Résumé

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Le
génome
d’une
plante
:
un
individu
compartimenté
ou
plusieurs
individus
coopérants
?
Françoise
Budar.
Institut
Jean‐Pierre
Bourgin,
INRA
Versailles.
[email protected]
Résumé
Les
eucaryotes
sont
des
organismes
dont
le
génome
est
compartimenté
entre
le
noyau,
hérité
selon
les
lois
mendéliennes,
et
les
mitochondries
(+
les
chloroplastes
chez
les
plantes),
transmises
verticalement
à
la
descendance
maternelle.
Malgré
une
très
forte
coopération
et
interdépendance
entre
les
compartiments
génétiques,
la
différence
d’hérédité
entre
les
compartiments
provoque
un
conflit
génomique
dans
la
production
de
la
descendance
mâle,
comme
c’est
le
cas
entre
les
Wolbachia,
bactéries
endosymbiotiques,
parasites
reproducteurs
de
nombreuses
espèces
d’insectes
et
leurs
hôtes.
Ce
conflit
génomique
est
concrétisé
chez
les
plantes
par
les
stérilités
mâles
nucléo‐
cytoplasmiques
(CMS).
Ce
phénomène
est
à
l’origine
de
l’existence
de
populations
gynodioïques
(coexistence
de
femelles
et
d’hermaphrodites),
et
est
exploité
pour
la
production
de
semences
hybrides
en
agriculture.
Les
CMS
ont
été
étudiées
par
deux
communautés
de
recherche
dont
les
cadres
conceptuels
diffèrent
(ont
longtemps
différé)
dans
leur
appréhension
de
la
plante
en
tant
qu’organisme.
Les
évolutionnistes
et
généticiens
des
populations
considèrent
les
compartiments
génétiques
comme
des
entités
en
conflit
pour
la
détermination
du
sexe
de
la
plante
(femelle
ou
hermaphrodite).
Les
biologistes
moléculaires
et
physiologistes
ont
abordé
le
phénomène
en
considérant
que
la
stérilité
mâle
résulte
d’un
défaut
dans
le
fonctionnement
normal
de
la
plante,
et
en
particulier
de
ses
mitochondries.
En
effet,
une
altération
des
fonctions
mitochondriales
entraîne
presque
toujours
un
défaut
de
pollen,
mais
aussi
très
souvent
des
défauts
dans
le
développement
végétatif
et
la
production
des
graines.
Beaucoup
de
résultats
expérimentaux,
en
particulier
l’identification
des
acteurs
moléculaires
impliqués
dans
le
phénomène,
sont
très
cohérents
avec
l’expression
d’un
conflit
génomique
entre
noyau
et
mitochondries
pour
la
production
de
la
descendance
par
la
voie
mâle.
Toutefois,
certains
résultats
soutiennent
également
que
les
cytoplasmes
stérilisants
peuvent
avoir
un
effet
délétère
sur
les
autres
composants
de
la
valeur
sélective,
donc
sur
le
succès
reproducteur
femelle.
Les
modèles
théoriques
récents
prennent
cet
effet
en
compte
pour
expliquer
les
polymorphismes
cytoplasmiques
trouvés
en
populations
naturelles
(Dufaÿ
et
al,
2007).
Un
des
problèmes
qui
restent
en
suspens
est
l’élucidation
du
mécanisme
fin
physiologique
qui
permet
l’avortement
du
pollen
sans
(trop)
altérer
les
autres
composants
de
la
valeur
sélective.
Pour
aller
plus
loin
:
BUDAR,
F.,
P.
TOUZET
and
R.
DE
PAEPE,
2003
The
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Modelling
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1
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Serial
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Maternal
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conflict
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the
maladapted
male.
Trends
Genet
21:
281‐286.
Glossaire
:
conflit
génomique
:
situation
où
une
variation
a
des
conséquences
antagonistes
sur
les
compartiments
génétiques.
La
sélection
naturelle
agit
sur
ces
compartiments
en
sens
contraires.
endosymbiote
:
organisme
symbiotique
vivant
à
l’intérieur
des
cellules
de
son
partenaire
(hôte).
gynodioécie
:
système
de
reproduction
où
les
individus
sont
femelles
ou
hermaphrodites.
hérédité
cytoplasmique
:
transmission
uniparentale
(le
plus
souvent
maternelle)
des
génomes
non‐nucléaires
(mitochondrial
et
chloroplastique).
Cela
peut
concerner
également
des
endosymbiotes
ou
des
viroïdes.
organite
:
structure
intracellulaire
délimitée
par
une
membrane.
Les
mitochondries
et
les
chloroplastes
sont
les
seuls
à
posséder
un
génome.
parasite
reproducteur
:
endosymbiote
qui
augmente
l’efficacité
de
sa
transmission
en
manipulant
la
reproduction
sexuée
de
son
hôte,
au
détriment
de
celui‐ci.
symbiose
:
association
intime
et
durable
de
deux
organismes
d’espèces
différentes
(souvent
très
éloignées
phylogénétiquement).
Au
sens
large,
une
symbiose
peut
être
mutualiste
(au
bénéfice
des
deux
partenaires),
commensale
(sans
bénéfice
ou
coût
pour
les
partenaires)
ou
parasitaire
(au
détriment
d’un
partenaire).
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