Le 23 avril 2015.
Aujourd’hui va être une journée qui sera difficile émotionnellement parlant.
Nous nous rendrons sur des lieux imprégnés de mémoire, de douleurs et de
morts.
Alors nous rappelons que votre comportement devra être exemplaire.
Visite du camp de concentration
d’Oranienburg- Sachsenhausen.
Un rappel historique général nécessaire.
I. Camps de concentration et camps d'extermination
Même si la mortalité dans les camps de concentration de l'Allemagne nazie a été élevée, il convient
d'emblée de bien distinguer les termes de camps de concentration et de camps d'extermination.
Le terme de camp de concentration ( Konzentrationslager KZ) n'a pas été inventé par les nazis. Il a été
utilisé dès le début du XXème siècle par les Britanniques, lors de la guerre des Boers qui les a opposés en
Afrique du Sud aux descendants des colons néerlandais.
Dans l'Allemagne hitlérienne, la fonction des camps de concentration était une fonction d'exclusion et de
terreur. Ces camps étaient destinés à recevoir non seulement les adversaires des nazis, mais aussi tous les
individus considérés comme dangereux pour le régime nazi. Les uns et les autres étaient arrêtés et amenés
dans ces camps pour y être astreints au travail forcé.
Les camps d'extermination eux, ont été construits pour liquider physiquement les Juifs et les Tsiganes, et
autres groupes ciblés par les nazis.
Chronologiquement, l'ouverture des camps de concentration a précédé celle des camps d'extermination
partir de la conférence du Wannsee le 20 janvier 1942).
1. L'ouverture des premiers camps de concentration à partir de 1933
Les premiers camps de concentration ont été ouverts dans l'Allemagne hitlérienne dès l'arrivée au pouvoir
des nazis au début de l'année 1933, pour recevoir : les communistes, les autres opposants politiques,
socialistes et démocrates chrétiens, les Juifs qualifiés de « sous-hommes », mélangés avec les prisonniers
de droit commun condamnés par les tribunaux allemands, et les « asociaux », les « parasites », termes
utilisés par les nazis pour désigner pêle-mêle les Tsiganes, les malades mentaux, les homosexuels et les
témoins de Jéhovah.
Le premier camp a été ouvert à Dachau, près de Munich, le 21 mars 1933.
Des camps ont été aussi implantés dans les pays annexés ou occupés par l'Allemagne nazie, à Mauthausen
en Autriche en 1938, à Theresienstadt en Tchécoslovaquie en 1939, à Auschwitz en Pologne en 1940, au
Struthof-Natzweiler en 1941, seul camp implanté en territoire français annexé, en Alsace.
2. Le développement du système concentrationnaire dans les territoires annexés ou occupés par les
nazis
Deux catégories de déportés ont été acheminées vers ces camps :
- d'une part, les «portés résistants et politiques », termes désignant , s'agissant des déportés français, les
gaullistes, communistes et autres résistants accusés par le gouvernement de Vichy de se livrer à des
activités qualifiées d'« antinationales » ;
- d'autre part, il y avait les « déportés raciaux », c'est-à-dire les Juifs et les Tsiganes.
Pour distinguer ces différentes catégories de déportés, soumis tous au même régime, un triangle de tissu
était cousu sur leur vêtement rayé :
- Triangle rouge pour les « politiques », porté par les opposants au nazisme, puis par tous les résistants
d'Europe ;
- Triangle bleu pour les « apatrides »
- Triangle vert pour les « droits communs »
- Triangle violet pour les témoins de Jéhovah
- Triangle brun pour les Tsiganes
- Triangle noir pour les « asociaux »
- Triangle rose pour les homosexuels
- Triangle jaune pour les Juifs
Les triangles pouvaient être combinés
pour les prisonniers qui cumulaient
plusieurs motifs de détention.
Une étoile jeune et rouge signifiait : un
communiste juif.
Au cours de la guerre, les premiers camps ont été agrandis, d'autres ont été ouverts :
- à Neuengamme, Bergen-Belsen, Dora, Gross-Rosen en Allemagne ;
- à Maïdanek et Stutthof en Pologne.
Des convois affluèrent de toute l'Europe occupée vers ces camps placés sous le contrôle des SS.
Dans ces camps de concentration, les déportés étaient soumis au travail forcé dans les Kommandos, les
usines secrètes d'armement et les filiales des grandes firmes allemandes, installées dans l'enceinte même
des camps ou à proximité des camps : 12 heures de travail par jour ; les appels interminables dès l'aube et
tard dans la nuit par tous les temps ; les sévices infligés par les kapos ; la sous-alimentation ; les maladies
mal soignées.
Les déportés les plus faibles ne résistaient pas longtemps à ce régime.
Les camps de concentration devinrent d'inépuisables réservoirs de main d'œuvre constamment renouvelés,
les déportés étaient utilisés comme des esclaves au service de la machine de guerre nazie.
