COP21 PAIX – JUSTICE ET CLIMAT DEPUIS 1971 12 DÉCEMBRE

publicité
DEPUIS 1971
N° 182 / Décembre 2015 / 3€20
PAIX – JUSTICE
ET CLIMAT
Construisons un monde
plus juste et solidaire !
COP21
Refusons l’inaction !
12 DÉCEMBRE
Relevons un défi inédit
pour le climat !
Tous à la COP !
Plus que jamais, nous devons
nous mobiliser massivement
Le contexte a radicalement changé et nos revendications
n’ont jamais été aussi légitimes. La vision des sociétés soutenables portée par les Amis de la Terre prend tout son sens en
ces temps troublés par une actualité dramatique.
C’est bien une autre vision du monde qui s’oppose à la réponse
politique apportée aux tragiques événements auxquels nous
venons d’être confrontés.
Nous sommes bouleversés par ce qui s’est passé en France
le 13 novembre, de la même manière que nous sommes
bouleversés par les attentats qui ont lieu au quotidien dans
nombre de pays.
« Climate Justice for Peace », la justice climatique pour la
paix, c’est bien ce que nous répondons à cette logique
d’escalade de la haine et de la violence.
« Climate Justice for Peace », c’est le nom de la grande mobilisation que nous portons pour le 12 décembre à Paris.
Cette mobilisation de masse dans les rues de Paris est aussi
inédite que créative. Elle répond de manière inventive à la
question qui nous est imposée en premier lieu : comment
manifester quand il est interdit de manifester ?
L’enjeu est de taille, il s’agit d’avoir le mot de la fin. Nous ne
pouvons pas laisser nos dirigeants nous faire croire qu’un
accord historique a été trouvé à Paris. Nous savons déjà qu’il
ne sera pas à la hauteur des enjeux et qu’il nous emmène au
mieux sur une trajectoire de 3°C ou plus. La simple question
du 2°C ou moins n’est même pas sur la table, on ne discute
que du contenant et pas du contenu.
Notre responsabilité est de faire entendre la voix des communautés affectées, des pays du Sud aux personnes
en situation de précarité énergétique ici et maintenant.
Nous devons construire un mouvement large pour la justice
climatique qui perdure bien après la COP. Le risque de sombrer dans le fatalisme et la résignation est bien trop grand
si nous n’arrivons pas à nous rassembler au-delà de nos
divergences.
Alors écrivons l’histoire, venez participer à une expérience
collective hors du commun !
Soyons des dizaines de milliers à Paris pour la justice climatique et la paix les 11 et 12 décembre.
FLORENT COMPAIN
Président des Amis de la Terre France
SOMMAIRE
Le Courrier de la Baleine n°182
Édition Spéciale COP21.
Décembre 2015 n°CPPAP :
0317 G86222 – ISSN 1969 – 9212
Dans ce numéro, les adhérents
des Amis de la Terre France
trouveront l’appel à don
« Debout pour la justice climatique ».
Directeur de la publication :
Florent Compain
Rédacteur en chef et directeur artistique :
Pierre Sagot
Rédacteurs :
Sylvain Angerand, Florent Compain, Gabriel
Mazzolini, Jagoda Munic, Malika Peyraut.
Communication, relations presse :
Pierre Sagot, [email protected]
09 72 43 92 65
Graphisme et maquette :
Aurélien Dovillez, [email protected]
Impression :
Sur papier recyclé Offset Igloo 120g/m2 avec
encres végétales : STIPA, http://www.stipa.fr/
Crédits photos :
Couverture : Théophile Navet,
http://www.theophilenavet.com/
Page 4 : Eric Coquelin
Page 5 : Jérémie Wach Chastel
Page 6 et 7 : Friends of the Earth Europe,
Collectif pour la Transition Citoyenne,
Jérémie Wach Chastel
Page 10 : Théophile Navet,
http://www.theophilenavet.com/
Page 11 : Jeunes Amis de la Terre
Page 12 : Friends of the Earth International
Les Amis de la Terre France
Mundo-M, 47 avenue Pasteur
93100 Montreuil
[email protected]
01 48 51 32 22
www.amisdelaterre.org
C
e document a été réalisé
avec le soutien financier
de l’Union Européenne.
