier 2018.
Mots clés : Excès de capital bancaire, Pro-cyclicité, Cycle conjoncturel, équations
dynamiques, UEMOA.
Bank Capital Buffers, lending growth and economic cycle: case of West African Economic
and Monetary Union (WAEMU) countries
89
Abstract
This study examines the relationship between economic cycle and capital buffers in West
African Economic and Monetary Union (WAEMU). We evaluate the effects of economic
activity on bank capital and the impact of the latter on bank lending. We also examine how
these effects vary with the economic cycle. We use balanced panel data of seven (07)
countries between 2001 and 2013 to estimate the dynamic equations of bank capital buffers
and bank credit growth rates. Our results suggest that economic cycle negatively affects the
banking surplus. These results have important implications for the discussions of capital
regulations and on the counter-cyclicality of proposals in Basel II and III that the WAEMU
countries have to implement from 1 January 2018.
Keywords : Capital Buffers; Pro-cyclicality, Economic cycle, dynamic equations, WAEMU.
90
Introduction
L’instabilité du secteur financier, plus spécifiquement le secteur bancaire, permet de mettre en
exergue son importance pour le bon fonctionnement de l’économie. En effet, elle a contribué
significativement à l’émergence de la crise de 2007/2008.
Pourtant, les modèles macroéconomiques ont longtemps été construits sans prendre en compte
le secteur financier, en particulier, les imperfections du marché de crédit, lesquelles sont
considérées comme la cause majeure des crises économiques (Bernanke, 2007). Avec les
travaux pionniers de Bernanke et al. (1999), beaucoup de recherches se sont, par la suite,
intéressées aux imperfections du marché et son impact sur les fluctuations du cycle
économique. Leurs conclusions suggèrent que l’existence des imperfections du marché
amplifie et propage les fluctuations du cycle conjoncturel à travers l’accélérateur financier
(Liu et Seeiso, 2011).
Beaucoup de ces recherches se sont également intéressées au rôle des banques dans la
transmission des chocs monétaires et les effets de leur capitalisation dans ce processus de
transmission ont été beaucoup discutés dans la littérature contrairement à leur rôle dans la
transmission des chocs du PIB. Pourtant, les banques faiblement capitalisées peuvent
potentiellement aggraver le cycle conjoncturel. Pour maintenir leurs ratios de capital pondéré
du risque au moins au seuil requis par le régulateur, ces banques peuvent lever des fonds
propres, ou diminuer leurs actifs pondérés du risque à travers la diminution des prêts.
Dans la littérature empirique, deux approches sont utilisées pour tester ces comportements. La
première analyse les effets de la capitalisation bancaire sur la transmission des fluctuations du
cycle conjoncturel sur les prêts (Stolz et Wedow, 2011). En effet, au moment où le ratio
Cooke est entré en vigueur, dès 1990 aux États-Unis, puis en Europe en 1993, il a suscité un
débat sur ses effets potentiellement pro-cycliques. Cela résulte des dramatiques épisodes de
contractions de l’offre de crédit enregistrés dans les pays occidentaux, précédant une
récession d’une ampleur et d’une durée inhabituelle après la guerre. De nombreux travaux ont
donc été consacrés à la vérification de ce que l’on a appelé alors le capital crunch ou le credit
crunch. Depuis, d’autres travaux se sont consacrés à la vérification de ce phénomène dans les
pays asiatiques et dans les pays d’Amérique latine (Dietsch et Petey, 2008). La seconde
91
approche met l’accent sur les effets des fluctuations du cycle conjoncturel sur les excès du
capital bancaire (Stolz et Wedow, op, cit).
En 2004, l’excès de capital concernait 72,85% des banques de l’UEMOA. Ces banques
représentaient 72,9% des unités en activité, concentraient 73,2% des risques pondérés et
73,9% des dépôts collectés par le système bancaire. Ce sont 16 grandes banques, 17 banques
de taille moyenne et 18 petits établissements bancaires. En 2010, 83% des banques étaient en
excès de capital, elles représentaient 83,0% des banques en activité et concentraient 87,1%
des dépôts collectés par le système bancaire. En général, les banques maintiennent un niveau
de fonds propres au-dessus du niveau règlementaire pour envoyer un signal sur la solidité du
marché (Jokipii et Milne, 2008) et éviter de ne pas respecter les exigences en capital
minimum (Rime, 1998 ; Jokipii et Milne, 2008; Stoltz et Wedow, 2011). En moyenne, les
banques africaines détiennent des fonds propres au-delà des fonds propres règlementaires
(Giovanni et Pietro, 2011).
L’objectif de ce papier est d’identifier les facteurs explicatifs de l’excès du capital bancaire,
en particulier il s’agit d’étudier la relation entre le capital bancaire et le cycle économique, et
ses effets sur l’activité économique. Cette étude constitue un approfondissement de l'analyse
des effets de la politique monétaire dans la zone UEMOA. Cette problématique revêt une
importance particulière pour la compréhension, d’une part, du rôle et de l'incidence du
comportement des banques dans le financement des économies, et d’autre part, de la solidité
bancaire.
Dans les sections suivantes, nous aborderons la littérature relative à ces différents effets, puis
nous analyserons, ensuite, ces effets dans le cadre des pays de l’UEMOA.
1. Revue de la littérature
1.1. Cyclicité du capital, crédit bancaire et conjoncture économique : arguments théoriques
La théorie économique identifie plusieurs canaux de transmission des chocs : le canal de taux
d’intérêt, le canal des prix d’autres actifs (canal du Q de Tobin et canal de change), le canal
restreint du crédit bancaire ou canal du crédit bancaire, le canal large du crédit bancaire ou
canal du bilan, le canal du capital bancaire. Pour analyser les conséquences de la
92
réglementation bancaire ou réglementation du capital, la littérature théorique utilise le canal
du taux d’intérêt (Jorge, 2009 ; Aguiar et Drumond, 2007 ; Tanaka, 2003), les canaux restreint
et large du crédit bancaire (Van den Heuvel, 2007 ; Aguiar et Drumond, 2007 ; Honda, 2004 ;
Baglioni, 2002 ; Repullo et Suarez, 2000) et le canal du capital bancaire (Berka et
Zimmermann, 2011 ; Agénor et Da Silva, 2010 ; Meh et Moran, 2010 ; Jorge, 2009 ; Van den
Heuvel, 2008 ; Ceccheti et Li, 2008 ; Aguiar et Drumond, 2007 ; Zicchino, 2006 ; Markovic,
2006 ; Bolton et Freixas, 2006 ; Kopecky et Vanhoose, 2004a et 2004b; Chami et Cosimano,
2001 ; Thakor, 1996 ; Blum et Helwing, 1995).
Tanaka (2003), en utilisant un modèle d’équilibre général statique, montre qu’un choc de
demande positif ou choc de politique monétaire expansionniste est inefficace en période de
récession avec une baisse de l’output lorsque les exigences en capital sont sensibles aux
risques. L’effet contraire est observé en période d’expansion. Par contre, Jorge (2009)
considère ce canal et montre qu’un choc de demande négatif est efficace car il aboutit à une
variation de l’activité économique.
Malgré cette relative efficacité constatée lorsque le canal du taux d’intérêt est considéré, les
banques ont des difficultés pour transmettre les intentions de politiques monétaires aux
marchés en présence d’un choc de demande négatif (Honda, 2004). Dans ce cas, les prêts
bancaires peuvent rester inchangés (Repullo et Suarez ; Van den Heuvel, 2007) ou subir une
baisse (Van den Heuvel, 2010 ; Baglioni, 2002). Les prêts bancaires diminuent également
lorsque le choc résulte du renforcement des exigences en capital (Repullo et Suarez, 2000 ;
Honda, 2004).
La prise en compte du canal du capital bancaire amplifie les effets des chocs sur l’activité
économique (Aguiar et Drumond, 2007), c'est-à-dire, l’inflation, l’output (Cecchetti et Li,
2008), et l’investissement (Markovic, 2006). L’amélioration de l’activité économique
augmente la demande de prêts (Chami et Cosimano, 2001) et l’offre de prêts sous Bâle II
quelle que soit la forme du capital bancaire et sous Bâle I lorsque le capital bancaire est non
fixe (Zicchino, 2006). Dans le cas où ces chocs sont défavorables, ils entraînent une baisse de
l’offre et de la demande de prêts avec une possibilité de rationnement de crédit (Berka et
Zimmermann, 2011), les coûts sociaux qui en résultent peuvent être très importants (Van den
Heuvel, 2008). Ces effets sont plus importants en présence de chocs d’offre que de chocs de
demande (Meh et Moran, 2010). D’une part, en présence de chocs de demande, l’output et les
93
prix peuvent varier jusqu’à un certain seuil de contrainte de capital bancaire et de spreads de
taux. A ces seuils, l’output, les prix et les prêts bancaires restent inchangés (Blum et Helwing,
Bolton et Freixas). Mais, une réduction plus conséquente des spreads de taux peut entraîner
une baisse des prêts bancaires (Bolton et Freixas, 2006).
L’impact des chocs de demande peut également varier selon que l’on se situe dans le court ou
le long terme. En effet, à court terme, les prêts se contractent et les taux d’intérêt débiteurs
augmentent lorsque les dépôts sont assurés ou en cas de non anticipation du renforcement des
exigences en capital alors qu’à long terme, l’effet sur les prêts et les taux d’intérêts des prêts
est indéterminé. L’effet peut aussi être indéterminé, à court terme, lorsqu’on considère qu’une
partie des dépôts est assurée et l’autre partie non assurée (Kopecty et Vanhoose, 2004a et
2004b). En considérant uniquement la structure des taux, il en résulte que le rationnement du
crédit augmente lorsque les taux de court terme sont supérieurs aux taux de long terme et
inversement (Thakor, 1996). D’autre part, en présence de chocs d’offre, la prime de risque est
pro-cyclique sous Bâle I et Bâle II (Agénor et Da Silva, 2010) de même que le ratio de capital
bancaire. Spécifiquement, lorsqu’il s’agit d’un choc de productivité, l’économie peut être
soumise à une crise de crédit alors que l’offre de prêts peut augmenter même en période
récession dans le cas d’un choc d’exigence en capital (Berka et Zimmermann, 2011).
Au total, nous constatons que quel que soit le canal utilisé, les résultats peuvent être
convergents, en termes de variation de prêts bancaires, d’output et d’investissement.
Cependant, il existe une diversité de résultats lorsqu’on considère le canal du capital bancaire.
Cette spécificité peut être due à l’utilisation par ces auteurs soit, de modèles dynamiques ou
de modèles macroéconomiques simple (Zicchino, 2006 ; Chami et Cosimano, 2001 ;
Cecchetti et Li, 2008 ; Blum et Helwing, 1995 ; Agénor et Da Silva, 2010). Elle peut être dues
aussi à l’utilisation de modèles d’équilibre général (Meh et Mora, 2010 ; Van den Heuvel,
2008 ; Berka et Zimmermann, 2011 ; Markovic, 2006 ; Aguiar et Drumond, 2007 ; Bolton et
Freixas, 2006). Dans tous les cas, Markovic (2006) montre que le canal du capital bancaire est
moins important que le canal du taux d’intérêt en présence de chocs de politique monétaire
(chocs de demande) et inversement en présence de chocs d’exigence en capital (chocs
d’offre).
94
1.2. Littérature empirique
Il existe des études qui mettent l’accent sur la réduction de l’offre de crédit (la « crise de
crédit ») aux Etats-Unis dans les années 1990. D’autres études examinent de façon explicite la
relation entre les exigences des fonds propres et l’offre de crédit et celles qui étudient les
réactions du système bancaire face aux chocs exogènes.
Le premier groupe inclut les auteurs comme Peek et Rosengreen (1995), Berger et Udell
(1994), Hancok, Laing et Wilcox (1995), Hancok et Wilcox (1998). Leurs études qui
concernent les banques américaines couvrent la période 1989-1992 à l’exception de celle de
Hancok et al. (1995) qui considère la période 1984-1993. Dans l’ensemble, elles montrent
qu’en présence d’une situation défavorable, les banques diminuent leurs offres de crédit d’une
part et que d’autre part, les petites banques ou celles qui sont contraintes réagissent plus
fortement aux chocs. Cette baisse du crédit peut être due à des chocs d’offre : l’impact du
ratio de solvabilité, du ratio d’endettement (Berger et Udell, 1994 ; Hancok et al., 1995), du
durcissement des critères d’évaluation et des politiques de provisionnement des créances
douteuses, de l’imposition des actions de renforcement (Peek et Rosengreen, 1995 ; Berger et
Udell, 1994) ; des chocs de demande macroéconomique et régionale (Berger et Udell, 1994 ;
Hancok et Wilcox, 1998 ; Peek et Rosengreen, 1995). Cependant, Berger et Udell
(1994) effectuent des estimations sur deux périodes, avant et après la mise en place de Bâle I
en utilisant un modèle linéaire tandis que Peek et Rosengreen utilisent un modèle à effets
fixes, sur un échantillon partitionné. Hancok et Wilcox estiment un modèle linéaire avec une
différence première et un modèle VAR.
Le second regroupe les études de Choi (2000) ; Barajas, Chami, Cosimano (2004) ; Chiuri et
al. (2002) ; Blum et Nakane (2006). Barajas al. (2004) utilisent des données de 2893 banques
de 152 pays dans le monde sur la période allant de 1987à 2000 pour tester l’impact de Bâle I
sur les activités bancaires. Pour ce faire, ils font des estimations sur des modèles linéaires à
l’aide des méthodes des moindres carrées ordinaires, des effets fixes, des variables
instrumentales avec effets fixes. Comme Berger et Udell (1994), ils effectuent des régressions
sur deux périodes afin de mesurer les effets de l’adoption de l’accord de Bâle I. Leurs
résultats montrent que certaines régions de l’Amérique Latine comparativement aux autres
régions du monde ont augmenté plus leurs fonds propres et prêts contrairement à d’autres
95
régions. Choi G. (2000) obtient le même résultat pour les banques non contraintes par la
réglementation en Corée du Sud en estimant un modèle à effets fixe sur un échantillon de 26
banques entre 1995 et 1998. C’est également la conclusion à laquelle parvient Chiuri et al.
(2002). Ils estiment le modèle ajusté de Peek et Rosengren (1995) en introduisant des effets
fixes sur 146 banques sous capitalisées dans des pays émergents et stables et sur les banques
internationales de ces pays mais en utilisant un modèle linéaire sans effets. Blum et Nakane
(2006) trouvent des conclusions similaires en estimant un modèle d’offre de crédit sur un
échantillon de 133 banques au Brésil entre 2001-2004.
Par contre, Barajas et al. (2004) trouvent, en plus, un faible accroissement des prêts après la
mise en œuvre de cet accord parmi les pays qui ont un niveau de développement financier
plus élevé, avec un seuil de développement financier au-delà duquel le crédit décroît. Dans le
cas de la Corée, Choi (2000) conclut que le crédit diminue fortement en considérant
uniquement les banques faiblement capitalisées ou celles qui octroient des prêts aux PME.
Chiuri et al. (2002) trouvent des résultats similaires pour 426 banques sous capitalisées dans
des pays émergents au début et un (01) an après la crise mais constatent au-delà que l’effet de
la réglementation bancaire est non significatif.
Certains auteurs comme Peek et Rosengren (2000) s’intéressent aux effets des chocs exogènes
et étudient par conséquent les effets de la crise des banques japonaises dans les années 1990
sur les activités aux Etats-Unis. Cette crise a été provoquée par la baisse de l’indice NIKKEI
et par la hausse du prix de l’immobilier en fin 1989. Les banques qui possédaient beaucoup
d’actions d’entreprises japonaises et des collatéraux basés sur l’immobilier ont vu leurs ratios
de solvabilité baissé. Cette diminution est due à la baisse des fonds propres et à la hausse de la
probabilité de défaut des emprunteurs. Les banques ont réagi en diminuant les actifs pondérés
du risque à travers la baisse des investissements directs étrangers. Eu égard de l’hétérogénéité
du marché de l’immobilier aux Etats-Unis et de l’inégale pénétration des banques japonaises à
travers ces marchés distincts géographiquement, ces auteurs ont testé les effets réels des chocs
exogènes d’offre de prêts. En utilisant des données sur les banques américaines et sur les
branches des banques japonaises aux Etats-Unis installées dans trois Etats sur la période
1989-1996 (New York, Californie et Illinois), ils effectuent d’abord des estimations sur un
modèle à erreurs composées. Leurs résultats montrent une réduction des prêts immobiliers
non seulement à l’ensemble des Etats mais également à chaque Etat pris individuellement. Ils
estiment ensuite un modèle à effets fixes par la méthode des doubles moindres sur la même
période mais en considérant 25 Etats. Leurs résultats montrent que les prêts des banques
96
japonaises installées dans ces Etats ont des effets négatifs et significatifs sur le secteur réel
(projets de construction et taux de chômage). Cette étude constitue un prolongement de celle
réalisée par Peek et Rosengren (1997).
D’autres travaux analysent les chocs exogènes en se focalisant sur la cyclicité du capital
bancaire. Ils étudient soit l’ampleur du co-mouvement entre l’excès du capital bancaire et le
cycle (Ayuso et al., 2004 ; Jokipii et Milne, 2008; Stoltz et Wedow, 2011 ; Tabak et al., 2011 ;
García-Suaza et al., 2012 ; Coffinet, J. et al, 2012), soit la cyclicité du provisionnement des
pertes sur prêts (Ghosh et Nachane, 2003). Ils concluent, respectivement, à une contracyclicité du capital bancaire des pays ayant accédé à l’Union Européenne en 2004 (Jokipii et
Milne, op, cit) et des banques indiennes. Cela signifie que dans la phase ascendante du cycle
ou en période d’expansion, l’excès du capital augmente et inversement en période de
récession. Par contre, pour les banques du Danemark, de la Suède, de l’Angleterre et celles
des anciens pays de l’UE, comme la France, l’Allemagne et l’Espagne le capital bancaire est
pro-cyclique (Ayuso et al., 2004 ; Jokipii et Milne, 2008; Stoltz et Wedow, 2011; Coffinet et
al, 2012). Il en est de même des pays émergents, comme les banques colombiennes (GarcíaSuaza et al., 2012), les banques brésiliennes (Tabak et al., 2011) et les banques asiatiques
(Deriantino E., 2011). Toutefois, Ghosh et Nachane estiment un modèle de provisionnement
dynamique et statique ; Ayuso et al, Jokipii et Milne, Stoltz and Wedow et al., Tabak et al.,
Deriantino, García-Suaza et al, un modèle d’ajustement partiel ; Coffinet et al. estiment un
modèle à équations simultanées.
Cette littérature résume les réactions des banques dans différents pays du monde face à
différents chocs. Globalement, il ressort, d’une part, que les banques peuvent diminuer ou
augmenter leurs crédits lorsque la situation économique est défavorable ou en présence de
crise lorsque les exigences en fonds propres augmentent. Par contre, en situation normale ou
stable, les banques augmentent leurs offres de crédit en réponse à une hausse de fonds propres
même si les études ne précisent pas qu’il s’agit d’une période d’expansion. Il en résulte que
les études indiquent implicitement, dans l’ensemble, une faible cyclicité du crédit due à Bâle
I. C’est la conclusion également de Béranger et Teïletche (2004) qui stipule qu’« au total, le
ratio Cooke, via le numérateur du ratio, a pu avoir un caractère pro-cyclique mais peu marqué.
Cet aspect a été limité géographiquement ou à certains types d’emprunteurs » après leur
analyse de la littérature sur le « credit crunch ». D’autre part, les travaux sur la relation entre
l’excès de capital et le cycle conjoncturel étayent ces résultats sur la pro-cyclicité des
97
exigences en capital dans certaines régions et montrent également que les fonds propres
peuvent exhiber dans d’autres régions une contra-cyclicité. Dans la section suivante, nous
étofferons la littérature empirique en analysant la pro-cyclicité dans les pays de l’UEMOA.
2. Modélisation de l’excès de capital et du comportement de prêts bancaires
2.1. Déterminants du surplus bancaire
Nous avons noté précédemment que les banques préfèrent garder un niveau de fonds propres
excédant le niveau règlementaire. Ce comportement peut entraîner trois types de coûts : le
coût d’opportunité de la détention des fonds propres, le coût de défaut car la détention du
capital diminue la probabilité de banqueroute, le coût d’ajustement lié au problème
d’asymétrie informationnelle dans le marché capital lorsque la banque décide d’y lever des
fonds propres (Ayuso et al., 2004). Pour ce dernier la banque représentative minimise ses
coûts intertemporels en résolvant le problème suivant :
∞
𝑀𝑖𝑛 𝐸𝑡 ∑ 𝛽 𝑖 𝐶𝑡+1
(1)
𝑖=0
𝑠. 𝑐 𝐶𝑡 = (𝛼𝑡 − 𝛾𝑡 )𝐾𝑡 + (1⁄2)𝛿𝑡 𝐼𝑡2
(2)
𝐾𝑡 = 𝐾𝑡−1 + 𝐼𝑡
(3)
Avec
𝐶: 𝐶𝑜û𝑡 𝑡𝑜𝑡𝑎𝑙
𝐸: 𝐴𝑛𝑡𝑖𝑐𝑖𝑝𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛
𝛽: 𝑇𝑎𝑢𝑥 𝑑′𝑎𝑐𝑡𝑢𝑎𝑙𝑖𝑠𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛
𝐾: 𝑁𝑖𝑣𝑒𝑎𝑢 𝑑𝑒𝑠 𝑓𝑜𝑛𝑑𝑠 𝑝𝑟𝑜𝑝𝑟𝑒𝑠
𝐼: 𝐸𝑚𝑖𝑠𝑠𝑖𝑜𝑛𝑠 𝑜𝑢 𝑟𝑎𝑐ℎ𝑎𝑡𝑠 𝑑′ 𝑎𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠 𝛼: 𝐶𝑜û𝑡 𝑑𝑒 𝑙𝑎 𝑟é𝑚𝑢𝑛é𝑟𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑑𝑢 𝑐𝑎𝑝𝑖𝑡𝑎𝑙
𝛾: 𝐶𝑜û𝑡 𝑑𝑒 𝑑é𝑓𝑎𝑢𝑡 𝑒𝑡 𝑜𝑢 𝑝é𝑛𝑎𝑙𝑖𝑡é𝑠 𝑝𝑜𝑢𝑟 𝑛𝑜𝑛 𝑟𝑒𝑠𝑝𝑒𝑐𝑡 𝑑𝑒𝑠 𝑒𝑥𝑖𝑔𝑒𝑛𝑐𝑒𝑠 𝑒𝑛 𝑐𝑎𝑝𝑖𝑡𝑎𝑙 𝑚𝑖𝑛𝑖𝑚𝑢𝑚
𝛿: 𝐶𝑜û𝑡𝑠 𝑑′𝑎𝑗𝑢𝑠𝑡𝑒𝑚𝑒𝑛𝑡
𝑖
La condition de premier ordre donne : 𝐼𝑡 = 𝐸𝑡 (𝛿1 ∑∞
𝑖=0 𝛽 (𝛾𝑡+1 − 𝛼𝑡+1 )) (4)
𝑡
𝑖
et par conséquent, 𝐸𝑡 (𝐾𝑡 ) = 𝐾𝑡−1 + 𝐸𝑡 (𝛿1 ∑∞
𝑖=0 𝛽 (𝛾𝑡+1 − 𝛼𝑡+1 ))
𝑡
(5)
Le capital minimum règlementaire peut être soustrait des deux côtés de l’équation (5) et le
capital anticipé remplacé par le capital observé et une erreur d’anticipation pour obtenir :
1
∞
𝑖
𝑖
̅ )𝑡 = (𝐾 − 𝐾
̅ )𝑡−1 + 𝐸𝑡 ( 1 ∑∞
(𝐾 − 𝐾
𝑖=0 𝛽 𝛾𝑡+1 ) − 𝐸𝑡 (𝛿 𝐸𝑡 ∑𝑖=0 𝛽 𝛼𝑡+1 ) + 𝜀𝑡 (6)
𝛿
𝑡
𝑡
98
L’excès de capital en période t est donc expliqué par l’excès de capital en période t-1, les
anticipations des coûts de rémunérations du capital et les anticipations des coûts de défaut
et/ou des pénalités qui dépendent de l’attitude des banques à l’égard du risque et de leur taille.
A l’instar de Ayuso et al. (2004), Tabak et al. (2011), Coffinet et al (2012), nous utilisons la
différence entre le capital observé et le capital règlementaire sur le capital règlementaire
comme proxy de l’excès de capital (Buff). Comme Ayuso et al. (2004), Jokipii et Milne
(2008), Tabak et al. (2011), Coffinet et al (2012), García-Suaza et al. (2012), Deriantino
(2011), le coût de la rémunération est approximé par la rentabilité des fonds propres(roe).
L’émission d’actions sur le marché du capital est coûteuse, de ce fait, les profits non
distribués sont fréquemment utilisés pour accroître l’excès de capital. Il en résulte un impact
positif des profits sur l’excès de fonds propres optimum. Toutefois, la banque, ayant des
capacités à générer des profits, peut maintenir un faible niveau de ratio de capital juste
nécessaire pour respecter les exigences règlementaires. Dans ces conditions, le profit agit
négativement sur l’excès de capital (Stoltz et Wedow, opt, cit). Le risque de défaut des prêts
(risq) est approximé par le ratio des créances douteuses par rapport au montant des crédits
octroyés. Le risque peut avoir une influence positive ou négative sur l’excès de capital selon
que la règlementation du capital incite les banques à prendre plus ou moins de risque. La
différence entre le logarithme du total des actifs des banques d’un pays et le total des actifs
des banques de l’UEMOA est approximée par la taille des banques (Coffinet et al, 2012). La
taille relative des banques (tab) a une influence négative sur l’excès de capital. Cela est dû au
fait que les grandes banques bénéficient des économies d’échelle, des opportunités
d’investissement et de diversification et que leur faillite a des conséquences importantes liées
à leur grande taille (Stoltz et Wedow, opt, cit). Le taux de croissance du PIB réel (tpib) est
introduit comme déterminant dans le but d’examiner si le cycle conjoncturel a un effet
additionnel sur l’excès de capital détenu par les banques (Ayuso et al., 2004 ; Jokipii et Milne,
2008 ; Coffinet et al., 2012, García-Suaza et al., 2012 ; Deriantino, 2011). Il peut exister une
relation positive ou négative entre le cycle conjoncturel et l’excès de capital selon que la
banque internalise ou non les externalités négatives des exigences pro-cycliques sur la
stabilité macroéconomique (Ayuso et al., 2004). En résumé, l’équation du surplus bancaire
s’écrit :
𝑏𝑢𝑓𝑓𝑖𝑡 = 𝑏𝑢𝑓𝑓𝑖𝑡−1 + 𝑡𝑝𝑖𝑏𝑖𝑡 + 𝑡𝑎𝑏𝑖𝑡 + 𝑟𝑜𝑒𝑖𝑡 + 𝑟𝑖𝑠𝑞𝑖𝑡 + 𝜀𝑖𝑡 (2.7)
99
2.2. Comportement de prêts bancaires
Comme Van Pham (2015), nous considérons que le montant du prêt est décidé par les
banques plutôt que par les emprunteurs. Il en résulte que la variable de décision est le montant
du prêt au lieu du taux d’intérêt. Au regard de la littérature théorique, empirique et dans le but
de simuler le comportement de prêts bancaires, nous considérons l’exigence de fonds propres,
le risque de défaut du prêt, le revenu des agents économiques, le taux d’intérêt débiteur et le
taux d’intérêt des bons de trésor comme des facteurs susceptibles d’influencer l’offre de prêts
bancaires.
𝑡𝑐𝑒𝑑𝑖𝑡 = 𝑡𝑐𝑒𝑑𝑡−1 + 𝑏𝑢𝑓𝑓𝑖𝑡 + 𝑡𝑝𝑖𝑏 + 𝑡𝑚𝑚𝑖𝑡 + 𝑦𝑖𝑒𝑙𝑑𝑖𝑡 + 𝑟𝑖𝑠𝑞𝑖𝑡 + 𝜇𝑖𝑡
(2.8)
Le taux d’intérêt moyen du marché monétaire (𝑡𝑚𝑚) est un proxy du taux d’intérêt débiteur
dont l’augmentation a un impact négatif sur les prêts bancaires. Il en est de même du taux
d’intérêt moyen des bons de trésor (yield) dont la hausse incite les banques à acquérir
davantage d’actifs émis par le trésor au détriment des prêts bancaires.
3. Estimation du modèle et résultats empiriques
3.1 Estimation du modèle
Pour déterminer l’excès de capital, nous avons utilisé d’abord les données sur les fonds
propres bancaires effectifs disponibles dans la base de données de la BCEAO. Ensuite, les
fonds propres bancaires règlementaires minimum ont été calculés à partir des fonds propres
bancaires actuels, du ratio de solvabilité réel et du ratio de solvabilité règlementaire. Enfin,
l’excès de capital a été déterminé comme la différence relative entre les fonds propres
bancaires effectifs et les fonds propres bancaires règlementaires minimum.
Le taux de croissance du PIB et celui des prêts bancaires, la taille des banques, le risque de
défaut des prêts ont été calculés à partir de la base de données de la BCEAO sur le PIB, les
prêts bancaires, le total des actifs des banques et les créances douteuses. Les taux d’intérêt
moyens des bons de trésor sont collectés à partir des rapports sur la politique monétaire de la
BCEAO. Pour faciliter l’interprétation, nous avons mis toutes les variables en pourcentage.
100
Toutes les données ont été trimestrialités à partir de la méthode de Goldstein et Khan (1976).
Elles couvrent la période 2001 à 2013 pour tous les pays de l’UEMOA, soit un panel cylindré
de 364 observations.
Avant de procéder à l’estimation du modèle et à la présentation des résultats, nous testons la
présence de racine unitaire dans les différentes variables des deux modèles. Pour ce faire,
nous utilisons le test de racine unitaire sur données de panel suggéré par Im-Pesaran-Shin
(IPS) (2003).
Tableau 1 : Résultats des tests de racine unitaire
Variables
A niveau
Sans
Trend
p-value
tced
buff
tmm
yield
roe
risq
tpib
tab
Avec Trend
p-value
0.0000
0.0020
0.0000
0.0000
0.0000
0.0139
0.0000
0.0461
Nature du test
Nombre de
retard pour
les
régressions
ADF
1
1
0
0
0
1
1
2
Ordre
d’intégration
Im-Pesaran-Shin
I(0)
I(0)
I(0)
I(0)
I(0)
I(0)
I(0)
I(0)
Source : Par l’auteur à partir des données de la BCEAO (2001-2013)
Les résultats, contenus dans le tableau 1, sont obtenus à l’aide du logiciel Stata 12. Ils
suggèrent que toutes les variables sont stationnaires à niveau (avec ou sans trend).
Dans la littérature empirique, les modèles de crédits bancaires et d’excès de capital sont
estimés soit simultanément en utilisant la méthode des triples moindres carrés (Coffinet et al.,
2012), soit séparément en utilisant la méthode des moments généralisés de Blundel et Bond
(1991) ou celle de Arellano et Bover (1995) et Blundell et Bond (1998). Nous utilisons cette
dernière méthode car elle combine les équations en différence première avec les équations en
101
niveau dans lesquels les variables sont instrumentées par leurs différences premières. Cette
méthode est valide sous l’hypothèse de stationnarité des variables explicatives. Les
estimations sont faites à l’aide du logiciel Stata 12. Elles ont permis de vérifier l’inexistence
d’autocorrélation de second ordre dans la série des résidus en différences premières des
estimateurs issus des régressions de l’excès de capital bancaire (p= 0.2684 ; cf. annexes) et du
taux de croissance des crédits bancaires (p= 0.2721 ; cf. annexes). Les estimations ont
également corrigées le problème d’hétéroscédasticité.
3.2. Résultats empiriques
3.2.1. Equation de l’excès du capital bancaire
Concernant l’équation d’excès de capital (cf. tableau 2), nous trouvons un effet
significativement négatif du taux de croissance du PIB réel sur l’excès de capital des banques
au seuil de 5%. Ainsi, en période de récession économique, l’excès de capital des banques de
l’UEMOA augmente de 0.59% par trimestre et inversement en période d’expansion. Cela est
dû au fait que les banques détiennent plus de réserves de précaution lorsque la situation
économique se dégrade.
L’excès de capital bancaire augmente de 0.88% lorsque l’excès de capital bancaire retardé
augmente de 1% au seuil de 1%. Cette hausse est supérieure à celle (0.13%) observée par
Jokipii et Milne (2008) sur les banques du Danemark, de la Suède, de l’Angleterre et les
anciens pays de l’UE. Elle indique que l’impact de la cyclicité s’accroît après un trimestre.
Les coûts d’ajustement, capturés par cette variable, permettent d’expliquer les détentions
importantes d’excès de capital effectuées par les banques de l’UEMOA.
Une augmentation du risque, mesuré par le taux des créances en souffrance, de 1% a un
impact négatif et significatif sur l’excès de capital de 1.26% par trimestre au seuil de 1%. Ce
comportement est lié à une augmentation des fonds propres règlementaires lorsque les risques
des agents emprunteurs augmentent. Le risque est donc un déterminant important de l’excès
de capital.
102
Tableau 2 : Estimation du modèle d’excès de capital bancaire
Variables dépendantes
buff
Variables
constante
buff-1
Tpib
Tab
Roe
Risq
Coefficients
16.1147
0.8876***
-0.5970**
0.3716
-0.6709
-1.2639***
Probabilités
0.339
0.000
0.000
0.451
0.683
0.000
Source : Par l’auteur à partir des données de la BCEAO (2001-2013)
* indique une significativité au niveau de 10% ; ** indique une significativité au niveau de
5% ; *** indique une significativité au niveau de 1%.
Pour approfondir l’analyse, nous vérifions la significativité du cycle conjoncturel sur l’excès
de capital bancaire en période d’expansion et/ou de récession. Pour ce faire, nous définissons
une variable muette, dyBOOM, qui est égale à 1 en période d’expansion, c'est-à-dire tpib > 0,
et zéro ailleurs. Nous combinons la variable muette et un moins la variable muette avec le
taux de croissance du PIB réel. Ainsi, le coefficient de la variable muette avec le taux de
croissance du PIB réel (CYCLE1) correspond à celui de l’expansion ; le coefficient de un
moins la variable muette avec le taux de croissance du PIB réel (CYCLE2) est celui de la
récession. Les résultats contenus dans le tableau 3 suggèrent qu’en période de récession,
l’excès de capital bancaire augmente significativement (1.04%)34 alors qu’il ne varie pas
significativement en période d’expansion.
Tableau 3 : Estimation du modèle d’excès de capital bancaire en période d’expansion et de
récession
Variables dépendantes
buff
Variables
constante
buff-1
cycle1
cycle2
Tab
Roe
Risq
Coefficients
13.2419
0.8861***
-0.1262
-1.039***
0.4219
-0.7699
-1.1732***
Probabilités
0.380
0.000
0.778
0.000
0.364
0.653
0.000
Source : Par l’auteur à partir des données de la BCEAO (2001-2013)
34
Un coefficient négatif associé à la variable 𝑡𝑝𝑖𝑏(1 − 𝑑𝑦𝐵𝑂𝑂𝑀) = 𝐶𝑌𝐶𝐿𝐸2 signifie un impact positif sur
l’excès de capital bancaire. En effet le cycle est négatif en période de récession et un coefficient négatif multiplié
par une valeur négative du cycle donne un impact positif sur l’excès de capital bancaire.
103
* indique une significativité au niveau de 10% ; ** indique une significativité au niveau de
5% ; *** indique une significativité au niveau de 1%.
Ces résultats confirment notre première estimation notamment en ce qui concerne la période
de récession. Dans l’ensemble, ils semblent indiquer que l’excès de capital bancaire génère
des effets pro-cycliques.
3.2.2. Equation du prêt bancaire
Une hausse du taux du marché monétaire de 1% a un impact négatif et significatif sur les
crédits bancaires de 1.05% par trimestre. En effet, la hausse du coût du crédit occasionné sur
le marché interbancaire va diminuer le montant de crédit demandé par les banques et ces
dernières vont rationner les crédits aux agents économiques. Ce comportement est conforme
aux anticipations de la théorie économique mais contraire à celui observé par Diagne et
Doucouré (2000) dans les pays de l’UEMOA entre 1975 et 1996. En effet, ils constatent
qu’un choc du taux d’intérêt directeur (taux d’intérêt du marché monétaire) a un choc positif
sur les crédits à l’économie pendant six (06) trimestres.
Tableau 4 : Estimation du modèle de prêt bancaire
Variables dépendantes
Tced
Variables
Constante
tced-1
Buff
Tpib
Tmm
Yield
Risq
Coefficients
8.4542***
0.8207***
0.0103***
0.1606
-1.0546**
-0.4661
-0.0309
Probabilités
0.001
0.000
0.009
0.365
0.021
0.113
0.840
Source : Par l’auteur à partir des données de la BCEAO (2001-2013)
* indique une significativité au niveau de 10% ; ** indique une significativité au niveau de
5% ; *** indique une significativité au niveau de 1%.
Les résultats du tableau 4 indiquent qu’une augmentation de l’excès de capital bancaire de 1%
entraine une hausse significative du taux de croissance des prêts bancaires de 0.01% au seuil
104
de 1%. Ainsi, une capitalisation bancaire plus élevée est associée à une augmentation des
prêts bancaires mais cette implication est faible.
