L’ESSENTIEL DE LA STRATEGIE REGIONALE BIODIVERSITE Trame verte et bleue Schéma Régional d’Aménagement et de Développement Durable du Territoire (SRADDT) Une ambition régionale pour renforcer les services fournis par la nature SOMMAIRE 04 p. Pourquoi une stratégie biodiversité ? 07 p. L’état des lieux en Nord-Pas de Calais 10 p. Restaurer les services fournis par la nature grâce à la Trame Verte et Bleue Edité par le Conseil régional Nord-Pas de Calais Pôle Aménagement régional et Dynamique territoriales Direction de l’Environnement Directeur de la Publication : Yves DURUFLE, Directeur général des services Mise en page : Catherine LAMAIRE, Direction de la Communication Rédaction : Bertrand LAFOLIE, Fanny MILBLED et Christophe BERNARD, Direction de l’Environnement Achevé d’imprimer en septembre 2014 sur les presses de L’Artésienne (62) à 1000 exemplaires Dépôt légal : en cours 12 p. Accélérer la recolonisation des milieux pour renforcer les services écosystémiques 15 p. Soutenir la recherche, la connaissance et la formation pour construire les conditions de la transition écologique 16 p. Agir ensemble avec les habitants pour la biodiversité 16 p. Agir avec les acteurs, dans une gouvernance adaptée POURQUOI UNE STRATÉGIE BIODIVERSITÉ ? Depuis le Sommet de Rio en 1992, protéger la biodiversité est devenue une priorité mondiale. La biodiversité représente la diversité et la variabilité naturelle des systèmes et des organismes vivants, sauvages et domestiques qui nous entourent. Elle peut, en somme, être considérée comme la « ressource des ressources », ou encore comme le « moteur de l’évolution ». La lutte contre le déclin de la diversité des espèces et des territoires doit être une priorité internationale, nationale et se joue également aux niveaux régional et local. Cette priorité a été reconfirmée lors de la Conférence des Nations-Unies sur la diversité biologique à Hyderabad en 2012. La Région Nord-Pas de Calais s’est engagée très tôt en faveur de la biodiversité. Par cette Stratégie Biodiversité du Schéma Régional d’Aménagement et de Développement Durable du Territoire, la Région propose une démarche toujours plus approfondie de reconquête des milieux naturels en région. Le Schéma Régional d’Aménagement et de Développement Durable du Territoire (SRADDT) L ZOOM sur « Pourquoi l’échelle régionale ? » L’Organisation des Nations-Unies, l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature, l’Europe et la France considèrent que l’échelon régional est « l’échelon le plus pertinent pour appréhender les enjeux environnementaux des territoires » pour les « fonctions de coordination et d’impulsion », et comme « échelon opérationnel privilégié ». Les Régions ont par ailleurs une compétence en aménagement du territoire et en environnement, avec notamment les Parcs Naturels Régionaux et les Réserves Naturelles Régionales. Elles assurent maintenant également la fonction de chef de file de l’action des collectivités locales en matière de biodiversité et de climat. La région est aussi une échelle légitime dans le cadre de l’approche scientifique territoriale de la biodiversité, comme l’a montré en France, la mise en place des Conseils Scientifiques Régionaux du Patrimoine Naturel (CSRPN). 04 e SRADDT est un document stratégique de la Région Nord-Pas de Calais. Il permet de penser sur le long terme l’avenir du Nord-Pas de Calais à l’horizon 2030-2050. Cet horizon donne la possibilité d’anticiper les risques, les contraintes et les opportunités qui viendront enrichir le modèle de développement régional. Ceci se révèle particulièrement vrai pour les conséquences du changement climatique dont les premiers effets se ressentiront dès 2030-2050. La perte d’espèces-clés ou d’une grande part de la diversité génétique a des conséquences imprévisibles, qui peuvent modifier radicalement et éventuellement irrémédiablement nos conditions de vie. Protéger la biodiversité répond à la fois au « principe de précaution » et au « principe de prévention ». La Stratégie Régionale Biodiversité : préserver la biodiversité en Nord-Pas de Calais L’urgence d’agir Pour l’Organisation des Nations-Unies, les cinq causes majeures et directes de la crise de la biodiversité sont : les effets directs et indirects du dérèglement climatique. Selon l’ONU, depuis 20 ans, ces pressions sont « restées constantes ou ont vu leur intensité augmenter », « l’empreinte