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« Le tabac, mortel sous
toutes ses formes »
Tel était le thème retenu, en 2006, par l'OMS pour la Journée mon-
diale sans tabac.
En cette fin d'année, à l'heure va se mettre en place l'interdic-
tion de fumer dans les lieux publics, il n'est pas inutile de pré-
senter quelques études qui rappellent et complètent ce qu'est
cette réalité mortelle du tabac : une réalité polymorphe, au
niveau des morbidités (cancers, consommation problématique
d'alcool associée,...), des populations touchées (adolescents,
jeunes adultes, femmes,...), des modes de consommation
(même une consommation occasionnelle est dangereuse ;
tout comme les fumées apparemment moins agressives pas-
sées par l'eau du narguilé ou aromatisées comme les « ciga-
rettes bonbons »).
Des mesures comme les hausses de prix de 2003-2004 ont,
entre autres, incité un tiers des 17 ans à diminuer leur consom-
mation. Les campagnes, notamment celles de l'INPES, contri-
buent également à la dénormalisation du tabagisme. Et n'ou-
blions pas les actions de proximité menées par les acteurs de
terrain, actions dont la journée des Assises de la prévention a
montré aussi bien la variété que la nécessité.
Le décret ouvre un nouveau cadre et de nouvelles pers-
pectives pour la lutte contre le tabagisme. Toutes les
actions de communication et toutes les actions de proxi-
mité sont plus que jamais à l'ordre du jour pour que cha-
cun dans la population contribue à la réussite de sa mise
en application.
Jean-Louis Wilquin
Chargé d’études Tabac, INPES
Actualités
LETTRE MENSUELLE D’INFORMATIONS
SUR LES EFFETS DU TABAGISME
ET LE SEVRAGE TABAGIQUE
Décembre 2006 NUMÉRO 72
ACTUALITÉS
SCIENTIFIQUES
2CANCÉROLOGIE
Le tabagisme occasionnel aussi
provoque des cancers
3ADDICTOLOGIE
Le tabagisme augmente
le risque de troubles liés
à la consommation d’alcool
chez les jeunes
4GYNÉCOLOGIE
Le tabac favorise le cancer
du col de l’utérus
4ENTRETIEN
AVEC SYLVIA FRANCESCHI
INITIATIVES
6MODES DE CONSOMMATION
Narguilé et chicha : nouvelles
modes, nouveaux dangers
7JEUNES ET TABAC
Cigarettes « bonbon » :
le « péril jeune »
REPÈRES
7Tabagisme des adolescents
en France et récentes hausses
des prix
INITIATIVES INPES
8RENCONTRE DU 8 DÉCEMBRE 2006
Prévention du tabagisme :
l’efficacité de l’action auprès
des populations
Les messages de prévention contre l’abus
du tabac doivent s’adresser à tous les
types de fumeurs : le tabagisme, même
occasionnel, entraîne un sur-risque de
cancers. C’est la principale conclusion d’une
récente étude danoise (1) réalisée à partir des
données d’EPIC (European Prospective Investi-
gation into Cancer and Nutrition).
La majorité des études s’intéressent aux fumeurs
quotidiens. Les fumeurs occasionnels en sont
exclus ; ils sont même souvent classés avec les
non-fumeurs, dans une population qui sert de
base de comparaison. Quelques rares essais ont
toutefois déjà montré que le tabagisme occasion-
gisme occasionnel sur la survenue de cancers sta-
tistiquement corrélés au tabagisme. La population
étudiée est une sous-population de la cohorte
EPIC, vaste essai prospectif multicentrique incluant
500 000 personnes réparties dans 10 pays euro-
péens, et étudie les rapports entre l’alimentation
et le cancer. L’équipe de B. Bjerregaard s’est inté-
ressée à 158 488 sujets vivant en Italie, Pays-Bas,
Allemagne, Suède et Norvège, pour lesquels des
données précises sur le tabagisme occasionnel et
le suivi des cancers ont été recueillies de 1992 à
2004. Étaient considérés comme « occasion-
nels » les fumeurs qui fument par intermittence
mais jamais quotidiennement ; « quotidiens » ceux
qui fument chaque jour ; « anciens quotidiens » ceux
qui fumaient chaque jour mais qui ne fument plus
nel augmente la mortalité
totale, celle due aux cancers ou
aux maladies cardiovasculai-
res, et qu’il entraîne une dimi-
nution du poids des nouveau-
nés de mères fumeuses
occasionnelles.