A
ction financée par la
Région Île-de-France.
4
MOBILISÉ-E-S
POUR TOUT
CHANGER !
Parce qu’il ne faut rien lâcher !
6
8
PAIX, JUSTICE
ET CLIMAT
Construisons un monde plus
juste et solidaire !
COP21 :
LES CITOYEN-NE-S
REPRENNENT
LA MAIN !
Par des actions inédites pour le
climat, nous aurons le dernier mot !
11
12
LA FORCE DE LA
NON-VIOLENCE
Ou comment accumuler
les victoires.
LE MOT
DU RÉSEAU
INTERNATIONAL
Agir de façon juste et ambitieuse
pour stabiliser le climat est sans
doute la meilleur manière d’agir
pour la paix.
LA BALEINE . N°182
3
MOBILISÉ-E-S
POUR TOUT CHANGER !
Avec la prolongation de l’interdiction des manifestations suite aux dramatiques événements du 13 novembre à Paris, nous
réaffirmons le besoin nécessaire de poursuivre la lutte pour un monde juste et solidaire. Nous maintenons la venue de milliers
de membres de notre Fédération Internationale à Paris les 11 et 12 décembre, à l’issue de la 21ème Conférence des Nations Unies sur
le climat. Nous ferons entendre la voix de celles et ceux qui luttent pour un monde meilleur et la justice climatique, au-delà des
dérives sécuritaires et xénophobes.
Les jours qui viennent de s’écouler ont
été marqués par une série d’attaques terroristes dramatiques. Aux victimes des
attentats de Paris, Bagdad, Beyrouth,
Tunis comme Bamako, ainsi qu’à leurs familles, nous exprimons toute notre solidarité et notre soutien. Nous dénonçons ces
actes criminels insensés qui, partout dans
le monde, visent à ébranler notre soif de
justice, de paix, d’équité, de liberté.
Nous sommes effarés de constater
que les seules réponses apportées à
ces actes sont celles de la violence
et des armes, alors qu’elles ne font
qu’attiser les symptômes d’une crise
aux fondements bien plus globaux.
Nous considérons que les réponses justes
sont celles qui s’attaquent aux fondements
des crises sociale, climatique, écologique
et économique, que nous connaissons
à l’échelle globale aujourd’hui. Nous luttons contre le pillage des ressources du
Sud par les États et multinationales du
Nord, les rapports inégalitaires au niveau
mondial, la violation des droits fondamentaux, la dérégulation financière globale, la
4
LA BALEINE . N°182
course effrénée à la surconsommation.
Nous sommes indignés par les actes
islamophobes et racistes qui s’accroissent en France, et ailleurs.
Le monde pour lequel nous nous mobilisons est celui de sociétés soutenables,
d’un monde de paix et de justice, où les
peuples vivent dans la dignité, la tolérance et le respect des droits, en prenant
en compte leur environnement et les
générations futures.
Pour parvenir à cet objectif, notre combat
pour la justice climatique est aussi celui de
la lutte contre la violence, la militarisation,
l’islamophobie, l’intolérance par rapport
aux réfugiés et aux étrangers. Une lutte de
résistance face à la peur.
Nous sommes révoltés de la confiscation
de nos droits à la liberté d’expression sous
couvert de notre propre protection. Nous
refusons de subir cette stratégie du choc
qui vise à profiter d’un traumatisme pour
légitimer des pratiques autoritaires et
liberticides.
Nous avons aujourd’hui une responsabilité, celle de résister. N’oublions pas le
défi historique posé à notre génération :
celui de lutter contre les dérèglements
climatiques provoqués par un système
capitaliste, extractiviste, consumériste
et inégalitaire.
Soyons lucides sur le fait que renoncer à
une part de nos libertés ne nous amènera
pas à plus de sécurité.
Lors de la COP21, les décideurs du monde
ne peuvent négocier un accord sur le
changement climatique aussi crucial sans
que la voix des communautés affectées ne
se fasse entendre.
C’est pourquoi nous devons soutenir les
mobilisations dans les rues de Paris et
d’ailleurs, du 29 novembre au 12 décembre,
pour faire entendre la voix de la justice
climatique.
