Étude des communautés végétales, de la flore et de l’entomofaune Tome IV : Entomofaune des terrasses alluviales (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères) 2015 Conservatoire Botanique National Conservatoire botanique national de Bailleul en partenariat avec le Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie B A I L L E U L Tome IV – Entomofaune des terrasses alluviales de la Seine (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères) Activités Coordination et validation scientifique Noms, fonctions Adrien SIMON, Chargé de projets faune, Emmanuel VOCHELET, Coordinateur scientifique Emmanuel MACE, Chargé d’études faune, Inventaires naturalistes Matthieu LORTHIOIS, Chargé de missions faune, Adrien SIMON, Chargé de projets faune, Laurent PALUSSIERE. Chargé d’études faune. Emmanuel MACE, Chargé d’études faune, Rédaction de l’étude Adrien SIMON, Chargé de projets faune, Matthieu LORTHIOIS, Chargé de missions faune Cartographie / SIG Charles BOUTEILLER, Chargé de missions SIG, Matthieu LORTHIOIS, chargé de mission faune Relecture Emmanuel VOCHELET, Coordinateur scientifique, Adrien SIMON, Chargé de projets faune Référence bibliographique intégrale à citer : SIMON A., LORTHIOIS M., MACÉ E. 2015 – Les terrasses alluviales de la Seine normande - Étude des communautés végétales, de la flore et de l’entomofaune -Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Saint-Étienne-du-Rouvray. 61 p. Photographies de la couverture : Friche sableuse, secteur de Courcelles-sur-Seine, « abbaye de Beau bec » (CENHN, E.MACE) ; Mélitée du plantain (Melitaea cinxia), Bernières sur Seine, « les Fondriaux » (CENHN, E.MACE) ; Lande à genêts sur sables, secteur de Courcelles-surSeine, « abbaye de Beau bec » » (CENHN, E.MACE). Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 1 SOMMAIRE Tome IV – Entomofaune des terrasses alluviales de la Seine (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères) Introduction...................................................................................................................................... 4 1 Méthodologie d’inventaire de la faune et cartographie ............................................................ 5 1.1 Territoire étudié pour l’entomofaune ............................................................................... 7 1.2 Choix des groupes étudiés ................................................................................................. 7 1.2.1 Notion d’espèces bio-indicatrices ................................................................................... 7 1.2.2 Les groupes faunistiques retenus ................................................................................... 7 1.3 Méthodologie d’inventaire de terrain ............................................................................. 12 1.3.1 Conditions météorologiques requises .......................................................................... 12 1.3.2 Calendrier des prospections ......................................................................................... 13 1.3.3 Techniques d’inventaires .............................................................................................. 13 1.3.4 Dénombrement ............................................................................................................ 14 1.4 Approche écologique....................................................................................................... 14 1.5 Organisation des prospections ........................................................................................ 15 1.6 Données utilisées ............................................................................................................ 15 2 Méthodologie pour l’analyse des résultats ............................................................................. 19 2.1 Cartographies de synthèse .............................................................................................. 21 2.1.1 Périmètres de prospections .......................................................................................... 21 2.1.2 Cartes de la richesse spécifique .................................................................................... 21 2.2 Cartographies détaillées .................................................................................................. 21 3 2.2.1 Localisation des espèces remarquables ........................................................................ 21 2.2.2 Carte des enjeux écologiques ....................................................................................... 25 Analyse de l’entomofaune des terrasses alluviales (Rhopalocères, Orthoptères, Odonates) ... 27 3.1 Analyse écologique ......................................................................................................... 29 3.1.1 Richesse spécifique ....................................................................................................... 29 3.1.2 Spécificité de la faune des terrasses ............................................................................. 30 3.1.3 Différences entre basses et hautes terrasses alluviales ................................................ 34 3.2 Analyse patrimoniale ...................................................................................................... 35 2 3.2.1 Richesse des terrasses en taxons d’intérêt patrimonial................................................ 35 3.2.2 Rareté et menace de l’entomofaune étudiée .............................................................. 36 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 3.3 Analyse par boucle .......................................................................................................... 39 3.3.1 Richesse spécifique par boucle ..................................................................................... 39 3.3.2 Richesse en taxons d’intérêt patrimonial par boucle.................................................... 40 3.4 Présentation d’espèces d’intérêt patrimonial et caractéristiques des terrasses alluviales42 4 Analyse de l’entomofaune des terrasses alluviales (Hyménoptères) ....................................... 47 4.1 Analyse générale des Hyménoptères inventoriés ............................................................ 49 4.1.1 Richesse spécifique générale ........................................................................................ 49 4.1.2 Zoom sur les Hyménoptères sphéciformes sur deux terrasses alluviales ..................... 50 4.2 Analyse écologique des cortèges d’Hyménoptères observés ........................................... 52 4.2.1 Comparaison spécifique par affinités écologiques ....................................................... 52 4.2.2 Liste des espèces .......................................................................................................... 53 4.2.3 Présentation de quelques espèces rares et intéressantes ............................................ 56 CONCLUSION .................................................................................................................................. 59 BIBLIOGRAPHIE............................................................................................................................... 60 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 3 Introduction Cinq ans après la fin de l’étude phytocénotique et floristique des basses et moyennes terrasses alluviales de la vallée de la Seine (2003-2006), le Conservatoire botanique national de Bailleul a souhaité étendre le niveau de connaissance acquis aux hautes terrasses de la Seine. En effet, tout comme les basses et moyennes terrasses, les hautes terrasses de la Seine hébergent une flore, une faune et des habitats typiques des milieux sableux, présentant un intérêt patrimonial majeur et apparaissant tout aussi menacés que sur les basses et moyennes (déclin des activités agropastorales, exploitation des sables et granulats, développement urbain…). Face à ce déclin, la connaissance scientifique, indispensable pour l’identification des enjeux de conservation, restait lacunaire et se devait d’être utilement complétée. Un partenariat entre le Conservatoire botanique national de Bailleul et le Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie a été établi dans le cadre de ce projet. Le Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie assure une prestation d’étude de la faune des terrasses alluviales de la Seine et contribue à l’évaluation patrimoniale ainsi qu’aux propositions de gestion et de conservation de ces espaces. Ce partenariat a été formalisé par la signature d’une convention entre les deux structures. Cette étude, cofinancée par l’Union européenne (FEDER), l’État (FNADT), la Région Haute-Normandie et Département de l’Eure, a porté sur environ 17 000 ha, soit une surface équivalente aux basses et moyennes terrasses de la Seine. 22 secteurs de terrasses alluviales ont fait l’objet de prospections entre 2011 et 2014, concernant trois groupes faunistiques : les Rhopalocères (Papillons de jour), les Orthoptéroïdes (Sauterelles, Criquets…), les Odonates (Libellules, Demoiselles). Un autre groupe, les Hyménoptères a été étudié de façon plus ponctuelle mais également de façon plus exhaustive sur deux sites de terrasses alluviales. Ces inventaires ont pour objectifs de dresser un état des lieux précis du patrimoine entomologique des terrasses de la vallée de la Seine et de cartographier les enjeux selon cinq niveaux d’intérêts : « faible à nul », « notable », « assez important », « important » et « exceptionnel ». 4 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 1 MÉTHODOLOGIE D’INVENTAIRE DE LA FAUNE ET CARTOGRAPHIE Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 5 1.1 TERRITOIRE ÉTUDIÉ POUR L’ENTOMOFAUNE Le périmètre d’étude pour l’inventaire entomofaunistique correspond à l’ensemble des hautes terrasses de la Seine, élargi aux basses et moyennes terrasses du département de Seine-Maritime. Les basses et moyennes terrasses du département de l’Eure ainsi que la boucle d’AnnevilleAmbourville en Seine-Maritime, ayant bénéficié d’inventaires entomologiques récents, ne sont pas concernées par ces nouvelles prospections. Néanmoins, les données récoltées lors de ces précédents inventaires sont intégrées à l’analyse des résultats. En complément des prospections réalisées, nous avons recherché les autres données existantes. Nous avons ainsi pu intégrer à l’analyse des résultats des observations issues des autres activités du CENHN, mais également d’autres structures comme le Parc naturel régional des Boucles de la Seine normande (PNRBSN), l’Association entomologique de Haute-Normandie (ASEHN), Le Collectif pour l’étude régionale la cartographie et l’inventaire des Odonates de Normandie (CERCION) ou la Base de données de l’Atlas des Orthoptères de Normandie. 1.2 CHOIX DES GROUPES ÉTUDIÉS L’entomofaune représente 80 % de la biodiversité et joue un rôle essentiel dans le fonctionnement des écosystèmes (prédation, recyclage, pollinisation, parasitisme…). Son étude apporte un regard complémentaire à celui de la flore, dont les nécessités de conservation peuvent parfois être en inadéquation partielle avec le fonctionnement et les besoins vitaux de certaines espèces animales. Devant la diversité des groupes faunistiques et la complexité de l’écologie des espèces, il est impossible d’avoir une approche exhaustive. Afin de répondre aux objectifs opérationnels de préservation du patrimoine naturel des terrasses alluviales, il convient donc de se restreindre à l’étude d’un petit nombre de groupes faunistiques, possédant des cortèges représentatifs de leur fonctionnement écologique. 1.2.1 NOTION D’ESPÈCES BIO-INDICATRICES Afin de qualifier l'intérêt faunistique des terrasses alluviales de la vallée de la Seine, le CENHN a concentré ses inventaires sur des groupes qualifiés "d'indicateurs". Ces groupes contribuent à qualifier l'état de conservation des habitats qui les accueillent. Dans une démarche "de conservation", le poids des espèces recensées est pondéré par la rareté et le degré de menace relatifs à chaque espèce à l'échelle régionale ; c'est l'approche "patrimoniale". Dans la démarche "écologique", les espèces sont appréhendées du point de vue de la formation végétale ou des facteurs écologiques prépondérants pour leur développement ; c'est l'approche "écologique par communautés d'espèces". Ces deux approches sont complémentaires dans une logique de détermination de zones prioritaires à la conservation des habitats et des cortèges faunistiques des terrasses alluviales. 1.2.2 LES GROUPES FAUNISTIQUES RETENUS Les principaux critères d’éligibilité d’un groupe sont les suivants : - une taxonomie suffisamment stable et claire, - une documentation suffisante sur la biologie, l’écologie, la rareté et le statut des espèces dans la région, - la présence de taxons sténoèces1, caractéristiques des différents habitats des terrasses alluviales, - la possibilité d’identifier rapidement et facilement les espèces observées, - la possibilité d’obtenir des inventaires proches de l’exhaustivité pour les groupes étudiés, 1 Se dit d’une espèce dont l’intervalle de tolérance vis-à-vis d’un facteur écologique est très réduit. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 7 - la présence d’espèces protégées ou reconnues d’intérêt communautaire. Sur la base de ces six principes, trois groupes d’insectes ont été plus particulièrement ciblés : - les Rhopalocères (Papillons de jour), - les Orthoptéroïdes = Orthoptères au sens large (Criquets, Sauterelles, Grillons, Mantes…) - les Odonates (Libellules et Demoiselles). Un quatrième groupe, dont les peuplements peuvent s’avérer intéressants en zone sableuse, mais relativement méconnu en Haute-Normandie a été intégré à l’étude : - Les Hyménoptères (en particulier les Vespiformes : Guêpes, Pompiles, Sphécides). Ce dernier groupe n’a pas l’objet d’inventaires systématiques sur toutes les boucles mais de deux inventaires ponctuels à partir de « tentes malaises » sur deux sites (Courcelles-sur-Seine et AnnevilleAmbourville) dans deux boucles. L’objectif était d’inventorier de manière approfondie ces sites pour se rapprocher de l’exhaustivité, plutôt que de disposer de données éparses issues de différents secteurs. 