Cette nouvelle étude s’est
donc donné comme objectif
d’évaluer l’influence du taba-
ACTUALITÉS SCIENTIFIQUES
2IACTUALITÉS TABAC l N° 72 l DÉCEMBRE 2006 l
CANCÉROLOGIE
Le tabagisme occasionnel aussi provoque
des cancers
Le fumeur
« intermittent »
n’échappe pas
aux dangers
du tabagisme
Référence
1. Bjerregaard BK, et al. The effect of occasional
smoking on smoking-related cancers: in the European
Prospective Investigation into Cancer and Nutrition
(EPIC). Cancer Causes Control 2006;17:1305-9.
En matière de risque lié au tabac, la simple
distinction « fumeurs » / « non fumeurs »
est insuffisante
CE QU’IL FAUT RETENIR
que par intermittence lors de l’inclusion ;
« anciens fumeurs » ceux qui ont arrêté le taba-
gisme au moment de l’entrée dans l’étude ; « non
fumeurs » ceux qui ne fument pas et n’ont jamais
fumé. Le suivi moyen a été de 5,3 ans.
Résultats :
780 cas de cancers liés au tabac ont été dia-
gnostiqués durant l’étude sur l’ensemble de la
population étudiée ;
– les fumeurs occasionnels ont un risque plus
élevé mais non significatif de développer un
cancer lié au tabac que les non-fumeurs ;
l’écart est également plus élevé pour les
fumeurs « anciens quotidiens » associés aux
« quotidiens » quand ils sont comparés aux seuls
« non-fumeurs » que lorsqu’ils le sont aux « non-
fumeurs » associés aux « occasionnels ».
Ces résultats sont certes à confirmer. Cepen-
dant, ils soulignent :
– l’importance de bien déterminer la popula-
tion étudiée et la population de référence
(la simple distinction « fumeurs » ou « non-
fumeurs » est trop limitante) ;
la nécessité de cibler tous les fumeurs lors des
campagnes anti-tabac, notamment les adoles-
cents chez qui le tabagisme occasionnel est un
indicateur prédictif fort d’une consommation
quotidienne ultérieure.
ACTUALITÉS SCIENTIFIQUES
3IACTUALITÉS TABAC l N° 72 l DÉCEMBRE 2006 l
retenus, tous largement étayés de données
socioéconomiques et sur l’usage du tabac et de
l’alcool.
En ce qui concerne la consommation de tabac,
les jeunes gens ont été répartis en 3 sous grou-
pes : les « non fumeurs » (n’ayant jamais
fumé, n = 44 009) ; les « fumeurs expérimen-
taux » (un maximum de 100 cigarettes déjà
fumées, n = 19 442) ; les « fumeurs » (plus de
100 cigarettes déjà fumées, n = 11385). Les
anciens fumeurs ayant fumé plus de 100 ciga-
rettes mais ayant arrêté depuis plus d’un an
ont été exclus.
La consommation d’alcool a été évaluée sur les
30 jours précédant l’interrogation. Des sous-
groupes ont été constitués selon la consomma-
tion : 40 % pour les plus petits consommateurs
(de 1 à 8 verres), et 3 groupes égaux pour les
autres (de 9 à 20 verres, de 21 à 50 et plus de 50).
Les consommateurs de tabac sont sou-
vent des consommateurs d’alcool et vice
versa. Certains aspects de cette relation
restent cependant mal connus. Chez les
fumeurs, les troubles liés à la consommation
d'alcool sont-ils uniquement attribuables à des
quantités consommées plus élevées ? À con-
sommation égale, les fumeurs n’ont-ils pas plu-
tôt une vulnérabilité supérieure à celle des non-
fumeurs? Enfin, le tabagisme du jeune serait-il
un facteur prédictif de troubles liés à la consom-
mation d’alcool ? Richard Grucza et ses collabo-
rateurs ont analysé les données recueillies de
2002 et 2004 auprès de 135 910 adolescents
et jeunes adultes américains
âgés de 12 à 20 ans inclus
dans l’enquête nationale
sur les drogues et la santé
(National Survey on Drug
Use and Heath)(1). 74 836
dossiers ont finalement été
ADDICTOLOGIE
Le tabagisme augmente le risque de troubles
liés à la consommation d’alcool chez les jeunes
Le
développement
du cerveau
Référence
1. Grucza RA, et al. Cigarette smoking and the risk
for alcohol use disorders among adolescent drinkers.
Alcohol Clin Exp Res 2006 ; 30:2046-54.