Beaucoup de déportés sont morts d'épuisement, dans ces « camps de la mort lente ».
3. L'ouverture des camps d'extermination, centres de mise à mort immédiate
En Pologne, à partir de 1941-1942, des camps d'extermination ont été ouverts à Chelmno, à Treblinka, à
Sobibor, à Belzec, ou implantés dans des camps de concentration préexistants tels que Maïdanek et
surtout Auschwitz-Birkenau, dans le cadre de ce que les nazis ont appelé la « solution finale de la
question juive ».
L'objectif des nazis était l'extermination totale, méthodique, systématique, « biologique » des Juifs et des
Tsiganes qualifiés de « sous-hommes », dans des centres de mise à mort immédiate.
La plupart des déportés étaient exterminés le jour même de leur arrivée ou au cours des jours suivants, à
l'issue d'une sélection qui envoyait immédiatement dans les chambres à gaz les enfants, les vieillards, les
femmes, les malades, tandis que les plus valides étaient utilisés quelque temps comme esclaves au travail
forcé, avant d'être liquidés à leur tour.
Le fonctionnement des camps de concentration et des camps d'extermination relevait d'une organisation
rigoureuse et scientifique, faisant appel aux techniques les plus modernes.
« Bundesarchiv Bild 146-1993-051-07, Tafel mit KZ-Kennzeichen
(Winkel) » par Bundesarchiv, Bild 146-1993-051-07 / Inconnu /
CC-BY-SA 3.0. Sous licence CC BY-SA 3.0 de via Wikimedia
Commons -
http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Bundesarchiv_Bild_146-
1993-051-07,_Tafel_mit_KZ-
Kennzeichen_(Winkel).jpg#/media/File:Bundesarchiv_Bild_146-
1993-051-07,_Tafel_mit_KZ-Kennzeichen_(Winkel).jpg
Cette organisation s'appuyait sur une gestion rigoureuse des convois de déportés acheminés vers les
camps dans des trains qui devaient partir à l'heure, et poussait la recherche de l'efficacité jusqu'à
l'exploitation commerciale et industrielle des cadavres.
Après avoir confisqué les vêtements, les chaussures, les effets personnels des déportés dès leur arrivée
dans les camps, les nazis récupéraient, après les avoir exterminés, les dents en or, les lunettes, les dentiers
des déportés, tandis que leurs cheveux étaient tissés pour fabriquer des couvertures, leurs os broyés et
transformés en engrais.
II. Véracité et singularité du génocide
1. Un génocide programmé, aboutissement d'une politique antisémite
Le génocide a bien eu lieu et il n'est pas le fruit du hasard ou des circonstances liées à la 2ème Guerre
Mondiale.
La « solution finale » procédait chez les nazis d'une volonté systématique d'extermination, inscrite dans
l'idéologie nazie, ouvertement exprimée par HITLER dans Mein Kampf ( Mon combat ) dès le milieu des
années 1920, avant qu'il ne parvienne au pouvoir, et qui a été mise en œuvre avec obstination à partir de
1933, conduisant tout droit au génocide.
Dès 1933, des mesures discriminatoires se sont abattues sur les 500 000 Juifs qui vivaient en Allemagne :
- boycott des magasins juifs ;
- interdits professionnels dans l'administration ;
- numerus clausus limitant l'accès des étudiants juifs à l'Université ;
- autodafés d'ouvrages juifs brûlés en place publique.
En 1935, les lois de Nuremberg sur la protection du sang allemand ont interdit :
- les mariages entre Juifs et ressortissants allemands ;
- les relations sexuelles entre Juifs et Allemands en dehors du mariage ;
- le droit pour les Juifs d'employer dans leur ménage des ressortissantes allemandes de moins de 45
ans.
- le droit pour les Juifs de hisser les couleurs nationales du Reich.
En 1938, toute une série d'ordonnances ont renforcé la législation raciste, antisémite du Reich hitlérien :
- 22 avril : « Tout Juif doit évaluer et déclarer la totalité de ses biens ».
- 25 juillet : « Les installations de médecins juifs doivent cesser le 30 septembre 1938 ».
- 18 août : Les Juifs n'ont plus le droit de porter un prénom chrétien et doivent tous s'appeler Israël ou
Sarah.
- Octobre : Les Juifs doivent faire tamponner la mention « J » sur leurs pièces d'identité, et les biens
juifs en Allemagne sont placés sous la tutelle d'administrateurs « aryens » ; c'est l'aryanisation des biens
appartenant aux Juifs.
- 12 novembre : « Le comportement hostile envers le peuple et l'État allemand des Juifs qui ne
reculent pas devant de lâches assassinats exige des moyens de défense énergique et une punition sévère
(...) Une contribution d'un montant de 1 milliard de reichsmark sera imposée à l'ensemble des Juifs de
nationalité allemande au profit de l'État allemand ».