Plus que jamais, bâtissons ensemble les
sociétés soutenables de demain !
PHOTO PRISE LORS D’ALTERNATIBA
PARIS LES 26 ET 27 SEPTEMBRE 2015
COPYRIGHT JEREMIE WACH CHASTEL
LA BALEINE . N°182
5
UN MONDE
QUI S’EFFONDRE
La crise climatique est le symptôme
d’une crise globale, à la fois écologique,
sociale et économique. Notre modèle
de développement, fondé sur la concurrence et la surexploitation des ressources naturelles, creuse les inégalités.
Il permet à une minorité de personnes
de vivre dans l’excès et empêche la majorité de satisfaire leurs droits et besoins
fondamentaux.
60-70 milliards de tonnes de matériaux par
an, c’est ce que nous extrayons et consommons : c’est 50 % de plus qu’il y a 30 ans !
Les Nations Unies prévoient que cette
consommation pourrait encore doubler à
l’horizon 2050 si nous ne réagissons pas.
Dans le même temps, les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont explosé et
constituent une menace imminente dont
les effets sont déjà perceptibles pour la stabilité du climat.
Surconsommation et changement climatique sont donc les deux faces d’une
même pièce.
Or, ce n’est qu’avec la stabilisation progressive du climat il y a environ 10 000 ans
que l’Humanité a pu prendre son essor, inventer l’agriculture et bâtir des civilisations.
Si le climat s’emballe, que les sécheresses et les événements climatiques
extrêmes se multiplient, les migrations
de personnes s’intensifieront et seront
6
LA BALEINE . N°182
exacerbées par des tensions géopolitiques croissantes pour le contrôle
des terres fertiles et des ressources
naturelles.
Ce qui se passe aujourd’hui en Syrie en
porte les prémisses : les sécheresses
incessantes qui se sont abattues dans
cette région entre 2006 et 2010 ont entraîné le déplacement de plus d’un million de
personnes : un terreau favorbale à la prise
de contrôle du pays par des extrémistes.
En Afrique sub-saharienne, l’asséchement
progressif du Lac Tchad, qui a perdu 30 %
de sa superficie en 20 ans, participe également à la déstabilisation des communautés qui en dépendaient et par ricochet,
accroît l’insécurité sur l’ensemble de la
sous-région.
Aujourd’hui, à chaque seconde, c’est
une personne qui quitte son domicile
en raison d’une catastrophe naturelle :
en 2050, les Nations Unies prédisent
des déplacements massifs de plus de
250 millions de personnes si rien n’est
fait pour enrayer les changements climatiques.
Nous pouvons fermer les yeux sur ces inégalités qui se creusent, construire les barrières les plus hautes pour nous protéger,
mais il y aura toujours un moment où la
réalité s’imposera à nous.
UNE VISION
POUR L’AVENIR
Pour les Amis de la Terre, la convergence de ces crises appelle des
solutions pour s’attaquer à la racine
du problème : réduire les inégalités
permettra d’articuler la satisfaction
des besoins fondamentaux de tous et
la préservation des écosystèmes.
Cela signifie permettre à chacun de
vivre dans un espace écologique soutenable qui se définit par :
• un plancher qui correspond au minimum de ressources dont chaque personne doit disposer pour couvrir ses
besoins fondamentaux : accès à l’air, à
l’eau, à l’alimentation, à l’énergie, à l’habitat... mais aussi à la santé, à l’éducation, à l’information et à la culture ;
•
un plafond, au-delà duquel toute
personne ou groupe utilisant une
ressource empiète sur l’espace écologique d’autrui et sur celui des générations futures.
Affirmer que chaque humain devrait avoir
le même droit d’accès à une « part » raisonnable et soutenable des ressources
naturelles ouvrirait une nouvelle voix de
dialogue avec les pays du Sud et les pays
émergents. Un dialogue qui devrait également prendre en compte la responsabilité
historique des pays développés qui ont
déjà largement consommé leur « part ».
DES SOCIÉTÉS
SOUTENABLES QUI
SE CONSTRUISENT
Partir des limites de notre planète
et prendre pour boussole le principe
d’équité permettraient de s’organiser
pour laisser une grande partie des
énergies fossiles dans le sol alors qu’aujourd’hui chaque pays cherche à sécuriser son accès aux ressources au détriment des autres. Ce sont ces principes
que défendent les Amis de la Terre
lorsque nous militons pour la justice
climatique.
