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Le monde après la Seconde guerre mondiale
Alain Sidot et le groupe « La Durance »
Le 28 octobre 2004
Professeur au Lycée Alphonse Benoit
L’ISLE-SUR-LA-SORGUE
Le 8 mai 1945, la guerre en Europe est terminée, et les populations laissent exploser leur
joie ; les Américains cependant attendent la fin de leur engagement face au Japon ; en
URSS, les cérémonies restent officielles. Quant aux Français, dont le territoire est pourtant
libéré depuis plusieurs mois, ils sont plus réservés s'attendant à des lendemains difficiles : en
effet, presque partout les traces de la guerre sont profondes et durables et il faut aussi
songer à rétablir la paix et reconstruire un monde sans guerre.
I) UN BILAN TRES LOURD
A) Le bilan démographique
Il est effrayant ; aux morts directes, civiles et militaires, il faut ajouter les pertes indirectes
dues à la surmortalité et à la diminution de la natalité. Le nombre des victimes tourne autour de
50 millions. Les pertes civiles sont considérables, en raison des déportations massives ou des
représailles opérées par les puissances occupantes. Elles s'expliquent aussi par l'importance des
bombardements : Coventry est en 1941 une ville en ruines, Londres est très touchée,
Stalingrad est détruite, Leningrad exsangue. Hambourg, Dresde, Le Havre sont presque
entièrement détruites tandis qu'Hiroshima et Nagasaki sont rasées. Les guerres civiles induites
par la lutte contre l'occupant aggravent encore le bilan, comme en Grèce ou en Yougoslavie.
À tous ces morts, il faut ajouter les 35 millions d'invalides définitifs. Des pertes indirectes
s'ajoutent en raison des pénuries de médicaments, de chauffage, et de nourriture. L'espérance
de vie recule.
Enfin, des millions d'hommes, de femmes et d'enfants partent de chez eux chassés par la
guerre, puis par la paix ! Les Polonais, Belges, Français, Chinois ont fui devant l'avancée de
l'ennemi ; les Finnois de Carélie, des Alsaciens, des Roumains de Bessarabie sont expulsés. Des
populations ont été déportées comme les Tatars de Crimée, les descendants des Allemands de
la Volga, les descendants des émigrants japonais aux EUA. À la fin de la guerre, commence la
fuite devant l'avancée de l'Armée Rouge ; la stabilisation des frontières exige le déplacement
des Sudètes et des autres populations allemandes d'Europe centrale. Bien sûr, les déportations
ont concerné toutes les victimes du racisme ou du STO.
B) Le bilan économique et financier
La guerre a entraîné de profonds bouleversements pour trois raisons.
-La guerre coûte cher ; il faut équiper les soldats, les entretenir ; la production pour les civils
diminue d'autant.
-Il faut financer ces dépenses, par l'impôt sur le revenu, par l'impôt sur les profits de guerre,
par l'appel à l'épargne, ce qui augmente la dette publique.
-Tout cela étant insuffisant, l'État émet de la monnaie, ou pille les pays occupés, ce qui crée de
l'inflation ; les prix augmentent. Les destructions sont estimées à 2000 milliards de $.
En Amérique latine, des pays comme le Chili, l'Argentine, le Brésil ont profité du conflit pour
développer leur agriculture, leur industrie. De nouvelles régions industrielles ont vu le jour, en
URSS, mais ce sont surtout les EUA et le Canada qui ont tiré le maximum de profit du conflit ; à
la fin de la guerre, outre la création de produits nouveaux (pénicilline, nylon, DDT) les EUA
jouissent des 2/3 du stock d'or mondial et réalisent la moitié de la production industrielle du
monde.
C) Le bilan moral
La révélation au grand jour des camps d'extermination et des horreurs perpétrées pendant la
guerre bouleverse l'opinion mondiale. C'est à la conférence de Potsdam (17 juillet - 2 août
1945), que les trois grands décident de dénazifier l'Allemagne et de traduire les principaux
responsables nazis devant le tribunal de Nuremberg.
