La recherche ne manque pas de chien

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PUBLIE AVEC L'AIMABLE AUTORISATION DE LA SEMAINE VETERINAIRE
DOSSIER
La recherche
ne manque
pas de chien
Depuis une dizaine d’années, le chien dans
la recherche n’est plus un animal de laboratoire
parmi d’autres. Avec le séquençage de son génome en
2005, il est devenu un véritable modèle en pathologie
comparée, pour l’étude de maladies humaines.
Pour les vétérinaires impliqués, il est aussi un patient
à part entière, susceptible de bénéficier en retour
des avancées qu’il permet chez l’homme, qu’il s’agisse
de techniques diagnostiques ou de traitement.
> DOSSIER RÉALISÉ PAR HÉLÈNE ROSE
LA SEMAINE VÉTÉRINAIRE - N° 1518 - 30 NOVEMBRE 2012 -
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DOSSIER
L
e chien est une espèce domestique dont la physiologie est proche
de celle de l’homme. De plus, il
partage son environnement, il est
exposé aux mêmes agents chimiques, aux mêmes stress, et, jusqu’à récemment, à
la même alimentation. Bien médicalisé, ce qui favorise le recrutement de cas cliniques, le chien développe de manière spontanée de nombreuses
maladies homologues aux affections humaines.
Identifier leur déterminisme génétique est une voie
importante de la recherche. Or la diversité raciale
chez le chien est une opportunité unique pour isoler les gènes responsables (voir encadré).
LE CHIEN, MEILLEUR MODÈLE
QUE LA SOURIS
Ces particularités font du modèle canin un modèle
expérimental plus pertinent que celui de la souris.
Pour la myopathie de Duchenne, par exemple, notre
confrère Yan Cherel, qui mène des travaux au sein
d’une unité mixte de recherche (UMR 703 InraOniris), rapporte que « le chien est un très bon modèle pour l’homme, notamment le golden retriever,
car il développe une maladie quasi identique. Une lignée de souris est porteuse de la même anomalie génétique, mais elle ne développe pas de lésion, nous ne
pouvons donc pas voir une éventuelle amélioration
clinique ». Serge Rosolen, chercheur à l’Institut de
la vision, explique le choix du modèle canin depuis
2009 : « Nos recherches ont une finalité humaine. La
souris a un mode de vie nocturne, sa rétine est dépourvue de macula (seuls les primates et l’homme en
possèdent), elle est malvoyante. Elle peut servir de
modèle génétique pour prouver des concepts thérapeutiques, mais c’est un très mauvais modèle d’expression clinique d’une maladie. Il nous fallait trouver
un modèle de taille intermédiaire pour réaliser des
injections dans le vitré ou en région sous-rétinienne :
le chien a des propriétés anatomo-fonctionnelles
proches de celles de l’homme et développe des affections homologues aux maladies humaines. » <
Le chien développe
de manière spontanée
de nombreuses maladies
homologues aux maladies
humaines
40 - LA SEMAINE VÉTÉRINAIRE - N° 1518 - 30 NOVEMBRE 2012
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POURQUOI LE CHIEN
EST UN MODÈLE
PERTINENT
© FRÉDÉR C DECANTE
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Une sélection intense a été pratiquée
depuis le XIXE siècle pour fixer les caractères
phénotypiques propres à chaque race (morphologie,
comportement, etc.), déterminés par les différents
allèles des gènes. De nombreuses races
ont été obtenues à partir de petits effectifs
de reproducteurs, surexploités pour certains, sans
souci de consanguinité. Elles constituent autant
d’isolats génétiques, avec une forte homogénéité
des allèles sélectionnés. Ainsi, les maladies
génétiques affectent de manière spécifique
une ou plusieurs des 400 races canines. Comme
leurs pedigrees sont accessibles, et que les chiens
se reproduisent plus que les hommes, la collecte
de données sur l’ensemble d’une famille
peut être assez rapide. Des arbres généalogiques
informatifs sont ainsi établis sans soulever
de problèmes éthiques comme chez l’homme.