écologique de l’humanité dépasse maintenant la capacité biologique de la terre de manière plus importante que lors de l’acceptation de l’Objectif 2010 pour la biodiversité ». la modification (changement d’affectation, pollution, etc.), la fragmentation ou la destruction des habitats naturels. L’étendue et l’intégrité de ces habitats continuent de diminuer presque partout dans le monde, Ces constats augurent de graves problèmes en termes de résilience écologique, de risque de zoonoses, d’épidémies et d’adaptation au changement climatique. la pollution avec la pollution génétique, la pollution lumineuse ou les perturbateurs endocriniens, Une biodiversité aux bénéfices mieux connus la surexploitation des espèces, des milieux et ressources naturelles, Aujourd’hui, les milieux régionaux sont trop dégradés pour ne pas impacter le développement des sociétés humaines ; la dégradation des milieux a un coût, qui dépasse souvent les coûts des politiques publiques environnementales. l’introduction et la diffusion d’espèces exotiques envahissantes ou très invasives, C’est parce qu’on connaît mieux ces coûts que désormais, on parle de « services écosystémiques ». Les travaux du Millenium Ecosystem Assessment (MEA) entrepris pour l’ONU entre 2000 et 2005 proposent la définition suivante : « les services écosystémiques sont les bénéfices que l’homme obtient des écosystèmes. Ceux-ci incluent les services d’approvisionnement tels que la nourriture et l’eau, les services de régulation tels que le contrôle des crues et des maladies, les services culturels tels que les bénéfices spirituels, récréatifs et culturels et les services de soutien tels que les cycles des nutriments et le maintien des conditions favorables à la vie sur Terre » (MEA, 2005). L’étude du MEA a conclu que 60% des services écosystémiques étaient en déclin à l’échelle mondiale. Ces services, fournis gratuitement par les écosystèmes, ont une valeur économique très élevée. Pour que la biodiversité puisse à nouveau et durablement assurer les « services écosystémiques » nécessaires au développement humain, la restauration La biodiversité est un « bien commun » dont l’enjeu est vital. Au même titre que la stratégie climat du Schéma Régional d’Aménagement et de Développement Durable du Territoire (SRADDT), la stratégie biodiversité du SRADDT a pour vocation d’apporter une réponse et un cadre d’action à un des enjeux fondamentaux du SRADDT : « Engager la région dans la transition écologique » (enjeu 5). La stratégie Biodiversité du SRADDT, rouage essentiel de la résilience régionale Si les motifs de la Stratégie Biodiversité peuvent être éthiques (protéger les bases et conditions des équilibres écologiques, de la résilience écologique et maintenir les ressources pour les générations à venir), il s’agit de préserver ce qui permet de satisfaire les besoins vitaux de toute la biosphère (oxygène, eau, alimentation, équilibres écologiques, santé, etc.) et les nombreux services (de support, d’approvisionnement, de régulation, de loisirs, culturels et sociaux) qu’elle fournit gratuitement à l’humanité. 05 d’une Trame Verte et Bleue (TVB) fonctionnelle apparait urgente et nécessaire, ainsi que la préservation des habitats, des espèces et de leur diversité génétique, à l’échelle des paysages régionaux. 40% de l’économie mondiale serait directement dépendante des services rendus par la nature. (Rapport The Economics of Ecosystems and Biodiversity 2007) C’est pourquoi la Stratégie Régionale Biodiversité a pour objectif de préserver la nature pour qu’elle puisse continuer à nous protéger et subvenir à nos besoins sociaux, économiques et biologiques par le biais des services écosystémiques qu’elle dispense. C’est l’une des conditions de la « transformation écologique et sociale régionale » (TESR). Les 5 objectifs de la stratégie Biodiversité 1. Restaurer les services fournis par les écosystèmes, grâce à la Trame verte et bleue 2. Accélérer la recolonisation écologique des milieux pour renforcer les services écosystémiques ZOOM sur la Trame Verte et Bleue régionale Après une phase expérimentale liée à la mise en place de contrats de corridors biologiques dans les années 1990, la TVB régionale a permis de donner une dimension nouvelle à la préservation de la biodiversité en s’intéressant à la fois aux cœurs de nature, aux liaisons écologiques et à la qualification de la matrice paysagère. Elle a aussi permis d’élargir les moyens d’intervention sur le territoire : actions de connaissances et de gestion, intégration de la TVB dans les documents de planification (SCOT, PLU…), accompagnement à la déclinaison locale de la TVB régionale, aides au boisement, appels à projets… À ce jour, quasiment tous les territoires de projet ont décliné à leur échelle la trame verte et bleue régionale, avec un comité de pilotage et de suivi. 