1.2.2.1 Les Rhopalocères Les Rhopalocères forment un des deux sous-ordres des Lépidoptères (Lepidoptera). En effet, du point de vue de la systématique, parmi les Lépidoptères, il est possible de distinguer deux groupes, les Rhopalocères (Rhopalocera) que l’on dénomme communément (mais abusivement) "Papillons de jour" et les Hétérocères (Heterocera) "Papillons de nuit". Pour la Haute-Normandie, les Rhopalocères regroupent sept familles et comptent 97 espèces inventoriées dont 78 observées ces 25 dernières années (LORTHIOIS, 2014). Dans nos régions (Europe), on distingue les Rhopalocères des autres Lépidoptères par les critères suivants : antenne en massue, absence d’appareil de couplage alaire entre l’aile postérieure et l’aile antérieure et ailes se tenant jointent verticalement au-dessus du corps au repos. La biologie de ces Lépidoptères est bien connue, il s’agit du groupe le plus étudié. Ce sont des insectes holométaboles2. Ils sont phytophages3 au stade larvaire. Leurs imagos sont floricoles et participent à la pollinisation. Contrairement aux Hétérocères, les Rhopalocères sont tous diurnes, ce qui facilite grandement leur observation. Les œufs sont généralement pondus sur la plante sur laquelle la chenille se développera ensuite. La chenille passe par différents stades larvaires par des mues successives permettant la croissance. La plupart des espèces régionales passent la mauvaise saison sous la forme de chenille ou de chrysalide. [XH] Habitus de Rhopalocère Hespéride, (Thymelicus sylvestris). Habitus de Rhopalocère Nymphalide, (Mellicta athalia). Dans le cadre de la gestion des milieux naturels, les Rhopalocères n’ont plus à faire leurs preuves, ils sont considérés comme de très bons indicateurs de l’ouverture des milieux et de l’état de conservation des habitats naturels (POLLARD & YATES, 1993 ; DUPONT & LUMARET, 1997). Ils sont liés à des plantes hôtes et donc à la composition floristique des milieux. Ils peuvent également avoir besoin d’un complexe d’habitats pour réaliser leur cycle de développement. Parmi la faune des 2 Se dit des insectes chez qui le passage de l'état larvaire à l'état adulte se fait par l'intermédiaire d'un état nymphal. Les larves et les adultes de ces insectes ont, en général, une morphologie et des modes de vie très différents. 3 8 Se dit d’un organisme dont le régime alimentaire est constitué de végétaux. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Rhopalocères de Haute-Normandie, certaines espèces présentent des exigences très précises en termes d’habitat (tourbière, pelouses sèches…) et ont des cycles biologiques complexes. L’identification des Rhopalocères est relativement facile avec un minimum d’expérience. Elle est basée sur la reconnaissance des ornementations alaires. Leur détermination peut se faire directement sur le terrain à l’aide d’un guide de référence (TOLMAN & LEWINTON, 1999), sans destruction de l’individu dans la très grande majorité des cas. Cependant l’identification de certaines espèces nécessite parfois la mise en collection d’étude et le recours à des spécialistes. Les genitalia mâles sont souvent utilisés pour la distinction et la détermination de certaines espèces. 1.2.2.2 Les Orthoptéroides Les Grillons, les Sauterelles, les Criquets, les Mantes et les Phasmes forment un superordre : les Orthoptéroïdes (Orthopteroidea). Ce superordre est subdivisé en quatre ordres : les Ensifères (Ensifera), les Caelifères (Caelifera), les Phasmoptères (Phasmoptera) et les Mantoptères (Mantodea) (DEFAUT 1999a & b). En Haute-Normandie, 56 espèces ont été inventoriées (SIMON & STALLEGGER, 2013), dont 52 observées ces 25 dernières années. La biologie des Orthoptéroïdes est assez bien connue (BELLMAN & LUQUET, 1995). Ce sont des insectes hétérométaboles4. Ils sont liés au topoclimat et à la structure de la végétation. Certains sont plutôt géophiles5 pour les premiers stades de développement. D’autres pondent dans les tiges ou feuilles de divers végétaux. Les Caelifères (Criquets) sont phytophages, tandis que les Ensifères (Sauterelles) sont davantage carnassières. Une des particularités des Orthoptères est la stridulation6 qui permet de déterminer certaines espèces au "chant". En effet, les Orthoptères sont les insectes pour lesquels les manifestations sonores sont les plus variées. De façon générale, chez les Sauterelles et les Grillons, ces émissions acoustiques sont obtenues par frottement l’un sur l’autre des tegmina7. Les Criquets stridulent en frottant leurs fémurs postérieurs le long des tegmina. Ces stridulations sont un critère de maturité sexuelle et jouent un rôle déterminant dans la reproduction. Quelques espèces émettent leurs stridulations dans des fréquences ultrasoniques inaudibles par l’Homme. Les Orthoptères se rencontrent sur tous les types d’habitats, mais ils sont les hôtes privilégiés des milieux ouverts thermophiles. L’étude des Orthoptères d’un site peut mettre en évidence des communautés de peuplements caractéristiques d’habitats et ce, même sur des petites surfaces. En outre, des études ont montré la sensibilité de certaines espèces d’Orthoptères à la pression de pâturage et à la fauche (JACOB, 1990 ; GUEGUEN, 1995 ; MULLER, 2002). A ce titre, les Orthoptères sont souvent considérés comme des indicateurs de la qualité et de la diversité des habitats naturels. 4 Se dit des insectes chez qui le passage de l'état larvaire à l'état adulte se fait directement, sans stade nymphal. Les ailes se développent en général petit à petit au cours des stades larvaires successifs et deviennent de plus en plus visibles. 5 Se dit d’un organisme se tenant ou se développant préférentiellement sur le sol nu ou très près de sa surface. 6 Emission acoustique produite par divers Arthropodes, obtenue par frottement d’un organe mobile sur un organe fixe. 7 Paire d’ailes antérieures (singulier : tegmen) à nervation complexe, plus étroites et coriacées que les ailes postérieures. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 9 [XH] Habitus de Mantoptère, (Mantis religiosa). Habitus d’Ensifère, (Platycleis tessellata). Habitus d’Ensifère, (Gryllus campestris). Habitus de Caelifère, (Tetrix subulata). L’identification des Orthoptères est relativement simple avec un minimum d’expérience. La détermination peut se faire directement sur le terrain à l’aide d’une petite loupe et d’un guide de référence, sans destruction de l’individu dans la grande majorité des cas, ou encore par reconnaissance sonore. 1.2.2.3 Les Odonates Les Libellules au sens large ou Odonates (Odonata) sont un ordre d’insectes à part entière. Il existe en région paléarctique deux sous-ordres d’Odonates, les Zygoptères (Zygoptera) et les Anisoptères (Anisoptera). En Haute-Normandie, on recense actuellement 50 espèces (CERCION, 2014). La biologie des Odonates est assez bien connue. Ce sont des insectes hétérométaboles dont le développement de la phase larvaire s’effectue dans le milieu aquatique par mues successives, jusqu’à l’émergence. En fonction des espèces, les femelles déposent les œufs en les insérant dans les végétaux ou bien en les larguant à la surface de l’eau. Le temps de développement larvaire peut prendre, selon les espèces, de quelques mois (plusieurs générations par an) à plusieurs années. Les larves comme les adultes sont carnivores, ce sont des prédateurs. Les imagos évoluent dans le milieu aérien et utilisent pour leur maturation et leur nourrissage une grande diversité d’habitats annexes tels que les prairies, les friches ou les lisières forestières. Certaines espèces [XH] 10 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Habitus d’Anisoptère, larve et imago, (Anax imperator). Habitus de Zygoptère, larve et imago, (Coenagrion puella). sont liées aux milieux lentiques8, d’autres aux milieux lotiques9. D’une façon générale, plus un milieu aquatique est diversifié (mobilité, profondeur, physico-chimie, végétation et végétalisation), plus il est susceptible d’accueillir un grand nombre d’espèces de Libellules. Cependant, les Odonates seuls ne permettent pas d’apprécier l’état de conservation d’un habitat aquatique. En effet, ils ne sont pas des "bio-indicateurs" au sens strict du terme mais peuvent s’avérer dans certains cas des "bioinformateurs" permettant de qualifier l’évolution du milieu (MASSELOT & NEL, 2003). L’identification des imagos d’Odonates est relativement simple avec un minimum d’expérience. La détermination peut se faire directement sur le terrain à l’aide d’une petite loupe et d’un guide de référence, sans destruction de l’individu dans la grande majorité des cas. L’étude des larves et des exuvies10 nécessite plus de matériel (loupe binoculaire, collection et ouvrage de référence,…) et d’expérience, mais permet de pousser les analyses écologiques beaucoup plus loin. La découverte d’une exuvie lors d’un inventaire permet de préciser avec certitude l’autochtonie de l’espèce. En effet, les exuvies sont la preuve formelle que l’espèce a effectué l’ensemble de son cycle de développement sur le site et révèle ainsi la stabilité ou l’instabilité du milieu (GERKEN, 1984). Par exemple, un peuplement d’Odonates autochtones majoritairement constitué d’espèces à développement rapide révèlera le caractère instable du milieu. 1.2.2.4 Les Hyménoptères Les Hyménoptères constituent, après les Coléoptères, l'ordre d'insectes le plus diversifié. On estime actuellement à plus de 230 000 le nombre d’espèces décrites. Les représentants les plus répandus de cet ordre sont les abeilles, les guêpes et les fourmis, présentes sur tous les continents sauf l'Antarctique. Les Hyménoptères sont des insectes holométaboles d'une taille comprise entre 0,1 mm et 10 cm, pourvus de quatre ailes membraneuses couplées en vol et de pièces buccales du type broyeurlécheur. La tête est séparée du thorax par un cou très mince et très mobile. Leur métathorax est très court, soudé au premier segment abdominal pour former le segment médiaire. L'ordre des Hyménoptères comprend des phytophages, des pollinisateurs et une large part d'entomophages jouant un rôle central dans le maintien des équilibres naturels. Les entomophages comportent en majorité des parasitoïdes (53 % des espèces d'Hyménoptères décrites) mais également des prédateurs. Les Hyménoptères sont caractérisés par : - deux paires d'ailes membraneuses reliées l'une à l'autre par un système de couplage, - des ailes antérieures sont plus larges que les postérieures, - un appareil buccal qui varie du type broyeur au type lécheur avec des formes intermédiaires, - des mandibules bien développées qui servent à la capture des proies et au façonnage du nid, - les maxilles et le labium sont unis par une membrane et forment une sorte de trompe qui permet l'aspiration des liquides, - les larves sont pour la plupart dépourvues de pattes mais elles ont une capsule céphalique bien visible. L'ordre des Hyménoptères est divisé en deux grands ensembles (sous-Ordre) : - les Symphytes chez lesquels l'abdomen fait directement suite au thorax (pas d'étranglement) ; 8 Qualifie les milieux aquatiques stagnants. 9 Qualifie les milieux aquatiques courants. 10 Mue imaginale, laissée par l’imago lors de l’émergence. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 11 - les Apocrites, chez lesquels l'abdomen est bien distinct du thorax du fait d'un étranglement, le premier segment abdominal est de plus entièrement fusionné au thorax. Habitus d’un Aculéate, (Scelifron servillei) Les Apocrites sont subdivisés entre Térébrants (parasitica) et Aculéates (porte-aiguillons). Les Térébrants possèdent un abdomen terminé par un oviscapte (tarière) tandis que chez les Aculéates, l'oviscapte a perdu sa fonction de ponte et est devenu un aiguillon. Caractéristiques des Térébrants (Parasitica) : antennes avec moins de 16 articles, nervation alaire très simplifiée, ovipositeur visible au repos. Caractéristiques des Aculéates : antennes de 12-13 articles, lobe jugal visible sur l'aile postérieure, aiguillon jamais visible au repos. Les Symphytes regroupent la très large majorité des phytophages, certaines espèces étant des ravageurs de milieux forestiers ou agricoles. Un autre groupe important de phytophages, les Cynipides, se rencontre chez les Apocrites Térébrants. La plupart des parasitoïdes appartiennent au groupe des Térébrants, en particulier aux superfamilles des Chalcidoidea, Scelionoidea, Serphoidea et Ichneumonoidea. Les prédateurs se rencontrent pour l'essentiel chez les Aculéates dans les superfamilles des Sphecoidea et Vespoidea (pompiles, guêpes et fourmis). La majorité des pollinisateurs de plantes cultivées se rencontre également chez les Aculéates parmi les Apoidea, les représentants de cette superfamille se nourrissant exclusivement de pollen et de nectar. 1.3 MÉTHODOLOGIE D’INVENTAIRE DE TERRAIN 1.3.1 CONDITIONS MÉTÉOROLOGIQUES REQUISES Pour les groupes choisis, les méthodes couramment employées dans le cadre d’un inventaire de site sont dites de "recherche active" ou "à vue" Les techniques d’inventaire diffèrent d’un groupe à l’autre et nécessitent la mise en place d’une stratégie afin de recenser le maximum d’espèces de chaque groupe à chaque sortie (LOTT & EYRE, 1996). Cependant, avant de partir en prospection, il faut particulièrement s’enquérir de la météorologie. L’ensoleillement, la température et la force du vent peuvent faire considérablement varier la richesse du relevé (DEMERGES, 2002). Pour les Insectes, seules les prospections effectuées entre 10 h et 16 h par temps chaud (> 15°C), dégagé (< 50 % de couverture nuageuse) et sans vent fournissent des résultats valables (EVANS, 1998 ; CHINERY & CUISIN, 1994). 12 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 1.3.2 CALENDRIER DES PROSPECTIONS Les inventaires de terrain se déroulent pendant la période favorable allant de fin mars à début octobre. I II Défavorable III IV V VI VII VIII Peu favorable sauf pour quelques espèces Favorable IX X XI XII Très favorable 1.3.3 TECHNIQUES D’INVENTAIRES Plusieurs techniques d’inventaire ont été utilisées en fonction des groupes inventoriés : - par l’observation visuelle directe à l’aide d’un filet pour les 3 principaux ordres (Rhopalocères, Orthoptères, Odonates) ; - par le chant (Orthoptères) ; - par la récolte éventuelle d’exuvies (Odonates) ; - par le piégeage (Hyménoptères). Concernant l’inventaire des Hyménoptères Sphécidés, un dispositif adapté à l’inventaire de ce groupe a été installé sur deux sites. Il s’agit de pièges passifs installés lors des périodes favorables à l’observation des espèces (avril à octobre). Ces pièges (tentes malaises) sont placés à des endroits stratégiques dans le déplacement des espèces (lisières, allées forestières, clairières). Caractéristique du piège dit « tente malaise » C’est un piège d’interception que l’on place dans un couloir de circulation d’insectes comme par exemple les lisières de boisements entre des massifs compacts de végétation. Ce piège dont une extrémité est plus haute que l’autre est une tente en voile synthétique dont les parois ne touchent pas le sol. Sous l’auvent est tendu un panneau de toile qui, lui, va jusqu’au sol. Il sépare ainsi les deux moitiés de la tente. Au point le plus haut de la tente est encoché le dispositif de récolte. Celui-ci est formé de deux flacons en polyéthylène superposés et reliés par leurs bouchons troués. Le flacon supérieur est percé d’un orifice qui le relie à la pointe de l’auvent. Le flacon du bas contient un liquide de E. Macé conservation (alcool à 70° ou eau avec quelques gouttes de mouillant). L’ensemble du dispositif est fixé par des mâts, de tendeurs et des piquets. Les insectes arrêtés en vol par le panneau vertical montent instinctivement vers la lumière et finissent par pénétrer dans le flacon de capture, qui doit se trouver dans la direction de la plus grande luminosité. Les relevés sont effectués en moyenne tous les mois pour éviter les risques de décomposition du matériel biologique. Ce type de piège n’est pas sélectif, et exige du temps pour trier les insectes récoltés. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 13 1.3.4 DÉNOMBREMENT Pour analyser correctement les résultats de l’inventaire, il est capital de donner une estimation de l’abondance des espèces. Cela peut permettre d’appréhender de façon plus fine l’importance du site prospecté pour certaines espèces rares. L’abondance des populations a été évaluée pour les groupes des Rhopalocères, Orthoptères et Odonates sur la base des individus adultes comptabilisés lors des différentes sorties. Deux types de dénombrement ont été utilisés : le dénombrement par comptage du nombre d’individus d’une espèce : la population de l’’espèce est quantifiable précisément et fait l’objet d’un comptage précis sur le terrain ; le dénombrement par estimation du nombre d’individus d’une espèce : la population de l’espèce n’est pas quantifiable précisément et fait l’objet d’une estimation du nombre d’individus supposés sur le site. Les Hyménoptères n’ont pas été dénombrés. Seule la présence/absence des espèces a été utilisée pour l’analyse de ce groupe. 1.4 APPROCHE ÉCOLOGIQUE La plupart des espèces de Rhopalocères et d’Orthoptères possèdent des exigences écologiques assez ciblées qui poussent certaines espèces à se développer dans des conditions environnementales similaires. Sur la base de ces exigences écologiques convergentes, il est possible de proposer un classement par « communautés écologiques » : Communautés écologiques Espèces ubiquistes Espèces des prairies et des lisières hygrophiles Espèces des prairies et ourlets mésohygrophiles Espèces des boisements hygrophiles Espèces des bois et des lisières mésophiles Espèces des prairies et ourlets mésophiles Espèces des pelouses ou prairies mésoxérophiles Espèces des ourlets, lisières et fourrés thermophiles Espèces des pelouses ouvertes xérothermophiles Les espèces de Rhopalocères et d’Orthoptères ont été affiliées à une communauté écologique d’après les catalogues régionaux récemment publiés par l’Observatoire de la Biodiversité de HauteNormandie : LORTHIOIS M. - Catalogue des Rhopalocères & Zygènes de Haute-Normandie. Version 1 2015. Conservatoire d'espaces naturels de Haute-Normandie, avec le soutien de l'Observatoire de la Biodiversité de Haute-Normandie. SIMON A., STALLEGGER P. - Catalogue des Orthoptères de Haute-Normandie. Version 1 2013. Conservatoire d'espaces naturels de Haute-Normandie, Peter Stallegger – Consultant Environnement, avec le soutien de l'Observatoire de la Biodiversité de Haute-Normandie. La diversité des habitats présents sur terrasses alluviales permet de retrouver des espèces de chacune de ces catégories au sein des secteurs prospectés. Néanmoins, il s’avère que ce sont parmi les communautés écologiques liées aux milieux chauds et secs (thermophiles ou xérophiles) que l’on va retrouver les espèces typiques des prairies sableuses de terrasses. Aucun classement n’a été proposé pour les Odonates. En effet, comme ces insectes présentent peu d’espèces véritablement exigeantes vis-à-vis des végétaux, ils ne sont pas directement liés à une structure de végétation comme peuvent l’être les Rhopalocères ou Orthoptères. 14 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Les Hyménoptères, sans avoir fait l’objet d’un classement détaillé, ont tout de même été regroupés en trois principaux groupes : espèces des milieux boisés, espèces des milieux ouverts sableux et espèces de zones humides. 1.5 ORGANISATION DES PROSPECTIONS Les prospections réalisées au cours de cette étude ont concerné les périmètres de hautes terrasses de l’ensemble de la région, ainsi que les secteurs de basses terrasses du département de SeineMaritime. Les périmètres de basses terrasses du département de l’Eure n’ont pas été prospectés car une étude, réalisée en 2009, a permis d’acquérir un nombre de données important sur ces secteurs. Les observations réalisées sur ces secteurs ont été intégrées aux résultats. La superficie du territoire concerné par l’étude étant très importante, un repérage préalable des secteurs considérés comme les plus favorables a été réalisé. Ainsi, une analyse à partir des photographies aériennes a permis d’écarter les vastes secteurs homogènes agricoles, forestiers ou urbanisés, peu propices au développement des groupes taxonomiques ciblés et de délimiter les zones semblant présenter un intérêt particulier et qui devaient par conséquent, être prospectées en priorité. Sur le terrain, les périmètres jugés défavorables d’après photo aérienne, ont fait l’objet d’une visite de confirmation de leur faible potentiel écologique (agriculture intensive, plantation forestière urbanisation…). Ils n’ont, dans la plupart des cas, pas fait l’objet d’inventaire, mais lorsque certains secteurs se sont révélés héberger des zones plus accueillantes, des inventaires plus poussés ont été menés. Les périmètres supposés plus favorables ont été prospectés de manière plus approfondie, une ou plusieurs fois dans la saison. Les individus ont été recensés selon trois techniques : - à vue (le plus souvent posés) ; - au chant (Orthoptères) ; - capturés au filet. Pour les espèces ne posant pas de problèmes d’identification, les déterminations des individus ont été réalisées sur le terrain. Les individus plus difficiles à déterminer ont été prélevés et déterminés en laboratoire au sein du Conservatoire. Une cartographie des secteurs prospectés, visités et jugés défavorables, a été réalisée. Les parcours d’inventaires faunistiques généraux ont été effectués au sein de mailles UTM 1 x 1 km. La saisie des données recueillies lors des inventaires a été exécutée sur fichier Excel et saisie sous Mapinfo. 1.6 DONNÉES UTILISÉES L’évaluation des enjeux des périmètres de hautes terrasses repose sur la synthèse de 9 709 observations issues de deux origines différentes : 4 140 données proviennent des prospections de terrain réalisées entre 2011 et 2014 par le CenHN dans le cadre de cette étude. Ces données ont été récoltées sur 356 sites d’inventaires différents, soit une moyenne de 11,7 espèces par point d’inventaire ; 5 569 données sont issues de sources bibliographiques, toutes postérieures à 2005. Parmi ces données bibliographiques, près de 3000 (54 %) sont issues des autres activités du CenHN (suivi de sites et étude sur les basses terrasses réalisée en 2009). Les données restantes proviennent de sources diverses, notamment professionnelles (bureaux d’études, Parc naturel régional des Boucles de la Seine normande, OBHN, Départements…) ou association d’amateurs (Association entomologique de Haute-Normandie, collectif CERCION…) L’ensemble de ces données représente un total de 724 sites d’inventaires répandus dans toute la vallée de Seine. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 15 Les données récoltées se répartissent de la façon suivante entre les quatre groupes étudiés : - 3 765 Rhopalocères (38,8 %) - 3 300 Orthoptères (34 %) - 1 960 Odonates (20,2 %) - 683 Hyménoptères Sphécides (7 %) La carte suivante présente l’emplacement des 724 relevés. 16 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 17 2 MÉTHODOLOGIE POUR L’ANALYSE DES RÉSULTATS Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 19 2.1 CARTOGRAPHIES DE SYNTHÈSE 2.1.1 PÉRIMÈTRES DE PROSPECTIONS La totalité des 40 000 hectares des périmètres de terrasses n’ont pas été prospectés avec la même intensité. Des inventaires plus approfondis ont été menés sur les secteurs au potentiel d’accueil plus élevé. La carte des prospections renseigne trois niveaux d’informations : - les secteurs non visités, écartés après repérage photographique. Il s’agit des zones urbaines denses ou des vastes périmètres forestiers ou agricoles homogènes, considérés comme défavorables à l’accueil de la faune étudiée ; - les secteurs visités jugés défavorables. Il s’agit des périmètres ayant fait l’objet d’une visite de terrain, mais où aucun inventaire approfondi n’a été effectué, car jugés peu propices aux insectes (sous-bois forestiers, certains chemins agricoles, certains espaces verts urbains…) ; - les secteurs jugés favorables et prospectés. Ces périmètres ont fait l’objet d’inventaires plus approfondis sur les trois principaux groupes étudiés (Rhopalocères, Orthoptères, Odonates). Il s’agit d’espaces à caractère naturel ou semi-naturel (clairières, friches, lisières, certains espaces verts, talus routiers) ou agricoles (prairies de fauche ou pâturées), où l’on retrouve les cortèges les plus représentatifs des hautes terrasses. 2.1.2 CARTES DE LA RICHESSE SPÉCIFIQUE Le nombre d’espèces observées sur un secteur (richesse spécifique), est un premier indicateur de l’intérêt écologique d’un milieu. Une richesse spécifique élevée, traduira souvent la présence de milieux à caractère naturel diversifiés et plus accueillants pour la faune des terrasses. Afin de disposer d’une vision globale à l’échelle de la vallée de la Seine, cette richesse spécifique est présentée sous la forme d’un "kriegeage". Cette technique permet de lisser l’information présentée en tenant compte de son environnement immédiat. Chaque donnée est pondérée par l’ensemble de celles qui l’entoure. La carte se présente donc sous forme d’un dégradé de couleur (du jaune au rouge) permettant de visualiser facilement les secteurs les plus riches et ceux plus pauvres. Il est possible, selon la même technique, de cibler les espèces à caractères patrimonial. Le calcul de cette richesse spécifique se base sur l’ensemble des données synthétisées, qu’elles soient issues de nos prospections de terrain ou bien de sources bibliographiques. 2.2 CARTOGRAPHIES DÉTAILLÉES 2.2.1 LOCALISATION DES ESPÈCES REMARQUABLES Pour les groupes des Rhopalocères, Orthoptères et Odonates, des espèces à caractère patrimonial ont été mises en avant. Ces espèces sont considérées comme remarquables au regard de leur statut de rareté, de menace ou de la fragilité des habitats qu’elles occupent. La liste que nous avons retenue pour les espèces à caractère patrimonial se base sur les référentiels régionaux lorsque ceuxci étaient disponibles. Pour les Odonates : DODELIN C., HOUARD X., LORTHIOIS M., SIMON A., 2010. - Liste Rouge des Odonates de Haute-Normandie : liste rouge, indices de rareté et espèces déterminantes de ZNIEFF. Conseil Scientifique Régional du Patrimoine Naturel. Pour les Orthoptères : SIMON A. & STALLEGGER P. (Coord), 2013. Liste Rouge des Orthoptères de Haute-Normandie. Indicateurs pour l'Observatoire de la Biodiversité de Haute-Normandie, Conservatoire d'espaces naturels de Haute-Normandie. 10p. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 21 Pour les Rhopalocères : LORTHIOIS (Coord.), 2015. Liste Rouge des Papillons diurnes & Zygènes de Haute-Normandie. Indicateurs pour l'Observatoire de la Biodiversité de Haute-Normandie, Conservatoire d'espaces naturels de Haute-Normandie. 17p. Pour ces trois groupes taxonomiques, les taxons dont le degré de menace en Haute-Normandie est égal aux catégories : « quasiment menacée » (NT), « vulnérable » (VU), en danger (EN) ou en danger critique (CR) ont été automatiquement considérées comme patrimoniaux. Tab.1. Nombre d’espèces menacées en Haute-Normandie par degré de menace En danger Critique En danger Vulnérable Quasiment menacé CR EN VU NT Total Rhopalocères 4 6 6 3 19 Odonates 5 8 4 3 20 Orthoptères 4 4 2 5 15 13 18 12 11 54 L’ensemble de ces 54 espèces n’a pas été observé au cours de l’étude. Seules 21 d’entre-elles se sont révélées présentes sur les terrasses de la vallée de la Seine, dont plusieurs de manière très localisée et occasionnelle. Un code cartographique basé sur les trois premières lettres du nom de genre, suivies des trois premières lettres de l’épithète spécifique, est attribué aux espèces observées sur les périmètres de prospections. Ces tableaux servent également de légende aux cartes des espèces patrimoniales présentées dans l’appendice cartographique. Le tableau ci-après présente les 21 espèces menacées recensée au cours de l’étude (inventaires de terrain et données bibliographiques) parmi les 54 actuellement présentes dans la région. 22 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Tab.2. Liste des espèces patrimoniales menacées en Haute-Normandie Groupe taxonomique RHOPALOCERES ODONATES ORTHOPTERES Famille Nom scientifique Nom vernaculaire Rareté HN ZNIEFF Liste rouge HESPERIIDAE Carterocephalus palaemon L'Echiquier RR X EN HESPERIIDAE Hesperia comma Le Comma AR X VU HESPERIIDAE Heteropterus morpheus Le Miroir RR X CR LYCAENIDAE Lycaena tityrus Le Cuivré fuligineux RR X EN LYCAENIDAE Lysandra bellargus L'Azuré bleu-céleste AC X NT LYCAENIDAE Maculinea arion L'Azuré du Serpolet RR X EN LYCAENIDAE Satyrium w-album Le Thécla de l'Orme R X VU NYMPHALIDAE Arethusana arethusa Le Mercure AR X NT NYMPHALIDAE Argynnis aglaja Le Grand Nacré R X EN NYMPHALIDAE Boloria aquilonaris Le Nacré de la Canneberge E X CR NYMPHALIDAE Brenthis ino Le Nacré de la Sanguisorbe RR X EN NYMPHALIDAE Euphydryas aurinia Le Damier de la Succise PC X VU NYMPHALIDAE Hipparchia semele L'Agreste E X CR NYMPHALIDAE Limenitis populi Le Grand Sylvain D? X CR NYMPHALIDAE Melitaea athalia La Mélitée du Mélampyre R X VU NYMPHALIDAE Melitaea aurelia La Mélitées des Digitales R X EN NYMPHALIDAE Melitaea cinxia La Mélitée du Plantain AR X NT NYMPHALIDAE Melitaea parthenoides La Mélitée des Scabieuses AR X VU NYMPHALIDAE Melitaea phoebe La Mélitée des Centaurées R X VU AESHNIDAE Aeshna affinis Aeschne affine AR X EN AESHNIDAE Aeshna grandis Grande Aeschne RR X EN AESHNIDAE Brachytron pratense Aeschne printanière R X COENAGRIONIDAE Ceriagrion tenellum Agrion délicat R COENAGRIONIDAE Coenagrion mercuriale Agrion de Mercure AR COENAGRIONIDAE Coenagrion pulchellum Agrion joli COENAGRIONIDAE Erythromma najas Naîade aux yeux rouges CORDULESGASTRIDAE Cordulegaster boltonii CORDULIDAE Observées Observées sur sur BassesHautesTerrasses Terrasses Code carto oui oui Lysbel oui Melcin oui Aesaff EN oui Brapra X EN oui X VU RR X EN E X CR Cordulégastre annelé R X EN Somatochlora flavomaculata Cordulie à taches jaunes E X CR GOMPHIDAE Gomphus vulgatissimus Gomphus vulgaire RR X EN oui oui Gomvul GOMPHIDAE Onychogomphus forcipatus Gomphe à pinces AR X VU oui oui Onyfor LESTIDAE Lestes barbarus Leste sauvage PC X NT oui LESTIDAE Lestes sponsa Leste fiancé RR X CR oui Lesspo LESTIDAE Lestes virens Leste verdoyant RR X CR oui Lesvir LIBELLULIDAE Libellula fulva Libellule fauve PC X NT oui Libful LIBELLULIDAE Libellula quadrimaculata Libellule à quatre taches PC X NT oui Libqua LIBELLULIDAE Orthetrum brunneum Orthétrum brun AR X VU oui Ortbru LIBELLULIDAE Orthetrum coerulescens Orthétrum bleuissant AR X VU oui Ortcoe LIBELLULIDAE Sympetrum danae Sympétrum noir RR X CR oui oui Symdan LIBELLULIDAE Sympetrum flaveolum Sympétrum jaune d'or R X EN ACRIDIDAE Chorthippus mollis Criquet des jachères AR X NT oui oui Chomol ACRIDIDAE Chorthippus montanus Criquet palustre RR X EN ACRIDIDAE Myrmeleotettix maculatus Gomphocère tacheté AR X VU oui oui Myrmac ACRIDIDAE Omocestus petraeus Criquet des grouettes E ACRIDIDAE Stenobothrus stigmaticus Sténobothre nain ACRIDIDAE Stethophyma grossum Criquet ensanglanté GRYLLOTALPIDAE Gryllotalpa gryllotalpa PHYLLIIDAE Clonopsis gallica TETRIGIDAE oui Certen oui Corbol Lesbar CR E CR AC X NT Courtilière commune R X Phasme de France RR Tetrix bolivari Tétrix caucasien RR X EN TETRIGIDAE Tetrix tenuicornis Tétrix des carrières AR X NT TETTIGONIIDAE Conocephalus dorsalis Conocéphale des Roseaux AC X NT TETTIGONIIDAE Decticus verrucivorus Dectique verrucivore RR X CR TETTIGONIIDAE Ephippiger ephippiger Ephippigère des vignes AR X NT TETTIGONIIDAE Metrioptera bicolor Decticelle bicolore E TETTIGONIIDAE Metrioptera brachyptera Decticelle des bruyères R EN VU oui oui Clogal oui Tetten oui Epheph CR X EN Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 23 En complément de ces espèces menacées, rares et hautement patrimoniales, nous avons ajouté 20 taxons un peu plus répandus, non menacés, mais