L’équipe dirigée par Catherine André, du CNRS de
Rennes, a participé activement au séquençage du
génome canin. Elle est aujourd’hui incontournable
dans les études de génétique canine.
Lorsqu’une maladie est déterminée par une
mutation sur un seul gène (maladie héréditaire
simple, ou monogénique), les études génétiques
peuvent parfois être relativement rapides.
Au sein de l’UMR 955 Inra ENVA de génétique
fonctionnelle et médicale dirigée par Geneviève
Aubin Houzelstein, notre consœur Marie Abitbol
s’est ainsi penchée sur l’ataxie cérébelleuse
de l’american staffordshire terrier : « Cette
maladie apparaît en moyenne entre 2 et 5 ans,
ce qui en fait un très bon modèle pour les
céroïdes lipofuscinoses humaines d’apparition
tardive, voire pour d’autres maladies de surcharge
neuronale. Nous avons identifié le gène
responsable et la mutation. Un test de dépistage
a été mis au point par le laboratoire Antagene,
et des généticiens humains de l’hôpital Cochin
travaillent à l’identification de mutations
dans le gène équivalent chez l’homme. »
Certaines maladies ont un déterminisme génétique
complexe, lié à plusieurs gènes et à plusieurs
mutations. Dans une race canine donnée, une
maladie complexe est souvent liée à l’altération
d’un de ces gènes, en raison de l’homogénéité
génétique de la race. Dans une autre race, un autre
gène ou une autre mutation peut être responsable.
Cela permet d’explorer progressivement les
différents mécanismes aboutissant à une même
maladie clinique.
LA SEMAINE VÉTÉRINAIRE - N° 1518 - 30 NOVEMBRE 2012 -
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DOSSIER
La pathologie comparée
Des retombées pour l’homme, mais aussi pour l’animal
u sein des équipes pluridisciplinaires
de chercheurs, l’originalité des vétérinaires est d’avoir toujours en tête la
santé de l’animal, le souci de faire bénéficier les chiens des techniques ou des
traitements élaborés sur un modèle canin,
mais développés pour soigner l’homme.
Serge Rosolen exerce en ophtalmologie,
comme les membres du Réseau européen
en ophtalmologie vétérinaire et vision animale (Reovva), animé collectivement par
39 vétérinaires, issus de 7 pays européens.
Il peut ainsi recruter des cas pour la recherche clinique et thérapeutique, sur le
glaucome en particulier. Au sein de l’Institut de la vision, il travaille notamment
sur la thérapie optogénétique pour traiter
les rétinopathies dégénératives1. L’implication des vétérinaires est fondamentale
pour lui : « Les vétérinaires sont les professionnels de l’animal, ils ne sont pas seulement là pour pratiquer des gestes techniques. Ils doivent participer activement à
l’élaboration des stratégies cliniques et thérapeutiques. Les membres du Reovva considèrent le chien comme un véritable patient.
Lui rendre la vue, c’est redevenir un vrai
prestataire de santé. » Il cite un exemple :
« Chez l’homme, un nouveau traitement du
glaucome est possible grâce à l’utilisation
d’ultrasons thérapeutiques. Cette technique
est spécifiquement adaptée au globe oculaire humain, mais elle a été mise au point
par un vétérinaire, Fabrice Romano, directeur d’une start-up (EyeTechCare). Par son
intermédiaire, nous verrons peut-être bientôt cette technique appliquée au chien, ce qui
serait un bel exemple de coopération entre
médecines humaine et animale, pour un bénéfice mutuel! » (voir schéma).
