UNIVERSITE DE NANTES FACULTE DE MEDECINE MASTER I SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES UNITE D’ENSEIGNEMENT OPTIONNEL MEMOIRE REALISE dans le cadre du CERTIFICAT d’ANATOMIE, d’IMAGERIE et de MORPHOGENESE 2009-2010 UNIVERSITE DE NANTES Les glandes sublinguales Par LEMASSON François LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES Président du jury : Pr. R. ROBERT Vice-Président : Pr. J.M. ROGEZ Enseignants : Laboratoire : Pr. O. ARMSTRONG Pr. O. BARON Pr. G. BERRUT Pr. C. BEAUVILLAIN Pr. D. CROCHET Dr. H. DESAL Pr. B. DUPAS Dr. E. FRAMPAS Dr. A. HAMEL Dr. O. HAMEL Pr. Y. HELOURY Pr. A. KERSAINT-GILLY Pr. J. LE BORGNE Dr. M.D. LECLAIR Pr. P.A. LEHUR Pr. O. RODAT S. LAGIER et Y. BLIN – Collaboration Technique 1 UNIVERSITE DE NANTES FACULTE DE MEDECINE MASTER I SCIENCES BIOLOGIQUES ET MEDICALES UNITE D’ENSEIGNEMENT OPTIONNEL MEMOIRE REALISE dans le cadre du CERTIFICAT d’ANATOMIE, d’IMAGERIE et de MORPHOGENESE 2009-2010 UNIVERSITE DE NANTES Les glandes sublinguales Par LEMASSON François LABORATOIRE D’ANATOMIE DE LA FACULTE DE MEDECINE DE NANTES Président du jury : Pr. R. ROBERT Vice-Président : Pr. J.M. ROGEZ Enseignants : Laboratoire : Pr. O. ARMSTRONG Pr. O. BARON Pr. G. BERRUT Pr. C. BEAUVILLAIN Pr. D. CROCHET Dr. H. DESAL Pr. B. DUPAS Dr E. FRAMPAS Dr A. HAMEL Dr O. HAMEL Pr. Y. HELOURY Pr A. KERSAINT-GILLY Pr. J. LE BORGNE Dr M.D. LECLAIR Pr. P.A. LEHUR Pr. O. RODAT S. LAGIER et Y. BLIN - Collaboration Technique 2 Remerciements Je remercie Monsieur le Docteur O. HAMEL pour avoir accepté d’encadrer mon étude et pour m’avoir délivré ses précieux conseils. Je tiens également à remercier l’ensemble des Professeurs d’anatomie pour la qualité de leurs enseignements. Je remercie aussi Messieurs Y. BLIN et S. LAGIER, pour avoir su me guider et me conseiller sur l’étude de l’anatomie, pour leur gentillesse et leur bonne humeur. 3 Table des matières I. Introduction…………………………………………………………..5 II. Rappels………………………………………………………………..6 a. Embryologie b. Histologie c. Physiologie d. Anatomie III. Etudes Anatomiques et radiologiques des glandes sublinguales…15 a. Matériels et méthodes b. Résultats IV. Discussions……………………………………………………………33 a. Explorations radiologiques des glandes sublinguales et intérêts dans le diagnostic des lithiases b. Voie d’abord chirurgicale dans la biopsie de glande sublinguale V. Conclusion……………………………………………………………35 VI. Références bibliographiques………………………………………...36 4 I. Introduction La salivation est une fonction physiologique quasiment indispensable pour la cavité buccale. La salive permet en effet de faciliter l’élocution, la mastication, la déglutition et la régulation de l’acidité du milieu buccal. La salive est excrétée par les glandes salivaires principales (parotides, submandibulaires et sublinguales) et les glandes salivaires accessoires (palatines, linguales, labiales…). Les pathologies des glandes salivaires sont nombreuses. Elles peuvent perturber ou stopper le débit salivaire. Les pathologies des glandes salivaires et de leurs canaux excréteurs peuvent être liées à une infection, une polymédication, un obstacle mécanique ou à un syndrome général. C’est pourquoi le praticien peut être amené à explorer la fonction salivaire. Cette exploration est clinique et radiologique (Bourgeois et al., 2006). Ce travail propose d’étudier l’anatomie des glandes sublinguales sur des pièces anatomiques et chez des sujets vivants. L’étude est anatomique et radiologique. Elle doit permettre de comprendre l’intérêt d’une parfaite connaissance anatomique de la région sublinguale, lors d’une exploration radiologique par clichés occlusaux ou d’une exploration paraclinique par biopsie. 