tout de même considérés dans les référentiels régionaux précédemment cités comme patrimoniaux au regard de leur répartition restreinte dans la région ou de leurs exigences écologiques particulières. Tab.3. Liste des espèces patrimoniales non menacées observées lors de l’étude Groupe taxonomique RHOPALOCERES ODONATES ORTHOPTERES Famille Nom scientifique Rareté Liste ZNIEFF HN rouge Nom vernaculaire LYCAENIDAE Cyaniris semiargus Le Demi-Argus PC X LC LYCAENIDAE Glaucopsyche alexis L'Azuré des Cytises AR X LC LYCAENIDAE Lampides boeticus L'Azuré porte-queue AR X LC LYCAENIDAE Quercusia quercus Le Thécla du Chêne AR X LYCAENIDAE Satyrium pruni Le Thécla du Prunier R X NYMPHALIDAE Apatura ilia Le Petit Mars changeant PC NYMPHALIDAE Apatura iris Le Grand Mars changeant PAPILIONIDAE Iphiclides podalirius LESTIDAE Lestes dryas LIBELLULIDAE Observées Observées sur sur Code carto BassesHautesTerrasses Terrasses oui oui Cyasem oui Glaale oui oui Lamboe LC oui oui Queque LC oui oui Satpru X LC oui oui Apaili PC X LC oui oui Apairi Le Flambé PC X LC oui oui Iphpod Leste dryade E NE oui Lesdry Leucorrhinia pectoralis Leucorrhine à gros thorax E NE oui Leupec ACRIDIDAE Chorthippus dorsatus Criquet verte-échine PC LC oui oui Chodor ACRIDIDAE Chorthippus vagans Criquet des Pins AR LC oui oui Chovag ACRIDIDAE Stenobothrus lineatus Criquet de la Palène PC LC oui GRYLLIDAE Eumodicogryllus bordigalensis Grillon bordelais E DD oui oui Eumbor GRYLLIDAE Oecanthus pellucens Grillon d'Italie PC X LC oui oui Oecpel TETRIGIDAE Tetrix ceperoi Tétrix des vasières PC X LC oui oui Tetcep TETTIGONIIDAE Phaneroptera nana Phanéroptère méridional E DD oui oui Phanan TETTIGONIIDAE Platycleis albopunctata Decticelle chagrinée PC LC oui oui Plaalb TETTIGONIIDAE Platycleis tessellata Decticelle carroyée AR X LC oui oui Plates TETTIGONIIDAE Ruspolia nitidula Conocéphale gracieux AR X LC oui oui Rusnit X Stelin Enfin, de manière à affiner l’analyse de l’entomofaune remarquable des terrasses alluviales, nous avons ajouté huit autres espèces relativement communes en Haute-Normandie. Sans être à proprement parler, strictement limitées aux habitats de terrasses alluviales, ces espèces n’en présentent pas moins des préférences écologiques clairement orientées vers les milieux ouverts et secs. Dans la mesure où ces taxons ne sont pas considérés comme patrimoniaux en HauteNormandie d’après les référentiels régionaux, leur emplacement sur les cartes est matérialisé d’une autre couleur. Nous faisons néanmoins le choix de les considérer comme remarquables dans le cadre de cette étude et de tenir compte de leur présence pour contribuer à définir les enjeux écologiques. Tab.4. Liste des espèces non patrimoniales considérées comme remarquables lors de l’étude Groupe taxonomique RHOPALOCERES ORTHOPTERES Famille Nom scientifique Nom vernaculaire Observées Observées sur sur Rareté HN Liste rouge Code carto BassesHautesTerrasses Terrasses HESPERIIDAE Carcharodus alceae La Grisette PC LC oui oui Caralc HESPERIIDAE Pyrgus malvae L'Hespérie de la Mauve PC LC oui oui Pyrmal HESPERIIDAE Thymelicus acteon L'Hespérie du Chiendent PC LC oui oui Thyact LYCAENIDAE Callophrys rubi L'Argus vert AC LC oui oui Calrub NYMPHALIDAE Issoria lathonia Le Petit Nacré AC LC oui oui Isslat NYMPHALIDAE Lasiommata maera Le Némusien PC LC oui oui Lasmae ACRIDIDAE Chorthippus brunneus Criquet duettiste C LC oui oui Chobru ACRIDIDAE Oedipoda caerulescens Oedipode turquoise AC LC oui oui Oedcae ACRIDIDAE Omocestus rufipes Criquet noir-ébène C LC oui oui Omoruf Ainsi, nous considérons 50 taxons (16 Rhopalocères, 16 Odonates, 18 Orthoptères) comme remarquables dans le cadre de cette étude. Seule la répartition de ces espèces est précisément localisée dans les cartes « espèces remarquables » jointes à l’appendice cartographique. 24 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Remarque : les insectes se déplacent au sein de leurs habitats. Représenter leur position exacte à un instant « t », par un point sur une carte très précise ne correspond pas à une réalité absolue et il est impossible de pointer exactement la position de chaque individu observé. Ainsi, il a été fait le choix de rassembler sous un même point, souvent situé au barycentre de la parcelle, le cortège des espèces observées au sein de milieux homogènes. Concernant le groupe des Hyménoptères et des Sphecidae en particulier, il n’y a que très peu d’informations sur la répartition et les éventuels statuts de rareté chez les espèces concernées. Il n’existe pas de document permettant une évaluation du caractère patrimonial à l’échelle régionale. Ainsi, nous proposons de présenter et mettre en exergue une quinzaine d’espèces d’Hyménoptères, dont la présence nous apparait intéressante au regard des éléments sur la biologie et la répartition des espèces, présentés dans les des volumes 79, 82 et 83 des faunes de France de Jacques Bitsh. Pour réaliser ces présentations et valider la détermination des individus, nous nous sommes rapprochés de Pierre TRIPOTIN, spécialiste reconnu Hyménoptères aculéates. 2.2.2 CARTE DES ENJEUX ÉCOLOGIQUES À partir de la répartition des 50 espèces remarquables définies dans le paragraphe précédent, les périmètres prospectés ont fait l’objet d’une hiérarchisation en fonction de leur intérêt patrimonial. Cette hiérarchisation repose sur un classement en cinq niveaux d’intérêt : Nombre d’espèces remarquables 0 1 2 3 4 ou + Aplat de couleur sans couleur Catégorie d’enjeux Faible à nul Notable Assez important Important Exceptionnel Ces niveaux sont ensuite représentés sur les cartographies par un dégradé d’aplats de couleurs appliqués aux périmètres inventoriés. . Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 25 3 ANALYSE DE L’ENTOMOFAUNE DES TERRASSES ALLUVIALES (RHOPALOCÈRES, ORTHOPTÈRES, ODONATES) Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 27 3.1 ANALYSE ÉCOLOGIQUE 3.1.1 RICHESSE SPÉCIFIQUE Remarque : en raison du niveau de connaissance régional très inégal entre les groupes classiquement étudiés (Rhopalocères, Orthoptères et Odonates) et les Hyménoptères, nous avons fait le choix de traiter à part, dans une partie séparée, ce dernier groupe. La richesse spécifique représente l’ensemble des espèces inventoriées pour chaque groupe sur les périmètres de terrasses alluviales prospectés de la vallée de Seine. Un total de 137 espèces pour les trois principaux groupes étudiés a été recensé sur l’ensemble des périmètres. Tab.5. Richesse spécifique par groupe taxonomique sur les terrasses alluviales de la vallée de Seine Richesse spécifique brute Groupe taxonomique (=Nb d’espèces) Richesse spécifique relative (% du pool régional) Nombre d’espèces remarquables Odonates Basses-Terrasses Hautes-Terrasses Total 38 35 42 74,5 % 68,5 % 82 % 10 10 16 Rhopalocères Basses-Terrasses Hautes-Terrasses Total 54 52 56 56 % 54 % 58 % 15 15 16 Orthoptères Basses-Terrasses Hautes-Terrasses Total 38 35 39 68 % 62,5 % 69,5 % 18 15 18 137 68 % 50 Total Nous distinguons richesse spécifique brute (= nombre d’espèces observées) et richesse spécifique relative (= % d’espèces par rapport au nombre total d’espèces connues dans la région). Pour les trois groupes concernés, un nombre plus important d’espèces a été recensé sur le périmètre de basses terrasses que sur les hautes. Toutefois, les deux types de terrasses présentent des richesses spécifiques relatives très élevées. Avec 42 espèces inventoriées, représentant 82 % du pool régional, les libellules présentent la plus grande richesse spécifique relative. Cela s’explique par plusieurs facteurs : la diversité des habitats aquatiques présents sur terrasses alluviales. Entre mares forestières ou prairiales et milieux pionniers courants ou stagnants, les terrasses alluviales offrent de nombreuses possibilités de développement pour les Odonates ; l’effet de concentration des milieux aquatiques. Les milieux aquatiques occupent une emprise limitée au sein des terrasses alluviales. La reproduction des libellules étant liée à la présence d’eau, un milieu aquatique agit comme un facteur de concentration des espèces ; le caractère thermophile de la vallée de la Seine. Le contexte plus chaud et sec de la vallée favorise la remontée d’espèces d’affinités méridionales en provenance du sud de la France. Plusieurs espèces présentent actuellement une dynamique d’expansion dans la région, en progressant notamment par la vallée de Seine. Les Orthoptères présentent une richesse spécifique brute un peu plus faible (39 espèces), mais représentant tout de même 68 % du pool régional. On retrouve notamment des cortèges d’espèces liés aux habitats sableux des terrasses alluviales, habitats où l’on va également retrouver plusieurs espèces d’affinités méridionales, absente du reste de la région. Les Rhopalocères possèdent la richesse spécifique brute la plus élevée : 56 espèces, mais qui ne représente que 58 % du pool régional. Cette richesse spécifique relative un peu moindre par rapport aux autres groupes s’explique par le nombre important d’espèces de papillons liées aux coteaux Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 29 calcaires en Haute-Normandie, habitats non concernés par cette étude. De plus, le nombre d’espèces de papillons liées aux milieux sableux est plutôt faible dans la région et peu d’espèces caractéristiques ont été observées. 3.1.2 SPÉCIFICITÉ DE LA FAUNE DES TERRASSES Les caractéristiques physiques, écologiques ou anthropiques influent sur l’organisation des peuplements entomologiques observés. Cela est valable pour les Orthoptères et Rhopalocères qui sont liés à la composition ou la structure de la végétation, mais ne fonctionne pas pour les Libellules, plutôt liées à l’existence de milieux aquatiques. La présence d’un substrat sableux, induisant généralement un milieu chaud et sec va donc favoriser le développement de certaines espèces adaptées à ces habitats. Répartition des Orthoptères et Rhopalocères par communautés écologiques 12; 13% Espèces des pelouses ouvertes xérothermophiles 13; 14% Espèces des pelouses et/ou prairies méso-xérophiles Espèces des ourlets, lisières et fourrés thermophiles 14; 15% 18; 19% Espèces des prairies et ourlets mésophiles Espèces des prairies et des lisières hygrophiles 5; 5% Espèces des boisements 12; 13% 20; 21% Espèces ubiquistes Presque la moitié des espèces observées (46 %) présente une affinité pour les milieux chauds et secs. On retrouve notamment 14 % de taxons liés aux secteurs les plus ouverts nettement xérothermophiles à la végétation souvent rase et clairsemée (photo 1). 19 % sont plutôt liés aux zones prairiales plus riches en végétation, mais où le caractère chaud et sec reste prononcé (photo 3). Enfin, 13 % des espèces vont plutôt coloniser les milieux de transition, correspondant à des parcelles en cours d’embroussaillement (photo 5). Ce sont, parmi ces trois communautés écologiques, que l’on retrouve les espèces typiques des milieux ouverts et sableux de terrasses alluviales. A. Simon Photo 1. Pelouse sableuse xérothermophile M. Lorthiois Photo 2. Tetrix tenuicornis (le Tétrix des carrières), un Orthoptère des milieux pionniers Les secteurs où la végétation est rase et clairsemée et où le sol sableux est largement apparent, ne vont généralement permettre le développement que d’un très faible nombre d’espèces. Néanmoins, 30 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 ces taxons sont souvent rares et caractéristiques de ces habitats particuliers et présentent une valeur patrimoniale élevée. On y retrouvera notamment plusieurs espèces d’Orthoptères d’affinités méridionales marquées comme Myrmeleotettix maculatus (le Gomphocère tacheté) ou Tetrix tenuicornis (le Tétrix des carrières), deux espèces « assez rares » en Haute-Normandie et considérées comme menacées dans la liste rouge régionale (photo 2). A. Simon Photo 3. Prairie mésoxérophile A. Simon Photo 4. Melitaea cinxia (la Mélitée du plantain) une espèce des prairies maigres et fleuries Les prairies maigres qui se développent sur les zones sableuses des terrasses offrent une végétation souvent fleurie et diversifiée favorable au développement des Rhopalocères. On y observe notamment Melitaea cinxia (la Mélitée du plantain), espèce « assez rare » en Haute-Normandie et considérée comme quasiment menacée dans la liste rouge régionale (photo 4). La structure de végétation, à la fois élevée et peu dense favorise le développement d’Orthoptères remarquables comme Platycleis tesselata (la Decticelle carroyée), ou encore Ruspolia nitidula (le Conocéphale gracieux), une autre espèce d’affinité méridionale, plutôt en expansion dans la région. A. Simon Photo 5. Prairie en cours d'embroussaillement A. Simon Photo 6. Callophrys rubi (le Thécla de la ronce), un papillon fréquent dans les faciès d’embroussaillement Les secteurs présentant des faciès d’embroussaillement constituent des zones de transition qui ne subsistent en place que quelques années, entre l’abandon d’une prairie et la colonisation par le boisement. De telles zones apparaissent très intéressantes pour l’entomofaune et plusieurs espèces possèdent d’importantes populations lorsque cet habitat est présent sur terrasses alluviales. C’est par exemple le cas de Callophrys rubi (le Thécla de la ronce), une espèce « assez commune » que l’on retrouve potentiellement dans toute la Normandie, mais qui apparait plus fréquente et abondante sur ces zones de terrasses (photo 6). En complément des espèces liées aux milieux chauds et secs, les habitats de terrasses permettent le développement de taxons peut-être moins caractéristiques des zones sableuses ouvertes, mais qui trouvent néanmoins sur les terrasses alluviales de la seine, des conditions favorables à leur développement. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 31 A. Simon Photo 7. Prairie mésophile dominée par une matrice dense de graminées M. Lorthiois Photo 8. Metrioptera roeselii (la Decticelle bariolée), une sauterelle très fréquente dans les prairies On retrouve ainsi un large cortège (21 %) d’espèces liées aux milieux prairiaux plus mésophiles et classiques. Cette communauté écologique est la plus représentée dans les résultats. Il s’agit le plus souvent d’espèces relativement répandues en Haute-Normandie, capables de coloniser la plupart des milieux ouverts de la région et qui se retrouvent donc présents sur les terrasses alluviales de la vallée de la Seine, au même titre que d’autres habitats de la région. A. Simon Photo 9. Clairière forestière richement fleurie M. Lorthiois Photo 10. Apatura iris (le Grand mars) une espèce forestière discrète d'intérêt patrimonial Les espèces liées aux milieux boisés se révèlent logiquement également assez nombreuses. En effet, de vastes secteurs de terrasses alluviales sont occupés par les forêts, et ces dernières présentent des faciès diversifiés d’une boucle de la Seine à l’autre. La présence de lisières, chemins forestiers, clairières ou encore de parcelles en régénération, favorisent le développement d’un cortège typiquement forestier dont certaines espèces comme Apatura iris (le Grand mars) ou Quercusia quercus (le Thécla du chêne) sont considérées d’intérêt patrimonial en Haute-Normandie. A. Simon A. Simon Photo 11. Mare dans une clairière forestière 32 Photo 12. Ceriagrion tenellum (l’Agrion délicat), une libellule d'intérêt patrimonial que l'on rencontre dans les mares riches en végétation Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Malgré le caractère généralement sableux et drainant des terrasses alluviales, il est fréquent d’y rencontrer un certain nombre de milieux aquatiques. Le périmètre des basses terrasses héberge de nombreuses ballastières issues de l’activité d’extraction de granulats, tandis que le périmètre des hautes terrasses est particulièrement riche en mares forestières. Si ces habitats favorisent le développement de quelques espèces d’Orthoptères comme Tetrix ceperoi (le Tétrix des vasières), c’est surtout le groupe des libellules qui profite de la présence de ces milieux. On retrouve notamment Ceriagrion tenellum (l’Agrion délicat), une espèce « rare » en Haute-Normandie et considérée comme « en danger » sur la liste rouge régionale. Enfin, on note également la présence d’un cortège d’espèces qualifiées « d’ubiquistes ». Ces taxons sont très communs dans la région et capables de coloniser pratiquement tous les habitats de HauteNormandie. Ils ne présentent en général pas d’intérêt patrimonial particulier. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 33 3.1.3 DIFFÉRENCES ENTRE BASSES ET HAUTES TERRASSES ALLUVIALES 9025 données réparties entre 724 sites d’inventaires ont été analysées. Les sites d’inventaires se répartissent de manière quasi équivalente entre basses (51,5 %) et hautes (48,5 %) terrasses. En revanche, le nombre de données récoltées est un peu moins équilibré puisque 55,7 % des observations ont été réalisées sur basses terrasses contre 44,3 % sur les hautes. Cela signifie qu’en moyenne, pour une pression d’observation à peu près équivalente, plus d’observations ont été réalisées sur les basses terrasses. Tab.6. Répartition des inventaires et observations entre basses et hautes terrasses Basses terrasses Hautes terrasses Ensemble Nombre de sites d’inventaires 373 51,5 % 351 48,5 % 724 Nombre de données 5035 55,7 % 3990 44,3 % 9025 Nombre moyen de données par site d’inventaire L’analyse de la richesse spécifique brute confirme ce constat. Pour les trois principaux groupes d’insectes étudiés, le nombre d’espèces observées est légèrement supérieur sur les périmètres de basses terrasses par rapport aux hautes. En moyenne trois ou quatre espèces ont été observées en plus par groupe taxonomique sur les basses terrasses par rapport aux hautes. 13,5 50 40 30 Hautes terrasses 20 Basses terrasses 10 Ensemble 0 Odonates 100 80 70 60 50 13 Espèces des pelouses ouvertes xéro-thermophiles 11 16 15 11 10 5 5 12,5 Richesse spécifique brute 60 Richesse spécifique par communauté écologique et périmètres de terrasses 90 11,4 Espèces des pelouses et/ou prairies méso-xérophiles Espèces des ourlets, lisières et fourrés thermophiles Espèces des prairies et des lisières hygrophiles Rhopalocères Orthoptères Cette différence tient probablement au fait que les basses terrasses présentent des potentialités d’accueil un peu plus importantes pour les espèces typiques des habitats sableux ouverts. Les zones forestières et agricoles semblent en effet plus développées sur les hautes terrasses et les milieux ouverts à caractère naturel moins répandus Cet aspect semble être confirmé par la comparaison de la richesse spécifique de 20 14 14 chaque communauté écologique (pour les Espèces des boisements 10 Orthoptères et Rhopalocères). Alors que les 12 12 Espèces ubiquistes 0 communautés écologiques non RS basse RS haute représentatives des milieux sableux secs des terrasse terrasse terrasses présentent exactement le même nombre d’espèces entre hautes et basses terrasses, les communautés écologiques liées aux milieux chauds et secs, sont un peu moins riches sur les hautes terrasses que sur les basses. 40 30 34 20 20 Espèces des prairies et ourlets mésophiles Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Ainsi, l’ensemble des terrasses alluviales de la Seine contribue de manière importante au développement de l’entomofaune régionale, puisque plus des deux tiers des espèces appartenant aux trois principaux groupes d’insectes étudiés ici (Rhopalocères, Odonates, Orthoptères) y ont été recensés. Au sein des terrasses, il apparait que les basses terrasses contribuent un peu plus efficacement au maintien de l’entomofaune typique des milieux sableux ouverts puisque le nombre d’espèces recensées y est légèrement supérieur au nombre d’espèces recensées sur les hautes terrasses. 3.2 ANALYSE PATRIMONIALE 3.2.1 RICHESSE DES TERRASSES EN TAXONS D’INTÉRÊT PATRIMONIAL 41 espèces considérées comme d’intérêt patrimonial en Haute-Normandie d’après les référentiels régionaux, ont été observées sur l’ensemble du périmètre des terrasses alluviales. 36 d’entre-elles ont été inventoriées sur les basses terrasses contre 31 pour les hautes terrasses. Néanmoins, certaines espèces considérées comme d’intérêt patrimonial à l’échelle régionale ne sont observées sur terrasses alluviales que de manière accidentelle et occasionnelle. Il peut par exemple s’agir d’espèces liées aux coteaux calcaires, qui lors de tentatives de dispersion ou sous l’effet des conditions climatiques, se retrouvent sur les terrasses alluviales. Ces espèces ne se reproduisent généralement pas, ou alors de manière très marginale, sur ces habitats. Elles sont représentées par le signe « - » dans le tableau ci-dessous (tab.7). Les autres espèces d’intérêt patrimonial observées dans le cadre de cette étude utilisent les habitats de terrasses alluviales pour se reproduire. Elles sont représentées par le signe « + » dans le tableau ci-dessous (tab.7). Une telle différenciation permet de mettre en évidence les espèces qui apparaissent véritablement typiques des habitats des terrasses alluviales par rapport aux espèces plus occasionnelles voire accidentelles. Parmi les espèces se reproduisant sur les terrasses, certaines sont répandues et se retrouvent dans toute la région. D’autres, au contraire, apparaissent intimement liées aux milieux sableux ouverts. Ces dernières espèces font l’objet d’une fiche de présentation en annexe. Basses terrasses Hautes terrasses ODONATES Patrimonialité RHOPALOCERES Liste rouge régionale Ordre Rareté HN Tab.7. Liste des espèces patrimoniales observées sur les périmètres de hautes et basses terrasses. Apatura ilia Le Petit Mars changeant PC LC P Espèces des boisements + + Apatura iris Le Grand Mars changeant PC LC P Espèces des boisements + + Cyaniris semiargus Le Demi-Argus PC LC P Espèces des prairies et des lisières hygrophiles - - Glaucopsyche alexis L'Azuré des Cytises AR LC P Espèces des pelouses ou prairies mésoxérophiles Iphiclides podalirius Le Flambé PC LC P Espèces des ourlets, lisières et fourrés thermophiles - - Lampides boeticus L'Azuré porte-queue AR LC P Espèces des pelouses ouvertes xérothermophiles - - Lysandra bellargus L'Azuré bleu-céleste AC NT P Espèces des pelouses ouvertes xérothermophiles - Melitaea cinxia La Mélitée du Plantain AR NT P Espèces des pelouses ou prairies mésoxérophiles + + Quercusia quercus Le Thécla du Chêne AR LC P Espèces des boisements + + Satyrium pruni Le Thécla du Prunier R LC P Espèces des ourlets, lisières et fourrés thermophiles + + Aeshna affinis Aeschne affine AR EN HP Brachytron pratense Aeschne printanière R EN HP - Ceriagrion tenellum Agrion délicat R EN HP + Cordulegaster boltonii Cordulégastre annelé R EN HP - Gomphus vulgatissimus Gomphus vulgaire RR EN HP + Lestes barbarus Leste sauvage PC NT P + Lestes dryas Leste dryade E NE P Nom scientifique Nom vernaculaire Communauté écologique Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 - + + + - 35 ORTHOPTERES Lestes sponsa Leste fiancé RR CR HP - Lestes virens Leste verdoyant RR CR HP - Leucorrhinia pectoralis Leucorrhine à gros thorax E NE P Libellula fulva Libellule fauve PC NT P + + Libellula quadrimaculata Libellule à quatre taches PC NT P + + Onychogomphus forcipatus Gomphe à pinces AR VU HP - - Orthetrum brunneum Orthétrum brun AR VU HP - Orthetrum coerulescens Orthétrum bleuissant AR VU HP - Sympetrum danae Sympétrum noir RR CR HP - - Chorthippus dorsatus Criquet verte-échine PC LC P Espèces des prairies et ourlets mésophiles + + Chorthippus mollis Criquet des jachères AR NT P Espèces des pelouses ouvertes xérothermophiles + + Chorthippus vagans Criquet des Pins AR LC P Espèces des pelouses ouvertes xérothermophiles + + Clonopsis gallica Phasme de France RR VU HP Espèces des ourlets, lisières et fourrés thermophiles + Ephippiger ephippiger Ephippigère des vignes AR NT P Espèces des ourlets, lisières et fourrés thermophiles + Eumodicogryllus bordigalensis Grillon bordelais E DD P Espèces des pelouses ouvertes xérothermophiles + + Myrmeleotettix maculatus Gomphocère tacheté AR VU HP Espèces des pelouses ouvertes xérothermophiles + + Oecanthus pellucens Grillon d'Italie PC LC P Espèces des ourlets, lisières et fourrés thermophiles + + Phaneroptera nana Phanéroptère méridional E DD P Espèces des ourlets, lisières et fourrés thermophiles + + Platycleis albopunctata Decticelle chagrinée PC LC P Espèces des pelouses ou prairies mésoxérophiles + + Platycleis tessellata Decticelle carroyée AR LC P Espèces des pelouses ouvertes xérothermophiles + + Ruspolia nitidula Conocéphale gracieux AR LC P Espèces des pelouses ouvertes xérothermophiles + + Stenobothrus lineatus Criquet de la Palène PC LC P Espèces des pelouses ou prairies mésoxérophiles - Tetrix ceperoi Tétrix des vasières PC LC P Espèces des prairies et des lisières hygrophiles + + Tetrix tenuicornis Tétrix des carrières AR NT P Espèces des pelouses ouvertes xérothermophiles + + Nombre total d’espèces patrimoniales recensées 36 31 Nombre d’espèces patrimoniales, autochtones et régulières recensées 25 21 - Légende : P: patrimoniale (espèces rares ou typiques des habitats de terrasses) HP : hautement Patrimoniale (espèces menacées d’après les listes rouges régionales) +: espèces patrimoniales présentant des populations reproductrices sur terrasses alluviales. -: espèces patrimoniales occasionnelles et non caractéristiques des terrasses alluviales. 25 espèces d’intérêt patrimonial, autochtones et régulières ont été recensées sur l’ensemble des terrasses alluviales. La totalité de ces espèces se retrouvent sur les périmètres des basses terrasses et 21 ont été observées sur le périmètre des hautes terrasses. Il s’avère que c’est au sein du groupe des Orthoptères que l’on retrouve le plus grand nombre d’espèces considérées comme patrimoniales, notamment sur les basses terrasses. La plupart d’entreelles y sont régulières et présentent des populations bien établies. Les Libellules faisant preuve de capacités de dispersion assez importantes pour des insectes, c’est dans ce groupe que l’on retrouve le plus d’espèces observées de manière occasionnelle. Seules 6 espèces sur les 16 considérées comme patrimoniales présentent un caractère régulier sur le périmètre d’étude. Enfin, on remarquera la quasi-absence d’espèces patrimoniales de Rhopalocères liées aux milieux ouverts. À l’exception de Melitaea cinxia, les autres espèces patrimoniales autochtones sont liées aux milieux boisés ou en cours de transition. 3.2.2 RARETÉ ET MENACE DE L’ENTOMOFAUNE ÉTUDIÉE 3.2.2.1 Classes de rareté de l’entomofaune des terrasses alluviales. Les récents référentiels régionaux publiés par l’OBHN proposent des statuts de rareté établis selon une méthodologie commune aux trois groupes étudiés. Il est donc possible de réaliser une comparaison de ces statuts entre les groupes. 36 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Il apparait qu’en proportion, ce sont les libellules qui présentent la plus grande part d’espèces rares sur les zones prospectées. On retrouve ainsi plus de 42 % d’espèces appartenant aux 4 catégories les plus rares (exceptionnelles (E), très rares (RR), rares (R) et assez rares (AR)). Cette proportion est de 30 % chez les Orthoptères et seulement 11 % chez les Rhopalocères. La diversité des habitats aquatiques présents sur terrasses alluviales (milieux pionniers courants ou stagnants, mares ouvertes ou forestières…) couplées à la forte mobilité des Odonates, expliquent en grande partie ce résultat. Proportion de chaque statut de rareté par groupe taxonomique 100% 90% 80% 70% 11 4 16 2 5 3 11 3 7 8 60% 50% 11 40% 30% 20% 10% 0% 10 R AR 6 PC 5 AC C 12 10 Rhopalocères RR 6 17 6 E CC 2 Odonates Orthopteres Au cumul des trois groupes, ce sont donc six espèces « exceptionnelles », sept espèces « très rares », six espèces « rares » et 19 espèces « assez rares » qui fréquentent les habitats de terrasses alluviales. Ces résultats, qui correspondent à près de la moitié des pools régionaux des statuts de rareté concernés, démontrent toute l’importance des terrasses alluviales pour l’accueil de l’entomofaune rare et remarquable. En ciblant les 25 espèces patrimoniales autochtones (tab.7), on remarque alors que ce sont les Orthoptères qui présentent, en proportion, le plus grand nombre d’espèces rares. Une très large majorité des espèces patrimoniales d’Orthoptères apparaissent liées aux habitats de terrasses alluviales, là où cette part est plus faible pour les Odonates et Rhopalocères. Proportion de statut de rareté des espèces patrimoniales autochtones par groupe taxonomique 100% 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% 1 1 1 2 2 Rhopalocères 3.2.2.2 2 1 1 7 E RR R AR 3 4 Odonates Orthopteres Niveaux de menace de l’entomofaune des terrasses alluviales La notion de menace est totalement indépendante de celle de rareté. En effet, une espèce peut être rare sur un territoire sans pour autant apparaitre menacée. C’est par exemple le cas des espèces d’affinités méridionales actuellement en expansion dans la région. Alors qu’à l’inverse, une espèce potentiellement présente sur une large portion du territoire peut présenter un déclin marqué et risquer de disparaitre à plus ou moins long terme. Cette fois encore, ce sont les Libellules qui présentent la plus grande proportion d’espèces menacées. Avec trois espèces observées considérées comme « en danger critique » (CR) et cinq autres comme « en danger » (EN) de disparition, les terrasses alluviales accueillent des espèces particulièrement sensibles. Précisons de plus, que deux espèces sont classées dans la catégorie « non évaluée » car leur présence dans la région n’a été confirmée qu’après le travail d’élaboration de la liste rouge régionale (2010). Il s’agit d’espèces accidentelles exceptionnelles (Lestes dryas (le Proportion de chaque statut de menace par groupe taxonomique 100% 90% 1 2 2 3 80% 5 70% 3 3 60% 50% 2 2 2 3 NE NA DD CR 53 40% 30 VU 26 30% EN 20% NT 10% LC 0% Rhopalocères Odonates Orthopteres Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 37 Leste des bois) et Leucorrhinia pectoralis (la Leucorrhine à gros thorax)) dont la reproduction n’est pas confirmée dans la région. Les Orthoptères présentent également plusieurs espèces sensibles ou menacées. Deux taxons sont ainsi considérés comme « vulnérables » à un risque de disparition et trois autres comme « quasiment menacés ». Deux autres espèces sont classées en « non applicable », c’est-à-dire qu’il s’agit d’espèces exogènes à la faune normande, introduites plus ou moins récemment (Tylopsis lilifolia (le phanéroptère liliacé) et Acheta domesticus (le Grillon domestique)) et pour lesquelles le risque de disparition n’a donc pas de véritable sens écologique. Enfin, les connaissances apparaissent insuffisantes pour évaluer le risque de menace pesant sur deux autres espèces. Les Rhopalocères n’hébergent qu’une seule espèce considérée comme quasiment menacée. Si l’on ne retient que les 25 espèces d’intérêt patrimonial, autochtones et régulières sur les terrasses alluviales, ce sont toujours les Libellules 100% qui hébergent les cortèges d’espèces les plus 2 90% 1 sensibles. Parmi les six espèces patrimoniales de 80% 2 3 70% Libellules qui se reproduisent régulièrement sur D 3 60% les habitats de terrasses alluviales, trois sont D 50% EN considérées en catégorie EN et trois autres en NT. 40% 4 Cette situation tient sans doute aux nombreuses 30% 3 7 20% atteintes portées de manière générale aux milieux 10% aquatiques. Les zones humides ont perdu plus de 0% 50 % de leur superficie au cours du dernier siècle. Rhopalocères Odonates Orthopteres Si la création des ballastières apportent des milieux de substitution et ont pu profiter à certaines espèces qui se sont adaptées, elles n’offrent cependant pas toujours les conditions nécessaires pour des espèces plus exigeantes, qui se retrouvent ainsi limitées à quelques sites isolés. Plusieurs espèces liées aux milieux pionniers et, dans une moindre mesure, aux mares forestières acides, présentent aujourd’hui des risques de disparition. Proportion de statut de menace des espèces patrimoniales autochtones par groupe taxonomique Cinq espèces sensibles d’Orthoptères (deux classées en « VU » et trois autres en « NT ») et une espèce de Rhopalocère possèdent également des populations bien établies sur terrasses alluviales. Les terrasses alluviales de la vallée de Seine accueillent, au moins de manière occasionnelle, 21 espèces menacées à l’échelle régionale. Cela représente 39 % des 54 espèces menacées de Rhopalocères, Odonates ou Orthoptères en Haute-Normandie. Douze d’entre-elles y présentent des populations autochtones bien établies et dont le développement est directement lié aux habitats de terrasses alluviales. Ainsi, les habitats de terrasses alluviales contribuent directement à la conservation d’un peu plus d’un cinquième des espèces menacées de Rhopalocères, Orthoptères et Odonates de Haute-Normandie. 