Dans le but de tester si la capitalisation bancaire affecte l’impact du cycle économique sur
l’activité de crédit, nous distinguons comme précédemment une période d’expansion et de
récession. Nous désignons une variable (CYCLE3) qui représente l’interaction entre une
période d’expansion et l’excès de capital bancaire et une autre (CYCLE4) dont le coefficient
est celui de l’association entre une période de récession et l’excès de capital bancaire. Les
résultats du tableau 4 suggèrent qu’en période d’expansion, une diminution de l’excès du
capital entraîne une faible baisse mais significative du taux de croissance du crédit bancaire ;
en période de récession, la hausse du surplus capital bancaire est aussi associée à une faible
hausse du taux de croissance du crédit bancaire.
Tableau 4 : Estimation du modèle de prêt bancaire en période d’expansion et de récession
Variables dépendantes
Tced
Variables
Constante
tced-1
cycle3
cycle4
Tmm
Yield
Risq
Coefficients
7.6513***
0.8025***
0.0049***
-0.0046***
-0.7911*
-0.6047**
0.0409
Probabilités
0.000
0.000
0.000
0.000
0.069
0.019
0.835
Source : Par l’auteur à partir des données de la BCEAO (2001-2013)* indique une
significativité au niveau de 10% ; ** indique une significativité au niveau de 5% ; *** indique
une significativité au niveau de 1%.
En considérant le cycle économique dans son ensemble et la période de récession, nous
identifions un effet pro-cyclique de l’excès du capital bancaire. Ces résultats sont en phase
avec ceux trouvés par Peek et Rosengreen (1995) obtenus sur les banques américaines. Ils
corroborent également ceux obtenus par Barajas et al. (2004) sur 2893 banques de 152 pays
du monde au délà d’un seuil de développement financier. Ces résultats confirment les
conclusions de Choi (2000) et Chiuri et al. (2002) respectivement sur les banques des pays
émergents et celles de la Corée du Sud.
Cependant, l’effet pro-cyclique n’est pas observé du côté du taux de croissance du crédit
bancaire car le prêt augmente en période de récession et diminue en période d’expansion.
105
Conclusion
Ce papier analyse les facteurs explicatifs de l’excès du capital bancaire, en particulier la
relation entre le capital bancaire et le cycle économique, et ses effets sur l’activité
économique en utilisant des données bancaires de sept (07) pays de l’UEMOA entre 2001 et
2013. Pour ce faire, un modèle dynamique a été utilisé pour vérifier l’effet de l’activité
économique sur l’excès de capital et un autre pour vérifier l’impact du surplus bancaire sur le
taux de croissance des prêts bancaires. L’impact du cycle économique sur le capital bancaire
et son interaction avec le capital bancaire sur le taux de croissance du crédit bancaire a
également été étudié à travers ses modèles. Ils ont été estimés à partir de la méthode des
moments généralisés d’Arellano et Bover (1995) et Blundell et Bond (1998) en contrôlant
l’hétéroscédasticité.
Les résultats indiquent qu’en période de récession économique, les banques accroissent
significativement le montant de l’excès de capital. Il en résulte donc que le capital bancaire
dans les pays de l’UEMOA est fortement pro-cyclique. En outre, les résultats suggèrent que
les crédits bancaires augmentent pendant cette période malgré la hausse du surplus bancaire.
La pro-cyclicité de la réglementation du capital actuelle suggère que la gestion du capital dans
les accords de Bâle II et III est un challenge pour les autorités monétaires car ces accords
génèrent davantage de fonds propres en période de récession au moment où les banques
cherchent à diminuer les niveaux de capital. En outre, en prenant en compte la capitalisation
bancaire dans le schéma de transmission, nous constatons que la politique monétaire a un
impact sur l’activité de crédit. Il en résulte que le capital bancaire est déterminant dans la
transmission des chocs au crédit bancaire.
Pour anticiper les risques du système bancaire et proposer des mesures de correction, les
autorités monétaires doivent utiliser des modèles pour évaluer les risques des banques pendant
un cycle d’affaire et non à un point du cycle. Elles peuvent également utiliser des coussins de
fonds propres contra-cycliques et adopter le provisionnement dynamique.
106
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110
ANNEXES
Résultats d’estimation du modèle d’excès de capital bancaire
. xtdpdsys buff tpib tab roe risq, lag(1) vce(robust)
System dynamic panel-data estimation
Group variable: pays
Number of obs
Number of groups
=
=
357
7
Time variable: annee
Obs per group:
Number of instruments =
min =
avg =
51
max =
51
320
51
Wald chi2(5)
Prob > chi2
=
= 116417.36
0.0000
One-step results
-----------------------------------------------------------------------------|
buff |
Robust
Coef. Std. Err.
z
P>|z|
[95% Conf. Interval]
-------------+---------------------------------------------------------------buff |
L1. | .8876378 .0109723
80.90 0.000
tpib | -.5970297 .1564223
-3.82 0.000
tab | .371627 .4931581
0.75 0.451
roe | -.6709221 1.642045
-0.41 0.683
-3.889271
npl | -1.263942 .1998362
-6.32 0.000
-1.655613 -.8722698
_cons | 16.11472 16.84489
0.96 0.339
.8661325
.909143
-.9036117 -.2904477
-.5949451
-16.90066
1.338199
2.547426
49.1301
-----------------------------------------------------------------------------Instruments for differenced equation
GMM-type: L(2/.).buff
Standard: D.tpib D.tab D.roe D.npl
Instruments for level equation
111
GMM-type: LD.buff
Standard: _cons
. estat abond
Arellano-Bond test for zero autocorrelation in first-differenced errors
+-----------------------+
|Order | z
Prob > z|
|------+----------------|
| 1 |-1.1724 0.2410 |
| 2 | 1.1068 0.2684 |
+-----------------------+
H0: no autocorrelation
. xtdpdsys buff cycle1 cycle2 tab roe npl, lag(1) vce(robust)
System dynamic panel-data estimation
Group variable: pays
Number of obs
Number of groups
=
=
357
7
Time variable: annee
Obs per group:
Number of instruments =
min =
51
avg =
51
max =
51
321
Wald chi2(6)
Prob > chi2
=
= 1.26e+07
0.0000
One-step results
-----------------------------------------------------------------------------|
buff |
Robust
Coef. Std. Err.
z
P>|z|
[95% Conf. Interval]
-------------+---------------------------------------------------------------buff |
L1. | .8861433 .0126879
cycle1 | -.1262017 .4473477
cycle2 | -1.039111
.17935
69.84 0.000
.8612755
-0.28 0.778 -1.002987
-5.79 0.000
.9110111
.7505836
-1.390631 -.6875919
112
tab | .4219579 .4653008
0.91 0.364
-.4900148
1.333931
1.71362
-0.45 0.653
-4.128504
2.588764
npl | -1.173262 .2085713
-5.63 0.000
-1.582054 -.7644695
roe | -.7698701
_cons | 13.24191 15.09355
0.88 0.380
-16.34091
42.82472
-----------------------------------------------------------------------------Instruments for differenced equation
GMM-type: L(2/.).buff
Standard: D.cycle1 D.cycle2 D.tab D.roe D.npl
Instruments for level equation
GMM-type: LD.buff
Standard: _cons
. estat abond
Arellano-Bond test for zero autocorrelation in first-differenced errors
+-----------------------+
|Order | z
Prob > z|
|------+----------------|
| 1 |-1.1748 0.2401 |
| 2 | 1.09 0.2757 |
+-----------------------+
H0: no autocorrelation
Résultats d’estimation du modèle de prêt bancaire
. xtdpdsys tced buff tpib tmm yield risq, lag(1) vce(robust)
System dynamic panel-data estimation
Group variable: pays
Number of obs
Number of groups
=
=
357
7
Time variable: annee
Obs per group:
min =
avg =
51
max =
51
51
113
Number of instruments =
385
Wald chi2(6)
Prob > chi2
=
= 610262.69
0.0000
One-step results
-----------------------------------------------------------------------------|
tced |
Robust
Coef. Std. Err.
z
P>|z|
[95% Conf. Interval]
-------------+---------------------------------------------------------------tced |
L1. | .8206531
buff |
.018926
.01025 .0039059
tpib | .1606127 .1773489
tmm | -1.054572 .4565003
yield | -.4661079 .2938127
npl | -.0309336
_cons | 8.454198
.153054
2.45468
43.36 0.000
2.62 0.009
0.91 0.365
.7835588
.0025945
-.1869848
-2.31 0.021
.0179055
.5082102
-1.949296 -.1598478
-1.59 0.113
-0.20 0.840
.8577473
-1.04197
.1097545
-.3309138
.2690467
3.44 0.001
3.643113
13.26528
-----------------------------------------------------------------------------Instruments for differenced equation
GMM-type: L(2/.).tced
Standard: D.buff D.tpib D.tmm D.yield D.npl
Instruments for level equation
GMM-type: LD.tced
Standard: _cons
. estat abond
Arellano-Bond test for zero autocorrelation in first-differenced errors
+-----------------------+
|Order | z
Prob > z|
|------+----------------|
| 1 |-2.1287 0.0333 |
| 2 | 1.0983 0.2721 |
114
+-----------------------+
H0: no autocorrelation
. xtdpdsys tced cycle3 cycle4 tmm yield npl, lag(1) vce(robust)
System dynamic panel-data estimation
Group variable: pays
Number of obs
Number of groups
=
=
357
7
Time variable: annee
Obs per group:
Number of instruments =
min =
51
avg =
51
max =
51
385
Wald chi2(6)
Prob > chi2
=
= 76314.46
0.0000
One-step results
-----------------------------------------------------------------------------|
tced |
Robust
Coef. Std. Err.
z
P>|z|
[95% Conf. Interval]
-------------+---------------------------------------------------------------tced |
L1. | .8024735 .0307874
26.06 0.000
.7421313
.8628158
4.10 0.000
.0025433
.0072013
cycle3 | .0048723 .0011883
cycle4 | -.0045831
.001289
tmm | -.7910857 .4347063
yield | -.6047039
npl | .0408511
.256739
.195799
-3.56 0.000 -.0071094 -.0020568
-1.82 0.069
-1.643094
.060923
-2.36 0.019
-1.107903 -.1015046
0.21 0.835
-.342908
_cons | 7.651313 1.812244
4.22 0.000
4.099379
.4246101
11.20325
-----------------------------------------------------------------------------Instruments for differenced equation
GMM-type: L(2/.).tced
Standard: D.cycle3 D.cycle4 D.tmm D.yield D.npl
. estat abond
115
Arellano-Bond test for zero autocorrelation in first-differenced errors
+-----------------------+
|Order | z
Prob > z|
|------+----------------|
| 1 | -2.346 0.0190 |
| 2 | .04737 0.9622 |
+-----------------------+
116
REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE B - ECONOMIE / NUMERO 1 - VOLUME 2 - Décembre 2016 / pp. 117-133.
Analyse empirique du lien entre croissance économique et chômage en Côte d’Ivoire
Nahoussé DIABATE
Université Alassane OUATTARA, Bouaké (Côte d’Ivoire)
[email protected]
(225) 59 45 91 47
Résumé
Cette étude avait pour objet de mesurer l’impact du taux de croissance économique sur le
chômage en Côte d’Ivoire. Pour ce faire, nous avons utilisé des données en séries temporelles
sur une période 1980-2014. Le test de cointégration a permis de découvrir une relation de
long terme entre les variables. Les résultats de l’estimation du modèle de long terme et de
court terme mettent en évidence une relation fortement négative et significative entre le taux
de croissance, le taux de croissance retardé et le taux de chômage. Le gouvernement ivoirien
doit par conséquent stimuler la production en incitant la population au travail et à travers des
investissements publics et privés nationaux et étrangers orientés vers les secteurs productifs,
avec emploi massif des mains d'œuvres locales.
Mots clés : Taux de croissance économique, chômage, test de cointégration
117
Abstract
The purpose of this study was to measure the impact of the rate of economic growth on
unemployment in Côte d'Ivoire. To do this, we used time series data over a period 1980-2014.
The cointegration test revealed a long-term relationship between variables. The results of the
estimation of the long-term and short-term model reveal a strong negative and significant
relationship between the growth rate, the delayed growth rate and the unemployment rate. The
Ivorian government must therefore stimulate production by encouraging the population to
work and through public and private investments, both domestic and foreign, directed towards
the productive sectors, with massive use of local hands.
Keywords: Economic growth rate, unemployment, cointegration test
118
Introduction
La relation entre croissance économique et chômage a été mis en évidence par la théorie
économique à travers la loi d’OKUN en 1962. Elle décrit une relation linéaire empirique entre
le taux de croissance (du PIB) et la variation du taux de chômage. Par ailleurs, elle a fait
l’objet de plusieurs études empiriques à travers le monde. En effet, Dogru (2013) dans l’union
européenne, constate qu’il existe des preuves soutenant le chômage hystérésis dans la plupart
de ces pays. Mitchell et Pearce (2010) ont également constaté qu’il y’a un sens inverse entre
le taux de chômage et le déplacement de la croissance du PIB. Cependant, le changement du
taux de chômage provoque moins d’influence sur la croissance du PIB par rapport au
coefficient de référence d'Okun. Neely (2010) a noté que les pays industrialisés avec des
marchés du travail les moins réglementés ont tendance à avoir de plus petites coefficients
d’Okun. Adanu (2007) trouve également ce coefficient comme -1,58 pour dix provinces
canadiennes.
En Afrique, certains auteurs ont vérifié la validité de la loi d’Okun. Adouka et Bouguell,
(2013) ont estimé la loi d’Okun en Algérie à l’aide de modèle ECM. Ils ont conclu dans leur
étude qu’il existe une relation inverse entre la variation du PIB réel et la variation du taux de
chômage. André et Oasis (2011) ont étudié la loi d’Okun en République Démocratique du
Congo. Généralement, ces résultats tendent à soutenir Okun. Au Ghana, les études de Baah et
Boateng (2013), à l’aide d’un modèle probit sur des données en coupe transversale sur la
période 1991- 2006, montrent l’importance des secteurs peu créateurs d’emplois qui tendent à
réduire l’intensité de la croissance économique sur l’emploi. Pour certains néanmoins comme
Ashipala et Eita (2010), l’investissement et la flexibilité des salaires réduisent le taux de
chômage en Namibie.
A l’analyse, plusieurs méthodes utilisées permettent de mettre en évidence la vérification de
la loi d’Okun. Cependant, n’y a-t-il pas d’autres études qui contrastent cette loi ? En effet,
certaines études mises en évidence dans certains pays contrastent la loi d’Okun (Moosa, 2008,
Sadiku et al., 2015). Par exemple, Moosa (2008) a examiné le cas des pays arabes. Ses
résultats montrent que la croissance de la production dans ces pays ne conduit pas directement
à la réduction du chômage. Dans son approche, Sadiku et al. (2015) à partir de quatre modèles
(différence, dynamique, ECM, et les modèles VAR) trouvent qu'il n'y avait pas de preuves
robustes concernant le lien entre taux de chômage et la croissance économique quel que soit
119
le modèle. A partir du modèle de l’ECM, ils ont conclu qu'il n'y a pas de relation à court
terme entre ces deux variables. En outre, le Modèle VAR ne conduit pas à une relation de
long terme. Par conséquent, ils peuvent conclure que le changement du taux de chômage ne
peut pas être une variable prédictive de la variation du PIB réel. Ils ne parviennent pas à
confirmer une relation inverse entre le taux de chômage et la croissance économique telle que
présentée dans la loi d'Okun. En Afrique du sud, Mosikari (2013) étudie le taux de chômage
et le produit intérieur brut. Son résultat est qu’il n’existe pas de causalité entre le taux de
chômage et la croissance du PIB. Cependant, il détecte une relation de long terme entre les
variables utilisées. Il conclut que toutes les variables ont tendance à revenir à leur position
d’équilibre. Utilisant la modélisation en output-gap, plusieurs auteurs montrent que la relation
d’Okun n’est pas vérifiée (Ashipala et Eita, 2010 ; Leballo, Moroke, 2013 ; Phiri, 2014 ;
Akanbi, 2015). Pour certains néanmoins comme Ashipala et Eita (2010), l’investissement et la
flexibilité des salaires réduisent le taux de chômage en Namibie.
Par ailleurs, avec le retour de la stabilité politique, l’économie ivoirienne a enregistré une
croissance rapide. Entre 2012 et 2015, la croissance moyenne du PIB réel par habitant a
avoisiné 6 %, contre -1,9 % entre 2002 et 2011(FMI, 2016). En même temps que le pays
connait un fort taux de chômage 9,4% 2012 en 8,91% en 2013 9,11% en 2014, le chômage
continue de demeurer un phénomène très inquiétant car il connaît un niveau non négligeable
et sévit au sein de la population active. En effet, selon l’Agence d’Etudes et de Promotion de
l’Emploi (AGEPE), les jeunes de moins de 35 ans, qui constituent plus de 64% de la
population, subissent un taux de chômage estimé à environ 25 %. Et vue l’inexistence
d’études en notre connaissance mettant en évidence le lien entre croissance et chômage en
Côte d’Ivoire, nous avons jugé opportun de vérifier l’existence éventuelle d’un lien entre
croissance et chômage. Existe-t-il une relation inverse entre la croissance et le chômage en
Côte d’Ivoire ? La loi d’Okun est-elle applicable à l’économie ivoirienne ? Pour répondre à
ces questions, la suite de notre travail est structurée comme suit : la section 1 présente les faits
stylisés sur la croissance et le chômage, la section 2 expose la méthodologie de l’étude. Quant
à la section 3, elle met en évidence les résultats de l’étude.
120
1. Faits stylisés sur la croissance et le chômage en Côte d’Ivoire
Les progrès constatés au cours des quinze premières années de l'indépendance ont fait place à
une longue période de récession, favorisée par la chute des cours mondiaux des matières
premières agricoles (café-cacao) et aggravée par divers facteurs dont la crise de 2002. La Côte
d'Ivoire reste toutefois un poids économique important pour la sous-région ouest africaine :
elle représente 39 % de la masse monétaire et contribue à près de 40 % au PIB de UEMOA
(BCEAO, 2013).
Avec le retour de la stabilité politique, l’économie ivoirienne a enregistré une croissance
rapide (graphique 1). Entre 2012 et 2015, la croissance moyenne du PIB réel par habitant a
avoisiné 6 %, contre -1,9 % entre 2002 et 2011(FMI 2016).
Graphique 1 : Niveau de croissance du PIB réel par habitant
L’accélération de la croissance s’explique principalement par une augmentation de la
productivité et une accumulation de capital. Les services du FMI estiment que de la moitié de
la croissance du PIB pendant la période 2012-15 s’explique par le résiduel de la quantification
de la croissance. Celle-ci reflète probablement un rattrapage de la demande non satisfaite et
une hausse de l’utilisation des capacités, ainsi qu’un accroissement de la productivité. Ce
dernier facteur s’explique par les mesures prises par le gouvernement pour réduire le déficit
des infrastructures, ainsi qu’améliorer la productivité agricole et le climat des affaires. Par
121
ailleurs, l’accumulation de capital est devenue positive et a représenté 0,8 point de la
croissance du PIB pendant la période 2012–15 (FMI, 2016).
Les travaux de Gakpa35 (2012) font ressortir qu’en Côte d’Ivoire , en ce qui concerne
l’efficacité des déterminants de la croissance économique, en termes de gouvernance
démocratique, on relève les investissements domestiques et le rapport des actifs liquides du
système financier ou agrégat M3/PIB influence positivement la croissance, la Stabilité
Gouvernementale, la Gouvernance Démocratique et la Gouvernance techniciste entre
positivement ont une influence positive sur la croissance économique. Le taux d’inflation, la
variable de commerce et le taux d’urbanisation influence positivement la croissance.
En même temps que le pays connait un fort taux de chômage 9,4% 2012 en 8,91% en 2013
9,11%en 2014, le chômage est un phénomène très inquiétant car il connaît une croissance
vertigineuse et sévit au sein de la population active. En effet, l’Agence d’Etudes et de
Promotion de l’Emploi (AGEPE) révèle aussi que les jeunes de moins de 35 ans, qui
constituent plus de 64% de la population, sont frappés d’un taux de chômage estimé à environ
25 %. Par ailleurs, selon les données de l’enquête de l’emploi 2012, le nombre de chômeurs
est de 986 220 personnes pour une population active totale de 10 478 370 personnes, soit un
taux de chômage de 9,4% au plan national. L’on note que le taux de chômage est plus élevé
pour les femmes (11,9%) que pour les hommes (7,4%).
Tableau n° 1 : Population active et taux de chômage selon le sexe
Population
active
Taux
Chômeurs
de
chômage (%)
Hommes
5 838 727
431 890
7,4
Femmes
4 639 643
554 330
11,9
Total
10 478 370
986 220
9,4
Source : AGEPE, à partir des données de l’EEMCI 201236
Par ailleurs, le taux de chômage croît avec le niveau de d’instruction en ce qui concerne les
diplômes de l’enseignement général. En effet, il est de 14,1% pour les titulaires du CEPE et
de 29,8% pour ceux de la maîtrise en passant par les titulaires du BAC qui ont un taux de
35
36
Réexamen des déterminants de la croissance économique en Côte D’Ivoire par (Lewis Landry GAKPA, 2012)
AGEPE, à partir des données de l’EEMCI, 2012
122
chômage de 19,8%, les non instruits ayant un taux de chômage de 6,4%. L’on observe
néanmoins que les titulaires du Doctorat ont le taux de chômage le plus faible (4%) tandis que
ceux du DEA ont un taux de chômage de 6,9%.
En ce qui concerne les diplômes techniques, l’on note que du CAP au BTS, le taux de
chômage croît avec le niveau du diplôme, à l’exception du diplôme de BEP dont les titulaires
ont un taux de chômage relativement faible (9,5%).
Le taux de chômage des titulaires du DUT (27,8%) est plus faible que celui des titulaires du
BTS (35,7%) mais plus élevé que celui des ingénieurs (21,3%). Il est de 23,9% pour les
titulaires du DESS et de 42,9% qui constitue le taux de chômage le plus élevé pour les
titulaires du master. L’on note également que les relations personnelles sont dominantes
comme modalité de recherche d’emploi des chômeurs (68,7%), davantage pour les
demandeurs d’emploi (70,6%).
2. Méthodologie
Deux sous-sections feront l’objet de cette partie. Il s’agit du modèle de base et du modèle de
détermination de la production potentielle.
2.1. Modèle de base
Le modèle empirique utilisé pour examiner la loi d'Okun est généralement :
ut   0  1 y t   t
(1)
Où ut et y t sont les variations du taux de chômage et de la production, respectivement, et εt un
terme d'erreur. Étant donné les décalages temporels impliqués dans la relation, des études
antérieures (Weber 1995 ; Sögner, Stiassny, 2002) ont montré qu'il est préférable d'inclure des
dynamiques supplémentaires dans l'équation et donc pour estimer:
ut   0  1 y t   2 y t 1   t
ut   0  1y t  (1   2 ) y t 1   t
(2)
(3)
L’effet de court terme de la croissance sur le chômage est capté par 1 et l’effet total est
déterminé par 1   2 . Ces coefficients sont désignés sous le nom d'effet court et total
d’Okun, respectivement. Comme l'a souligné (Sögner, Stiassny, 2002), cette spécification de
123
décalage distribué réduit le biais de simultané de l'effet total de la production sur le chômage
lorsque la croissance de la production est positivement autocorrélée. C’est ce modèle qui sera
appliqué au cas de la Côte d’Ivoire.
2.2. Modèle de détermination de la production potentielle
La production potentielle peut être évaluée par l’une de trois méthodes suivantes : soit par les
méthodes statistiques d’extraction de la tendance, soit par les indicateurs directs de l’écart de
production, soit par la méthode structurelle.
La production potentielle peut être définie par la forme suivante :
Log (Y /N)=f (inf, gov, tot,inv)
(4)
Où Y : PIB par tête, N: population totale par année, inf : taux d’inflation, gov : dépense
gouvernementale en pourcentage de PIB, tot : terme de l’échange, inv : le taux
d’investissement.
Nous supposons que la relation (8) est linéaire, cela nous permet d’écrire celle-ci :
Log (Y/N)t=  0 +  1inft+  2govt+  3govt+  4tott+ Ԑt
(5)
Où :  1,  2,  3,  4 des paramètres à estimer et Ԑt est le terme d’erreur.
Economiquement, nous attendons un signe positif pour  1,  3,  4 et un signe négatif pour
 2.
2.3. Source de donnée
Les données de cette étude proviennent de la banque mondiale et du FMI. Le tableau suivant
met en évidence cette source de données.
124
Tableau 2: Présentation de la source des données
Variables
Description
Y
Produit
Inf
Source
intérieur WID,
Signes attendus
Banque Signe positif
brut
mondiale, FMI
taux d’inflation
WID,
Banque Signe positif
mondiale, FMI
Gov
dépense
WID,
Banque Signe négatif
gouvernementale en mondiale, FMI
3.
pourcentage de PIB
Tot
terme de l’échange
WID,
Banque Signe positif
mondiale, FMI
Inv
taux
WID,
Banque Signe positif
d’investissement
mondiale, FMI
Résultats37
Nous présenterons les tests de racine unitaires et de cointégration puis les résultats de
l’estimation du modèle à long et court terme.
3.1. Tests de racine unitaires et de cointégration
Toutes nos séries sont intégrées d’ordre 1 car elles sont stationnaires en différence première,
sauf la variable inflation qui est stationnaire à niveau. Ce qui nous pousse à étudier la relation
de long terme.
37
Les résultats concernant relatifs au modèle de détermination du taux de change réel d’équilibre sont présentés
en annexe.
125
Tableau 3 : Résultat des tests de stationnarité
Variable
ADF
PP
Décision
Log (Y/P)
-1,458145
-0,691727
H0
(0,8237)
(0,9657)
-4,075776
-4,075495
(0,0156)
(0,0156)
-4,777384
-4,791152
(0,0027)
(0,0026)
-2,841470
-2,660675
(0,1933)
(0,2581)
-7,529365
-7,529365
(0,0000)
(0.0000)
-1,422804
-1,785266
(0,8346)
(0,6897)
-4,424503
-5,957494
(0,0070)
(0,0001)
-2,923686
-2,856712
(0,1680)
(0,1884)
-5,747238
-7,642347
(0,0002)
(0,0000)
-3,305473
-2,188352
D (Log(Y/P))
Inflation
Taux d’investissement
D (Taux d’investissement)
Terme de l’échange
D (Terme de l’échange)
Dépenses gouvernementales
D (Dépenses gouvernementales)
Taux de chômage
H1
H1
H0
H1
H0
H1
H0
H1
H0
126
D (Taux de chômage)
(0,0830)
(0,4806)
-3,305
-3,640
(0,0067)
(0,0101)
H1
Sources : Calculs des auteurs à partir de logiciel Eviews 9
Ce résultat nous invite à tester l’existence éventuelle d’une relation de cointégration. Il
convient donc de déterminer le retard optimal du modèle et celui de chaque variable du
modèle (Tableau
4).
Tableau 4: détermination du retard optimal
Lag
LogL
0
LR
FPE
AIC
SC
HQ
-397.4575 NA
26958.99
24.39136
24.61811
24.46766
1
-297.5168
63.5394*
93.1129*
19.84950
1.20996*
0.30725*
2
-270.9920
35.36629
298.9006
9.75709*
22.25127
20.59631
(*) Indique le niveau de retard optimal retenu par le test.
Source : Calcul des auteurs à partir du logiciel Eviews 9
D’après les résultats du tableau 4, nous pouvons considérer qu’il existe une seule relation de
cointégration entre les quatre variables. Les résultats du test de la valeur propre maximale sont
en accord avec cette conclusion.
Tableau 5:Résultat du test de cointégration
Critical value
Lower Bound Value
Upper Bound Value
1%
3,29
4,37
5%
2,56
3,49
10%
2,2
3.09
5,526676
127
Note: Computed F-statistic: 5.700 (Significant at 0.05 marginal values).Critical Values are
cited from (Pesaran et al., 2001), Table CI (iii), Case 111: Unrestricted intercept and no trend.
Les résultats de ce test montrent que la valeur calculée de la statistique de Fisher (5,526) est
supérieure à la borne supérieure de la valeur critique tabulée au seuil de 5%. On rejette donc
l’hypothèse nulle d’absence de Cointégration.
Les résultats de nos estimations confirment la relation de long terme, la force de rappel étant
négative et statistiquement non nulle. En plus, la p-value associée à la statistique de Fisher
indique que notre modèle est globalement significatif au seuil de confiance de 95%. Et aussi,
les variables exogènes du modèle expliquent à 85% l'évolution du PIB par habitant.
A présent, nous allons procéder au test de validation de notre modèle. Nous avons obtenu la
relation de long terme suivante par les moindres carrées ordinaires (MCO):
.
u  0,2627  0,2294 y t
(0.0581)
(0.0485)
 0,3978 y t 1   t
(0.0461)
Le modèle est globalement valide avec une F-stat égale à 181,192 et la p-value associée est
nulle. Le modèle pris dans son ensemble est donc significatif au seuil de 5%.
Pour notre modèle, les variables indépendantes expliquent à 97,58% et 97,03% le
comportement du PIB réel par tête de la Côte d’Ivoire; car R2 et R2 ajusté sont respectivement
de 0,975766 et 0,970381. Les valeurs t de student nous montrent que la croissance de la
production est significative au seuil de 5%.
Après avoir estimé l’équation de long terme par les MCO, deux séries de tests on été
effectuées : les tests d’hypothèse sur la qualité du modèle et les tests de stationnarité sur les
résidus.
Le test de normalité de Jacques-Berra (1984) sur les résidus nous permet de conclure quant à
la normalité des erreurs puisque la statistique est inférieure à 5,99 (J-B=4,96). Le test
d’hétéroscédasticité de White (1980) nous permet d’accepter la décision d’homoscédasticité
des erreurs. La P-value est supérieure à 0,05 (0,39) pour le modèle. La statistique de Durbin
Watson (1950) de 2,19 nous amène à conclure que les erreurs ne sont pas corrélées. Le test de
stabilité de CUSUM et CUSUM carré qui a été mené avant correction d’erreur pour
128
autocorrélation nous permet de dire que l’équation de long terme est stable puisque la courbe
représentative se trouve à l’intérieur du corridor.
16
12
8
4
0
-4
-8
-12
-16
86
88
90
92
94
96
98
00
CUSUM
02
04
06
08
10
12
14
5% Significance
Graphique 2: Test de CUSUM appliqué aux coefficients du modèle
Nous observons sur la graphique 2 que le CUSUM est à l’intérieure de corridor. Ce test nous
permet de dire que la relation est stable. Nous avons le même résultat avec le Test de CUSUM
carrés comme le confirme le graphique suivant.
1.4
1.2
1.0
0.8
0.6
0.4
0.2
0.0
-0.2
-0.4
86
88
90
92
94
96
98
00
CUSUM of Squares
02
04
06
08
10
12
14
5% Significance
Graphique 3 : Test de CUSUM carrés appliqué aux coefficients du modèle
Le pouvoir explicatif dans notre modèle est de 97%, cela nous permet de dire que le taux de
croissance de la production explique fortement la variation du chômage durant la période
d’étude. D’après l’étude statistique que nous avons traitée, nous pouvons conclure que notre
modèle est globalement satisfaisant.
Une relation de cointégration est une relation d'équilibre de long terme. Mais à court terme, il
peut y avoir des déséquilibres. L’estimation du modèle à correction d’erreur par les MCO
donne le résultat suivant:
129
.
u  0,5218  0,3610 y t 1  0,1628 y t 1  (-0,62)RESID t -1   t
(0.0427)
(0.0524)
(0.0427)
(0.0241)
Nous voyons que tous nos coefficients sont significatifs aux seuils de 5%. Le modèle est
globalement significatif aux seuils de 5% et les variations à court terme du taux de chômage
sont expliquées à hauteur de 69% par les variables utilisés sur la période de l’étude. Aussi,
l’estimation de cette relation montre qu’à court terme le taux de croissance
impacte
négativement le taux de chômage.
Nous constatons aussi que le coefficient associé à la force de rappel est négatif (-0,62) et
significativement différent de zéro au seuil statistique de 5% (la p-value associée à son t de
student est inférieur à 0,05). Il existe donc un mécanisme à correction d’erreur. Ce mécanisme
indique la convergence des trajectoires de la série des taux de chômage vers la cible de long
terme. Par ailleurs, les résultats des tests d’hypothèses concluent en la robustesse du modèle.
Conclusion et recommandations
Cette étude s’est portée sur le lien entre la croissance économique et le chômage en Côte
d’Ivoire et elle avait pour objet de mesurer l’impact du taux de croissance économique sur le
chômage en Côte d’Ivoire. De façon spécifique, il s’agissait d’estimer la relation empirique
entre les variations de la production et les variations du taux de chômage en Côte d’Ivoire en
utilisant la loi d’Okun. Pour ce faire, nous avons utilisé des données en séries temporelles sur
une période 1980-2014. Le test de cointégration a permis de découvrir une relation de long
terme entre les variables. Les résultats de l’estimation du modèle de long terme mettent en
évidence une relation fortement négative et significative entre le taux de croissance, le taux de
croissance retardé et le taux de chômage. Le modèle de correction d'erreur (ECM) a montré
qu’il y’a une relation de court terme entre les variables. A court terme, les taux de croissance
et le taux de croissance retardé impactent négativement le taux du chômage en Côte d’Ivoire.
Ce résultat permet de conclure qu’il y’a une relation inverse entre le chômage et la croissance
de la production à court et à long terme. Les signes négatifs (-), attendus, pour le taux de
croissance autour de son taux naturel est vérifié et les résidus sont aussi bien confirmé à
court. Cela signifie qu'en Côte d’Ivoire, les variations du taux de croissance du produit
intérieur brut autour de son produit potentiel en pourcentage est une fonction décroissante ou
130
négative de la variation du taux de chômage autour de son taux naturel. Aussi, cela confirmet-il qu’il existe une relation négative entre les variations du taux de croissance et la variation
du taux de chômage. Ce qui permet de conclure que la loi d’Okun est applicable en côte
d’Ivoire. Ce résultat est conforme à ceux de Beaton (2010), Mitchell et Pearce (2010), Adanu
(2005), Adouka et Bouguell (2013). Le gouvernement ivoirien doit par conséquent stimuler la
production en incitant la population au travail et à travers des investissements publics et
privés nationaux et étrangers orientés vers les secteurs productifs, avec emploi massif des
mains d'œuvres locales. Par ailleurs, nos résultats sont contraires à ceux de Moosa (2008),
Sadiku et al. (2015).
131
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133
REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE B - ECONOMIE / NUMERO 1 - VOLUME 2 - Décembre 2016 / pp. 134-161.
L’hypothèse du revenu permanent extérieur et l’investissement : le cas de la Côte
d’Ivoire
Denis Joël Tongnivi FOADE
Université Félix HOUPHOUET-BOIGNY, Abidjan (Côte d'Ivoire)
08 BP 1716 Abidjan 08 (Côte d’Ivoire)
[email protected]
Résumé
L’objet de cette étude est d’une part de définir, mesurer, apprécier le revenu permanent
extérieur et d’autre part, intégrer ce revenu à la politique économique voire la politique des
investissements.
Aussi n’est-il pas possible de faire du revenu permanent extérieur un revenu potentiel
d’équilibre de long terme comme stabilisateur de croissance en vue de son maintien ou sa
consolidation pour atténuer les chocs extérieurs.
Mots-clés : revenu permanent, investissement, planification, croissance économique
JEL Classification : F40, F41, F43
134
Abstract :
The purpose of this study is firstly to define measure, assess the external permanent income
and other, integrate this income with economic policy or investment policy.
Also it is not possible to make the Standing outside income potential of long-term equilibrium
as a growth stabilizer income for its maintenance or consolidation to mitigate external shocks.
Key words : permanent income, investment, planification, economic growth
JEL Classification: F40, F41, F43
135
Introduction
Dans tous les pays notamment en développement, l’État est conduit à jouer un rôle essentiel
dans le processus de formation de capital, indispensable à la croissance économique en raison
de la réalisation de certains investissements. Cette perspective pousse l’État à disposer des
ressources d’origines externe et interne.
L’hypothèse du revenu permanent extérieur et l’investissement dans l’économie ivoirienne est
l’objet de notre étude. Celle-ci s’intéresse aux revenus extérieurs comprenant les recettes
d’exportation et le financement extérieur ou épargne extérieure. Toutefois, les importantes
fluctuations de ces revenus peuvent compromettre la maîtrise de la politique des
investissements et par suite, la direction de la politique économique globale voire le
développement économique. Aussi fait-on de l’hypothèse du revenu permanent extérieur, un
revenu potentiel d’équilibre de long terme comme stabilisateur de croissance pour cerner
l’expansion économique en vue de son maintien ou sa consolidation pour amortir les chocs
externes. Nos préoccupations tournent alors autour de deux questions : (i) Comment définir,
mesurer, apprécier le revenu permanent extérieur? (ii) Comment l’intégrer à la politique
économique, notamment à la politique des investissements?
L’intérêt de la notion de revenu permanent est d’être, un instrument de précision,
d’exploration économique, exempt de fluctuations perturbatrices. Ledit revenu sera un
amortisseur devant jouer un rôle prépondérant dans l’étude de la demande d’investissements.
La Côte d’Ivoire, dès son indépendance, a été confrontée à un problème crucial de
développement comme tous les pays africains issus des anciennes colonies. L’objectif fut de
promouvoir, le processus de croissance économique avec un moyen sûr de financement
régulier des investissements. Ainsi, nous avons assisté dès 1960 à l’entrée massive de
capitaux d’origines diverses. Cette situation a permis à la Côte d’Ivoire de connaître une
croissance économique très rapide -1960 : 140.0 milliards F CFA de revenu national brut;
1970 : 402,3 milliards F CFA de revenu national brut; 1980 : 1149,8 milliards F CFA; 1990 :
2939,3 milliards F CFA ; 2000 : 7630,2 milliards F CFA; 2010 : 12324,7 milliards F CFA
2014 :16935,5 milliards F CFA soit une augmentation annuelle de 15,49 % de 1960 à 2014,
favorisant ainsi le niveau de vie de la population.