5 II. Rappels a. Embryologie i. Développement de la tête et du cou – généralités La formation du système nerveux central, de l’appareil branchial et la différenciation des cellules des crêtes neurales sont à l’origine du développement de la tête et du cou. Le système nerveux et les cellules des crêtes neurales résultent de la différenciation des cellules de l’épiblaste. Le chordo-mésoblaste est le siège d’une différenciation importante, il est limité par la membrane pharygienne primitive en avant et la membrane cloacale en arrière. Ces limites représentent les points de contact entre l’endoderme et l’ectoderme. Ce sont ces limites qui sont à l’origine de la plicature céphalo-caudale de l’embryon. Dans la région antérieure, la plicature entraine l’apparition de bourrelets. Ces bourrelets représentent l’appareil branchial. L’appareil branchial est constitué de 6 arcs branchiaux et sillons. Il permet le développement des structures de la base de la tête et du cou : os, cartilages, muscles, tissus conjonctifs, glandes, organes lymphoïdes, vaisseaux sanguins, nerfs.... Il contribue à la formation de la face. La face se forme de la fin de la 4ème semaine à la fin de la 8ème semaine grâce aux bourgeons faciaux (Larsen, 2003). ii. Individualisation des glandes sublinguales Aux jours 14 et 15, les cellules épiblastiques voisinent de la ligne primitive migrent grâce à leurs prolongements (pseudopodes) à travers la ligne primitive dans l’espace entre l’épiblaste et l’hypoblaste. Ce processus d’invagination et de pénétration s’appelle la gastrulation. Les cellules épiblastiques qui s’invaginent remplacent l’hypoblaste pour former l’endoderme définitif. L’endoderme définitif est à l’origine du futur intestin et de ses dérivés (Larsen, 2003). 6 Figure n°1 : Jours 14-15, invagination des cellules de l’épiblaste vers l’hypoblaste. Remplacement de l’hypoblaste par l’endoderme définitif (d’après Larsen, 2003). Les glandes salivaires proviennent de l’endoderme et de l’exoderme. Les glandes sublinguales s’individualisent à partir d’une invagination de l’endoderme des sillons paralinguaux (Larsen, 2003). Elles se développent à partir de la 8ème semaine de vie intrautérine. Les cellules muqueuses des glandes sublinguales sont déjà fonctionnelles avant la naissance (Vidailhet et al., 2008). b. Histologie Les glandes salivaires principales (parotides, submandibulaires et sublinguales) sont extrinsèques. Elles forment des organes à part entière et sécrètent la salive de façon discontinue. Les glandes salivaires accessoires sont intrinsèques, non encapsulées et sécrètent la salive de façon continue. (Vaillant et al., 1997). Les glandes salivaires sont des glandes exocrines, elles sont composées d’une unité sécrétoire et d’une unité excrétoire. 7 Les acini constituent la partie sécrétoire des glandes salivaires. Ils peuvent être séreux, muqueux ou mixtes (avec prédominance séreuse ou muqueuse) en fonction de la nature de la salive sécrétée. Ils sont composés de cellules cylindriques muqueuses (pyramidales, avec un cytoplasme large triangulaire à base dirigée vers le bas) ou séreuses (plus petites avec un noyau rond en position basale). Ils sont également constitués de cellules myoépithéliales qui entourent les acini et les canaux excréteurs (l’histologie est semblable à des fibres musculaires) (Vaillant et al., 1997). Les canaux excréteurs sont composés de voies intralobulaires en relation avec les acini. Les voies interlobulaires collectent la salive des différents canaux intralobulaires pour déboucher dans la cavité buccale (Vaillant et al., 1997). Les glandes salivaires sont séreuses ou muqueuses. Les parotides sont séreuses, les submandibulaires sont séro-muqueuses, les sublinguales et les glandes salivaires accessoires sont à prédominance muqueuses (Vaillant et al., 1997). 1. Acinus séreux ; 2. Acinus muqueux ; 3. Canal intercalaire ; 4. Canal stié ; 5. Cellules myoépithéliale ; 6. Croissant séreux Figure n°2 : Structure d’une glande séro-muqueuse (mixte) (d’après Vidailhet et al., 2008). 