Cette ordonnance allemande fait allusion à l'assassinat, à Paris, du conseiller d'ambassade Von RATH par
un jeune Juif, assassinat qui déclencha en Allemagne un vaste pogrom orchestré par les SA et les SS, dans
la nuit du 9 au 10 novembre 1938. Au cours de cette nuit qualifiée de « Nuit de cristal », des Juifs on été
assassinés, plusieurs milliers arrêtés et internés dans des camps de concentration ; 262 synagogues et
7 000 magasins juifs ont été détruits ou pillés.
- 18 novembre : les Juifs sont exclus de toute activité commerciale.
2. La mise en œuvre systématique du génocide
En janvier 1939, Hitler considérait comme probable « l'extermination de la race juive en Europe » si une
guerre devait intervenir. C’est d’ailleurs une menace qu’il adressait à tous les pays qui n’adhéraient pas à
sa manière de penser.
En septembre 1939, après la défaite et l'occupation de la Pologne, les Juifs polonais ont été rassemblés à
proximité des nœuds ferroviaires et enfermés dans des ghettos où ils furent astreints au travail forcé.
En 1940, après la défaite française, les nazis envisagèrent un moment la possibilité de transférer les Juifs
d'Europe à Madagascar.
En attendant, les préparatifs de la politique d'extermination se poursuivirent en Allemagne, en Autriche,
en Tchécoslovaquie, en Pologne, et dans tous les territoires annexés ou occupés par les nazis :
- recensement des Juifs sur des fichiers tenus à jour
- marquage ( port obligatoire de l'étoile jaune dite de David )
- discrimination et exclusion ( interdits professionnels, interdiction des mariages mixtes )
- spoliation ( confiscations des biens = aryanisation ) ;
- ghettoïsation ( regroupement obligatoire des Juifs dans des quartiers isolés )
- déportation des Juifs ( transports ) dans des camps.
Entre le printemps et l'automne 1941, les chefs nazis ont pris trois décisions importantes pour mettre en
œuvre leur politique d'extermination systématique des Juifs :
- créer des forces mobiles spéciales organisées au sein de groupes d'intervention, les
Einsatzgruppen, chargés de pratiquer des exécutions massives en plein air ;
- étendre le génocide à l'ensemble du continent européen ;
- construire des camps d'extermination équipés de camions à gaz et de chambres à gaz utilisant le
monoxyde de carbone ou le Zyklon B (acide prussique), ainsi que des fours crématoires pour brûler les
cadavres.
En juin 1941, dès le début de l'invasion de l'Union soviétique par les troupes allemandes, les
Einsatzgruppen au fur et à mesure de l'avancée allemande en territoire soviétique ont fusillé sur place en
même temps que les cadres et les membres du parti communiste, tous les Juifs, hommes, femmes, et
enfants
Le 7 décembre 1941, le maréchal KEITEL, chef du Haut-commandement de la Wehrmacht, a signé ce
que l'on a appelé le cret Nacht und Nebel (Nuit et brouillard) : toutes les personnes arrêtées, qui
n'avaient pas été condamnées à mort par les Cours martiales allemandes, seraient déportées en
Allemagne, marquées des lettres NN = Nacht und Nebel, c'est à dire destinées à disparaître dans la nuit et
le brouillard.
Le 20 janvier 1942, les modalités du génocide ont été définitivement arrêtées à la conférence de Wannsee,
réunie près de Berlin sous la présidence de Reinhard HEYDRICH, chef de l'Office central de sécurité du
Reich, secondé par Adolf EICHMANN.
Au printemps 1942, a é lancée l'« opération Reinhard » qui concernait la liquidation des Juifs de
Pologne.
Dans le même temps, le processus d'extermination s'intensifia : de toute l'Europe occupée partirent des
convois à destination des camps d'extermination, principalement celui d'Auschwitz-Birkenau.
III. La complicité du régime de Vichy dans la mise en œuvre de la « solution finale »
En France, le gouvernement mis en place à Vichy par le maréchal PÉTAIN, chef de l'État français qu'il a
substitué à la République, n'a jamais eu pour objectif l'extermination des juifs, mais il n'en a pas moins été
l'instrument efficace de la première étape du génocide.
De septembre 1940, les lois applicables en Allemagne le sont en France et le 20 août 1941, est ouvert le
camp de Drancy, dans la région parisienne, plasous le contrôle de la Gestapo, mais gardé par des
gendarmes français. L’ouverture du camp de Compiègne suivra.
De nombreuses arrestations et déportations sont organisées sur le territoire français. Mais une des plus
marquante est sans doute celle du Vel’ d’Hiv. Les 16 et 17 juillet 1942, la police française a arrêté en
région parisienne 13 152 Juifs dont 4 115 enfants ; la plupart furent parqués au Vélodrome d'Hiver de
Paris avant d'être internés à Pithiviers ou à Beaune-la-Rolande puis à Drancy et déportés à Auschwitz.
Le 31 juillet 1944 : départ du dernier convoi de Drancy pour Auschwitz.
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