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Mlle Hélène Clerq,
pédicure-podologue
au sein de la Maison médicale
de Bletterans
Qu’est-ce qui vous a attiré
dans ce type de structure plutôt
que dans un cabinet traditionnel ?
- La proximité des médecins et des autres
professionnels de santé est quelque chose
de rassurant, de les savoir proches en cas
de problèmes ou pour des questions que
l’on peut se poser. Ils sont disponibles
rapidement pour venir voir le patient, c’est
un avantage pour lui et c’est aussi rassu-
rant pour moi.
Jusqu’où va la collaboration
avec les autres professionnels
au sein de la maison de Bletterans?
- Il y a une organisation commune. Dans le
cas d’un patient diabétique par exemple,
il y a un suivi, d’une part, auprès du méde-
cin, et également auprès de nous. On a
mis en place des évaluations et on trans-
met au médecin un dossier incluant ces
évaluations réalisées pendant les soins.
Quel est l’objectif de cette évaluation?
- Une meilleure prise en charge du patient,
aussi une manière d’être réactif, d’agir
vite en cas de problème, et également
une action de prévention, par exemple en
cas d’infection, où le nombre de jours per-
dus est toujours en trop.
Avez-vous également des échanges
avec d’autres professionnels
que les médecins ?
- Oui, avec les infirmières, et les kinésithé-
rapeutes dans le cadre du suivi des
semelles orthopédiques. Quand on remet
des semelles à un patient, on ne le revoit
que quelques temps après. S’il y a déjà un
suivi par le kiné, on a un rendu plus rapide
de l’action de l’orthèse sur le patient.
Avez-vous l’impression de faire
partie d’un «réseau de soins»
au service de la prise en charge
globale des patients?
- Oui, et cela vient surtout des patients
eux-mêmes qui se sentent réellement pris
en charge, ils sentent que les différents
praticiens sont «reliés», que le dialogue
passera aussi directement entre nous.
Quels sont les avantages
que représente cette structure
pour votre exercice professionnel?
-Je pense que si j’avais débuté mon acti-
vité en dans un cabinet «isolé », je n’aurais
déjà pas eu l’avantage de l’accès aux
secrétaires, au personnel de ménage,
tout ce qui vient du « bâtiment ». Et d’autre
part, m’installer ailleurs dans Bletterans
n’aurait été d’aucun intérêt puisque les
patients venaient pour la plupart à la
maison médicale.
Cela vous aurait-il coûté plus cher
ou moins cher de racheter
un cabinet traditionnel?
- Le coût de patientèle aurait été le
même, et il n’y aurait effectivement pas eu
les frais supplémentaires liés au bâtiment.
Mais ainsi, je suis aussi associée de la SCI
du bâtiment, comme chaque profession-
nel qui exerce ici. On se sent concerné par
la vie du bâtiment.
Mme Moret-Chalumeau,
pédicure-podologue au sein de
la Maison médicale de Bletterans
Quand vous êtes-vous installée
au sein de la Maison médicale?
- Je suis installée ici depuis la création de la
maison, il y a 7 ans. J’exerce depuis 26 ans
et j’étais auparavant déjà sur Bletterans.
Comment vous êtes-vous engagée
dans ce projet?
- J’exerçais déjà à Bletterans, avec une
clientèle bien amorcée. Le point de départ
était un problème de locaux. J’avais une
associée qui travaillait avec moi, à mi-
temps. Nous étions installées dans un
cabinet partagé avec trois kinés qui, eux
aussi, commençaient à manquer de
place. L’extension n’était pas possible
dans nos locaux. Ce projet de maison
médicale a commencé à germer dans la
tête de médecins du village voisin, les
idées se sont rejointes et l’on a abouti à la
création de la maison médicale.
Combien étiez-vous
à l’origine de projet?
- Nous étions une dizaine au départ, il y a
7 ans, et nous exerçons aujourd’hui à 19,
dont 10 médicaux et 9 paramédicaux.
Tous disposent du même statut au sein de
la maison médicale, à savoir que nous
sommes tous obligatoirement membres
de la SCI, professionnels indépendants,
exerçant au sein d’une SCM.
Avez-vous le sentiment de constituer
un «réseau de soins», de prise
en charge des patients, notamment
au regard de la manière dont
vous exerciez auparavant?
- Oui, la proximité des médicaux et para-
médicaux infirmiers et kinés facilite les
échanges au sujet de nos patients : j’ou-
vre ma porte et à côté il y a un kiné, un
peu plus loin un médecin… C’est vrai que
dès qu’il y a un souci, une urgence, c’est
très facile. On n’a pas besoin de courriers
entre professionnels, pour avertir le méde-
cin d’un bilan podologique par exemple.
Et c’est aussi, dans l’autre sens, les
médecins qui viennent frapper à notre
porte, demander un avis sur un patient
qui est dans leur cabinet, de façon tout à
fait simple.
Quels avantages représente le fait
d’exercer dans une telle structure ?
- En termes d’horaires, cela n’a pas beau-
coup changé. En termes d’organisation,
par contre, c’est vrai qu’auparavant on ne
pouvait pas bénéficier d’un secrétariat
commun, même à 7. Depuis notre arrivée
dans la maison médicale, la clientèle a
augmenté. Mon associée de l’époque qui
était à mi-temps, a été remplacée par
Hélène qui est à plein-temps. Nous pou-
vons bénéficier de la prise en charge des
rendez-vous par la secrétaire, ce qui est
un vrai confort de travail. Les rendez-vous
sont coordonnés, c’est-à-dire qu’à la
suite d’une séance de kiné, il peut y avoir
un soin de pédicurie programmé ou une
consultation de médecin, et vice-versa.