8 1. Sécrétion muqueuse prédominante 2. Croissants de Gianuzzi séreux 3. Canaux excréteurs, segments intercalaires 4. Canaux de Pflüger 5. Canaux excréteurs plus larges localisés dans les cloisons conjonctives Figure n°3 : Coupe histologique d’une glande sublinguale (d’après Leloup, 2007). c. Physiologie de la salivation La salive est composée d'environ 99,5% d'eau et 0,5% de protéines, d'électrolytes, de divers bactéricides et composants antimicrobiens. Il y a deux types de secrétions : - une sécrétion séreuse : elle contient des substances bactéricides (thiocyanate), des enzymes protéolytiques (lysozymes), des anticorps (IgA) et des enzymes agissant sur l’amidon (amylases) ; - une sécrétion muqueuse : elle contient l’eau et la mucine. Elle permet la lubrification et l’hydratation des muqueuses, la phonation, la déglutition, la mastication et la perception du goût. (Holmes, 1998) 9 La salive a plusieurs rôles : - un rôle digestif : elle permet la préparation du bolus alimentaire. Elle débute aussi la digestion avec l’amylase ; - un rôle antibactérien et anticariogène ; - un rôle mécanique pour l’élocution. (Vaillant et al., 1997) La sécrétion salivaire est gérée par le système nerveux sympathique et parasympathique. Il existe une sécrétion salivaire de repos (essentiellement médiée par les glandes submandibulaires), une sécrétion salivaire psychique (liée à la vue des aliments, réflexe de Pavlov) et une sécrétion salivaire réflexe (déclenchée par la présence d’aliments dans la cavité buccale, leur goût, leur odeur, la mastication et la stimulation de la muqueuse buccale) (Vaillant et al., 1997). Les influx nerveux parasympathiques déclenchent la sécrétion d’une salive muqueuse. Les influx nerveux sympathiques déclenchent la sécrétion d’une salive séreuse. Le stress, l’exercice musculaire, l’activité physique, la déglutition et les sensations tactiles ou nociceptives peuvent inhiber la sécrétion salivaire ; et à l’inverse, l’acide citrique peut provoquer la salivation (Vaillant et al., 1997). d. Anatomie des glandes sublinguales Les glandes sublinguales sont paires et symétriques. Elles sont composées d’une agglomération de glandules. Elles possèdent autant de canaux excréteurs qu’elles ont de glandules. Les canaux excréteurs principaux sont les canaux de Rivinius et parfois les canaux de Walther. Ils longent les canaux de Wharton (canaux excréteurs des glandes submandibulaires) et s’abouchent au niveau du plancher buccale en avant et en dehors des caroncules salivaires (Vaillant et al., 1997). 10 1. Canal de Sténon 2. Glande parotidienne 3. Glande submandibulaire 4. Canal de Wharton 5. Glande sublinguale 6. Glandes salivaires accessoires 7. Muscle buccinateur 8. Muscle masséter 9. Auricule de l’oreille 10. Mandibule 11. Glandes salivaires accessoires 12. Canal sublingual postérieur 13. Canal sublingual 14. Canal sublingual antérieur 15. Cavité buccale. Figure n°3 : Vue latérale schématique des glandes salivaires et des canaux salivaires du côté gauche (d’après Bourgeois et al., 2006). Les glandes sublinguales sont situées dans le plancher buccal, au-dessous de la muqueuse du sillon alvéolo-linguale. Les glandes sublinguales sont les plus petites des glandes salivaires principales. Elles mesurent environ 3cm de longueur, 15mm de hauteur et 6 à 7mm de largeur. Elles pèsent environ 2 à 3 grammes. Elles sont aplaties transversalement et allongées. Elles sont composées d’une vingtaine de lobules glandulaires (Katz, 2006). 11 Les limites de ces glandes sont : - en avant et en externe : les fossettes sublinguales de la mandibule ; - en bas : les muscles mylohyoïdiens ; - en interne : les muscles génioglosses ; - en haut : le plancher de la bouche (Vaillant et al., 1997). 