Salsa Le journal des Reflets Vendredi 13 mars 2009 / numéro 4 4 Picante L’étrange histoire De tomÁs gutiérrez alea I l y a du Benjamin Button chez Tomás Gutiérrez Alea, sinon dans sa vie, du moins dans sa carrière de cinéaste. En décembre 1993, à La Havane, sort son film Fresa y Chocolate, au XVème Festival International du Cinéma Latinoaméricain. Puis, à partir de l’année suivante, 1994, ce film va entamer une carrière internationale, recueillant ainsi une moisson de plus d’une vingtaine de nominations, prix et récompenses diverses et variées. A partir de là, on va se rendre compte que Tomás Gutiérrez Alea, dit Titón, né en 1926 à La Havane, a derrière lui toute une carrière, presque entièrement conduite dans le contexte de la Cuba castriste, avec, ma foi, une production non dépourvue d’intérêt et qui, éventuellement, pouvait intéresser un large public et pas seulement un petit cercle de cinéphi- les, latinophiles, postsoixantehuitards et autres farfelus pas forcément politiquement corrects. Peut-être la question était-elle « Comment peut-on être (cubain) ? » : Petite précision, Titón est mort en 1996, à 69 ans, à Cuba, soit deux ans après sa « découverte ». Nous n’allons pas suivre l’exemple de Button et remonter le fil de sa carrière jusqu’à son premier court métrage, mais « bureaucratiquement » parcourir quelques moments clefs de sa vie de cinéaste, car c’est de vie dont il s’agit et non de carrière. Il n’est pas aisé, en fait, d’évoquer la vie et l’œuvre de Titón, et ceci parce que luimême, lors d’interviews, d’articles qu’il a écrits ou d’ouvrages qu’il a publiés, s’exprimait sur ce sujet avec une telle lucidité, une telle transparence et une telle fran- chise, qui depuis les calendes grecques sont le signe de la sagesse (« connais toi toi-même »), qu’il n’est pas possible d’en dire plus ni, bien évidemment, de le dire mieux. Cette franchise lui a valu parfois, reproches et rancunes, auxquels il a toujours répondu sans détours et avec pertinence. Il pratiquait l’autocritique aussi radicalement que la critique et si, parfois, il s’est montré critique à l’égard de la tournure que prenaient les événements en regard de l’esprit de la révolution, dans son pays, qu’il n’a jamais quitté, il s’en est expliqué lui-même très clairement. La critique a des visées constructives et non agressives et destructrices : « …pour que la révolution grandisse, pour que notre pays se développe dans une direction positive, la critique est nécessaire. Il faut avoir une conscience critique de ce que (Suite page 2) Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain (Suite de la page 1) nous sommes et de ce que nous faisons. Et ne jamais cesser de nous critiquer. … Il faut défendre la nécessité de la critique en tant que nécessité pour la survie de la révolution. » www.lesreflets-cinema.com Les deux films qui ont provoqué le plus de défiance quant à la fermeté de son engagement révolutionnaire sont sans doute Memorias del Subdesarrollo (1968) et Fresa y Chocolate (1993). Il défend, surtout dans Fresa y Chocolate, le droit pour chaque individu à exprimer ce qu’il est et à avoir, comme tout un chacun, sa place au soleil, quels que soient ses particularismes. Que fait-il d’autre que ce que faisait, en 1964, Nicolás Guillén, par exemple, dans son poème « Tengo » : revendiquer le droit à vivre ce que l’on est dans la liberté retrouvée, grâce à la révolution castriste de 1959. Qui songerait à soupçonner de quoi que ce soit Nicolás Guillén? Le moyen d’expression est différent mais le propos lui, l’est-il ? Célébration des bienfaits de la révolution pour Guillén, réflexion sur la révolution pour que durent ses bienfaits et qu’elle n’aille pas se heurter aux écueils qui pourraient faire chavirer le navire pour Alea. Même attachement à ce qui a été conquis. Dans l’autocritique il se montrait tout aussi radical, considérant sans doute que, ne mettant en cause que lui-même il avait les coudées franches. Un exemple, à propos de son film Cumbite, (1964 - adaptation d’un roman haïtien) : « J’ai de la difficulté à revoir Cumbite jusqu’au bout. Je ne parviens à regarder que quelques passages… C’est un film qui n’est pas abouti, je n’y retrouve pas une expression personnelle ». Point / barre, on passe à autre chose. D’autres choses, il y en aura beaucoup, parmi lesquelles on peut rappeler les films qui ont rencontré une audience internationale plus particulièrement large. En 1966, La Mort d’un Bureaucrate que lui-même a qualifié de « comédie ». Puis, en 1968, Mémoires du Sousdéveloppement, où le ton change totalement. Un homme, Sergio, refuse de suivre sa famille qui fuit la révolution et s’exile, va, sans parvenir à s’intégrer à la société telle qu’elle évolue autour de lui, en faire une observation critique, du haut il est vrai, de la tour d’ivoire dans laquelle il s’est enfermé en solitaire. Ce fut sans doute, au niveau international, son premier grand succès marquant. La última cena, en 1976, peut, du point de vue du genre, être classé historique puisque le film s’inspire d’un épisode réel du temps de l’esclavage. En ayant toutefois présent à l’esprit que l’abolition de Page 2 l’esclavage à Cuba ne remonte qu’à 1880, un peu moins d’un siècle. Fondamentalement le film s’attaque à des problèmes de société intemporels : par delà le questionnement sur l’utilisation de la religion pour « …soumettre une classe sociale et de toutes façons mettre un frein au développement de la société… » c’est l’hypocrisie des puissants prêts à tout et n’importe quoi pour garder leurs privilèges qui est dénoncée. Suivirent des réalisations plus légères. En 1978 Les Survivants, aventures et mésaventures d’une famille bourgeoise, recluse dans sa propriété, pour ne pas être atteinte par le virus de la révolution. En 1987, Lettres du Parc, une histoire d’amour inspirée d’une nouvelle de García Márquez. En 1993, Fresa y Chocolate, dont on a déjà évoqué le retentissement international et qui incite à une réflexion sur la différence, illustrée, ici, par l’homosexualité et la violence du rejet et de la répression qu’elle provoque, dans le contexte cubain. Puis, enfin, le dernier mot de Titón, Guantanamera, qui, entre rires et larmes, revient au thème de la Mort d’un Bureaucrate. En définitive, c’est peut-être cela qui pourrait définir le cinéma de Tomás Gutiérrez Alea, le rire grave. Ce qu’il souhaitait c’était tout à la fois offrir aux spectateurs un divertissement qui en même temps et par le rire « …serve à mieux comprendre le monde, à mieux comprendre la réalité et à aider le spectateur à avancer dans cette direction. » Annie Damidot Note : Les citations de Tomás Gutiérrez Alea sont extraites de l’ouvrage de J.A Evora « Tomás Gutiérrez Alea » et traduites. TitÓn, de la habana a guantanamera Film inédit Lundi 16 à 18h30 au Zola La mort d’un bureaucrate Lundi 16 à 20h45 au Zola + présentation du film par Alain Liatard Mercredi 18 à 14h au Zola La Mort d’un Bureaucrate Il s’agit d’une comédie satirique qui met en scène les faits et méfaits de la bureaucratie. Un ouvrier modèle a été enterré, sur sa demande, avec ses documents de travailleur, mais sa veuve, pour toucher sa retraite, doit présenter ces documents à l’administration. Donc il faut les récupérer. Oui, mais comment ? On ne visite pas les tombes impunément ! Le film part, en fait, de l’expérience personnelle de Tomás Gutiérrez Alea suite à ses démêlés avec des administrations diverses et variées. « Vint un moment où je me suis senti si accablé que le désir m’est venu de me faire la peau à un bureaucrate » On ne peut pas être plus clair ! D’ailleurs il qualifie lui-même son film de « psychothérapie ». La mort n’est ici choisie qu’en tant que situation extrême. Les problèmes, quels qu’ils soient, même bassement matériels, ne peuvent désormais pas être remis à plus tard. Il faut les affronter, si absurdes soient-ils. C’est ainsi que l’on entre dans des dédales kafkaïens que Tomás Gutiérrez Alea a choisi de traiter à la Laurel et Hardy, selon ses propres dires, en accumulant des situations « dans lesquelles tout se déchaîne à partir d’un conflit insignifiant qui prend des proportions progressivement. » Mais en aucun cas le ridicule des situations n’a pour unique bût le rire et l’amusement du spectateur. « Le réalisateur assume une façon de raconter proprement comique pour aborder un sujet qui dans la vie quotidienne est exaspérant (et pas seulement dans une situation limite représentée par la mort), ceci dans l’espoir de rendre l’absurde plus évident encore en le ridiculisant et que par conséquent le spectateur sorte du cinéma décidé à le bannir. » Lorsque Titon va reprendre le thème du film dans Guantanamera il ne parle plus de « psychothérapie » mais affirme avoir fait un « documentaire ». En effet Cuba vit le tristement célèbre « periodo especial », l’île manque de tout et en particulier de carburant. Pour ramener un cercueil de Guantanamo à La Havane il va falloir se plier au système mis en place par un zélé bureaucrate et changer de voiture corbillard en même temps que l’on passe d’une province à l’autre. En prime, évidemment, toutes les situations de manques vécues à Cuba font partie du voyage et sont évoquées. Tout ceci est parfaitement en accord avec ce que remarque José Antonio Evora « Le cinéma de Tomás Gutiérrez Alea est davantage un cinéma de synthèse et de dévoilement que de fiction. », formule qui rend compte à merveille de ce que sont Mort d’un Bureaucrate et Guantanamera. Annie Damidot Sal Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain D ans les années trente au cœur du Mexique, Elias, chrétien fanatique, a commis un péché contre Dieu ; ainsi, il est convaincu qu’il sera puni : il est persuadé que ses enfants vont mourir tôt ; il tente alors de contrecarrer la volonté divine en érigeant une église en plein désert. Cette histoire de foi, de folie et de fanatisme est racontée telle qu’elle est vue et vécue par Aureliano, le plus jeune et le plus fragile des enfants. Aureliano est enfermé pendant de longues années et doit peindre l’histoire sainte, nourri par ses frères et ses sœurs. Mais le monde extérieur va peu à peu se manifester… L’argument de ce film, le premier long métrage, en fait de Rodrigo Plá, n’est pas sans rappeler un autre enfermement, et une autre relation père-fils, celui de La Zona (La zona : propriété privée), situé lui dans un futur proche et dans un lieu quelconque d’Amérique latine. Ainsi, avec Desierto adentro, Rodrigo Plá revient sur l’enfermement, la frontière, les difficultés des relations père-fils et l’intrusion de l’extérieur dans un monde fermé. A propos de l’œil sur la nuque, court métrage montré aux Reflets, il dé- Désert intérieur clare : « J’ai eu beaucoup de chance de travailler avec Gael Garcia Bernal et Daniel Hendler parce que ce sont de très bons acteurs. J’ai contacté Gael qui était alors dans une école en Angleterre. Il m’a envoyé une vidéo de casting et on s’est revu ensuite