Un risque multiplié par 4 par rapport
aux jamais fumeurs
Et par 2 par rapport aux expérimentateurs
CE QU’IL FAUT RETENIR
Résultats :
Les fumeurs ont rapporté, pour les 30 derniers
jours, des consommations d'alcool supérieures
à celles des expérimentateurs et des non-
fumeurs. Parmi ceux ayant consommé de l'al-
cool dans les 30 derniers jours, les fumeurs pré-
sentent 4 fois plus de troubles liés à la
consommation d'alcool dans les 12 derniers
mois, et les expérimentateurs 2 fois plus, que
les non fumeurs. Le risque est d'autant plus éle-
vé que le fumeur est jeune, et ce même pour
des consommations d'alcool pas très élevées.
La question est de savoir si le tabagisme adoles-
cent est une cause de cette plus grande vulnéra-
bilité, ou bien s'il est un indicateur d'une vulné-
rabilité préexistante (génétique ou autre). Les
résultats de cette étude suggèrent que la com-
préhension du rôle du tabagisme dans la dépen-
dance à l'alcool et à d'autres substances pourrait
apporter un bénéfice considérable en termes de
santé publique. Et si l'influence de la nicotine sur
les troubles liés à la consommation d'alcool s'ex-
pliquait par un effet pharmacologique direct sur
le développement du cerveau, un nouveau mes-
sage pourrait être ajouté aux programmes d'é-
ducation à la santé pour les jeunes : le tabagis-
me adolescent fait courir au cerveau des risques
spécifiques qui viennent s'ajouter aux effets
délétères du tabac déjà connus sur la santé.
Une grande étude cas-témoins menée
en Suède confirme clairement la rela-
tion entre le tabagisme et la surve-
nue du cancer du col de l’utérus.
Cette implication défavorable du tabac dans ce
cancer féminin était déjà connue grâce à
plusieurs études épidémiologiques conduites
depuis les années 1980, de taille et de métho-
dologie plus modestes.
Les auteurs ont tout d’abord considéré la tota-
lité des 146 104 femmes d’un des comtés sué-
dois, le comté d’Upsalla, ayant participé à un
dépistage cytologique du cancer du col entre
1969 et 1995. L’ensemble des frottis cor-
respondants avait été conservé dans l’hôpital
universitaire centralisateur, pour d’éventuels
contrôles et analyses supplémentaires. Les
105 760 femmes suédoises faisant partie de
la cohorte finalement étudiée se caracté-
risaient par : un premier frottis normal, une
naissance en Suède, et un âge à l’entrée du
dépistage de moins de 50 ans. De 1969 à
1995, 499 femmes ont developpé un cancer
in situ, non invasif. Elles ont été comparées à
autant de femmes témoins. Les paramètres
étudiés concernaient :
– le mode et les habitudes de consommation
tabagique depuis le premierrfrottis ;
le statut des femmes vis-à-vis du papillomavi-
rus (HPV) de type 16, responsable de la plu-
part des cancers du col utérin. Sa détection et sa
quantification ont été faites par la recherche et
le dosage du génome de ce virus (ADN-HPV16)
après traitement spécifique des lames de frottis.
ACTUALITÉS SCIENTIFIQUES
4IACTUALITÉS TABAC l N° 72 l DÉCEMBRE 2006 l
GYNÉCOLOGIE
Le tabac favorise le cancer du col
de l’utérus
Une raison de plus pour ne pas fumer…
Fumer multiplie environ par 2 le risque de
cancer du col de l’utérus. Le mécanisme
physiopathologique exact de cette interaction
reste incompris. Il semblerait que les agents carci-
nogènes contenus dans le tabac puissent atteindre
et se concentrer dans la zone du col utérin, à l’instar
de ce qui se passe avec d’autres organes comme le
poumon, la vessie, le foie ou l’estomac. Ces mêmes
agents interagiraient avec le papillomavirus, prin-
cipal cause du cancer du col utérin.
Le tabagisme est associé au carcinome épider-
moïde du cancer du col, le plus fréquent des types
histologiques de cancers du col dans les pays occi-
dentaux. À l’arrêt du tabagisme, le risque de can-
cer diminue pour rejoindre après quelques années
celui des femmes n’ayant jamais fumé. L’augmen-
tation du risque de cancer du col est une raison
supplémentaire pour ne jamais commencer à
fumer ou stopper au plus vite cette dangereuse
habitude...
