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L’HOMME FACE À LA CRÉATION : LE RESPECT QUIL LUI DOIT
« Dieu prit l’homme et le plaça dans le jardin d’Eden pour le cultiver et pour le garder »
Gn II, 15
Méditation 7
Chers pèlerins,
Après que nous ayons entrevu la perfection de l’Ordre Divin à travers la
beauté de la création, nous nous proposons maintenant d’examiner la raison
pour laquelle Dieu a voulu confier la création à l’homme et quelle
conséquences nous devons en tirer dans l’usage que nous pouvons en faire.
I. POURQUOI DIEU A-TIL CONFIE LA CREATION A LHOMME ?
1. Dieu confie la création à l’homme pour qu’elle nous parle de lui
et nous le fasse connaitre et aimer : le « livre de la création »
Dieu a confié la création à l’homme non seulement pour qu’elle lui assure
les conditions de la vie matérielle (nourriture, abri, etc.) mais plus encore
pour qu’elle chante les gloires de Dieu. Nos anciens aimaient dire que Dieu
s’est exprimé non seulement dans la Bible, le livre de la révélation, mais
aussi dans le monde de la nature, le livre de la création.
A. L’EMERVEILLEMENT DEVANT LA CREATION COMME
FONDEMENT DE TOUTE CULTURE ET DE TOUTE PHILOSOPHIE
«L’émerveillement est le début de la philosophie » (Socrate, Thaetetus,
155d), c’est-à-dire de la recherche de la sagesse ; c’est le fondement de
toute culture et de toute philosophie. Devant la richesse de la création nous
recherchons tout naturellement sa cause ultime. « Par la contemplation des
choses créées, notre intelligence peut monter jusqu’à cerner l’existence de
Dieu, tout comme on connaît une cause par ses effets » (concile Vatican I).
B. LE TEMOIGNAGE DE L’ÉCRITURE SAINTE
La Sainte Bible, aussi bien dans l’Ancien que dans le Nouveau Testament,
témoigne que l’homme peut dans une certaine mesure connaître Dieu, ou
tout du moins savoir qu’Il existe, en contemplant la beauté de la création :
« la grandeur et la beauté des créatures font connaître par analogie Celui
qui en est le Créateur » (Sag 13, 5). Et Saint Paul d’ajouter : « [Les païens]
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sont donc inexcusables, puisque, ayant connu Dieu, ils ne l'ont pas glorifié
comme Dieu et ne lui ont pas rendu grâces… » (Rom 1, 20-21).
C. LE TEMOIGNAGE DE LA TRADITION CHRETIENNE
Nous pouvons penser à la longue lignée de saints, – dont notamment saint
François d’Assise que nous prions tout particulièrement aujourd’hui, – qui
ont fait de l’amour de la création un des points centraux de leur
spiritualité.
2. Dieu confie la création à l’homme, pour que l’homme conduise
la création vers Dieu : la dimension liturgique de la création
A. DIEU CREE TOUT LIBREMENT, POUR SA GLOIRE
« Le monde a été créé pour la gloire de Dieu » (Cc. Vatican I : DS 3025).
Saint Bonaventure explique que Dieu a créé toutes choses, « non pour
accroître la Gloire, mais pour manifester et communiquer cette Gloire »
Car Dieu n’a pas d’autre raison pour créer que son amour et sa bonté
(C.E.C., nº 293).
- cas des êtres dépourvus de raison
Sans choix délibéré de leur part, en existant selon leur nature, ils
glorifient le Créateur qui les a tirés du néant.
- cas des êtres intelligents
La « liturgie » de la création a besoin de l’homme pour rassembler le
cantique silencieux des êtres dépourvus de raison. « C’est seulement
alors, qu’il y a religion et liturgie » (Dom Delatte).
B. L’HOMME, SOMMET DE LA CREATION MATERIELLE, EST UN
MICROCOSME
L’homme, union d’un corps matériel et d’une âme spirituelle, résume en
lui-même toute la hiérarchie mystérieuse qui existe au sein de l’univers
créé, au sein du cosmos. Ainsi,
- nous occupons un lieu comme tous les corps physiques ;
- nous accomplissons des opérations communes à tous les êtres
vivants, telles que nutrition, croissance, reproduction ;
- comme tous les animaux, nous avons des sens internes et externes qui
nous mettent en contact avec le monde qui nous entoure…
- Spirituelle comme les anges, notre âme s’ouvre aux plus hautes vérités
et nous invite à répondre à l’invitation que Dieu adresse seulement aux
êtres doués d’intelligence et de volonté.
