1. Principe de la mesure
Le principe de la mesure de pression est relativement sim-
ple. Le signal de pression est recueilli au niveau d’une artère
par l’intermédiaire d’un cathéter et transmis au capteur par une
tubulure remplie de sérum physiologique. Le capteur lui-même
est constitué par une membrane déformable sur laquelle est
fixé un pont de Weatstone dont toute déformation modifie la
résistance électrique et, par-là, l’intensité du courant qui le tra-
verse. Ainsi, le signal de pression, par l’intermédiaire des dé-
formations de la membrane qu’il génère, est converti en signal
électrique, transmis au moniteur où il est converti de nouveau
en signal analogique ou numérique.
La plupart des constructeurs assurent une parfaite linéarité
de réponse entre signal de pression et signal électrique généré
par le capteur, et ce dans une gamme de fréquence très large-
ment supérieure aux fréquences rencontrées en physiologie hu-
maine. Il s’ensuit une parfaite fiabilité des capteurs proprement
dits, membrane et pont de Weatstone.
Il n’en est pas de même du système intermédiaire constitué
de la tubulure, des dispositifs de prélèvement et des accessoires
éventuellement interposés dont l’ensemble possède des carac-
téristiques biomécaniques très différentes d’un constructeur à
l’autre.
Ces caractéristiques biomécaniques confèrent au système in-
termédiaire des propriétés viscoélastiques susceptibles de mo-
difier, parfois considérablement à l’échelle des critères clini-
ques exigés, la valeur quantitative de la pression artérielle
ainsi que la morphologie de la courbe, morphologie qui n’est
pas sans intérêt dans l’analyse d’une situation hémodynamique
donnée [3,4].
Typiquement, le capteur de pression utilisé en soins inten-
sifs est un système dynamique de second ordre. Grossièrement,
on peut le représenter par un tube déformable empli de liquide
mobilisé par une différence de pression entre les deux extrémi-
tés du tube. La différence de pression entre les deux points de
ce tube obéit à une équation de mouvement qui est une équa-
tion différentielle d’énième ordre du type
dP ¼αdV þα2dV=dt þα3d2V=αt2þ:::::::: þαndnV=dtn
où P est la pression, V le volume, d
n
V/dt
n
la dérivée énième de
V en fonction du temps.
Dans un système de deuxième ordre, seuls les deux pre-
miers termes de cette équation différentielle interviennent. Il
s’ensuit que l’équation de mouvement du liquide mobilisé dans
le tube sous l’action d’une différence de pression devient :
ΔP¼αΔVþα2ΔV=dt
où αcaractérise l’élastance (E) du système, α
2
la résistance (R)
àl’écoulement et ΔV/dt le débit de liquide.
Ainsi, la perte de charge dans le système dépend de l’élas-
tance et de la résistance de celui-ci, ainsi que du débit de li-
quide et du volume stocké. Le comportement d’un tel système,
lorsqu’on lui applique ou relâche brutalement une contrainte,
est analogue au comportement d’une masse, reliée à un point
fixe par un ressort, d’une part, et à un disque plongé dans un
liquide possédant une viscosité donnée, d’autre part. Le sys-
tème va osciller avec une certaine fréquence, dite fréquence
naturelle (F
n
), et avec une amplitude d’oscillation décroissante
dans le temps (Fig. 1)[5]. Ces caractéristiques (fréquence d’os-
cillations et amplitude de décroissance) dépendent de la raideur
du ressort de la masse M et de la viscosité du liquide (résis-
tance au déplacement). On observe la même dynamique de re-
laxation pour le capteur de pression :
●la raideur du système correspond à l’élastance de l’ensemble
tubulure, accessoires, et membrane du capteur ;
●la masse, à celle de la masse de liquide déplacée ;
●la viscosité, à la résistance au déplacement du liquide.
Toutes ces caractéristiques dépendent de l’architecture du
système, de la longueur et de la section des différents consti-
tuants ainsi que des caractéristiques biomécaniques des maté-
riaux industriels utilisés (type de polymérisation, épaisseur des
matériaux, etc.).
2. Comportement d’un tel système lorsqu’on lui applique
une pression sinusoïdale de fréquence croissante
Si l’on enregistre un signal de pression périodique sinusoï-
dal de fréquence croissante généré par un générateur de pres-
sion, on obtient une réponse qui dans une certaine limite de
fréquence du signal sera adéquate avec un rapport amplitude
réponse/amplitude signal égal à 1. Au-delà d’une valeur seuil
de fréquence, l’amplitude de la réponse est amplifiée par rap-
port à celle du signal (Fig. 2), le maximum d’amplification se
produisant pour une fréquence égale à la fréquence naturelle du
capteur. La fréquence du signal à partir de laquelle la réponse
est amplifiée dépend de la fréquence naturelle du système, la
valeur de l’amplification pour ces fréquences dépend d’un co-
efficient appelé coefficient de damping (ζ= zéta) (Fig. 3).
Fig. 1. Modèle de comportement d’un système de second ordre.
β0¼R=2Metωd¼½S=MðR=2MÞ21:
J.-F. Cochard / Réanimation 15 (2006) 103–108104