Faire le constat du monde tel qu’il est
aujourd’hui, des rapports de force
qui l’animent et des inégalités qui se
creusent, ne signifient pas pour autant être fataliste et renoncer à notre
capacité à agir. Partout dans le monde
et en France, des alternatives se structurent, des initiatives citoyennes se
multiplient, des entreprises s’organisent différemment et l’ensemble de
ces actions participent à construire,
dès aujourd’hui, le monde dans
lequel nous voulons vivre demain.
Le slogan « moins de biens, plus de
liens » souligne la puissance de ces
initiatives qui renforcent durablement
la résilience de nos sociétés et nous
permettront de réagir avec plus de
solidarité aux chocs que nous affronterons. Mais surtout, la multiplication
de ces expériences de transition
permettent de rendre palpables nos
utopies, d’accumuler des forces pour
qu’un jour ce qui était « l’alternative »
devienne la « norme ». Il y a encore 5
ans, habiter une maison en paille était
une excentricité. Aujourd’hui, ce type de
construction est normalisé et accessible
à tous. Au début des années 2000, les
premières Associations pour le Maintien
de l’Agriculture Paysanne sont apparues
en France : aujourd’hui, il y en a plus de
1500 et il n’est plus tabou de privilégier
l’achat de produits locaux. Même le
sacro-saint cadre des marchés publics
qui dérive de l’Organisation Mondiale
du Commerce et interdit la « discrimination » est en train de craqueler : en 2011,
le législateur a dû l’adapter pour intégrer
la notion « d’approvisionnement direct »
actant de fait la multiplication - illégale
mais légitime - des marchés publics privilégiant plus ou moins explicitement
des produits locaux.
Ces graines du changement peuvent
engendrer de puissants effets de levier si nous en avons conscience et si
nous savons construire des stratégies
efficaces. Rien n’est impossible.
L’histoire a montré comment des pays
sont capables de profondément modifier leur appareil de production en basculant sur une « économie de guerre.
De tels changements ne seraient-ils pas
possible pour construire une « économie
de paix » ?
Les crises qui se multiplient, se connectent
et s’amplifient condamnent le monde tel
que nous le connaissons. Nous pouvons en avoir peur mais nous pouvons
aussi y voir l’opportunité de construire
des sociétés plus soutenables, plus
justes et en paix.
LA BALEINE . N°182
7
COP21 :
LES CITOYEN-NE-S
REPRENNENT LA MAIN !
EST-CE
UTILE ?
QUE PEUT-ON
ATTENDRE DE
L’ACCORD DE PARIS ?
L’espace multilatéral permet théoriquement à des petits pays comme Tuvalu
d’avoir la même voix que des États pollueurs comme les États-Unis ou l’Europe,
et de ne pas baser la résolution de la crise
climatique sur des accords bilatéraux, qui
excluraient les pays les plus petits et les
plus pauvres. Mais ce fonctionnement théorique est miné par la présence, au sein des
COP et en amont, d’intérêts privés et d’une
logique permanente de marché. Ainsi, en
réalité, le poids des lobbies et des multinationales, avec la complicité des États, est tel
que le rapport de force est disproportionné.
L’un des défis est donc d’assainir la COP, et
de rebalancer le rapport de force en faveur
des peuples, en priorité ceux qui sont affectés par le dérèglement climatique.
Pour sortir de la crise climatique, il nous
faudrait un accord contraignant, limitant
l’augmentation de la température du
globe en deçà de 1,5°C (car 2°C pour beaucoup de pays, c’est déjà trop), universel et
ambitieux, qui ne recourt pas à des mécanismes de marché comme les marchés
carbone ou la compensation. On sait déjà
que ce n’est pas cet accord qui va sortir
de Paris. Les États-Unis, entre autres, reviennent sur la dimension contraignante.
La somme des contributions volontaires
que les États étaient censés mettre sur la
table excède les 3°C. Les financements nécessaires pour rétablir la justice vis-à-vis
des pays affectés par le dérèglement climatique ne sont pas réunis. L’emprise du
secteur privé est toujours aussi prégnante.
