du maghreb au moyen-orient : villes et sociétés en mutation

DU MAGHREB AU MOYEN-ORIENT : VILLES ET SOCIÉTÉS EN MUTATION
1.1. La genèse du projet scientifique
Les processus mondiaux ne s’appliquent pas sur l’ensemble de la planète avec la même constance et
les mêmes conséquences car les aires culturelles les absorbent différemment. C’est tout l’intérêt
d’une recherche sur le monde arabe et musulman, comme sur lAfrique subsaharienne ou l’aire
confucianiste. D’ailleurs, il est à noter qu’il existe en Asie orientale des laboratoires sur les mondes
européens. Cependant, travailler sur une aire culturelle ne signifie pas qu’il faille se couper des autres
mondes et n’étudier les processus universels qu’à travers son prisme géographique.
L’intérêt d’un laboratoire comme le GREMMO est d’être en contact avec des laboratoires spécialisés
sur des thématiques et d’autres aires culturelles avec lesquels nous pouvons collaborer. Le GREMMO
est membre depuis sa création de la Maison de l’Orient et de la Méditerranée, qui nous donne une
profondeur historique et la valeur ajoutée de la pluridisciplinarité. Lors du précédent quadriennal, nous
avons contribué à la création de l’ISERL (Institut Supérieur d’Étude des Religions et de la Laïcité), ce
qui nous ouvre sur d’autres aires culturelles à travers le religieux. En 2010, nous avons participé avec
une quinzaine de laboratoires du PRES de Lyon à la création de l’Institut des Mondes Urbains, qui a
obtenu le statut de Labex au printemps 2011. Notre intérêt pour l’IMU est dans la continuité de notre
politique d’ouverture thématique avec comme point de fixation « La ville » dans le monde arabe et
musulman. L’acuité de cette question n’échappe à personne, tant du point de vue des défis urbains
techniques que des enjeux sociaux et politiques, comme les révoltes de 2011 l’ont prouvée.
Le monde arabe et musulman a connu une mutation urbaine sans précédent dans le monde puisqu’il
est passé de 25 % de citadins en 1950 à plus de 75 % aujourd’hui. Cette urbanisation conduit à une
déstabilisation complète de la société et des pouvoirs politiques, qui n’est d’ailleurs pas sans rapport
avec le « Printemps arabe » de 2011 et « l’insurrection verte » iranienne de 2009, car l’autoritarisme
politique qui caractérise la plupart des régimes arabes n’est plus accepté par les nouvelles
générations de citadins (et de ruraux). La ville n’est pas un nouvel objet d’étude dans cette aire
culturelle, la littérature scientifique sur la ville arabo-musulmane est abondante, notre laboratoire a
d’ailleurs contribué à sa connaissance par de nombreuses publications. L’étude du patrimoine, sa
valorisation et son intégration dans le nouveau tissu urbain constitue toujours l’un des thèmes de
recherche du GREMMO au sein de la MOM et de l’IMU. Mais notre but aujourd’hui et pour le futur est
surtout d’étudier l’urbain en relation avec les mouvements sociaux et l'actuelle étape de la
mondialisation. C’est à travers l’urbain que nous pouvons comprendre concrètement les mutations
sociales, politiques et culturelles actuelles.
Le monde arabe et musulman connaît un processus historique comparable à ce qui s’est produit en
Amérique latine avec la fin des dictatures et en Europe de l’Est, après la chute des régimes
communistes. Nous sommes, pour l’instant, face à des révoltes, mais qui sont riches de potentialités.
Il est hautement probable que les gimes vont changer, et finir par libérer le potentiel de
développement bridé par l’autoritarisme et la trop forte dépendance à la rente pétrolière, directe ou
indirecte en fonction des pays. D’aucuns émettent l'hypothèse que nous entrons dans « la décennie
perdue » sur le plan de la croissance économique, car les changements politiques causent une
instabilité qui ralentit les affaires et fait fuir les investisseurs. Cependant, une fois que les institutions
démocratiques fonctionneront, comme en augurent de nombreux indices, nous pouvons espérer que
cette région connaisse un développement comparable à celui de l’Amérique latine et de l’Europe de
l’Est. Les progrès en matière de développement humain effectués durant les dernières décennies
constituent une base solide pour cette issue positive, ce qui n’est pas le cas de l’Afrique
subsaharienne.