3. Soutenir la recherche, la connaissance et la formation pour construire les conditions de la « transition écologique » 4. Construire la transition écologique avec les habitants 5. Construire une gouvernance adaptée avec l’ensemble des acteurs. De la stratégie régionale Trame Verte et Bleue à la Stratégie Biodiversité du SRADDT Très tôt, les acteurs régionaux se sont engagés, en faveur de la biodiversité. La Région Nord-Pas de Calais a été la première à : se doter de Parcs naturels régionaux (PNR) avec la création en 1968 du PNR Scarpe-Escaut, à introduire dans le Contrat de Projet Etat-Région et ses politiques environnementales la notion de « corridors biologiques » déclinant en région la « Stratégie paneuropéenne pour la diversité biologique et paysagère », à expérimenter dès 1995, les « contrats de corridors biologiques », ancêtres de la « trame verte et bleue régionale ». En 2006, le SRADDT a retenu la Trame Verte et Bleue (TVB) parmi les 6 enjeux majeurs et a identifié dans ce cadre des « espaces à enjeux » : des « cœurs de nature » à protéger, abritant la majorité de la diversité biologique. Ce sont essentiellement les ZNIEFF (Zones Naturelles d’Intérêt Ecologique, Floristique et Faunistique), les sites Natura 2000 et les sites protégés ; des « espaces naturels relais » à conforter, renforcer ou restaurer (cours d’eau et autres zones humides, boisements, prairies, coteaux, terrils…) qui peuvent participer aux continuités écologiques ; des « espaces à renaturer » caractérisés par une grande rareté de milieux naturels et par l’absence ou la rareté de corridors écologiques. Aujourd’hui, la stratégie biodiversité du SRADDT (articulée avec le SRCE-TVB), est de fixer un nouvel horizon de l’action régionale et, en conformité avec la stratégie nationale de la biodiversité, de renforcer la visibilité de la stratégie régionale selon les recommandations de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN). ETAT DES LIEUX EN NORD-PAS DE CALAIS La région recèle une grande diversité de milieux naturels. Selon les scientifiques régionaux, la position littorale, la géologie hétérogène, le climat tempéré, la richesse des sols et l’histoire expliquent cette diversité et donc cette grande richesse biologique. Cependant, malgré des efforts importants, la diversité des espèces et la diversité génétique continuent à régresser, du fait de l’évolution défavorable des habitats, résultante des pressions humaines exercées et en particulier du fait de la fragmentation des milieux. La diversité génétique des cultures et des animaux d’élevage des agrosystèmes continue de diminuer (Rapport de l’ONU Perspectives mondiales de la biodiversité 3) Selon l’Organisation des Nations Unies, les causes à l’origine de la dégradation de la biodiversité sont: la dégradation, fragmentation et destruction des habitats, les pollutions, la surexploitation, les espèces invasives, le dérèglement climatique. En Nord-Pas de Calais, ces causes se conjuguent à la faiblesse des espaces naturels, la fragmentation des milieux, les séquelles de l’industrie lourde, de l’activité minière et des guerres, les pollutions de diverses natures ainsi que les changements d’occupation des sols. Des espèces sur liste rouge Les données réunies par l’Observatoire Régional de la Biodiversité (ORB) montrent quelques progrès (pour les chauves souris par exemple), mais ils ne compensent pas un recul continu, et aggravé des espèces. Depuis le début des années 1900 jusqu’à 2005, le Nord-Pas-de-Calais et la Picardie perdaient environ une espèce végétale par an. Ce rythme serait aujourd’hui de 1,4 espèce par an environ. Parmi les espèces animales présentes en région, 3 sont considérées « en danger critique d’extinction » (un reptile, un amphibien et un oiseau) et 34 (oiseaux et mammifères) sont classées « en danger » sur les listes rouges nationale et régionale. Plus du quart de la flore régionale est considéré comme menacé (128 espèces) et 