1. Glande parotide 2. Veine intra-parotidienne 3. Artère faciale 4. Glande submandibulaire 5. Muscle masséter 6. Muscle mylohyoïdien 7. Pédicule vasculaire facial pour les glandes submandibulaire et sublinguale 8. Pédicule lingual 9. Canal de Wharton 10. Nerf lingual 11. Canal styloglosse 12. Muscle stylohyoïdien 13. Ventre postérieur du digastrique 14. Artère carotidienne 15. Veine jugulaire interne 16. Muscle sterno-cléido-mastoïdien 17. Diaphragme stylien 18. Glande sublinguale 19. Artère carotide interne 20. Rameau mentonnier du nerf facial 21. Artère faciale. A. Loge parotidienne B. espace carotidien C. espace submandibulaire D. Espace sublingual E. Espace prévertébral F. Espace muqueux pharyngé et rétro pharyngé. Figure n°4 : Coupe Axiale des régions sublinguale, submandibulaire et parotidienne (d’après Bourgeois et al., 2006). 12 Figure n°5 : Vue postéro-supérieure du plancher de la bouche (d’après Netter, 2007). La vascularisation de la glande sublinguale est assurée par les branches de la carotide externe. Les artères sublinguale (branche de l’artère linguale) et sous mentale (branche de l’artère faciale) vascularisent la glande sublinguale. Le retour veineux est assuré par les veines faciales puis les veines jugulaires internes (Vidailhet et al., 2008). Figure n°6 : Vue latérale de la langue et du plancher buccal, innervation et vascularisation veineuse et artérielle (d’après Netter, 2007). 13 L’innervation des glandes sublinguales est assurée par le système ortho-sympathique et le système para-sympathique. Les ganglions sublinguaux via les nerfs linguaux issus des cordes du tympan (noyaux salivaires supérieurs des VII bis) assurent l’innervation parasympathique des glandes sublinguales. Les ganglions cervicaux supérieurs issus des tracti intermédiolatéralis (D1 - D2) assurent l’innervation orthosympathique des glandes sublinguales. Figure n°7 : Représentation schématique de l’innervation des glandes salivaires principales (d’après Vidailhet et al., 2008). 14 III. Etudes Anatomiques et radiologiques de la glande sublinguale a. Matériels et méthodes i. Matériels 1. Sujets vivants - Femme, 24 ans - Femme, 23 ans - Homme, 22 ans - Homme, 23 ans 2. Pièces anatomiques - Sujet féminin âgée de 68 ans et 8 mois formolé - Sujet féminin âgée de 88 ans et 10 mois formolé 3. Instruments a. Instrumentations pour dissections - Manche de bistouri n°4 et lame n°23 ; - Manche de bistouri n°3 et lame n°15 ; - Ciseaux à disséquer droits ; - Ciseaux à disséquer courbes ; - Pinces à disséquer standard, pinces à disséquer très fines ; - Pinces à clamper ; - Une scie à main. b. Instrumentations pour études sur sujets vivants - Miroir intra-buccal rectangulaire ; - Lumière artificielle : scialytique dentaire ; - Générateur de rayons X avec long cône ; - Films argentiques occlusaux Kodak®. 15 c. Appareils photographiques - Appareil photo utilisé lors des dissections : Nikon® ; - Appareil photo utilisé lors des études sur individus vivants : Nikon D60® zoom optique autofocus 18-55mm. ii. Méthodes 1. Dissections a. Objectifs des dissections Les différents travaux anatomiques réalisés doivent permettre de mieux appréhender l’abord chirurgical des glandes sublinguales au cours d’une biopsie. Le but est d’explorer les différentes relations anatomiques des loges sublinguales avec les structures avoisinantes : corps de la de la mandibule ; muscles mylohyoïdiens, génioglosses ; et la muqueuse du plancher buccale. Par ailleurs, ce travail doit permettre de mieux appréhender le contenu des loges sublinguales et du plancher buccal : nerf lingual et ganglion submandibulaire ; canaux excréteurs des glandes submandibulaires et sublinguales ; artères et veines sublinguales. 16 b. Choix de la voie d’abord et description des dissections La première dissection a été réalisée sur une pièce anatomique (tronc+tête) formolée. L’étude a été faite grâce à un abord latéral. La première incision a été réalisée le long de la branche horizontale de la mandibule. La seconde incision démarre au niveau de la ligne médiane de la lèvre inférieure vers la partie craniale du manubrium sternal. La troisième incision démarre de la partie craniale du manubrium sternal et longe la clavicule. Cet abord à permis de mettre en évidence les structures anatomiques importantes de la partie latérale du cou et de la mandibule (les muscles sterno-cléido-mastoïdien, digastrique et mylohyoïdien ; les glandes parotide et submandibulaire ; et l’artère faciale). Ensuite le travail s’est poursuivi par l’éxérèse de l’hémimandibule droite. Cela a permis d’étudier le plancher buccal et notamment la loge sublinguale (son contenu et ses relations anatomiques). Figure n°8 : Tracé des trois incisions réalisées pour la première dissection (Schéma modifié d’après Netter, 2007). 