136
Cette évolution favorable est due à un volume très élevé des investissements. Tous ces grands
travaux ont été presque financés sur les ressources d’origine externe qui comprennent d’une
part les recettes d’exportations et d’autre part l’épargne extérieure. L’ensemble de ces
ressources qualifié de revenu extérieur représente les principales sources d’accumulation et de
financement de l’expansion économique. Les résultats tirés de cette croissance ont été fort
remarquables : (i) de 1960-1970, on a enregistré en moyenne par an un taux de croissance de
7.2%; (ii) de 1970-1975, le revenu national par tête a cru à un rythme de 9.8% en moyenne
par an.
La portée de l’action du développement économique ne s’appréhende pas seulement à travers
les simples mesures statistiques mais une solution des structures économiques en est encore
un autre aspect positif. En effet, au départ, les structures sont fragmentées selon l’expression
de McKinnon (1991). En outre, du fait de la désarticulation et de la désintégration, ces
structures sont nées de l’héritage colonial et entretiennent une dualité à la fois sectorielle et
régionale. Au plan régional, la dichotomie se caractérise par la concentration des richesses
matérielles et immatérielles à Abidjan au détriment de l’intérieur du pays. Au plan sectoriel,
l’effort était surtout porté sur le secteur moderne constitué de l’agriculture d’exportation
fondée sur quelques produits (café, cacao, bois, hévéa, noix d’acajou, etc.) et de quelques
unités d’import-substitution en défaveur du secteur vivrier.
La problématique du développement est de pouvoir réaliser, réunir les bases fondamentales de
la croissance, liées aux retournements
de structures à partir de l’intégration de la
modernisation et de la diversification des secteurs d’activité économique.
Le problème que nous cherchons à résoudre en Côte d’Ivoire est de créer et de moderniser les
structures de production agricole et industrielle, de construire une infrastructure économique
et sociale adéquate, d’opérer de profondes transformations administratives, sociales,
politiques et économiques du pays. C’est dans ce cadre que l’on peut expliquer l’importance
de la politique des investissements entreprise dans le pays depuis son indépendance.
En 1960, le niveau des investissements était de 20 milliards de FCFA ; en 1970, il se situait
aux alentours de 91,3 milliards de FCFA. Au cours de la période (1980-2010), on a enregistré
en moyenne par an 838,2 milliards de FCFA dépensés dans le domaine des investissements.
137
La notion de conjoncture, en Côte d’Ivoire, étant presque inexistante. L’investissement bien
structuré est un instrument de régulation économique et un moyen de briser une organisation
traditionnelle et stationnaire et de lui substituer un nouveau visage dynamique. A cet objectif
d’investissement correspond celui de leur financement. Celui-ci est une donnée fondamentale
des économies en développement, en particulier de la Côte d’Ivoire qui cherche à sortir plus
vite du sous-développement. L’épargne nationale est très insuffisante, compte tenu du niveau
bas des revenus et du manque d’information de la population.
En Côte d’Ivoire, le recours au financement extérieur sous toutes ses formes s’impose. Or,
dans ce domaine encore et malheureusement, l’entrée des capitaux n’est ni automatique ni
régulière alors que la sortie est presque toujours assurée. C’est dire que les ressources
d’investissements qui, pour la plupart relèvent des exportations et du financement extérieur et
qui, comme telles sont appelées recettes extérieures sont très hypothétiques, très aléatoires et
traduisent aussi le caractère souvent discontinu et instable des investissements ou de la
politique des investissements.
Les recettes d’exportations qui constituent les principales sources sont fluctuantes à cause de
l’instabilité des marchés et des cours de matières premières. Pour lutter contre cet aléa en
matière de politique des investissements et qui par ailleurs sont un élément de blocage de la
croissance économique, la Côte d’ivoire a opté très tôt pour la programmation de ses
investissements dans un cadre global, plus cohérent et plus dynamique de planification
économique dont la finalité serait l’équilibre spatial et social du pays. En outre, après la crise
post électorale de 2011, les nouvelles autorités ont créé un cadre règlementaire pour stimuler
les investissements. A cet effet, le 6 septembre 2012 est créé le CEPICI (centre de promotion
des investissements en Côte d’Ivoire) pour promouvoir les investissements en direction de ce
pays. En outre, un guichet unique pour la formalité de création d’emplois, un tribunal du
commerce ainsi qu’une plateforme d’échange entre secteurs publics et privés pour centraliser
les appuis des partenaires au développement à l’environnement des affaires ont été créés.
Dans le cadre du processus de planification, les ressources provenant de l’extérieur vont être
déterminantes pour permettre l’équilibre financier global de la Côte d’Ivoire. L’ensemble de
ces ressources définies comme revenu extérieur est très aléatoire et exige dans ce cas,
beaucoup de prudence en matière d’investissement et de planification économique. Mais
n’existe-t-il pas un revenu permanent extérieur d’équilibre, analogue au revenu permanent de
138
Friedman? Si oui, y-a-t-il une corrélation entre ce revenu et l’investissement? Dans quelles
mesures peut-on alors utiliser cette corrélation si elle existe, pour prévoir l’évolution de la
croissance économique ?
Ce sont là, autant de questions qui justifient cette étude que nous articulerons autour de deux
points : 1. Mise en évidence de la relation entre revenu permanent extérieur et
l’investissement 2. Implication du revenu permanent extérieur dans la politique économique.
1. Mise en évidence de la relation entre revenu permanent extérieur et investissement
L’investissement, du point de vue de l’analyse économique est un élément déterminant de la
croissance économique. Il se traduit par une augmentation de la capacité de production. C’est
aussi une addition apportée en bien d’équipements corporels ou incorporels au patrimoine des
agents économiques pendant une période déterminée. Il entraîne tout le potentiel de l’activité
économique du pays.
L’investissement pris en considération est la formation brute de capital fixe (y compris les
variations de stocks) est réalisé année par année par l’ensemble des agents économiques.
Nous tenterons d’appréhender le revenu permanent extérieur et l’investissement par des
approches théorique et économétrique.
1.1. Approche théorique
Cette approche s’oriente sur deux directions essentielles. La première sera celle qui présente
les différentes analyses du revenu permanent telles qu’elles sont admises par les différents
auteurs, chacun selon sa préoccupation. Nous formulerons ensuite un essai spécifique du
revenu permanent extérieur dans le cas de la Côte d’Ivoire et mettrons en évidence ses
liaisons avec la politique d’investissement.
1.1.1. Le concept du revenu permanent et sa place dans la littérature économique
Le concept de revenu permanent
La base fondamentale de cette théorie se situe dans « les nouvelles théories de la
consommation». On se place dans le cadre temporel de la vie de l’agent et on recherche quelle
est la consommation choisie à partir de l’image qu’on se fait de la répartition de son revenu.
139
La réponse à cette question est qu’on maximise un index d’utilité inter-temporel sous la
contrainte de richesses actualisant tous les revenus futurs (toute chose étant égale par ailleurs).
Formellement, on écrit :
MaxU (c0 , c1 ,
, cn )  h
(1)
sous contrainte de :
n
c0  
t 1
où
n
ct
1  i 
t
 R0  
t 1
Rt
1  i t
(2)
U c0 , c1,..., cn  est l’index d’utilité inter-temporel, i le taux d’actualisation et (R0, R1, …,
Rn) la répartition inter-temporelle des revenus.
La théorie du revenu permanent est une application de cette analyse. Le concept du revenu
permanent est par conséquent fondé sur l’analyse microéconomique du comportement de
consommation. Ce concept envisage la consommation dans le cadre de l’allocation des
revenus de l’individu pour la durée entière de sa vie ou pour un horizon économique donné. Il
en résulte que l’idée fondamentale de cette hypothèse du revenu permanent est que, le
consommateur prévoit ses dépenses non sur la base du revenu encaissé lors de la période
courante mais, en fonction du revenu qu’il pense toucher à long terme ou pendant toute la
durée de sa vie.
La théorie du revenu permanent a été une arme redoutable contre la stabilité à court terme de
la fonction de consommation keynésienne. Elle est un apport inestimable pour notre
appréhension du comportement économique.
Selon Ferber (1976), ce concept fait appel aux conceptions pré-keynésiennes qui mettent
l’accent sur l’importance de la richesse et des taux d’intérêt car le revenu permanent
représente un flux de richesses humaines et matérielles.
On trouve deux théories mais nullement contradictoires après la percée keynésienne dans la
nouvelle formulation de la théorie classique du comportement du consommateur et de la
fonction de consommation. La première est due à Modigliani, connue sous le nom
d’hypothèse de Cycle de vie. La deuxième est l’hypothèse de revenu permanent de Milton
Friedman.
140
Cet article s’appuie sur l’hypothèse du revenu permanent de Milton Friedman. Pour ce
dernier, le terme usuel de revenu courant sera utilisé pour des motifs statistiques. Il ne
correspond au concept théorique du revenu permanent. Celui-ci est la part de la richesse qu’un
individu ou qu’un agent économique pourrait consommer en maintenant sa richesse intacte.
Si nous appelons i le taux d’intérêt et
wt la valeur des ressources totales à l’instant t, le
revenu permanent y p ,t à cette même période est le revenu qui sert aux décisions des
individus.
y p ,t  iwt
3
D’un point de vue théorique, cette richesse peut s’écrire sous cette forme :
Wt  y0 
yn
y1
 ... 
,
1 i
1  i n
Avec n , dernière période entrant dans l’horizon économique du sujet considéré et y est le
revenu observé, la théorie du revenu permanent résulte de la convergence de deux idées :
- le revenu d’un agent qui évolue de manière imprévue, entraîne la consommation à suivre
instantanément et de façon proportionnelle à ce mouvement;
- la consommation de l’époque t dépend de la période t  1 .
Ces idées ont été formalisées par Friedman (1957) dans « A theory of the consomption
function.» L’auteur fait une distinction entre le revenu mesuré qui est le revenu perçu et le
revenu permanent entendu comme le revenu qui ne tient pas compte des fluctuations
aléatoires et sur lequel est fondé le comportement de consommation. L’hypothèse de revenu
permanent permet d’expliquer les apparents paradoxes de la théorie du consommateur tels que
la constance de la propension marginale globale à consommer. Pendant les cent dernières
années, Milton Friedman montre que si les revenus augmentent, la propension marginale en
coupe instantanée augmente.
Selon le professeur Friedman, le revenu permanent est considéré comme une moyenne
géométrique pondérée des revenus passés et présents. A cet effet, trois points essentiels
méritent d’être considérés :
- la consommation permanente est proportionnelle au revenu permanent;
- le facteur de proportionnalité est constant;
- le revenu permanent est une répartition inter-temporelle des revenus actualisés.
141
Le comportement fondamental des consommateurs individuels ne peut s’appliquer en termes
de consommation actuelle et de revenu actuel. D’une manière formelle, on écrit :
C  C p  Ct 5
Y  Y p  Yt 6
Où C = consommation courante ou observée; C p = consommation permanente; Ct 
consommation transitoire; Y  revenu courant ou observé; Y p  revenu permanent; Yt 
revenu transitoire. Les composantes permanentes de C p et Y p sont les facteurs déterminants
des ressources totales du sujet économique. Les composantes transitoires C t et Yt sont les
éléments accidentels résultant du hasard, des fluctuations cycliques de l’activité économique.
L’une des propositions intéressantes de cette théorie est que la consommation permanente est
proportionnelle au revenu permanent :
C p  k i, w, u Yp
7
Où k est la propension marginale à consommer (PmC) qui dépend du taux d’intérêt i  , du
rapport des actifs non humains au revenu permanent w et des facteurs démographiques,
économiques u  . Les grandeurs permanentes et transitoires ne sont pas directement
observables, Friedman pose une série d’hypothèses qui sont indépendantes des précédentes :
les coefficients de corrélation entre le revenu transitoire et la consommation transitoire sont
nuls :
CovYp , Yt   CovC p , Ct   CovCt , Yt   0 avec Cov  covariance.
Il vient que le revenu permanent selon Friedman est une partie de la richesse que l’individu
pourrait consommer en maintenant intacte sa ressource totale. Celle-ci est une relation
actualisée d’une répartition inter-temporelle des revenus.
Le problème est que les ressources totales restent intactes sur la durée de la vie en ce sens que,
le sujet économique peut consommer à la période ө une partie de ses actifs non humains s’il
prévoit que les revenus des actifs humains sont croissants et laissant constante la valeur de ses
ressources totales, d’origine humaine et non humaine.
Ce comportement transitoire est modifié avec la satisfaction d’ordre monétaire. En effet, si
une aubaine est réalisée au temps futur, nous avons le revenu permanent supérieur au revenu
observé. Ce qui implique que le revenu transitoire est négatif. Si l’aubaine est perçue en une
142
période actuelle, le revenu observé est supérieur au revenu permanent et par conséquent le
revenu transitoire est positif. Partant de cette observation, nous pouvons affirmer que la
liaison entre le revenu observé, la consommation, le revenu permanent et le revenu transitoire
est fonction de l’aubaine et son échelonnement dans le temps.
L’aubaine est un évènement avantageux, anticipé ou non. Elle peut être un héritage. Cette
aubaine modifie le profil temporel des flux de revenus par rapport au profil de l’hypothèse
stationnaire. Elle est aussi l’anticipation d’une croissance de revenu, un don ou un
changement de profession.
Quelle est donc la place de ce concept dans la littérature économique ?
Le concept du revenu permanent dans la littérature économique
De nombreux problèmes empiriques surgissent quand on veut tester l’hypothèse du revenu
permanent car les composantes transitoires et permanentes sont difficiles à séparer. Par
l’importance théorique d’une part et les difficultés précitées d’autre part de cette hypothèse,
de nombreux auteurs l’ont testée et utilisée.
- Lee (1964)38 montre que le revenu permanent est un élément plus important que le revenu
courant, dans la détermination de la demande des ménages américains;
- Eisner (1458)39 a utilisé le concept du revenu permanent dans son analyse de
l’investissement ;
- Klevorick et Branson (1969)40 montré que l’illusion monétaire est évidente lorsque les
fonctions de consommation sont évaluées à l’aide des variables de revenu permanent ;
- Holmes (1974)41, montre que le revenu transitoire et le revenu permanent expliquent d’une
façon importante les fluctuations de la consommation permanente;
- Selon les monétaristes ayant pour chef de fil Friedman M., la demande de monnaie est
fonction du revenu permanent qui correspond au rendement de la richesse.
Il semble que le concept de revenu permanent ait évolué dans le sens de la simplification.
Ainsi Paul Taubman et Irwin Friend définissent le revenu permanent comme une tendance ou
une moyenne du revenu des dernières années dans le cas de séries chronologiques et comme
38
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41
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39
143
une fonction de variables socio-économiques fondamentales dans le cas des données en coupe
instantanée.
Ayant une idée du revenu permanent selon la revue de littérature économique, quelle est la
notion de revenu permanent extérieur dans le contexte ivoirien? La place du revenu
permanent dans l’économie développée se justifie par le comportement rationnel des agents
économiques qui anticipent du fait de leur sensibilité aux fluctuations économiques.
Ainsi, la problématique de l’hypothèse du revenu permanent doit-elle permettre de se poser
des questions sur le fondement des anticipations dans une économie en voie de
développement. Ce comportement doit être analysé, examiné par rapport aux structures
mentales, sociales, économiques et financières mais surtout dans le cadre de la politique
d’investissement.
1.1.2. Notion du revenu permanent extérieur dans le cas de la Côte d’Ivoire
L’hypothèse du revenu permanent est un concept fondé sur l’analyse micro-économique du
comportement de consommateur. A ce titre, nous considérons la Côte d’Ivoire comme un
agent économique face au reste du monde. Cet agent reçoit des ressources extérieures pouvant
financer les investissements (a). Comment peut-on alors définir la notion du revenu
permanent extérieur ? Ce revenu sera défini à partir des ressources extérieures de la Côte
d’Ivoire (b).
Ressources extérieures pouvant financer les investissements
On associe au problème d’investissements, celui du financement qui est une contrainte pour
les pays en développement où l’épargne nationale est très faible, compte tenu du niveau des
revenus et de l’information presque inexistante.
L’économie ivoirienne étant extravertie, la Côte d’Ivoire a recouru au financement extérieur
sous toutes ses formes. Dans ce domaine encore, l’entrée des capitaux n’est ni automatique ni
régulière mais la sortie est toujours assurée.
Les ressources extérieures pouvant financer les investissements, proviennent des exportations
et du financement extérieur ou de l’épargne extérieure. Ces ressources ainsi définies sont
appelées recettes extérieures ou revenu extérieur. Il est aléatoire, très hypothétique et entraîne
144
le caractère instable des investissements ou de la politique des investissements. Formellement,
ce revenu extérieur pourrait s’écrire sous la forme suivant :
R  X  Fe
(7)
Où R est le revenu extérieur, X l’exportation, Fe le financement extérieur ou l’épargne
extérieure. Les ressources d’exportation sont fondées essentiellement sur les produits de base
café/cacao, bois, hévéa, banane, noix d’acajou pour traduire le rôle important de l’agriculture
dans l’économie ivoirienne. La production ivoirienne fait vivre 95% de la population. Le café,
le bois, le cacao, la banane, etc. assurent près de 80% des recettes d’exportation. L’agriculture
fait travailler 30% des industries locales, emploie les trois quart de la population active
estimée 9,6 millions sur une population de 12 millions.
On remarque que la croissance du secteur primaire a joué un rôle essentiel dans la croissance
globale. Cette croissance a permis à la balance commerciale de demeurer fortement
excédentaire. En effet, le café, le cacao et le bois, etc. représentent encore 76% en valeur du
total des exportations depuis 1976. Ceci rend l’économie ivoirienne trop sensible aux
fluctuations des cours mondiaux des matières premières.
Ainsi, le gouvernement ivoirien s’est fixé un programme d’action pour le développement de
la production agricole, axé sur les principes directeurs dont la diversification de la production
agricole permet de :
(i)
Rendre l’économie ivoirienne moins sujette aux aléas de conjoncture internationale;
(ii)
Réduire les déséquilibres régionaux entre la zone forestière et la zone de savane;
(iii)
Satisfaire le plus rapidement possible les besoins alimentaires du pays;
(iv)
Produire les matières premières nécessaires au développement des industries de
transformation de produits agricoles.
L’agriculture constitue ainsi une des sources importantes de ressources extérieures qui sont
liées au phénomène de l’instabilité des marchés. La côte d’Ivoire pour sortir rapidement du
sous-développement a recours au financement extérieur. Ce sont les aides extérieures non
remboursables ou des emprunts extérieurs.
Ce financement extérieur est la différence entre l’investissement réalisé et l’épargne locale. La
relation ainsi définie se traduit par cette formule mathématique :
145
Fe  I  S
8
Où I est l’investissement, S l’épargne locale et Fe l’épargne extérieure ou financement
extérieur. L’équation (7) devient :
R  X  Fe  X  I  S (9)
Ce revenu extérieur est fluctuant du fait de l’instabilité des cours mondiaux et des marchés
des produits primaires, mérite une analyse en ce qui concerne l’investissement et la
planification. Ce phénomène explique les échecs successifs des plans africains et hypothèque
dangereusement la croissance économique. Ainsi, la Côte d’Ivoire doit-elle fonder ses
prévisions sur un instrument adéquat de politique économique. Il s’agit de compter en fait sur
un flux régulier de financement de l’économie. Cette notion, peut trouver son fondement dans
l’hypothèse du revenu permanent qui serait défini comme un revenu stable, amortisseur des
chocs extérieurs. Comment définir alors la notion de revenu permanent extérieur dans le cadre
de l’économie ivoirienne ?
Le concept du revenu permanent extérieur dans l’économie ivoirienne
Il s’agit ici de montrer comment passer de la notion de ressources extérieures à la notion de
revenu potentiel qui assurerait une croissance régulière de l’économie ivoirienne. Selon
Friedman, le revenu permanent serait un amortisseur de chocs économiques. Ce revenu
permanent est utilisé dans les modèles de demande, à savoir la demande de monnaie, la
demande de consommation et d’investissement dans le but surtout de rendre compte des
contradictions entre l’évolution dans le court terme et dans le long terme des fonctions de
demande.
Cette hypothèse bien que vielle de plus d’une vingtaine d’années, est encore actuelle pour
avoir été reprise par les chercheurs contemporains, désireux d’expliquer l’évolution de la
consommation, de la demande de monnaie ou du comportement de la vitesse de circulation de
la monnaie.
L’efficacité et l’évolution du système d’information économique, largement accessible à la
majorité de la population, induisent des anticipations qui sont formellement traduites par la
notion du revenu permanent. Par ailleurs, toute demande observée (de consommation, de
monnaie ou d’investissement) est une grandeur contingente au même titre que le revenu
observé et par conséquent, l’influence du revenu courant ne peut être qu’apparente. Seules les
146
grandeurs permanentes, considérées comme normales font l’objet des décisions des individus
et déterminent bien des relations de comportement liées à la notion de demande. C’est cette
approche qui explique notre problématique quant à la recherche de liaison entre
l’investissement et un certain flux de ressources extérieures stables, qui auraient pour la Côte
d’Ivoire, une certaine évolution dans le temps, une sorte de ressources d’équilibre.
En Côte d’Ivoire ou comme en Afrique, l’information économique est imparfaite voire
inexistante et par conséquent, il se pose la question de savoir si cette notion de revenu
permanent peut s’intégrer à l’analyse économique. Très peu d’écrits existent dans ce domaine
concernant les pays en voie de développement. Ezeckiel (1968)42, dans son étude sur la
demande de monnaie, a essayé de démontrer l’existence d’anticipation dans le comportement
monétaire des agents économiques et a conclu que leur demande de monnaie est fonction de
leur revenu permanent. Certains économistes pakistanais et indiens ont évolué dans le même
sillage, dans leur tentative pour expliquer l’évolution de la demande de monnaie ou de
l’épargne des ménages. Ils ont conclu que le revenu permanent extérieur est un concept plus
puissant que le revenu courant. L’hypothèse du revenu permanent extérieur pourra jouer un
rôle fondamental dans la conception et l’exécution de la politique d’investissement en Côte
d’Ivoire. Cette notion du revenu permanent extérieur dans notre pays se définit à partir du
revenu extérieur, ensemble de ressources extérieures (exportation et épargne extérieure). Du
point de vue théorique, le concept de revenu permanent extérieur sera la part de la richesse W
que la Côte d’Ivoire pourra consommer en maintenant intacte cette richesse. De façon
rigoureuse, il s’écrit :
10
R p  iw
Où i est le taux de l’intérêt. Si on a, une répartition de revenus extérieurs futurs
R0 , R1 , R2 ,..., Rn  ,
la valeur présente de ces revenus extérieurs ou la richesse W pourrait
s’écrire :
n
W  R0   e it
t 1
n
W   e it Rt dt
0
Rt
1  i t
12
11 (Répartition discrète)
(Répartition continue)
42
EZECKIEL, A. (1968), The demand for money : evidence from developed and less developed economies,
IMF, Staff Papers, Vol. 15, n° 2, pp. 280-365.
147
Dans la réalité, les revenus extérieurs observés dans le cas de cette étude et d’une façon
générale, sont des valeurs discrètes.
Pour des raisons statistiques, on retiendra le revenu permanent extérieur comme étant la
moyenne pondérée des valeurs passées et présentes du revenu extérieur observé car les
composantes transitoires et permanentes posent de nombreux problèmes empiriques difficiles
à tester. Formellement :
R  R p  Rtr
13
où R  revenu extérieur observé
R p  revenu permanent extérieur
Rtr  revenu extérieur transitoir e.
n
R p   (1   )t R t (14)
t 0
Les revenus extérieurs constatés sont recueillis dans les comptes de la nation. En pratique, le
concept de revenu permanent est un cas particulier de lissage des séries statistiques.
Ainsi, nous ferons le lissage des séries de revenu extérieur sur 2 ou 3 ans.
Il apparait une relation de l’investissement avec le revenu extérieur et par conséquent avec le
revenu permanent extérieur. Ceci se remarque même dans l’évolution du revenu extérieur et
de l’investissement. C’est l’étude de ce phénomène qu’aborde l’approche économétrique.
1.2. Approche économétrique
L’approche théorique a explicité l’influence du revenu extérieur sur le niveau de
l’investissement. Elle a dégagé le fondement de la politique des investissements et situé
l’importance considérable dudit revenu. Nos préoccupations porteront sur (i) la spécification
du modèle; (ii) mise en évidence de la relation « le revenu permanant extérieur et
l’investissement » par le modèle vectoriel autorégressif (VAR); (iii) les résultats de l’analyse
de causalité au sens de Granger.
1.2.1. Spécification du modèle
Le modèle
Le modèle proposé est un VAR, calqué sur celui de Baffes et Shaw (1994), Hoque (1995),
Masih et al. (1996) et Kouassi et al. (1997) pour examiner la relation entre investissement et
148
revenu extérieur permanent. Il s’agit d’un modèle vectoriel autorégressif d’ordre p. La
procédure de test de cointégration est celle développée par Johansen (1998) et par Johansen et
Juseluis (1990).
Soit it = log(I)t la mesure de l’investissement, rpt = log(Rp)t la mesure du revenu extérieur
permanent. Soit un vecteur X*t de format (nx2), c’est-à-dire, X*t = (it, rPt). Soit un VAR
d’ordre p avec des bruits blancs.
X t *  c  1 X *t 1  ...   p X *t  P   t (15).
Avec c = vecteur des constantes de format (nx1) dans le cas de notre exemple;  1 = matrice
carrée d’ordre k des coefficients, i = 1, p et  t = vecteur de format nx1 des erreurs i.i.d 
  0,  2  avec une matrice des variances et covariances positive.
Le VAR(p) défini dans l’équation (15) est stationnaire si toutes les valeurs de Z respectant la
condition de l’équation (16); elles sont à l’extérieur du cercle de racine unitaire :
I k   1Z   2 Z 2  ...   p Z p  0
(16)
L’équation (15) peut être transformée en un système de vecteur à correction d’erreur par
reparamétrage pour faire la différence entre stationnarité par combinaison linéaire et la
stationnarité par différenciation. Ce qui permet d’avoir l’équation (17) :
p 1
X *t  c   i X *t  p  X *t  p   t (17)
i 1
p
  ( I    i ) et i  ( i 1  ...   i ), i  1, p  1
Où
i 1
La différence entre l’équation (17) et VAR standard en différences est le terme de correction
d’erreur, X
*
t p .
Le système de l’équation (17) contient à la fois l’information relative aux
ajustements de court terme, symbolisée ici par l’estimation de  i stationnaire et l’information
de long terme, matérialisée par l’estimation de  .
*
La matrice  des coefficients des vecteurs X t  p peut être factorisée afin de faire le test de r
hypothèses nulles avec rang (  ) = r qui désigne le nombre de relations de cointégration. Ce
qui se traduit par :
H 0 :    ; rang()  r  k (18)
149
X *t , est un vecteur de variables non-stationnaires I(1), tous les termes dans l’équation (16)
*
impliquent que X *t i sont stationnaires ou I(0), et X i  p doit être aussi pour  t  I (0)
stationnaire. Le rang de la matrice  permet en général d’avoir le nombre de vecteurs cointégrés tel que r  (k  1) . L’existence d’une relation de long terme dans notre système
pousse à établir des implications comprenant : (i) le « spurious regression », (ii) la non
causalité de Granger et (iii) les simulations dynamiques. Par exemple, ces dernières peuvent
permettre de comprendre la signification économique des variables du modèle. Ces
simulations s’obtiennent habituellement par le calcul de la décomposition de la variance
(VDC) et par la détermination des fonctions d’impulsions-réponses issues d’un choc externe
(IFR). Le calcul de la décomposition de la variance s’effectue avec un VAR(p) sous forme
d’un vecteur de moyenne mobile autorégressive (Hamilton, 1994 ; Lutkpohl et Reimers,
1992).
Données et résultats économétriques
La possibilité des investissements doit être placée dans le contexte de pays en développement
qui cherche à sortir le plus rapidement que possible du marasme économique. Il faut aussi
prendre en considération les difficultés de disposer de sources permanentes de financement.
C’est pourquoi les investissements ne doivent point être indexés sur les revenus courants
extérieurs. Ce qui explique les dangers que courent les pays en voie de développement à trop
compter sur les niveaux courants de revenu extérieur qui subissent les fluctuations des prix
internationaux des matières premières. Ce qui doit compter, c’est le flux de revenus
permanents extérieurs que la Côte d’Ivoire espère affecter à un investissement régulier de sa
croissance.
Les données de notre étude sont issues de World Development Indicators, (WDI, 2014) de la
Banque Mondiale. Nous utiliserons les données annuelles qui reflètent mieux la stratégie de
développement qui est essentiellement un phénomène de long terme. Les données collectées
dans le WDI couvrent la période 1960-2014.
Tests de racine unitaire
Étudier la stationnarité d’une variable, c’est tester la présence ou non de racine unitaire. Une
série temporelle est stationnaire lorsque son espérance mathématique et sa variance sont
constantes au cours du temps et les covariances entre les deux composantes de dates
150
différentes ne dépendent que de l’écart de temps entre ces deux composantes (Doukouré,
2007). Si elles sont toutes stationnaires en niveau nous ferons la régression à l’aide de la
méthode des Moindres Carré Ordinaire (MCO). Dans le cas contraire, nous étudierons la
cointégration des variables.
La procédure qui permet de déterminer la présence de racine unitaire se fait au travers d’un
test ou plusieurs tests de stationnarité. Nous avons le test Kwiatkowski, Phillips, Schmidt et
Shin (1992) dit test KPSS, ce test postule l’hypothèse nulle de stationnarité (absence de racine
unitaire) ; le test de Phillips-Perron (1988) et celui de Dickey-Fuller Augmenté (ADF) (1981)
sont les tests couramment utilisés. Ses tests présentent comme hypothèse nulle la présence de
racine unitaire.
Dans notre étude nous allons utiliser le test de Dickey-Fuller Augmenté (ADF) (1981), en
tenant compte de la constante et la tendance et de celui de Philipps-Perron (1988). Le test de
Dickey-Fuller Augmenté (ADF) (1981), permet de ne pas faire a priori l’hypothèse de bruit
blanc du modèle de la série dont la stationnarité est testée. Ce test donne les résultats selon la
règle de décision suivante :
-Si la valeur ADF (la statistique calculée) est inférieure à la valeur critique tabulée, alors la
série est stationnaire et on rejette l’hypothèse nulle.
-Si la valeur ADF (la statistique calculée) est supérieure à la valeur critique tabulée, alors la
série est non stationnaire et on accepte l’hypothèse d’une racine unitaire, ce qui implique que
la série n’est pas stationnaire.
En dépit des tentatives de sophistication, le test de racine unitaire de Dickey-Fuller reste
marqué par une limite essentielle. L’hypothèse nulle suppose en effet que la tendance de la
série ne change pas sur toute la période. Or on sait que quelques chocs ponctuels peuvent
influencer, même sensiblement, la tendance des séries. Il apparaît donc que le test de DickeyFuller est biaisé en faveur de l’hypothèse nulle de racine unitaire (Perron, 1989, 1992 ;
Rappoport et Reichlin, 1989). Ces critiques ont conduit à l’élaboration d’autres tests de racine
unitaire et de stationnarité dont ceux de Phillips et Perron (1988) et Kwiatkowski, Phillips,
Schmidt et Shin (1992) (noté KPSS par la suite).
151
Le test de Phillips-Perron (1988) est construit sur une correction non paramétrique de la
statistique de Dickey-Fuller pour prendre en compte des erreurs hétéroscédastiques KEHO,
(2012). Il se déroule en deux étapes : on estime par MCO les trois modèles de base du test de
Dickey-Fuller et on calcule les statistiques associées, puis on estime un facteur correctif établi
à partir de la structure de covariance des résidus de telle sorte que les transformations
réalisées conduisent à des distributions identiques à celles du Dickey-Fuller standard. Ce test
se ramène donc au test de Dickey-Fuller simple dans le cas où les erreurs seraient
homoscédastiques. Ce test est non paramétrique car
aucune modélisation du processus
générateur des aléas n’est formulée, il est plus robuste à une autocorrélation (mais également
à une hétéroscédasticité) de forme inconnue. La mise en œuvre du test est identique à celle du
test de Dickey-Fuller : on suit la même procédure séquentielle descendante.
Les résultats du test de racine unitaire issus du tableau 1 de Dickey-Fuller Augmenté (ADF) et
celui de Phillips-Perron(PP) montrent que les variables LIt et LRP sont stationnaires en
niveau et en différence première. Puisque toutes les variables du modèle ne
sont
stationnaires en niveau, il faut donc les cointégréer. Le test de cointégration est nécessaire afin
de trouver une relation de long terme entre les variables.
Tests de cointégration
La théorie de la cointégration permet de :
-Étudier des séries non stationnaires mais dont une combinaison linéaire est stationnaire.
-Tester l’existence de relation de long terme tout en analysant la dynamique de court terme
entre les variables.
Il existe de nombreuses méthodes statistiques pour tester une relation de cointégration entre
les variables. Les techniques les plus usuelles sont celles d’Engel et Granger (1987) et celle de
Johansen (1988). Dans notre étude nous utiliserons la méthode de Johansen au détriment de
celui d’Engel et Granger (1987). Cette méthode montre que les séries peuvent être cointégrées
même si elles sont intégrées d’ordre différent, cependant celle d’Engel et Granger (1987)
s’applique aux variables intégrées de même ordre. En plus ce test présente l’avantage de
déterminer les relations de court terme et de long terme entre les variables.
La méthode de Johansen, est fondée sur la technique du maximum de vraisemblance. La
procédure du test de cointégration de Johansen repose précisément sur la détermination du
152
rang de la matrice ∏, noté r ; r représente le nombre de relation de cointégration, à partir de la
statistique de la trace et celle de la valeur propre maximale.
Le test de Johansen que nous avons effectué dans le tableau 2, nous a révélé une relation de
cointégration. Alors, analysons simultanément la relation de court et long termes avec un
modèle à correction d’erreurs (MCE) à la Banerjee et Hendry(1993) avant de passer au test de
causalité au sens de Granger avec le modèle VAR. Ce modèle est un processus d’ajustement
par la combinaison de variables stationnaires en différence représentant les fluctuations de
court terme et celles en niveau déterminant le long terme. Il permet d’analyser la dynamique
de court terme et de long terme.
Interprétation du coefficient de correction d’erreur
Après la régression, un modèle à correction d’erreur (MCE) est valide si nous constatons que
la force de rappel ou le coefficient de correction d’erreur, est inférieure à l’unité, négative et
significative. Dans notre cas, le coefficient associé la force de rappel est négatif (-0.451280) et
significatif au seuil de 5%(0.0007). Donc il existe bien un mécanisme à correction d’erreur. A
long terme les déséquilibres entre l’investissement et le revenu permanent extérieur se
compensent de sorte que les séries ont des évolutions similaires. Aussi, les chocs sur
l’investissement en Côte d’Ivoire se corrigent-ils à 45.12% par l’effet de « feedback ». En
d’autres termes, un choc constaté au cours d’une année est entièrement résorbé au bout de
deux années environ (1/0.451280= 2.21 années ou 2 ans 3 mois). Ce coefficient indique la
vitesse à laquelle tout déséquilibre entre les niveaux désiré et effectif de l’investissement est
résorbé dans l’année qui suit tout choc.
Relation de court terme
Il ressort de nos estimations que le revenu permanent impacte positivement et
significativement l’investissement en Côte d’Ivoire au seuil de 5%. Car la valeur de sa
probabilité est estimée à 0.0040. En effet, son élasticité par rapport à l’investissement est de
0.721725 pour l’estimation de notre modèle. Ce qui signifie qu’une augmentation de 10% du
revenu permanent entraine une augmentation de 7.21% de l’investissement.
Relation de long terme
A long terme nous constatons que le revenu permanent impacte également de façon positive
et significative l’investissement en Côte d’Ivoire au seuil de 5%. La valeur de sa probabilité
153
est estimée à 0.0019. Son élasticité par rapport à l’investissement est de 0.310532 avec une
tendance à la baisse pour l’estimation de notre modèle. Ce qui signifie qu’une augmentation
de 10% du revenu permanent entraine une augmentation de 3.10% de l’investissement. On
observe par ailleurs qu’à
long terme le revenu extérieur permanent impacte moins
l’investissement qu’à court terme (7.21% à court terme contre 3.10% à long terme). Cela
pourrait s’expliquer par la succession des crises qu’a connues la Côte d’Ivoire qui auraient
ralenti les effets de long terme du revenu permanent extérieur sur l’investissement.
1.2.2. Résultats de l’analyse de causalité au sens de Granger et de la simulation dynamique
Résultats de l’analyse de causalité au sens de Granger
Pour Granger (1969), une variable X cause une autre variable Y , si la connaissance
des valeurs passées de X rend meilleure la prévision de Y ; en d’autres termes, on dira que
la variable X cause au sens de Granger la variable Y si les valeurs passées de X
influencent significativement la valeur contemporaine de Y (Keho, 2012).