10% de ces espèces ont déjà disparu depuis le début du XXème siècle. Figure 1 - Statut de menace de la flore du Nord-Pas-de-Calais, comparaison de la situation en 2005 et 2010 (Source : ORB/CBNBl 06 07 La biodiversité est la ceinture de sécurité de l’Humanité (JM Gehu, scientifique, botaniste et phytosociologue Co-fondateur du Centre Régional de Phytosociologie, agréé Conservatoire botanique national de Bailleul) Des habitats régionaux diversifiés mais petits La région compte la part d’espaces semi-naturels et forestiers la plus faible de France avec près de 13% seulement du territoire régional contre 34% en France. Par ailleurs, les espaces naturels les plus remarquables de la région, couverts par des mesures de protections réglementaires, foncières ou de gestion, ne représentent que 3,76% de la région contre 15,16% en moyenne nationale (cf. figure ci-dessous). D’autres espaces de biodiversité remarquable ont fait l’objet de zonages d’inventaires ou de protection contractuelle (cf. figure espaces naturels remarquables). Au total, la région est fragmentée en plus de 85 000 morceaux. Les causes de la fragmentation sont l’urbanisation, les principales voies de communication et infrastructures, certains grands espaces agricoles labourés et traités avec des pesticides, les lumières et les bruits. Ils constituent autant d’obstacles majeurs à la circulation de la plupart des espèces. Il existe une écopotentialité du territoire régional réelle et importante (Journal du SRADDT Mars 2013) SCHEMA REGIONAL DE COHERENCE ECOLOGIQUE TRAME VERTE ET BLEUE DU NORD - PAS DE CALAIS Patrimoine naturel : Protection réglementaire et foncière Les espaces naturels protégés réglementairement Arrêté préfectoral de protection de biotope Réserve biologique domaniale Réserve naturelle nationale Réserve naturelle régionale Carte- Les espaces naturels remarquables constituant les hot-spots régionaux (Source SIGALE Nord-Pas de Calais 2012). Les espaces naturels préservés par maîtrise foncière Les sites du Conservatoire des Espaces Littoraux et des Rivages Lacustres (CELRL) Périmètre d'intervention du CELRL Espace provisoirement protégé par le CELRL Espace définitivement protégé par le CELRL Les sites du Conservatoire d' Espaces Naturels (CEN) Sites en maîtrise d'usage ou foncière par le CEN Les Espaces Naturels Sensibles (ENS) Zones acquises par les Départements Zones de Préemption des départements L'occupation du sol Espaces artificialisés Espaces agricoles Espaces semi-naturels 0 D2DPE / IGAS / FD 2012-020 - Janvier 2012 5 10 Km Sources : Région Nord-Pas de calais - SIGALE® ; ONF ; MEDDTL (2011) ; CELRL; CEN; Département du Nord; Département du Pas de Calais; EEA - Carte - Zones dont le foncier est protégé dans la région Nord-Pas-de-Calais (Source SIGALE Nord-Pas de Calais 2012). Carte- Eléments fragmentant les continuités écologiques terrestres du Nord – Pas de Calais (Source SIGALE Nord-Pas de Calais 2012). 08 09 Objectif .1 RESTAURER LES SERVICES FOURNIS PAR LES ÉCOSYSTÈMES, GRÂCE À LA TRAME VERTE ET BLEUE La fragmentation du territoire est un problème majeur en région Nord – Pas de Calais. Elle est l’une des toutes premières causes de régression de la biodiversité. Cet objectif vise donc à « défragmenter le paysage » pour prioritairement restaurer, protéger et gérer la biodiversité « patrimoniale » (environ 13 % du territoire en 2012) afin d’approcher le « bon état écologique ». Renforcer les « réservoirs de biodiversité » et les « hot-spots » de biodiversité marine et sous-marine I l s’agit de retrouver le « bon état écologique » des habitats présentant des intérêts patrimoniaux et naturels, et de tendre vers cet état pour des habitats semi-naturels (tels que le bocage, les coteaux calcaires, forêts, certaines zones humides). Il faut pour cela encourager le « génie écologique », et une gestion restauratrice afin de restaurer les zones plus artificialisées des réservoirs et améliorer la surface et la qualité des zones-tampon. Développer un réseau hiérarchisé d’aires protégées ZOOM sur « Qu’appelle-t-on « réservoir de biodiversité » ? » L’objectif des aires protégées est de regrouper sous un statut de protection pérenne les supports les plus vitaux des processus écologiques et des services fournis par ces processus. La Région compte 25 « Réserves naturelles régionales » (RNR) d’une superficie totale de 760 ha et plusieurs projets d’extension