à Mexico. Pablo Stoll avait vu mon précédent court métrage, Novia mia , et s’était proposé pour m’aider à tourner en Uruguay. Il m’a également beaucoup aidé dans mes recherches, m’accueillant chez lui durant le tournage. Tout cela avant même qu’il fasse lui-même 25 watts. » Pour finir, nous rappellerons que Rodrigo Plá est né en Uruguay et que ses parents ont dû s’exiler alors qu’il n’avait que 9 ans. Il a suivi des études de cinéma au CCC (Centro de Capacitación Cinematografica) du Mexique dont il est sorti diplômé. Ses courts métrages ont été très vite remarqués et primés : Novia mia a obtenu le Prix du meilleur court métrage au festival de Biarritz et au Festival international du Cinéma de Guadalajara. El ojo en la nuca, lui, a reçu l’Oscar étudiant du meilleur court métrage étranger et l’Ariel du meilleur court métrage de fiction. La Zona, qui a fait l’effet d’une déflagration, a reçu quant à lui divers prix internationaux : le Lion de l’Avenir pour le Meilleur Premier film au 64ème Festival International de Cinéma de Venise et le prix de la Critique Internationale au Festival International de Cinéma de Toronto. Desierto Adentro qui débute, lui, sa « carrière internationale » a déjà obtenu 7 récompenses au Festival de Guadalajara. Filmographie de Rodrigo Plá 2008 : Desierto adentro (réalisateur, scénariste, monteur et producteur) 2007 : La Zona (réalisateur, scénariste) 2001 : El ojo en la nuca (réalisateur, scénariste) 1996 : Novia mia (réalisateur) 1996 : Libre de culpas (premier assistant réalisateur) 1991 : La mujer de Benjamin (second assistant réalisateur) Rodrigo Plá est actuellement occupé au montage de son troisième long métrage et au tournage de son dernier court métrage. Il nous a promis d’être parmi nous lors des 26èmes Reflets pour nous les présenter en personne, en 2010. Rendez-vous pris ! www.lesreflets-cinema.com Revenons à la carrière de Rodrigo Plá : alors que le journaliste Cédric Lépine (le 21 février 2008 à Paris) lui demandait ce qui s’était passé avant d’arriver à la Zona, sorti en 2008, le cinéaste mexicain d’origine uruguayenne répondait : « La grande difficulté était d’avoir un budget. Après l’œil sur la nuque, j’avais écrit un scénario, le désert intérieur, qui n’a pu rencontrer assez vite le budget nécessaire. Nous avons commencé un autre scénario, celui de La Zona. Une fois que ce scénario a été terminé, nous avons reçu l’argent pour les deux films. Alors nous avons commencé aussi ce film que nous venons de terminer. Le désert intérieur mêle film et animation ; lorsque nous avons fini de filmer et que la partie animation plan par plan a débuté, nous avons tourné La Zona. » Rodrigo plÁ Pascale Amey Desierto adentro Film inédit Dimanche 15 à 21h au Zola Mardi 17 à 20h au Comoedia Pascale Amey Salsa Picante n° 4 Page 3 Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain L www.lesreflets-cinema.com ’art cinématographique au Venezuela est une longue histoire vieille de cent douze ans, faite de hauts comme le cinéma social des années soixante et soixante dix qui a donné lieu à des œuvres remarquables (Cuando quiero llorar no lloro de Mauricio Wallerstein, El pez que fuma de Román Chalbaud et Soy un delincuente de Clemente de la Cerda), et de bas consécutivement à la profonde crise économique des années 1980 qui a fait chuter la production cinématographique à deux films par an. De récentes lois de financements et la création de soutiens institutionnels comme le Cnac (Centro Nacional Autónomo de Cinematografía) ont donné une nouvelle dynamique à une nouvelle vague de jeunes cinéastes et a permis de relancer d’autres réalisateurs dont la carrière battait de l’aile comme Luis Alberto Lamata (Jericó, Desnudo con narajas) qui a réalisé le premier film produit par le gouvernement d’Hugo Chávez Miranda Regresa (Le retour de Miranda, présenté cette année aux Reflets). L’inauguration de la Villa del Ciné le 3 juin 2006 a permis un nouvel essor de l’activité cinématographique au Venezuela. Avec quinze mini studios, deux grandes salles complètement équipées, un centre de haute technologie pour la post-production et des formations permanentes, les cinéastes vénézuéliens(ne)s peuvent enfin résister à la dictature de Hollywood en réalisant sur place les activités jusque-là soustraitées à l’étranger. Mais si la Villa del Ciné a incontestablement dopé les productions cinématographiques du Venezuela, cela n’empêche pas certains cinéastes et politiques d’y voir un outil de propagande au service du régime. Néanmoins, la majeure partie des professionnels du cinéma estiment la composition du centre cinématographique équilibrée et applaudissent la volonté du gouvernement d’en finir avec le diktat américain… En dix ans, l’Etat vénézuélien a financé 73 films et depuis sa création la Villa del Ciné a financé 25 films et a donné l’occasion à de jeunes cinéastes de réaliser leurs premiers films tels Andrea Herrera et Anabel Rodríguez (1, 2 y 3 mujeres) Hernán Jabes (Macuro) ou à des réalisateurs confirmés de poursuivre leur œuvre tels Fina Torres (Oriana) Luis Alberto Lamata, ou Román Chalbaud (El Caracazo). L’activité cinématographique au Venezuela a été - et continue d’être liée - , à la problématique des politiques culturelles et de la législation émanant de l’Etat. Néanmoins, en dehors des circuits de Page 4 COMMENT SE PORTE LE CINéma Vénézuélien ? l’Etat se développe un cinéma indépendant dont font partie de jeunes cinéastes talentueux tels Jonathan Jakubowicz, dont son premier film Secuestro express a été l’un de plus gros succès du cinéma vénézuélien, Eduardo Arias et son film en haute définition Elipsis qui fut produit et distribué par la 20th Century Fox, Franco de Peña (Amor en Concreto) et Alejandro Wieddeman (Plan B). Ces cinéastes souhaitent montrer une autre image de la réalité en décrivant le monde tel qu’ils le ressentent. Ils représentent une véritable bouffée d’oxygène au sein d’une industrie cinématographique instable qui souffre de l’interdépendance entre situation politicoéconomique et politique culturelle dans un pays dont le statut d’exportateur de pétrole l’expose inévitablement aux aléas du marché international. Dans le contexte actuel, le cinéma vénézuélien a peu de chances d’échapper à cette réalité incontournable. Homero Vladimir Arellano La Villa del Cine Asphyxié par le néolibéralisme des années 80, le cinéma latino-américain avait vu ses écoles privatisées, ses studios bradés et ses remparts légaux démontés. “Comment accepter que les huit plus grands studios d’Hollywood se répartissent 85 % du marché mondial du cinéma et occupent 98 % de l’offre en Amérique Latine ?” a demandé le président Chávez en inaugurant le 3 juin 2006 une de ses promesses électorales, la Villa del Cine, un complexe de studios de cinéma bâti sur un terrain de 4 hectares à Guarenas, près de Caracas. Cette inauguration a été suivie par la création de La « Fundación Villa del Cine ». Entité spécialisée dans la production cinématographique et audiovisuelle, elle possède le statut de Fondation d’Etat et se retrouve inscrite au Ministère du Pouvoir Populaire pour la Culture. Miranda Regresa (Le Retour de Miranda) est le premier film produit par le gouvernement d'Hugo Chávez. Film de commande, il a au moins contribué au retour au premier plan de son réalisateur, Luis Alberto Lamata, dont la carrière s’écrivait alors en pointillés. Sans être révolutionnaire d’un point de vue formel, Miranda Regresa témoigne dé(Suite page 5) Salsa Picante n° 4 Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain Pourquoi tony manero est un grand film ? (Suite de la page 4) sormais de la possibilité de tourner des films ambitieux 100% vénézuéliens. Loin d’être une enclave (Lamata a par la suite réalisé El Enemigo -présenté lui aussi aux Reflets- un instantané d’un Venezuela en perdition, puis est revenu dans le giron de l’Etat pour son dernier film, Boves), la Villa del Cine apparaît comme un outil appréciable pour des cinéastes dont la vision induit des budgets plus importants. Depuis sa création, la Villa del Cine a participé à la production et au tournage de 25 films, ouvrant ainsi une nouvelle voie dans la création cinématographique nationale. A travers la société de Distribution Amazonia Films, ce ne sont pas moins de quatre productions de la Villa Del Cine qui ont été diffusées au plan national et international en 2007. C’est à la fois peu et beaucoup au sein d’une production cinématographique qui a toujours eu beaucoup de mal à s’exporter, en comparaison de ses voisins argentins et brésiliens. Homero Vladimir Arellano Le comédien américain Danny Glover et le président Chávez, lors de l’inauguration de la Villa del Cine Salsa Picante n° 4 J e me suis posée et reposée la question plusieurs fois après avoir vu le film de Pablo Larrain. Non que je doive absolument écrire un article pour Salsa Picante mais surtout parce que je ne cessais de voir passer devant mes yeux le visage d’Alfredo Castro, et ce, plusieurs jours après l’avoir vu incarner Tony Manero… J’avais également remarqué que mes amis chiliens semblaient mal à l’aise pour parler de ce film… Ils soulignaient la performance de l’acteur, l’accueil du film dans les festivals internationaux, mais éludaient finalement le propos-même du film, comme si cela leur renvoyait un Chili tellement peu présentable, celui qu’ils avaient été obligés de quitter… Plusieurs scènes revenaient me hanter : l’assassinat brutal d’une vieille femme pour lui prendre sa télévision couleur, le dépouillage d’un opposant à Pinochet, agonisant près du fleuve, les chiens féroces gardant les propriétés, les corps allongés, après une tentative de rapport sexuel, le visage inexpressif de Raúl, son corps vieillissant, son obsession de la ressemblance au modèle... Ce qu’il en ressort est pourtant clair : la peur et la terreur engendrent la médiocrité, la trahison mais aussi parfois (plus rarement) la lutte clandestine et l’héroïsme de certains. La domination d’un modèle culturel qui se veut celui de l’élite (Pinochet-dictateur soutenu par les USA, l’idolâtrie de Raúl pour le personnage de La fièvre du samedi soir, rêve de paillettes contre plomb, gloire de la danse contre misère même si c’est dans un cabaret de troisième zone) engendre l’aliénation et la folie, l’envie de devenir un autre, d’être autre. Au-delà des immenses qualités d’acteur d’Alfredo Castro (qui ressemble plus au Pacino de Lumet ou même de Brian de Palma qu’au John Travolta de John Badham), au-delà des qualités indéniables de Pablo Larrain en tant que cinéaste (recréation de l’atmosphère de l’époque par le montage, caméra portée, la photographie, les cadrages et la direction d’acteur), c’est tout le message qui soustend ce film qui en fait une œuvre éminemment politique : la médiocrité du pouvoir de Pinochet, la médiocrité de Pinochet tout court, et pour finir l’aliénation à laquelle conduit le modèle culturel américain… Un film essentiel ! www.lesreflets-cinema.com