Statistiquement, le test de causalité au sens de Granger revient à faire un test de significativité
global des coefficients associés aux valeurs passées de la variable causale dans l’équation de
la variable causée (Keho, 2012). L’analyse de la causalité va permettre de savoir quelles sont
les influences statistiquement significatives des variables du modèle. On constate avec les
résultats issus du tableau 3 du test de causalité de Granger que le revenu permanent extérieur
cause l’investissement au seuil de 5% et vice-versa.
Résultats de la simulation dynamique
La simulation dynamique permet de comprendre la signification économique des variables du
système économique de la Côte d’Ivoire. En effet, on calcule la décomposition des variances
(VDC) et les fonctions de réactions des chocs ou les fonctions impulsions-réponses (IRF). Les
tableaux 5 et 6 contiennent tous les résultats de la décomposition de la variance du modèle et
ceux des fonctions impulsions-réponses.
On observe avec les fonctions impulsions-réponses, qu’un choc positif sur le revenu
permanent extérieur (augmentation du revenu permanent extérieur) conduit dans un premier
temps dès la deuxième année à une hausse de l’investissement de 5%. Au-delà de la deuxième
154
année, cet effet sur l’investissement reste stable dans le temps jusqu’à la dixième année
malgré l’augmentation du revenu permanent.
Un examen minutieux des décompositions de la variance de la table 2 du tableau 6 montre
que le choc du revenu extérieur permanent explique une très grande part de la dynamique de
l’investissement. De façon instantanée, le choc du revenu permanent contribue à 95,19% de la
variance de l’erreur de prévision de l’investissement, contre seulement 4,09% pour le choc de
la demande d’investissement (première ligne de la table 2 du tableau 6, horizon de 1 à 2 ans).
A moyen et long termes, la variance de l’erreur de prévision du revenu permanent extérieur
est expliquée à 86% de la 4ème à la 6ème année et à 15,67% par les investissements. De la 7ème à
la 10ème année, la variance de l’erreur de prévision du revenu permanent extérieur est
expliquée à 80% environ et à 19% par les investissements.
Conclusion
Nos résultats empiriques fournissent quelques propriétés intéressantes de la relation entre
investissement et revenu permanent extérieur. En effet, il existe une relation de court et long
termes entre l’investissement et le revenu permanent extérieur. A court terme, il ressort de nos
estimations que le revenu permanent extérieur impacte positivement et significativement
l’investissement en Côte d’Ivoire au seuil de 5%. Car la valeur de sa probabilité est estimée à
0.0040. En effet, son élasticité par rapport à l’investissement est de 0.721725 pour
l’estimation de notre modèle. Ce qui signifie qu’une augmentation de 10% du revenu
permanent extérieur entraine une augmentation de 7.21% de l’investissement. Cette relation
est confirmée par le test de causalité au sens de Granger, qui révèle que le revenu permanent
extérieur cause l’investissement au seuil de 5% et vice-versa.
A long terme, nous constatons que le revenu permanent extérieur impacte également de façon
positive et significative l’investissement en Côte d’Ivoire au seuil de 5%. La valeur de sa
probabilité est estimée à 0.0019. Son élasticité par rapport à l’investissement est de 0.310532.
Ce qui signifie qu‘une augmentation de 10% du revenu permanent entraine une augmentation
de 3.10% de l’investissement. On observe par ailleurs qu’à long terme le revenu permanent
extérieur impacte moins l’investissement qu’à court terme (7.21% à court terme contre 3.10%
155
à long terme). Ce résultat est confirmé par les simulations dynamiques que sont la
décomposition des variances (VDC) et les fonctions de réactions des chocs ou les fonctions
impulsions-réponses (IRF).
Cela pourrait s’expliquer par la succession des crises qu’a connues la Côte d’Ivoire qui
auraient ralenti les effets de long terme du revenu permanent extérieur sur l’investissement.
Les fonctions impulsions-réponses indiquent qu’un choc positif sur le revenu permanent
extérieur (augmentation du revenu permanent extérieur) conduit dans un premier temps dès la
deuxième année à une hausse de l’investissement de 5%. Mais au-delà de la deuxième année,
cet effet sur l’investissement reste stable dans le temps jusqu’à la dixième année malgré
l’augmentation du revenu permanent extérieur.
Les décompositions de la variance montrent que le choc du revenu permanent extérieur
explique une très grande part de la dynamique de l’investissement sur un horizon de 1 à 2
ans). Malgré les chocs, le revenu permanent extérieur permet d’exécuter des investissements
réguliers dans le temps dans un cadre de planification.
156
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Tableau 1: Résumé des Tests de stationnarité des variables du modèle (au seuil de 5%)
Test de stationnarité (au seuil de 5%)
Variables
Stationnarité en Niveau
Augmented Dickey-Fuller
(ADF)
Stationnarité en niveau
Phillips-Perron
(PP)
Oui/non
Valeur des
statistiques
Oui/non
Valeur des
statistiques
Oui
I(0)
-9.65
Valeur
critique
à 5%
-3.49
Oui
I(1)
-7.44
-3.49
Ordre
D’intégration
LIt
Oui
I(0)
-9.65
Valeur
Critique à
5%
-3.49
LRP
Oui
I(1)
-7.68
-3.49
Ordre
D’intégration
La variable LTt est stationnaires en niveau et la variable LRp , stationnaire en différence première
158
Tableau 2.Test de cointégration à la johansen
Date: 12/29/16 Time: 08:23
Sample (adjusted): 1963 2014
Included observations: 52 after adjustments
Trend assumption: No deterministic trend
Series: LIT LRP
Lags interval (in first differences): 1 to 1
Unrestricted Cointegration Rank Test (Trace)
Hypothesized
No. of CE(s)
Eigenvalue
Trace
Statistic
0.05
Critical Value
Prob.**
None *
At most 1
0.245130
0.055319
17.58211
2.959212
12.32090
4.129906
0.0060
0.1011
Trace test indicates 1 cointegrating eqn(s) at the 0.05 level
* denotes rejection of the hypothesis at the 0.05 level
**MacKinnon-Haug-Michelis (1999) p-values
Unrestricted Cointegration Rank Test (Maximum Eigenvalue)
Hypothesized
No. of CE(s)
Eigenvalue
Max-Eigen
Statistic
0.05
Critical Value
Prob.**
None *
At most 1
0.245130
0.055319
14.62290
2.959212
11.22480
4.129906
0.0122
0.1011
Max-eigenvalue test indicates 1 cointegrating eqn(s) at the 0.05 level
* denotes rejection of the hypothesis at the 0.05 level
**MacKinnon-Haug-Michelis (1999) p-values
159
Tableau 3 : MCE test à la Hendry
Dependent Variable: D(LIt)
Method: Least Squares
Date: 08/04/16 Time: 11:57
Sample (adjusted): 1962 2014
Included observations: 53 after adjustments
Variable
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
C
D(LRP)
LIt(-1)
LRP(-1)
3.493342
0.721725
-0.451280
0.310532
1.154783
0.249458
0.123957
0.094575
3.025107
2.893173
-3.640614
3.283455
0.0040
0.0057
0.0007
0.0019
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
0.846456
0.700321
0.337021
5.565564
-15.48086
5.342020
0.002902
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
0.087836
0.376876
0.735127
0.883828
0.792310
2.198135
Tableau 4.Test de causalité de Granger
VAR Granger Causality/Block Exogeneity Wald
Tests
Date: 08/23/16 Time: 18:43
Sample: 1960 2014
Included observations: 52
Dependent variable: LIt
Excluded
Chi-sq
df
Prob.
LRp
6.718200
2
0.0348
All
6.718200
2
0.0348
Excluded
Chi-sq
df
Prob.
LIt
1.580276
2
0.0453
All
1.580276
2
0.0453
Dependent variable: LRp
160
Tableau 5 Tests sur les fonctions de réponses impulsionnelles
Response to Cholesky One S.D. Innovations ± 2 S.E.
Response of LINVEST to LINVEST
Response of LINVEST to LREVENU_PER
.5
.5
.4
.4
.3
.3
.2
.2
.1
.1
.0
.0
-.1
-.1
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
1
Response of LREVENU_PER to LINVEST
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Response of LREVENU_PER to LREVENU_PER
.25
.25
.20
.20
.15
.15
.10
.10
.05
.05
.00
.00
-.05
-.05
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Tableau 6 Décomposition de la variance
Table 1
Variance Decomposition of LIt :
Period
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
S.E.
LIt
LRp
0.342270
0.400293
0.438171
0.463409
0.482442
0.497789
0.510753
0.522027
0.532017
0.540980
100.0000
94.78139
91.13325
87.80909
84.94146
82.43234
80.23810
78.31580
76.62863
75.14411
0.000000
5.218611
8.866749
12.19091
15.05854
17.56766
19.76190
21.68420
23.37137
24.85589
LIt
LRp
4.091678
8.269556
11.26746
13.67565
15.57643
17.07806
18.26906
19.22102
19.98913
20.61523
95.90832
91.73044
88.73254
86.32435
86.42357
86.92194
81.73094
80.77898
80.01087
79.38477
Table 2
Variance
Decomposition of
LRp
Period
S.E.
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
0.150681
0.231095
0.291759
0.340632
0.381561
0.416633
0.447137
0.473949
0.497705
0.518886
161
REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE B - ECONOMIE / NUMERO 1 - VOLUME 2 - Décembre 2016 / pp. 162-184.
La socio-histoire de l’action publique africaine : cas des processus de construction des
politiques sociales au Congo de 1382-1991
Julien BOKILO
Université Marien NGOUABI (République du Congo)
[email protected]
Tél : (00242) 06 500 03 16 / 05 631 51 74
Résumé
Cette étude analyse la dynamique des politiques sociales, à travers une approche sociohistorique de l’action publique. Elle montre l’imbrication des confessions religieuses avec
l’administration coloniale comme fondement des constances et des ruptures de l’action sociale
avant et après l’indépendance du Congo.
Mots-clés : Socio-histoire, action publique, processus de construction, politiques sociales,
assistance médicale.
162
Introduction
Au Congo, les politiques sociales ont toujours été menées, depuis la colonisation jusqu’à à
aujourd'hui, avec comme pour objectif d’aider les populations les plus pauvres et vulnérables.
L’objet de la présente recherche sur les politiques sociales au Congo s’inscrit dans le cadre
des objets « qui ne sont pas donnés là » (Favre, 2005 ; Surel, 2015), dans le sens où les
politiques sociales ont un caractère abstrait comme l’Etat et l’Etat-providence. Ces objets ne
disposent pas d’une matérialité qui les rendrait aisément identifiables. Pour cela, leur
existence doit être prouvée par une étude, du fait qu’il s’agit des objets sociaux attachés à des
perceptions véhiculées le plus souvent par les scientifiques.
La mise en place des politiques sociales contemporaines au Congo est l'objet d'un
encadrement suivant les régimes ou systèmes politiques. Celui-là, dans le régime
démocratique, joue en faveur d'une convergence entre acteurs étatiques, privés, ONG,
institutions internationales et philanthropes. Cet encadrement au Congo est à la fois
institutionnel ou structurel, avec plusieurs intervenants comme le Gouvernement, qui en est le
principal (qui s’appuie principalement sur le Plan d’Actions de la Politique Nationale
d’Actions Sociales, sur l’accord de rattrapage salarial), les partenaires techniques, financiers
d’autres pays comme la Chine et la société civile, et juridique, car il est défini à partir des
conventions internationales.
L’objectif de cette étude, c’est d’expliquer, au-delà du seul effet de labellisation, l’évolution
des politiques sociales au Congo dans une dynamique socio-historique, qui part de 1382 à
1991 (date de la fin du monopartisme au Congo).
Ce faisant, cette étude permet de présenter les principales politiques d'action à vocation
sociale menées dans ce pays, en montrant les constances et ruptures qu’on peut dégager de
cette dynamique à travers le multipartisme et le monopartisme que le Congo a connus.
Eu égard aux dynamiques créées dans ces deux systèmes politiques par les mêmes acteurs
congolais, la question de la singularité du regard socio-historique de la genèse des politiques
sociales et de la mise en œuvre de celles-ci au Congo se pose. Ainsi, quelles sont les
constances et ruptures de celles-ci ? Par ailleurs, comment s'organisent le pouvoir politique et
le système de décision pendant le monopartisme et le multipartisme au Congo ?
163
La singularité du regard socio-historique de la genèse et de la mise en œuvre des politiques
sociales au Congo tient, d’une part, de l’imbrication de l’Administration coloniale avec
l’Eglise sur les actions sociales dans ce pays, et sur la différence des approches de gestion des
actions sociales dans les deux systèmes politiques qu’a connus ce pays, d’autre part.
Pour mener cette étude, plusieurs approches sont mises à contribution, afin d’aider à
comprendre le processus de construction des politiques sociales et enjeux de l’action publique
à vocation sociale au Congo, tout en identifiant certaines logiques du fonctionnement de
l’Etat.
D’abord, nous recourons au Néo-institutionnalisme historique (Hall et Taylor, 1997). En effet,
développé en réaction à certaines approches socio-économiques, il repose sur le postulat selon
lequel les règles politiques formelles et les politiques publiques établies sont la source de
contraintes institutionnelles, en tant qu’elles infléchissent les stratégies et décisions des
acteurs politiques, comme le cas du changement des politiques sociales pendant la période du
règne du parti unique au Congo.
Ensuite, nous nous appuyons sur l’approche séquentielle, cette grille classique de Jones
(1970), qui correspond à la phase d’identification du problème, à l’évaluation des politiques
menées pour résoudre le problème identifié. Cette approche aide à considérer les politiques
sociales comme un processus (policy process) composé des moments fonctionnels qu’une
politique tend à traverser tout au long de sa vie ou de sa réalisation. En l’occurrence, les
étapes de l’évolution des politiques sociales au Congo qui part de 1382 à 1959, qui est
caractérisée par l’imbrication de l’Eglise avec l’Administration coloniale, jusqu’à la période
post-indépendance avec l’avènement du Socialisme.
La méthodologie consacrée à cette étude associe la théorie et l’empirie, dans le but de
mobiliser conjointement des outils analytiques abstraits et éléments factuels venant de
l’observation d’abord des faits passés, c’est-à-dire ceux coloniaux et ceux de l’époque du
monopartisme. Ensuite, des faits contemporains du Congo. Dans ce cadre, le couple
empirie/théorie montre que la recherche débute par la quête d’informations et par l’examen
des théories disponibles. Cette étude invite à convoquer deux modes logiques différents et
complémentaires de raisonnement que sont l’induction et la déduction, et qui nourrissent le
164
va-et-vient (processus itératif) constant entre théorie et empirie. La première opération
d’induction permet de multiplier et confronter les observations sur les politiques sociales,
pour voir se dégager des éléments transversaux et tendances communes susceptibles de faire
l’objet d’une tentative de généralisation ; la seconde concernant la déduction vise à formuler
des hypothèses sur les politiques sociales que l’on va ensuite éprouver sur le réel.
Cette dimension méthodologique permet l’examen des moyens techniques qui contribuent à la
production de ce travail, en confrontant la théorie aux faits observés et en validant les
hypothèses formulées. Ainsi, plusieurs opérations qui rythment le travail d’enquête
contribuent à décrire les faits et à construire l’objet. Cette étude s’appuie sur des méthodes
qualitatives et quantitatives. La première méthode implique l’observation et l’interprétation
des pratiques et des raisonnements produits par les organisations ou institutions qui animent
les politiques sociales. La seconde, quantitative, vise à transformer en données chiffrées les
objets et phénomènes sociaux observés.
L’état des lieux sur la question des politiques sociales au Congo-Brazzaville atteste de
l’existence d’un travail d’Appolinaire Attant Ngouari (2007), qui traite de la relation de type
dynamique qui existe entre les politiques sociales et le développement dans les pays du Sud,
sans réellement présenter, décrire ou présenter les politiques sociales au Congo. Cet auteur
circonscrit ces politiques dans la période postcoloniale.
Cependant, cette étude sur la socio-histoire des processus de construction des politiques
sociales au Congo donne une occasion de combler cette lacune. L’étude sur la socio-histoire
représente inévitablement un apport pour les politiques publiques en Afrique, le cas du
Congo.
La présente étude est composée de deux parties : la singularité de la socio-histoire des
politiques sociales en Afrique : cas du Congo (1), et le changement sur l’approche de gestion
des politiques sociales par le parti unique de 1964-1991 (2).
165
1. La singularité de la socio-histoire des politiques sociales en Afrique : cas du Congo
La singularité de la socio-histoire des politiques sociales au Congo se caractérise par un
recadrage de chaque politique dans un contexte qui exprime le double héritage, l’un issu du
passé précolonial, et l’autre, engendré par la politique coloniale avec l’imbrication de l’Eglise.
Ce faisant, cette démarche retrace le processus composé des moments fonctionnels ou des
étapes de construction de ces politiques (Jones, 1970).
1.1. Sociogenèse des politiques sociales
S’interroger sur la sociogenèse des politiques sociales, c’est non seulement, lever le voile sur
un aspect de la dynamique du processus de ces politiques, mais aussi susciter une réflexion
sur les conditions socioéconomiques et culturelles qui ont permis la construction de ces
politiques.
Alors, que peut-on dire des évolutions socio-historiques desdites politiques ?
1.1.1. Tentative de compréhension des pratiques sociales précoloniales de 1382 à 1870
Le retour à l’histoire permet de décrire la première pénétration des missionnaires qui
constitue, entre autres, une forme d’introduction des politiques sociales au Congo à travers
l’œuvre charitable43.
Sous-couvert de l’évangélisation, le Père Jean arrive en expédition en Afrique centrale en
1382, pour vérifier les voies d’évacuation des eaux de pluies de cette zone d’Afrique. Mais, ce
contact fut infructueux à cause du manque de moyens et de l’impréparation des missionnaires.
Dans leurs démarches de prise de contact, ils accordent de l’aide, notamment, des habits, du
savon, du sel et les allumettes aux populations, après l’évangélisation.
Malgré ces œuvres de charité, ils rencontrent la résistance des populations qui ne veulent pas
abandonner leurs fétiches et leur Dieu appelé « Zambe ». Ces missionnaires ont baptisé trop
vite de nombreux volontaires, sans avoir les moyens de les instruire et de les former sur le
43
Entretien avec les Pasteurs de l’Eglise Evangélique du Congo.
166
Christianisme. Cette opération s’est soldée par un échec. Il faut attendre 1873 que d’autres
missionnaires réussissent leur pénétration (Kinata, 2008).
Cependant, le retour à l’histoire montre que les enseignements au Congo (notamment une
école épisodique) commencent en 1482. Cette dynamique d'alphabétisation est enclenchée par
Afonso 1er (comme le dit Balandier), deuxième roi chrétien du royaume Kongo, qui est investi
d’une autorité religieuse également44, et dont l’objectif est de donner à ses sujets une
instruction élémentaire.
1.2. Les jalons du processus d’institutionnalisation des politiques sociales au Congo (18701959) : la mise en œuvre
La présence européenne en Afrique le cas du Congo au milieu du XIX ème siècle se
manifeste sur le plan tant politico-économique que culturel et spirituel. Cette période est celle
de la mise en œuvre officielle des politiques sociales par l’Administration coloniale et l’Eglise
(Jones, 1970).
Les Européens, pour réaliser les actions sociales, s’appuient sur l’Eglise Catholique et
Protestante, notamment, l’Eglise Evangélique et l’Armée du Salut. Tout commence avec des
mouvements de Réveil qui éclatent en Angleterre et en Europe du Nord ou dans les pays
Scandinaves comme la Norvège et la Suède. Ils contribuent à la création des sociétés de
mission constituées des pionniers, parmi lesquels, des sociétés américaines et les spiritains.
Ces derniers arrivent en premier au Congo, mais ne connaissent pas de succès.
Suite à l’échec des spiritains en Angola, les Pères Dupar-quet et Carrie, de la Congrégation du
Saint-Esprit, arrivent sur la côte congolaise de l'Atlantique en 1873 et fondent la mission au
Congo autrefois portugais. Les missionnaires relancent
une œuvre abandonnée, en
commençant à réapprendre l'Évangile aux indigènes. En terre congolaise, l’Eglise Catholique
s’implante en premier en 1873.
Mais, l’imbrication de l’Administration coloniale avec l’Eglise est démontrée par le fait que
celle-ci a facilité l’installation des missionnaires. C’est ainsi que Mizon écrit (le 8 octobre
44
Balandier G. (1965), La vie quotidienne au Royaume de Kongo du 16è au 18è siècle, Paris, Hachette, pp.42-43.
167
1881) au Père Augouard, qui symbolise avec De Brazza, l’imbrication des deux structures en
disant :
…je ferai tout ce qu’il sera possible pour vous faciliter l’établissement d’une
mission dans le pays de Batékés, à l’endroit que vous me désignez dans
votre lettre… Mon Père, vous travaillez pour le Dieu qui est le mien ; je
travaille pour ma patrie qui est la vôtre ; nous réussirons à faire pénétrer la
civilisation dans ces contrées et comme vous le dites, à y faire connaître et
aimer le nom de notre France45.
L’Eglise est utile à l’œuvre coloniale à travers les actions scolaire et sanitaire. Mais,
l’Administration coloniale est au début réticente face au combat des missionnaires
contre la polygamie et la sorcellerie.
Par ailleurs, dans la mission de l’Eglise, les protestants rencontrent quelques difficultés par
rapport aux catholiques qui sont plus proches de l’Administration française.
1.2.1. Les politiques sociales de l’Eglise
Les sociétés des missionnaires ont principalement deux préoccupations qui se traduisent en
deux politiques. Les politiques « civilisatrice », d’abord, à travers les politiques de la famille
et de la société, notamment, l’enseignement. La dynamique d’alphabétisation et de
scolarisation enclenchée au Congo est au départ l’œuvre des missionnaires catholiques,
protestants et évangélistes ; ensuite, il y a la santé, et enfin, la politique d’évangélisation des
populations autochtones dites indigènes.
Les enseignements ont pour première utilité de donner aux indigènes des bribes de
connaissances nécessaires devant permettre uniquement de savoir écrire et lire la bible. Ils se
dispensent dans les couvents, pour les filles, et les séminaires, pour les garçons, à travers les
catéchismes, pour les catholiques. Pour les protestants et les évangélistes, ces enseignements
se passent dans d’autres maisons de formation.
45
Mizon cité dans Witwicki 1995, p. 289.
168
Ces Missions sont soutenues par des œuvres sociales appelées politiques sociales ayant pour
but, entre autres, d’améliorer les conditions de vie des populations, dans des possessions
coloniales à travers l’assistance, car l’Administration a, par ailleurs, besoin d’une maind’œuvre valide.
Par ces politiques, l’Eglise devrait, entre autres, libérer ces populations du péché, par la
spiritualité, de la maladie corporelle (à travers les Centres de santé) et de l’analphabétisme
(grâce à l’école). Cela justifie que, dans la plupart des postes missionnaires, il y ait un clocher,
un centre médical et une école qui constituent des domaines fondamentaux de ces politiques
publiques. Ces actions sociales viennent en complément, car, les services sanitaires créés par
l’Etat colonial ne répondent pas aux besoins de tout le pays.
Cette présence a contribué aussi à la confrontation de civilisations et de cultures négroafricaines contre celles occidentales (Administrateurs et missionnaires), à travers les
politiques de la famille, en luttant contre la polygamie et la sorcellerie.
L’Eglise Evangélique, par exemple, s’implante au Congo en 1909 à Madza, et obtient
l’autonomie en tant qu’Eglise Evangélique du Congo (EEC) en 1961. Les deux politiques
publiques fondamentaux qui accompagnent ou complètent l’évangélisation sont les œuvres
médicales et scolaires. L’œuvre médicale de l’Eglise Evangélique se fait grâce aux apports
extérieurs, notamment, l’appui des partenaires et organisations gouvernementales de certains
pays de l’Europe du Nord (Ngala, 1973). Cette œuvre est constituée d’infirmeries, des
maternités, des pharmacies et elle est répartie à travers tout le territoire congolais, sauf dans la
région administrative de la Likouala (au Nord du Congo). L’Eglise participe également à
l’effort de lutte contre le Sida (avec un budget annuel de plus 100 000 000 de FCFA). Elle est
assurée de la collaboration des Eglises sœurs avec l’arrivée du personnel médical Scandinave.
Depuis 1964, l’Eglise pratique la médecine par les plantes dans les paroisses de Boko et
Mindouli. En 1989, l’action sanitaire a enregistré 1500 accouchements, 35 000 journées
d’hospitalisation et elle a réalisé un vaste programme de vaccination dans 30 villages au
Congo.
1.2.2. Les politiques sociales de l’Administration coloniale
169
L’émergence des politiques sociales venant de l’Administration date des premières mesures
publiques ciblant les populations congolaises les plus déshéritées apparaissent pendant la
période coloniale. Il s’agit des politiques de santé, d’alimentation et d’enseignement. Le but
visé à travers ces politiques est de s’occuper des individus capables de rendre de nobles
services à la métropole (Coquery-Vidrovitch, 2001).
L’Administration coloniale a procédé à des campagnes médicales de masse, et cette politique
commence en 1893. C’est de cette manière que la prise en charge des malades indigents est
décrétée.
Plusieurs arrêtés appuient par la suite cette politique envers les indigents. Il s’agit de l’arrêté
du 2 août 1917, relatif au fonctionnement des services médicaux hospitaliers et
réglementaires, et de l’arrêt du 15 décembre 1928, fixant les conditions sanitaire de l’Afrique
Equatoriale Française, qui stipule en son article premier que « les soins sont donnés
gratuitement aux indigènes de la colonie ou du groupe de colonies porteurs d’un certificat du
chef de circonscription constatant qu’ils n’ont ni revenu, ni emploi ou qu’ils sont
indigents »46. Mais cette disposition est élargie grâce à l’évolution des critères donnant accès à
l’aide à travers l’arrêté n°3114-DGF-6 du 4 novembre 1949. Le terme « indigence » est
remplacé par « personne nécessiteuse ». Néanmoins, les frais d’hospitalisation des indigents
sont à la charge des budgets locaux du Moyen-Congo, à travers d’abord l’arrêté du 14
novembre. Cette gratuité des soins est instituée par la loi n°55-1489 du 18 novembre 1955,
relative à la réorganisation municipale en Afrique Occidentale et Equatoriale françaises et à
Madagascar.
Cependant, la prise en charge des indigents est née de la discrimination entre les Français de
la Métropole, des Antilles et autochtones appelés autrefois « indigènes », qui aspirent à la
gratuité des soins. Dans celle-ci, les Français de la Métropole bénéficient d’un certificat
d’admission à l’Hôpital et les autochtones peuvent obtenir le certificat d’indigence.
Par ailleurs, étant une colonie française, Brazzaville bénéficie de la législation sociale
française sur les accidents du travail de 1898, qui pose un principe général d’intervention.
Cette loi porte en germe l’idée de la protection contre les risques sociaux qui permettent
46
Journal Officiel de la République Française du 8 novembre 1928, pp.11-876.
170
également l’affirmation du droit social autonome du droit civil, prolongé par les lois du 5 avril
1928 et du 30 avril 1930. Créé au bénéfice des salariés de l’industrie et du commerce, les
indigènes salariés ont profité du premier système complet et obligatoire d’assurances sociales
(couverture des risques maladie, maternité, invalidité, vieillesse et décès), ainsi que sur les
risques maladies avec l’action sanitaire.
Mais, l’arrêté 1925 ITT/MC sur la protection sociale n’a pris effet que dans l’année 1956,
avec la création de la Caisse de Compensation des Prestations Familiales (CCPF).
La situation sociale des territoires de l’Afrique Equatoriale Française à cette époque veut que
l'administration coloniale puisse aider les populations indigènes. C’est ainsi que
l’Administration devrait veiller à l'amélioration de leurs conditions d'existence et de leur
évolution (même morale), même si l'objectif principal des colonisateurs est de mettre en
valeur les richesses naturelles du Congo en leur profit. Cependant, l'application de ces
objectifs ne devrait passer qu'à travers les réformes qui font office des politiques sociales de
l'administration coloniale, qui devraient concerner plusieurs secteurs à savoir les politiques
d'assistance médicale et d'hygiène, de l'enseignement, d’alimentation et d'organisation
collective.
1.2.2.1. Organisation collective
Dans le domaine des collectivités locales, les réformes d'ordre social réalisées par
l’administration coloniale favorisent entre autres l'organisation : des villages, des chefferies,
de l'œuvre de la protection de l'enfance, de la maternité indigène. Dans le même sens, ces
politiques ont également contribué à la création des sociétés de prévoyance, d'état civil
indigène, d'offices de l'alimentation et à la constitution de greniers de réserve dans la plupart
des localités congolaises.
Cependant, de manière générale, les politiques publiques en tant que processus historique de
transformation de l’Etat, débute à partir de la loi française de 1898 sur les accidents du travail,
qui devrait concerner également les colonies françaises (Ewald, 1986).
171
1.2.2.2. Politique alimentaire
L'administration locale a, entre autres, un devoir impérieux qu'elle a placé au premier rang de
ses préoccupations, celui d'assurer aux indigènes un bon régime alimentaire, et par la suite,
elle devrait accroître et varier les cultures vivrières dans l’ensemble du territoire.
Le but de cette politique publique est de procurer aux indigènes un complément alimentaire,
tout en créant des Centres d'élevage dans toute la colonie. Elle devrait également développer
la culture des légumineuses qui sont riche en azote et créer des réserves vivrières
permanentes, en s'appuyant sur les circulaires n°34 du 30 mai 1936 et celle n°63 du 27 août
193647, ainsi que sur trois arrêtés du 29 avril 1936. Ces textes constituèrent également les
assises de la politique alimentaire des colonies.
1.2.2.3. Les politiques de santé et de l’éducation
Les œuvres scolaire et sanitaire marchent ensemble et représentent le cœur des politiques
publiques du système colonial.
Action sanitaire
Elle a permis, d'un côté, de prévenir les maladies en vaccinant à tour de bras de longues files
des indigènes. Cette médecine est celle de masse, destinée à enrayer les grandes endémies
identifiée sur le territoire ; de l'autre, elle favorise le traitement des maladies tropicales,
comme la maladie du sommeil (trypanosomiase), la fièvre jaune. Par ailleurs, l'intérêt de cette
politique publique est aussi pour les colonisateurs d'avoir une main-d’œuvre autochtone
abondante, de bonne qualité et disponible pour l'exploitation de la colonie, alors que la
pénurie la guette et ils sont obligés pour faire face à celle-ci pour la construction du chemin de
fer Congo-océan (CFCO), de faire appel à la main-d’œuvre chinoise comme le dit Bokilo48.
C’est à travers ce prisme que l'Empire français installe l'Assistance médicale indigène (AMI),
qui est un système de santé, une institution mise en place à l'initiative du Gouverneur général
Gallieni en 1896. Elle est élaborée pourMadagascar au début du siècle et s’est étendue à
47
DESTE J. F. (1879-1976), Action politique, économique et sociale en AEF : 1963-1938, p.78.
BOKILO J L. (2012), La Chine au Congo-Brazzaville, Stratégie de l’enracinement et conséquences sur le
développement en Afrique, Paris, L’Harmattan, pp. 54-57.
48
172
l'AOF et l'AEF. Ainsi, elle est une solution sociale et économique, car, les colonisateurs ont
besoin d’une main-d’œuvre solide, valide et en bonne santé.
Le manque de main-d’œuvre valide a poussé l’Administration à favoriser l’importation de la
main-d’œuvre venant des pays comme le Tchad, la Chine pour la construction de Chemin de
Fer Congo Océan.
Cette action s’accompagne aussi par une action d’hygiène et d’alimentation appropriée,
permettant de libérer l’indigène de la misère physiologique. Donc, parallèlement aux actions
de dépistage des maladies et traitement dans les hôpitaux, il y a entre autres le programme de
travaux d’assainissement.
Les politiques de l’éducation
L’organisation de l’enseignement public comme institution coloniale date de la période du
Commissariat Général, qui va de 1881 à 1910 (Freyssinet-Dominjon, 1969). Cependant, ces
politiques sont organisées officiellement au Congo à partir de l’année 1911, car, avant cette
période, l’enseignement public n’est pas encore officiellement organisé. Cette officialisation
est l’œuvre des missionnaires (Bulletin mensuel du Comité de l’Afrique Française, 1928).
Cependant, l'action scolaire49 plus tard universitaire a en réalité pour objectif la sélection
d'une élite, car elle est aussi un instrument de promotion sociale. L’Administration locale a
voulu également instruire les masses indigènes, les élever sur le plan moral ou de l’esprit.
L'Administration, dans son action envers les femmes, par exemple, a décidé de prendre en
charge l'éducation de certaines filles qui devraient répondre au souci politique de pénétrer au
cœur du foyer indigène. Pour ces filles, une fois devenues épouses ou mères de famille, elles
devraient faciliter la diffusion des valeurs européennes dans les familles indigènes. De la
même manière que Michael Jackson a fait accepter les Noirs américains dans les familles des
Blancs américains, grâce à sa musique (Bokilo, 2011). Mais, à ce niveau, ce qui domine, c'est
de l'éducation pratique, morale et sociale. Il s’agit des éducations ménagères, de morale, de
couture. Elles devraient également permettre aux indigènes d’apprendre les leçons de cuisine
49
Arrêté portant organisation générale de l’Enseignement en A.E.F N° 6 du 2 janvier 1937 (JO. P.134).
173
et de faire des formations d’auxiliaires : interprètes, employés de commerce, infirmiers et
ouvriers, plus que la transmission de connaissances pouvant entraîner les effets émancipateurs
de l'instruction. Il faut quelque part les contenir pour les contrôler. Dans ces conditions,
l’action sociale est un moyen pour l’institution publique et les groupes d’indigènes dominants
d’avoir le contrôle des conduites privées ou des classes populaires (Donzelot, 1977).
Grâce à ces politiques ou ces actions civilisatrices, les premières normaliennes africaines, qui
sont formés entre 1938 et 1956 au Sénégal, sont de près de 300 jeunes filles. Elles viennent de
toutes les colonies françaises, dont Brazzaville.
Par ailleurs, ces filles suscitent critiques et convoitises auprès de certains Africains, car, elles
sont traitées par les autres africains de « marionnettes nègres » ou de « demoiselles
frigidaires », parce qu’elles ont la réputation de vivre comme les Blancs, d’exiger le
réfrigérateur dans leur foyer.
Pour la mise en œuvre de ces politiques publiques, l'Administration coloniale est dans
l'obligation de construire des centres de santé, des écoles et internats, des écoles supérieures.
Cela justifie la place qu'occupent les actions sanitaire et scolaire dans les budgets de l’AEF de
1936 à 1938, qui ont pour objectif de proposer, entre autres, de pousser avec vigueur la
réalisation du programme d'actions politique, économique et sociale de ces années coloniales.
Tableau n° 1 : Budgets de l’AEF exercices 1936, 1937 et 1938
Pour l’enseignement et l’assistance médicale.
Assistance médicale
Enseignement
1936
14.910.680 F
2.490.850 F
1937
15.710.000 F
2.809.480 F
1938
21.826.000 F
6.665.700 F
1936-1938
Source : Deste, J-F, (1879-1976), Action politique, économique et sociale en AEF :
1963-1938, pp.33-34.
174
Ces chiffres présentent une augmentation du budget de 1938 et l’accent de ce budget est aussi
mis sur l’assistance médicale et l’enseignement, qui sont les bases essentielles de l’évolution
de la colonie congolaise.
1.22.4. La conquête des droits fondamentaux des Congolais
Les élites africaines éduquées à l’école française ont, d’abord, commencé par contester la
hiérarchie qui suppose que, malgré l’instruction, les peuples indigènes ne peuvent s’élever au
niveau des Européens. Entre temps, la France refuse de faire de ces colonisés des citoyens de
plein droit, avec le droit de vote et ce qui donne quelque part l’occasion aux administrateurs
de commettre des exactions, sans être poursuivis. Face à cette situation, les Matswanistes
refusent de payer l’impôt et ils ont été réprimés par l’administration coloniale. André Grenard
Matsoua et ses compagnons sont arrêtés et jugés en 1930. Après, les politiques sociales, la
sortie de l’Etat social pour l’Etat pénal est confirmée (Wacquant, 1998).
Ces contestations ont également contribué à ce que les élites africaines puissent acquérir en
1947, l’équivalence des diplômes qui a favorisé à quelques « élus » de poursuivre leurs études
en France. En conséquence, l’histoire du rapport entre administration et colonisé est aussi
l’histoire de la différentiation du social et du répressif.
Ainsi, des dispositifs politiques et sociaux permettant la redistribution des ressources au
Congo comme partout en Afrique noire, commence par la lutte pour les autochtones à la
conquête des droits fondamentaux de l’homme. Cette lutte est liée aux trois dimensions
civiles de la citoyenneté, politique et sociale.
La première dimension civile de la citoyenneté renvoie à la conquête de la liberté de pensée,
de parole et de croyance, non seulement au Dieu du colonisateur, mais aussi aux fétiches. La
seconde, politique veut que le droit de vote fasse de l’indigène un citoyen, un membre à part
entière de la communauté politique, détenteur aussi comme l’homme blanc d’une parcelle de
souveraineté. Et, enfin la troisième, celle sociale, concerne la citoyenneté liée au
développement des droits sociaux, d’autant plus que l’imposition est obligatoire pour tous les
autochtones.
175
Par ailleurs, la volonté d’affranchissement du joug colonial est caractérisée par l’acquisition
des droits civils à la revendication d’une responsabilité de l’Etat à travers un certain nombre
de droits sociaux et économiques, en passant par la conquête des droits politiques nés de
l’impératif démocratique du choix par les autochtones de leurs représentants à l’Assemblée
nationale française, le cas de Félix Houphouët-Boigny.