de réserves. Ce nombre et surtout leurs surfaces cumulées sont encore insuffisants. Ces RNR accompagnent la « Stratégie de création d’aires protégées terrestres » (SCAP) qui vise à identifier les lacunes du réseau actuel d’aires protégées, « afin que 2% au moins du territoire terrestre métropolitain soient placés dans les dix ans sous protection forte ». Protéger, conforter, réintroduire les espèces patrimoniales et freiner les espèces invasives Sans attendre la mise en œuvre complète de la Trame verte et bleue fonctionnelle à l’échelle du territoire régional, il est nécessaire – avec appui scientifique – de soutenir les actions de confortement des noyaux viables de populations animales, végétales, fongiques (champignons) parmi les plus menacées. Ce sera le cas par exemple de la mise à jour des « Plans nationaux d’action » et aussi du document d’orientation régional « Plan régional de restauration et réintroduction de la biodiversité ». Pour accélérer la requalification des milieux, il est également souhaitable de soutenir la réintroduction « d’espèces-clés » ; « espècesingénieurs » comme le castor et la loutre (espèce régulatrice et super-prédatrice), en cohérence avec des actions plus globales de « génie végétal » et de « génie écologique ». Ces opérations permettent aussi de développer une action en direction du grand public et des décideurs locaux en mobilisant le capital de sympathie de ces espèces. Reconnecter, défragmenter le territoire, grâce à la Trame verte et bleue La fragmentation importante du territoire et des milieux naturels du Nord – Pas de Calais et l’altération de la qualité biologique des espaces sont, avec la destruction directe des milieux naturels, les causes majeures de la perte de biodiversité. L’une des conséquences du phénomène de fractionnement est la diminution, pour un nombre très important d’espèces, de leur aire initiale de répartition. Pour que les réservoirs « hotspots » de biodiversité soient pleinement fonctionnels, il convient ainsi de les reconnecter, en remettant en bon état écologique les corridors écologiques qui les relient, et en restaurant des corridors aujourd’hui disparus. Les réservoirs de biodiversité sont des espaces exceptionnels du point de vue de leurs caractéristiques écologiques ou de leur diversité biologique. Ils concentrent l’essentiel du patrimoine naturel sauvage régional. Pour en savoir plus sur le Schéma Régional de Cohérence Ecologie-Trame Verte et Bleue : www.srce-tvb-npdc.fr Figure- Réservoirs de biodiversité du SRCE-TVB (Source : SIGALE Nord – Pas-de-Calais, 2012) 10 11 Objectif .2 ACCÉLÉRER LA RECOLONISATION ÉCOLOGIQUE DES MILIEUX POUR RENFORCER LEURS SERVICES ZOOM sur le Plan Forêt La forêt est un réservoir de biodiversité animale, végétale et fongique dont la qualité dépend de sa taille, de sa qualité écologique, de son degré de connexion avec des milieux similaires, de son degré de fragmentation et de son degré de fréquentation. Avec 9 % du territoire, la région reste la moins boisée de France. Le Plan forêt régional, délibéré par la Région en 2009, vise à porter à 18 - 20% le taux de boisement à l’horizon 2040 en région, en intégrant toutes les formes de boisement : haies multistrates, agroforesterie, vergers, etc. Cinq orientations ont été définies pour concrétiser le projet : développer la forêt périurbaine, créer des boisements de protection (air, eau, sols), renforcer et qualifier les massifs existants, profiter des délaissés des infrastructures de transport pour qualifier le paysage par des boisements, renaturer les espaces agricoles en maintenant leur vocation de production et ainsi freiner l’étalement urbain et réduire l’artificialisation des sols. 12 Cet objectif vise principalement la biodiversité dite « ordinaire » et les services écosystémiques qu’elle contribue à fournir (puits de carbone, stabilité microclimatique, moindre érosion et moindre dégradation des sols, meilleure alimentation/épuration des nappes,…). Outre quelques friches ou anciens terrains militaires, les espaces à renaturer sont essentiellement les espaces ruraux les plus fragmentés ou présentant le moins d’espaces de connexion. Il s’agit la plupart du temps de zones de grande production agricole, mais aussi d’espaces urbains, périurbains ou industriels devenus peu propices à la circulation et à la diffusion de la biodiversité (dans les grandes agglomérations, les zones