Devant les représentants des quatre puissances alliées, un procès est intenté à 24 dirigeants
politiques, militaires et économiques du Troisième Reich. Trois chefs d'inculpation sont retenus :
crimes contre la paix, crimes de guerre, crimes contre l'humanité.
Les débats durent de novembre 1945 à octobre 1946 et se terminent par 11 condamnations à
mort, 3 prisons à vie, 2 à 20 ans, 1 à 15 ans, 3 acquittements.
Au Japon, seuls 25 responsables politiques passent en procès avec sept condamnations à mort.
Une épuration touchera 200 000 personnes, mais l'empereur ne sera jamais inquiété ;
cependant, beaucoup de criminels de guerre échappent à toute condamnation.
L'important est que les procès ont permis d'affirmer l'existence d'une morale des Droits de
l'Homme ; mais ces procès posent aussi le problème de la justice internationale : les victimes,
pas toujours innocentes elles mêmes, jugent les coupables.
II) UNE PAIX DIFFICILE À ÉTABLIR
A) La conférence de Potsdam
En juillet 1945, c'est l'ultime rencontre entre les trois grands ; les conditions ne sont déjà plus
les mêmes : l'Allemagne a capitulé, pas le Japon ; il faut organiser la paix, alors que Staline se
montre peu empressé à respecter ses engagements de Yalta (février 45), que les dirigeants
occidentaux ont changé, que les Russes occupent les Balkans et l'Europe orientale tandis que
les EUA annoncent qu'ils détiennent l'arme atomique.
L'Allemagne doit rester un état unique soumis à quatre zones d'occupation. Les trois se mettent
d'accord sur les transferts de populations depuis la Pologne, sur le principe de réparations et la
dénazification.
Les Anglo-américains ne reconnaissent pas la ligne Oder-Neisse imposée par les Russes, alors
que l'accord se fait sur les partitions en quatre de l'Autriche et en deux de la Corée. Mais la
méfiance règne désormais ; les Occidentaux craignent l'extension du communisme, avec raison
puisque Staline impose un gouvernement de son choix en Roumanie et en Pologne, tandis que
l'influence déjà forte des partis communistes en France, Italie et Tchécoslovaquie s'accroît.
B) Les traités de paix en Europe
Une conférence de la paix se réunit à Paris en 1946. 21 états sont présents, mais les débats
sont orchestrés par les quatre Grands. Les traités ne seront signés que plus tard en 1947 pour
l'Europe centrale et 1955 pour l'Autriche.
Les nouvelles frontières qui apparaissent ne correspondent pas aux décisions de Yalta ou
Potsdam, mais à la situation de 1946. L'URSS est la grande bénéficiaire puisqu'elle conserve
toutes les annexions opérées depuis 1941 plus Königsberg pris à la Prusse et la Ruthénie prise à
la Tchécoslovaquie. La Pologne a compensé ses pertes orientales par une avancée vers l'Ouest
et une large ouverture maritime ; d'autres modifications ont lieu ainsi que le versement de
réparations somme toute modérées afin d'éviter les erreurs de 1919.
Toutefois, le sort de l'Allemagne n'est pas réglé ; en 1946, les Russes poursuivent le
démantèlement de leur zone tandis que les Occidentaux cessent leurs prélèvements afin
d'éviter une révolution sociale.
C) La paix dans le reste du monde
Le Japon perd toutes ses dépendances et la Corée est coupée en deux sur le 38e parallèle ; le
traité de paix ne sera signé avec le Japon qu'en septembre 1951 ; en attendant, les forces
américaines l'occupent : Mac Arthur impose le régime démocratique, le retour de la
Mandchourie à la Chine et l'occupation de la zone sud de la Corée. L'URSS obtient le sud de
Sakhaline et les îles Kouriles, alors que les Américains s'approprient Mariannes, Carolines et
Marshall.
Les puissances coloniales européennes espèrent recouvrer leurs possessions, mais les
nationalistes proclament leurs indépendances.
La situation au Moyen-Orient reste très compliquée, et la création de l'Etat d'Israël ne simplifie
pas les choses.