38 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 3.3 ANALYSE PAR BOUCLE 3.3.1 RICHESSE SPÉCIFIQUE PAR BOUCLE La richesse spécifique varie considérablement d’une boucle de la Seine à l’autre. Celle-ci est comprise entre une dizaine d’espèces pour la plus pauvre, à plus d’une centaine pour la plus riche. Tab.8. Richesse spécifique par boucle et par type de terrasses (par ordre décroissant du nombre d’espèces observées). Nom de la boucle Tosny Courcelles-sur-Seine/Forêt des Andelys Elbeuf/Pont-de-l'Arche Gaillon Poses Notre-Dame-de-l'Isle/Port-Mort Rouen Brotonne Saint-Aubin-lès-Elbeuf/Les Authieux-sur-le-Port-Saint-Ouen Anneville-Ambourville Andé Vernon rive gauche/Forêt de Bizy Roumare Vernon rive droite / vallée de l'Epte Saint-Sulpice-de-Graimbouville/Foulbec Jumièges Igoville/Romilly-sur-Andelle Notre-Dame-de-Gravenchon La Rive-sous-Venables/Venables Quillebeuf Vallée d’Eure rive droite Vallée d'Eure rive gauche Basses terrasses 106 93 78 85 86 82 57 64 59 71 61 23 7 16 23 21 1 5 10 Nombre d’espèces Hautes terrasses 55 49 83 15 75 65 63 50 47 71 69 55 47 40 29 34 26 19 17 - Ensemble 106 97 92 87 86 82 79 77 73 72 72 71 69 55 51 44 39 38 27 19 17 10 Plusieurs facteurs influent bien évidemment sur ces résultats : la superficie. Plus une boucle est grande et plus elle offre d’habitats potentiels pour l’accueil de l’entomofaune des terrasses. A l’inverse, une boucle de petite taille réduit les chances d’observer un nombre important d’espèces ; l’occupation du sol. Certaines boucles sont plus urbanisées ou industrialisées que d’autres. C’est par exemple le cas du secteur de Notre-Dame-de-Gravenchon où il ne subsiste que peu d’habitats accueillants pour l’entomofaune. D’autres boucles (Brotonne, Jumièges, Roumare) sont très largement dominées par les secteurs forestiers ou agricoles. Les milieux à caractère naturel y sont présents, mais peu favorables au développement d’un grand nombre d’espèces ; les conditions mésoclimatiques. Il est connu que la vallée de Seine constitue un secteur au sein duquel les conditions climatiques à l’échelle de la région apparaissent un peu plus chaudes et sèches. Cette caractéristique favorise la remontée d’espèces d’affinités méridionales, selon un axe sud-est/nord-ouest et les boucles situées le plus en amont, peuvent donc accueillir des espèces absentes des boucles situées plus proche de l’embouchure de la Seine ; la pression d’observation. Si les prospections menées dans le cadre de cette étude entre 2011 et 2014 se veulent homogènes entre les différentes boucles, il n’en est pas de même pour les données bibliographiques intégrées aux résultats. Ainsi, certaines boucles ont fait l’objet, par le passé d’études approfondies, qui n’existent pas sur d’autres boucles (territoire du PNR des Boucles de la Seine normande, sites gérés par le Conservatoire d’espaces naturels). Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 39 Tenant compte de ces différents facteurs, il semble donc assez logique que les boucles de Tosny, Courcelles-sur-Seine, Elbeuf, Gaillon et Poses figurent parmi les boucles les plus riches en espèces. Au moins les deux tiers des espèces recensées sur l’ensemble des périmètres ont été retrouvées sur chacun de ces secteurs. Il est intéressant de constater que la boucle de Rouen, pourtant très fortement urbanisée et soumise à de nombreuses pressions anthropiques, présente néanmoins une richesse spécifique importante. Cela tient au fait qu’il persiste encore quelques secteurs préservés de terrasses alluviales, s’apparentant à des landes, dans la forêt du Rouvray. Ces quelques secteurs abritent encore des espèces remarquables typiques des habitats de terrasses alluviales. La carte de la richesse spécifique (page suivante) permet de constater qu’au sein même d’une boucle, il existe une grande hétérogénéité et que même si une boucle héberge un grand nombre d’espèces, l’ensemble du périmètre n’apparait pas forcément intéressant. Par exemple, dans la boucle de Poses, on remarquera que c’est dans le secteur sud que se concentrent le plus grand nombre de taxons, alors que la partie nord, plus agricole, apparait bien plus pauvre. 3.3.2 RICHESSE EN TAXONS D’INTÉRÊT PATRIMONIAL PAR BOUCLE Le fait de cibler les espèces à caractère patrimonial ne perturbe pas fondamentalement le classement et l’importance des boucles dans l’accueil de l’entomofaune des terrasses. Tab.9. Nombre d’espèces d’intérêt patrimonial par boucle et par type de terrasses (par ordre décroissant du nombre d’espèces observées). Nom de la boucle Nombre d’espèces patrimoniales Ensemble Hautes terrasses Basses terrasses Tosny 20 5 20 Gaillon 16 1 17 Elbeuf/Pont-de-l'Arche 15 12 17 Courcelles-sur-Seine/Forêt des Andelys 16 2 16 Poses 14 - 14 Rouen 8 10 12 Notre-Dame-de-l'Isle/Port-Mort Anneville-Ambourville 11 - 11 10 6 11 Andé 9 4 11 Brotonne 6 7 11 Saint-Aubin-lès-Elbeuf/Les Authieux-sur-le-Port-Saint-Ouen Roumare 7 7 10 1 8 8 Vernon rive gauche/Forêt de Bizy 40 8 8 Vernon rive droite/Vallée de l'Epte - 6 6 Saint-Sulpice-de-Graimbouville/Foulbec La Rive-sous-Venables/Venables 1 3 4 - 3 3 Igoville/Romilly-sur-Andelle 1 1 2 Jumièges 0 1 1 Vallée d’Eure rive droite Quillebeuf 0 1 1 1 1 Vallée d'Eure rive gauche 1 - 1 Notre-Dame-de-Gravenchon 0 0 0 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 41 3.4 PRÉSENTATION D’ESPÈCES D’INTÉRÊT PATRIMONIAL ET CARACTÉRISTIQUES DES TERRASSES ALLUVIALES Melitaea cinxia – La Mélitée du plantain Statut de rareté régionale Statut de menace Assez rare Quasiment menacé La Mélitée du plantain est inféodée aux prairies et pelouses maigres à la végétation clairsemée où elle va se reproduire sur diverses espèces végétales comme les piloselles, les centaurées et les plantains. En Haute-Normandie, cette espèce des milieux secs ne subsiste que dans les vallées de Seine et d’Eure où elle se rencontre quasi exclusivement sur terrasses alluviales et, dans une moindre mesure, coteaux calcaires. sur 27 observations concernant une dizaine de localités réparties dans six boucles ont été recensées. Ce taxon « quasiment menacé » à l’échelle régionale souffre de la réduction des milieux prairiaux secs du fait de l’urbanisation importante de la vallée de Seine ou de l’expansion des cultures. Myrmeleottix maculatus – Le Gomphocère tacheté Statut de rareté régionale Statut de menace Assez rare Vunérable Le Gomphocère tacheté est une espèce pionnière liée aux milieux pauvres en végétation où le sol à nu est largement apparent. L’espèce semble apprécier et rechercher les substrats assez grossiers de type sableux. D’affinité thermophile, cette espèce ne se rencontre en Haute-Normandie que dans la vallée de la Seine où elle semble en regression ces 20 dernières années, ce qui lui vaut d’être classée dans la 42 catégorie « vulnérable » de la liste rouge régionale. 48 observations concernant une quinzaine de localités réparties dans huit boucles ont été recensées. Ce taxon « vulnérable» à l’échelle régionale est menacé par la raréfaction des pelouses sableuses pionnières rases, soit en raison de leur destruction directe (aménagement), soit suite à la fermeture progressive du milieu. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Chorthippus mollis – Le Criquet des jachères Statut de rareté régionale Statut de menace Assez rare Quasiment menacé Le Criquet des jachères se développe dans les prairies et pelouses à la végétation clairsemée. En Haute-Normandie, cette espèce des milieux secs ne subsiste que dans les vallées de Seine et d’Eure où elle se rencontre quasi exclusivement sur terrasses alluviales et dans une moindre mesure sur coteaux calcaires. 36 observations concernant une dizaine de localités réparties dans huit boucles ont été recensées. L’espèce s’est révélée être particulièrement abondante dans les boucles de Tosny et Courcelles-sur-Seine où des effectifs de plusieurs dizaines d’individus ont été comptabilisés Ce taxon « quasiment menacé » à l’échelle régionale souffre de la réduction des milieux prairiaux secs du fait de l’urbanisation importante de la vallée de Seine ou de l’expansion des cultures. Platycleis tessellata – La Decticelle carroyée Statut de rareté régionale Statut de menace Assez rare Non menacé La Decticelle carroyée apprécie tout particulièrement les prairies sèches à la végétation clairsemée, mais néanmoins présente. En Haute-Normandie, cette espèce ne se développe que dans les vallées de Seine et d’Eure où elle se rencontre quasi exclusivement sur terrasses alluviales et dans une moindre mesure sur coteaux calcaires. 78 observations concernant une cinquantaine de localités réparties dans 14 boucles ont été recensées. Considérée comme non menacée dans la région en raison de sa capacité à survivre dans des habitats de taille parfois très restreinte, cette espèce assez rare apparait caractéristique des milieux ouverts de terrasses alluviales qu’elle colonise de manière quasi systématique. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 43 Tetrix tenuicornis– Le Tétrix des carrières Statut de rareté régionale Statut de menace Assez rare Quasiment menacé Espèce des milieux pionniers par excellence, le Tétrix des carrières ne colonise exclusivement que les milieux pratiquement dépourvus de végétation. Les pelouses sableuses pionnières au sable apparent constituent un habitat important pour l’espèce. En Haute-Normandie, cette espèce liée aux milieux les plus chauds et secs ne colonise que les coteaux calcaires et terrasses alluviales des vallées de Seine et d’Eure. 30 observations concernant une quinzaine de localités réparties dans neuf boucles ont été recensées. Ce taxon « quasiment menacé » à l’échelle régionale souffre de la destruction des pelouses pionnières qui constituent sont habitat de prédilection. Phaneroptera nana – Le Phanéroptère méridional Statut de rareté régionale Statut de menace Exceptionnel données insuffisantes Le Phanéroptère méridional est une espèce découverte récemment en région HauteNormandie (2007). Comme son nom l’indique, l’espèce est originaire du sud de la France mais semble actuellement en expansion vers le nord. L’espèce a été observée dans des secteurs très secs, en cours d’embrouissaillement. Il semble visiblement que les habitats de terrasses alluviales contribuent à sa progression vers le nord. 44 Deux observations ont été recensées. La première est une donnée bibliographique correspondant à la découverte de l’espèce. La seconde est une nouvelle observation, réalisée à proximité de la précédente, lors des prospections de 2011. Le peu de données disponibles ne permet pas d’évaluer le niveau de menace de cette espèce. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Lestes barbarus – Le Leste sauvage Statut de rareté régionale Statut de menace Peu commun Quasiment menacé Le Leste sauvage est une espèce qui apprécie les mares pionnières mais avec une végétation suffisamment développée (Eléocharis et Joncs notamment). Elle s’accommode des mares temporaires. En Haute-Normandie, l’espèce est potentiellement présente dans toute la région, mais présente souvent des populations plus importantes en vallées de Seine. 20 observations concernant une dizaine de localités réparties dans six boucles ont été recensées. Ce taxon « quasiment menacé » à l’échelle régionale souffre de la dégradation qualitative et quantitative des milieux humides Ceriagrion tenellum – L’Agrion délicat Statut de rareté régionale Statut de menace Rare En danger L’Agrion délicat colonise les mares et étangs forestiers de préférence acides ou oligotrophes présentant une ceinture de végétation assez importante. En Haute-Normandie, cette espèce se rencontre dans les principaux massifs forestiers. Sept observations concernant trois localités réparties dans deux boucles ont été recensées. Quelques mares forestières au substrat sableux des terrasses alluviales offrent des conditions favorables au développement de cet Agrion. Ce taxon considéré comme « rare » et « en danger » à l’échelle régionale est menacé par la fermeture progressive des mares forestières et l’eutrophisation de l’eau. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 45 46 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 4 ANALYSE DE L’ENTOMOFAUNE DES TERRASSES ALLUVIALES (HYMÉNOPTÈRES) Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 47 4.1 ANALYSE GÉNÉRALE DES HYMÉNOPTÈRES INVENTORIÉS 4.1.1 RICHESSE SPÉCIFIQUE GÉNÉRALE Les prospections menées dans le cadre de cette étude ciblent les Sphéciformes de la boucle de Courcelles-sur-seine où un inventaire approfondi a été mené principalement en 2012, auquel s’ajoute quelques observations réalisées en 2010 et 2011. D’autre part, une étude réalisée en 2010 pour le compte du PNR des Boucles de la Seine normande portait sur l’ensemble des Hyménoptères de la boucle d’Anneville-Ambourville (STALLEGER & MOULIN 2010). Les résultats de cette étude nous ont été communiqués afin de réaliser un comparatif entre les deux boucles de terrasses alluviales. Dans les deux cas, les inventaires de terrain ont été réalisés à l’aide de tentes malaises, à vue et aux pièges jaunes. Ils ont permis de recenser et déterminer près de 300 espèces d’Hyménoptères, toutes familles confondues. Tab.10. Richesse spécifique du groupe des Hyménoptères sur les basses terrasses de Courcelles-sur-Seine et Anneville-Ambourville Groupe taxonomique HYMENOPTERES Familles Courcellessur-Seine AnnevilleAmbourville Nombre d’espèces remarquables Apidae / 127 Non connu Chrysididae 2 9 Non connu Cynipidae / 1 Non connu Formicidae / 11 Non connu Pompilidae / 21 Non connu Tiphiidae / 2 Non connu Sphéciformes (Crabronidae, Sphecidae) 65 42 34* Vespidae 1 13 Non connu Argidae / 3 Non connu Cephidae / 3 Non connu Cimbicidae / 2 Non connu Pamphiliidae / 5 Non connu Tenthredinidae / 38 Non connu Mutillidae 1 / Non connu Total 69 277 *d’après les données collectées dans la bibliographie (plus particulièrement les ouvrages de la faune de France en 3 volumes sur les Sphecidae). Bien que non comparable en raison du nombre différent de groupes étudiés sur chacun des périmètres, le nombre de taxons recensés semble relativement important par rapport à d’autres habitats. Cela s’explique en partie par le fait que les hautes et les basses terrasses alluviales constituent des milieux d’accueil très favorables pour les Hyménoptères. A l’instar des autres groupes entomologiques, la diversité des habitats présents, couplée au caractère thermophile général de la vallée de la Seine, favorisent le développement d’un cortège diversifié d’Hyménoptères. Il apparait de plus, que le caractère sableux des terrasses alluviales favorise un cortège important d’espèces, notamment celles d’affinités méridionales, qui vont nidifier dans le sable. Par exemple, au vu des derniers inventaires menés dans la région et les régions voisines depuis 2006 (Île-de-France : Val d’Oise, GADOUM, 2006 ; Centre : l’Eure-et-Loir (28), le Loir-et-Cher (41) et le Loiret (45), LARIVIERE, 2002), il semble que certaines espèces de Sphécides comme Prionyx kyrbii présentent actuellement une dynamique d’expansion dans le nord de la France, en progressant notamment par la vallée de Seine. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 49 4.1.2 ZOOM SUR LES HYMÉNOPTÈRES SPHÉCIFORMES SUR DEUX TERRASSES ALLUVIALES Le groupe des Sphéciformes (Crabronidae, Sphecidae…) ayant fait l’objet d’inventaires très approfondis soit directement lors de cette étude, soit préalablement lors d’une étude menée par le PNRBSN (STALLEGGER & MOULIN 2010), nous proposons une analyse ciblée de ce groupe. Ainsi, 83 taxons du groupe des Sphéciformes ont été observés sur l’ensemble des deux sites, ce qui représente 21 % de la faune française concernant ce groupe (400 espèces répertoriées en France) avec respectivement 65 taxons inventoriés sur Courcelles-sur-Seine (16 % de la faune française) et 42 sur Anneville-Ambourville (10,5 % de la faune françaises) dont 23 sont communs aux deux sites (voir tableau ci-dessous). 4.1.2.1 Approche patrimoniale des Sphéciformes D’après les cartes de répartition des espèces provenant des trois tomes de la Faune de France (BITSCH et al., 1993 ; 1997 ; 2001), cette étude a permis de découvrir en l’état actuel de nos connaissances, 37 espèces ont été découvertes récemment dans la région dont 18 nouvelles pour le département de la Seine-Maritime, soit près de 43 % de la faune inventoriée sur la boucle d’Anneville-Ambourville et 34 pour le département de l’Eure, soit près de 52 % de la faune inventoriée sur les basses terrasses de Courcelles-sur-Seine. Six espèces présumées nouvelles pour la Seine-Maritime et la région sont exclusivement connues de la boucle d’Anneville-Ambourville : Crossocerus exiguus, Dinetus pictus et Psen ater (espèces à tendance psammophile) ; Crossocerus cetratus, Crossocerus nigritus et Trypoxylon attenuatum (espèces liées aux lisières et boisements). 19 espèces présumées nouvelles pour l’Eure et la région sont exclusivement connues des terrasses alluviales de Courcelles-sur-Seine : Alysson spinosus, Crossocerus wesmaeli, Diodontus luperus, Harpactus elegans, Mimesa equestris, Mimumesa atratina, Miscophus ater, Nysson niger, Tachysphex fulvitarsis, Tachysphex tarsinus et Tachysphex unicolor (espèces liées aux pelouses et milieux pionniers à tendance psammophile) ; Crabro peltarius, Diodontus luperus, Dryudella tricolor, Harpactus laevis, (espèces liées aux pelouses, ourlets, fourrés et landes thermophiles et nichant au sol à tendance psammophile également) ; et Crossocerus capitosus, Nitela spinolae, Nitela borealis et Spilomena beata (espèces liées aux lisières et boisements). Sept espèces présumées nouvelles pour les deux départements et la région ont été trouvées conjointement sur les deux sites : Astata minor, Nysson maculosus, et Prionyx kirbii (espèces liées aux pelouses ouvertes et milieux pionniers dont les deux dernières sont psammophiles) ; Passaloecus singularis, Stigmus solskyi, Trypoxylon deceptorium et Trypoxylon minus (espèces liées aux lisières et boisements). Suite aux inventaires réalisés sur les deux sites, 34 espèces peuvent être considérées comme remarquables au regard des connaissances actuelles. Ces espèces ont été jugées patrimoniales du fait de leur répartition (espèces peu ou pas citées régionalement et en limite d’aire de répartition) ou du fait d’une écologie particulière bien spécifique (nidification de Crabro peltarius au sein des garennes de lapin sur sol dénudé ; nidification de Crossocerus wesmaeli sur des parois sableuses verticales et dénudées : type front de taille et ou falaise ; affection particulière des roselières et phragmitaies pour Rhopalum gracile et Trypoxylon deceptorium. 4.1.2.2 Spécificité de la faune des terrasses Les caractéristiques physiques, écologiques ou anthropiques – présentées plus en détail dans la partie végétation - influent sur l’organisation du peuplement observé. Ceci est valable également pour les Hyménoptères Sphéciformes qui sont liés aussi à la composition ou à la structure de la végétation. De nombreuses espèces recensées semblent intimement liées à la présence de zones sableuses et notamment de sable fin, dépourvu de végétation. Ainsi, la surface de recouvrement semble être un facteur prépondérant pour l’installation et la nidification des espèces (certaines espèces nichant sur les sols dénudés : Cerceris sp., Mimesa equestris, Crossocerus wesmaeli. 50 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 La présence d’un substrat sableux, induisant une certaine chaleur va donc favoriser le développement de certaines espèces adaptées à ces habitats. Citons les plus rares : Prionyx kirbii, Mimesa bruxellensis, Lindenius pygmaeus, Dinetus pictus, Miscophus ater, Tachysphex fulvitarsis, Tachysphex pompiliformis, Tachysphex tarsinus, Tachysphex unicolor… La présence de bois mort et de végétaux à tiges creuses va également influencer la nidification chez certains genres. Nous avons donc distingué trois groupes selon la nature du substrat utilisé : - les espèces rubicoles, qui nichent dans les tiges creuses et autres galeries de faible diamètre. Elles sont représentées par 21 espèces sur les deux sites avec respectivement huit espèces uniquement sur Anneville-Ambourville, six espèces exclusives sur Courcelles-sur-Seine et sept espèces communes aux deux sites. C’est par excellence le groupe des Tripoxylon, Pemphredon, Passaloecus, Nitela et quelques Crossocerus. Parmi les plus rares, citons Crossocerus cetratus, Crossocerus nigritus, Passaloecus singularis, Stigmus solskyi, Trypoxylon attenuatum, Trypoxylon medium, Trypoxylon minus (espèces présumées nouvelles pour Anneville-Ambourville et la région), Crossocerus capitosus, et Trypoxylon scutatum pour celles présentes à Courcelles-sur-Seine ; À noter la présence de deux espèces (Rhopalum gracile et Trypoxylon deceptorium, espèce nouvelle pour la région) plutôt liées aux zones humides qui nidifient dans les tiges creuses des phragmites et autres grands hélophytes. - les espèces lignicoles qui nidifient dans des galeries dans le bois mort. Ces espèces sont au nombre de dix et sont représentées par les genres Crossocerus (ici annulipes et megacephalus), Ectemnius, quelques Pemphredon (lugubris et rugifer), et le genre Spilomena (dont Spilomena beata, grande rareté, espèce découverte à Courcelles-sur-Seine, en limite d’aire septentrionale et connue seulement de neuf départements dont huit dans le sud de la France) ; - les espèces qui nidifient dans le sol. Elles sont ici très majoritaires, représentant 52 des 83 espèces de Sphécides recensés soit près de 63 % du nombre total d’espèces. Ce cortège regroupe à la fois les espèces liées aux pelouses ouvertes et milieux pionniers et celles inféodées aux pelouses, ourlets, fourrés et landes thermophiles (voir 4.2.1). 44 espèces appartenant à cette communauté ont été recensées sur le site de Courcelles-sur-Seine dont 23 sont considérées comme psammophiles soit près de 80 % des espèces nidifiant dans le sol, ce qui représente également plus d’un tiers des espèces présentes sur le site avec 35 % de l’effectif total. Dans ce cortège, les nombreuses espèces du genre Tachysphex sont révélatrices d’une certaine chaleur, témoignant d’une position « assez méridionale » du site. On citera en particulier Tachysphex fulvitarsis, Tachysphex pompiliformis, Tachysphex tarsinus, Tachysphex unicolor ; espèces présumées nouvelles et exclusives au site de Courcelles-sur-Seine et pouvant s’apparenter ici comme des espèces patrimoniales. D’autres espèces complètent cette liste des « patrimoniales inféodées aux milieux thermophiles » avec Prionyx kirbii, Drydella tricolor (connu de 22 départements dont 5 dans la moitié nord, le site de Courcelles étant la station la plus septentrionale), Crabro scutellatus (nidifiant dans le sable pulvérulent dans les garennes de lapins), Crossocerus wesmaeli (nidifiant sur les tas de sable au parois verticales et dénudées), Mimumesa atratina (signalé de 15 départements dont quatre au nord de la Loire, station la plus septentrionale), Miscophus ater et Nysson niger (espèces thermophiles de répartition continentale) et surtout Mimesa bruxellensis (espèce nouvelle pour la France). À l’inverse des espèces thermophiles méridionales, Mimesa equestris, pourtant liée aux milieux sableux pionniers, est considérée comme une espèce septentrionale pouvant s’apparenter à une espèce relictuelle. Concernant la boucle d’Anneville-Ambourville, quelques espèces exclusives au site et liées aux milieux thermophiles sableux peuvent être considérées comme patrimoniales : Crossocerus exiguus, Dinetus Pictus (signalé de 30 départements surtout dans le sud, 7 localités connue en région Centre), Lestica subterranea (Signalée de 30 départements. En région Centre, une seule femelle récoltée en deux années de piégeage, ceci confirme la rareté de Lestica subterranea sur le site, mais également Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 51 en France), Psen ater et bien sûr Prionyx kirbii (espèce thermophile méridionale dont les stations d’Anneville-Ambourville et Courcelles constituent les deux localités les plus septentrionales). 4.2 ANALYSE ÉCOLOGIQUE DES CORTÈGES D’HYMÉNOPTÈRES OBSERVÉS 4.2.1 COMPARAISON SPÉCIFIQUE PAR AFFINITÉS ÉCOLOGIQUES Si les connaissances régionales ne sont pas encore suffisantes pour proposer des classements détaillés par communautés écologiques, il est néanmoins possible de distinguer des grands ensembles séparant les espèces liées aux milieux ouverts chauds et secs de celles liées aux milieux boisés ou encore aux milieux humides. Si l’on compare les cortèges propres à chaque site, il ressort que malgré le nombre d’espèces un peu plus élevé sur Courcelles-sur-Seine que sur Anneville-Ambourville (65 contre 42), les affinités écologiques des espèces qui composent les cortèges observés sont très similaires. Ainsi, près de 70 % des espèces observées sont liées aux milieux ouverts pionniers au substrat sableux, tandis que les 30 % restants sont liées aux milieux boisés. Les espèces plutôt typiques des zones humides sont très peu représentées. Répartition des Hyménoptères Sphéciformes par sites et par communautés écologiques 100% 90% 80% 70% 19 2 60% 29 11 1 2 Espèces liées aux pragmitaies et zones humides 50% 40% 30% 20% 10% Espèces liées aux lisières et boisements 44 52 30 Espèces liées aux pelouses ouvertes pionnières thermophiles 0% Même si proportionnellement les cortèges sont similaires entre les deux sites, celui de Courcellessur-Seine accueille plus d’espèces thermophiles d’affinités méridionales comme les cinq espèces de Tachysphex, Druydella tricolor, Lindenius pygmaeus ou bien encore Spilomena beata. Le positionnement géographique plus méridional du site de Courcelles-sur-seine, en amont de Rouen peut expliquer cette situation. 52 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 4.2.2 LISTE DES ESPÈCES Nom scientifique AnnevilleAmbourville Communauté écologique X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers Espèces rubicoles Espèces lignicoles Espèces nidifiant au niveau du sol X* Ammophila campestris X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Ammophila pubescens X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Ammophila sabulosa X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers Argogorytes mystaceus X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* X Astata boops X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Astata minor X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Cerceris arenaria X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Cerceris quadricincta X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers Alysson spinosus X Cerceris ruficornis Cerceris rybyensis HYMENOPTERES Courcellessur-Seine Espèce nouvelle pour la région Ordre Mode de nidification Espèce nouvelle pour le 27 Présence de l’espèce Espèce nouvelle pour le 76 Tab.11. liste des Sphéciformes observés sur Anneville-Ambourville et Courcelles-sur-Seine. X X Crabro peltarius X Crabro scutellatus X X X X X X Crossocerus annulipes X X Crossocerus capitosus X X X* (terriers de lapin) X Espèces liées aux lisières et boisements Espèces liées aux lisières et boisements X Crossocerus cetratus X X X Espèces liées aux lisières et boisements X Crossocerus exiguus X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers Crossocerus megacephalus Crossocerus nigritus X X X X X X Crossocerus wesmaeli X X X X* X Espèces liées aux lisières et boisements Crossocerus ovalis Dinetus pictus X X X Espèces liées aux lisières et boisements X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Diodontus luperus X Diodontus minutus X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Diodontus tristis X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Dolichurus corniculus X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers Dryudella tricolor X X X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 53 Ectemnius continuus X Espèces liées aux lisières et boisements X Ectemnius dives X Espèces liées aux lisières et boisements X Ectemnius lapidarius X Espèces liées aux lisières et boisements X Ectemnius lituratus X Espèces liées aux lisières et boisements X Entomognathus brevis X Gorytes laticinctus X X Gorytes quinquecinctus X X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Harpactus elegans X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Harpactus laevis X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Harpactus tumidus X X Lestica subterranea X Lindenius pygmaeus Mellinus arvensis X X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Mimesa bruxellensis X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Mimesa equestris X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Mimumesa atratina X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Miscophus