portuaires et l’arc minier en particulier). Accélérer la recolonisation écologique des milieux, c’est : restaurer, protéger et gérer la biodiversité partout, hors Trame Verte et Bleue qualifier les espaces de détente, agricoles, industriels et urbains en espaces propices au développement de la biodiversité, restaurer, dans ces zones, des habitats pour les espèces, et en priorité, transformer les espaces prioritaires pour améliorer la qualité et la résilience de ces milieux. Recréer des milieux naturels D ans tous les milieux, des aménagements ou une gestion restauratoire puis conservatoire peuvent contribuer à restaurer le « bon » état écologique et paysager de sites que l’on estime dégradés par les activités humaines ou par la disparition de certains animaux (grands ou petits herbivores, fouisseurs, etc). Outre un rôle d’îlot de biodiversité, ces milieux peuvent parfois acquérir une fonction de zone tampon (par exemple le long d’un cours d’eau, autour d’une forêt ou d’une lande). Améliorer les matrices agricole et urbaine Le paysage agricole, souvent dominé par le labour et les grandes cultures couvre plus de 70% du territoire. Il a tendance, depuis les années 1950 à s’homogénéiser, au détriment des ressources « sol » et « eau » mais aussi des pollinisateurs et d’autres auxiliaires de l’agriculture De son coté, la ville et plus généralement les zones urbanisées sont considérées comme des éléments majeurs de fragmentation des milieux. Elles ne peuvent pourtant pas se résumer à une rupture des continuités écologiques. Ainsi, les observations et études montrent que la ville peut abriter une réelle biodiversité, plus ou moins connectée aux espaces péri-urbains, favorisée par une gestion de plus en plus écologique des espaces verts et parcs urbains. Par ailleurs, les espaces dits « de nature » en milieu urbain répondent à des enjeux essentiels en termes de cadre de vie, de loisirs, mais aussi d’agriculture par le biais des jardins partagés ou familiaux et de l’agriculture périurbaine de proximité. Figure - Carte des espaces à renaturer du SRCE-TVB. (Source : SIGALE Nord – Pas-de-Calais, 2012) Diminuer la fragmentation par les infrastructures Si le premier objectif reste de maîtriser la périurbanisation et d’éviter la fragmentation par des infrastructures nouvelles, il est possible de diminuer les impacts des infrastructures, sur la biodiversité, ainsi que sur la qualité de l’air et de l’eau : par une écoconception en amont des projets, par des aménagements appropriés permettant l’évitement et le contournement par la faune, par divers aménagements (génie végétal, écoducs), par la diminution de la pollution lumineuse. Restaurer et protéger les sols et sous-sols agricoles et urbains en tant qu’habitats Le sol est l’habitat ou le lieu d’hibernation ou de gîte de nombreuses espèces. Les taux de matière organique et la vie microbienne des sols régionaux sont globalement en régression depuis plusieurs décennies dans les milieux cultivés. En ville, l’imperméabilisation urbaine asphyxie les sols et les prive d’eau. Il s’agit ici en complément de la TVB et en cohérence avec elle, de préparer la « trame pédopaysagère » visant à conserver l’intégrité des continuums de sols et de sédiments, sans attendre la « Directive Européenne Sols », et en utilisant la trame verte comme facteur de résilience et de protection des sols dégradés par la pollution, l’érosion, la perte d’humus. 13 Objectif .3 Restaurer et préserver la ressource en eau Les collectivités locales sont confrontées à des responsabilités et des obligations en matière de distribution d’eau potable et d’assainissement des eaux usées, mais aussi à des attentes fortes de la part de leurs administrés. Disposer d’une ressource de qualité, préserver, traiter les eaux usées, limiter les coûts liés à l’eau… sont autant de sujets préoccupants pour les gestionnaires de la ressource en eau. Il est indispensable de protéger celle-ci. Ce, en protégeant notamment les aires d’alimentation des captages pour réduire ou pour éviter les traitements avant la distribution d’eau dans les réseaux publics. La protection des périmètres de captage de la ressource en eau est un objectif prioritaire en région. Restaurer et préserver la trame sous marine ZOOM sur la politique Recherche/Biodiversité : les appels à projets et Groupement d’intérêt scientifique En partenariat avec la Fondation Recherche Biodiversité (FRB), l’objectif est : de promouvoir, via des appels à projets, des projets de recherche, focalisés sur la biodiversité en région et construits avec des acteurs locaux, de promouvoir la mise en réseau entre les équipes de recherche de la région et les équipes existantes sur l’ensemble du territoire national voire à l’étranger, de mettre en perspective la démarche d’appel à projets avec d’autres expériences françaises ou européennes, enfin, de valoriser les projets de recherche au niveau national et régional. 