Sa création et son action sont néanmoins controversées. Certains lui reprochent de n’être qu’un instrument de l’Etat pour contrôler et diriger la création cinématographique du pays. D’autres soutiennent son action de réhabilitation des cultures traditionnelles à travers des œuvres audiovisuelles de qualité. Pour pallier aux critiques, la Villa del Cine vient d’approuver une politique d’appui aux organismes publics et privés en établissant des alliances de coproduction avec des producteurs indépendants vénézuéliens pour mener à bien des projets cinématographiques d’envergure. Il est encore trop tôt pour savoir si cette politique va porter ses fruits mais au moins s’annonce t-elle très intéressante et porteuse d’espoir pour un pays qui ne peut se dispenser d’un rayonnement culturel plus important. pour le conserver dans une atmosphère délétère. Pascale Amey Peu à peu la lumière s’est fait jour… ce n’était pas simplement l’histoire du psychopathe, du minable, du sex-symbol impuissant et mutique, du piètre danseur et de son amoralité qui me fascinaient mais bien la parabole du pouvoir des médiocres et de leurs efforts Page 5 Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain S La sangre brota www.lesreflets-cinema.com i Walter Salles et Daniela Thomas ont récemment dressé le portrait type de la société brésilienne en dessinant celui d’une Famille brésilienne, on peut se demander si Pablo Fendrik voit la société argentine comme il croque la famille de La Sangre Brota : comme une cocotte minute ! Si Salles et Thomas peignaient une famille brésilienne éclatée où mixité, quête d’identité, d’origine et d’avenir répondaient à l’absence de la figure de guide qu’est le père, Pablo Fendrik nous présente une famille plutôt classique : un père, Arturo, chauffeur de taxi tranquille et sans histoire ; Irène, la mère, cantonnée à la maison et plutôt effacée ; et Leandro, le fils cadet, jeune loulou plutôt charmeur et sympathique. Mais, comme dans Une famille brésilienne, c’est l’absence qui va lancer la narration et bouleverser cette cellule familiale à l’équilibre finalement fragile : celle du fils aîné, Ramiro, qui a émigré au Texas et appelle, un jour, pour demander à son père de l’aider et de lui envoyer deux mille dollars, d’ici 24 heures, question de vie ou de mort. L’inertie et la mollesse dans lesquelles baignait jusque là le film et, incidemment, son histoire, vont laisser la place à une mise en mouvement quasi-circulaire et concentrique des deux personnages d’Arturo (le père) et de Leandro (le fils) autour du siège familial (la maison) et Irène (la mère) : Arturo qui va enchaîner les courses pour essayer de gagner de l’argent, mais aussi faire le tour de la ville pour trouver une solution plus rapide ; et Leandro qui va errer à la recherche d’un bon plan d’achat et de revente de drogue. Chacun avec un objectif différent mais une finalité identique : Arturo afin d’aider son fils aîné, Leandro afin de quitter l’Argentine et partir rejoindre son frère à Houston. Et ce mouvement amorcé, à la fois narratif et esthétique, va donc agir comme une spirale, se rapprochant sans cesse d’un Ou « une famille argentine » version cocotte minute épicentre dramatique où se concrétisera cette course contre la montre, qui laissera sans doute le spectateur KO. D’où cet effet « cocotte minute »… Et pourquoi ce mouvement autour de la maison me direz-vous ? Simplement parce que celle-ci abrite les économies familiales, jalousement gardées par la mère, mais qui vont devenir un véritable enjeu pour Arturo et Leandro. Car une fois toutes les solutions épuisées, ce sont les économies d’une vie, pourtant insignifiantes mais qui les rendent justement encore plus vitales, qui pourront seules permettre aux deux personnages d’arriver à leurs fins. Dans cette construction narrative complexe, mais admirablement mise en scène par Pablo Fendrik, suit une évolution ad hoc de l’esthétique du film, avec une première partie de film plutôt posée, avec des plans prioritairement lumineux et souples, et une lente évolution vers une caméra à l’épaule, de plus en plus en d’ombres et de noirs à mesure que tombe le jour et que l’on se rapproche du dénouement. Aussi, il est indéniable que, depuis son premier film (L’assaillant, 2008), Pablo Fendrik a progressé, et vite qui plus est, en parvenant à mettre en place avec succès ce système « cocotte minute » qui fait monter en pression, au fil des plans, un film qui finit par vous péter aux yeux. Pierre angulaire de son système, l’interprétation de ses comédiens fait merveille. Si l’on connaissait déjà les qualités d’Arturo Goetz (qui campe Arturo) pour, entre autres, ses collaborations avec Daniel Burman (Les lois de la famille, 2006 ; Les enfants sont partis, 2008), la véritable découverte du film reste évidemment Nahual Pérez Biscayart. Les prémisses de son talent avaient pu être entrevues dans El Aura de Fabian Bielinsky (2005), mais qu’il s’annonce avec La sangre brota comme l’un des prochains grands comédiens argentins. Charismatique à souhait, l’œil rieur, une nonchalance quasi-chorégraphique, tout est réuni chez lui pour faire du personnage de Leandro la lueur d’espoir du film. Présenté à la Semaine de la Critique au dernier Festival de Cannes, La sangre brota avait divisé le public, certains le trouvant choquant, pesant, traumatisant, d’autres le trouvant terriblement maîtrisé, profond, captivant, hypnotisant. N’est-ce pas l’apanage de (futurs) grands réalisateurs que de savoir renvoyer le spectateur à sa condition, de le heurter ou de l’aspirer dans ses histoires ? Une chose est sûre, c’est que vous ne sortirez pas indemnes de la cocotte minute argentine ! Laurent Hugues ! Avant première du film le samedi 14 mars à 16h15 au Zola Séance supplémentaire Mardi 17 à 20h45 au Zola Nahual Pérez Biscayart et Ailín Salas dans La Sangre Brota Page 6 Salsa Picante n° 4 « Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain Ce n'est pas facile de trouver une histoire avec laquelle débuter dans le cinéma. Quatre ans, entre la première idée et la fin du processus de post-production c'est un temps considérable, pour parier et s'engager sur quelque chose (…). Lo mejor de mí parle de la bonté de Raquel, de sa candeur et sa naïveté, de son désir d'aimer de la meilleure façon possible et de son éloignement de tout ce qu'elle aime. Mais au cours de son histoire, Raquel appréciera pour la première fois les petites raisons, lâchera prise pour pouvoir respirer. Et elle apprendra à regarder la mer et à se laisser porter. Lo mejor de mí est un film sur la perte de l'innocence. Il s'agit du pas à faire entre la fantaisie et la réalité. De l'amour, des silences et de la douleur. Du doute. D'espérer pendant longtemps retrouver quelque chose et se rendre compte ensuite que ce n'était pas ce qu'on attendait. Et de se dire qu'il y a toujours beaucoup plus. Roser Aguilar Lo mejor de mí est le premier film de Roser Aguilar, scénariste de la Télévision de Catalogne et réalisatrice du court métrage Cuando te encontré. Il s'agit d'un drame qui parle de la perte de l'innocence, des illusions tronquées et les conséquences de l'amour. DE ROSER AGUILAR Le film a participé à de nombreux festivals et obtenu de nombreuses récompenses, notamment : 60e Festival International de cinéma de Locarno en Suisse 2007 (Locarno d'argent à la Meilleure Actrice, Boccalino d'Or au Meilleur film), Festival Cinehorizontes de Marseille (Mention spéciale du jury), XVII Premis Turia de Valencia (Prix du Meilleur Premier film et de la Meilleure actrice). La production du film s'est faite dans le cadre du projet Ópera Prima, résultat d'un accord entre la société de production Escándalo Films et l'ESCAC (Escola Superior de Cinema i Audiovisuals de Catalunya) dont l'objectif est de positionner les meilleurs élèves de l'école dans le cercle audiovisuel national, les propulser vers des postes à responsabilité créative en tant que chefs d'équipe afin de leur ouvrir des portes dans leur trajectoire professionnelle. L'équipe du film est donc composée intégralement par des anciens élèves de l'école, jeunes talents et professionnels reconnus. De l'ESCAC nous viennent des réalisateurs aussi prometteurs que Guillem Morales (nominé aux Goyas 2005 pour son film El habitante incierto), Juan Antonio Bayona (L’orphelinat, qui se passe de présentation), ou Alex Pastor (Prix du Meilleur Court Métrage au Festival de Sundance Salsa Picante n° 4 2006 pour La ruta natural). Mais aussi des chefs d'équipe des productions comme La secte sans nom de Jaume Balagueró, Krampack de Cesc Gay, ou L'échine du diable et Le labyrinthe de pan de Guillermo del Toro. En ce qui concerne les acteurs, la presse et le public sont unanimes et saluent le travail de la protagoniste, Marián Alvarez, connue en Espagne pour son rôle dans une série télé à succès. Dans le rôle de son copain, Juan Sanz, que nous avons pu découvrir à Villeurbanne dans La vida mancha de Enrique Urbizu (Reflets 2004) et qui est bien présent dans le cinéma espagnol actuel. Avec eux, Lluís Homar (acteur de longue date, nous l'avons vu dans La Mauvaise éducation et (très) bientôt à nouveau avec Almodóvar dans Los abrazos rotos), Alberto Jiménez (Los aires difíciles, El principio de Arquímedes, El Bola) y Marieta Orozco (Krámpack, Barrio). Irene Sánchez Miret www.lesreflets-cinema.com Malgré les difficultés, fort heureusement, j'ai trouvé une belle histoire à raconter et une équipe technique et artistique généreuse et pleine d'entrain pour la mener à bien. » Lo mejor de mÍ Lo mejor de mi Film inédit Samedi 14 à 18h30 au Zola Page 7 Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain S www.lesreflets-cinema.com amedi 7 mars, sur les coups de midi les Reflets présentaient au Zola un film colombien, Soñar no cuesta nada, du réalisateur Rodrigo Triana. Belle affluence pour ce film inédit présenté avec sous titrage anglais. Que diable allait donc nous réserver cette projection : drogue, violence, paramilitaires… ? En fait pas vraiment ça, mais plutôt une aventure rocambolesque, tirée de faits réels survenus en 2003. Un compagnie de l’armée colombienne « Buitre y Demoledor », à la poursuite de guérilleros des FARC, découvre une cache, « una guaca » de plus de 16 millions de dollars. « El tesoro escondido » est enterré dans des bidons dans la forêt colombienne. Les soldats, pour la plupart jeunes, exténués par des semaines de marche, ne résistent pas à la tentation et, après avoir récupéré et s’être partagé le magot, se mettent à le dépenser sans compter dans les restaurants et les bordels de la petite ville de Popayán. La suite est forcément moins festive (si l’on peut dire) : 129 soldats, 15 sous officiers et 3 lieutenants furent condamnés de 3 à 10 ans de prison. On peut toujours rêver… Même en colombie !!! Rodrigo Triana n’est pas un inconnu pour les Reflets car il a réalisé Como el gato y el ratón que nous avions présenté en 2003 (souvenez