Spécialisée en imagerie cardiovasculaire,
notre consœur Valérie Chetboul dirige
l’unité de cardiologie d’Alfort et travaille
dans l’UMR Inserm-ENVA U 955 (cardiologie), qui regroupe une quarantaine de
personnes réparties entre l’hôpital HenriMondor et l’ENVA. Attachée à utiliser des
techniques diagnostiques non invasives,
elle explique sa démarche : « Pour valider
une technique, il faut montrer de manière
factuelle la valeur de ce que l’on fait (tech-
EXEMPLE D’INTERACTIONS ENTRE DIFFÉRENTS PARTENAIRES DANS L’ÉTUDE DU GLAUCOME CHEZ
L’EURASIER, DANS LE CADRE PLUS LARGE DU PROJET FIGLAN (FIGHTING GLAUCOMA IN ANIMALS)
Informations (normes)
validées par le Reovva
Président
du Club de
l’eurasier
Institut
de la vision
Ophtimalia
(éleveurs et
propriétaires)
Cohortes
de patients
Problématiques du club :
manques et demandes
- Marqueurs
cliniques et
fonctionnels
- Développements
thérapeutiques
Club de
l’eurasier
Examens et traitements
validés par le Reovva
Vébiotel
Reovva
Thèses
d’université
AFEP/MHOC
(base de
données)
CNRS
(P. Quignon)
Thèses
d’université
Recherche
EyeTech
Care
- Éléments de phénotypage
clinique et fonctionnel
- Prélèvement, histologie, etc.
Institut
du glaucome
Siem
École
d’Alfort
(M. Abitbol)
PÔLE PHÉNOTYPE
PHÉNOTYPE
PÔLE GÉNÉTIQUE
Clinique
Reovva = Réseau européen en ophtalmologie vétérinaire et vision animale.
AFEP/MHOC = vétérinaires agréés pour le dépistage des maladies héréditaires oculaires canines.
nique répétable, reproductible, détermination d’intervalles de référence), afin d’en
tirer des modèles statistiques. La rigueur est
le maître mot du travail de recherche. » Elle
a inventé et démontré l’efficacité de
l’échographie sur animal debout, avant de
mettre au point la technique du Doppler
tissulaire (Tissu Doppler Imaging 2D color
mode) chez le chien. Sans anesthésie générale, celle-ci permet une analyse fine
du fonctionnement du muscle cardiaque
(sur 1 à 2 mm), donc de mieux comprendre la physiopathologie d’une cardiopathie. Elle l’utilise en clinique, pour diagnostiquer une maladie cardiaque ou
détecter précocement une atteinte héréditaire. Elle évalue également l’efficacité
de médicaments. « Avec l’Inserm, l’objectif
L’objectif est de développer
des traitements chez l’homme,
et de faire en sorte qu’ils puissent
ensuite revenir au chien
42 - LA SEMAINE VÉTÉRINAIRE - N° 1518 - 30 NOVEMBRE 2012
est de développer des traitements chez
l’homme, et il me tient à cœur de faire en
sorte qu’ils puissent ensuite revenir au
chien. Grâce à nos travaux, une molécule a
été commercialisée en médecine humaine,
l’ivabradine. Elle pourrait être utile pour
traiter la dysrythmie chez le chien. »
Ses relations avec l’équipe de chirurgie
cardiaque de l’institut mutualiste Montsouris, dirigée par le Pr François Laborde,
ont permis quelques interventions pionnières : la correction d’une sténose mitrale
chez un cairn terrier ou la pose d’une
valve sous circulation extracorporelle à
cœur battant (nécessaire pour éviter l’hémolyse provoquée lors du passage du
sang canin dans la pompe de la machine).
« Ces interventions ne servent pas à l’homme,
les techniques existent déjà, elles ont été
pratiquées uniquement pour le chien ! »,
précise Valérie Chetboul.
La collaboration des praticiens,
indispensable au recrutement des cas
La phase de recrutement est primordiale
pour augmenter les chances d’aboutir
à des résultats. Un protocole rigoureux
et des critères diagnostiques précis sont
© LA SEMA NE VÉTÉR NA RE D’APRÈS SERGE ROSOLEN
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vétérinaires spécialisés
Une demande forte des propriétaires
et des éleveurs
Propriétaires et éleveurs sont souvent
demandeurs d’avancées pour la santé de
leurs animaux. D’après Guillaume Queney, les attitudes des clubs de race sont
variables : « Nous sommes plus souvent en
contact avec les éleveurs que les clubs de
race ou la Société centrale canine (SCC).