Pour comprendre cette évolution, nous avons besoin de plonger dans l’histoire de notre aire culturelle
car les comportements sociaux et politiques actuels sont à la croisée de phénomènes universels,
véhiculés par la modernité occidentale et la mondialisation, et du fond culturel arabe et musulman.
La réflexion sur le projet d’équipe que nous avons menée en 2009 a abouti à nous intéresser à la
transition en cours dans les villes du monde arabe et musulman, liée pour l’époque contemporaine
aux effets de la mondialisation, mais avec comme référence les mutations qui se sont déjà produites
depuis la conquête musulmane. Les mutations furent progressives et non pas radicales comme on a
pu le penser : la ville islamique ne s’est pas imposée ou juxtaposée à la ville byzantine ou sassanide,
mais a repris les matériaux et l’espace existants. A l’époque abbasside, le développement de la
civilisation urbaine dans l’espace ouvert de l’empire musulman n’est pas sans rappeler les processus
urbains actuels liés à la mondialisation. La connaissance de l’épaisseur culturelle nous apporte une
valeur ajoutée pour interpréter les évolutions de l’espace urbain dans le monde arabe et musulman
contemporain.
« L’insurrection verte » iranienne et le « printemps arabe » ont donné une nouvelle impulsion à notre
programme de recherche. Il existe une relation évidente entre l’urbanisation, les changements sociaux
et le refus de l’autoritarisme. Ce long processus s’exprime aujourd’hui par des révoltes et révolutions
qu’il nous faut étudier à travers l’espace au sens large.
1.2. Les trois axes du projet scientifique
Depuis les premiers regroupements humains au néolithique, la ville s’est progressivement imposée
comme le mode de vie de la majorité de l’humanité. En 2005, et pour la première fois dans l'histoire
de celle-ci, la ville était le mode de vie de plus de la moitié de la population de la planète et le
phénomène va encore progresser au XXIème siècle. On estime que la population urbaine en Chine et
en Inde va passer de 25 % à 75 % d’urbains durant ce siècle, provoquant les plus gigantesques
migrations de l’histoire. Dans le monde arabe et musulman, la population est urbanisée à plus de
75% ; dans des pays comme Qatar ou Koweït, c’est même le cas de la quasi-totalité de la population.
Le clivage urbain/rural a disparu par l’intégration des campagnes dans des espaces polarisés par les
villes. Le rural « profond » est de plus en plus marginal. Il demeure dans les espaces périphériques :
les montagnes du pourtour méditerranéen, le Yémen, les steppes syriennes, mais l’essentiel de la
population « rurale » réside aujourd’hui dans des régions urbaines ou périurbaines au sens large.
De l’Atlantique à l’Océan Indien en passant par le Golfe, cette région est donc un important laboratoire
pour l’étude du phénomène urbain dans une perspective transdisciplinaire. Les premières villes de
l’histoire y sont apparues, les cités antiques s’y sont développées, l’islam a fait de la ville le lieu
d’épanouissement de sa civilisation ; la modernisation européenne a transformé ces villes
« orientales » sur le plan urbanistique, mais elles ont conservé leur mode de fonctionnement hérité. La
mondialisation s’appuie sur des métropoles puissantes, capables d’intégrer les territoires dans
l’espace économique mondialisé, réceptacles de marchandises, de flux, d’hommes et d’informations.
Ces métropoles fonctionnent comme des hubs, des territoires à part, qui possèdent un territoire qui
n’est pas forcément contigu. Ces nouvelles formes d’organisation territoriale et urbaine s’opposent à
celles qui ont prévalu dans le cadre étatique précédent. On peut néanmoins se demander jusqu'à quel
point elles diffèrent fondamentalement des formes urbaines qui ont dominé sous l’Empire ottoman, et
même durant l’islam classique.
Si l’urbanisation et la métropolisation sont des phénomènes concomitants à la mondialisation, les
formes qu'elles prennent ne sont pas identiques dans toutes les régions du monde. La connaissance
de l’histoire, des sociétés et des cultures est indispensable pour comprendre les spécificités du
développement urbain passé et actuel. Le but de ce programme de recherche est de comprendre la
façon dont les villes et les sociétés urbaines évoluent et se transforment en référence aux processus
mondialisés et aux spécificités de l’aire culturelle arabe et musulmane. Interroger le passé pour mieux
comprendre le présent et croiser les disciplines pour explorer toutes les dimensions du monde urbain,
tels sont les objectifs méthodologiques de ce programme qui s’articule autour de trois axes :
- « villes et fondations », animé par Sylvia Chiffoleau, Saba Farès, Alexandrine Guérin, Marie-
Odile Rousset et Katia Zakharia.