vous, c’est l’année de l’affiche avec les pots de confitures !). A partir de cette histoire, il nous embarque dans une comédie où Porras, Venegas, Lloreda et Perlaza se trouvent mêlés. Devenus soudainement riches, certains vont s’éclater à la ville à la recherche de Dayana ; d’autres, plus lucides, vont préserver l’avenir. Bonne direction d’acteurs, scénario bien ficelé et le résultat est finalement là, à savoir un bon moment de divertissement qui valut à Échos photo des Reflets (ça s’est passé pendant les Reflets) ce film une carrière impressionnante en Colombie, avec un record d’entrées. Alors dimanche 15 mars, vers midi, n’hésitez pas : venez passez un bon moment de suspense et de détente à l’ombre du totem du Zola. Michel Dulac Soñar no cuesta nada Film inédit Dimanche 15 à 12h au Zola Brèves En 2009 deux films espagnols sont particulièrement attendus, Los abrazos rotos, le 17é film de Pedro Almodóvar dont nous savons peu de choses sinon qu’il s’agit d’un « drame obscur mâtiné de thriller autour d’un grand récit romantique à 4 voix » (www. pedroalmodovar.es) et la superproduction d’Alejandro Amenábar, Agora. Telecinco, le producteur, vient de mettre en ligne la bande-annonce (www.telecinco.es) de ce deuxiéme film tourné en anglais après Los otros (2001). Cartes Postales de Leningrad ouvre le festival… devant une salle comble !!! Vous étiez 241 pour cette soirée d’ouverture ! Merci. (photo Guillaume Grasse) Découvrez l’album photo des Reflets sur notre site www.lesreflets-cinema.com Page 8 L’action se déroule à Alexandrie en 391 après J.C. C’est l’histoire d’Hypathie (Rachel Weisz), première femme astronome et philosophe d’Occident, enfermée dans le Bibliothèque en train de se battre pour sauver la sagesse du monde antique. Après trois ans de recherche et 15 semaines de tournage, le cinéaste de Tesis (1996), d’ Abre los ojos (1997) et de Mar adentro (2004) « veut que le public voie, sente, respire cette lointaine civilisation comme une chose aussi réelle que le présent. » Le film devrait sortir à l’automne. Attendons. Alain Liatard Salsa Picante n° 4 Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain M regards aría Lionza, divinité de l’amour et de la fertilité, symbole de l’histoire et de l’identité vénézuéliennes… de sa légende racontée par un instituteur aux enfants de l’école aux constantes réinventions de ses représentations. Un film didactique où se mêlent les visions d’artistes sculpteurs, peintres, danseurs, metteurs en scène etc… Où l’on suit Roger Canals dans ses rencontres avec des chamans, des spirites et des artistes ; parfois femme blanche d’une grande beauté, d’autres fois indienne, souvent bienfaisante, la Reina (ou le professeur Lino Valles) prend possession du corps de certains chamans pour faire connaître sa pensée. Ce film a reçu le prix d’anthropologie visuelle 2006 de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (Paris) mais a aussi été sélectionné dans des festivals prestigieux tels que le Festival International Jean Rouch 2008 (Paris, France), le Festival of Visual Culture, Viscult 2008 (Joensuu, Finlande), le XVII International Festival of Ethnological Film 2008 (Belgrade, Serbie), le Delhi International Ethnographic Film Festival 2008 (Delhi, Inde), le Festival du Film Ethnographique du Québec 2009 (Québec) et enfin aux Days of ethnographic film in Rovinj 2009 (Croatie). Quelques questions à Roger Canals Vilageliu, réalisateur du film… Pourquoi vous êtes-vous intéressé à María Lionza ? Interview du réalisateur Roger Canals 17 septembre dernier et qui se compose d’un mémoire et du film Visages d’une déesse vénézuélienne. Comment êtes-vous entré en contact avec les différents artistes et spirites que l’on voit dans le film ? Est-ce que cela a été difficile et/ou long ? Le contact avec les croyants et les artistes du film s’est fait à travers différentes voies. Il y a eu néanmoins une rencontre cruciale : à l’université de Caracas, où j’étais en contact avec une professeure d’anthropologie spécialiste du culte à María Lionza, j’ai fait la connaissance d’une élève d’anthropologie dont la famille vivait aux pieds de la montagne de Sorte, centre de pèlerinage des croyants en María Lionza. Elle m’a proposé de m’installer dans sa famille le temps de mon travail de terrain, et c’est dans ce magnifique environnement naturel que j’ai établi le lien avec nombre de pratiquants. Quant aux artistes, la personne qui m’a le plus aidé a été Dixon Calvetti. Je l’ai rencontré grâce à un ami vénézuélien qui avait étudié avec moi à l’Université de Barcelone. Dixon et moi sommes devenus très amis, et c’est lui qui m’a présenté les autres artistes travaillant sur la figure de María Lionza. Le travail de terrain au Venezuela n’a pas été facile. C’est un pays fascinant mais en même temps très dangereux, avec des tensions sociales très marquées. Cela dit, les Vénézuéliens sont en général très ouverts, et il est facile de discuter avec eux et de susciter leur intérêt à faire partie d’un projet comme celui-ci. Je suis resté au Venezuela plus d’un an, et pendant cette période j’ai dû dialoguer avec des acteurs sociaux très variés comme le gouvernement, l’armée ou les responsables des Parcs Naturels. Ce côté institutionnel de la recherche a été souvent plus compliqué que les rapports avec les pratiquants du culte. Le fait d’être initié, a-t-il facilité l’approche et la rencontre avec les artistes et les spirites et/ou chamans ? María Lionza. Pour être initié, il aurait fallu que j’apprenne les techniques rituelles permettant « d’incorporer » dans mon corps les esprits des dieux et des ancêtres. Je n’ai jamais voulu faire cet apprentissage, même si on me l’a proposé maintes fois. Ce que l’on voit dans le film, c’est tout simplement une salutation que je fais à une jeune fille possédée par María Lionza. Cette salutation « de politesse » est souvent demandée à un moment donné à toutes les personnes assistant à la cérémonie et elle est très habituelle dans les rituels du culte à María Lionza. J’ai toujours eu un énorme respect envers les croyants du culte. Par exemple : lorsqu’ils me disaient qu’il fallait que je me purifie à l’eau et au tabac pour pouvoir filmer un rituel, j’acceptais de le faire. Puisque j’étais « chez eux », il me semblait que c’était à moi de m’adapter à leurs coutumes. Je ne leur ai jamais menti en faisant semblant d’être croyant pour obtenir plus d’information. En général, je dirais que le rôle de l’anthropologue n’est pas de porter des jugements de valeur sur ce qu’il étudie (il ne s’agit pas de déterminer si ce qu’on étudie est « vrai » ou « faux ») mais de tenter de comprendre le sens des phénomènes sociaux qu’on étudie ainsi que les fonctions qu’ils développent dans un cadre culturel et historique concret. En fait, l’anthropologue se trouve toujours dans une situation frontalière : tout en faisant partie activement de la réalité qu’il étudie, il doit en même temps rester en dehors pour pouvoir l’analyser et l’interpréter. www.lesreflets-cinema.com Tout a commencé en 2003. A cette époquelà, je venais de terminer mes études de philosophie et photographie à l’Université de Barcelone, et je cherchais un sujet de recherche pour mener une thèse de doctorat en anthropologie visuelle. J’ai rencontré une anthropologue catalane qui venait de rentrer du Venezuela et qui m’a offert une statuette représentant une femme nue chevauchant un tapir. Elle m’a dit qu’il s’agissait de la déesse la plus connue du Venezuela. J’ai été tout de suite attiré par cette image et j’ai commencé à faire des recherches. Je me suis rendu compte que le culte à María Lionza était très peu exploré et j’ai décidé de me consacrer à l’étude de cette religion vénézuélienne. Pour réaliser la thèse de doctorat, j’ai choisi de quitter Barcelone et de m’installer à Paris, où l’anthropologie visuelle était beaucoup plus développée que dans ma ville. J’ai donc appris le français puis je suis parti en France pour m’inscrire au département d’anthropologie de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales de Paris où j’ai réalisé, sous la direction de Monsieur Jean-Paul Colleyn, un DEA puis ma thèse que j’ai soutenue le Visages d’une déesse vénézuélienne Considérez-vous avoir fait de l’anthropologie participante ? Je considère en effet avoir fait de l’anthropologie participative, et ce à deux niveaux différents. D’une part, je me suis toujours investi dans les processus sociaux que j’ai étudiés. En ce sens, la caméra m’a beaucoup aidé à m’intégrer dans les rituels ou à tisser une relation de proximité avec les (Suite page 10) Tout d’abord, je n’ai pas été initié au culte à Salsa Picante n° 4 Page 9 Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain (Suite de la page 9) artistes. www.lesreflets-cinema.com D’autre part, j’ai fait une anthropologie participative en laissant aux croyants et aux artistes la possibilité de me donner des idées pour mon enquête et pour mon film. Je n’ai pas toujours suivi leurs conseils, mais l’important, c’est qu’ils ont toujours été et eu l’impression d’être, à la fois, objets et sujets de la recherche. Ceci est indispensable pour l’anthropologie d’un point de vue éthique et méthodologique. Puisque vous êtes fidèle du culte à María Lionza, en quoi est-elle en vous ? Dans le film, l’un des protagonistes déclare « celui qui représente María Lionza, l’a en lui, il est aussi María Lionza ». En quoi la Reina vous a-t-elle aidé ? En quoi êtes-vous aussi María Lionza. Le fait d’être frère était une condition sine qua non pour rencontrer et partager avec d’autres frères de culte ? Comme je l’ai dit antérieurement, je ne suis pas un adepte du culte à María Lionza. En fait, je n’appartiens à aucune religion en concret, mais je les respecte beaucoup. C’est pour cela que je respecte les conventions du culte à María Lionza lorsque je suis avec des pratiquants. La phrase de Dixon disant que « María Lionza est à l’intérieur de chacun de nous » est très révélatrice de l’esprit de cette religion puisqu’elle met en évidence la plasticité de María Lionza. En effet, chaque croyant, chaque artiste peut réinventer María Lionza et se l’approprier tout en lui attribuant de nouveaux sens. C’est ainsi qu’il faut comprendre l’idée que María Lionza est en chacun de nous et que nous, nous sommes aussi María Lionza. La grandeur de cette déesse se trouve là : dans sa capacité à se reformuler incessamment, à accepter de nouveaux visages tout en restant toujours la même. Pour répondre enfin à la dernière question, le fait d’être croyant n’est pas une condition nécessaire à l’établissement d’un contact avec les membres des groupes de culte. J’ai toujours dit aux croyants que je ne partageais pas leur religion mais que je voulais l’apprendre, la découvrir. C’est cette sincérité qui a été valorisée. Les croyants sont en général très ouverts : le culte n’a rien d’une secte. En commençant le film quelle était votre intention ? Pensiez-vous déjà à