C. SELON LE PLAN DE DIEU, LHOMME EST COMME LE « GRAND
PRETRE » DE LA CREATION
Toute proportion gardée, considérer la création comme le Temple de la
présence de Dieu, c’est nous inviter à une profonde révérence devant la
création.
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Le monde créé est comme un Temple (ce que font entendre maints
passages dans les psaumes), et l’homme est le prêtre que Dieu y met pour
le garder et le cultiver : autrement dit, pour manifester la gloire divine à
travers la création.
La liturgie nous rappelle la beauté et la dignité de la création. L’Église
se plaît à nous rappeler que la création n’est point un fait passé mais une
réalité qui se prolonge dans la vie du croyant. D’ailleurs, l’un des thèmes
principaux du Psautier est la gloire de Dieu manifestée dans la création. Le
thème de la création est particulièrement prononcé dans les rites de la
Vigile Pascale, avec la lecture des prophéties et la bénédiction des deux
éléments primordiaux qui sont la lumière et l’eau.
La liturgie sanctifie les biens créés pour les conduire à Dieu. « Dieu
nous touche par le moyen des réalités matérielles, à travers des dons de la
création qu’Il met à son service... » (Benoît XVI).
Les sacrements sont l’exemple le plus évident, mais songeons aussi aux
processions des Rogations, avec les bénédictions des champs, ou les très
nombreux sacramentaux, qui doivent être pour nous autant d’occasions de
remercier le Bon Dieu pour les merveilles de sa création.
La liturgie, – et surtout les sacramentaux et les bénédictions des choses
créées, – témoigne donc de la récapitulation de toute chose dans le
Christ.
II. COMMENT L'HOMME DOIT-IL UTILISER ET PROTEGER LA
CREATION : LECOLOGIE CATHOLIQUE ?
1. Des erreurs concernant les rapports entre l’homme et la
création
Le Pape Benoit XVI nous met en garde : « L’importance de l’écologie est
désormais indiscutée. Nous devons écouter le langage de la nature et y
répondre avec cohérence.
Je voudrais cependant aborder avec force un point qui aujourd’hui comme
hier est – me semble-t-il – largement négligé : il existe aussi une écologie
de l’homme. L’homme aussi possède une nature qu’il doit respecter et
qu’il ne peut manipuler à volonté… Il est esprit et volonté, mais il est aussi
nature, et sa volonté est juste quand il respecte la nature, l’écoute et quand
il s’accepte lui-même pour ce qu’il est… C’est justement ainsi et seulement
ainsi que se réalise la véritable liberté humaine ».
A. « ÉCOLOGISME » MODERNE : LA « NATURE » COMME UNE FIN EN
SOI
Dans l’histoire de la pensée, et même aujourd’hui dans une certaine
sentimentalité religieuse à la mode, certains ont cru devoir identifier Dieu
avec le monde (c’est l’erreur appelée panthéisme) : Dieu ne serait pas une
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personne transcendante qui nous créé librement par amour, mais Il serait
tout simplement le monde.
Une version sécularisée de cette erreur peut se reconnaître dans certains
courants de l’écologie moderne. L’homme serait même l’ennemi parce
qu’il abîme la nature en l’utilisant. D’où la prétendue nécessité de limiter
les populations. Ce courant, qui ne reconnaît pas Dieu tel que la révélation
biblique nous le fait connaître, ignore aussi l’homme créé à l’image de
Dieu.
B. UTILITARISME OUTRANCIER : EXPLOITATION DES BIENS CREES
Les papes le plus récents nous ont prévenus sans cesse du danger qui existe
lorsque l’homme regarde le monde comme un champ d’exploitation destiné
à satisfaire ses désirs personnels. Ainsi l’homme-consommateur perd son
lien avec les autres hommes (crées eux-aussi à l’image de Dieu et qui
doivent eux-aussi pouvoir jouir des biens de la terre) ; il perd aussi tout
sens de l’harmonie avec la création, qu’il ne respecte et ne contemple
pas, mais qu’il ne fait qu’utiliser.