QUE DÉSIGNE
LE TERME
COP ?
« COP » désigne la
« Conférence des Parties »,
soit la Conférence de l’ONU
durant laquelle les États
négocient pour limiter
l’augmentation de la température du globe en-deçà
du seuil critique de 2 °C.
8
IL N’Y A DONC
RIEN À GAGNER ?
ET AU-DELÀ
DE LA COP21 ?
La présence de la société civile à l’intérieur agit comme garde-fou. Dans
les négociations, la Fédération internationale des Amis de la Terre lutte
ainsi pour faire entendre la voix des populations affectées, s’opposer
au déploiement des fausses solutions et à l’expansion des mécanismes
de marché et mener des batailles gagnables telles que l’expansion des
énergies renouvelables en Afrique. Bien sûr, la COP n’est pas le premier
champ de bataille. Pour sortir de la crise climatique, c’est le système
qu’il faut changer. Cette bataille-là, elle se joue au quotidien, à toutes les
échelles, en menant des luttes de résistance et en essaimant les alternatives citoyennes.
Nous n’avons pas focalisé tous nos efforts sur la
COP. Au contraire, nous avons solidifié les fondements de notre mouvement, gagné des batailles
nationales. Rien de tout cela ne s’arrête en 2016.
Nous continuerons à mener des campagnes
stratégiques, à soutenir les résistances et les
alternatives.
LA BALEINE . N°182
Pourquoi organiser une action
à la fin de la COP 21 ?
Nous savons que dans le meilleur des cas
l’accord qui sera adopté à Paris permettra
d’écarter certaines fausses solutions et
de renouer un dialogue international
indispensable. Mais nous ne sommes
pas dupes. Les États-Unis ont déjà fait
savoir qu’ils s’opposeraient à tout accord
contraignant et la Chine, si elle a acté
la nécessité d’agir, évoque une simple
stabilisation de ses émissions à l’horizon
2030. Nous sommes donc très loin
de ce que le GIEC recommande pour
tenter de stabiliser le climat. La solution
ne viendra donc pas d’en « haut », elle ne
viendra pas non plus simplement de la
juxtaposition d’initiatives citoyennes. Ce
qui est en jeu, c’est de montrer qu’il existe
un mouvement capable de s’appuyer
sur ces initiatives pour en faire une force
de transformation. Montrer que là où les
décideurs désertent le champ politique en
se compromettant avec des intérêts privés,
les citoyens le réinvestissent en réclamant
la justice climatique. Nous sommes unis
et imaginatifs, nous n’attendons l’aval
d’aucun gouvernement pour engager la
transition et nous savons que cette force
deviendra un jour si puissante que les
gouvernements ne pourront plus l’ignorer.
C’est ce message que nous voulons faire
passer à la fin de la COP 21 : « votre agenda
n’est pas le nôtre, ce qui est une fin pour
vous n’est qu’un point d’étape pour nous ».
Comment organiser
une grande action
populaire de masse
dans un contexte
post-attentat ?
Résister au système actuel, c’est manier
avec créativité l’art de gérer les limites
pour imaginer des solutions. Cette ingéniosité est sans réserve, quelques soient
les barrières qui tentent d’être dressées.
Or, dans ce contexte, un mois après les
fusillades dramatiques qui ont ébranlé
la population ; dans un pays où le gouvernement a déclaré l’état d’urgence et
muselé le droit à manifester ; ces barrières sont nombreuses.
Pour les Amis de la Terre, il n’a jamais été
question de renoncer à notre droit à manifester mais pour que cette action ait
une grande ampleur, et que des milliers
de citoyens participent, il nous a paru important d’agir dans un cadre sécurisé. La
question était donc d’imaginer comment
manifester sans manifester. Nous allons
créer une action de mobilisation de masse,
légale, mais suffisamment subversive pour
montrer la volonté et la détermination de
la société civile impliquée dans la bataille
pour le climat.