Les clubs motivés existent, mais sont minoritaires. Certains sont même un réel frein.
portage d’un allèle morbide, il est nécessaire
de les conseiller pour qu’ils pratiquent une
sélection raisonnée. Même si les tests génétiques leur permettent de sélectionner les
chiens, l’expertise du vétérinaire est et restera indispensable, car il est le seul habilité
à détecter les symptômes cliniques », rappelle Benoît Hedan. « Soigner est au cœur
de notre métier. Il importe de se faire rémunérer pour ses compétences », précise
Serge Rosolen.
© YAN CHEREL
Le financement,
un souci récurrent
Les financements publics ont pour objectif
la santé humaine. La Communauté européenne a ainsi subventionné le projet
Lupa, de 2008 à 2011. Celui-ci a mobilisé
20 laboratoires, dans 12 pays européens,
pour identifier chez le chien les bases génétiques de maladies homologues à celles
de l’homme. « Le financement s’est arrêté,
mais pas la recherche ! », indique Guillaume Queney, qui ajoute : « Un projet
Lupa2 est envisagé, il sera sans doute plus
restreint ». Pour l’étude sur l’ichtyose chez
le golden retriever, Catherine André rapporte un coût de « 500000 € au total pour
trouver un gène : de l’argent est nécessaire
pour collecter les échantillons, effectuer >>>
© YAN CHEREL
établissent la cohorte », explique Guillaume Queney, directeur d’Antagene. « Ainsi, quelques
dermatologues, en particulier Éric Gaguère,
ont collaboré au projet sur l’ichtyose chez
le golden retriever, qui a permis l’identification du gène responsable, retrouvé ensuite
chez l’homme. » Il poursuit : « Le recrutement est beaucoup moins sélectif aux ÉtatsUnis, et les chercheurs font souvent face à
une hétérogénéité génétique qui crée un
bruit de fond et les ralentit. »
Un recrutement large auprès des praticiens peut aussi être approprié, comme
pour les études de génétique en cancérologie menée par le CNRS de Rennes.
Notre confrère Benoît Hedan en rappelle
les modalités : « Pour les analyses génétiques, nous avons besoin d’un prélèvement
sanguin sur EDTA de chiens atteints et de
chiens âgés des mêmes races, mais indemnes de cancer. Dans certains projets, en
cancérologie, par exemple, il est nécessaire
de prélever les tumeurs, lors d’une chirurgie
ou en post-mortem, en vue d’analyses histologiques et d’analyses génétiques complémentaires. Beaucoup de vétérinaires se
montrent très réceptifs, motivés pour participer à la recherche ». Il ajoute : « Nous
sommes là pour répondre à leurs interrogations. Il y a tellement de maladies génétiques qu’il est impossible au praticien de
les connaître toutes, race par race. »
Une banque de prélèvements de chiens,
développée et gérée par le CNRS de
Rennes, appelée “CaniDNA2”, centralise
les prélèvements de 10 000 chiens, avec
leurs données généalogiques et cliniques.
Comme le précise Catherine André, qui
dirige cette unité, « cette biobanque est
aussi à la disposition des vétérinaires et des
éleveurs intéressés par une maladie pour
laquelle il n’y a pas de recherche en cours :
il importe de l’alimenter pour de futures
études, plus faciles à lancer lorsqu’il y a
assez de prélèvements. »
Ils ont peur pour l’image
de leur race. Cependant,
on remarque une prise
de conscience de la SCC
depuis trois ans. »
Pour ses recherches en
génétique quantitative,
notre confrère Jean-François Courreau (professeur à
l’ENVA) a un rapport privilégié avec
le club du border collie. Il travaille à l’indexation génétique de l’héritabilité des
aptitudes des chiens de troupeau, avec
des méthodes de calcul identiques à celles
pratiquées chez les animaux de rente.
« Les éleveurs de moutons connaissent déjà
les principes de l’indexation, donc ils comprennent l’intérêt de la méthode. Il y a aussi
une question de fierté : ils cherchent à améliorer la qualité de leurs chiens pour être
plus compétitifs face aux lignées étrangères
lors des concours ! » Pour recueillir des
données standardisées, en limitant les
biais (dressage, environnement, etc.), il a
mis en place avec le club une évaluation
lors de la confirmation : « C’est la seule
race qui pratique cela ! ».