regrouper tous les intervenants dans l’exposition finale ou c’est le fait de savoir qu’il y aurait une expo finale qui vous a donné l’envie de rencontrer chaque artiste ou chaman dans l’expression de María Lionza ? Le scénario du film s’est défini petit à petit, au fur et à mesure de l’avancée de ma recherche. Quand je suis arrivé au Venezuela, je n’avais aucun scénario préétabli. En fait, je n’avais même pas l’idée de rencontrer des artistes, puisque mon projet initial était d’étudier uniquement les images dans le culte. Ce n’est que plus tard que je me suis rendu compte de la proximité entre le domaine du culte et celui de l’art. Page 10 L’organisation de l’exposition de San Felipe a été pour moi une chance énorme. Je n’ai appris l’existence de ce projet que très tard, quand les scènes avec les différents artistes étaient déjà filmées. J’ai alors parlé avec le commissaire de l’exposition, M. Rafael Principal, et lui ai demandé la permission de filmer le jour du vernissage. Cette dernière scène a une grande valeur ethnologique, puisqu’elle montre la façon dont tous les aspects du film (culte, art, école, théâtre, possession) sont en relation et comme les différentes images de María Lionza se complémentent les unes les autres. En fait, le tournage de cette scène m’a donné beaucoup d’idées pour la construction d’une théorie sur les images de la déesse et pour la rédaction de ma thèse doctorale. María Lionza a de multiples visages, elle est finalement toutes les femmes, selon les époques, les classes sociales, etc. Et pour vous ? Il me semble qu’il n’y a pas de sens à dire quel est le « vrai » visage de María Lionza. Comme je le dis à la fin du film, elle est « toutes les María Lionza à la fois ». Cette pluralité du personnage met en évidence que, depuis un point de vue ethnique, nous sommes face à une figure « hybride » ou, mieux encore, « métisse », qui ne peut être rattaché à aucun « groupe ethnique » particulier (à supposer qu’ils existent !). Quant à la féminité, María Lionza représente tantôt la femme mûre et protectrice, tantôt la femme sensuelle et à forte charge érotique. Bref, María Lionza est la féminité dans sa plus grande indétermination. C’est justement de là qu’elle tire son pouvoir et qu’elle peut être réinventée et appropriée par n’importe quel artiste ou croyant. Quels sont vos projets actuellement ? J’ai plusieurs projets en tête dont la réalisation d’un deuxième film sur María Lionza, d’une enquête sur l’esclavage noir au Venezuela et d’un documentaire en Inde, toujours sur le thème des images des dieux. L’aboutissement de ces projets dépendra surtout et malheureusement de mes possibilités financières. Néanmoins, je suis optimiste et, en fait, j’ai déjà commencé à faire une recherche de terrain. Pensez-vous tourner à nouveau un documentaire ou était–ce seulement pour votre thèse ? Je me sens autant cinéaste qu’anthropologue, et je ne conçois pas une chose sans l’autre. Le cinéma est un outil merveilleux pour faire des enquêtes ethnologiques, et, en même temps, les processus sociaux et culturels que l’anthropologie étudie sont des sujets très aptes à être portés à l’écran. Je crois au cinéma ethnologique et je ne vais pas m’arrêter là. Certains de mes collègues anthropologues contestent l’usage du cinéma dans les sciences sociales. Inversement, certains cinéastes disent que nous sommes des amateurs et que nous ne faisons pas du « vrai cinéma ». Je pense qu’il faut revendiquer une place pour le cinéma de recherche, c’est-à-dire pour un cinéma qui soit à la fois rigoureux anthropologiquement et cinématographiquement soigné. Il y a des indices qui nous invitent à l’optimisme : à Barcelone, par exemple, nous avons, depuis trois ans, un Master en Anthropologie Visuelle qui marche très bien, et où je travaille comme professeur. Bref, ce film n’est pas mon dernier travail : j’ai terminé récemment un court-métrage sur les rituels de guérison dans le culte à María Lionza intitulé « Le sang et la poule » que j’ai présenté au Musée de l’Homme de Paris le 25 février dernier et je ferai tout mon possible pour ne pas m’arrêter là ! Qu’est-ce que cela vous a apporté (de tourner un film, l’écrire, le tourner, le monter ?)… Intellectuellement, beaucoup. Je me suis rendu compte qu’en faisant du cinéma, je pouvais découvrir et interpréter le monde qui nous entoure. Ceci n’est pas si évident. Beaucoup de documentaires se font dans des conditions fixées à l’avance. En fait, on va filmer ce qu’on sait et connait déjà (ou ce qu’on croit déjà connaître). Moi, je suis resté plus d’un an sur le terrain et j’ai filmé plus d’une cinquantaine d’heures. Toutes mes décisions techniques et esthétiques du film ont été prises sur une base anthropologique. Le processus du montage a été aussi très enrichissant, puisqu’il a été un moment de réflexion et de construction de l’objet ethnographique. Je montais le matin et je rédigeais la thèse l’après-midi. En anthropologie visuelle, nous concevons le montage comme faisant entièrement partie du processus de recherche anthropologique. De plus, j’ai eu la chance de travailler avec Marc-François Deligne, un monteur fort expérimenté qui a toujours été à l’écoute et qui a saisi parfaitement l’idée de María Lionza que je voulais transmettre dans mon film. Interview réalisée par Pascale Amey, Julien Fayet et Laura Haro Visages d’une déesse vénézuélienne 2007 / France / 55 minutes / réalisation : Roger Canals / vostf / production CNRS Images Séance de rattrapage le samedi 21 mars à 15h30 Bibliothèque du 4ème - Croix Rousse 12 rue de Cuire - 69004 Lyon tél. : 04 72 10 65 41 Claire Girard http://www.bm-lyon.fr/pratique/ bibliotheques/bib4.htm Salsa Picante n° 4 Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain U n cactus américain s’ennuie ferme, tout seul de son côté, aux USA ; de l’autre côté, on chante, on danse, on boit. Il décide alors de passer au Mexique où il semble faire bon vivre. Voilà notre héros piquant qui tente de traverser la frontière sous l’œil alcoolisé du redneck Jo… qui veille ! Une fable édifiante et aigre-douce, animée par Paul Gómez, jeune réalisateur mexicain formé à l’université de Guadalajara. Nous avons eu envie d’en savoir plus sur ce jeune réalisateur mexicain, très doué… Quelles études avez-vous faites à l’Université de Guadalajara ? Je suis diplômé en Arts audiovisuels de l’Université de Guadalajara, promotion 2002-2006. Que faites-vous actuellement quels projets développez-vous ? ? Depuis mi-2008 je travaille sur un autre projet indépendant de court métrage animé intitulé Antenas de conejo. Une sorte d’allégorie d’humour noir sur le consumérisme de la société actuelle. Vous ne voulez pas utiliser la 2D ou la 3D ? Pourquoi avez-vous choisi le Stop Motion ? La frontera Interview du réalisateur Paul GÓmez Le projet sur lequel je travaille actuellement utilise des techniques d’animation mixtes. Le protagoniste est un téléviseur qui sera animé en stop motion tandis que les personnages humains avec lesquels il inter-agit sont faits en toon boom. Un travail dans la droite ligne de l’Anglais Daniel Greaves et de son studio Tandem qui a l’habitude de mélanger les techniques traditionnelles et les nouvelles technologies. Je n’ai pratiquement aucune expérience dans le domaine de la 3D et l’utilisation de logiciels pour ça. J’ai choisi le Stop Motion car c’est une technique qui permet d’exercer les différents champs du savoir-faire cinématographique : la photographie, le dessin d’art, d’une manière plus palpable, plus plastique, ce qui me plait beaucoup plus que de rester trop longtemps assis en face d’un ordinateur. La frontera est un excellent film. Il dénonce la bêtise de la frontière, c’est pratiquement un film politique ! Mon intention était de faire un travail qui traite des phénomènes migratoires qui sont vécus dans ce pays (Mexique) mais je ne voulais pas qu’à une première lecture cela apparaisse comme un pamphlet, comme le fait traditionnellement un jeune étudiant. Je voulais apporter un éclairage nouveau, plus frais, moins commun. C’est pour cela que j’ai décidé de me concentrer sur un personnage dont les motivations étaient plutôt d’ordre psychologique, de ne plus se sentir seul. Cela est parti d’un article que j’ai lu sur l’augmentation des suicides en décembre de la part des migrants aux USA. Le fait que le cactus tente de s’arracher de ses racines, en refusant sa nature sédentaire est déjà en soi une action suicidaire. Comment a été reçu La frontera par le public mexicain et latinoaméricain ? Le court a été bien reçu au Festival de Guadalajara et à celui de Expresión en Corto. Il a gagné un prix d’animation au festival Creanimax de Guadalajara en 2006 et a été sélectionné dans d’autres festivals internationaux, tel que ANIMA à Cordoue. Bien qu’il y a eu des gens qui, à la lecture du synopsis ont crû qu’ils verraient une histoire de plus sur la frontière avec les caricatures du coyote et du candidat au passage, ils ont été déçus de voir une histoire qui avait plus à voir avec une toile de fond sociale qu’avec un sketch animé comique. Si vous voulez ajouter quelque chose… Ce court est ma première expérience d’animation, à l’exception des travaux d’apprentissage. Je suis de ceux qui pensent que l’animation peut être un genre par le biais duquel on peut éveiller les consciences sur des thèmes importants plutôt que l’expression d’une simple flamboyance, de virtuosité ou du caractère d’amusement distrayant pour les enfants, auquel on a l’habitude de l’associer. J’espère que, dans la mesure du possible, je vais pouvoir continuer de raconter des histoires portant des thématiques importantes pour la société, par le biais de ce genre cinématographique. Merci beaucoup d’avoir programmé La frontera. www.lesreflets-cinema.com Actuellement, je travaille à Victoria dans l’Etat de Tamaulipas dans le nord-est du pays. Je travaille dans une entreprise qui gère la production de vidéos pour le gouvernement de l’Etat et quelques campagnes politiques. Je m’occupe plus particulièrement de la postproduction et de l’animation, en faisant des spots animés et des petites couvertures, des contenus pour internet etc… J’ai également fait des illustrations pour des imprimeries de Guadalajara et des story-boards pour différentes entreprises de production et pour quelques court métrages comme Señas particulares de Kenya Márquez et Mala Memoria d’Alfonso Esquivas. Ces projets ont tous été produits par IMCINE. Regards Propos recueillis et traduits par Pascale Amey, Julien Fayet et Laura Haro La frontera (2006 / Mexique / 5 :30 minutes / réalisation-sc énariomontage : Paul Gómez / stop motion / vost anglais / production : Université de Guadalajara) La Frontera a été présenté le mardi 3 mars au Sirius Salsa Picante n° 4 Page 11 Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain Regards T out en ombres chinoises et sans paroles, Bendito Machine dénonce le pouvoir, la religion, le sexe, l’asservissement et