L’existence d’un Etat-providence dans le Congo colonial est liée à un certain nombre de lois
sociales qui sont promulguées à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle en France. Il
s’agit des lois de 1946, qui ont permis l’instauration d’un système généralisé de sécurité
sociale pour l’ensemble de la population française et celles de ses colonies dont le Congo.
1.3. L’institutionnalisation postcoloniale (1960-1963)
Au lendemain des indépendances, les politiques sociales ont bénéficié, pour le cas du Congo,
de l’impulsion du système multipartiste hérité de la colonisation, sans une réalisation majeure.
Au cours de l’ère post-coloniale, ce pays a connu une situation économique relativement
prospère e tpréconise le libéralisme économique en garantissant l’initiative privée. Ce régime
de l’Abbé Fulbert Youlou décide d’imposer le régime mono partiste. En négligeant les
urgences sociales, il consacre plus de temps à la politique étrangère, car, il est obsédé par la
peur d’un complot. Cette démarche le pousse à la démission sous la pression syndicale
(Monga, 1997).
Ainsi, il est clair, qu’une doctrine naissante importée en Afrique appelée le Socialisme, qui va
de 1964 (date de l’officialisation du parti de masse) à 1991 (date de la Conférence nationale
souveraine marquant l’avènement de la démocratie), a complètement créée de la rupture avec
les anciennes politiques sociales.
2. Changement sur l’approche de gestion des politiques sociales par le parti unique de 19641991
Les politiques sociales établies sous le régime monopartisme sont la source de contraintes
institutionnelles, notamment, des règles du parti unique. Cela exprime le changement, l’ancien
paradigme ne pouvant plus rendre opérationnelles des politiques sociales, car, la rupture avec
176
l’ancienne politique se manifeste par la manière d’agir du nouveau régime [P. Hall, 1993].
Toutes les politiques sociales du pays se décident à la direction du parti.
Il s’agit d’une rupture de systèmes politiques, mais les acteurs restent les mêmes (Crozier et
Friedberg, 1977).
2.1. L’implémentation des politiques sociales pendant le parti unique
Ce nouveau vent politique se traduit par la mise en place d’un parti unique qui est officialisé
en 1964, à savoir : le MNR (Mouvement National de la Révolution), qui est un parti de
masses50. La pensée socialiste est dominée par un débat entre deux tendances socialistes. La
première veut d’un Socialiste Bantou, dirigée par Massamba-Débat, et la seconde, d’un
Socialiste scientifique51, encadrée par Pascal Lissouba. Mais, la période la plus marquante est
celle de l’installation du Marxisme-léninisme avec le deuxième parti unique, qui est un parti
d’avant-garde, le « PCT » (Parti congolais du travail), commandé par Marien Ngouabi.
L’option politique et idéologique prise veut que tous les modèles de développement, y
compris celui à vocation sociale, qui ont prévalu entre 1964 et 1991, ont conféré à l’Etat une
fonction prépondérante, avec entre autres pour principe : liquider progressivement et
totalement le secteur privé et l’action sociale de l’Eglise devrait être aussi proscrite
(Althusser, 1970). Ainsi, l’Etat devrait s’affirmer à travers l’importance du secteur public
(Senghor, 1971). Seul, l’Etat a le monopole de la politique de l’emploi.
Mais, le comble est que ces sociétés publiques sont paralysées par une gestion chaotique
(pléthore, politisation) (Maldonado et Gaufryau, 2001). La fermeture de certaines de ces
entreprises fait augmenter le chômage qui complique encore la situation sociale déjà
exsangue.
Entre 1969 et 1989, la politique de l’éducation est marquée par le projet dit l’« Ecole du
peuple », ce slogan est appuyé par le colloque de 1970 qui initie un projet sur une nouvelle
école qui se veut à la fois politique et sociale. Cette initiative a pour but l’édification d’une
50
Bazenguissa-Ganga R. (1997), Les voies du politique au Congo, Essai de sociologie historique, Paris,
L’Harmattan, p.105.
51
Bokilo J. L. op. cit., p. 62.
177
« société socialiste » avec une « école du peuple ». Et, c’est la loi 20/80 du 11 septembre
1980, qui a systématisé ces grandes orientations.
De ce fait, pendant cette période, les politiques sociales se matérialisent par une politique
d’équilibre social (PES) et de confiscation des écoles et centres de santé privés par le parti
d’avant-garde.
2.1.1. L’arrêt forcé de l’action de l’église dans le domaine social
La manifestation de la politique brutale du parti d’avant-garde s’est matérialisée par la
confiscation ou la nationalisation. D’abord, des écoles privées à travers la loi n°32/65 du 12
août 1965 proclamant « la nationalisation de l’enseignement, la gratuité et la neutralité vis-àvis de la religion ». Le projet veut que l’école soit l’«école du peuple », grâce à la loi 20/80 du
11 septembre 1980. Mais, ce projet est un échec. Son montage est faussé, car, il n’a pas
d’objectif quantifiable, aucun plan d’actions et élément sur son coût. Et, ensuite des centres
médicaux, notamment celles des Eglises. En 1970, l’Eglise Evangélique du Congo s’est vue
confisquée par l’Etat des Infirmeries d’Indo et de Zanaga.
Cependant, avec le vent de l’arrivée de la Démocratie, l’Etat à travers son Assemblée
Nationale Populaire a décidé de « libérer le secteur social ». Cette nouvelle orientation est
soutenue par la loi n° 008-90 du 6 septembre 1990, « portant réorganisation du système
éducatif au Congo », en son article 3, qui stipule que « l’Enseignement est dispensé par les
Etablissements Publics et par les Etablissements privés ».
2.1.2. La politique d’équilibre social (PES)
Chaque citoyen devrait justifier ses biens et services en direction du peuple. La redistribution
de ceux-ci devrait être équitable, en s’appuyant sur la rationalisation. Chaque famille devrait
avoir la même portion de pain et elle ne doit pas avoir une petite marge d’aliment (un peu à
l’image du Venezuela). Les biens comme des réfrigérateurs devraient être vendus moins
chers. Et, par ailleurs, l’Etat a décidé de faire de l’agriculture une « priorité des priorités »,
sans disposer des moyens de production des machines agricoles, à la différence de la Russie,
qui fabrique les réfrigérateurs et engins pour la production agricole. Dans le système
capitaliste, les populations devraient manger à leur faim. Cette situation est déjà une source de
178
mécontentement, qui voue ce système en quelque sorte déjà à l’échec. Car, le Congo n’a pas
le potentiel pour soutenir la politique sociale à vocation socialiste.
Par ailleurs, l’Etat a aussi instauré la gratuité dans tous les secteurs, notamment, de la santé et
de l’éducation. Le mot d’ordre des dirigeants politiques est que tout doit appartenir au peuple,
mais sous la direction de l’Etat, du parti unique. Les citoyens devraient justifier la provenance
de leurs biens. C’est ainsi que le slogan phare des dirigeants congolais à cette époque est :
« Tout pour le peuple, rien que pour le peuple ! ». Ainsi, l’articulation des mécanismes de
solidarité est exclusivement réalisée par l’Etat, quelquefois avec l’aide des pays amis et
institutions internationales à travers la coopération multilatérale. Mais, les politiques sociales
de l’Etat sont conçues comme un moyen de transition au Socialisme et sont influencés par :
-
Le développement du secteur productif d’Etat dans le domaine agricole, conçu dans un
contexte où les capitaux privés, nationaux ou étrangers, ne veulent plus investir au
Congo, à cause de l’orientation socialiste. Il s’agit du soutien à la production populaire
et au secteur coopératif émis par la Directive du IIIe Congrès Extraordinaire du Parti
Congolais du Travail (PCT), selon laquelle, l’activité agricole devrait être considérée
comme prioritaire;
-
Le non contrôle par l’Etat des secteurs stratégiques de développement a contribué à la
nationalisation de certaines entreprises, dans le but de faire face à la dégradation
inexorable de la Fonction publique comme débouché quasi-unique des demandeurs
d’emploi au Congo, que le système éducatif jette annuellement sur le marché du
travail congolais.
Néanmoins, ce qui caractérise les politiques sociales dans ce système communiste ou
socialiste, c’est le fait que l’Etat soit l’acteur principal des politiques publiques, en mettant de
côté tous les autres acteurs comme les ONG. Dans ce registre, l’attention n’est pas
suffisamment accordée aux intervenants extérieurs privés ou à la société civile.
Dans ce registre socialiste, les politiques sociales s’exécute beaucoup plus dans le cadre des
grands plans étatiques et sur le cas du Congo, parmi, on peut citer le plan quinquennal.
179
Dans ce plan, les politiques sociales sont orientées vers un développement autocentré. Le
Congo devrait assurer le maintien du choix socialiste dans un environnement marqué par la
baisse constante et continue des niveaux de production de l’agriculture et, particulièrement,
des productions paysannes qui ont un impact sur la santé et la sécurité alimentaire des
populations les plus vulnérables. C’est dans cette perspective générale que le Congo s’est doté
des instruments qui peuvent être définis comme des politiques publiques indispensables pour
lutter contre la pauvreté, les inégalités et les exclusions des populations les plus vulnérables.
2.2. Le fonctionnement des institutions et l'organisation des systèmes de pouvoir et de
décision
Dans ce système de parti unique, le processus de décision est centralisé autour de deux
organes cardinaux : le Bureau politique et le Comité central.
Le Président de la République reçoit l’avis du Bureau politique sur des questions liées à
l’Exécutif, notamment, sur le choix des membres du Gouvernement. Ce même Bureau
politique fait exécuter les décisions du Comité central52.
2.2.1. Les moyens de régulation et de contrôle de l’Administration
Le contrôle des actions publiques est assuré par le Bureau politique du parti unique, qui est à
son service, la sécurité d’Etat et la police. Ce Bureau a le devoir de contrôler la vie politique,
les pouvoirs publics et économiques de la Nation entre les sessions du Comité central. Sauf
cas exceptionnel, le renouvellement se fait après tous les cinq an au congrès.
Néanmoins, le syndicat unique qui est la CSC (Confédération Syndicale Congolaise) a
beaucoup de pouvoir dans ce système.
Ainsi, l’évolution de l’Etat vers l’Etat-providence au Congo est liée aux limites de l’assistance
de l’Etat devant la paupérisation croissante née du départ des colons qui laissent un Etat en
construction et en quête d’unité.
52
Le congrès constitutif du Parti Congolais du Travail, tenu à Brazzaville du 29 au 31 décembre 1969.
180
Conclusion
Les résultats de l’étude qui s’achève permettent de dégager deux grandes phases de
développement des politiques sociales au Congo.
La première, c’est la phase démocratique et la deuxième traitée d’idéologique, donne
l’occasion à cette étude d’évoquer la rupture du modèle de l’action publique dans un même
pays avec les mêmes acteurs.
Cette étude permet également de confronter les hypothèses issues de la question de départ.
Celles avancées sont corroborées par l’ensemble des analyses, lesquelles permettent de tirer la
conclusion, selon laquelle, l’imbrication de l’Administration coloniale et de l’Eglise, d’une
part, la différentiation sur le mode de gestion de l’Etat à travers le parti unique qui fait de
l’Etat, le seul à avoir le monopole des actions sociales, en mettant de côté les ONG, confirme
la singularité du regard socio-historique de la mise en œuvre des politiques sociales au Congo
par rapport aux pays qui n’ont pas connu, par exemple, le parti unique ou la colonisation.
Donc, il sied de dire que les pistes de réflexion retenues dans cet article enrichissent la
perspective néo-institutionnaliste, voire de la science politique au sujet du développement des
politiques sociales. Ainsi, que peut-on dire des politiques sociales actuelles ?
181
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REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE B - ECONOMIE / NUMERO 1 - VOLUME 2 - Décembre 2016 / pp. 185-214.
Protection des droits de propriété et diversification économique dans l’espace CEDEAO
Moussa SANGARE
Université Alassane OUATTARA, Bouaké (Côte d’Ivoire)
[email protected]
Résumé
Cette étude revisite les déterminants de la diversification économique dans l’espace CEDEAO
en accordant une attention particulière à la protection des droits de propriété. Elle décrit la
concentration des exportations des pays de la CEDEAO et identifie les moteurs de la
diversification des économies de cette zone. Ainsi, elle utilise un modèle de panel inspiré de
ceux de Longmore, Jaupart et Cazorla (2014) et de Sannassee, Seetanah et Lamport (2014).
Les résultats de l’étude montrent que la protection des droits de propriété, le revenu par tête et
l’ouverture commerciale stimulent le processus de diversification économique alors que le
climat d’investissement et le taux d’inscription en cycle tertiaire semblent ne point impacter
ce processus. Sont donc recommandées la suppression de toutes les barrières commerciales,
l’amélioration du pouvoir d’achat des populations et la protection des droits de propriété dans
l’espace CEDEAO.
Mots-clés : Droits de propriété, Diversification, Croissance économique.
Property rights protection and economic diversification in ECOWAS space
185
Abstract
This study revisits the determinants of economic diversification in the ECOWAS space
paying particular attention to the protection of property rights. It describes the concentration
of exports from ECOWAS countries and identifies the main drivers of economic
diversification in this space. So, it uses a panel model inspired from those of Longmore,
Jaupart and Cazorla (2014) and Sannassee, Seetanah and Lamport (2014).
The study results show that property rights protection, GDP per capita and the degree of
economic openness promote economic diversification process, while investment climate and
the inscription rate in tertiary education do not impact this process. The remove of all trade
barriers, the improving of GDP per capita and property rights protection are recommended.
Keywords : Property rights, Diversification, Economic growth.
186
Introduction
La Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) (15 Etats pour
6,14 millions de kilomètres-carrée) forme un vaste marché de près de 320 millions d’habitants
(environ 35% de la population d’Afrique subsaharienne). Cette communauté représente à peu
près 27% du PIB courant de toute l’Afrique subsaharienne avec une structure économique et
démographique assez contrastée. De “petites économies” (Gambie, Cap-Vert) cohabitent avec
le Nigeria (48% du PIB régional et 55% de la population de la région) qui est la première
économie continentale et des puissances économiques régionales (Côte d’Ivoire, Ghana). A
l’horizon 2050, l’espace CEDEAO abritera 8% de la population mondiale (ENDA CACID,
2012). Les autorités devront donc faire face à de nombreux défis dont la diversification de
l’offre de biens et services, pour améliorer les conditions de vie de leurs concitoyens.
Malheureusement, la CEDEAO ne pèse actuellement que 0,5% du PIB mondial, 0,5% des
importations mondiales et 0,7% des exportations mondiales. Les économies de la CEDEAO
souffrent davantage de la volatilité que de la relative faiblesse de leur taux de croissance
économique (Graphique A.1). Cela accentue la vulnérabilité de ces économies pourtant dotées
de fortes potentialités économiques largement sous-exploitées (ENDA CACID, 2012).
Les économies de cette sous-région font partie de celles qui sont les moins diversifiées au
monde. Elles reposent essentiellement sur les secteurs agricole et minier. En 2009,
l’agriculture représentait plus du tiers du PIB dans les deux-tiers des Etats de la CEDEAO et
seuls quatre de ces Etats avaient des secteurs manufacturiers qui pesaient plus du dixième de
leur PIB. Par ailleurs, seuls le Bénin, la Gambie, le Sénégal et le Cap-Vert ont des secteurs
tertiaires qui contribuent à plus de 50% à la formation de leur PIB. Certains pays, notamment
la Guinée-Bissau et le Nigéria, ont des recettes d’exportation qui proviennent à plus de 85%
d’un seul produit. L’indice de concentration des exportations dans l’ensemble des pays de la
zone Franc est estimé à 0,22 en moyenne contre une moyenne mondiale de 0,08 et un niveau
de 0,14 pour l’ensemble des pays en développement (BCEAO, 2012). Ces différents chiffres,
qui attestent la forte concentration des exportations des pays de la CEDEAO, expliquent
187
incontestablement leur faible participation au commerce international et soulignent
l’impérieuse nécessité de diversifier ces économies vers les produits à forte valeur ajoutée.
Cependant, elles doivent surmonter l’“obstacle” que constituent les droits de propriété dans la
réalisation des investissements pourtant nécessaires au processus de diversification et de
croissance économique ; et ce, en dépit de leur effet théoriquement ambigu sur l’innovation
(Napo et Ambagna, 2014 ; Locke, 2013 ; Pfister et Combe, 2001). En effet, la performance
économique d’un pays reste subordonnée à l’existence d’institutions inclusives protégeant les
droits de propriété des investisseurs et exerçant un certain contrôle sur le pouvoir politique et
les élites (Acemoglu et Robinson, 2015 ; Acemoglu, 2008 ; Acemoglu, 2003).
Est un droit de propriété, tout titre donnant à une personne physique ou morale le droit
d’utilisation exclusive d’un actif, un procédé, un bien ou un service de sorte à ce qu’une tierce
personne ne puisse pas l’utiliser ou en jouir sans l’accord préalable du propriétaire, du
détenteur ou de l’inventeur. Ainsi, les droits de propriété, à condition que soient
convenablement définies leur étendue optimale et leur durée, jouent un rôle primordial dans le
processus de création de richesses non seulement en étant à la base de nombreuses incitations
en faveur de l’investissement, de l’épargne et d’une meilleure utilisation des actifs, mais
également en assurant la protection et la diffusion de l’innovation reconnue dans la littérature
économique comme un puissant facteur explicatif de la croissance économique (Aragón,
2015 ; Marcelin et Mathur, 2015 ; Woo, Jang et Kim, 2015 ; Acemoglu et Robinson, 2015 ;
Napo et Ambagna, 2014 ; Besley et Ghatak, 2010 ; Idris, 2003 ; Stiglitz, 2000 ; Liotard,
1999 ; Norton, 1998 ; Bessy et Brousseau, 1997 ; Deffains, 1997 ; Romer, 1990).
Dans le contexte africain, la question des droits de propriété est assez prégnante. En effet,
certains dirigeants ont appauvri leurs concitoyens et retarder le développement économique et
social de leur pays en imposant des droits de propriété incertains et des institutions
économiques vacillantes (Acemoglu et Robinson, 2015). Ces insuffisances ont favorisé la
contrefaçon des produits pharmaceutiques pouvant atteindre l’énorme seuil de 70% dans
certains pays (Idris, 2003). En outre, le renforcement des droits de propriété semble être à
l’origine d’une redistribution des revenus du Sud vers le Nord dont l’ampleur est tout de
même contestée (Pfister et Combe, 2001).
188
Dans l’espace CEDEAO, à l’instar des pays de l’Afrique subsaharienne, des contraintes
économiques, environnementales, culturelles, géographiques, technologiques et sociales
fragilisent parfois le processus de développement. Mais, elles sont subsidiaires aux contraintes
politiques érigées, délibérément ou non, par des institutions défaillantes. Ainsi, les problèmes
de gouvernance et de qualité des institutions sont couramment évoquées (Acemoglu et
Robinson, 2015 ; Sangaré, 2008 ; Ouattara, 2007 ; Edison, 2003).
D’ailleurs, la qualité des institutions peut être mesurée à travers leur réelle capacité à faire
respecter les titres de propriété d’une part et à diversifier les activités économiques d’autre
part.
Mais, la production, la commercialisation et la consommation de plusieurs biens et services
sont soumises à des droits de propriété qui du coup influencent le processus de diversification
économique. Pourtant, la littérature économique reconnait que cette dernière rend l’économie
moins tributaire des produits de base et lui permet de disposer d’une capacité accrue à résister
aux conséquences des fluctuations récurrentes du marché international (à l’image de la Chine
malgré son ouverture économique croissante) et d’atteindre une croissance économique
durable, une balance des paiements satisfaisante, des créations d’emplois et une redistribution
des revenus. Par ailleurs, la diversification propulse l’économie vers la production et
l’exportation de produits plus élaborés et constitue dans une certaine mesure un tremplin pour
son développement économique (Sannassee, Seetanah et Lamport, 2014). Malheureusement,
la diversification économique risque d’être une gageure dans l’espace CEDEAO si des efforts
considérables ne sont pas faits pour garantir, de manière optimale, les droits de propriété dont
les effets positifs sont démontrés particulièrement sur l’investissement, l’offre de travail, la
productivité agricole et l’utilisation des terres (Idris, op. cit. ; Aragón, 2015). Aussi, le
développement de la contrefaction dans des secteurs d’activité, à l’image des industries
textiles turques et des industries chinoises de logiciels et de biens culturels (Pfister et Combe,
2001), pourrait-il stimuler sensiblement le processus de croissance économique dans les pays
concernés.
Dès lors, il importe de s’interroger sur les principaux facteurs explicatifs de la diversification
économique dans l’espace CEDEAO. En d’autres termes, la concentration économique estelle assujettie à une bonne définition et au renforcement des droits de propriété ? Le pouvoir
d’achat (approximé par le PIB par tête), le niveau d’instruction (approximé par le nombre
189
d’inscriptions en cycle tertiaire), le climat d’investissement et l’ouverture commerciale
stimulent-t-ils le processus de diversification économique dans l’espace CEDEAO ?
Comme hypothèses, on suppose que (a) les économies de la CEDEAO se caractérisent par
une forte concentration de leurs exportations ; (b) les améliorations du PIB par tête, du climat
d’investissement et une plus grande ouverture commerciale stimulent le processus de
diversification économique et (c) le renforcement des droits de propriété, en stimulant les
investissements directs étrangers, accélère le processus de diversification économique.
Cette étude revisite les déterminants de la diversification économique dans l’espace
CEDEAO. Spécifiquement, elle (1) met en exergue le rôle dévolu aux droits de propriété dans
le processus de diversification économique ; (2) identifie les moteurs de la diversification des
économies tout en évaluant leurs contributions spécifiques à celle-ci. La section 1 dresse la
revue de la littérature. La section 2 est consacrée à la méthodologie de l’étude. Les résultats
sont analysés et discutés dans la section 3.
1. Revue de la littérature
Acemoglu et Robinson (2015) expliquent les inégalités de croissance économique observées à
travers les âges par les différences constatées au niveau des institutions. Pour ces auteurs, les
institutions économiques, elles-mêmes déterminées par la politique et les institutions
politiques, constituent la pièce maitresse de l’évolution d’un pays vers la prospérité ou vers la
pauvreté. Ces auteurs prétendent que les difficultés des pays africains résultent de l’imposition
de droits de propriété incertains et des institutions économiques vacillantes.
Suspectant des influences positives de l’ouverture commerciale et de l’accumulation du
capital humain sur le processus de diversification, Longmore, Jaupart et Cazorla (2014)
effectuent une analyse empirique de ce processus sur un échantillon de 183 pays puis dans le
cadre spécifique de Trinite & Tobago sur la période 1980-2011. Ces auteurs constatent que
l’ouverture aux investissements directs étrangers est le principal stimulant du processus de
diversification économique et que l'amélioration du climat des affaires favorise également ce
processus. Ils observent que la volatilité des taux de change réel influence positivement la
concentration économique et que la surévaluation n'a aucun effet significatif sur la
diversification économique.
190
Sannassee, Seetanah et Lamport (2014) analysent l’économie de l’Ile Maurice et identifient la
faiblesse de l’élasticité de la demande, le manque de financement, les tares de la bureaucratie,
l’existence de barrières à l’entrée sur le marché, l’inadéquation des infrastructures et le
manque de main-d’œuvre qualifiée comme les principaux obstacles susceptibles de freiner le
processus de diversification économique.
Hammouda, Oulmane et Jallab (2009) recensent dans la littérature économique de nombreux
avantages de la diversification économique ; mais soulignent que cette dernière n’est pas un
remède miracle capable de stimuler la création de richesses et d’améliorer les conditions de
vie des populations. Pour ces auteurs, il est même possible que le processus de diversification
s’accompagne d’une faible insertion internationale comme ce fut notamment le cas dans les
pays du septentrion africain où la diversification s’est effectuée vers les produits
certes intensifs en travail mais peu dynamiques sur les marchés internationaux. En définitive,
la diversification économique a une contribution d’autant plus substantielle à la croissance
économique et au processus de développement qu’elle s’opère vers les activités économiques
à fortes valeurs ajoutées.
Berthélemy (2005) considère comme étant diversifiée toute économie dont la structure
productive est dispersée en un grand nombre d’activités différentes les unes des autres par la
nature des biens et services produits. Pour cet auteur, la simplicité de cette définition
conceptuelle cachent d’énormes difficultés liées à l’élaboration d’une mesure opérationnelle
de la diversification ; ce qui expliqueraient le faible nombre d’études empiriques sur les
facteurs explicatifs de cette dernière. Il constate dans son analyse empirique que le niveau de
développement contribue à expliquer significativement le niveau de diversification des
économies.
Pour de nombreux auteurs (Campi et Duenas, 2016 ; Kyrkilis et Koboti, 2015 ; Besley et
Ghatak, 2010 ; Du, Lu et Tao, 2008), garantir les droits de propriété permet de soutenir d’une
part l’activité économique en stimulant les investissements, les échanges commerciaux et
d’autre part le processus de développement économique, en améliorant la productivité, en
réduisant les risques d’expropriation, en évitant des coûts improductifs associés à la protection
de la propriété, en facilitant des gains de commerce via la mobilité des actifs et en servant de
supports aux autres transactions économiques.
191
Guellec et Ralle (1993) stipulent que le renforcement des droits de propriété permet
également de développer de nouveaux marchés en inventant des biens nouveaux et surtout de
générer des revenus. En effet, les droits de propriété offre la capacité à leur détenteur d’être
offreurs exclusifs d’un bien tout au moins de manière temporaire (monopole temporaire),
d’échapper ainsi à la pression concurrentielle directe et de réaliser un “profit pur”.
Webster et al. (2016), Aragón (2015) et Meinzen-Dick (2009) ont plutôt choisi de mettre
l’accent sur le rôle important joué par le renforcement des droits de propriété dans l’élévation
du statut social et la préservation de la dignité de leurs détenteurs. Ces auteurs pensent que la
protection des droits de propriété participe indubitablement à la lutte contre la pauvreté.
Liotard (1999) affirment que les droits de propriété, en particulier ceux du domaine
intellectuel, servent à la fois d’outil de protection et d’outil stratégique. A ce titre, ils
permettent à la firme de développer, à côté des avantages concurrentiels “traditionnels” tels
que la domination par les coûts, la différenciation et la concentration de l'activité, une source
particulière d'avantage concurrentiel. En effet, les droits de propriété permettent, en tant
qu’instruments de mise en œuvre de stratégies défensives ou offensives, de conserver ou
d’acquérir des parts de marché ou tout simplement de gêner les concurrents.
Du, Lu et Tao (2008) prétendent que tous les avantages des droits de propriété recensés dans
la littérature économique accordent une primauté à leur protection sur l’exécution des contrats
dans le processus de détermination de la performance économique des entreprises ; ce qui
pourrait constituer un des maillons essentiels du processus de création de richesses.
Idris (2003) prétend que la fiabilité du système de propriété pourrait s’avérer assez incitative
pour l’investissement direct étranger comme ce fut le cas en Inde avec la réforme du système
des brevets et des marques au début des années 90 et au Brésil avec l’adoption de la loi de
1996 sur la propriété industrielle.
192
A l’échelle internationale, Pfister et Combe (2001) effectuent une analyse statique des effets
du renforcement des droits de propriété intellectuelle qui permet de déceler une double
inefficience dans le commerce international. Pour ces auteurs, le renforcement des droits de
propriété intellectuelle octroie d’une part une rente de monopole au pays innovateur sur une
plus longue période (inefficience allocative) ; et entraine d’autre part un effet de détournement
de la production du pays imitateur vers le pays innovateur où les coûts de production sont plus
élevés avec à la clé une détérioration des termes de l’échange (inefficience productive).
L’effet conjugué de ces deux inefficiences entraine assurément une augmentation des prix du
bien. Cependant, dans leur analyse dynamique du renforcement des droits de propriété
intellectuelle, ces auteurs détectent un triple effet positif. En effet, le renforcement des droits
de propriété intellectuelle est susceptible d’inciter à l’innovation, de favoriser les recherches
destinées à satisfaire les besoins spécifiques des pays en développement et de permettre une
rapide diffusion de l’information sur l’innovation évitant ainsi la duplication des efforts de
R&D tout en encourageant les innovations cumulatives. Pour ces auteurs, l’étendue des droits
de propriété est susceptible d’influencer tant le volume que les formes des investissements
directs étrangers.
Bessy et Brousseau (1997) plaident, en lieu et place d’une “protection rigide”, l’adoption
d’une définition minimale et incomplète du principe de droit de la propriété intellectuelle, afin
d’inciter l’innovation via des négociations de modalités effectives de valorisation des efforts
d’invention.
Deffains (1997) constate qu’en présence d'innovations cumulatives caractérisées par le fait
que des inventions sont suscitées ou facilitées par une invention qui leur est antérieure
(“invention de base”), le processus de diversification a tendance à ralentir. Ainsi, une partie de
la valeur sociale de cette “invention de base” résulte nettement de l'impulsion qu'elle donne
aux inventions des générations ultérieures. Dès lors, apparaissent des difficultés quant à la
détermination de la rétribution à accorder au pionnier en présence d’un tel effet externe afin
de lui permettre de continuer à innover. En inscrivant les dérivées de son invention dans le
domaine de propriété exclusive du pionnier et en lui attribuant une part dans le surplus social
des inventions dérivées, il est malheureusement possible de décourager les futurs inventeurs
193
naturellement peu enclins à partager les bénéfices de leurs recherches avec le pionnier. Ainsi,
une protection étendue des pionniers peut freiner le progrès scientifique.
Norton (1998) constate que l’insécurité des droits de propriété rend de nombreux actifs nonfongibles dans les pays en développement. Il identifie l’insécurité des droits de propriété
comme l’un des obstacles majeurs au processus de création des richesses et à la lutte contre la
pauvreté et un facteur exacerbant des inégalités notamment sexo-spécifiques.
Roy et Tisdell (2000) constatent que les femmes, qui représentent près de la moitié de la
population mondiale, ne détiennent que le dixième des droits de propriété alors même qu’elles
produisent 60 à 80% des aliments consommés dans les pays en développement. Pour eux,
l’autonomisation des femmes via la sécurisation de leurs droits de propriété contribue
significativement à réduire la pauvreté, à atténuer la malnutrition et à stimuler le processus de
croissance économique. Ils remarquent que les femmes consacrent une part relativement plus
importante de leur revenu aux dépenses de santé et d’alimentation de leur progéniture.
2. Méthodologie de l’étude
Le modèle de cette étude s’inspire des modèles de panel dynamique de Longmore, Jaupart et
Cazorla (2014) et de Sannassee, Seetanah et Lamport (2014). Ce modèle respecte la
catégorisation des facteurs explicatifs potentiels de la diversification économique recensés
dans la littérature. On a des variables institutionnelles (protection des droits de propriété,
climat d’investissement), des variables macroéconomiques (PIB par tête, taux d’inscription en
cycle tertiaire) et une variable financière et commerciale (taux d’ouverture commerciale).
DIVit = ∝ PROit + β CLIit + δ ICTit + φ TOUVit + τ REVit + ωt + ui + εit
DIV représente l’indice de diversification de l’économie. Cette variable, qui est bâtie comme
le symétrique d’un indice Herfindahl, renseigne sur le niveau de concentration des
exportations. Cet indicateur est préféré aux deux autres principaux indicateurs de
diversification des exportations que sont l’indice de Gini et l’indice d’entropie de Theil (voir
Cottet, Madiaraga et Jégou, 2012) ;
194
𝑃𝑅𝑂 est le taux d’application des droits de propriété dans l’économie sur une échelle
comprise entre 0 et 100. Cet indicateur évalue l’environnement du secteur privé et le degré de
facilitation de l’activité économique privée par un système juridique effectif et une structure
de gouvernance règlementée, garantissant le respect des droits de propriété et l’exécution des
contrats. Dans l’élaboration de cet indicateur, sont prises en compte quatre dimensions à
savoir (a) le cadre juridique de la protection des droits de propriété et des droits contractuels,
(b) la prévisibilité, la transparence et l’impartialité des lois régissant l’activité économique et
leur application par le pouvoir judiciaire, (c) les difficultés d’obtention d’une licence de
commerce et (d) la criminalité et la violence comme entraves à l’activité économique ;
𝐼𝐶𝑇 représente le taux d’inscription en cycle tertiaire. Cet indicateur estime le pourcentage
d’individus dans le pays ayant au minimum achevé avec succès le cycle secondaire et ayant
bénéficié d’une qualification en recherche plus ou moins avancée.
𝑇𝑂𝑈𝑉 renseigne sur le degré d’ouverture de l’économie approximé par la somme des
𝑋+𝑀
exportations et des importations rapportée au double du PIB (2∗𝑃𝐼𝐵 ∗ 100). Toutes les
variables utilisées dans la formule précédente sont évaluées en valeur courante 2005 du dollar
US ;
𝐶𝐿𝐼 renseigne sur le climat d’investissement. Cet indicateur évalue la liberté économique d’un
pays à partir de différentes contraintes pesant sur le flux d’investissement telles que le
traitement national des investisseurs étrangers, le code des investissements étrangers, les
restrictions à la propriété foncière, les restrictions sectorielles sur les investissements,
l’expropriation des investisseurs sans compensation équitable, le contrôle des changes et le
contrôle des mouvements de capitaux.
𝑅𝐸𝑉 représente le produit intérieur brut par tête. Cette variable permet d’approximer le
pouvoir d’achat des populations de l’espace CEDEAO ;
Les paramètres ∝, 𝛽, 𝛿, 𝜑 𝑒𝑡 𝜏 sont tous supposés supérieurs à 0 ;
𝜔𝑡 et 𝑢𝑖 mesurent respectivement les effets temporel et individuel du modèle.
𝜀 est le terme d’erreur ;
𝑖 est l’indice spatial et 𝑡 est l’indice temporel variant de 2000 à 2011.
195
Les données de l’étude couvrent la période 2000-2011. Elles proviennent toutes de la
Fondation Mo Ibrahim excepté les données relatives au PIB par tête et celles ayant permis le
calcul du degré d’ouverture économique (PIB, Exportations et importations). Ces données ont
été compilées à partir de World Development Indicators de la Banque mondiale.
3. Analyse et discussion
Les statistiques descriptives des variables sont décrites dans le Tableau A.1. Contrairement à
Longmore, Jaupart et Cazorla (2014) et Sannassee, Seetanah et Lamport (2014), cette étude a
recours à un modèle de panel classique.
L’analyse de la corrélation entre les différentes variables ne révèle aucune corrélation
significative entre elles (Tableaux A.2 et A.3). Le test de Hausman conduit à la spécification
d’un modèle à effet aléatoire (Tableaux A.4, A.5 et A.6). Le test de spécification de Breusch
Pagan confirme les résultats du test d’Hausman et justifie le choix du modèle à effet aléatoire
(Tableau A.7).
Les tests de Wooldridge et de Breusch-Pagan révèlent la présence significative de problèmes
d’autocorrélation et d’hétéroscédasticité (Tableaux A.8 et A.9). Le recours à la méthode des
moindres carrées généralisées permet de corriger ces différents problèmes (Tableau cidessous et Tableau A.10).
196
Tableau : Résultats d’estimation de la méthode des moindres carrés généralisés
Variables
Coefficient
P-value
pro
.0407
**
0.025
ict
-.1521
0.144
cli
-.0438
0.189
touv
5.0109***
0.009
rev
.0014**
0.030
4.2886***
0.004
constante
Log likelihood = -508.4381
*
significatif à 10%
**
Wald chi2(5) = 26.74
significatif à 5%
***
Prob > chi2 = 0.0001
significatif à 1%.
Source : Calculs de l’auteur.
Les résultats de cette étude confirment les observations de Acemoglu et Robinson (2015). En
effet, la protection des droits de propriété contribue à améliorer le processus de diversification
économique dans l’espace CEDEAO. Garantir les droits de propriété contribue à sécuriser les
investissements.
Contrairement à Longmore, Jaupart et Cazorla (2014), on observe que le climat
d’investissement n’influence pas le processus de diversification. En l’état, le climat
d’investissement semble être peu favorable à la diversification économique. Ce résultat
confirme donc le besoin de mener des actions vigoureuses afin d’améliorer sensiblement le
climat d’investissement afin qu’il puisse impacter positivement le processus de diversification
économique.
Conformément aux résultats de Sannassee, Seetanah et Lamport (2014) et de Berthélemy
(2005), cette étude observe les impacts positifs du revenu par tête et du niveau de
développement économique sur le processus de diversification économique. Ainsi,
l’amélioration du pouvoir d’achat stimule le processus en élevant l’élasticité de la demande.
197
De nombreuses études, à l’image de Longmore, Jaupart et Cazorla (2014), ont confirmé
l’influence du taux de change sur le processus de diversification économique. Cette étude est
incapable de se prononcer sur ce sujet faute d’avoir incorporé cette variable dans le modèle en
raison d’un manque criard de données.
Alors que Sangaré (2008) observe que l’amélioration du taux d’alphabétisation améliore le
niveau de vie en Côte d’Ivoire, cette étude constate que les inscriptions en cycle tertiaire ne
contribuent pas significativement au processus de diversification économique dans l’espace
CEDEAO. Cet état de fait pourrait s’expliquer par l’inadéquation formation-emploi ou encore
par une formation tertiaire très peu tournée vers la diversification économique.
Conclusion
La diversification économique est d’une importance capitale dans le processus de
développement économique et social. Elle constitue donc un enjeu majeur pour l’essor des
pays de la CEDEAO. Dès lors, analyser le processus de diversification économique en
identifiant notamment ses facteurs explicatifs regorge de nombreux intérêts tant économiques
que sociaux.