bicolor X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Miscophus ater X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Nitela spinolae X X X Espèces liées aux lisières et boisements X Nitela borealis X X X Espèces liées aux lisières et boisements X Nysson dimidiatus X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X** X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X** X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X** X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X** Nysson trimaculatus X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X** Nysson tripunctatus X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X** Oxybelus bipunctatus X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Nysson maculosus X Nysson niger Nysson spinosus 54 X X X X X Oxybelus trispinosus X Passaloecus gracilis X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers Espèces liées aux lisières et boisements X Espèces liées aux lisières et boisements X Espèces liées aux lisières et boisements X Espèces liées aux lisières et boisements X X Passaloecus insignis X Passaloecus singularis X Pemphredon inornata X Pemphredon lethifer X X Espèces liées aux lisières et boisements Pemphredon lugubris X X Espèces liées aux lisières et boisements X Pemphredon rugifer X Espèces liées aux lisières et boisements X Philanthus triangulum X X Prionyx kirbii X X Psen ater X X X X X X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Espèces liées aux lisières et boisements X Rhopalum coarctatum Psenulus pallipes X X Espèces liées aux lisières et boisements X Rhopalum gracile X X Espèces liées aux pragmitaies et zones humides X Spilomena beata X X Spilomena troglodytes X Stigmus solskyi X X X X Tachysphex fulvitarsis Tachysphex obscuripennis X X X Espèces liées aux lisières et boisements X Espèces liées aux lisières et boisements X X X Espèces liées aux lisières et boisements X X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X* X* Tachysphex pompiliformis X Tachysphex tarsinus X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers Tachysphex unicolor X X X Espèces liées aux milieux ouverts, pionniers X Espèces liées aux lisières et boisements X Espèces liées aux lisières et boisements X X Espèces liées aux pragmitaies et zones humides X Espèces liées aux lisières et boisements X X Espèces liées aux lisières et boisements X X X Espèces liées aux lisières et boisements X X X Espèces liées aux lisières et boisements 35 37 Trypoxylon attenuatum X X Trypoxylon clavicerum X Trypoxylon deceptorium X X X Trypoxylon figulus X X X Trypoxylon medium X Trypoxylon minus X X X Trypoxylon scutatum Total X X 42 X 65 18 X* X 21 10 Légende : « X*» : espèces psammophiles ou à tendance psammophile nichant dans le sol. « X** » : espèces cleptoparasites, en particulier les espèces du genre Harpactus. : Espèces présumées remarquables en l’état actuel des connaissances En rouge : Espèces présumées nouvelles pour la région en l’état actuel des connaissances. Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 55 52 4.2.3 PRÉSENTATION DE QUELQUES ESPÈCES RARES ET INTÉRESSANTES Espèces typiques des pelouses ouvertes et milieux pionniers : Crabro scutellatus Espèce présumée nouvelle pour la région. Observée également dans l’estuaire de la Seine (TRIPOTIN, 2011). Espèce liée aux milieux sableux pionniers. Nidification dans le sol. Se rencontre principalement dans les sites sablonneux. RIEMANN (1983) a observé des nids à l’emplacement de terriers de Lapins. Les proies sont principalement des Diptères Dolichopodidés, Muscidés et Syrphidés. JANVIER (1977b) a observé, en Sologne, des nids creusés dans du sable durci et a noté des Muscidés, Dolichopodidés et Syrphidés comme proies. [@] Espèce peu observée, depuis (KOHL, 1915), sur les fleurs, donnant à penser que les adultes ne sont pas très anthophiles (cf. liste des fleurs butinées à l’annexe 2, page 300, du Vol. 1 des « Hyménoptères Sphecidae d’Europe occidentale » de J. BITSCH Les premières références éthologiques ont été transcrites par K OHL (1915) et résumées par LECLERCQ (1954) et ELSE & FIELD (1989). Crossocerus wesmaeli Espèce présumée nouvelle pour la région. Observée également dans l’estuaire de la Seine (TRIPOTIN, 2011). Petite espèce inféodées aux zones sableuses. Nidifie le long des parois verticales dépourvues de végétation. [@] Lindenius pygmaeus Espèce présumée nouvelle pour la région. Observée également dans l’estuaire de la Seine (T RIPOTIN, 2011). Espèce liée aux milieux sableux pionniers en limite d’aire, très rare dans le nord de la France. La nidification a lieu de préférence dans le sable. Les proies sont des petits Diptères (M ANEVAL, 1937 et OLBERG, 1959) et des petits Hyménoptères Térébrants, notamment des Chalcididés, exceptionnellement d’autres insectes : 1 Diptère parmi les 41 Chalcidiens dénombrés par GRANDI (1928, 1934, 1961) et 2 Fourmis ouvrières parmi les 130 micro-Hyménoptères dénombrés par JANVIER (1977a). [@] Les adultes ont été observés sur les inflorescences d’Apiacées et sur diverses autres fleurs, également sur le miellat de Quercus (cf. liste à l’annexe 2, page 306, du vol. 1 des « Hyménoptères Sphecidae d’Europe occidentale » de J. BITSCH). 56 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 Prionyx kirbii Espèce présumée nouvelle pour la région, découverte simultanément sur les deux sites en un exemplaire unique à chaque fois. Espèce thermophile méridionale en cours d’expansion en limite nord de répartition dans notre région, découverte auparavant dans le Vexin francilien et dans les Yvelines en 2006 par GADOUM & BARBIER. Nidification dans le sol. Le nid comporte une courte galerie plus ou moins inclinée et une seule cellule de 30 mm de diamètre. Après creusement la femelle chasse une proie qu’elle transporte au sol puis [@] introduit dans le nid. Après la ponte d’un œuf sur la proie, la femelle referme soigneusement l’entrée du nid à l’aide de petits cailloux. Les proies, au nombre de deux à quatre par cellule, sont diverses espèces d’Homoptères Acrididés, en particulier Stauroderus vagus. GRANDI a signalé deux Diptères parasites : le Bombylide Petrossia hesperus et le Sarcophagide Apodacra rondaniella. Les adultes ont été observés sur diverses fleurs : Eryngium sp., Foeniculum vulgare et Mentha sp. Le comportement de cette espèce a fait l’objet de nombreuses observations, en Europe notamment. Les principales références éthologiques viennent de: FABRE (1856a, 1879) ; FERTON (1901, 1903, 1923) ; ROTH (1925) ; BERLAND (1925a) ; GRANDI (1928a, 1954, 1961) ; BERNARD (1935) ; DELEURANCE (1941, 1946) ; SOYER (1947) ; BERLAND & BERNARD (1949) ; BENZ (1959, 1985) ; SIMON THOMAS (1972) & BONNELLI (1988), mais également de Chine TSUNEKI (1963c) et d’Afrique du Sud GESS (1981). Espèces liées aux pelouses, ourlets, fourrés et landes thermophiles Dryudella tricolor Espèce présumée nouvelle pour la région. Nidification dans le sol. Les proies sont des formes immatures d’Hétéroptères Lygaeidés (Emblethis verbasci, Rhyparochromus sp.) (FERTON, 1901, 1908). Note: L’observation des ♂permet de déterminer 3 sousespèces. Quant aux ♀, elles ne peuvent être distinguées de façon certaine. [@] Espèce notée dans 21 départements dont seulement 3 de la moitié nord du pays : Loire-Atlantique, Maine-etLoire, Loiret. Le site de Courcelles étant la station la plus septentrionale à ce jour. Espèce liées aux lisières et boisements Spilomena beata Espèce présumée nouvelle pour la région. Espèce notée dans 9 départements disséminés, dont 8 de la moitié sud de la France. Le seul département signalé de la moitié nord est le Loiret et maintenant l’Eure qui semble constituer la limite nord de répartition de l’espèce en France. Nidification dans des poteaux de bois ou des montants de fenêtre perforés d’anciennes galeries d’insectes xylophages, en particulier d’Anobiidés. Trouvée en Allemagne du nord dans un tronc d’Aulne (HAESELER, 1984). Un nid observé en Finlande, dans une tige de Rubus idaeus, certaines cellules approvisionnées de larves de Thrips, d’autres contenant un cocon (VALKEILA, 1961, sous S. expectata). En Angleterre, trouvé dans les tiges de Rubus (YARROW, 1969). H. TUSSAC (Cahors, 19/09/1999) relate le comportement d’une femelle sur une branche d’arbre mort : l’insecte a fait [@] Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 57 plusieurs voyages pour récolter de petites fibres de bois qu’elle a utilisées pour boucher l’orifice d’une étroite galerie de xylophage. Après dépôt des fibres de bois, la femelle s’est retournée et a frappé les fibres avec l’extrémité de son abdomen pour les tasser (ou déposer une sécrétion abdominale ?). Le nid comportait plusieurs cellules contenant de nombreuses larves de Thrips empilées. Les proies sont exclusivement des larves de Thysanoptères (Thrips, Taeniothrips). L’espèce est bivoltine en Allemagne (WOLF, 1958, 1959 ; BLÜTHGEN, 1960 ; GAUSS, 1982 HAESELER, 1984). L’espèce a été observée sur les fleurs de Peucedanum cervaria dans les Alpes-de-Haute-Provence. Les données éthologiques ont été résumées par : OEHLKE (1970) ; LOMHOLDT (1975) ; SCHMIDT (1984) ; JACOBS & OEHLKE (1990). Espèce liées aux phragmitaies et zones humides Rhopalum gracile Espèce présumée nouvelle pour le département de l’Eure. Espèce notée dans 12 départements disséminés, principalement méditerranéens. La donnée de l’Eure semble constituer actuellement la donnée la plus nordique après l’unique donnée du Loiret en 1990. Nidification dans des tiges de Roseaux (Phragmites). Les proies sont principalement des petits Diptères Nématocères et des Psocoptères. Dans le midi de la France, JANVIER (1977a) a observé le comportement nidifiant dans Phragmites communis ; toutes les proies étaient des Diptères Nématocères. En Hollande, P IET (1945) a obtenu des éclosions à partir de Roseaux ayant subi une inondation. Au Japon TSUNEKI (1947, 1952, 1960b) a décrit des nids établis dans des roseaux et un autre dans une tige de Solidago occidentalis; les proies étaient des Diptères et des Psocoptères. MERISUO (1968), en Finlande, a décrit un nid dans un phragmite ; les proies étaient des Diptères Chironomidés. Les adultes sont peu floricoles. Néanmoins l’espèce a été observée sur quelques fleurs, principalement des Apiacées. Commentaire sur le volet Hyménoptères Le fait d’avoir intégré les Hyménoptères à cette étude de l’entomofaune des terrasses alluviales constitue une étape importante dans l’amélioration des connaissances régionales concernant ce groupe et plus particulièrement de la vallée de Seine. Compte tenu du caractère très chronophage de ce type d’étude et de la nécessité de poser des pièges très visibles pour étudier ce groupe, il n’a pas été possible d’étudier chaque boucle individuellement. Les prospections réalisées démontrent néanmoins, qu’il existe des spécificités propres aux habitats de terrasses alluviales avec des espèces d’affinités méridionales intimement liées aux milieux sableux thermophiles. De plus, il semble exister, comme pour d’autres groupes taxonomiques, un gradient au sein de la vallée car cette proportion d’espèces thermophiles s’est révélée plus importante sur le site de Courcelles-sur-Seine (amont de Rouen) par rapport à celui d’Anneville-Ambourville (aval de Rouen). Il est difficile de dire aujourd’hui si les basses terrasses sont plus riches en espèces que les hautes terrasses même si on peut légitimement le penser ; les habitats sableux et pionniers plus fréquents sur bassesterrasses étant plus favorables aux Hyménoptères. Malgré la découverte de nombreuses nouvelles espèces pour la région, les connaissances sur la répartition et les menaces de ce groupe sont encore très partielles et lacunaires à l’échelle du territoire normand, y compris sur les terrasses alluviales de la vallée de la Seine. Il reste encore sans doute beaucoup à apprendre et à découvrir. Il apparait néanmoins que ces habitats de terrasses alluviales, de par leurs caractéristiques écologiques, présentent un potentiel d’accueil pour les Hyménoptères extrêmement important et qu’il existe un cortège d’espèces typiques de ces milieux sableux sans doute unique dans la région. 58 Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Normandie, Décembre 2015 CONCLUSION Cette importante étude d’une partie de l’entomofaune des terrasses alluviales de la vallée de Seine confirme et précise le très grand intérêt que représentent ces milieux pour les groupes étudiés. Ainsi, 58 % des Rhopalocères, 70 % des Orthoptères et 82 % des Odonates, connus à ce jour en HauteNormandie, sont susceptibles de fréquenter de manière occasionnelle ou régulière ces habitats. Pour ces trois groupes d’insectes, parmi les 54 espèces menacées en Haute-Normandie d’après les listes rouges régionales, 21 espèces (soit 39 %) ont été observées sur le périmètre prospecté. Les terrasses alluviales contribuent donc à la conservation de 39 % des espèces menacées dans la région. Cette richesse écologique importante et la haute valeur patrimoniale des cortèges recensés tiennent à l’originalité de ces terrasses alluviales. Le caractère sableux du substrat est un élément déterminant, contribuant à la fois à maintenir le caractère pionnier de certains secteurs, tout en favorisant des « microconditions » localement chaudes et sèches. Le contexte général de la vallée de Seine plus chaud que le reste de la région et constituant un couloir « sud-est/nord-ouest » favorisant la circulation des espèces depuis les régions plus méridionales. La diversité des habitats. De la zone pionnière dépourvue de végétation jusqu’au boisement mature, il existe tout un panel de milieux possédant des caractéristiques particulières où se mêlent secteurs secs liés au substrat sableux et zones plus humides en raison du contexte de vallée. Au sein de la mosaïque d’habitats que l’on rencontre sur les terrasses, c’est au niveau des milieux ouverts semi-naturels (zones pionnières, pelouses sableuses, prairies) que se concentrent les plus grands enjeux. Les périmètres de basses terrasses sont globalement un peu plus riches que ceux des hautes terrasses. Ils accueillent également souvent un nombre d’espèces remarquables plus importants. Le fait que les hautes terrasses soient plus fréquemment boisées et cultivées contribue à expliquer cette situation. Ce constat global ne doit cependant pas masquer une situation disparate, ainsi que les importantes inégalités entre les boucles. Si certaines font figure de « hot spot » pour l’accueil et le développement de l’entomofaune typique des habitats de terrasses alluviales, d’autres apparaissent très dégradées et bien plus pauvres. La conservation des espèces menacées présentes sur terrasses alluviales et des cortèges typiques de ce genre d’habitats devra passer par le maintien en l’état de ces milieux et notamment des réservoirs silicicoles identifiés au SRCE (Schéma régional de cohérence écologique). Les terrasses alluviales de la Seine normande. Tome IV : l’entomofaune (Orthoptères, Rhopalocères, Odonates et Hyménoptères). Décembre 2015 59 BIBLIOGRAPHIE BELLMANN H. & LUQUET G., 1995. – Guide des Sauterelles, Grillons et Criquets d’Europe occidentale. Lausane (Suisse) : Delachaux et Niestlé, 383 p. BITSCH J. & LECLECQ J., 1993. - Hyménoptères Sphecidae d’Europe occidentale, 1. Faune de France 79. Paris, Fédération Française des Sociétés de Sciences Naturelles, 325 p. 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