14 Le Nord – Pas-de-Calais est une région littorale dotée d’un riche patrimoine de « ridens », c’est à dire d’estuaires et d’eaux aux caractéristiques uniques (turbidité élevée, forts courants) avec présence d’un « fleuve marin côtier ». Le littoral est un corridor de migration pour les oiseaux d’importance paneuropéenne (jusqu’à 1 million d’oiseaux migrants par 24 heures en automne ou au printemps), dans un contexte de risque maritime parmi les plus aigus dans le monde, de pressions cynégétiques, halieutiques, urbanistiques, industrielles et touristiques importantes. SOUTENIR LA RECHERCHE, LA CONNAISSANCE ET LA FORMATION, POUR CONSTRUIRE LES CONDITIONS DE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE En 2012, la biodiversité marine est encore mal connue et les « Aires marines protégées » s’y résument à Natura 2000 en mer et à un projet de Parc marin. Des liens avec la sécurité maritime existent et sont pris en compte par le « Plan Polmar » et les centres de soins pour animaux marins sont soutenus par la Région. La connaissance en matière de biodiversité évolue rapidement et la biodiversité elle-même peut rapidement fluctuer. L’effort de connaissance doit être constant et les savoirs et savoirs-faires partagés. Développer la coopération transfrontalière Mobiliser la recherche et encourager les sciences participatives Diagnostiquer et expliciter les services écosystémiques I Pour maintenir les services fournis des écosystèmes (forêts, prairies, zones humides …), il est essentiel de Comme les nuages et les cours d’eau, la biodiversité ne connaît pas les frontières administratives. Chaque année, des dizaines de millions d’animaux (oiseaux mais aussi poissons, invertébrés, dont insectes volants) effectuent des migrations transrégionales et transfrontalières, nécessaires à leur perpétuation. La prolongation de la trame verte vers les pays voisins fait partie des « critères de cohérence nationale » de la TVB. l apparait essentiel de construire des éléments de réponse aux questions que se posent les gestionnaires, acteurs socio-économiques et politiques du champ de la biodiversité, afin de contribuer à stopper la dégradation des écosystèmes, de préserver la biodiversité et d’anticiper les évolutions à venir. Il faut donc mener des travaux de recherche et d’expérimentation, à caractère technique, écologique ou socio-économique, guidés par des besoins et des spécificités locales, basés sur des cas concrets, associant étroitement des équipes de recherche avec des collectivités, des entreprises, des associations ou des habitants et dont les résultats puissent être généralisés et transférables. Approfondir et diffuser la connaissance de la biodiversité L’acquisition et le partage de la connaissance sur la biodiversité (actuelle et passée) sont une condition d’appropriation par tous des problématiques de conservation de la biodiversité régionale. Par exemple, la connaissance de la biodiversité des réservoirs (flore, faune …) et des sols sont des thèmes à approfondir et à diffuser. les identifier à l’échelle locale, identifier leurs bénéficiaires, diagnostiquer leurs états, identifier les structures ou personnes en charge de leur maintien en bon état. Construire de nouveaux outils financiers au service de la biodiversité Dans un contexte financier difficile et face à l’ampleur des défis, de nouvelles pistes de financement sont à explorer pour soutenir durablement les projets. Une étude de faisabilité est en cours concernant la mise en place d’un « Fonds régional pour la biodiversité ». D’autres outils financiers pourraient également être étudiés, comme les « obligations vertes », qui ont été récemment lancées avec succès par la Région Ile-deFrance. ZOOM sur l’Observatoire régional de la biodiversité (ORB) L’ORB regroupe le Conservatoire botanique national de Bailleul, le Conservatoire d’espaces naturels Nord-Pas-de-Calais et le Groupe ornithologique et naturaliste du Nord. Il interprète les informations collectées par le Réseau d’acteurs de l’information naturaliste (RAIN) et d’autres producteurs de données en région. Il publie annuellement un rapport sur la biodiversité en Nord-Pas de Calais. Ce travail autour de la connaissance est partenarial, mobilisant des naturalistes amateurs, des associations, des chercheurs, des collectivités autour du RAIN (Réseau d’acteurs de l’information naturaliste). 