- « villes et mobilisations », animé par Chérif Ferjani, Jean-François Legrain, Daniel Meier, Ali
Sheiban, Christian Velud.
- « villes et mondialisation », animé par Fabrice Balanche, Karine Bennafla, Thierry Boissière,
Jean-Claude David, Yves Gonzalez, Marc Lavergne, France Métral, Cyril Roussel et Salah
Trabelsi.
Les thèmes des chercheurs peuvent être sécants à plusieurs axes mais, pour plus de lisibilité, nous
les avons inscrits dans l’axe où ils étaient le plus investis.
1.2.1. Villes et fondations
L’objectif de cet axe est de comprendre les conditions de la fondation réelle, supposée et imaginaire
des villes, ainsi que leur morphologie, leur extension et leur évolution, depuis les débuts de l'époque
islamique. A l’heure de la refondation urbaine induite par la modernisation et la mondialisation, il
convient également de s’interroger sur les permanences culturelles constitutives de ces villes. Ce
programme de recherche abordera ces questionnements par des approches disciplinaires
complémentaires, rassemblant des spécialistes de l'écrit et des vestiges matériels.
Le thème de la fondation mythique, réelle ou imaginaire, des villes n'a que très rarement été abordé.
Le corpus des textes littéraires, des relations des chroniqueurs, géographes et historiens médiévaux
est d'une grande richesse et n'a encore que peu été exploité pour l'étude de cette question.
L'épigraphie permet d'appréhender la dimension antéislamique de la conception des mondes urbains
par les populations nomades. Ce matériau, confronté à l'observation des sociétés contemporaines qui
évoluent dans le même environnement, nourrira la réflexion comparative, dans une démarche
d'ethnoarchéologie.
L'étude de la morphologie de la ville, de l'évolution du tissu urbain, de sa transformation et de son
adaptation d'une période à l'autre sera envisagée à partir de l'analyse architecturale et archéologique
d'exemples concrets. L'un des objectifs principaux est d’analyser l'impact de la conquête arabo-
musulmane sur le paysage architectural, les systèmes défensifs, les activités industrielles, l'habitat, la
culture matérielle, etc. par une étude diachronique de l'urbanisme et des composantes urbaines.
1.2.1.1. Fondation mythique des villes (selon les auteurs du monde arabo-musulman
médiéval)
Cette recherche s'inscrit dans le volet "fondations mythiques" et de manière plus générale autour de la
représentation textuelle des villes ou des espaces urbains par opposition aux espaces décrits comme
naturels (qu'ils soient "apprivoisés" ou sauvages). Ce volet s'insère dans les thèmes de recherche du
GREMMO et du Labex IMU (Intelligence des Mondes Urbains). Le travail principal consiste à publier
une étude sur le traitement dans le Dictionnaire des pays (Mu'jam al-Buldân) de Yâqût (mort ca. 1229)
des récits des mythes fondateurs des villes dans le monde qui est le sien.
Le dictionnaire géographique de Yâqût (m. 626/1229) est l'un des ouvrages les plus célèbres dans
son domaine. À partir d'un dépouillement systématique des notices qu'il propose, un descriptif des
mythes de fondation des villes mentionnées sera établi. Il sera analysé et les références religieuses
qu'il met en jeu seront mises en lumière et commentées, notamment dans leurs ramifications
lointaines et, le cas échéant, non islamiques. L'ouvrage de Yâqût étant un texte charnière, seront
ensuite étudiées les occurrences des mêmes récits dans les principaux ouvrages antérieurs et leur
persistance dans les ouvrages postérieurs. Il s’agit d’un travail dont il convient d'indiquer dès à
présent qu'il ne pourra être réalique grâce à l'apport précieux des bibliothèques virtuelles. Ainsi,
seront mises en lumière la vie de ces récits mythiques et leurs transformations à travers les siècles.
Les liens de ces changements avec les grands courants idéologiques marquant les différentes
périodes concernées seront étudiés. Ce travail permettra d'esquisser, dans sa phase finale, une
typologie des récits islamiques en langue arabe des mythes de fondation des villes et de la mettre en
relation avec les récits de même type dans d'autres espaces culturels.
1.2.1.2. Les origines de la ville islamique
Ce thème de recherche étudie la représentation de la ville par les nomades, à l'époque antique et
aujourd'hui.