la folie des hommes. Quelque soit le système, celui-ci engendre ses propres dérives et révoltes ; le Phénix semble néanmoins devoir toujours renaître de ses cendres mais jusqu’à quand ? www.lesreflets-cinema.com Nous avons souhaité poser quelques questions à Jossie Malis, le réalisateur, chileno-péruvien, installé à Barcelone, et dont le film percutant ne laisse personne indifférent… Pourquoi avez-vous quitté le Chili ? Vous qui êtes né au Pérou et qui avez quitté votre pays pour le Chili, vous avez fait vos études au Chili puis vous vous êtes installé à Barcelone. Croyez-vous que l’animation a plus d’avenir en Europe ? Je suis né au Pérou, de père chilien et de mère péruvienne. A 10 ans, ma famille a déménagé au Chili, que j’ai quitté il y a pratiquement 10 ans, après m’être consacré quelques années au dessin et à la publicité. J’ai passé un moment aux Etats-Unis avant d’arriver à Barcelone en 2003 pour étudier le stop motion. Le jour-même où je suis arrivé, j’ai su que j’allais rester. J’ai quitté le Chili sur un élan vital, de ceux que l’on assume joyeusement. En ce qui concerne l’animation, je ne sais pas s’il y a plus d’avenir en Europe ou dans une autre partie du monde, ce qui se passe ici c’est qu’il y a une industrie puissante au niveau commercial et, en même temps, il y a des aides publiques, des circuits de festivals, beaucoup de gens qui travaillent dans l’animation et de bonnes écoles. Tout bouge bien plus qu’en Amérique du Sud, sans aucun doute mais au bout du compte, tu dois savoir bien clairement ce que tu veux : entrer dans ce circuit commercial ou rester à la marge en développant tes projets personnels. Au final, ça dépendra de comment tu te débrouilles. L’animation présente cet avantage que tu peux la développer où que tu sois et arriver où tu veux avec ton travail vu qu’il n’y a pas de barrière. L’avantage principal c’est que tu peux bouger d’un pays à l’autre sans difficulté aucune et à terme ça te permet de connaître plus de gens qui bougent dans ce sympathique petit monde. Quels projets avez-vous en ce moment ? A quoi travaillez-vous en ce moment ? Je suis sur le point de présenter le troisième épisode de Bendito Machine, je termine aussi un projet d’animation pour enfants pour une entreprise de Page 12 Bendito machine Interview du réalisateur Jossie Malis production du Chili et prochainement je vais ouvrir avec une associée un magasin d’illustrations en ligne. Vous ne voulez pas utiliser la 3D ? J’ai quelques idées pour des courts métrages qui, tels que je les imagine, ne peuvent être développés qu’en 3D. Je n’ai absolument pas l’intention d’apprendre à faire de l’animation 3D, je préférerais reprendre le Stop Motion après avoir terminé avec le projet de Bendito Machine et laisser un peu de côté les écrans et les curseurs. J’ai des collègues qui se consacrent à la 3D et finalement, il faut juste que nous trouvions un moment pour nous mettre à faire quelque chose ensemble. Votre film Bendito Machine est tout à fait génial. Il dénonce tout : le pouvoir, la religion, le lucre, le sexe… Qu’avez-vous de plus à dire aujourd’hui ? Est-ce, selon vous, le rôle d’un réalisateur que de dénoncer ce type de choses ? J’aime raconter des histoires, réinterpréter et parodier les conduites de l’être humain, dans leur majorité absurdes, et que certains illuminés tentent de nous vendre jusqu’à plus soif ! D’une part, il est incroyable de voir la quantité de couleuvres journalières que la grande majorité des gens est prête à avaler sans la moindre réflexion ; mais d’autre part, et cela me réconforte, il existe des outils qui permettent de mettre en contact des milliers de personnes et là, tu peux leur raconter ton histoire. Beaucoup de gens réfléchissent et sont inquiets des mêmes choses que toi, que l’on peut résumer au final, et qui sentent bien mauvais depuis pas mal de temps. On peut les résumer en deux mots : la peur et l’argent. La liste de ce qu’implique la peur est longue, il y en a pour tous les goûts et les couleurs. L’argent, pour sa part, ne provoque jamais la peur, à moins que tu n’en aies pas ! C’est un jeu macabre dans lequel nous sommes tous partie prenante, enfin, pour résumer, ce que j’essaye de faire, c’est rire de ces thèmes et inviter à la réflexion, c’est très thérapeutique !!! Comment Bendito Machine a-t-il été reçu par le public en Espagne et en Amérique Latine ? Bien mieux que je n’aurais pu l’imaginer. A ce jour, il a participé à plus de 150 festivals et mostras tout autour du monde et il a été primé 22 fois, tant par des jurys que par le public. Ça me remplit de joie ! Vous avez quelque chose à ajouter ? Le bonheur est l’absence de peur. Propos recueillis par Pascale Amey, Julien Fayet et Laura Haro Bendito Machine 2006 / Pérou-Espagne / 6 minutes / réalisation : Jossie Malis / animation 2D / vo / production : Zumbakamera Ce film d’animation a été montré au Sirius le mardi 3 mars Séance de rattrapage le mardi 31 mars à 19h Bateau péniche le sirius En face du 4 quai Augagneur 69003 Lyon tél. : 04 78 71 78 71 www.lesirius.com Entrée libre Salsa Picante n° 4 Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain S es films nous ont enthousiasmés, nous avons décidé de lui poser quelques questions, Carlos Eduardo Nogueira nous ré- pond : Regards Quelle idée vous avez des femmes !!! Dans vos films, elles sont toutes folles ou obsédées par leur jeunesse et la beauté ou schizophrènes ou elles tombent amoureuses de plusieurs hommes, est-ce vraiment votre vision des femmes ? Les femmes sont folles et elles veulent vraiment être jeunes et sexy !!! ah ! ah ! ah ! je plaisante ! Au final, c’est la trace d’une attitude très couramment trouvée « chez les femmes ». Le fait que l’une de mes protagonistes, Vanessa, se lie avec beaucoup beaucoup d’hommes (Pálvida Vanessa Pérvida) est un cas extrêmement particulier. Pourquoi y a-t-il autant d’hommes « faibles » dans vos films et pourquoi si peu nombreux ? Parfois, je me dis que l’animation est un boulot trop pénible ! Il est toujours plus sympa de travailler avec des femmes. Mais sérieusement, je pense que le fait d’être un homme, ça nous attire nous les réalisateurs de films, ça attire notre attention vers les femmes et nous pousse à penser à cet univers que nous aimons mais dont nous ne faisons pas partie. C’est un peu un truc de voyeur, quelque chose de très habituel dans la musique, le cinéma, la poésie. Mais d’une façon ou d’une autre, dans la trois D, cela attire l’attention bien plus que dans d’autres média, les gens ont tendance à créer des hommes très forts, très masculins et plein de testostérone dans les films et les jeux vidéo. Moi je ne le fais pas. L’idée de traiter de ce désordre comme d’un problème physique m’amuse. Et si l’on pouvait vraiment séparer les différents aspects de notre personnalité en deux personnes réelles ? Là était l’idée de départ du film. Pourquoi avez-vous choisi Milton Gonçalves – immense acteur brésilien comme récitant de l’histoire de Yansan ? Milton Gonçalves est l’un des meilleurs acteurs brésiliens. Yansan transporte le mythe afro-brésilien de Yansan au Japon. Puisque Milton est noir et qu’il a ses propres racines sur le continent africain, j’ai pensé que nous pourrions faire entrer en collision sa narration très émotionnelle avec le visuel très futuriste et postmoderne créé pour le film. C’est cela la véritable source de puissance de ce film. Combien de temps travaillez-vous sur chaque film ? Je pense que je n’ai jamais travaillé moins de 8 mois sur un film. D’autres m’ont pris bien plus de temps. Vanessa, par exemple, m’a pris pratiquement 18 mois. Yansan est beaucoup plus complexe sur des tas d’aspects mais je m’étais amélioré en tant que modéliste et animateur, ça m’a donc pris moins de temps. Salsa Picante n° 4 Interview du réalisateur Vous travaillez toujours avec Ruggero Ruschioni, comment vous êtes-vous rencontrés ? Ruggero est l’un de mes meilleurs amis. Nous nous sommes rencontrés à l’Université de São Paulo. Au début des années 90, nous ne pouvions pas faire de conception assistée par ordinateurs sans l’aide de machines très chères ; j’ai donc déménagé dans un labo de la faculté où il y avait deux ordinateurs graphiques de la Silicon. Ruggero, en tant que musicien, se heurtait au même problème pour créer ses morceaux de musique. Donc on s’est rencontrés. Nous partageons beaucoup d’opinions sur le cinéma, l’art etc… et notre « connection » s’est encore améliorée au fil du temps. Nous avons écrit ensemble le script d’une animation long métrage, appelée Hex. Je prépare un nouveau film, avec des acteurs et de la 3 D, appelé Zigurate qui a également été écrit conjointement. Ruggero est un super partenaire très créatif. Travaillez-vous sur un projet particulier en ce moment ? Je viens juste de terminer mon travail sur Zigurate ; Ruggero est en train de faire la bande son et il travaille sur les effets sonores en ce moment-même. Je travaille également sur un film court qui est contenu dans l’univers de Hex. J’espère que nous pourrons faire le film long après cette expérience de courts. Que pensez-vous de la 3D et de l’industrie cinématographique brésilienne ? Je pense que la 3D est adaptée pour les effets visuels réalistes mais je pense que les gens ont tendance à l’utiliser pour figurer la réalité. Or, cet outil permet de jouer avec les couleurs, les lumières, les textures et les formes dans des proportions que le cinéma ne permet pas. Nous n’avons pas besoin que les choses semblent être photographiées ou couper le film comme on le ferait avec une action filmée et des acteurs. Mais comme toute technologie, je pense que la 3D commence à se comprendre, des choses nouvelles et très intéressantes sont en train de venir ! Propos recueillis et traduits par Pascale Amey, Julien Fayet et Laura Haro Quatre courts métrages de Carlos Eduardo Nogueira (scénario, montage et direction artistique) et Ruggero Ruschioni (bande sonore et effets sonores). Pálvida Vanessa Pérvida 2002 / Brésil / 28 minutes / Scénario, montage, direction artistique : Carlos Eduardo Nogueira et Michelle Gabriel /Musique : Ruggero Ruschioni / production : Petrobras Vanessa souffre de schizophrénie, il lui faut deux corps… Ange ou démon, dévote ou perverse ? Desirella 2004 / Brésil / 11 minutes / Scénario, montage, direction artistique : Carlos Eduardo Nogueira / son : Ruggero Ruschioni / production : Petrobras Desirella souhaite la jeunesse éternelle… Elle chausse des escarpins magiques. Là voici redevenue jeune, sexy, en un mot irrésistible ; elle va dévorer le monde… Multi primé au Brésil, il s’agit là du second film de Carlos Eduardo Nogueira Yansan 2006 / Brésil / 18 minutes / Carlos Eduardo Nogueira / animation 3D / Production : Glaz Cinema Yansan, abusée par son père, s’enfuit de la maison familiale et découvre ses pouvoirs sur les objets. Seule, elle erre dans les rues et rencontre Ogum qui, subjugué par sa beauté, l’enlève et l’épouse. De leur union, d’abord