17 Ventral Caudal Ventre antérieur du digastrique Branche horizontale de la mandibule Artère faciale Glande submandibulaire Glande parotide Muscle sternocléidomastoïdien Figure n°9 : Voie d’abord latérale. 18 La deuxième dissection a été réalisée sur une hémi-tête. La tête de la première pièce anatomique formolée a été congelée, puis coupée selon l’axe strictement médian. Ensuite la base de la langue a été extraite. L’étude a porté sur le contenu de la loge sublinguale et ses relations anatomiques. Elle a permis de mettre en évidence de façon précise le canal de Wharton ainsi que le nerf lingual. La troisième dissection a été réalisée après le prélèvement de la tête chez un sujet formolé. La voie d’abord est inférieure. La première incision a été réalisée le long de la branche montante des deux cotés de la mandibule. La seconde incision débute de la pointe du menton et longe l’axe médian du cou. La peau a été réclinée en deux volets latéraux. Ce travail a permis de mettre en évidence les structures anatomiques de la partie médiane et paramédiane du cou. Ensuite il a permis d’accéder aux loges sublinguales par abord inférieur. Figure n°10 : Tracé des deux incisions réalisées pour la troisième dissection (Schéma modifié d’après Netter, 2007). 19 Cranial Branche horizontale de la mandibule Latéral gauche Platysma récliné Ventre antérieur du digastrique Glande submandibulaire Artère faciale Figure n°11 : Voie d’abord inférieure. 2. Photographie et Imagerie chez plusieurs individus vivants a. Photographies intra buccales Le but des photographies sur sujet vivant est de compléter les études sur pièce anatomique et d’apporter une vision clinique. En effet, le contour des glandes sublinguales est nettement visible sur la muqueuse du plancher buccale. Ces photographies doivent donc permettre d’envisager une partie de l’anatomie des glandes sublinguales. L’intérêt de ces clichés est également d’étudier les relations anatomiques des ostiums des glandes submandibulaires et sublinguales par rapport au frein de la langue notamment. Les photographies ont été réalisées chez des sujets vivants grâce à un miroir intra-buccal et un appareil reflex numérique. 20 b. Clichés radiologiques occlusaux Des clichés radiologiques occlusaux ont été réalisés sur des sujets sans pathologie salivaire. Ces clichés doivent permettre d’explorer les loges sublinguales d’un point de vue radiologique (limites osseuses, fossettes sublinguales et apophyses génis de la mandibule). De plus, ces clichés présentent l’aspect sain au niveau radiologique des glandes sublinguales et des canaux excréteurs des glandes submandibulaires et sublinguales. Les clichés ont été réalisés en plaçant un film radio argentique occlusal entre les arcades dentaires mandibulaires et maxillaires. Le cône radio est placé en dessous de la mandibule. L’incidence des rayons est inféro-supérieure. b. Résultats i. Les dissections 1. Les loges sublinguales, contenus et relations anatomiques L’abord par voie inférieure permet d’explorer les relations anatomiques latérales, médiales, dorsales et ventrales des loges sublinguales. Les loges sublinguales sont circonscrites en latéral et ventral par la branche horizontale de la mandibule, et plus particulièrement par les fossettes sublinguales de la mandibule. En médial les loges sublinguales sont limitées par les muscles géniohyoïdiens (en caudale) et les muscles génioglosses. En dorsal, les loges sublinguales sont limitées par les parties ventrales des glandes submandibulaires. 