ENTRETIEN
Sylvia
Franceschi
CIRC, Lyon
TABAC ET VACCIN
Ilexiste deux vaccins contre le papillomavirus humain :
l’un vient tout juste d’être commercialisé en France,
l’autre est en cours d’homologation. Tous deux ont une
action préventive : ils évitent l’introduction des
papillomavirus les plus fréquemment responsables
de cancers du col (70 à 80 % des cas). À l’heure de la
mise à disposition de ces vaccins anti-papillomavirus,
dits « vaccins contre le cancer du col », le frottis
de dépistage reste néanmoins d’actualité, tout comme
l’arrêt du tabac chez les fumeuses.
ACTUALITÉS SCIENTIFIQUES
5IACTUALITÉS TABAC l N° 72 l DÉCEMBRE 2006 l
Les résultats finaux portent sur 738 femmes,
parmi lesquelles 375 ayant une lésion du col et
363 témoins. L’âge moyen du premier frottis
est de 25 ans, le délai moyen de survenue d’u-
ne lésion cytologique est de 9 ans. Le risque de
cancer augmente significativement en cas de
contraception orale, chez les femmes ayant
1 ou 2 enfants, et avec le nombre de partenai-
res sexuels.
Tout d’abord, l’étude retrouve un lien fort entre
la présence du HPV-16 et la survenue d’un can-
cer in situ. Les femmes infectées par le papillo-
mavirus à l’époque de leur premier frottis ont
globalement un risque de cancer in situ 8 fois
plus élevé en comparaison des femmes non por-
teuses du virus ; une charge virale élevée multi-
plie le risque par 11 et une charge basse de 5,5
par rapport à l’absence de ce virus.
Ensuite, l’étude confirme l’impact négatif du tabac
dans le développement des cancers du col utérin.
Un tabagisme habituel lors du premier frottis
confère un sur-risque de 70 % pour le cancer in
situ comparé à l’absence de tout tabagisme.
HISTOIRE NATURELLE DES HPV (3)
Les papillomavirus (HPV) sont des virus très répandus.
On en connaît 120 types dont une trentaine oncogènes.
Ils sont responsables de cancers du col de l’utérus, mais
aussi de la vulve et de la verge ; certains sont à l’origine
des condylomes acuminés (tumeurs virales situées dans
la sphère ano-génitale).
Les infections à HPV sont les infections sexuellement
transmissibles les plus fréquentes. Au moins 70%
des femmes contractent un HPV durant leur vie, le plus
souvent lors des premiers rapports sexuels.
Elles l’éliment spontanément dans 90% des cas au bout
de quelques mois. Dans 10% des cas, le virus entre dans
les cellules de l’épithélium du col de l’utérus et y
prolifère, entraînant des transformations cellulaires
délétères. Cette persistance virale, favorisée par le tabac,
expose au développement de lésions précancéreuses.
Celles-ci peuvent évoluer vers la guérison spontanée ou au
contraire vers le stade de cancer, processus qui prend
environ 10 à 20 ans.
Références
Enfin, l’étude suggère une synergie précoce
entre l’effet du tabac et la présence du
papillomavirus de type16. Les fumeuses infec-
tées au premier frottis ont 14 fois plus de
lésions de cancer du col que les fumeuses non
infectées. Le risque de cancer augmente avec
la charge virale : il est multiplié jusqu’à 27
chez les fumeuses infectées. Une haute
concentration de virus a moins d’impact chez
les non-fumeuses : elle n’augmente le risque de
cancer « que » de 6 fois. Il existe bien une rela-
tion significative entre la durée du tabagisme
et la présence de l’infection d’une part et le
développement du cancer d’autre part.
Ces données doivent être confirmées par des
études complémentaires, menées à plus
grande échelle, notamment pour des types
différents de papillomavirus.
CANCER DU COL DE L’UTÉRUS :
quelques chiffres (2)
Dans le monde, le cancer
du col de l’utérus est le 2ecancer
féminin : 493 000 nouveaux cas
et 274 000 décès par an
En France, le cancer du col est
le 8ecancer féminin : 3 387 cas
estimés en 2000
1.Gunnel AS, et al. Synergy between Cigarette
Smoking and Human Papillomavirus Type 16 in
Cervical Cancer In situ Development. Cancer
Epidemiol Biomarkers Prev 2006;15:2141-7.
2. Duport N. Données épidémiologiques sur le
cancer du col de l’utérus, InVS, octobre 2006
http://www.invs.sante.fr/publications/2006/
cancer_col_uterus_connaissances/cancer_col_uterus_%
20connaissances.pdf
3. Mougin C, et al. Histoire naturelle des
papillomavirus. Rev Prat 2006;56:1883-9.
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