III) RECONSTRUIRE UN MONDE NOUVEAU
La seconde GM apparaît comme un échec de la SDN, mais aussi comme une conséquence de la
crise de 1929 ; deux problèmes auxquels s'attellent les vainqueurs.
A) Bretton Woods : 22 juillet 1944
La célèbre conférence se tient afin de réorganiser le monde : le Gold Exchange Standard est
rétabli. Les paiements extérieurs sont faits en or qui garantit également la valeur des devises ;
en 1944, une seule monnaie est convertible, le $. En fait donc, les transactions internationales
se font en $. Les parités de change sont fixes et établies par rapport à l'or…ou au $. Chaque
pays s'engage à maintenir la valeur de sa monnaie dans une fourchette de +/- 1 % par rapport
à la parité officielle. Le Fonds Monétaire International créé doit servir à la mise en place du
système ; ses fonds proviennent des cotisations de chaque membre évaluées en fonction de sa
puissance économique. Le FMI peut accorder des crédits en cas de difficultés passagères. La
Banque Internationale pour la Reconstruction et le Développement complète le dispositif.
B) San Francisco : l'ONU
Sans moyens militaires, la SDN s'était montrée incapable de résoudre les crises des années 30.
Dès janvier 1941, Roosevelt proclame le droit aux libertés de pensée, de croyance et de parole
et à la libération de la misère et de la peur. En août est signée avec Churchill, la Charte de
l'Atlantique qui reprend ces principes auxquels sont ajoutés les droits des peuples à disposer
d'eux-mêmes et ceux de la liberté des mers et du commerce. Le projet se complète le 1/1/42
par la déclaration des Nations Unies qui propose d'établir un système de paix et de sécurité
après la victoire. Ce projet est confirmé et précisé aux grandes conférences interalliées de
Moscou, Téhéran et Yalta l'on décide que les cinq membres permanents de Conseil de
Sécurité prendront leurs décisions à l'unanimité. C'est en juin 1945, à la conférence de San
Francisco que naît l'ONU.
La charte proclame la volonté d'assurer la paix et de protéger les droits de l'Homme ; si le
désarmement est un objectif prioritaire, l'ONU se dote cependant de forces armées pour les
règlements internationaux, s'interdisant toute ingérence dans les affaires intérieures des États.
En 1948, la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme est adoptée ; huit abstentions dont
l'URSS, l'Afrique du Sud et l'Arabie Saoudite.
C) L'organisation de l'ONU
L'ONU se compose de trois organes principaux et d'une foule d'institutions spécialisées.
-L'Assemblée Générale comprend tous les membres qui y disposent d'une voix ; sa compétence
est sans limites. Elle élit le Secrétaire Général, les membres des différents conseils, de la Cour
Internationale de Justice et vote le budget.
-Le Conseil de Sécurité est composé de 5 membres permanents et de 10 membres élus pour
deux ans renouvelables par moitié chaque année. Il exerce la responsabilité principale du
maintien de la paix et de la sécurité ; Conseil Économique et Social (54 membres) se préoccupe
de toutes les questions de coopération et de l'aide aux pays en voie de développement ; la Cour
Internationale de Justice siège à La Haye, composée de 15 membres élus pour 9 ans : elle
tranche les conflits juridiques entre les États.
-Le Secrétariat Général, formé de 5000 fonctionnaires assure la permanence administrative ; le
Secrétaire est élu pour 5 ans renouvelables.
-Les nombreuses institutions spécialisées, réparties dans le monde entier réussissent avec plus
ou moins de bonheur dans leurs missions ; le bilan est pratiquement nul dans le domaine
économique, excellent dans les domaines techniques (météo, postes, aviation civile),
encourageant dans les domaines culturels (UNESCO) ou de la santé (OMS).
En réalité, bien avant la fin de la guerre, l'opposition entre Staline et ses Alliés s'est
fortement renforcée. Les menaces d'une troisième guerre mondiale deviennent de plus en
plus fortes et les habitants du monde occidental font peu confiance à l'ONU pour échapper à
la guerre.
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