Quel est le retour des patients
sur cette organisation?
- Il est plutôt positif, on a de très bons
retours sur ce côté pratique de pouvoir
grouper des rendez-vous. Ils apprécient
aussi d’avoir un médecin accessible le
samedi et le dimanche, en cas d’urgence.
Le fait d’exercer à deux
dans cette maison médicale
plutôt que dans un cabinet
change-t’il les choses?
Oui, forcément, cela bouscule les habitu-
des. Parce que 19 personnes, avec des
caractères différents, des personnalités
différentes, c’est aussi une remise en
question, il faut s’ouvrir à chacun avec ce
qu’il est. C’est aussi bien professionnel
que personnel. J’ai mis un peu de temps à
m’adapter à cela, mais je ne le regrette
pas!
Parmi elles, la Maison médicale de
Bletterans, installée dans le Jura,
est une des premières maisons
pluridisciplinaires à avoir vu le jour en
Franche-Comté. Créée en 2001 par
7 professionnels de santé en exercice,
elle regroupe désormais 22 professionnels
dont 7 médecins généralistes, 4 kinési-
thérapeutes, 5 infirmières et infirmiers,
2 podologues (voir interviews ci-après),
une diététicienne, un orthophoniste et
une psychologue clinicienne, pour un
bassin d’environ 20000 habitants et une
file active annuelle de 135000 patients1.
Elle emploie également une dizaine de
salariés complémentaires. Le résultat:
des plannings plus souples pour certains,
compatibles avec la permanence et la
continuité des soins, des échanges sur
les pratiques, un meilleur suivi des
patients, des actions de prévention plus
efficaces. Ouverte 7 jours sur 7, la
Maison médicale de Bletterans assure
ainsi une permanence médicale les
samedis et dimanches, capable de
prendre en charge certaines urgences
dans deux salles dédiées. Répondant
au Bulletin de l’Ordre des médecins,
le Dr Jean-Michel Mazué, généraliste
et responsable de la structure déclare:
«le temps gagné sur les actes
administratifs nous permet de nous
concentrer sur l’activité de soins, tout en
ne travaillant que 38 heures par semaine
grâce à un système de roulement».
Un projet de soins commun
Pour Arnaud Blessemaille2, médecin
généraliste et membre fondateur de la
Maison de santé de Baumes les Dames,
également en Franche-Comté, «le point
important est que les professionnels
ne s’associent pas seulement pour être
regroupés dans un même bâtiment,
pour partager des moyens: ils partagent
un projet de soins commun centré autour
du patient». Concertation et disponibilité:
deux maîtres-mots que les professionnels
exerçant au sein de cette structure
s’attachent à mettre en pratique au
service des patients, en assurant, par
exemple, une séance de kiné respiratoire
dans les minutes qui suivent le diagnostic
d’une bronchiolite chez un enfant.
«C’est un réseau de soins, mais avec
une forme beaucoup plus simple»
reprend Arnaud Blessemaille, «tous
ses membres sont au même endroit».
Cette entraide est également très
formatrice: «Bien souvent, j’apprends
quelque chose en demandant le conseil
d’un spécialiste, médecin ou pas. (…).
Ça marche dans les deux sens: nous
progressons ensemble. Cette entraide
ne se limite pas au cas par cas: nous
organisons des réunions où nous
nous formons mutuellement».
Des actions de santé publique
Un rapport parlementaire3du sénateur
Jean-Marc Juilhard sur l’offre de soins,
publié en octobre 2007, reconnaît
l’innovation apportée par ces structures
nouvelles «qui tient à leurs modalités de
fonctionnement, à l’existence d’un projet
médical commun, ainsi qu’à l’association
d’autres acteurs extérieurs au champ
sanitaire». Le rapport plaide également
pour «une sécurisation de leur cadre
juridique, une harmonisation des aides
dont elles bénéficient et l’avènement
de modes de rémunération spécifiques
pour leur permettre de mener des actions
de santé publique». Pour Arnaud
Blessemaille «Le point important n’est
pas tant de fournir un bâtiment que de
pérenniser un projet de santé, c’est-à-dire
d’aider la maison à fonctionner sur le long
terme. (…) Nous avons besoin d’être
rémunéré pour pouvoir développer
une véritable politique d’amélioration
de la qualité des soins, pour salarier
une personne chargée de la coordination.
Notre but n’est pas de gagner plus
d’argent, mais ces initiatives de santé
publique coûtent cher. »
en régions<
6Repères JANVIER 2009
en régions
<
JANVIER 2009 Repères 7
1. source APM / Dépêche du 16 septembre 2008
2. In La revue du praticien, médecine générale, n°809, 12 novembre 2008
3. Rapport de Jean-Marc Juilhard, sénateur du Puy-de-Dôme «offre de soins:
comment réduire la fracture territoriale?» sur www.senat.fr
<
interviews
D.R. D.R.
De plus en plus de professionnels de santé s’unissent pour exercer
conjointement au sein de structures indépendantes et autonomes:
les maisons pluridisciplinaires de santé, parfois également appelées
maisons médicales. Encore souvent portés par des médecins, ces
«nouveaux lieux de la santé » répondent à deux attentes partagées
par la plupart des professionnels et encouragées par les politiques:
offrir aux patients une prise en charge globale et coordonnée et
mutualiser les tâches professionnelles et administratives.
MAISONS
PLURIDISCIPLINAIRES,
UN SUCCÈS CROISSANT