Ainsi, cette étude a analysé les déterminants de la diversification économique dans l’espace
CEDEAO en ayant recours à un modèle de panel couvrant la période 2000-2011. Les résultats
ont permis d’identifier la protection des droits de propriété, l’augmentation du revenu par tête
et une plus grande ouverture commerciale comme les principaux moteurs du processus de
diversification économique. L’accroissement des inscriptions en cycle tertiaire et le climat
d’investissement n’expliquent pas les variations du processus de diversification économique
dans cet espace géographique.
198
Au vu de ces résultats, on recommande (i) le renforcement et de la protection des droits de
propriété afin de sécuriser les investissements ; (ii) l’amélioration du pouvoir d’achat des
populations ce qui permettrait de stimuler la demande ; (iii) une plus grande ouverture
commerciale des économies de la CEDEAO en réduisant au strict minimum les barrières
commerciales ; et (iv) l’amélioration sensible du climat d’investissement et du système
éducatif. Ceux-ci ont été identifiés comme de potentiels stimulants de la diversification
économique.
Une insuffisance non négligeable de cette étude réside dans la non prise en compte des
potentiels effets du taux de change sur le processus de diversification économique ; effets
pourtant démontrés dans de nombreuses études antérieures. Aussi, faut-il garder à l’esprit le
caractère contextuel des conclusions de cette analyse qui sont inhérentes à la période d’étude.
199
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203
ANNEXES
Graphique A.1 : Evolution du taux de croissance économique moyen de la CEDEAO.
Taux de croissance moyen
7
6
5
4
3
2
1
0
200020012002200320042005200620072008200920102011
Source : Données de la Fondation MO Ibrahim
Tableau A.1 : Statistiques descriptives des variables utilisées
. xtsum div pro ict rev touv
Variable
|
Mean Std. Dev.
Min
Max | Observations
-----------------+--------------------------------------------+---------------div
overall | 5.833951 4.383107
between |
within |
1.2
within |
23.70749
within |
|
rev
0
6.25
100 |
93.75 |
15
T=
12
N=
180
n=
7.890958 15.13889 75.55556 |
15
T=
12
|
overall | 5.955546 4.776179
between |
n=
|
|
ict
180
2.316438 -.0869091 15.91309 |
overall | 38.05556 24.28525
between |
N=
3.840874 1.286553 16.02086 |
|
pro
26.1 |
4.540422
.41084 19.07806 |
N=
180
1.14433 19.07806 |
n=
15
1.861001 -1.310157 14.88783 |
T=
12
|
overall | 676.3373 637.7137 133.1532 3766.112 |
N=
180
204
between |
552.0121 217.6114 2455.736 |
within |
347.4005 -550.3541 2141.399 |
15
T=
12
overall | .3703756 .2258016 .1536626 1.608159 |
N=
|
touv
n=
|
between |
.1882696
within |
.1906 .9684857 |
n=
.1331132 -.2711541 1.010049 |
180
15
T=
12
Source : Calculs de l’auteur
Tableau A.2 : Etude de la corrélation entre les variables du modèle.
. pwcorr div pro cli ict rev touv, star(.5)
|
div
pro
cli
ict
rev
touv
-------------+-----------------------------------------------------div | 1.0000
pro | 0.2515* 1.0000
cli | 0.0618* 0.6010* 1.0000
ict | 0.0631* -0.1985* -0.2670* 1.0000
rev | 0.2457* 0.4957* 0.2996* 0.3236* 1.0000
touv | 0.1502* -0.1567* -0.2462* 0.6756* 0.0499 1.0000
Source : Calculs de l’auteur
Tableau A.3 : Etude de la corrélation entre les différentes variables
. xtcsd, pesaran abs
Pesaran's test of cross sectional independence =
3.295, Pr = 0.0010
Average absolute value of the off-diagonal elements =
0.456
Source : Calculs de l’auteur
Tableau A.4 : Résultats du modèle à effets fixes
. xtreg div pro cli ict rev touv, fe
Fixed-effects (within) regression
Group variable: id
R-sq: within = 0.0375
between = 0.1086
Number of obs
=
Number of groups =
Obs per group: min =
avg =
180
15
12
12.0
205
overall = 0.0883
max =
F(5,160)
corr(u_i, Xb) = 0.0577
=
12
1.25
Prob > F
= 0.2891
-----------------------------------------------------------------------------div |
Coef. Std. Err.
t
P>|t|
[95% Conf. Interval]
-------------+---------------------------------------------------------------pro | .0360063 .0233173
1.54 0.125
-.010043
.0820556
cli | .0130076 .0245366
0.53 0.597
-.0354498
.061465
ict | -.0674299 .1373442
-0.49 0.624
-.3386713
.2038114
rev | .000255 .0007269
0.35 0.726
-.0011805
.0016905
touv | 2.292516 1.358847
_cons | 3.271065 1.713109
1.69 0.094
1.91 0.058
-.3910721
-.1121577
4.976105
6.654287
-------------+---------------------------------------------------------------sigma_u | 3.6335981
sigma_e | 2.4036878
rho | .69560133 (fraction of variance due to u_i)
-----------------------------------------------------------------------------F test that all u_i=0:
F(14, 160) = 25.59
Prob > F = 0.0000
. estimates store fixed
Source : Calculs de l’auteur
Tableau A.5 : Résultats du modèle à effets aléatoires
. xtreg div pro cli ict rev touv, re
Random-effects GLS regression
Number of obs
=
180
206
Group variable: id
Number of groups =
R-sq: within = 0.0373
15
Obs per group: min =
between = 0.1182
avg =
overall = 0.0949
max =
Wald chi2(5)
corr(u_i, X) = 0 (assumed)
=
12
12.0
12
7.70
Prob > chi2
=
0.1736
-----------------------------------------------------------------------------div |
Coef. Std. Err.
z
P>|z|
[95% Conf. Interval]
-------------+---------------------------------------------------------------pro | .0368908 .0209009
1.77 0.078
-.0040743
.0778558
cli | .0108604 .0237247
0.46 0.647
-.0356391
.0573598
ict | -.0600455 .1224133
-0.49 0.624
-.2999712
.1798803
rev | .0003001 .0006667
0.45 0.653
-.0010065
.0016067
touv | 2.459394 1.324297
1.86 0.063
-.1361796
5.054967
_cons | 3.195625 1.883057
1.70 0.090
-.4950992
6.88635
-------------+---------------------------------------------------------------sigma_u | 4.0947679
sigma_e | 2.4036878
rho | .74372339 (fraction of variance due to u_i)
------------------------------------------------------------------------------
Source : Calculs de l’auteur
Tableau A.6 : Résultats du test de Hausman
. estimates store random
207
. hausman fixed random
---- Coefficients ---|
(b)
(B)
(b-B)
|
fixed
random
sqrt(diag(V_b-V_B))
Difference
S.E.
-------------+---------------------------------------------------------------pro | .0360063
.0368908
-.0008845
.0103367
cli | .0130076
.0108604
.0021473
.0062599
ict | -.0674299
-.0600455
-.0073845
.0622769
rev |
.0003001
-.0000451
.0002897
.000255
touv | 2.292516
2.459394
-.1668776
.3044717
-----------------------------------------------------------------------------b = consistent under Ho and Ha; obtained from xtreg
B = inconsistent under Ha, efficient under Ho; obtained from xtreg
Test: Ho: difference in coefficients not systematic
chi2(5) = (b-B)'[(V_b-V_B)^(-1)](b-B)
=
Prob>chi2 =
0.82
0.9759
Source : Calculs de l’auteur
Tableau A.7 : Résultats du test de spécification de Breusch Pagan
. xtreg div pro cli ict rev touv, re
Random-effects GLS regression
Number of obs
=
180
208
Group variable: id
Number of groups =
R-sq: within = 0.0373
15
Obs per group: min =
between = 0.1182
avg =
overall = 0.0949
max =
Wald chi2(5)
corr(u_i, X) = 0 (assumed)
=
12
12.0
12
7.70
Prob > chi2
=
0.1736
-----------------------------------------------------------------------------div |
Coef. Std. Err.
z
P>|z|
[95% Conf. Interval]
-------------+---------------------------------------------------------------pro | .0368908 .0209009
1.77 0.078
-.0040743
.0778558
cli | .0108604 .0237247
0.46 0.647
-.0356391
.0573598
ict | -.0600455 .1224133
-0.49 0.624
-.2999712
.1798803
rev | .0003001 .0006667
0.45 0.653
-.0010065
.0016067
touv | 2.459394 1.324297
1.86 0.063
-.1361796
5.054967
-.4950992
6.88635
_cons | 3.195625 1.883057
1.70 0.090
-------------+---------------------------------------------------------------sigma_u | 4.0947679
sigma_e | 2.4036878
rho | .74372339 (fraction of variance due to u_i)
------------------------------------------------------------------------------
. xttest0
Breusch and Pagan Lagrangian multiplier test for random effects
div[id,t] = Xb + u[id] + e[id,t]
209
Estimated results:
|
Var
sd = sqrt(Var)
---------+----------------------------div | 19.21163
4.383107
e | 5.777715
2.403688
u | 16.76712
4.094768
Test: Var(u) = 0
chibar2(01) = 400.80
Prob > chibar2 = 0.0000
Tableau A.8 : Résultats du test d’autocorrélation
. xtserial div pro cli ict rev touv
Wooldridge test for autocorrelation in panel data
H0: no first-order autocorrelation
F( 1,
14) =
Prob > F =
21.330
0.0004
Source : Calculs de l’auteur
Tableau A.9 : Résultats du test d’hétéroscédasticité
. xtreg div pro cli ict rev touv, fe
Fixed-effects (within) regression
Group variable: id
R-sq: within = 0.0375
between = 0.1086
Number of obs
=
Number of groups =
Obs per group: min =
avg =
180
15
12
12.0
210
overall = 0.0883
max =
F(5,160)
corr(u_i, Xb) = 0.0577
=
Prob > F
12
1.25
= 0.2891
-----------------------------------------------------------------------------div |
Coef. Std. Err.
t
P>|t|
[95% Conf. Interval]
-------------+---------------------------------------------------------------pro | .0360063 .0233173
1.54 0.125
-.010043
.0820556
cli | .0130076 .0245366
0.53 0.597
-.0354498
.061465
ict | -.0674299 .1373442
-0.49 0.624
-.3386713
.2038114
rev | .000255 .0007269
0.35 0.726
-.0011805
.0016905
touv | 2.292516 1.358847
_cons | 3.271065 1.713109
1.69 0.094
1.91 0.058
-.3910721
-.1121577
4.976105
6.654287
-------------+---------------------------------------------------------------sigma_u | 3.6335981
sigma_e | 2.4036878
rho | .69560133 (fraction of variance due to u_i)
-----------------------------------------------------------------------------F test that all u_i=0:
F(14, 160) = 25.59
Prob > F = 0.0000
.
end of do-file
. do "C:\Users\DOCTEU~1\AppData\Local\Temp\STD04000000.tmp"
. predict residu
(option xb assumed; fitted values)
211
.
end of do-file
. do "C:\Users\DOCTEU~1\AppData\Local\Temp\STD04000000.tmp"
. gen residu2=residu^2
.
end of do-file
. do "C:\Users\DOCTEU~1\AppData\Local\Temp\STD04000000.tmp"
. xtreg residu2 pro cli ict rev touv, fe
Fixed-effects (within) regression
Number of obs
Group variable: id
=
Number of groups =
R-sq: within = 0.9712
180
15
Obs per group: min =
between = 0.9543
avg =
overall = 0.9557
12.0
max =
F(5,160)
corr(u_i, Xb) = 0.3071
12
12
= 1080.42
Prob > F
= 0.0000
-----------------------------------------------------------------------------residu2 |
Coef. Std. Err.
t
P>|t|
[95% Conf. Interval]
-------------+---------------------------------------------------------------pro | .4209614 .0085926
cli | .1464279 .0090419
48.99 0.000
16.19 0.000
.4039919
.1285709
.4379309
.1642848
212
ict | -.8944809 .0506124 -17.67 0.000
-.9944355 -.7945263
rev | .0022583 .0002679
8.43 0.000
.0017293
touv | 21.50315 .5007458
42.94 0.000
_cons | 8.605826 .6312944
13.63 0.000
.0027873
20.51423
22.49207
7.359081
9.85257
-------------+---------------------------------------------------------------sigma_u | 3.0179249
sigma_e | .88577814
rho | .92068688 (fraction of variance due to u_i)
-----------------------------------------------------------------------------F test that all u_i=0:
F(14, 160) = 47.50
Prob > F = 0.0000
Source : Calculs de l’auteur
Tableau A.10. Résultats d’estimation de la méthode des moindres carrés généralisés
. xtgls div pro ict cli rev touv
Cross-sectional time-series FGLS regression
Coefficients: generalized least squares
Panels:
homoskedastic
Correlation: no autocorrelation
Estimated covariances
=
1
Estimated autocorrelations =
Estimated coefficients
=
0
6
Number of obs
= -508.4381
180
Number of groups =
Time periods
Wald chi2(5)
Log likelihood
=
=
=
15
12
26.74
Prob > chi2
=
0.0001
------------------------------------------------------------------------------
213
div |
Coef. Std. Err.
z
P>|z|
[95% Conf. Interval]
-------------+---------------------------------------------------------------pro | .0407162
.018221
2.23 0.025
.0050037
.0764287
ict | -.1521372 .1042459
-1.46 0.144
-.3564554
.052181
cli | -.043821 .0333687
-1.31 0.189
-.1092224
.0215805
rev | .0014419 .0006629
2.18 0.030
.0001426
.0027412
touv | 5.010991 1.911959
2.62 0.009
1.263619
8.758362
_cons | 4.288693 1.483129
2.89 0.004
1.381814
7.195572
-----------------------------------------------------------------------------Source : Calculs de l’auteur
214
REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE B - ECONOMIE / NUMERO 1 - VOLUME 2 - Décembre 2016 / pp. 215-240.
Déterminants de la participation des populations riveraines à la protection des retenues
d’eau en milieu urbain : cas des barrages no 1, 2 et 3 de la ville de Ouagadougou au
Burkina Faso
Tibi Didier ZOUNGRANA et Olivier COMBELEM
Université Ouaga II, Ouagadougou, Burkina Faso
[email protected]
[email protected]
Résumé
L’édification des retenues d’eau dans les milieux urbains vise à rendre disponible l’eau pour
les usages domestiques et pour les besoins hydroélectriques. De plus en plus, ces retenues
sont soumises à plusieurs pressions conduisant à accélérer le niveau de dégradation de cellesci. L’objectif de cet article est d’analyser les facteurs qui expliquent le Consentement à Payer
(CAP) des usagers pour la protection des barrages no 1, n°2 et n°3 dans la ville de
Ouagadougou. Plus spécifiquement, il s’agit d’une part de déterminer
les facteurs
susceptibles d’influer la décision des exploitants à participer à la protection de ces barrages,
et d’autre part d’évaluer le niveau du consentement à payer des usagers.
Pour ce faire, la modélisation économétrique du CAP s’est faite à l’aide du modèle de
Heckman à deux étapes pour tenir compte des biais de sélection. Pour y parvenir, une enquête
basée sur la Méthode d’Evaluation Contingente (MEC) et portant sur 200 individus usagers de
ces barrages a été réalisée dans la ville de Ouagadougou.
Les résultats de l’étude montrent que les exploitants des barrages enquêtés ont exprimé un
CAP moyen annuel
de 11 220 FCFA pour l’entretien et la préservation des barrages.
Également, il en est ressorti que l’existence de conflits, le mode d’acquisition de la parcelle, la
profession, les usages, et la superficie de la parcelle sont les principaux déterminants de la
participation des usagers à la protection des plans d’eau.
Mots clés : Consentement A Payer, Méthode d’Evaluation Contingente, Modèle de Heckman.
215
Abstract
The edification of waters’ restraints in urban areas is at aim to make available the water for
domestic uses and hydroelectric needs. More and more, these restraints are subjected to
several pressures leading to accelerate the level of that degradation. The aim of this article is
to analyze the factors explaining why dams users are willing to pay (WTP) for the protection
of the dams no 1, n°2 and n°3 in the city of Ouagadougou. In other terms, the issue is on the
one hand to identify the dams users involvement factors in the protection of the dams, and on
the other hand to assess to which dams users are willing to pay.
To do it, the econometric modelling of WTP was carried out in two steps using Heckman
model to take into account biases of selection. To do so, an investigation based on the
Contingent Valuation Method (CVM) with 200 dams users was carried out throughout the
city of Ouagadougou.
The outcomes of the study show that the majority of users alongside the dams who have been
surveyed wish to contribute annually for 11 220 francs CFA for the maintenance and
preservation of the dams. Also, it came out that conflicts, land acquiring way, profession, uses
and the land area are the main WTP determining factors. It is evident from this survey that of
the actions as the clearing-out, the struggle against the hyacinth of water, the sensitization and
the installation of a committee of management of the conflicts should contribute to a
restoration and a good management of the water plans.
Keywords : Willingness To Pay, Contingent Valuation Method, Heckman model,
Ouagadougou.
216
Introduction
La crise grandissante de l’eau au niveau planétaire menace la sécurité, la stabilité et la
durabilité de l’environnement particulièrement dans les pays en développement. La quantité
de l'eau douce renouvelable et disponible est passée, par habitant, de 17 000 m3 en 1950 à 7
500 m3 en 1995 et devrait tomber à 5 100 m3 en 2025 (2IE, 2010). Selon l’OMS (2012),
l’humanité utiliserait actuellement 54% des ressources accessibles en eau, soit environ 6 000
m3/an, mais cette proportion pourrait s’élever à 70% en 2025. Notons que la consommation
d’eau potable a été multipliée par sept au cours du XXème siècle (Hugonin, 2011). On estime
qu'au cours des deux prochaines décennies, la consommation d'eau par individu augmentera
de 40%. En 2010, environ 780 millions d’êtres humains dans le monde, n’avaient pas accès à
l’eau potable (OMS, 2012). L’une des principales causes est la forte croissance de la
population mondiale. En effet, la population de la terre a été multipliée par quatre au XX ème
siècle, passant de 1, 6 milliards d’individus en 1900 à 7 milliards en 2011 et pourrait atteindre
entre 8 et 10 milliards vers 2050 (OMS, 2012).
À cet égard, l’Afrique subsaharienne se classe parmi les régions les plus désavantagées. Elle
est confrontée à un fort « stress hydrique », c'est-à-dire une menace de pénurie d’eau qui pèse
sur une partie significative des populations (Ziba, 2016). Dans cette partie du continent, près
de 300 millions de personnes n’ont pas accès à l’eau potable (soit plus du tiers de la
population du continent) et un habitant sur deux souffre de maladies inhérentes de la pénurie
ou de la mauvaise qualité de cette matière première essentielle pour la survie humaine
(Mérino, 2008).
Le Burkina Faso, pays sahélien à vocation agricole, a un potentiel faible en eau de surface
(Bougairé, 2008). En outre, il connait une forte croissance démographique (3,11% par an) et
un taux d’urbanisation d’environ 26%53, se traduisant par une pression de plus en plus
importante sur ses ressources déjà fragilisées par les aléas climatiques. Pour répondre aux
besoins croissants en eau, les autorités ont procédé à la construction de plusieurs retenues
d’eau (barrages) sur les grands bassins tels que le Nakanbé, le Mouhoun, le Niger et la
Comoé. Ces barrages sont pour la plupart destinés à l’intensification agricole, l’alimentation
53
Enquête multisectorielle continue, INSD 2015.
217
en eau potable, l’abreuvement des animaux, la pêche et l’hydroélectricité aussi bien en milieu
rural qu’en milieu urbain (DGRE, 2011).
Dans la ville de Ouagadougou, trois barrages ont été construits pour répondre aux besoins en
eau potable des populations. Aujourd’hui, ces retenues subissent généralement de multiples
contraintes dues à une forte croissance démographique et à l’inadaptation ou même l’absence
d’assainissement (Groen et al., 1988 ; Boukary et al., 1996 ; Cissé et al., 2000 ; Foster, 2001 ;
Nkhuwa, 2003). L’édification de ces retenues d’eau sur un des affluents du bassin du
Nakambé, devraient permettre aux populations de la ville d’avoir une source
d’approvisionnement en eau potable (ONEA, 2010). Avec une capacité cumulée de 14 960
000 m3, ces barrages contribuaient, avec celui de Loumbila, à près de 30% à
l’approvisionnement en eau potable de la ville (Yaméogo, 2008). Outre leur vocation
d’approvisionnement en eau potable, ces infrastructures hydrauliques, jointes à la forêt de
Bangr-Weogo, constituent les principaux poumons écologiques de la ville. Ils jouent
également un rôle de recharge de la nappe phréatique et, en même temps, servent de zones de
tampon de préservation des habitants contre les inondations et le développement des atouts
touristiques et permettent la pratique des activités récréatives (AEN, 2015). Cependant, avec
la non potabilité des eaux due à la forte présence de déchets dans les retenues, l’eau des
barrages est de nos jours utilisée en majorité pour la pratique de diverses activités. Il s’agit
notamment de la culture maraîchère, de l’horticulture, de la pêche et de la restauration qui
sont des activités pourvoyeuses de revenus pour les populations riveraines (Sawadogo, 2008).
De plus en plus, ces retenues d’eau sont soumises à une panoplie de pratiques qui menacent
leur existence. De nombreuses familles connectent les toilettes de leurs habitations aux
barrages, dégageant ainsi une odeur nauséabonde qui fait fuir toute personne « sensée »54 d’où
les problèmes d’externalités négatives. Certains maraîchers utilisent des pesticides qui par
ailleurs sont interdits tels que le "décis" ou le "lamda" pour traiter leurs cultures. L’on
remarque également une occupation anarchique des abords des retenues d’eau par des
promoteurs de maquis, des horticulteurs, et des maraichers. Toutes ces activités sont de nature
à menacer à long terme l’existence des barrages. La conséquence directe étant la réduction de
la capacité de stockage des retenues et la présence des plantes envahissantes appelées jacinthe
d’eau. Pour faire face à cette situation, la commune de Ouagadougou organise fréquemment
54
Sortie officielle de l’agence de l’eau du Nakambé, 2013.
218
des journées de salubrité qui visent à restaurer les barrages et à optimiser l’exploitation de
l’eau. Cependant, les résultats engrangés ne sont pas toujours satisfaisants (AEN, 2010).
Dans la perspective de construire un plan d’action utile pour le renforcement de la gestion des
retenues d’eau, de la poursuite des objectifs de restauration et surtout à leur protection
efficace; il est impérieux de comprendre l’attitude des exploitants face aux problèmes de
dégradation des barrages. Ainsi, sommes-nous amenés à poser la question de savoir : quels
sont les principaux déterminants du consentement à payer des exploitants pour la protection
des barrages no 1, no 2 et no 3 de la ville de Ouagadougou ?
L’objectif de cet article est d’analyser les facteurs explicatifs du consentement à payer des
usagers pour la protection des plans d’eau dans la ville de Ouagadougou au Burkina Faso. Le
présent article commence par une revue de littérature qui expose le débat théorique sur la
valorisation des ressources en eau avant de présenter brièvement la démarche méthodologique
utilisée pour la collecte des données. Par la suite, les résultats économétriques sont présentés
et analysés.
1. Revue de la littérature
La compréhension de la valeur économique de l’eau est fondamentale si l’on doit utiliser cette
ressource qui se fait de plus en plus rare et ce de manière plus efficace afin de satisfaire les
besoins de la société.
Le point suivant permet de poser le débat théorique relatif à la
valorisation de l’eau dans un contexte de raréfaction.
1.1. Débat théorique sur la valorisation des ressources en eau
Les ressources en eau, ainsi que la gamme de services qu’elles peuvent rendre, contribuent à
la réduction de la pauvreté, à la croissance économique et à la sauvegarde de
l’environnement55. De nos jours, la compétition autour de ces ressources, dans un contexte
d'incertitude climatique et de mutation des politiques publiques, constitue un nouvel enjeu
pour la recherche. L’eau est une ressource qui a été pendant longtemps considérée comme
abondante, inépuisable et sans prix dont l’utilisation ne posait pas de problèmes particuliers
55
Rapport de la journée mondiale de l’eau, 2016.
219
(Dembélé, 2007). Cependant, les modes de consommation et de production ont subi de
nombreuses transformations faisant ainsi évoluer de façon manifeste la place de cette
ressource dans le système économique et social. Ainsi, l’eau est plus que nécessaire pour de
nombreux usages qui dépendent de sa qualité et de sa quantité. L’agriculture est encore de
loin le secteur le plus demandeur en eau, puisqu’il contribue pour 70 % des prélèvements et
93 % de la consommation globale, essentiellement dans les pays en développement où
l’agriculture demeure une activité majeure (Baechler, 2012). Elle est de ce point de vue le
secteur le plus problématique pour la gestion des ressources en eau. Spécifiquement sur la
question des usages, Baechler (Op.cit) ajoute qu’avec l’augmentation des niveaux de vie un
peu partout dans le monde, les deux autres catégories de prélèvement, pour l’industrie et les
activités domestiques, voient leur part augmenter. Elles ne comptent respectivement que pour
22 % et 8 % des prélèvements globaux, mais leur augmentation a été deux fois plus rapide
que pour l’agriculture au cours de la deuxième moitié du XXe siècle. Ce sont ces situations de
plus en plus critiques qui ont conduit à la recherche d’un cadre de gestion approprié afin de
préserver la ressource. Selon Guesnier (2010), le cycle hydrologique doit être appréhendé
dans sa globalité par une gouvernance sociétale qui, seule, peut garantir la pérennité du couple
eau-développement durable, en impliquant gouvernements et citoyens. Bied-Charreton et al.
(2006), pensent aussi que la gouvernance de l’eau doit ainsi prendre en compte l’ensemble des
usages de la ressource et leurs interactions. Dans le même ordre d’idées, Bordet (2002) pense
qu’une politique concertée de l’eau est nécessaire si l’on ne veut pas voir le triomphe
d’intérêts sectoriels avec toutes les conséquences.
Au-delà de tous ces débats sur la problématique liée à la gestion des ressources en eau, la
GIRE apparait dans les années 90 comme une des approches pour atteindre la bonne
gouvernance de l’eau (Philip et al., 2008). Elle s’invite en même temps dans le débat sur la
valorisation économique des ressources en eau. Le principe 4 de la GIRE, stipule que « l'eau a
une valeur économique dans toutes ses utilisations concurrentes et devrait être reconnue aussi
bien comme bien économique que bien social » (2iE, 2011). Considérer l'eau comme un bien
économique et la gérer en conséquence, c'est ouvrir la voie à une utilisation efficace et à une
répartition équitable de cette ressource, à sa préservation et à sa protection (Hugonin,
2011). Comme l’eau devient de plus en plus rare, sa valeur économique augmente et
l’utilisation des instruments économiques pour le partage de son usage ou sa consommation
par des secteurs ou des groupes concurrents prend aussi de l’ampleur dans les sociétés.
220
Pour améliorer la gestion des ressources en eau, il faut d’abord reconnaître de quelle manière
l’intégralité du secteur de l’eau est liée à l’économie nationale. Il importe également de
comprendre comment des instruments différents de politiques économiques peuvent
influencer l’utilisation de l’eau dans différents secteurs économiques, ainsi qu’aux échelons
local, régional et national, et entre les ménages, les exploitations agricoles et les entreprises
industrielles. L’eau à l’instar de plusieurs ressources naturelles, a été longtemps considérée
comme un bien public gratuit et faisait l’objet d’une mauvaise gestion.
Aujourd'hui, dans un contexte de pénuries d'eau croissantes, d'intensification de la
concurrence des usages industriels et domestiques et de l'alarme lancée sur la dégradation des
écosystèmes, il devient fondamental d'attribuer une valeur marchande à l'utilisation de l'eau en
agriculture dans l'aménagement des ressources hydriques (Kientéga, 2014). L’argument
fréquemment invoqué en faveur de la transformation de l’eau en marchandise est le même que
celui qui préside à la commercialisation de l’ensemble des biens que nous utilisons : le
marché serait le lieu le plus optimal à la distribution des ressources matérielles et naturelles et
à la répartition des richesses. Selon Briscoe (2004), « l’eau doit être gérée comme un produit
économique car tant que cette idée de gestion n’est pas ancrée dans les esprits, la
problématique ne sera pas résolue.»56. Un rapport de la FAO (2006), indique que de tous les
secteurs qui utilisent l'eau douce, l'agriculture représente à elle seule 70% des prélèvements
mondiaux de sources naturelles et enregistre la plus faible rentabilité économique. Cette
situation a amené certains partisans de la valeur marchande de l'eau, à favoriser les "marchés
de l'eau" non réglementés qui, en traitant l'eau comme une denrée économique, la
réorientaient vers des usages de faible valeur à des usages de valeur plus élevée. Selon
Bonnieux et al. (1995), l’étude du consentement à payer du consommateur pour avoir une
garantie de qualité et de disponibilité de la ressource, peut permettre d’éviter le gaspillage
économique et les risques écologiques. Quant à la fonction productive agricole représentée
par l’irrigation, on peut aborder la question de la valeur par une approche quantitative, en
modélisant le processus de production, en analysant les prix sur le marché de droit de l’eau ou
en calculant l’impact économique global d’un retrait de la ressource , mais aussi par une
approche qualitative, en prenant en compte l’assolement et les choix d’intensification qui
détermineront la conduite d’irrigation.
56
Phrase prononcée lors du 4e congrès mondial de l’eau à Marrakech en Septembre 2004.
221
En substance, on peut retenir que l’eau, considérée en elle-même, n’est pas fabriquée par
l’homme : elle est un don de la nature. En revanche, son pompage, son traitement, son
acheminement vers des fontaines ou des robinets particuliers, en somme tout le service de la
fourniture de l’eau, a un coût. Ces services nécessitent des infrastructures, des
investissements, des compétences, des frais de fonctionnement et de maintenance. Selon le
PNUD (2008), l’accès à l’eau ne peut donc qu’avoir un prix, directement ou indirectement.
De cette évidence, on ne doit toutefois pas conclure nécessairement que l’eau doit être
considérée comme une marchandise ou, pour utiliser l’euphémisme en vigueur au niveau
international depuis la conférence de Dublin en 1992. La raréfaction de l’eau causée par la
pression anthropique impose une gestion optimale de ces ressources à travers la mise en place
de méthodes économiques.
1.2. Méthode de révélation de la valeur économique de l’eau
Les méthodes d’évaluation des ressources environnementales sont au nombre de deux : les
méthodes directes et les méthodes indirectes. Les méthodes indirectes observent ce qui se
passe sur un marché particulier et à partir de ces observations tirent des conclusions sur
l’environnement. Elles reposent sur l’hypothèse de complémentarité entre les biens
environnementaux et les biens marchands. Les méthodes indirectes observent un phénomène
déjà produit: ce sont des méthodes ex-post. Elles se composent des prix hédonistes
(Thiombiano, 2008), des coûts de déplacement (Hotelling, 1947) et des modèles de demande
pour sites de loisirs multiples.
Ces méthodes présentent cependant plusieurs limites. Tout d'abord, elles n'abordent la valeur
accordée au bien à évaluer qu'en fonction d'un usage qui en est fait. Seuls les usagers du bien
en question (randonneurs sur un site naturel, ou visiteurs d’un musée) sont pris en compte et
la révélation de la valeur monétaire se limite aux seuls comportements de ces derniers. Or,
une ressource environnementale telle que l’eau a une valeur qui dépasse le seul usage que l’on
en fait (valeur d’option, valeur de legs, valeur d’existence). On touche ici à la notion de « non
use value », c’est-à-dire à la valeur accordée à un bien selon d’autres déterminants que l’usage
direct du bien. Par ailleurs, le seul usage ne permet pas de déterminer la valeur économique
totale de l’eau. Aussi, cela ne suffit pas pour identifier les motivations des populations à payer
pour la protection des barrages dans le cadre de cet article. L'interrogation directe des
222
individus s’avère donc nécessaire dans ce sens que, l'on veut appréhender la valeur d’usage et
de non usage des retenues en eau dans la ville de Ouagadougou.
Les méthodes directes quant à elles se focalisent uniquement sur le bien environnemental sans
passer par un autre support. Ce sont des méthodes ex-ante car elles anticipent ce que serait la
demande et le bien-être avant que le changement sur le milieu naturel se produise. Elles
cherchent à pallier aux limites des méthodes d’évaluation monétaires dites « indirectes » en se
basant essentiellement sur la construction des marchés hypothétiques. Ce sont les méthodes de
modélisation des choix et d’évaluation contingente. Parmi ces méthodes, l’évaluation
contingente est la plus utilisée (Desaigues et Point,1993 ; Faucheux et Noel,1995 ).
La méthode d’évaluation contingente (MEC) consiste à interroger une population
convenablement définie sur son consentement à payer (CAP) (ou à recevoir s’il s’agit
d’estimer une compensation) pour bénéficier d’une modification de (ou renoncer à) la qualité
de l’environnement (Lahsen et Mundler, 2010). L’évaluation contingente est employée
chaque fois que le marché ne permet pas d’utiliser les méthodes indirectes de révélation des
préférences, ou lorsque l’intervention publique ne peut s’appuyer sur aucune donnée
disponible (Désaïgues et Point, 1993). Lorsque les données du marché sont manquantes, la
MEC est plus appropriée parce qu’elle essaie de montrer comment les individus évaluent
certaines ressources naturelles et environnementales. C’est une méthode qui consiste à révéler
la valeur d’un bien ou d’un service environnemental par la conduite d’une enquête (Bonnieux,
1998). A travers un questionnaire, on demande directement aux individus concernés ce qu’ils
seraient prêts à payer afin de protéger les retenues d’eau. Il s’agit ainsi de révéler directement
les préférences en créant un marché fictif dans lequel l’individu peut révéler sa volonté à
payer pour la protection des retenues. C’est la méthode de valorisation des actifs naturels la
plus utilisée de nos jours (Voltaire, 2011). Concernant les applications spécifiques au secteur
de l’eau, divers travaux ont montré que la MEC pourrait être valide pour l’estimation de la
disposition à payer pour bénéficier d’une amélioration du service d’eau ou pour permettre des
changements de prix sans pour autant détériorer le bien-être des usagers (Amigues et al.,
1996; Ayadi et al. 2000; Lakoandé, 2000 ; Zoungrana, 2014). Cette méthode permet
l’estimation de la valeur économique de l’eau (Chébil et al. 2007).
La MEC est flexible et peut fournir des estimations des valeurs d’usage et de non-usage
(ensemble ou séparément) de l’eau, possible pour tous les contextes décisionnels dans le
223
domaine de la gestion de l’eau (Godard, 2010). Cependant, cette flexibilité de la MEC
l'expose à des difficultés d'analyse importantes appelées biais (Pearce, et Markandya, 1989).
La notion de biais suppose implicitement que chaque individu valorise le bien sur la base d'un
maximum de l'utilité conformément à la théorie du consommateur. Tout écart à ce programme
d'optimisation est alors considéré comme un biais. Il s’agit principalement des biais
stratégique, hypothétique et de sélection. Le biais stratégique fait allusion au problème du
passager clandestin. A cet effet, un agent peut choisir de cacher sa préférence réelle s’il y
gagne un intérêt supérieur. Quant au biais hypothétique, il résulte du fait que les individus
sont placés sur un marché fictif. Sur ce type de marché, l’individu n’a aucun risque pour
révéler ses préférences, tandis que sur un marché réel, il supportera un coût s’il se trompe. Le
biais de sélection se traduit par une situation où un pourcentage de l’échantillon ne parvient
pas à donner un CAP positif. Ce qui occasionne une « non réponse » à la question posée ou
un zéro de protestation. Du fait de ces problèmes, la MEC a été beaucoup critiquée (Voltaire,
2011). Mais ces critiques n’ont pas pu empêcher son utilisation. Au contraire, elles ont donné
lieu à des travaux ayant permis de la perfectionner aussi bien du point de vue des techniques
de questionnement que de traitement économétrique des réponses (Terra, 2005).
1.3. Facteurs justifiant la participation monétaire des populations à la protection des retenues
d’eau
Du point de vue empirique, la MEC a fait l’objet de plusieurs usages pour valoriser certains
biens et services. Plusieurs auteurs l’ont utilisé dans le domaine de l’environnement. On peut
citer entre autres Alinsato (2005) et Yelkouni (2001) respectivement pour la protection des
sols et celle de la forêt. Le domaine de l’eau a aussi fait l’objet d’investigation. Les études
dans ce domaine s’intéressent à la protection ou à la préservation des services fournis par
l’eau.