1.2.1.2.1. Fabrication des identités urbaines
Le gouvernement jordanien mise depuis 1996 sur le Wadi Ramm pour développer son tourisme,
première ressource économique du pays. La population, résidant encore en grande majorité dans le
désert, s'est installée dans le village en peu de temps pour profiter de la manne apportée par le
tourisme. Ce mode de vie a exposé la population à un nouveau modèle de société, celui des
représentants de l'État, citadins et celui des touristes occidentaux. Exclus au départ du débat par les
représentants locaux du gouvernement, ces nomades sédentarisés y ont été progressivement
impliqués grâce à une mobilisation de type tribal. Ils participent ainsi au veloppement urbain de
Ramm : construction des maisons fixes (habitat « immobile »), mise en place d'un réseau de
transport, accès aux informations (télévision, journaux) et aux communications (téléphones fixe et
cellulaire). Les habitants de Ramm ont ainsi adopté le mode de vie « sédentaire », mais sans
abandonner pour autant l'habitat traditionnel mobile (la tente : chaque maison contient, dans sa cour,
une tente). De plus, ils s'approprient l'espace urbain selon le mode de vie nomade : chaque quartier
est occupé par une famille, mais la ville est elle-même occupée par les membres d'une même tribu ou
par des familles qui ont demandé protection à la tribu dominante. Ce mode de vie contribue à
maintenir l'identité nomade dans un espace urbain dans lequel ses habitants sont appelés à vivre et
au développement duquel ils participent. Mais, en retour, ce mode de vie urbain influence celui des
nomades. Les deux modes s’entremêlent et la culture urbaine prend inévitablement le pas sur celle
des nomades. Afin d’éviter une désintégration totale de l’identité nomade, les parents veillent à
amener leurs enfants dans le désert, à ce qu’ils y séjournent, et à ce qu’ils y apprennent la vie du
désert. On observe ce phénomène dans d’autres villes de la péninsule arabique comme Riyadh. Si le
mode de vie sédentaire y a pris le pas sur la vie nomade, pourtant les anciens nomades y conservent
les symboles du mode de vie de leurs ancêtres en organisant les quartiers par familles, et en allant, à
la fin de la semaine, dans le désert (sous une tente climatisée !) où ils pratiquent la chasse.
1.2.1.2.2. dentarisation et extension
La création des villes (zone bâtie et planifiée) dans les régions côtières du Golfe arabo-persique est
relativement récente particulièrement dans l’émirat du Qatar (fin XVIIIe siècle - début XIXe siècle) et le
plus souvent sous influence extérieure (monde occidental, colonie et protectorat britanniques). Région
constituée de déserts en contact avec la mer, le Qatar révèle, après des investigations de terrain, une
série d’implantations datées de la période abbasside et plus spécifiquement une occupation restreinte
au seul IXe siècle.
La notion traditionnelle même de « ville » est à reconsidérer dans ce contexte particulier de population
sédentarisée ou en cours de sédentarisation : les structures bâties sont implantées dans des zones
vierges de toutes occupations antérieures et la durée d’occupation ne dépasse pas le siècle. Aucune
réoccupation postérieure n’est à signaler. L’organisation des maisons, des mosquées, des forteresses
et des caravansérails répartis dans une zone de 20 x 20 km en 6 sites bien définis montre une
maîtrise de l’occupation des terroirs indispensables à la survie tant physique qu’économique des
populations sédentarisées. C’est dans ce contexte particulier de territoire binaire - désert et mer que
l’ensemble des zonesties sont indissociables et forment un ensemble socio-économique cohérent :
espace domestique, monument religieux, centre du pouvoir, zone de commerce et d’échange.
Ce territoire binaire doit s'expertiser en prenant en compte le substrat géographique déterminant dans
l’implantation humaine de ces gions : le phénomène saisonnier (été/hiver), impliquant des phases
de nomadisation et de sédentarisation ainsi qu’une intendance des ressources alternant pâturage,
pêche et commerce.
L’étude des « villes du Golfe » dans le cas du Qatar est à considérer dans la perspective d’une
extension en satellite des territoires bâtis et donc en lien avec ses territoires socio-économiques, lien
d’inter-indépendance et de complémentarité. Le croisement des sources historiques écrites avec des
données archéologiques (prospection, fouille, typochronologies céramique et architecture) et la
comparaison avec le monde moderne et contemporain (ethnoarchéologie) seront les outils employés
lors de cette recherche que mène la Mission Archéologique Française au Qatar (MAFQa/MAEE).