LA BALEINE . N°182
9
12 2015
12
Écrivons l’Histoire :
un message géant dans les rues de Paris
Manifester, c’est porter un message. Nos libertés se voient limitées drastiquement par l’état d’urgence. Pourtant plus que jamais il est
temps de se lever face à l’état d’urgence climatique, de faire entendre la voix de celles et ceux qui sont affectés par les déréglements
climatiques. Ne renonçons pas à nous manifester, relevons ce défi inédit pour le climat !
« Climate Justice for Peace », c’est le message géant que des milliers de personnes composeront dans tout Paris et qui sera visible en
direct sur une carte interactive.
Le long des rues de la capitale, les mêmes que l’on voudrait nous faire déserter, par milliers de petits groupes (ne pouvant être considérés
comme des attroupements) nous nous lancerons à la conquête d’emplacements prédéfinis pour composer physiquement ce message
à grande échelle.
Le concept est simple :
• Rejoindre sa position et se géolocaliser.
• Porter un message, se prendre en photo.
• Partager pour envahir les réseaux sociaux.
• Suivre en direct la construction du message en ligne.
Exprimons avec créativité toutes nos revendications et nos aspirations. Face aux crises globales, nous pouvons fermer les yeux sur les inégalités
qui se creusent, construire des barrières plus hautes pour nous protéger, ou construire un monde plus juste, plus solidaire, et en paix.
Au croisement entre la mobilisation de masse et la mobilisation digitale, à la fois légale, subversive et à fort impact médiatique, cette action
sera une expérience collective hors du commun pour renforcer le mouvement pour la justice climatique.
03 2015
12
Remettons les Prix Pinocchio
du Climat.
L’édition spéciale « climat » des Prix Pinocchio cible les entreprises dont les activités ont un impact direct sur le climat et les communautés
à travers le monde, et celles dont l’influence, à travers le lobbying et le greenwashing affaiblit et détruit les politiques climatiques et sape
les actions pour un monde plus juste et solidaire.
Pour ne pas laisser les lobbies et autres faiseurs de « fausses solutions » nous imposer leur vision d’avenir, nous leur remettrons le prix des
plus gros « menteurs » lors d’une cérémonie pleine d’humour, de musique et d’invités spéciaux.
10
LA BALEINE . N°182
LA FORCE DE LA
NON-VIOLENCE
RÉQUISITION CITOYENNE DE CHAISES À HSBC
PAR LES JEUNES AT
Nombreux-ses sont celles et ceux qui
croient que la force armée est le seul
moyen pour résoudre des conflits ou que
répondre à l’oppression et à l’injustice
par la violence est la plus efficace des
méthodes pour faire changer les choses.
Il y a eu Gandhi et Martin Luther King,
bien sûr, mais il ne s’agirait là que de
belles histoires à raconter aux enfants.
La violence serait-elle efficace là où la
non-violence serait juste un moyen de se
donner bonne conscience ?
Écartons l’argument moral et concentrons-nous simplement sur l’argument de
l’efficacité : pour répondre à cette question,
Erica Chenoweth et Maria J. Stephan ont
étudié plus de 300 conflits documentés
entre 1900 et 2006 et analysé les stratégies utilisées et leur efficacité. La conclusion est que les campagnes de résistance
non-violente sont presque deux fois
plus susceptibles de réussir totalement
ou en partie que la résistance violente !
Et la démonstration est encore plus forte
lorsque l’on considère le long terme :
les pays qui sont sortis d’un conflit par
une résistance non-violente ont plus de
40 % de chances de rester des démocra-
ties cinq ans après la fin du conflit alors
que ce chiffre chute à 5 % si le changement
a eu lieu avec des méthodes violentes.
Mais il ne suffit pas de descendre dans la
rue par millions pour faire chuter une dictature ou convaincre nos gouvernements
d’agir. Nous pouvons avoir les meilleurs
arguments du monde, avoir la morale de
notre côté et de nombreux alliés, tout cela
peut être insuffisant sans une stratégie
claire et efficace.
Les luttes non-violentes sont des luttes
asymétriques : leur réussite passe par
une analyse fine du rapport des forces
en présence et par notre capacité à nous
concentrer sur les faiblesses de notre
adversaire.