Auprès de leurs clients éleveurs, les vétérinaires ont un important rôle de conseil
à jouer. « Pour diminuer la fréquence de
L’équipe de Yan Chérel a abouti à des résultats prometteurs chez le golden retriever
myopathe. Le chien malade (à gauche) soulage ses membres postérieurs en déplaçant son
poids vers l’avant, et présente une palmigradie, une plantigradie et une ankylose des
postérieurs. Chez un chien traité avec des cellules souches (à droite), le poids est réparti
équitablement sur les quatre membres et les anomalies posturales ont disparu. « Notre
objectif est d’aider concrètement les enfants malades, rapporte notre confrère. En thérapie
génique, nous cherchons à améliorer l’efficacité de la main, pour que les enfants
myopathes contrôlent plus longtemps le joystick de leur fauteuil. La protéine produite
après l’injection de notre vecteur viral (qui permet de sauter la zone mutée lors de la
lecture de l’ADN) est plus courte que la normale, mais elle est fonctionnelle. Nous espérons
qu’un essai clinique pourra débuter en 2014. » En thérapie cellulaire, des cellules souches,
les MuStem, pourraient être une solution : « Notre plus vieux chien (traité quand il avait
3 mois) a 4 ans, et il est en bonne forme (les chiens atteints ne vivent pas plus d’un an).
Il n’est pas parfait, mais il est dynamique, joueur, il peut se dresser sur ses postérieurs, etc.
Ces résultats ont été obtenus grâce à un soutien fort de l’Association française contre
les myopathies, complété depuis peu par des aides dans le cadre du programme
“Investissements d’avenir”. Nous espérons pouvoir appliquer cette technique à l’enfant
d’ici à cinq ans, mais nous sommes des chercheurs, pas des devins. Des problèmes liés
à l’immunosuppression doivent en particulier être réglés auparavant. »
LA SEMAINE VÉTÉRINAIRE - N° 1518 - 30 NOVEMBRE 2012 -
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DOSSIER
© SERGE ROSOLEN
© SERGE ROSOLEN
appartenance historique au ministère de
l’Agriculture et le soutien principal de
l’Inra, plus orienté vers les productions
animales, sont parmi les causes avancées.
Des unités mixtes de recherche existent
cependant, surtout en partenariat avec
l’Inserm.
La tomographie par cohérence optique (OCT) permet d’effectuer une coupe de rétine au niveau du nerf
optique et en périphérie. Chez cet Eurasier atteint d’un glaucome bilatéral, l’OCT de l’œil gauche (le premier
à être atteint et traité médicalement depuis 3 mois) montre une dépression importante au niveau
de la papille et un amincissement de la rétine. Ces lésions ne sont pas encore discernables dans l’œil droit
malgré une pression intra-occulaire plus élevée. Cette technique non invasive issue de la recherche
est désormais utilisable chez l’homme et l’animal.
>>> les manipulations, etc., avec du personnel
souvent employé en contrat précaire ».
Certaines sources privées contribuent
également, comme l’Association française
contre les myopathies (AFM). Selon Yan
Cherel, « nous sommes totalement dépendants du Téléthon. Si la levée de fond se passait mal sur une année, nous devrions arrêter du jour au lendemain. Les sommes
nécessaires sont impressionnantes. »
Quelques organismes américains soutiennent des laboratoires européens, comme
le National Institute of Health ou la fondation de l’American Kennel Club (chaque
éleveur inscrit verse une cotisation annuelle, qui est ensuite investie dans des projets de recherche pour l’amélioration des
races). Le CNRS de Rennes en bénéficie.
En France, les financements en provenance du milieu canin sont modestes. La
SCC a réduit ses budgets depuis qu’elle
ne peut plus disposer des excédents du fichier d’identification canin, selon JeanFrançois Courreau, et les moyens des
clubs de race sont souvent limités. Des
discussions sont en cours pour créer une
fondation sur le modèle de l’American
Kennel Club en France, qui serait affiliée
à la SCC.