21 Ventral Latéral Corps de la mandibule dépériosté Muscle géniohyoïdien Glande sublinguale Artère sublinguale Nerf hypoglosse XII Glande submandibulaire Os hyoïde Figure n°12 : Vue inférieure des loges sublinguales. 22 Les veines et artères sublinguales sont en relation médiale et caudale avec les glandes sublinguales. En revanche, les nerfs linguaux et les conduits de Wharton sont en relation strictement médiale avec les glandes sublinguales. Cranial Ventral Ganglion sublingual Nerf lingual Conduit submandibulaire de Wharton Artère sublinguale Ramifications terminales du nerf lingual Figure n°13 : Vue latéro-inférieure après résection de la glande sublinguale droite. 23 La pièce anatomique a été congelée puis coupée en deux selon un axe strictement médian. La base de la langue a été extraite de façon à mettre en évidence la loge sublinguale gauche. Les trois principaux éléments anatomiques contenus dans cette région anatomique sont : le nerf lingual issu du V3, le canal de Wharton (canal excréteur de la glande submandibulaire) et la glande sublinguale. Cranial Ventral Muscles de la langue Glande sublinguale Nerf lingual Canal de Wharton Figure n°14 : Coupe sagittale de la tête. Exploration de la loge sublinguale. 24 Après avoir extrait l’hémimandibule droite et récliné les muscles mylohyoïdien et digastrique, nous pouvons étudier les rapports anatomiques des éléments nobles contenus dans le plancher buccal. Le nerf lingual donne le ganglion submandibulaire (innervation orthosympathique de la glande) puis croise le canal de Wharton selon un X allongé et donne le ganglion sublingual (innervation orthosympathique de la glande) avant de se diviser en ramifications terminales. Cranial Ventral Muqueuse du plancher buccal Ganglion submandibulaire Glande sublinguale Nerf lingual Muscle génioglosse Canal de Wharton Symphyse mentonnière Glande submandibulaire Muscle mylohyoïdien Artère sublinguale Figure n°15 : Vue latérale du paquet vasculo-nerveux du plancher buccal. 25 2. Anatomie de la glande sublinguale et des canaux excréteurs Le prélèvement de la glande sublinguale permet de confirmer les valeurs moyennes proposées par katz : - Longueur : 30mm - Hauteur : 15mm - Largeur : environ 7 mm Les glandes sublinguales sont obliques en cranial et en latéral selon le plan coronal. Craniolatéral Ventral Figure n°16 : Glande sublinguale droite. 26 Après avoir extrait l’hémimandibule droite et récliné les muscles mylohyoïdien et digastrique, nous pouvons distinguer la glande sublinguale avec ses canaux excréteurs principaux (Rivinius et Walther) et mineurs. La muqueuse du plancher buccal a été étirée de façon à mettre en évidence ces canaux. Cranial Ventral Muqueuse du plancher buccal Canaux excréteur de la glande sublinguale Glande sublinguale Symphyse mentonnière Figure n°17 : Abord latéral du plancher buccal. Mise en évidence de la glande sublinguale droite et de ses canaux excréteurs. 27 ii. Les photographies et clichés radiologiques sur sujets vivants 1. Le plancher buccal et l’émergence des glandes sublinguales Les photographies réalisées sur sujet vivant permettent une approche très précise de l’anatomie supérieure des glandes sublinguales. En effet, les contours de ces glandes se dessinent sur la muqueuse du plancher buccale. Les glandes sublinguales sont légèrement aplaties en ventral et sont allongées en dorsal. Avant Latéral gauche Figures n°18 et19 : Vue supérieure du plancher buccal. 28 Ci après, les contours approximatifs des glandes sublinguales a été représenté au niveau de la muqueuse du plancher buccal. Avant Latéral gauche Lèvre inférieure Frein de la langue Arcade dentaire mandibulaire Contours approximatifs des glandes sub-linguales Figures n°20 et 21 : Mise en évidence des contours des glandes sublinguales au niveau du plancher buccal. 