Combattre un pouvoir militaire plus fort
que nous par les armes est tout aussi vain
que de vouloir combattre le pouvoir des
multinationales par l’argent. Ce qui fait
notre force, c’est notre imagination, notre
capacité à créer de l’adhésion autour de
nos actions et à mettre en scène l’absurde et l’anormalité des situations que
nous dénonçons. Ce qui forge nos victoires, c’est notre capacité à décomposer une stratégie globale en une succes-
sion de victoires d’étapes atteignables
qui nous permettent d’accumuler des
forces. Prenons un exemple : il y a un an,
après une bataille sur le méga-projet minier
Alpha Coal en Australie, la Société Générale
a annoncé son retrait. Depuis, le mouvement s’est amplifié : cette banque s’est
engagée à ne financer aucun autre projet
minier dans le Bassin de Gallilée puis a annoncé qu’elle renonçait à soutenir le secteur du charbon. Nous avons ensuite reporté nos moyens sur les autres banques
et c’est aujourd’hui BNP Paribas qui s’est
aligné. Ce qui était impensable, il y a encore un an, devient progressivement une
réalité grâce à une stratégie efficace.
Envie de passer à l’action ? En 2016, les Amis
de la Terre souhaitent renforcer l’accès aux
formations à la stratégie et à l’action directe
non-violente dans le cadre d’un nouveau
programme « Alternativez-vous ».
Pour en savoir plus
contacter
Gabriel Mazzolini
[email protected]
Sylvain Angerand
[email protected]
LA BALEINE . N°182
11
CONTACTEZ PIERRE SAGOT
[email protected]
pour nous faire part de vos avis
et envies pour les prochaines Baleines
Retrouvez nos derniers communiqués de presse et téléchargez nos publications sur
www.amisdelaterre.org/Nos-communiques-de-presse.html
LE MOT DU RESEAU INTERNATIONAL
Agir de façon juste et ambitieuse pour stabiliser
le climat est sans doute la meilleure manière d’agir pour la paix.
Nous sommes debouts en solidarité avec les Parisien(ne)s et nous demandons une action urgente contre les changements climatiques pour construire des sociétés soutenables, pacifiques et justes. En mon nom, et en celui de notre fédération des Amis de
la Terre International, je voudrais exprimer mes condoléances les plus sincères aux familles et aux ami(e)s des victimes tout en
ayant une pensée de solidarité vers toutes les personnes affectées par la violence et le terrorisme.
Malheureusement, ces attaques ne sont pas isolées. Il y a trop d’endroits dans le monde où les conflits meurtriers sont devenus le
quotidien pour nombre de personnes.
pauvreté, de famines, à une érosion de la biodiversité, à une baisse
de la productivité des terres cultivées et, en bout de chaîne, à plus
de violence et de guerres.
Nous militons pour la paix et la justice, pour un monde plus soutenable pour les générations futures et l’environnement ; un monde
dans lequel les gens peuvent vivre dignement, s’exprimer librement, un monde plus attentif à la détresse des refugiés et à l’accueil des étrangers. Pour que ce rêve devienne réalité, nous ne devons pas céder à la peur mais au contraire agir contre la violence,
la militarisation et l’islamophobie.
Nous voulons dire à toutes celles et ceux qui ont prévu de venir
à Paris le 11 et 12 décembre de ne pas changer leurs plans. Nous
avons imaginé une solution pour maintenir notre mobilisation,
tout en respectant les nouvelles consignes de sécurité. Plus que
jamais, nous ne voulons pas laisser le mot de la fin aux décideurs
politiques et aux pollueurs, mais démontrer la force des citoyens.
Depuis les attaques à Paris, le gouvernement français a contraint
les libertés, annoncé l’Etat d’urgence et annulé les mobilisations
prévues pour la justice climatique. Mais la voix des citoyens ne
sera pas étouffée. Nous sommes déterminés à faire en sorte que
celles et ceux qui réclament la justice climatique soient entendus
de façon claire et forte.
Le nouvel accord politique qui sera adopté à Paris sera sûrement
insuffisant pour stabiliser le climat. Il pourrait conduire à plus de
À Paris et partout dans le monde, nous sommes debouts et solidaires, nous réclamons la justice climatique et nous n’abandonnerons pas tant que que nous n’aurons pas gagné !
Jagoda Munic
Présidente des
Amis de la Terre International
Téléchargement