L’ensemble de ces résultats participe activement au programme de conservation et de mise en valeur
du patrimoine au sein de la création de la galerie archéologique du futur Musée National de Doha.
1.2.1.2.3. Composantes urbaines : l'exemple de Qinnasrin
La mission archéologique franco-syrienne de Qinnasrin étudie les formes urbaines au Moyen-Orient
au début de l’époque islamique. L’un des buts du travail archéologique à Qinnasrin est d’étudier
l’évolution morphologique d’une ville de Syrie du Nord à l’époque islamique (VIIe-XIIe s.). Les
modalités de l’intégration des constructions antérieures, depuis l’époque hellénistique, la
réorganisation du système fensif, le veloppement des quartiers artisanaux et résidentiels sont au
cœur de cette recherche. Pour définir comment la ville antique a évolué au cours de la période
islamique, l’étude de l’urbanisme de Qinnasrin est effectuée par l’analyse simultanée des données
des textes, des prospections géophysiques, des photographies aériennes, des prospections et des
fouilles. La mission est conduite en collaboration avec la Direction nérale des Antiquités et Musées
de Syrie. Elle est financée par la fondation Max van Berchem et la Commission des fouilles et
recherches archéologiques du Ministère des Affaires Étrangères et Européennes.
Au cours des prochaines années, le programme insistera plus particulièrement sur deux types
d’implantations du début de l’époque islamique et leur rôle dans l'évolution du tissu urbain.
- La présence d'un édifice balnéaire, richement décoré, dans un quartier à l'extérieur de
l'enceinte urbaine, pose la question de la nature de l'occupation dans ce secteur au moment de la
transition Byzance / Islam et d'un changement d'affectation, d'industrielle à résidentielle.
- Le sommet de la montagne pourrait correspondre au lieu d’installation des premiers
musulmans dans la région. L’occupation de cette zone à l’écart de la ville byzantine, dans une position
dominante, est tout à fait comparable au dispositif adopté à Fustat, en Égypte, avec le quartier d’Istabl
Antar dominant l’ancienne cité de Babylone. La forteresse de Qinnasrin pourrait également s’inscrire
dans le mouvement de construction des places fortes (thughurs) dans la zone au contact avec
l’empire byzantin, sous Haroun al-Rashid. Il s'agit de l'un des très rares plus anciens exemples de
forteresse des débuts de l’époque islamique, jamais réoccupée après le Xe siècle.
1.2.2. Villes et mobilisations
Cet axe cherchera à identifier les tensions entre les processus de sécularisation et ceux de
remobilisation du religieux dans des phénomènes sociaux, politiques et culturels relevant de la vie
urbaine : les partis politiques, les ONG, les syndicats, les mouvements de jeunes, les mouvements
féministes, la production juridique, la création artistique (architecture, peinture, cinéma, théâtre,
médias, littératures), pour y déceler la part de sécularisation et d’opposition aux traditions religieuses
et la part de sollicitation de ces traditions en les réifiant ou en les réinventant.
1.2.2.1. Les transformations politiques
Le « printemps arabe » influence bien sûr fortement le contenu de cet axe car le changement politique
se concrétise désormais.
1.2.2.1.1. Le binôme modernité/tradition
Une première approche consiste à nous interroger sur le binôme Modernité/Tradition, élément
incontournable du discours savant sur le monde social, qui pourrait être considéré comme la matrice
du discours social des 15 dernières années. Or, indépendamment de l'objet de notre recherche qui
s'articule dans un premier temps autour de l'évolution des thématiques des discours intellectuels, la
relation entre ville et modernité, ville et mobilisations politiques et religieuses est étroite. Si le vocable
intellectuel au sens général ne peut être exclusivement conçu comme vocable « urbain », par contre
une certaine « fonction intellectuelle » est intimement liée à la ville et au développement urbain. C'est
cette fonction que nous visons dans l'analyse du champ intellectuel. L'époque moderne inscrit la
« fonction intellectuelle » dans une sphère d'activité relativement autonome, ou du moins tendant vers
l'autonomie. L'évolution du champ de la philosophie et des sciences sociales, de ses clivages, de sa
structure et de ses thématiques, est fortement imprégnée des logiques politiques et/ou religieuses. Ce
qui met ce champ d'activité très souvent au cœur de la mobilisation politique et des mouvements
collectifs.
1.2.2.1.2. La mobilisation politique en Palestine
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