Lankoandé (2000) a appliqué la MEC pour évaluer le CAP des ménages pour une
alimentation en eau potable dans la ville de Ouagadougou (Burkina Faso). L’enquête a
concerné 200 ménages qui s’approvisionnent auprès des revendeurs d’eau. La pertinence de
l’étude réside dans le fait que pour certains ménages, il n’y a pas de substituts à ce mode
d’approvisionnement. Plusieurs ménages (55%) sont contraints de s’approvisionner auprès de
ces revendeurs. Les facteurs explicatifs de la décision de payer sont le revenu, le niveau
d’éducation et la distance par rapport au point d’approvisionnement. Egalement dans son
224
étude sur l’impact environnemental de l’office togolais des phosphates sur l’eau de mer,
Thiombiano (2002), a utilisé un modèle Probit pour analyser les variables susceptibles
d’influer le CAP des personnes concernées par la pollution de l’eau par l’office des
phosphates. Les résultats révèlent que le CAP est influencé par la profession, la taille du
ménage, l’éducation, la distance et l’état de santé. Utilisant les mêmes modèles
économétriques (tobit et logit), Chébil et al. (2007) ont cherché à identifier les variables
influençant le consentement des agriculteurs maraîchers de la région de Teboulba (Tunisie) à
payer pour l’eau d’irrigation. Les résultats empiriques montrent que les agriculteurs sont
disposés à accepter une légère augmentation du prix de l’eau en contrepartie d’une
amélioration du service d’approvisionnement. Les consentements à payer sont affectés
principalement par la taille de l’exploitation et la productivité de l’eau. La méthode de
modélisation des choix discrets a été aussi utilisée par Morardet (2008) dans le cadre du projet
de restauration du bassin versant du Vistre pour recenser les facteurs qui guident le choix des
populations de contribuer ou non au programme. Parmi les variables sociodémographiques,
seul l’âge influence positivement le consentement à payer. Ceci peut vraisemblablement être
mis en relation avec le fait que seules les personnes les plus âgées ont connu le Vistre en bon
état. Également, les personnes accordant plus d’importance aux questions d’environnement et
de santé ont ainsi des consentements à payer plus importants que celles qui privilégient les
questions de sécurité et d’emploi. Enfin, le lieu d’habitation a un effet significatif sur le
consentement à payer, négatif pour les résidents éloignés du bassin et positif pour les
habitants plus proche plus exposés aux inondations.
Zoungrana (2014) quant à lui, a eu recourt au modèle de Heckman à deux étapes pour estimer
les déterminants du CAP des populations pour la protection du barrage de Yitenga au
Burkina Faso. Ses résultats font ressortir que les hommes sont plus disposés à payer que les
femmes. Egalement, il ressort de cette étude que le niveau d’éducation (ménages instruits), la
profession, la dotation des ménages (nombre de bovins) influencent positivement le CAP des
riverains du barrage. Aussi, il obtient que les dépenses annuelles des ménages et l’accès au
crédit influencent positivement le CAP des ménages. En somme, plusieurs variables peuvent
justifier la participation d’un individu à la protection de la ressource eau.
1.4. Modélisation économétrique des choix de participation
225
Les différentes études menées montrent qu’il existe diverses modèles d’analyse que l’on peut
utiliser pour étudier l’impact de certaines variables sur la décision de payer et le niveau de
participation des populations. Le choix de l’un ou de l’autre de ces modèles dépend de
l’hypothèse faite au niveau de la décision des ménages. Cette décision peut être séquentielle, à
savoir que le ménage décide de cotiser d’abord puis décide ensuite du montant de la cotisation
ou simultanée. Aussi, les biais de sélection, l'omission de variables explicatives, les données
manquantes ou censurées de certaines variables explicatives sont autant de problèmes
généralement rencontrés lors des estimations du CAP. Pour éviter de faire des
recommandations de politiques erronées, il faut opter pour la méthode qui traduit le mieux le
comportement des populations. A cet effet,
la méthode d'estimation en deux étapes de
Heckman s'avère adéquate pour pallier à tout problème pouvant survenir lors de l’estimation
du CAP puisqu'elle permet de corriger le biais de sélection pour produire des estimations
correctes pour les paramètres individuels et les estimations du « bien-être ». Ce modèle prend
en compte le fait que la valeur fournie par une personne lors de la question de valorisation est
le résultat de deux processus stochastiques potentiellement corrélés : la personne donne une
valeur au bien à partir d’un modèle de choix et décide de dévoiler ou non cette valeur (c'est-àdire son prix de réserve) selon un autre modèle de choix. Formellement on notera di la
variable dichotomique (0 ou 1) qui indique si l’individu i révèle la valeur qu’il accorde au
bien environnemental évalué. On suppose que la variable latente mesurant le « vrai » montant
du consentement à payer de l’individu i est déterminé par un ensemble xi de variables
explicatives :
CAPi⃰ = 𝑥𝑖 𝛽 + 𝜎𝑢𝑖
De même, on suppose que la décision de révéler ou non son véritable consentement à payer
est
déterminée
par
le
signe
de
la
variable
latente
𝑑𝑖∗
définie
par :
𝑑𝑖∗ = 𝑧𝑖 𝛾 + 𝜇𝑖
Où 𝑧𝑖 constitue un ensemble de variables pouvant expliquer la décision de révéler ou non son
véritable consentement à payer. Plus particulièrement, 𝑑𝑖 = 1 si 𝑑𝑖∗ ≥ 0 et 𝑑𝑖 = 0 sinon.
En combinant ces deux décisions, il est clair que le véritable consentement à payer n'est
observable que si di = 1 (c'est-à-dire si i décide de révéler la valeur qu'il accorde au bien).
On peut donc écrire :
𝐶𝐴𝑃𝑖∗ 𝑠𝑖 𝑑𝑖 = 1
𝐶𝐴𝑃𝑖 = {
0 𝑠𝑖 𝑑𝑖 = 0
226
𝑥 𝛽 + 𝜎𝑢𝑖 𝑠𝑖 𝑧𝑖 𝛾 + 𝜀𝑖 ≥ 0
𝐶𝐴𝑃𝑖 = { 𝑖
0 𝑠𝑖 𝑧𝑖 𝛾 + 𝜀𝑖 < 0
On suppose que la distribution conjointe de (ui, 𝜀 i) est une loi normale bivariée de moyenne
nulle, de variance unitaire et de corrélation r. Quand r = 0, les deux décisions sont
indépendantes et les paramètres des deux équations peuvent être estimés séparément.
La méthode d’estimation de ce type de modèle a été proposée par Heckman. Il s’agit d’une
démarche en deux étapes. La première étape consiste à estimer l’équation de participation
(c'est-à-dire la décision de révéler ou non son véritable consentement à payer) par un modèle
Probit. L’obtention de l’inverse du ratio de Mill λ(zi𝛾) = φ(zi𝛾)/ Ф(zi𝛾) permet de passer à la
seconde étape. La seconde étape consiste en une régression (par les moindres carrés
ordinaires) de 𝐶𝐴𝑃𝑖 sur 𝑥𝑖 et λ estimé, pour les seuls consentements à payer strictement
positifs.
Le CAP moyen est obtenu par la formule suivante :
E(CAP*i/ di = 1) = xiβ +ρσλ(zi𝛾)
Les variables du modèle sont de deux groupes. Les variables dépendantes et les variables
indépendantes. Les variables dépendantes ou variables expliquées sont le CAP (disposition à
payer qui prend la valeur 1 ou la valeur 0) et CAPm (montant du CAP). Quant aux variables
indépendantes pouvant expliquer la disposition et le consentement à payer des riverains, elles
portent sur les caractéristiques socioéconomiques des exploitants et leur lien avec les retenues
d’eau. Les variables retenues sont : le sexe, l’âge, le niveau d’éducation (educ), la taille du
ménage (taim), la profession (prof), le revenu (rev) tiré de l’exploitation de l’eau, le mode
d’acquisition de la parcelle (aqparcel), l’existence de conflits (conflit), l’existence de
maladies liées à l’état du barrage (maletat), le type d’usage (usage), la quantité d’eau
prélevée par jour (qteeauj), le recours à d’autres sources d’eau (recours), la distance séparant
la parcelle au barrage (dsepar ) et la superficie de la parcelle (superfic).
Le consentement à payer étant fonction des caractéristiques du riverain i et de l’état de la
ressource, le modèle empirique peut donc s’écrire :
227
Etape I : Modèle probit :
cap=f(sexe, educ, age, taim, conflit, maletat, dsepar, aqparcel, prof1, prof2, prof3, qteeauj,
superfic, rev)+ 
Etape II : MCO
capm = f(sexe, educ, age, taim, conflit, maletat, dsepar, aqparcel, prof1, prof2, prof3, usage1,
usage2, usage3, qteeauj, superfic, recours,rev, ratio mills)+  .
2. Méthodologie de collecte des données
2.1. Echantillon
L’enquête a porté sur 200 exploitants repartis sur les trois barrages ; soit 35 exploitants au
niveau du barrage no 1, 77 au niveau du barrage no 2 et 88 au niveau du barrage no 3. Les
éléments de l’échantillon ont été choisis suivant la méthode de la probabilité proportionnelle à
la taille. C’est une méthode qui construit l’échantillon en respectant la distribution dans la
population de base en fonction des caractéristiques étudiées (Gadiaga, 1987). En effet,
l’échantillon final est composé de 74 maraichers, 98 horticulteurs, 6 restaurateurs, 18
pêcheurs et 4 évoluant dans les bâtiments et travaux publics (prélèvement). Ces derniers ont
été soumis à un exercice contingent visant à faire révéler leur consentement à payer.
2.2. Questionnaire et précautions dans l’exercice contingent
Le questionnaire se décompose en cinq sections. La première section présente
l'environnement des trois barrages et les problèmes qui se posent pour sa sauvegarde. La
seconde section porte sur les caractéristiques individuelles du répondant. La troisième section
est constituée d’une série de questions sur l'usage des barrages par l’enquêté. La quatrième
partie concerne la relation existant entre l’enquêté et le barrage en question. La cinquième
section enfin présente le scénario hypothétique. Il s’agit d’une présentation du programme et
de ses objectifs : restauration des plans pour garantir leur amélioration. Cette section inclut la
présentation de la contribution sous formes monétaire et non monétaire pour la mise en place
du programme. L’enquêteur demande à l’individu s’il est prêt à contribuer pour la mise en
place du programme. Si oui, quelle serait la contribution maximale de chaque répondant. A ce
stade de l’enquête, on procède à la révélation de la valeur du CAP selon la technique de la
228
question ouverte. Ensuite, l’enquêteur cherche à obtenir les raisons des réponses et cherche à
comprendre en quoi consiste la valeur du bien exprimée par le répondant, si elle est liée à un
usage direct de l’eau ou indirect (la valeur d'existence, la valeur d'option et la valeur liée à
l'utilité de préserver le bien pour les générations futures).
Le questionnaire a également intégré des éléments permettant de corriger les éventuels biais
pouvant survenir. Ainsi, le biais stratégique a été corrigé en demandant aux enquêtés de
fournir des vraies réponses aux questions, car si les réponses sont fausses elles ne changeront
pas les décisions relatives à la restauration des plans d’eau. Quant au biais hypothétique, sa
possibilité d’apparaître dans la plupart des services publics des pays en développement est
faible (Whittington et al., 1990). Pour ce qui est du biais de sélection, il a été pris en compte
par le modèle de Heckman à deux étapes. En effet, l’usage de ce modèle vient remédier à ce
biais. Pour le biais opérationnel, nous formulons l’hypothèse que les individus interrogés sont
familiers aux plans d’eau, car ils sont eux-mêmes les potentiels utilisateurs.
3. Analyse et discussion des résultats
3.1.Résultats statistiques
Environ 86% des personnes interrogées ont annoncé un consentement à payer non nul variant
entre 100 et 150 100 FCFA tandis que les 14% ont donné une valeur nulle.
Le tableau 1 montre la tendance de CAP moyens par profession.
Tableau 1:Tendance des CAP moyens (en FCFA) par profession
Type d’acteurs
CAP moyen
Horticulteur
8 690
Maraîcher
13 130
Pêcheur
2 428
Restaurateur
28 683
BTP
51 225
Ensemble
11 220
Source : Construit à partir des données de l’enquête
229
En moyenne, les enquêtés sont prêts à payer par an 11 220 FCFA pour la préservation et
l’entretien des barrages dans la ville de Ouagadougou. Les résultats obtenus montrent que les
plus gros préleveurs de l’eau des barrages sont ceux qui ont les CAP moyens les plus élevés.
En effet, les répondants opérant dans le Bâtiment et Travaux Publics (BTP) ont un CAP
moyen de 51 225 FCFA, plus élevé que la moyenne d’ensemble, en ce sens qu’ils sont les
plus gros utilisateurs de l’eau des barrages. Ils sont suivis des restaurateurs et des maraîchers
avec des CAP moyens respectifs de 28 683 FCFA et 13 130 FCFA. Les horticulteurs quant à
eux ont fourni un CAP moyen de 8 690 FCFA. En ce qui concerne les pêcheurs, leur CAP
moyen s’élève à 2 428 FCFA.
Il ressort donc que les différents CAP fournis sont fonction de la dépendance de l’activité visà-vis des barrages. En d’autres termes, le CAP est fonction de la quantité d’eau prélevée. La
dégradation et la pollution des barrages entrainent le recours à d’autres sources d’eau pour
mener les activités. La valeur attachée aux barrages à travers le CAP fourni par les enquêtés
sera d’autant plus importante que les dépenses engagées pour faire face à la pollution et à la
dégradation des eaux des barrages sont grandes. Ces dépenses peuvent être appréhendées à
travers le coût engendré par rapport aux autres sources d’eau. Ces autres sources d’eau
peuvent être considérées comme des substituts. On peut donc révéler la valeur des barrages en
tant que ressources par rapport au prix de ces substituts comme le préconise la théorie
économique (Desaigues et Point, 1993 ; Desaigues, Lesgards, 1991).
Les résultats font ressortir qu’en moyenne le coût financier résultant au recours à d’autres
sources d’eau, du fait de la pollution des barrages, s’élève à 7 152 FCFA par an et par acteur.
En comparant cette valeur au CAP moyen qui est de 11 220 FCFA, on constate que les
usagers attachent une grande valeur aux barrages car ils sont prêts à payer plus. Cela pourrait
aussi s’expliquer par la rationalité des usagers. En effet, le recours à d’autres sources
engendre des coûts supplémentaires autres que le coût financier en l’occurrence, le temps
perdu, les distances parcourues. Le recours à d’autres sources d’approvisionnement entraine
une baisse de la quantité d’eau journalière du fait des difficultés liées à l’accessibilité. Une
des conséquences de cette situation est la baisse de rendement des activités des différents
usagers.
230
3.2.Test statistique des relations entre les variables : Test de Khi-deux
L’objectif de ce test est d’analyser les relations entre le CAP et les variables retenues. Le
tableau 2 donne les résultats de l'estimation des variables explicatives du CAP à l’aide du test
de khi2. La significativité de la relation entre une variable et le CAP est acceptée si sa
probabilité est inférieure au moins à 10%. Les variables significatives en ce qui concerne le
CAP des exploitants des retenues d’eau sont la profession, le fait d’utiliser l’eau du barrage
(1%) et le type d’usage (5%).
Tableau 2 : Test de khi-deux entre les caractéristiques des exploitants et le CAP
Variables
sexe
ethnie
sitma
religion
educa
prof
usag
usage
conflit
maletat
autrsrce
aqparcel
Khi2 calculé
0,022
0,112
1,438
1,713
4,352
31,635***
26,311***
3,764*
1,043
1,775
0,002
1,452
Degré de liberté
1
1
1
2
4
4
4
1
1
1
1
1
Khi2 théorique
1%
5%
6,635
3,841
6,635
3,841
6,635
3,841
9,21
5,991
13,2767
9,487
13,2767
9,487
13,2767
9,487
6,635
3,841
6,635
3,841
6,635
3,841
6,635
3,841
6,635
3,841
10%
2,706
2,706
2,706
4,605
7,779
7,779
7,779
2,706
2,706
2,706
2,706
2,706
*** significatif au seuil de 1% ; ** significatif au seuil de 5% ; * significatif au seuil de 10%.
Source : Construit à partir des données de l’enquête
3.3. Résultats économétriques
L’analyse des déterminants de la disposition à payer indique que le sexe, le niveau
d’éducation, l’âge, la taille du ménage, l’existence de conflit, la distance séparant la parcelle
du barrage, le mode d’acquisition de la parcelle et la superficie de la parcelle n’influencent
pas la probabilité à payer. Par contre, la profession, la quantité d’eau prélevée et le revenu ont
un impact significatif sur la disposition à payer des enquêtés. On note également que ces
variables sont positivement corrélées au consentement à payer des enquêtés. Les coefficients
obtenus dans le tableau 3 laissent voir le type de lien existant entre les variables explicatives.
231
En ce qui concerne les déterminants du montant du CAP, les résultats du tableau 3 indiquent
que les variables significatives sont l’existence de conflits, le mode d’acquisition de la
parcelle, la profession, les usages et la superficie de la parcelle.
Les conflits et le mode d’acquisition des parcelles influencent significativement et de façon
négative le montant des CAP. En effet, l’existence de conflit autour du barrage a pour effet de
diminuer le CAP de 0,897 FCFA à la moyenne. De même, le fait d’avoir hérité de la parcelle
aura pour effet de réduire le CAP de 0,706 FCFA en moyenne. Cela peut s’expliquer par le
fait que l’existence de conflits crée un environnement incertain pour les usagers. Ceci les
pousse à ne pas contribuer à l’entretien des barrages. Ce résultat concorde avec celui trouvé
par Sironneau (1996) qui montre que les multiples usages de l’eau conduisent inéluctablement
à des conflits qui ne sont pas sans conséquence sur la pérennité de l’eau. Ceux qui ont hérité
de leur parcelle ne sont pas motivés pour l’entretien des plans d’eau. Cela peut être lié au fait
qu’ils n’accordent pas trop d’importance aux barrages contrairement aux autres qui ont soit
loué ou soit acheté la parcelle.
Egalement, le fait d’être maraîcher, horticulteur ou pêcheur accroit le CAP respectivement de
7,102, 1,145 et 6,227 FCFA. Ces résultats rejoignent ceux trouvés par Conchita et al (2010), à
savoir que les potentiels utilisateurs des retenues d’eau sont les plus motivés à contribuer pour
leur entretien. Aussi, Zoungrana (2014), dans son étude, a montré que le fait de pratiquer le
maraichage, la pêche ou de prélever l’eau a pour effet d’augmenter le consentement à payer
des populations en milieu rural. Les mêmes comportements sont observés en milieu urbain car
ces utilisateurs tirent l’essentiel de leur revenu dans ces activités.
De même un accroissement de la superficie de la parcelle de 1m2 a pour effet une hausse du
CAP de 0,019 FCFA. Ce résultat est contraire à celui de Alinsato (2005). Dans son travail, il
est ressorti que les ménages ayant les plus grandes superficies sont moins disposés à payer
pour l’entretien. Une des raisons évoquées par l’auteur est que les ménages avaient recours à
des produits chimiques pour l’amélioration de la fertilité des sols. Ce qui n’est pas le cas pour
les exploitants autour des barrages.
L’analyse des résultats obtenus quant à la variable usage de l’eau du barrage par les ménages
montre que cette dernière a aussi un effet positif sur le CAP. En effet, le fait d’utiliser l’eau
pour l’horticulture, le maraîchage et la pêche accroit le CAP respectivement de 5,484; 6,045
232
et 4,893 FCFA. Cela peut s’expliquer par le fait que les activités de ces derniers étant
dépendantes de l’eau du barrage, ils sont plus incités à contribuer pour l’entretien des
barrages. Le résultat obtenu n’est pas contraire à ceux déjà obtenus par d’autres auteurs. En
effet, Zoungrana (2014), par exemple, a montré que le type d’usage de l’eau est déterminant
dans la décision des ménages à payer. Egalement en Afrique au sud du Sahara, dans les
ménages à vocation agricole, plusieurs études ont montré que le type d’usage est un principal
déterminant du choix des ménages de contribuer à l’entretien des points d’eau (Yuying et
Ayalo, 1996 ; Randriaamiarana, 2001 ; Israngkura, 2001 ; Pagiola, Bishop et Mills, 2002 ;
Polson et Spencer, 2003).
233
Tableau 3 : Résultats de l’estimation
Variables
Disposition à payer
Montant du CAP
Coefficients
P>|z|
Coefficients
P>|z|
Sexe
-0,0065987
0,956
-0,4329571
0,28
Educ
-0,0005481
0,995
0,0231778
0,936
Age
0,0048982
0,214
0,0241604
0,108
Taim
0,0042609
0,662
-0,0085498
0,838
conflit
0,1469286
0,131
-0,8965898**
0,027
maletat
-0,0042127
0,966
-0,26049
0,437
dsepar
0,0004722
0,534
-0,0028536
0,292
aqparcel
-0,0907995
0,419
-0,7063745*
0,078
prof1
0,6271398***
0,001
7,101939***
0
prof2
0,5981656***
0,001
1,145303*
0,094
prof3
0,5709149***
0,005
6,227656***
0
usage1
5,484338***
0
usage2
6,045344***
0
usage3
4,892921***
0
qteeauj
0,0005025*
0,051
0,0187981
0,23
superfic
0,0003411
0,442
0,01919776*
0,084
recours
8,48E-08*
0,063
-0,0751926
0,819
2,14E-07
0,24
0,5066878**
0,048
Rev
mills lambda
*** significatif au seuil de 1% ; ** significatif au seuil de 5% ; * significatif au seuil de 10%.
Source : Construit à partir des données de l’enquête
234
Conclusion
La pollution des eaux est un problème environnemental crucial pour un pays comme le
Burkina Faso dont la quantité en eau de surface est limitée. Le présent article avait pour
objectif d’analyser les facteurs qui expliquent le consentement à payer des exploitants pour la
restauration des plans d’eau dans la ville de Ouagadougou. L’estimation économétrique par le
modèle de Heckman à deux étapes a montré que la profession, la quantité d’eau prélevée et le
revenu sont des variables qui impactent significativement la disposition à payer des enquêtés.
Concernant les déterminants du montant du CAP, les résultats indiquent que les variables
significatives sont l’existence de conflits, le mode d’acquisition de la parcelle, la profession,
les usages et la superficie de la parcelle. En outre, il ressort de l’analyse que les exploitants
sont disposés à participer monétairement à hauteur de 11 220 FCFA en moyenne pour la
restauration des plans d’eau. En vue de contribuer à l’entretien des barrages pour pérenniser
ces sources de création d’emplois durables et ces zones de développement d’espèces
aquatiques au plan écologique, il est impératif de mettre en place un plan d’actions pour
améliorer l’état des plans d’eau. Les différents acteurs (Autorités communales, société civile,
organisations de producteurs, partenaires au développement) doivent travailler en synergie en
mettant l’accent sur la sensibilisation des utilisateurs sur les bonnes pratiques en matière
d’utilisation et de gestion des barrages. A cela, il est important d’instaurer un comité de
gestion des barrages qui sera en charge de réglementer l’accès et l’utilisation de l’eau. Les
actions comme le curage des plans d’eau et la lutte contre la jacinthe sont à envisager pour
garantir la survie de ces retenues. Au niveau des mécanismes économiques, une taxe
d’exploitation pourrait être imposée pour inciter les populations à une gestion optimale des
barrages. Cette taxe annuelle d’exploitation pour être fixée entre le coût de recours à d’autres
sources (7 152 FCFA) et le CAP moyen (11 220 FCFA).
235
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REVUE INTERNATIONALE DE GESTION ET D’ECONOMIE
SERIE B - ECONOMIE / NUMERO 1 - VOLUME 2 - Décembre 2016 / pp. 241-267.
Approches-prix des biens et services et approches-quantité de main d’œuvre comme
facteurs de croissance dans l’UEMOA : analyse sur données de panel
Yao Séraphin PRAO et Angbonon Eugène KAMALAN
Université Alassane OUATTARA, Bouaké (Côte d’Ivoire)
[email protected] / (225) 01 11 87 60
[email protected] / (225) 08 72 72 37
Résumé :
Les pays de l’Union Économique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA57) ont une
croissance économique faible et volatile, CNUCED (2010). Dans cette étude, nous examinons
les rôles joués par deux catégories de facteurs dans la croissance des pays de l’UEMOA. En
effet, nous nous sommes intéressés aux rôles joués par des variables de prix sur le marché des
biens et services notamment : la parité du pouvoir d’achat, les prix [des biens et services], le
coût de l’investissement, le coût des dépenses gouvernementales et le taux de change réel.
[Nous nous sommes intéressés également aux rôles joués par des variables de quantité liées à
la main d’œuvre notamment la production en volume et la productivité des travailleurs.
L’étude spécifie un modèle à effets fixes versus à effets aléatoires sur un panel des huit pays
de cette zone sur la période 1965-2010. Les résultats indiquent quatre déterminants majeurs à
court terme : la parité du pouvoir d’achat, le coût de l’investissement, la production en volume
et la productivité des travailleurs. A long terme, seul le coût de l’investissement a un impact
sur la croissance économique. Pour enregistrer des taux de croissance forts et durables, l’étude
recommande d’améliorer le cadre institutionnel afin de réduire le coût de l’investissement.
Mots clés : Croissance, Prix, Parité de pouvoir d’achat, Investissement, Dépenses
gouvernementales, taux de change réel, productivité, main d’œuvre.
Classification JEL: O11 - 043 – H54 - C23 - N17
57
Regroupe huit pays : Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo
241
Abstract:
The countries of the West African Economic and Monetary Union (WAEMU) have low and
volatile economic growth, UNCTAD (2010). In this study, we examine two categories of
factors impacting the growth of WAEMU countries. Indeed, we are interested in the roles of
some price-based variables in the goods and services market: the purchasing power parity,
prices of goods and services, the cost of investment, the cost of goods Government spending
and the real exchange rate. We also looked at the roles of quantity variables addressing the
labor force, in particular the volume of production and the productivity of workers. The study
specifies a fixed versus random effects in a panel data model with the eight countries of the
WAEMU zone; over the period 1965-2010. The results show four main determinants of
growth in the short term issue: the purchasing power parity, the cost of investment, the
volume of production and the productivity of workers. In the long run, only the cost of
investment impacts economic growth. In order to achieve strong and sustainable growth rates,
the study recommends improving the institutional framework to reduce the cost of investment.
Keywords: Growth, Prices, Purchasing power parity, Investment, Government spending, real
exchange rate, productivity, labor.
JEL classification: O11 - 043 - H54 - C23 - N17
242
1. Introduction
De façon générale, durant cette dernière décennie, l’Afrique a connu une croissance plus
importante que la plupart des plusieurs régions du monde notamment l’Europe.
Or, la croissance de l’Afrique n’a pas été un facteur de réduction de la pauvreté (monétaire)
notamment au sein des pays de la zone UEMOA. Sur la base des seuils nationaux de pauvreté
et en fonction des années de déroulement des enquêtes nationales, l'incidence de la pauvreté,
c'est-à-dire le nombre de personnes vivant avec un revenu en dessous d'un niveau dit « de
pauvreté58 », est évaluée à 49,4% en 2010 dans l'Union (BCEAO, 2012). Or, il est certain que
les objectifs de réduction de la pauvreté ne peuvent être atteints sans une croissance
économique soutenue et durable. Dès lors, cette dernière reste au cœur du processus du
développement si bien que, sans elle, il est impossible d’avoir un développement durable et de
réduire la pauvreté (Dwight et al, 2008).
Ainsi, il apparait que les pays de l’UEMOA éprouveraient encore des difficultés à réaliser des
taux de croissance robuste et régulière.
L’Afrique
subsaharienne
(ASS)
notamment
enregistre
une
croissance
moyenne
particulièrement élevée : 5,6 % contre 4,5 % pour l’Afrique du Nord.
Les économies de l’Union ont été marquées au cours de ces dernières années par une
croissance faible et volatile. Sur les dix dernières années (2002-2011), le taux de croissance
moyen de l’Union est ressorti à 2,9% avec un écart-type de 1,4 point. Le taux de croissance
du PIB réel de l’UEMOA est passé de 0,5% en 1992 à 6,5% en 1996 puis 1% en 2002 pour se
situer à 4,2% en 2008 (BCEAO, 2013).
Comme l’indique le Tableau1, le taux de croissance des pays de l’UEMOA est demeuré faible
et largement en deçà du taux minimum de 7% indiqué par les institutions internationales, pour
réduire la pauvreté (Banque de France, 2012). Cette situation pourrait être imputable à la
fragilité des moteurs de la croissance, en raison d’une faible diversification de la base
productive, ce qui rend ces économies vulnérables aux chocs exogènes et aux aléas
climatiques.
58
Qui est estimé en 2002 par le PNUD à deux (02) USD par jour. Le niveau de 1 USD est appelé niveau de
« pauvreté extrême ».
243
Tableau 1 : Taux de croissance du PIB réel dans l'UEMOA (2008-2012)
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
4,2%
3,0¨%
4,4%
0,6%
5,8%
5,9%
6,8%
Source : BCEAO (2013)
Les États membres de l’UEMOA ont mis en œuvre, dans le cadre des programmes
d’ajustement structurels, des réformes structurelles qui ont permis une amélioration notable de
leur cadre macroéconomique. Mais une bonne analyse des déterminants de la croissance
économique serait un bon guide pour les politiques visant à améliorer significativement le
revenu réel par tête.
Le but de la présente étude est donc d'examiner les déterminants de la croissance économique
(CGDP) sur la base de l'analyse de données de panel pour les différents pays de l’union. De
façon spécifique, il s’agit d’identifier les variables qui jouent un rôle important dans les
évolutions de la croissance économique des pays de la zone UEMOA.
Il est évident que les travaux sur la croissance économique ont suscité beaucoup d’intérêt dans
la littérature économique. La revue de la littérature sur le thème de la croissance depuis le
début des années 90 jusqu’à nos jours, au-delà de la densité et de la diversité des travaux, fait
apparaitre plusieurs angles. On peut noter celui qui s’est focalisé sur l’impact du commerce et
de l’investissement direct étranger sur la croissance (Nath, 2004 ; Mansouri, 2009). On peut
citer également celui qui est axé sur les déterminants de la croissance et les raisons de sa
volatilité (Dedewanou, 2015 ; Blanca and Bayraktar, 2015 ;
Kinda et Mlachila, 2011).
Cependant, très peu d’études ont pris en compte les prix des facteurs et l’approche quantité de
la main d’œuvre pour expliquer la croissance économique dans les pays de l’UEMOA.
La présente étude apporte une contribution économétrique à la recherche économique en
évaluant dans quelle mesure les prix de certains facteurs influencent la croissance économique
des pays de l’UEMOA. Notre étude introduit deux innovations majeures : l’une conceptuelle
et l’autre méthodologique. Premièrement, au niveau conceptuel, nous essayons d’analyser
dans la zone UEMOA, les déterminants de la croissance, en termes de bien-être des
populations. Nous introduisons ainsi la notion de fonction d’utilité indirecte qui est un
élément du problème dual du consommateur. A notre connaissance, aucune étude dans la
zone, n’a été menée sur les déterminants de la croissance de cette façon.
244
Deuxièmement, l’étude utilise une technique d’estimation relativement performante par
rapport aux méthodes usuelles en données de panel avec des variables non stationnaires. Il est,
en effet, naturel de penser que les propriétés de long terme des séries telles que la PPA ont
une forte probabilité d’être commune à plusieurs pays. Mais les tests de cointégration usuels
(Engle et Granger, 1987 ; Pedronoi, 1995, 1997 ; Kao, 1999) basés sur les résidus dans les
modèles des données de panels reposent sur l’hypothèse nulle d’absence de cointégration
comme il a été suggéré dans la littérature des séries chronologiques. Il peut, cependant, arriver
que toutes les variables du panel ne soient pas intégrées d’ordre 1. De nombreuses études, à
partir de ces différents tests, ne parviennent pas à rejeter l’hypothèse nulle d’absence de
cointégration même si la cointégration entre les variables est fortement suggérée par la théorie
économique.
Pour ce faire, nous appliquons ici le test de cointégration de Westelund (2007) qui teste
l’absence de cointégration tout en déterminant si chacun des individus du panel peut adopter
un modèle à correction d’erreur.
Notre étude aboutit à des résultats importants. La parité du pouvoir d’achat, le coût de
l’investissement, le PIB réel et le niveau de la productivité de la main-d’œuvre ont un impact
sur le PIB réel par habitant dans la zone UEMOA. Le PIB réel a un impact positif sur le PIB
réel par habitant des populations de la zone UEMOA. Plus les pays de la zone UEMOA
produisent des biens et services, plus cela profite aux populations.
Pour répondre aux préoccupations soulevées dans cette étude, nous organisons la suite de
l’étude de la façon suivante. La section 2 présente la revue de la littérature académique sur les
déterminants de la croissance. La section 3 présente la méthodologie et les variables utilisées
pour l’étude. Les résultats des estimations sont présentés dans la section 4. Nous terminons
cette étude par une conclusion qui fait ressortir les principaux résultats et les implications de
politiques économiques.
2. Les déterminants de la croissance : une revue de la littérature théorique et économétrique.
Cette section revisite la littérature théorique et économétrique sur les déterminants de la
croissance. Dans une première sous-section, nous examinons les principaux déterminants de
la croissance avant de montrer dans une deuxième sous-section,
que les résultats
économétriques indiquent qu’aucune théorie n’explique à elle seule la réalité des faits.
245
2.1. Les travaux théoriques
La littérature concernant la croissance économique peut être charpentée en deux grands
compartiments.
Le premier s’attèle à identifier les principaux déterminants de la croissance économique. En
premier lieu, les déterminants exogènes (Harrod, 1939 ; Domar, 1946 ; Solow, 1956) et en
second lieu, les déterminants endogènes (Lucas, 1988 ; Romer, 1986 ; Barro, 1990).
Le second se propose d’étudier les raisons pour lesquelles de nombreux pays n’arrivent pas à
croitre de façon soutenue. Dans cette position, on retrouve les traits principaux de Rodrik
(2006), pour qui, le décollage économique des pays africains nécessite de surmonter le piège
de la trappe à la pauvreté. A cet effet, on peut décliner cinq facteurs : ceux liés à l’ouverture
internationale, à la productivité, aux institutions, à la stabilité politique et à la démographie.
Au plan de l’insertion internationale, la littérature indique que les politiques d’ouverture
seraient favorables pour le développement en Afrique Subsaharienne (Durlauf etQuah 1998,
Collier et Gunning, 1999). D’ailleurs, l’origine la plus évidente de l’amélioration de la
croissance et sa vulnérabilité, en ASS est la progression de la demande mondiale et des prix
de produits primaires qui constituent l’essentiel des revenus d’exportation de la région. On
peut ajouter également que les mauvaises performances économiques des pays africains, en
particulier ceux de la zone UEMOA, sont également associées à leur faible capacité
d’absorption des technologies étrangères (Seck, 2012).
Au niveau de l’investissement, il est admis qu’il reste la clé de la croissance. Ainsi, pour
Lumbila (2005), les pays africains dont les stocks d’infrastructures sont importants obtiennent
plus d’investissements directs étrangers et d’investissements intérieurs que les pays dont les
stocks sont faibles. Cependant, Devarajan et al. (2003) font remarquer que c’est le niveau de
la productivité, et non celui de l’investissement, qui a été la principale contrainte à la
croissance de l’Afrique.
En ce qui concerne les institutions, Jerzmanowski (2006) montre que les institutions
économiques ont un effet positif et significatif sur la croissance économique à travers la
protection des investisseurs. Dans ce cadre, le respect des droits de propriété et des règles est
favorable à la croissance économique (Murphy, Shleiferet Vishny, 1993).
246
Concernant la stabilité politique, l’interaction entre l’instabilité politique et la croissance
économique a été évoquée par divers auteurs. Par exemple, Berthélemy et al. (1996) ont
montré que le risque politique affecte positivement et négativement le taux de croissance en
Afrique. L’instabilité politique serait à la source des faibles taux de croissance en Afrique
(Fosu, 1992 ; Azam et al. 1996).
Enfin, en ce qui concerne la transition démographique, des travaux récents ont épinglé la
démographie comme une contrainte au développement en Afrique subsaharienne (Ndulu,
2006 ; Vimard et Fassassi, 2011). Selon Ndulu (2006), l’écart entre le taux de croissance de
l’Afrique subsaharienne et celui des autres pays en développement entre 1960 et 2004,
s’explique en partie par des facteurs démographiques. Dès lors, les modèles de croissance
endogène prenant en compte le capital humain (Lucas, 1988 ; Romer, 1990), peuvent fournir
un cadre d’analyse des sources de la croissance.
3. Modèle économétrique et description des données
Lorsqu’on étudie les déterminants de la croissance, on peut le faire de deux manières. La
première consiste à estimer des équations où la variable expliquée est le taux de croissance
avec un vecteur de variables explicatives. La deuxième consiste à analyser les déterminants
d’une croissance favorable au bien-être des populations. Il s’agit alors d’analyser les
déterminants en termes de bien-être des populations. Ainsi, nous étudions un modèle de
croissance de ce type sur un panel des pays de l’UEMOA à l’exception de la Guinée-Bissau,
entre 1960 et 2007.
3.1. Le modèle
Comme on l’a déjà vu dans l’étude théorique, le niveau des investissements et les dépenses
publiques sont considérés comme étant des facteurs pertinents pour expliquer les différences
de développement économique entre les pays. Pour cela, nous allons analyser les prix des
facteurs de la croissance sur la croissance économique des pays de l’UEMOA. Kitov (2006) a
proposé un modèle où la croissance du PIB réel ne dépend que des changements de la
population d'un groupe d'âge spécifique et un niveau donné du PIB réel par habitant. Selon ce
modèle, le PIB réel par habitant a une composante constante du taux de croissante et les
fluctuations observées au niveau de la population. Jones et Manuelli (2005), notaient pour leur
part que, la différence observée au niveau du PIB par habitant entre les pays développés et
sous-développés est due au capital humain, à sa production et sa divulgation. La spécification
247
retenue pour analyser les déterminants de la croissance en zone UEMOA, s’inspire de celle
d’Akbar et al (2011) et peut s’écrire de la façon suivante :
𝐶𝐺𝐷𝑃𝑖𝑡 = 𝛽𝑖0 + 𝛽2 𝑋𝑅𝐴𝑇𝑖𝑡 + 𝛽3 𝑃𝑃𝑃𝑋𝑖𝑡 + 𝛽4 𝑃𝑖𝑡 + 𝛽5 𝑃𝐺𝑖𝑡 + 𝛽6 𝑃𝐼𝑖𝑡 + 𝛽7 𝑌𝑖𝑡
+ 𝛽8 𝑅𝐺𝐷𝑃𝑊𝑂𝑅𝐾𝑖𝑡 + 𝜀𝑖𝑡
Il
s’agit
d’étudier
les
interdépendances
entre
les
variables
𝐶𝐺𝐷𝑃, 𝑋𝑅𝐴𝑇, 𝑃𝑃𝑃𝑋, 𝑃, 𝑃𝐺, 𝑃𝐼, 𝑌 𝑒𝑡 𝑅𝐺𝐷𝑃𝑊𝑂𝑅𝐾 sans faire d’hypothèses a priori sur la
valeur des coefficients les reliant et de tester l’existence de relations de long terme. Une
première étape consiste à identifier l’ordre d’intégration de chacune des variables afin
d’observer si une relation de cointégration peut être mise en évidence.