29 2. Ostiums des canaux excréteurs des glandes sublinguales et submandibulaires Les canaux excréteurs des glandes sublinguales et submandibulaires s’abouchent latéralement par rapport au frein de la langue par les ostiums des canaux de Wharton et les caroncules sublinguales. Avant Latéral gauche Frein de la langue Caroncules sublinguales et ostiums des canaux de Wharton Figures n° 22 et 23 : Caroncules sublinguales et ostiums des canaux de Wharton. 30 3. Imagerie par clichés occlusaux des glandes sublinguales et des canaux excréteurs L’imagerie par clichés occlusaux d’incidence inférieure met en évidence le corps de la mandibule en « fer à cheval ». On y distingue les dents de l’arcade mandibulaire, les apophyses géni inférieures et supérieures (points d’attaches des muscles géniohyoïdien et génioglosse) et les fossettes sublinguales de la mandibule. Le contenu du plancher buccal est radio-clair sauf en cas de calcifications dans les conduits salivaire (cf. chapitre discussions). Arcade mandibulaire Avant Latéral gauche Apophyses géni Faux positif Langue Figures n°24 et 25 : Clichés radiologiques occlusaux sans préparation de l’arcade mandibulaire et du plancher buccal. 31 Ci après, dessin approximatif des contours des glandes sublinguales. Figure n°26 et 27 : Clichés radiologiques occlusaux sans préparation de l’arcade mandibulaire et du plancher buccal. 32 IV. Discussions a. Explorations radiologiques des glandes sublinguales et intérêts dans le diagnostic des lithiases A B A : Calcifications dans le canal submandibulaire. B : Lithiases fragmentées dans le canal submandibulaire. Figures n°28 et 29 : Radiographie sans préparation (d’après Katz, 2006 ; MarsotDupuch, 2003). La sialolithiase est une calcification qui se forme dans le conduit salivaire excréteur. Elle obstrue le canal et empêche l’excrétion normale de la salive. La lithiase salivaire représente l’une des pathologies salivaires les plus fréquentes après la parotidite ourlienne. Elle concerne les glandes submandibulaires dans la majorité des cas (90%). Le tableau clinique de la lithiase salivaire sublinguale est proche de celui de la sialodochite du canal de Wharton, avec une tuméfaction du plancher buccal plus externe. La lithiase salivaire des glandes sublinguales est objectivée par un cliché radiologique occlusal qui montre une calcification en dehors du trajet du canal de Wharton (voir figure ci-dessus, la lithiase sublinguale a le même aspect radiologique, mais la localisation est différente). Cette lithiase s’abcède et se fistulise, ce qui conduit en général à la guérison (Bourgeois et al., 2006). 33 b. Voie d’abord chirurgicale dans la biopsie de glande sublinguale La biopsie de glande salivaire est un examen systématique pour le diagnostic d’une sarcoïdose, d’une maladie auto-immune ou d’une réaction du greffon contre l’hôte et plus rarement dans la recherche étiologique d’un syndrome sec (Adam et al., 1992). La biopsie de glande salivaire est essentiellement réalisée à partir des glandes sublinguales. L’abord chirurgical est le plus facile et la quantité de matériel glandulaire disponible permet une bonne exploitation du prélèvement (à la différence des glandes salivaires accessoires). La facilité de prélèvement au niveau des glandes sublinguales, ne doit pas pour autant faire perdre de vue la présence d’éléments anatomiques nobles contenus dans les loges sublinguales : nerfs linguaux, canaux de Wharton, artères et veines sublinguales. C’est pourquoi il convient de respecter un protocole de dissection anatomique précis pour le prélèvement de cette glande. La technique de prélèvement débute par une anesthésie locale en avant et en dehors du canal de Wharton. L’incision muqueuse débute 1 cm en avant et en dehors de l’ostium du Wharton et s’étend sur 1 cm en direction antéro-postérieure. La dissection se fait avec des ciseaux mousse, la glande fait alors hernie dans la plaie opératoire. Le prélèvement est réalisé avec une pince à disséquer et des ciseaux. Il doit avoir un diamètre d’environ 5 mm pour être