infructueuse naitront 9 enfants… jusqu’à ce que Xangô, le frère d’Ogum, ne jette son dévolu sur sa bien jolie belle-sœur… Canônes para três mulheres 2008 / Brésil / 9 minutes / Carlos Eduardo Nogueira / animation 3 D / bande sonore : Ruggero Ruschioni / Production : Glaz Cinema La routine de trois femmes dont l’une est hôtesse de l’air, l’autre infirmière et enfin la dernière secrétaire. Leur vie sexuelle, leur retour à la maison etc… www.lesreflets-cinema.com Pourquoi traitez-vous de la schizophrénie avec deux corps, dans Pálvida Vanessa Pérvida ? Soirée Carlos Eduardo nogueira Soirée Carlos Eduardo Nogueira le mardi 31 mars à 19h Bateau péniche le sirius En face du 4 quai Augagneur 69003 Lyon tél. : 04 78 71 78 71 www.lesirius.com Entrée libre Page 13 Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain cette rencontre… Rafael : le groupe a démarré il y a trois ans approximativement, comme passe-temps entre voisins d’abord, puis nous avons répété plus régulièrement ; désormais nous jouons dans des activités associatives. Aujourd’hui, nous louons un local et nous jouons chaque fois qu’on nous le demande, mais nous continuons d’être des amateurs, et fiers de l’être. www.lesreflets-cinema.com Pourquoi la musique des Andes…. N’est ce pas un peu « daté » ? quel est votre répertoire dans ce domaine. Qu’écoutez vous de la musique des Andes d’aujourd’hui ? INTILLAPUN I ls seront à la bibliothèque du 4èmeCroix Rousse le samedi 28 mars à partir de 15h30 pour un concert exceptionnel qui clôturera les Regards dans les bibliothèques de la ville de Lyon. Ils sont cinq mais seuls trois d’entre eux ont pu répondre à nos questions, les deux autres se préparent sur les plages cubaines pour le concert qui suivra la projection de Souvenirs de Madrid de Jacques Duron. Pourquoi un nom quechua à votre groupe et… que veut dire Intillapun ? Tonio : Alors, c’est un nom un peu quechua qui commence par le soleil (Inti) mais c’est surtout un délire, en fait, on reprend surtout des chansons de 3 groupes qui s’appellent Inti Illimani, Illapu et Quillapayun, et quand la question s’est posée de comment on s’appellerait, on a mixé les 3 pour faire finalement Intillapun ; Thomas : Le nom est venu de lui-même, au cours d’une séance où nous reprenions des morceaux d’Inti Illimani, d’Illapu et de Quilapayun. Par ce mariage et par les musiques qui composent notre répertoire nous voulons rendre hommage à tous les peuples d’Amérique Latine, et pas seulement aux Quechuas ou aux Mapuches. Rafael : C’est pas très orthodoxe mais bon ! Comment vous êtes-vous connus ? Tonio : Intillapun, c’est surtout l’histoire de rencontres, d’abord avec Rafa (seul réel latino du groupe) qui s’est trouvé être mon voisin sympa du dessus en 1999, à force d’en parler, j’ai fini par y aller (au Pérou, Bolivie et Chili) en 2003 avec mon pote d’enfance (depuis la 6ème) Mickeul, en ramenant charangos et flûtes de pan et de la musique plein la tête depuis un moment !… Ensuite, on s’est retrouvés à habiter dans le même immeuble : le 104 rue Marius Berliet (haut lieu de la résistance !) : moi au premier, Rafa au 2ème, Mickeul au 3ème et Thomas au 4ème puis, de proches en potes, Remy nous a rejoint il y a 2 ans. Thomas : Les 4/5 du groupe ont vécu les uns sur les autres au « 104 » pendant quelques années, ce qui a facilité grandement l’organisation des répétitions. Nous avons rencontré Rémy par amis interposés, mais au vu de l’entente quasi immédiate qui s’est produite, j’y vois une part de destin dans Page 14 Tonio : La musique des Andes, c’est surtout intemporel, ça vient de loin, c’était interdit pour les indiens sous les espagnols, et ça a la pêche, mais on joue aussi de la musique cubaine, chilienne des années 70 (Los Jaivas, Victor Jara, Violetta Parra…) d’ailleurs y a pas que là bas qu’il y avait de la super bonne musique à cette époque, aujourd’hui, on écoute surtout Awatinas, un super groupe Bolivien…mais au niveau engagement politique, ça vaut quand même pas Quillapayun. Thomas : Personnellement j’ai été initié à la musique andine en arrivant au « 104 » et séduit par son côté festif ainsi que ses paroles qui la rendent parfaitement actuelle, certainement pas démodée. Et puis c’est très enrichissant, musicalement parlant. Rafael : En réalité, nous ne jouons pas seulement de la musique des Andes même si elle est pour une part importante dans notre répertoire ; nous interprétons aussi de la musique du Mexique, d’Uruguay, de Cuba, de la musique afro-péruvienne et nous essayons d’élargir le spectre. Moi personnellement, je continue d’écouter Inti Illimani, illapu, les awatinas, les Quila, los Jaivas etc… ce qui ne m’empêche pas d’écouter aussi des musiques plus modernes ou d’autres latitudes. Pourquoi les chansons révolutionnaires du Mexique ? n’est-ce pas un peu « vieux » ? ou trop « typique » ? Ecoutez-vous de la musique mexicaine actuelle ? et si oui, qui et quoi ? Tonio : Du vieux et du typique : on nous demande souvent « la Bamba », « El condor pasa » ou des pubs pour le café ! alors ouais bien sûr que la révolution mexicaine c’est beaucoup trop vieux, et vivement qu’on remette ça pour de bon, petite dédicace au passage aux camarades du Chiapas. Thomas : J’essaye de rester au fait de ce qui se passe au Mexique (Chiapas, Oaxaca…) mais j’avoue ne pas connaître du tout la musique contemporaine mexicaine. Sauf ce que je peux entendre sur Radio Canut le samedi… Rafael : Comme le disait Victor Jara « Une chanson courageuse sera toujours une nouvelle chanson », ceci pour dire que quand une chanson contient un message (historique, politique, social etc) la temporalité n’est pas très importante. Qui pourrait dire que les Misérables de Victor Hugo sont passés de mode. Pour ce qui est de la musique mexicaine, j’écoute Amparo Ochoa, Cuco Sanchez (j’adore les corridos et les rancheras), pour ce qui est plus moderne : j’écoute Café Tacuba et Los tigres del Norte. Pourquoi ces deux pôles très distincts dans votre répertoire : musique des Andes et Chansons de la Révolution Mexicaine ? Tonio : On ne parle pas QUE de la révolution mexicaine, mais aussi de révoltes au Chili, à Cuba, de l’escapade du Che en Bolivie…Bref, on aime tout ce qui tend à changer radicalement ce monde de merde, les Chávez, les Morales, (même s’ils sont encore un peu mous ;) mais on aime aussi les fiestas de carnaval des Andes ! Thomas : Parce que !! Rafael : en réalité il n’y a pas vraiment de polarisation sur deux types de musique, celle des Andes et la musique mexicaine, notre objectif est de faire voyager le public en Amérique latine, avec toutes les différences qui l’enrichissent. Etes-vous déjà allé en Amérique Latine ? Tonio : En plus des Andes, je suis allé à Cuba en 2006, d’où j’ai ramené un tres. Thomas : Non ! Je suis le seul du groupe dans ce cas là. Mais je suis aussi le seul à ne pas parler espagnol Comment avez-vous appris à jouer d’un instrument « traditionnel » ? (charango, siku, etc.) Tonio : Avec un pote musicien du nom de Marcelo Donoso, adorable et super patient ; Thomas : Guitare / Guimbarde / Harmonica (un p’tit peu) : J’ai commencé tout seul, et puis je dois beaucoup à Rafa depuis que nous jouons ensemble. Rafael : j’ai appris la guitare tout petit et le folkloriste Pedro Yanes a été mon premier professeur. Puis j’ai pris des cours de cuatro vénézuélien et de kena avec Pablo Morales, qui, à cette époque (les années 80) jouait dans Barroco Andino. Quel est le répertoire que vous allez interpréter le samedi 28 pour les spectateurs des Regards ? Thomas : Vous verrez bien !! Je ne pense pas qu’il y aura beaucoup de nouveautés vu que notre groupe a été séparé pendant quelques semaines… Rafael : Dos palomitas, el bohio, el alcatraz, la fiesta de San Benito, La muralla, A Cochabamba me voy…. Entre autres ! Il ne nous reste plus qu’à donner rendezvous à ces joyeux drilles le samedi 28 mars à partir de 15h30 pour un concert latino qui prévoit d’être exceptionnel ! Propos recueillis par Pascale Amey, Julien Fayet et Laura Haro Contact : Intillapun Mickael (06 87 57 47 41) [email protected] Samedi 28 mars à 15h30 Bibliothèque du 4ème - Croix Rousse 12 rue de Cuire - 69004 Lyon tél. : 04 72 10 65 41 Claire Girard http://www.bm-lyon.fr/pratique/ bibliotheques/bib4.htm Entrée libre Salsa Picante n° 4 FIESTA !!! Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain Embarquement immédiat avec CALLE ALEGRIA Depuis les 20 ans des Reflets et la Fiesta de Clôture qu’ils avaient enflammée en 2004, les Calle Alegria ont poursuivi leur bonhomme de chemin et reviennent plus en forme que jamais pour fêter les 25 ans du Festival… Quelques compilations et trois albums plus tard, El barrio en 2004, Sin embargo en 2006 et enfin Hasta que qui sortira d’ici un mois, la bande des quatre des débuts (Véronique, Angélique, Alice et Patrice) s’est adjoint un nouveau compère et l’esprit festif est toujours là ! Nous avons demandé à Véronique ce qu’elle pensait de leur aventure musicale… èmes Depuis la Fiesta de Clôture des 20 Reflets, cinq ans ont passé… En cinq ans, votre carrière a décollé et vous avez réalisé 3 disques, n’est-ce pas un peu rapide ? En fait, on a réalisé exactement 2 disques et une sortie d’un maxi 5 titres est prévue le 23 avril 2009 au Sirius à Lyon : un avant-goût des prochains titres de l’album Hasta Que qui, lui, sortira fin 2009 ou début 2010. Rapide, je ne suis pas sûre, car on prend le temps de s’entourer d’une bonne équipe afin de mettre toutes les chances de notre côté… Pourquoi vous êtes-vous adjoints un nouveau complice ? Qu’est-ce qui vous semble avoir changé, dans votre inspiration ou/et dans les spectacles du groupe depuis vos débuts ? Ce qui a changé dans les spectacles, c’est d’abord la technique des musiciens qui s’est améliorée au fil des répétitions, des nombreux concerts et résidences. Mais aussi le son et le visuel (lumières, costumes, enchaînements des morceaux), tout un travail et une rigueur qui facilitent les prestations. Les nombreux concerts ne sont pas arrivés seuls. La création d’un poste de chargé de production au sein de notre association a fortement contribué à l’évolution de nos projets. Stf s’occupe de tout l’administratif, la communication, la recherche et le suivi des concerts ainsi que les rencontres avec de nombreux professionnels. Sinon notre inspiration n’a pas forcément changé, on compose tous dans le groupe et Salsa Picante n° 4 l’interview les idées arrivent comme avant : textes poétiques, humoristiques, populaires et engagés sont des sujets que l’on met toujours en place avec envie, sourire et fiesta. On a gardé notre côté « familia », le plaisir et l’inspiration sont donc toujours là !!! Si vous deviez dire en quelques mots ce que ces cinq dernières années vous ont apporté ? En quelques mots : maturité, professionnalisme, complicité et joie de vivre avec la famille des musiciens et musiciennes qui s’agrandit, et nous conforte dans l’idée de faire ce que l’on aime, la