3.2. Définition des variables utilisées
La variable endogène
Notre objectif étant d’analyser les déterminants de la croissance, il importe de choisir la
variable à même de représenter cette croissance économique. D’ordinaire, c’est le taux de
croissance du PIB qui est le principal indicateur. Alors que le PIB sert souvent d'indicateur de
l'activité économique d'un pays, le PIB par habitant reflète plutôt le niveau de vie des
habitants et donc le niveau de développement du pays. C’est pourquoi nous l’utilisons dans la
spécification du modèle comme variable endogène (𝐶𝐺𝐷𝑃).
Les variables exogènes
Le taux de change réel par rapport au dollar américain (XRAT). C’est une variable très
importante du point de vue macroéconomique car c’est elle qui doit s’ajuster en cas de
déséquilibre de balance des paiements. Même lorsque le taux de change est fixe, le taux de
change réel peut subir de fortes variations cumulatives au cours du temps. Un taux de change
réel faible signifie que les biens étrangers sont relativement chers et les biens domestiques
bon marché. Entre 2000 et 2010, 30 % du PIB du continent était associé à l’utilisation et
l’exploitation des ressources naturelles (BAD, 2011). Les exportations de produits agricoles,
de pétrole, de métaux et de minéraux représentent environ 70 % des recettes en devises de
l’Afrique subsaharienne (Mills et Herbst, 2012).
La parité du pouvoir d’achat (𝑃𝑃𝑃𝑋) .Comme l’observe Mainguy (1998), la détermination, à
partir de la parité des pouvoirs d’achat, des taux de change sur les biens échangeables, permet
de faire correspondre avantage comparatif et compétitivité par les coûts. En règle générale,
248
l’écart entre pays à haut et à bas revenu diminue lorsqu’on remplace les taux de change par les
parités de pouvoir d’achat.
Le déflateur du PIB (P). Il mesure le prix de l’unité caractéristique de production par rapport
à son prix au cours de l’année de base. C’est donc un indice de prix « temporel » visant à
obtenir des comparaisons « corrigées pour les différences de prix » dans le temps pour un seul
pays. Alors que l’IPC ne mesure que les prix des seuls biens et services achetés par les
consommateurs, le déflateur mesure les prix de tous les biens et services produits dans une
économie. Or, dans la zone UEMOA, les équations retenues pour les données trimestrielles
indiquent que la prévision de l'évolution des prix doit tenir compte de la persistance de
l'inflation, mais également de l'inflation importée (TOE, 2010).
Le déflateur des dépenses gouvernementales (PG).C’est un indicateur qui mesure la place de
l’Etat dans l’économie. En général, l’Etat peut utiliser deux instruments de politique fiscale.
Les dépenses gouvernementales et les taxes affectent le PIB réel et le niveau des prix.
Comme l’observe Nubukpo (2007), les dépenses publiques peuvent favoriser la croissance
des économies de l’UEMOA lorsqu’elles sont destinées aux investissements, mais agissent
comme un frein quand elles privilégient la consommation.
Le déflateur de l’investissement (PI). Dans la base de PWT, cette variable peut être interprétée
comme un proxy du rendement moyen, en termes de PIB créé au cours de l'année t à partir de
l'investissement réalisé au cours de la même période. Comme l’ICOR, plus sa valeur est
élevée, plus faible est la productivité marginale de l’investissement. Devarajan et al. (2001)
ont soutenu également, l’idée selon laquelle la stagnation économique des pays d’Afrique
Subsaharienne s’explique par un faible investissement et surtout par un mal-investissement.
Ces auteurs ont testé la faible productivité des investissements notamment publics.
Le PIB par tête en dollar(Y). Il reflète le niveau de vie des populations par rapport au niveau
américain. Le PIB par habitant est plus intéressant que le revenu national de l'économie pour
deux raisons au moins. Premièrement, l'estimation du PIB par habitant donne une meilleure
approximation de l'évolution du niveau de vie d'un pays que la mesure du revenu national.
Deuxièmement, cet indicateur universel se prête particulièrement bien à des fins comparatives
entre des pays dont la grandeur de la population diffère. Les données transversales montrent
clairement que la croissance du revenu produit des bénéfices tangibles en matière de bonheur
et de la satisfaction dans la vie des individus, quoique avec des rendements marginaux
décroissants (Clark et Senik, 2011).
249
Le niveau de la productivité de la main-d’œuvre (𝑅𝐺𝐷𝑃𝑊𝑂𝑅𝐾). C’est la production par
personne salariée. Ils permettent aussi d’apprécier la croissance d’un pays au regard de ses
niveaux actuels de revenu et de sa productivité. Pour procéder à une comparaison
internationale des niveaux de productivité de la main-d’œuvre, les PPA sont indispensables :
par définition, toute mesure de productivité met en effet en relation un indicateur en volume
de la production et un indicateur en volume des moyens mis en œuvre pour cette production.
3.3. La procédure d’estimation
La procédure d’estimation se fera en trois étapes. Dans un premier temps, nous vérifions la
stationnarité des séries. Dans un second temps, nous faisons un test de cointégration pour
valider l’existence d’une relation de long terme. Dans un troisième temps, nous procédons à
l’estimation de cette relation.
3.3.1. Etude de la stationnarité
La stationnarité doit être vérifiée pour chacune des séries afin d’éviter des régressions
fallacieuses pour lesquelles les résultats pourraient être « significatifs » en apparence, alors
qu’ils ne le sont pas en réalité.
3.3.2. Test de cointégration
La littérature sur les tests de cointégration en panel est récente. Elle s’est développée autour
de deux tests fondamentaux : le test de Pedroni (1999) et celui de Kao (1999). Ces deux tests
sont d’ailleurs les plus utilisés dans les études économétriques. Leur hypothèse nulle est
identique. Il s’agit de l’absence de cointégration entre les variables considérées. En revanche,
l’hypothèse alternative diffère. Ces tests reposent sur une relation de long terme du type :
𝑀
𝑘 𝑘
𝑌𝑖,𝑡 = 𝛼𝑖 + ∑ 𝛽𝑖,𝑡
𝑥𝑖,𝑡 + 𝜀𝑖,𝑡
𝑘=1
Avec
𝑖 = 1, … . , 𝑁; 𝑡 = 1, … . , 𝑇
,
2
𝑒𝑡 𝑚 = 1, … . . , 𝑀 𝑒𝑡 𝐸(𝜀𝑖,𝑡 𝜀𝑗,𝑡
) = 𝜎𝑖,𝑡
pour
𝑖=
𝑗 𝑒𝑡 0 𝑠𝑖𝑛𝑜𝑛.
Pedroni (1999) et Kao (1999) testent la stationnarité des résidus de la relation de long terme
de façon analogue aux tests d’Engle et Granger.
𝜀𝑖,𝑡 = 𝜃𝜀𝑖,𝑡−1 + 𝑢𝑖,𝑡
250
L’hypothèse nulle testée correspond alors à l’absence de relation de cointégration. Soit :
𝐻0 : 𝜃𝑖 = 𝜃 = 1 ∀ 𝑖
Pedroni présente sept tests statistiques pour tester l’hypothèse nulle. Dans ces différents tests,
quatre sont basés sur la dimension within (intra) et trois sur la dimension between (inter). La
distinction entre ces deux catégories de tests se fait au niveau de l’hypothèse alternative :
𝐻1 : 𝜃𝑖 = 𝜃 < 1 ∀ 𝑖 pour les tests sur la dimension within
𝐻1 : 𝜃𝑖 < 1 ∀ 𝑖 pour les tests sur la dimension between
3.3.3. Sources de données
La présente étude utilise les données secondaires. Les données proviennent toutes de la base
de données PWT(2008). Elles ont une dimension annuelle et couvrent la période 1960-2007.
Ce choix est imposé par la disponibilité des données au niveau des pays et le souci d’avoir un
panel sans données manquantes. Notre analyse sera menée sur les pays de l’UEMOA, à savoir
le Benin, le Burkina-Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et
le Togo. Ce sont donc des données de panel qui seront traitées conformément à la
méthodologie des données de panel, c’est-à-dire l’analyse de la stationnarité et de la
cointégration, le test de la présence d’effets spécifiques et le test de Hausman pour le choix
entre le modèle à effets fixes et le modèle à effets aléatoires.
4. Les résultats économétriques
Cette section analyse la relation entre le PIB réel par habitant, le taux de change réel, la parité
du pouvoir d’achat, le déflateur du PIB, le coût des dépenses gouvernementales, le coût de
l’investissement, le PIB réel et le niveau de la productivité de la main-d’œuvre.
4.1. La méthode des données de panel statique et les résultats économétriques
La première étape à établir pour un échantillon de données de panel est de vérifier la
spécification homogène ou hétérogène du processus générateur de données. Au plan
économique, les tests de spécification reviennent à déterminer si l’on est en droit de supposer
que le modèle théorique étudié est parfaitement identique pour tous les pays, ou au contraire
s’il existe des spécificités propres à chaque pays.
On commence par tester l’hypothèse d’une structure parfaitement homogène (constante et
pente identiques). Si les statistiques de Fischer associés au test d’homogénéité total sont
251
supérieures au Fischer de la table, alors on rejette cette hypothèse. Ensuite, on teste la
présence des effets individuels en supposant que les 𝛽𝑖 sont constantes pour tous les individus.
Après avoir effectué ces deux tests, le modèle retenu sera estimé par deux spécifications de
panel hétérogène, où la seule source d’hétérogénéité provient des constantes individuelles :
𝑌𝑖𝑡 = 𝛼𝑖 + 𝛽𝑋𝑖𝑡 + 𝜀𝑖𝑡
Pour ce type de modèle, on distingue deux cas : le cas où les paramètres 𝛼𝑖 sont des
constantes déterministes (modèle à effets fixes) et le cas où les paramètres 𝛼𝑖 sont des
réalisations d’une variable aléatoire d’espérance et de variance finie (modèle à effets
aléatoires). Pour choisir le bon modèle pour notre échantillon, nous avons procédé à une
analyse du test de spécification de Hausman.
4.2. Résultat des tests de racine unitaire
Pour examiner les propriétés des séries (stationnarité et ordre d’intégration) temporelles de
nos données, nous utilisons les développements récents de la littérature sur les tests de racine
unitaire sur données de panel. Les tests développés récemment sont celui de Breitung (2000),
celui de Hadri (2000), celui de Levin, Lin et Chu (2002) et celui de Im, Pesaran et Shin
(2003). Dans le cadre de notre étude, nous utilisons le dernier test, le plus populaire à notre
sens. Les résultats sont consignés dans le tableau 1 en annexe. Ils indiquent que les variables
sont intégrées d’ordre 1 sauf PG et PIqui sont stationnaires en niveau. En revanche, en
différence première, l’hypothèse de racine unitaire est rejetée pour l’ensemble des variables
d’analyse. Il en résulte que toutes les séries en panel sont intégrées d’ordre 1.
4.3. Résultats du test de cointégration de Westerlund (2007)
Les variables étant intégrées d’ordre 1, nous procédons au test de cointégration. La littérature
sur les tests de cointégration en panel est récente sans pour autant manquer de travaux. Une
bonne synthèse de travaux est présentée par Hurlin et Mignon (2007). On peut citer les tests
de Pedroni (1999) et de Kao (1999). De nombreuses études ont révélé une faiblesse de ces
tests car ils ne parviennent pas à rejeter l’hypothèse nulle d’absence de cointégration, même si
la cointégration entre les variables est fortement suggérée par la théorie économique.
Westerlund (2007) a proposé quatre nouveaux tests de cointégration qui sont basés, non pas
sur les résidus mais sur la dynamique structurelle des relations. La force du test est de ne pas
imposer de restriction sur les facteurs communs. L’idée est de tester l’hypothèse nulle de non
252
cointégration en vérifiant si le terme de correction d’erreur dans le modèle à correction
d’erreur construit est significativement égal à zéro. Les quatre tests sont normalement
distribués et accommodent assez bien les dynamiques individuelles de courte période, les
tendances, les paramètres spécifiques aux individus et les dépendances intra-individus. Les
deux premiers (𝐺𝑡 , 𝐺𝑎 ) testent l’alternative d’existence d’au moins un individu pour lequel les
variables sont cointégrées. Les deux derniers (𝑃𝑡 , 𝑃𝑎 ) permettent de tester l’hypothèse nulle
d’absence de cointégration contre l’hypothèse alternative selon laquelle le panel dans son
ensemble est cointégré.
Tableau 2 : Le résultat des tests de cointégration en panel (Westelund 2007)
CGDP et XRAT
CGDP et PPP
CGDP et P
CGDP et PG
stat Coef
P-value Coef
P-value Coef
P-value Coef
P-value
Gt
-2,908
0,026
-2,914
0,025
-2,284
0,600
-2,764
0,075
Ga
-17,935 0,005
-16,34
0,029
-13,38
0,264
-15,277 0,075
Pt
-5,328
-11,489 0,066
-5,657
0,645
-4,826
Pa
-11,121 0,152
-11,87
-11,164 0,148
0,775
0,083
0,910
-10,008 0,309
Tableau 2 (suite)
CGDP et PI
CGDP et Y
CGDP et RGDPWOK
Stat
Coef
P-value
Coef
P-value
Coef
P-value
Gt
-2,923
0,021
-1,683
0,991
-2,325
0,544
Ga
-12,679
0,370
-6,339
0,991
-13,665
0,226
Pt
5,729
0,063
-3,990
0,990
-5,752
0,603
Pa
-12,403
0,051
-6,289
0,896
-11,310
0,132
Source : Auteur
A partir des résultats présentés dans les tableaux ci-dessous, il découle qu’un certain nombre
de couples de test parviennent à rejeter l’hypothèse nulle de non cointégration de certaines
séries pour le panel tout entier. Il en résulte que le PIB réel par habitant entretient une relation
de long terme avec certains déterminants , ce qui suggère la pertinence du recours à un
modèle à correction d’erreur afin de mettre en évidence les relations de court et de long terme
entre le PIB réel par habitant et ces déterminants. A la suite de Westerlund (2007), il est
possible d’écrire le modèle à correction d’erreur de la façon suivante :
253
𝐷𝐶𝐺𝐷𝑃𝑖𝑡 = 𝛽1 𝐷𝑋𝑅𝐴𝑇𝑖𝑡 + 𝛽2 𝐷𝑃𝑃𝑃𝑋𝑖𝑡 + 𝛽3 𝐷𝑃𝑖𝑡 + 𝛽4 𝐷𝑃𝐺𝑖𝑡 + 𝛽5 𝐷𝑃𝐼𝑖𝑡 + 𝛽6 𝐷𝑌𝑖𝑡
+ 𝛽7 𝐷𝑅𝐺𝐷𝑃𝑊𝑂𝑅𝐾𝑖𝑡 + 𝜇1 𝑋𝑅𝐴𝑇𝑖𝑡−1 + 𝜇2 𝑃𝑃𝑃𝑋𝑖𝑡−1 + 𝜇3 𝑃𝑖𝑡−1 + 𝜇4 𝑃𝐺𝑖𝑡−1
+ 𝜇5 𝑃𝐼𝑖𝑡−1 + 𝜇6 𝑌𝑖𝑡−1 + 𝜇7 𝑅𝐺𝐷𝑃𝑊𝑂𝑅𝐾𝑖𝑡−1 + 𝛾𝐶𝐺𝐷𝑃𝑖𝑡−1 + 𝜖𝑖𝑡
𝑜ù les 𝛽𝑗 représentent les élasticités de court terme pendant que les ratios
𝜇𝑗
𝛾
représentent les
élasticités de long terme. 𝛾 est le terme à correction d’erreur dont la négativité et la
significativité statistique valident le modèle à correction d’erreur.
4.4. Résultats des tests de spécification des effets individuels
La méthode de régression avec données de panel à effets fixes permet de contrôler les
variables omises qui varient entre les entités (Etats) mais pas avec le temps. Cette régression
peut être utilisée lorsqu’il y a plus de deux périodes d’observation (𝑇 ≥ 2). Cela a consisté à
effectuer le test de Fisher afin de vérifier la spécification homogène ou hétérogène du
processus générateur de données. Cela revient à déterminer si l’on est en droit de supposer
que le modèle étudié est parfaitement identique pour tous les pays ou s’il existe des
spécificités propres à chaque pays. Le résultat des tests est consigné en annexe 1. Le pouvoir
explicatif global du modèle est élevé (overall 0,6892) avec Prob > F = 0,000. Son pouvoir
explicatif intra-groupe est, lui, très élevé (R-sqwithin = 0,8305). La probabilité associée à la
statistique de Fischer (F test that all u_i=0
F (7,369) = 69,58
prob> F = 0,0000). Il y a
assez d’évidences statistiques pour une hypothèse d’hétérogénéité entre les coefficients des
différents pays. Les effets fixes introduits sont spécifiques.
Dans notre étude, le rejet de l’hypothèse nulle d’absence d’effets individuels (voir tableau en
annexe 1) conduit à effectuer des tests supplémentaires pour apprécier sa nature.
En premier lieu, il s’agit du test de Breusch et Pagan qui ne permet pas de rejeter ici
l’hypothèse nulle et concluons que les effets aléatoires ne sont pas appropriés. Il n’y a pas de
différences significatives entre les pays.
On peut utiliser un MCO simple pour les
régressions. En second lieu, le test de Haussman permet de faire le choix entre le modèle à
effets fixes individuels et le modèle à effets fixes aléatoires. Le test suit une loi de Chi-Deux
avec 7 degrés de libertés. Les résultats du test d’Hausman (annexe) montrent que ce test ne
réfute pas l’hypothèse d’absence de corrélation entre le terme aléatoire et les variables
indépendantes. Le modèle à effets aléatoires représente alors le mieux la structure des
données de notre échantillon car il est plus adapté que le modèle à effets fixes puisque la pvalue est inférieure au seuil de 5%. Nous estimons notre modèle à correction d’erreur en panel
254
en une seule étape mais qui permet de mettre en exergue la relation de long terme et la
dynamique de court terme.
4.5. Résultat sur panel dynamique
Les différents tests effectués conduisent à retenir le modèle à effets spécifiques aléatoires.
Les paramètres estimés sont consignés dans les tableaux 3, 4 et 5 pour la relation de long
terme et la dynamique de court terme respectivement.
Tableau 3 : Le résultat de l’estimation du modèle à effets aléatoires
Variables
Coefficients
STD ERR
Prob P >|𝑍|
Décision
DXRAT
0,0463682
0,068025
0,496
Non significatif
DPPP
- 0,7372073
0,2748628
0,007
Significatif
DP
0,4339179
0,7162436
0,545
Non significatif
DPG
0,0439236
0,4548372
0,923
Non significatif
DPI
-0,2840326
0,0903531
0,002
Significatif
DY
69,25654
6,537003
0,000
Significatif
DRGDPWOK
0,0551007
0,0123254
0,000
Significatif
CGDP (-1)
-0,0050919
0,0072673
0,0508
Significatif
XRAT (-1)
0,0230958
0,0370265
0,533
Non significatif
PPP (-1)
-0,058119
0,1076594
0,589
Non significatif
P (-1)
0,4074166
0,3868443
0,292
Non significatif
PG (-1)
-0,1790612
0,1522509
0,240
Non significatif
PI (-1)
0,1146603
0,0791165
0,147
Non significatif
Y (-1)
0,9466139
1,369937
0,490
Non significatif
RGDPWOK (-1)
0,0046735
0,003039
0,124
Non significatif
C
-15,71009
14,89751
0,292
Non significatif
Number of observations = 376
Number of groups = 8
R-sq within = 0,5808
between = 0,7420
wald chi2 (15) = 503,33
prob> chi2 = 0,000
overall = 0,5830
corr (u_i, x) = 0 (assumed)
Source: Auteur
255
Le test de Fisher indique que tous les coefficients du modèle sont différents de zéro (prob>
chi2 = 0,000 donc inférieur à 0,05). Les différences entre les pays ne sont pas corrélées avec
les répresseurs (corr (u_i, x) = 0 (assumed)).Nous pouvons donc interpréter les coefficients du
modèle. Le coefficient de correction d’erreur est négatif (-0,0050919) et significatif à 5%
(0,0508). Il en découle que nos résultats sont donc interprétables.
-
La relation d’équilibre de long terme
Tableau 4 : Estimation de la relation de long terme
Variables
Coefficients de long terme
XRAT
- 4,53579214
PPP
11,4140105
P
- 80,0126868
PG
35,1658909
PI
- 22,5181759
Y
- 185,905831
RGDPXOK
- 0,91783028
CGDP
- 0,0050919
Source : Auteur
Conformément au tableau 3, aucune variable n’est significative à long terme. Il en découle
qu’à long terme, le taux de change réel, la parité du pouvoir d’achat, le déflateur du PIB, le
coût des dépenses gouvernementales, le coût de l’investissement, le PIB réel et le niveau de la
productivité de la main-d’œuvre n’ont pas d’effet sur le PIB réel par habitant.
-
La dynamique de court terme
256
Tableau 5 : Estimation de la relation de court terme
Variables
XRAT
PPP
Coefficients de court terme
0,0463682
- 0,7372073
P
0,4339179
PG
0,0439236
PI
- 0,2840326
Y
69,25654
RGDPWOK
0,0551007
C
- 15,71009
Source : Auteur
Conformément au tableau 3, la parité du pouvoir d’achat, le coût de l’investissement, le PIB
réel et le niveau de la productivité de la main-d’œuvre ont un impact sur le PIB réel par
habitant dans la zone UEMOA. Les coefficients associés à la parité du pouvoir d’achat et le
coût de l’investissement ont un signe négatif tandis que ceux associés au PIB réel et au niveau
de la productivité de la main-d’œuvre ont un signe positif.
La relation négative et statistiquement significative indique qu’une hausse du taux de change
PPA engendre une baisse du niveau de vie des populations de l’Union. La surévaluation du
franc CFA par rapport au dollar est défavorable au PIB réel par habitant dans la zone
UEMOA. Un tel résultat peut résulter de la combinaison de deux variables : d'une part, le
rythme d'inflation comparé à celui des pays partenaires; d'autre part, le taux de change
nominal. Il en résulte que l’augmentation des prix des pays membres exprimée en dollars
supérieure à celle des Etats-Unis, n’est pas profitable aux pays de l’Union. Du fait de
l’arrimage du franc CFA à l’euro, les économies de la zone CFA pâtissent de toute
appréciation de l’euro; celle-ci étant une source indéniable de perte de compétitivité-prix.
D’ailleurs, pour Couharde et al. (2011) et Gnimassoun (2012), la sous-région UEMOA dans
son ensemble avait connu avant 1994, un taux de change surévalué de près de 25%.
Le coût de l’investissement est négativement relié au PIB réel par habitant. Dans la zone
UEMOA, l’augmentation du coût de l’investissement n’est pas favorable au bien-être des
populations. En effet, la faiblesse de l’infrastructure de base, le mal-investissement et le
niveau élevé de la corruption augmentent le coût de l’investissement. Ce résultat peut être
257
rapproché avec ceux de Tachiwou (2014). Si on s’accorde avec eux que tous les pays de
l’UEMOA sont corrompus, il est possible que l’efficacité dans les dépenses publiques pourrait
impacter le bien-être des populations ouest-africaines. D’ailleurs, la récente étude de Blanca
et Bayraktar (2015), sur la période 2000-2013, soutient que les dépenses publiques ont un
impact significatif sur la croissance économique des pays de la zone UEMOA. Toutefois ils
trouvent que la volatilité des mesures de politiques publiques a un effet négatif sur la
croissance de ces pays. Mais la qualité de la formation brute du capital fixe impacte
qualitativement la croissance économique.
L’impact positif et statistiquement significatif entre le PIB par habitant en dollar et le PIB réel
par habitant des populations de la zone UEMOA, est conforme aux prédictions théoriques. Le
pouvoir d’achat des individus est favorable à la croissance. Comme l’a souligné Easterly
(2009), la faible réactivité du taux de pauvreté à la croissance observée en Afrique subsaharienne provient du faible niveau du PIB par tête moyen : pour deux pays connaissant un
taux de croissance du PIB par tête équivalent, celui qui a le PIB par tête initial le plus élevé
profiterait mécaniquement d’une réduction plus forte du taux de pauvreté. Ce résultat est très
intéressant en ce sens que la croissance doit s’accompagner d’un accroissement du pouvoir
d’achat des populations. La stabilité macroéconomique a été citée comme favorable à la
croissance économique (Kpodar et Gbenyo, 2010). Pour autant, la stabilité des prix ne doit
pas être comprise comme un rigorisme monétaire car les travaux de Dramani et Thiam (2012)
montrent que la perte de croissance liée à la réduction de l'inflation serait de 0,6 point sur la
période 1970-2007.
L’étude indique également que l’accroissement de la productivité du travail est favorable à la
réduction de la pauvreté dans l’Union. L’éducation, la formation et l’apprentissage tout au
long de la vie favorisent un accroissement de la productivité, une progression quantitative et
qualitative de l’emploi, une augmentation des revenus et le développement. Les politiques
visant à augmenter le capital disponible par travailleur et l'élévation du niveau d'éducation et
de qualification de la main-d'œuvre, peuvent améliorer la productivité du travail. Dans les
pays où l’essentiel de la population active se trouve dans le secteur agricole, il va sans dire
que, plus l’exploitant agricole est instruit, et plus son revenu a de chances de s'accroître
lorsqu'il utilise des technologies nouvelles et s'adapte rapidement aux changements
technologiques. Les investissements en santé sont également favorables à l’accroissement de
la productivité de la main d’œuvre, comme indiqué dans l’étude de Umoru et Yaqub (2013),
258
pour le cas du Nigeria. En outre, l’augmentation de la main d’œuvre dans le secteur agricole
entraine une baisse des prix alimentaires favorable au bien-être des populations (Dorward,
2013).
Conclusion
Dans cette étude, nous nous sommes intéressés aux déterminants de la croissance économique
par tête dans les pays de la zone UEMOA. Pour ce faire, nous avons présenté une brève
synthèse de la littérature. Ensuite nous avons estimé un modèle en données de panel afin d’en
tirer quelques conclusions. Les résultats de l’étude montrent que la parité du pouvoir d’achat,
le coût de l’investissement, le PIB réel et le niveau de la productivité de la main-d’œuvre ont
un impact sur le PIB réel par habitant dans la zone UEMOA.A court terme, la parité du
pouvoir d’achat et le coût de l’investissement ont un impact négatif sur la croissance
économique des pays de la zone UEMOA. La surévaluation de la monnaie de la zone par
rapport au dollar est défavorable à la croissance économique des pays de la zone. L’étude
indique également que le coût de l’investissement est un facteur clé de la croissance dans la
zone UEMOA. Certains facteurs de risques et les lacunes de l’environnement qu’ils entraînent
représentent des obstacles aux activités de l’ensemble des entreprises. Il s’agit notamment des
pratiques discriminatoires, de la corruption, d’un faible respect de la règle de droit, des coûts
de transaction élevés, de la pesanteur de la réglementation, du manque de transparence et de
l’incurie de l’administration.
Une augmentation du PIB réel et l’élévation de la productivité de la main-d’œuvre sont
favorables à la croissance économique et surtout à l’accroissement du niveau de vie des
populations de l’Union.
Dans l’ensemble, ces résultats permettent de mettre en relief deux enseignements.
Premièrement, dans les économies de marché, l’investissement est un moteur de la croissance.
Il nourrit et stimule la croissance dès lors qu’un certain nombre de facteurs se conjuguent pour
offrir un environnement propice à son expansion. L’investissement privé est une condition
préalable indispensable à la croissance économique : il est, en effet, le moteur qui entraîne les
rouages de la machine économique en permettant aux entrepreneurs de réunir les ressources
nécessaires pour produire des biens et des services.
259
Deuxièmement, les investissements en capital humain et l’accroissement du pouvoir d’achat
des populations permettent de dynamiser la croissance. Les pays de l’Union doivent engager
les réformes nécessaires dans ce sens. C’est d’ailleurs une obligation pour eux car, selon le
CNUCED (2012), les pays africains doivent enregistrer des taux de croissance d’environ 7%
et plus à moyen et long terme, ce qui exigerait des taux d’investissement de 25% du PIB.
L’investissement est un facteur clé d’accroissement de la compétitivité des entreprises
africaines et du développement de leur savoir-faire. L’Etat pourra
accompagner cette
politique de croissance en investissant dans les infrastructures de base, de santé et accroître
ses dépenses en éducation afin d’augmenter le niveau de productivité des travailleurs. Car la
faible qualification de la main d’œuvre peut être un obstacle réel à l’investissement. Sur le
long terme, l’élévation des gains de productivité doit être recherchée, afin d’élever le rythme
de la croissance potentielle et en conséquence de la progression du PIB par habitant.
260
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264
Annexe
Tableau 1 : résultats des tests de racine unitaire en panel
IPS
En Niveau
LLC
XRAT
En différence
Coefficient
P-value
1,3730
0,9151
-
1,0282
0,1519
0,0000
-
8,4444
0,0000
-
9,8063
Coefficient
P-value
première
En Niveau
CGDP
En différence
6,3507
-
1,0000
11,4954
0,0000
3,9416
-
1,0000
9,2682
0,0000
0,8381
0,7990
première
En Niveau
PPP
En différence
3,4911
0,9998
-
10,3165
0,0000
-
8,0807
0,0000
-
1,1545
0,1241
-
2,6416
0,0041
-
10,6515
0,0000
-
9,7199
0,0000
-
2,5846
0,0049
-
2,9449
0,0016
-
11,3433
0,0000
-
11,4108
0,0000
-
3,3290
0,0004
-
3,2513
0,0016
-
11,5054
0,0000
-
12,4959
0,0000
-
0,3582
0,3601
-
3,8716
0,0001
-
12,6200
0,0000
-
11,2783
0,0000
0,8079
0,7904
11,7628
0,0000
première
En Niveau
P
En différence
première
En Niveau
PG
En différence
première
En Niveau
PI
En différence
première
En Niveau
Y
En différence
première
En Niveau
RDGP
0,2916
0,6147
WOK
En différence
-
-
10,2539
0,0000
première
Source : Auteur
265
Tableau A1 : Test de présence d’effets spécifiques
. xtreg cgdp XRAT ppp p pg pi y rgdpwok,fe
Fixed-effects (within) regression
Group variable: Pays
Number of obs
Number of groups
=
=
384
8
R-sq:
Obs per group: min =
avg =
max =
48
48.0
48
within = 0.8305
between = 0.4703
overall = 0.6892
corr(u_i, Xb)
F(7,369)
Prob > F
= -0.1894
cgdp
Coef.
XRAT
ppp
p
pg
pi
y
rgdpwok
_cons
.2857226
.2334021
-.8058675
1.403696
-1.150036
-155.2656
.3564971
302.3043
.2029487
.691877
2.280582
1.037968
.4010941
7.175175
.0158017
86.88723
sigma_u
sigma_e
rho
249.47494
172.0249
.6777473
(fraction of variance due to u_i)
F test that all u_i=0:
Std. Err.
F(7, 369) =
t
1.41
0.34
-0.35
1.35
-2.87
-21.64
22.56
3.48
69.58
P>|t|
=
=
0.160
0.736
0.724
0.177
0.004
0.000
0.000
0.001
258.34
0.0000
[95% Conf. Interval]
-.1133584
-1.127114
-5.290435
-.6373784
-1.938753
-169.375
.3254244
131.448
.6848036
1.593918
3.6787
3.44477
-.3613196
-141.1563
.3875699
473.1605
Prob > F = 0.0000
Source : Auteur
Remarque : le test conclut à la présence d’effets spécifiques. En conséquence, il est indiqué de
faire le test de hausman afin de déterminer la nature de ces effets spécifiques (individuels ou
aléatoires).
266
sigma_u
sigma_e
rho
249.47494
172.0249
.6777473
F test that all u_i=0:
(fraction of variance due to u_i)
F(7, 369) =
69.58
Prob > F = 0.0000
Tableau A2 : Test de hausman
. est store fixed
. hausman
random fixed
Coefficients
(b)
(B)
random
fixed
XRAT
ppp
p
pg
pi
y
rgdpwok
.5800854
1.19855
-1.194961
4.885593
-.8598911
-89.43505
.2756116
.2857226
.2334021
-.8058675
1.403696
-1.150036
-155.2656
.3564971
(b-B)
Difference
sqrt(diag(V_b-V_B))
S.E.
.2943628
.9651478
-.3890934
3.481897
.2901454
65.83057
-.0808855
.162639
.3128729
1.480576
.2212339
.3203845
4.201787
.0046594
b = consistent under Ho and Ha; obtained from xtreg
B = inconsistent under Ha, efficient under Ho; obtained from xtreg
Test:
Ho:
difference in coefficients not systematic
chi2(7) = (b-B)'[(V_b-V_B)^(-1)](b-B)
=
299.72
Prob>chi2 =
0.0000
(V_b-V_B is not positive definite)
Source : Auteur
Le test de Hausman est un test de spécification qui permet de discriminer les effets
fixes et aléatoires. Ce test est important car il permet de déterminer si les coefficients des
deux estimations (fixe et aléatoire) sont statistiquement différents. L’idée sous-jacente est
que, sous l’hypothèse nulle d’indépendance entre les erreurs et les variables explicatives,
les deux estimateurs sont non biaisés donc les coefficients devraient en principe être peu
différents. Le rejet de l’hypothèse nulle conduit au choix du modèle à effets fixes.
267
Recommandations aux auteurs
Pour soumettre un article, les auteurs doivent suivre les recommandations suivantes :
- deux exemplaires doivent être soumis en version Word à l'adresse suivante :
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page, le titre de l’article, le nom des auteurs, leur titre, leur affiliation et l’adresse
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réception du papier se fera par l’envoi d’un message électronique ;
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- les textes doivent être dactylographiés en Times New Roman corps 12 avec un interligne
1,5 et des marges de 2,5 cm (en haut, en bas, sur la droite et sur la gauche) en format A4
recto seulement
- les paragraphes seront justifiés. Le document sera paginé (au centre du pied de page). Les
notes de bas de page seront numérotées de manière croissante.
- le texte ne comporte aucun caractère gras, italique ou souligné, qu'il s'agisse du corps du
texte ou des titres et sous-titres.
- l’article ne doit pas dépasser 25 pages, figures, tableaux, annexes et bibliographie compris.
- les références bibliographiques situées dans le texte doivent comporter, entre parenthèses,
le nom des auteurs (et pas seulement celui du premier auteur lorsque la référence est une
œuvre collective ou une coordination collective) ainsi que l’année de la publication et,
éventuellement, la page citée sous la forme suivante : (Albert, 1991 : 351).
- la bibliographie, classée par ordre alphabétique, sera située à la fin du document selon la
forme suivante :
 pour les articles, les communications de colloques ou les cahiers de recherche :
ALBERT P., FAYOLLE A., MARION S. (1994), « L’évolution des systèmes
d’appui à la création d’entreprises », Revue Française de Gestion, n°101, p.100112.
 pour les livres ou les rapports : JULIEN P.A., MARCHESNAY M. (1988), La
petite entreprise : principes d'économie et de gestion, Vuibert. –
268
 pour les références issues d'un site Internet : ALLOUCHE J., AMANN B. (1997),
Le second marché au cœur de l'aventure entrepreneuriale française, Plaquette
officielle
de
l'anniversaire
du
Comité
du
second
marché,
décembre
(http://www.univ-pau.fr/~amann/efmain.html).
- les auteurs veilleront à ce que la référence soit effectivement accessible et que l'adresse ait
une sérieuse chance de perdurer. - Les tableaux, graphiques ou schémas seront numérotés
de manière indépendante au titre ou sous-titre dans lesquels ils s'insèrent. Ils seront intégrés
dans le texte à l’endroit le plus approprié, sans mise en page spécifique (par exemple, ne
pas utiliser la fonction d'encadrement des images). Ils doivent être précédés d’un titre court
et de la référence s’ils sont empruntés. La numérotation est croissante. Ainsi, pour les
tableaux : Tableau 1, Tableau 2. Idem pour les graphiques ou schémas, sous le vocable :
Figure 1, Figure 2, etc. - Les titres et sous-titres sont numérotés de façon numérique : 1
puis 1.1, 1.2 pour les sous-titres, etc. Chaque titre ou sous-titre est annoncé. Ainsi, il ne
peut y avoir un titre 2.1 suivant directement un titre 2 sans que quelques lignes ne
s’intercalent à des fins de présentation et de structuration de la section.
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- un saut de ligne précède et suit chaque titre ou sous-titre.
- un « chapeau » de quelques lignes sous un titre principal (1 ou 2) doit présenter les soustitres
269
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N° d’imprimeur : RCCM : CI-ABJ-2016-B-7774
Dépôt légal : décembre 2016 - imprimé en Côte d’Ivoire
270
SERIE B - ECONOMIE / NUMERO 1 - VOLUME 2 - Décembre 2016
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