exploitable. Une légère hémorragie peut se produire à cause d’une lésion d’une veine linguale profonde (ranine). Il est recommandé de ne pas suturer la plaie de façon à ne pas voir apparaitre de kyste mucoïde par la suite, sinon un simple point avec du fil résorbable peut être effectué (Adam et al., 1992). La biopsie des glandes sublinguales est recommandée en absence de syndrome sec pour diagnostiquer certaines pathologies : sarcoïdose, polyarthrite rhumatoïde, amylose ou réaction du greffon contre l’hôte. Dans ces derniers cas, la pathologie peut être confirmée par modifications histologiques des glandes salivaires. La biopsie peut également être recommandée en présence d’un syndrome sec, elle peut permettre de poser l’étiologie dans de rares cas et ainsi objectiver un Gougerot-Sjögren seul ou associé à une pathologie autoimmune (polyarthite rhumatoïde, sarcoïdose, lupus…) (Adam et al., 1992). 34 Figure n°30 : Tracé de l’incision muqueuse pour la biopsie de glande sublinguale (d’après recommandations Adam et al., 1992). V. Conclusion Les glandes sublinguales sont contenues dans les loges du même nom. Elles se trouvent à un carrefour anatomique stratégique ou se rejoignent plusieurs éléments nobles tels que les canaux de Wharton, les nerfs linguaux, les artères et veines sublinguales. Les glandes sublinguales participent avec les glandes parotides, submandibulaires et accessoires à la salivation. Elles sont donc nécessaires à de nombreuses fonctions buccales. Lorsque leur fonctionnement est compromis, les effets buccaux se font très vite ressentir, par une xérostomie, des douleurs, une tuméfaction… L’une des principales pathologies de ces glandes salivaires et de leurs canaux excréteurs est la sialolithiase sublinguale. La connaissance anatomique de cette région est donc indispensable pour diagnostiquer cliniquement et objectiver radiologiquement cette pathologie. Les glandes sublinguales sont très faciles d’accès du fait de leur rapport intime avec la muqueuse du plancher buccal. C’est pourquoi, lorsque l’on souhaite confirmer le diagnostic d’une pathologie générale à répercussion salivaire ou lorsque l’on veut connaitre l’étiologie d’un syndrome sec, nous pouvons pratiquer une biopsie de ces glandes. La quantité de matériel glandulaire permet une meilleure exploitation du prélèvement qu’avec une biopsie de glande salivaire accessoire. La facilité d’accès pour la biopsie ne doit pas pour autant faire perdre de vue que ces glandes sont en étroite relation anatomique avec les nerfs linguaux ou les canaux de Wharton. Il est donc impératif de respecter un protocole d’accès minimisant le risque de lésion de ces deux éléments. 35 VI. Références bibliographiques 1- ADAM P, HAROUN A, BILLET J et al. Biopsie des glandes salivaires. Intérêt et technique de la biopsie de la glande sublinguale sur son versant antéro-latéral. Rev stomatol chir maxillofac 1992;93(5):337-340. 2- BOURGEOIS B, MASSEAU A, HAMIDOU M et al. Pathologie salivaire médicale. Encycl. Med. Chir. (Paris), Otho-Rhino-Laryngologie, 20-628-A-10, 2006, 14. 3- HOLMES S. Xerostomia: aetiology and management in cancer patients. Support Care Cancer 1998;6(4):348–355. 4- KATZ P. Imagerie normale des glandes salivaires. Encycl. Med. Chir. (Paris), Radiodiagnostic coeur poumon, 32-800-A-20, 2006, 14. 5- LARSEN W.J. Embryologie humaine. 3ème éd. Bruxelles : De Boeck Université, 2003. 6- LELOUP R. Atlas d'Histologie humaine et animale. 2007. http://webapps.fundp.ac.be/umdb/histohuma/index.htm 7- MARSOT-DUPUCH K, KATZ P, MAULAT I et Al. Imagerie des glandes salivaires. Encycl. Med. Chir. (Paris), Radiodiagnostic appareil digestif, 32-020-A-10, 2003, 24. 8- NETTER FH. Atlas d’anatomie humaine. 4ème éd. Paris : Masson, 2007. 36 9- VAILLANT L, GOGA D et al. Dermatologie buccale. Paris : Doin éditeurs, 1997. 10- VIDAILHET B, ROBIN O, POLO A. et al. Salivation. Encycl. Med. Chir. (Paris), médecine buccale, 28-150-M-10, 2008, 8. 37