15 La mobilisation doit ainsi passer par différents axes d’action : Renforcer le lien homme-nature par l’information et la sensibilisation Encourager les actions individuelles favorables à la biodiversité Soutenir les dynamiques écocitoyennes collectives Réduire les inégalités écologiques et les inégalités sociales Ancrer le développement de l’écocitoyenneté dans les territoires SCHEMA REGIONAL DE COHERENCE ECOLOGIQUE - TRAME VERTE ET BLEUE DU NORD-PAS DE CALAIS Si l’information et la sensibilisation sont des étapes indispensables pour éclairer les citoyens et les amener à agir pour la protection de la nature et de la biodiversité, elles ne sont pas à elles seules suffisantes. Le passage à l’action des citoyens passe par un cheminement qui vise à concrétiser la stratégie régionale d’écocitoyenneté tout au long de la vie. Conception et réalisation : Conseil Régional Nord - Pas de Calais (D2DPE-IGAS ) à partir de données de la DREAL Nord-Pas de Calais, AEAP, CRP/CBNBL; IFEN; EEA ; SIGALE®Nord-Pas de Calais; ©IGN-BD Carthage®, ©IGN-BD Carto® -2012 autorisation n° 60.12005 CONSTRUIRE LA TRANSITION ÉCOLOGIQUE AVEC LES HABITANTS Figure - Carte de synthèse du SRCE-TVB. (Source : SIGALE Nord – Pas-de-Calais, 2012) Objectif .4 Objectif .5 Corridors principaux corridors avérés à remettre en bon état fluviaux de zones humides corridors potentiels à remettre en bon état de prairies / bocage forestiers de landes et pelouses acidiphiles de falaises de pelouses calcicoles Prairies Espaces semi-naturels réalisation : SIGALE®Nord-Pas de Calais DECEMBRE 2012 17 Carte de synthèse du SRCE-TVB CONTINUITES ECOLOGIQUES Réservoirs de Biodiversité Réservoirs de Biodiversité Réservoirs de Biodiversité Linéaires Attention : les corridors écologiques, au contraire des réservoirs, ne sont pas localisés précisément par le schéma. Ils doivent être compris comme des "fonctionnalités écologiques", c'est-à-dire des caractéristiques à réunir entre deux réservoirs pour répondre aux besoins des espèces (faune et flore) et faciliter leurs échanges génétiques et leur dispersion. de dunes miniers ELEMENTS DE CONTEXTE 10 Kilomètres Occupation du sol Espaces artificialisés Cultures 7,5 16 5 la construction d’une gouvernance multi-niveaux. La montée en puissance des territoires doit s’appuyer sur une gouvernance multi-niveaux, en s’appuyant sur la complémentarité et la répartition des compétences. ¯ l’intégration de la préservation de la biodiversité dans l’acte III de la décentralisation, et le renforcement des compétences et moyens dévolus aux collectivités territoriales. Les Régions assumeront la fonction de chef de file pour garantir les cohérences des stratégies La Région, au sein de ses propres politiques, se doit d’être exemplaire. La biodiversité est une condition non suffisante mais absolument nécessaire de la transformation écologique et sociale régionale. Espaces à renaturer 2,5 Il convient face à l’ampleur du défi et à son urgence de mettre en place une gouvernance adaptée qui passe à la fois par : ESPACES A RENATURER 0 L’absence de compétences reconnues et leurs éparpillements sur différents échelons locaux rend difficile la mise en œuvre de politiques cohérentes et ambitieuses en faveur de la biodiversité. Espaces à renaturer fluviaux CONSTRUIRE UNE GOUVERNANCE ADAPTÉE AVEC L’ENSEMBLE DES ACTEURS CRÉDITS Photos PHOTO DE COUVERTURE : Hugo FOURDIN PHOTO SOMMAIRE : Philippe FRUTIER PHOTO PAGE 04 : Hugo FOURDIN PHOTO PAGE 06 : Hugo FOURDIN PHOTO PAGE 10 : Hugo FOURDIN PHOTO PAGE 11 : Hugo FOURDIN PHOTO PAGE 12 : Hugo FOURDIN PHOTO PAGE 13 : Hugo FOURDIN PHOTO PAGE 14 : Philippe FRUTIER PHOTO PAGE 15 : Hugo FOURDIN PHOTO PAGE 16 - GAUCHE : Florent LAMIOT PHOTO PAGE 16 - DROITE : Emmanuel WATTEAU PHOTO PAGE CRÉDITS : Hugo FOURDIN 18 151, avenue du Président Hoover - 59555 Lille Cedex Tél. 03 28 82 82 82 - Fax. 03 28 82 82 83 - www.nordpasdecalais.fr