C’est cette culture de consommation que le Pape François stigmatise, en
l’appelant « culture de rebut » : un malfaisant utilitarisme qui tend à
devenir une mentalité commune. N’en serions-nous pas coupables, nous
aussi ?
2. La vision catholique : l’homme comme intendant de la création
En 1979 le Pape Jean-Paul II a proclamé Saint François d’Assise « patron
céleste de l’écologie» (lettre apostolique Inter Sanctos), signifiant ainsi que
les catholiques ne peuvent se désintéresser des réalités écologiques.
Or, le plan de Dieu concernant la place de l’homme dans le monde (dès
avant la chute) se résume en deux points : l’homme peut utiliser la
création, et il doit la protéger. En bref, l’homme est l’intendant de la
création. L’intendant, c’est celui qui doit gérer ce qui ne lui appartient pas,
sachant qu’il aura à rendre compte de son ministère : il ne doit ni
s’approprier ni gaspiller ce qui lui est confié.
A. L’HOMME PEUT UTILISER LA CREATION
« Il est légitime de se servir des animaux pour la nourriture et la confection
des vêtements. On peut les domestiquer pour qu’ils assistent l’homme dans
ses travaux et dans ses loisirs. Les expérimentations médicales et
scientifiques sur les animaux sont des pratiques moralement acceptables,
pourvu qu’elles restent dans des limites raisonnables et contribuent à
soigner ou sauver des vies humaines » (C.E.C. nº 2417). Ce qui est vrai des
animaux, (êtres sensibles), l’est également pour les êtres inférieurs de la
création.
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L’homme est maître de la création mais il n’en est pas le tyran. La raison
devrait nous permettre d’utiliser la création en respectant son but :
pourvoir aux besoins de tous les hommes (destination universelle des
biens de la terre) et nous faire admirer la sagesse et la bonté du Créateur.
L’homme peut « utiliser » la création pour pourvoir à ses besoins
physiques, mais aussi pour ses « besoins métaphysiques ». Le chrétien est
appelé à utiliser les biens créés avec révérence et gratitude, conscient du
fait qu’ils sortent des mains de Dieu.
B. L’HOMME DOIT PROTEGER LA CREATION
Le Catéchisme nous dit : « La domination accordée par le Créateur à
l’homme sur les êtres inanimés et les autres vivants n’est pas absolue ; elle
est mesurée par le souci de la qualité de la vie du prochain, y compris des
générations à venir ; elle exige un respect religieux de l’intégrité de la
création » (C.E.C. nº 2415).
De nos jours les pontifes romains insistent fortement sur le lien entre la
protection de la nature et le respect pour la vie humaine ; c’est même une
note essentielle du magistère pontifical sur l’écologie,
De plus, « protéger la nature » veut dire respecter l’être des choses telles
qu’elles ont été créées par Dieu, ne pas les manipuler : respecter, par
exemple, la différence entre les sexes est un aspect indispensable de la
protection de la création.
Chers amis pèlerins,
L’écologie catholique repose sur l’état d’esprit qui animait les grands
mystiques : l’esprit d’admiration, de joie et de gratitude qui les faisait
adorer dans la création les desseins de la providence du Créateur. C’est un
état d’esprit qui nous fait éviter les dangereux extrêmes d’un écologisme
antihumain et d’un goût excessif pour les prouesses de la technologie.
Arrivons-nous, nous même, à garder cet équilibre ? Je vous propose d’y
réfléchir quelques instants en silence, avant de réciter ensemble la prière de
Saint Ignace de Loyola :
« Recevez, Seigneur, l’offrande de ma liberté. Recevez ma mémoire, mon
intelligence, toute ma volonté.
Tout ce que j’ai, tout ce que je suis, c’est Vous qui me l’avez donné. Je vous
le rends, Seigneur, sans réserve, pour que vous en disposiez selon votre
bon plaisir.
Donnez-moi seulement votre amour et votre grâce ; et je suis assez riche, et
je ne demande rien de plus. Ainsi soit-il. »
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