musique, notre musique. Prévoyez-vous quelque chose de particulier pour la Fiesta de Clôture 2009 ? La fiesta et un concert inoubliable ! Souhaitez-vous ajouter quelque chose en particulier pour les spectateurs des Reflets du cinéma ibérique et latinoaméricain ? ¡Qué viva el arte, la música para todos en este mundo ! ¡ Hasta pronto ¡ Véro (paroles lues et approuvées par toute la Rue de la Joie !!) Fiesta de clôture Samedi 14 mars à partir de 20h Centre Culturel et de la Vie Associative Salle de Bal 234 cours Emile Zola - Villeurbanne Métro Ligne A arrêt Flachet Entrée : 10 € tarif unique (entrée + 1 boisson) En vente au Zola jusqu’au 14 mars + en vente à l’entrée de la fiesta Calle Alegria au Zola Jusqu’à la fin du festival, vous entendrez, avant chaque séance, des morceaux inédits de Calle Alegria en véritable exclusivité puisque le nouvel album ne sera en vente qu’au mois d’avril. Petit cadeau de Calle Alegria aux festivaliers des Reflets !!! Alors ouvrez grand vos yeux… et vos oreilles !!! www.lesreflets-cinema.com Suite au départ de notre percussionniste l’an dernier, nous avons dû trouver une solution et, naturellement, nous nous sommes tournés vers le milieu professionnel. Une super rencontre avec Martial Marzoukou Macauley (Les Innocents, Rachid Taha, ZenZila…) a boosté le spectacle et enrichi la Rue de la Joie. Son groove et ses influences font un super mélange avec notre Calle. Cela fait maintenant un an que l’on travaille ensemble et notre spectacle a vraiment évolué. Calle alegria, Entre reggae et rumba, ça va chauffer ! Calle Alegria sera en première partie de la Fiesta des Reflets !!! Pascale Amey CALLE ALEGRIA Stéphane Guieux Email : [email protected] tél. 06 08 35 37 69 http://www.callealegria.com http://www.myspace.com/callealegriacom Page 15 Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain Quand un fidèle d’entre les fidèles des Reflets, romancier à ses heures, choisit le Zola et les Reflets pour sa prochaine et sanglante nouvelle, ça donne Sangre y Sangria, une histoire louche dont nous sommes tous les héros… Sangre y sangria Episode 4 Pour lire d’autres exactions de l’auteur : http://petitesnouvelles.blogspot.com/ Attention, épisode 4 !!! www.lesreflets-cinema.com samedi. fiesta Comme il n’y a pas eu de meurtre depuis une semaine (Quel relâchement au niveau de l’organisation !) la fiesta a été autorisée. Et croyez moi, on a grand besoin de faire la fête en ce moment. Ceux qui ont le plus dérouillé, ce sont tous les potes latinos. Les flics ne les lâchent pas. Alors pour les soutenir (moralement) nous tapons dans la sangria. Chaque année, c’est Michel, le président de l’association qui prépare le doux breuvage, mais cette année, avec tous ces évènements, il a un peu la tête à l’envers et il a méchamment forcé sur l’alcool. Elle dépote sa sangria. Après deux verres, les premières victimes grimpent aux rideaux. L’ambiance est chaude. Avec tous ces flics en tenue appuyés contre les murs de la salle, indifférents à la musique, on se croirait au stade de Gerland (Sans les Brésiliens, puisque ce soir, ils sont tous en garde à vue). Soudain, j’aperçois, au fond de la salle, ma beauté brune en grande discussion avec deux hommes que je n’ai jamais vus ici. Je m’approche bien décidé à l’inviter à danser et à ne pas la perdre cette fois. Je suis à quelques mètres d’elle quand elle me voit. Elle sursaute et vient à ma rencontre. Elle pose ses deux mains à plat sur mon torse pour m’arrêter. Le doux contact me fait vaciller (Je vous l’ai déjà dit que j’étais sensible comme garçon) « Vas-t’en, ne te mêle pas de cela, je t’expliquerai plus tard » Et elle me ramène doucement mais fermement au comptoir. Je suis tout troublé et Laurent vient se moquer de moi : « Alors Martin, les femmes te ramènent au bar, maintenant ? C’est le monde à l’envers. » Je ne l’écoute pas, tout occupé à détailler le groupe qui discute. Mon inconnue est avec un bel homme à peine plus âgé qu’elle et un vieillard aux cheveux rares et blancs. Le temps que je trempe mes lèvres dans l’immonde breuvage, et le groupe a disparu. Une paire d’heures plus tard, l’ambiance a grimpé dangereusement, grâce aux musiciens déchaînés et à la sangria sur-vitaminée, quand une femme secoue les policiers endormis, en découvrant (et en hurlant) dans les toilettes le corps ensanglanté du vieillard qui a passé la soirée avec ma belle. J’ai comme l’impression que mon histoire d’amour naissante a du plomb dans l’aile. L. à suivre... Échos photo des Reflets (ça s’est passé pendant les Reflets) Le réalisateur espagnol Jaime Rosales, venu présenter Un tir dans la tête, juste avant une série d’interviews. (photo Guillaume Grasse) Page 16 Salsa Picante n° 4 Los Momentos Picantes tous les jours à partir de 18h30 chez Capoeira Senzala Lyon (40 rue Hippolyte Kahn - métro république - Villeurbanne) Cette année, les Momentos Picantes prennent l’accent brésilien et se dérouleront chez nos amis de l’Association Capoeira Senzala Lyon, à deux pas du Zola. Les mercredi, jeudi et vendredi à partir de 18h30, retrouvez toute l’équipe de Senzala et leurs invités pour des moments festifs et conviviaux ! Entrée Libre Vendredi 13 mars : soirée latino avec baila conmigo Initiations et animations : merengue, bachata, salsa, ambiance Caraïbes avec Baila Conmigo. Boissons et plats latinos en vente sur place. www.senzala.org Los Momentos Picantes « Bonus » Trois concerts vont encore se tenir à la Brasserie Le Zénith Restaurants partenaires des Reflets Cette année, trois établissements vous permettent de vous restaurer pendant les Reflets. Pour s’acheter un sandwich ou une barquette de pâtes avant de rejoindre la file d’attente, prendre un verre ou déguster des tapas entre deux films, ou bien encore dîner à plusieurs pour finir la soirée ? Trois adresses à deux pas du Zola : Brasserie Le Zénith 73 rue Francis de Pressensé tél. 04 78 17 28 55 Ouverte tous les jours de 10h à 23h (samedi et dimanche compris) Tapas, chili, paëlla, etc. Pizzeria Zanotti 2 bis cours de la République tél. 04 72 44 04 15 Ouverte tous les jours à midi et le soir (samedi et dimanche compris) Spécialités italiennes, pizzas et pâtes à emporter. Crousty Chaud 71 rue de Pressensé tél. 04 78 94 09 99 Ouvert du lundi au vendredi De 9h à 19h Sandwiches, quiches, paninis. Vendredi 13 mars à partir de 19h : Abraço (musique brésilienne) Le « Duo Abraço » est né de la rencontre de deux passionnés de musique brésilienne. Josiane Valsésia (« Josianinha do Pandeiro quebrado » au chant et percussions) et Benjamin Lubrano (« Benjinho do cavaco » au chant, guitare et cavaquinho). Enrichi de ses voyages au Brésil, ce duo tendre et rythmé est dans la pure tradition de la musique populaire de Rio de Janeiro. Mercredi 18 mars à partir de 18h : Les noix de Côco (musique brésilienne) Le Trio de Côco explore de nombreuses facettes de la musique brésilienne, notamment le Pagode,ou Samba de Raiz (Samba des racines) dont le principe est de reprendre des sambas des années trente à aujourd'hui; des sambas chantées, pleurées, des airs où la mélancolie et l'allégresse s'entrecroisent. Entrée libre !!! 1 033 et vous, et vous et vous ! Dernière minute !!! www.lesreflets-cinema.com (73 rue Francis de Pressensé - Villeurbanne - métro république) Infos pratiques Ont collaboré à ce numéro : Pascale Amey, Homero Vladimir Arellano, Annie Damidot, Michel Dulac, Loulou Esparza, Julien Fayet, Laura Haro, Laurent Hugues, Irene Sánchez Miret, Monica Sessin Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain Ben, rien, désolé… Tout va bien ! Vous avez participé à l’enquête 2009 et voulez connaître les résultats ? Vous avez laissé des questions et voulez connaître les réponses ? Vous trouverez tout cela sur l’Emile N°32 d’octobre 2008 à consulter sur http://www.lezola.com/Files_archives_emile/qLZ__emile_n_260_32_.pdf Salsa Picante n° 4 Page 17 25èmes Reflets du Cinéma Ibérique et Latino-américain Cinéma Comoedia Cinéma Le Zola 10h 12h 14h 16h15 El tiempo prestado (16’) + Barcelona (un mapa) (1h30 / vostf) Inédit Mer 4 18h30 Ver llover (13’) + Mutum (1h30 / vostf) Parque vía (1h26 / vostf) Inédit 20h45 20h Ouverture Cartes postales de Leningrad (1h30 / vostf) Avant Première ® Paseo (13’)+ Tras los visillos (16’) + Jeu 5 Lo mejor de mi (1h25 / vostf) Inédit Ven 6 La cité des hommes (1h50 / vostf) Sam 7 Fados (1h27 / vostf) Soñar no cuesta nada (1h40 / vost anglais) Inédit Dim 8 Smoking Room (1h33 / vostf) Sleep Dealer (1h30 / vostf) La dama en el umbral (14’20) + De profundis (1h15) Inédit Cartes postales de Leningrad (1h30 / vostf) El tiempo prestado (13’) + Los bastardos (1h30 / vostf) Interdit - 12 ans Todos estamos invitados (1h35 / vost anglais) Inédit Mutum (1h30 / vostf) Puisque nous sommes nés (1h30 / vostf) ® Paseo (13’)+ Yo sólo miro (18’) + Todos estamos invitados (1h35 / vost anglais) Inédit Un tir dans la tête (1h34 / sans dialogue) Avant Première ® Ver llover (13’) + 18H15 Parque vía (1h26 / vostf) Inédit Lapsus (3’30) + Leonera (1h53 / vostf) Une famille brésilienne (1h48 / vostf) Avant Première Barcelona (un mapa) (1h30 / vostf) Inédit La femme sans tête (1h27 / vostf) Avant Première Lun 9 Mutum (1h30 / vostf) Travail & Cinéma Smoking Room (1h33 / vostf) ® Travail & Cinéma Casual Day (1h34 / vostf) Inédit ® La camara oscura (1h25 / vostf) Avant Première Mar 10 Casual Day (1h34 / vostf) Inédit Fados (1h27 / vostf) Ce cher mois d’août (2h30 / vostf) Avant Première El camino (1h31 / vostf) Inédit Si loin (1h32 / vostf) Calavera Highway (1h28 / vost espagnol) Inédit ® Soy Andina (1h10 / vo intégrale) Inédit ® Jeu 12 Sleep Dealer (1h30 / vostf) 18H15 Tropa de Elite (1h55 / vostf) Interdit - 16 ans 14 kilomètres (1h35 / vostf) ® Ven 13 Si loin (1h32 / vostf) Los bastardos (1h30 / vostf) Interdit - 12 ans Tony Manero (1h38 / vostf) Interdit - 12 ans Tras los visillos (16’) + 21H Miranda regresa (2h22 / vostf) Inédit La dama en el umbral (14’20) + De profundis (1h15) Inédit Mer 11 La Escala Benzer (21’20) + Sam 14 14 kilomètres (1h35 / vostf) La cité des hommes (1h50 / vostf) El enemigo (1h30 / vostf) Inédit La sangre brota (1h40 / vostf) Dim 15 Puisque nous sommes nés (1h30 / vostf) Soñar no cuesta nada (1h40 / vost anglais) Inédit Tropa de Elite (1h55 / vostf) Interdit - 16 ans Tony Manero (1h38 / vostf) Interdit - 12 ans Lo mejor de mi (1h25 / vostf) Inédit Hoy no estoy (8’) + El camino (1h31 / vostf) Inédit Desierto adentro (1h52 / vostf) Inédit La mort d’un bureaucrate (1h25 / vostf) ® Lun 16 16H Miranda regresa (2h22 / vostf) Inédit Titón, de la Havane à Guantanamera (1h33 / vostf) Inédit Mar 17 14 kilomètres (1h35 / vostf) Leonera (1h53 / vostf) El enemigo (1h30 / vostf) Inédit Si loin (1h32 / vostf) Mer 18 La mort d’un bureaucrate (1h25 / vostf) Harraga (20’) + La Escala Benzer (21’20) + La sangre brota (1h40 / vostf) Casual Day (1h34 / vostf) Inédit Desierto adentro (1h52 / vostf) Inédit Una abuela virgen (1h40 / vostf) Inédit Séances non ouvertes aux invitations