Dans les écoles vétérinaires, les budgets
alloués sont relativement maigres, situation que dénonce un rapport de l’Académie vétérinaire de France paru en 2009
sur l’état de la recherche en France3. Leur
Les chercheurs comptent
sur les nouvelles vocations
Valérie Chetboul résume en quelques
mots le quotidien des chercheurs : « On
cherche. Quand on trouve, on est très heureux. » Elle précise : « Je ne pourrais plus
me passer de faire de la recherche. Cela
m’apporte une réelle satisfaction cartésienne, et, en clinique, cela a changé ma
façon de travailler. » Ce qu’elle s’attache à
transmettre. « L’avenir, c’est les jeunes. La
recherche peut les tirer vers le haut. »
Comme le conclut Jean-François Courreau,
« dans cette espèce que l’on croit connaître
de A à Z, il reste beaucoup de zones d’ombre.
Le champ d’investigation est énorme, il n’y
a que les moyens qui manquent, mais l’intérêt pour le chien lui-même est là. » <
Il s’agit d’injecter un morceau de gène (transgène)
issu d’une algue ou d’une bactérie capable de produire
des protéines (canaux ioniques) lumino sensibles,
qui induisent des courants électro ioniques similaires
à ceux produits par les photorécepteurs lorsqu’ils
sont stimulés par la lumière. Cette technique permet
de rendre sensibles à la lumière des cellules qui
ne l’étaient pas ou plus, comme les cônes dormants
(ayant perdu leur segment externe mais possédant
toujours leur segment interne) observés dans les
rétinopathies pigmentaires. Ainsi, il est possible de
traiter la maladie quelle que soit la ou les mutations
génétiques en cause.
2 http://dog genetics.genouest.org
3 Rapport sur la recherche dans les écoles nationales
vétérinaires françaises Propositions en vue de son
intégration dans un ensemble rénové de la recherche
vétérinaire. Commission recherche et enseignement,
Académie vétérinaire de France, 2/4/2009.
1
Valorisation des races
Pedigree et maladies génétiques
C
onsciente de l’importance de prendre
en compte les maladies héréditaires
pour aider les éleveurs à valoriser leurs
chiens, la Société centrale canine (SCC) a
souhaité faire évoluer les documents relatifs à l’identification et aux performances des chiens. Depuis mai 2011, lors de
l’inscription au Livre des origines français
(LOF) après la naissance, les chiots recevaient un certificat de naissance (éléments
d’identification immuables) et un certificat
de performance des ascendants (rapportant des informations relatives à la cotation, à l’ADN, à la santé et aux performances des reproducteurs). Une fois les chiens
confirmés, le pedigree et le certificat de
qualification des reproducteurs reprenaient ensuite ces mêmes informations.
Pour simplifier la présentation de ces éléments, ces documents ont été fusionnés,
et la nouvelle présentation des certificats
de naissance et des pedigrees est disponible depuis mai dernier. Chaque document coûte 25 €.
Ainsi, les nouveaux pedigrees reprennent
l’arbre généalogique du chien et précisent, selon un code couleur, pour chaque
géniteur dont les informations sont disponibles :
> sa cotation, avec les six mêmes niveaux
(de « confirmé » à « élite A »);
> la mention de son identification génétique, sigle « DNA », ou de la compatibilité
avec ses parents si elle a été recherchée,
sigle « DNA comp ». L’identification génétique et la détermination de la compati-
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bilité sont effectuées par le laboratoire
Antagene sur 14 marqueurs génétiques,
dont un de sexe, à partir d’un frottis buccal. La participation des éleveurs repose
sur le volontariat;
> les informations de santé relatives aux
affections héréditaires invalidantes de sa
race, gérées par le club de race concerné.
Le nombre d’affections indiquées a été
limité aux trois plus importantes pour
chaque race, « afin d’éviter une dispersion
des efforts des clubs » ;
> les informations sur les performances
obtenues en morphologie et en travail. <
Le lexique des abréviations relatives à la santé
est disponible sur Internet. Pour chaque maladie,
il est précisé si le dépistage est à réaliser au moyen
d’un test génétique.
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