L`Astrologie Celtique - Lenculus-le

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L'Astrologie Celtique: Une création
moderne?
(Commenté par Joseph Monard, celtologue et
linguiste)
par Michel-Gérald Boutet (iconologue)
N. Éd.: Les fontes pour les oghams et les coelbrens sont utiles pour lire ce texte.
Introduction
L'astrologie fascine, excite la curiosité, soulève les passions. Science cosmique ou
art divinatoire ? On la fait remonter à la nuit des temps, ou aux Chaldéens, tant on
ignore l'histoire de ses origines et ce, qu'elle soit tout occidentale ou orientale. Une
chose demeure certaine cependant, les zodiaques que l'on dit celtiques, mais qui
n'en conservent que le nom, n'ont rien à voir avec les Anciens, et encore moins avec
les druides. Cette étude ne vise pas tant à exposer les failles du système de base des
modèles proposés par les "reconstructivistes" d'astrologie celtique qu'à démontrer
que celles-ci ont une origine douteuse, voire frauduleuse.
Plusieurs tentatives ont été faites pour restaurer, et même reconstruire, le modèle
astrologique celtique ancien. Malheureusement, ces zodiaques ont été, pour la
plupart, fabriqués de toutes pièces. Il n'est pas étonnant que cette astrologie celtique
reconstituée ait très peu de ressemblance avec les systèmes d'astrologie
conventionnels tant occidentaux qu'orientaux. Faudrait-il alors parler de nouvelles
créations plutôt que de simples reconstructions à partir l'éléments existants ou de
fragments anciens? Or justement, ces fragments fossiles existent toujours !
Ceci étant, la plupart des reconstructivistes travaillent à partir de fausses données,
ou de pistes confuses, que l'on peut malgré tout imputer à l'écrivain irlandobritannique Robert Graves. Dans son sillon, ces reconstructivistes de l'astrologie
celtique ont complètement confondu almanach et zodiaque.
Évidemment, il s'agit là de deux systèmes différents. L'almanach est strictement
lunaire alors que le zodiaque est solaire. Le premier repose sur un cycle annuel de
354,3 jours, soit approximativement 12 lunaisons, alors que le second cycle annuel
est de 365,6 jours précisément.
Autre rappel important: la lune fait le tour des 12 constellations zodiacales en un
mois seulement alors que le soleil prend une année complète pour effectuer le
même tour.
Si tout ceci nous semble bien évident, ces détails semblent avoir échappé à nos
faiseurs de zodiaques. Cependant, il y a plus grave encore: aucun de ces auteurs,
Carnac et Bliss surtout, ne se risquent à donner leurs sources. Malgré tout, en
suivant les pistes de ces auteurs, on parvient visiblement à reconnaître la forêt
derrière l'arbre!
Robert Graves savait très bien qu'un zodiaque ne peut pas être un "calendrier
perpétuel", constatation qui n'allait pas l'empêcher cependant de commettre la
méprise sur la séquence du Beth-Luis-Nion qui, selon lui, ne pouvait réconcilier les
équinoxes et les solstices avec les douze constellations zodiacales.
Donc, selon la thèse de Graves, nos zodiaques de douze mois dérivaient d'un ancien
calendrier de treize mois. Ainsi, il s'est imaginé que le signe double des Gémeaux
résultait d'une combinaison de deux constellations antérieures en une dans le but
d'arriver à harmoniser les cycles luni-solaires.
Sa suite sylvestre débute à la veille de Noël le 24 décembre ; une impossibilité car
l'année celtique luni-solaire débutait en fait à la mi-automne à la lune de fin octobre
début novembre.
Autre impossibilité : les dates fixes données par Graves contredisent les données
archéologiques recueillies sur les plombs de Coligny, prouvant que les druides
avaient ingénieusement solutionné les divergences entre les deux cycles.
Les druides comptaient à partir de la pleine lune; ce qui faisait que les dates étaient
flottantes et pas toujours en accord avec le mois zodiacal.
Des corrections inévitables devaient être faites en indexant le court cycle lunaire
avec le long cycle solaire en ajoutant un mois supplémentaire à tous les deux ou
trois ans suivant un retour de cinq ans.
Bref, il n'y avait pas de dates fixes dans le schéma druidique, que des flottantes.
Un bref rappel :
Le mois sidéral : Le mois sidéral est défini comme étant le temps de la révolution
de la lune dans un orbite à partir d'une maison donnée et son retour dans la même
constellation (c'est-à-dire, les constellations définies en tant que maisons lunaires)
en précisément dans une moyenne de 27 jours, 7 heures, 43 minutes et 11.5
secondes.
L'année sidérale : Le temps moyen d'une année sidérale est mesuré selon une
révolution complète de la terre dans son orbite autour du soleil. C'est-à-dire selon le
déplacement apparent du soleil d'une constellation zodiacale à l'autre et son retour
dans la même constellation initiale (c.-à-d. : du point vernal au point vernal, ou du
Bélier au Bélier), et ce, en précisément 365 jours, 6 heures, 9 minutes, et 9,54
secondes en temps solaire.
LE SOLEIL A RENDEZ-VOUS AVEC LA LUNE (mais la lune n'est pas là et
le soleil attend)...
Indexage des deux cycles :
Les difficultés surviennent lorsque l'on tente de combiner le cycle de lunaisons
avec l'année solaire. Le problème vient du fait que l'année lunaire moyenne est
constituée de douze mois de 354, 3669 jours alors qu'un cycle solaire complet est
de 365, 2422 jours en moyenne. La différence est donc de 10, 8753 jours
exactement.
La tâche est de combiner ces deux années en une année synchronique en gardant
bien le cours des changements saisonniers. La solution est venue avec l'ajout d'un
mois embolismique dans l'année et de l'ajout d'une année intercalaire dans les
cycles plus longs.
Les druides conçurent un cycle de trois ans dans lequel ils introduisirent un
treizièmement mois "mis de côté" qu'ils appelèrent Santarana (sanataran-os/-a/-on,
adj. = "à côté"). Cette technique du mois "embolismique" est à la base de notre
année bissextile.
À part la possibilité de l'ajout d'un mois embolismique, il y avait aussi la possibilité
de l'ajout d'un jour supplémentaire au mois Juillet, opération délicate qui devait
compliquer quelque peu les calculs. Ce premier mois supplémentaire inséré au
point vernal en mars/avril s'appelait Ciallobuis Sonnocingos, ce qui veut dire,
"indexation de la course du soleil". Dans sa course, le soleil retrouve tous les cinq
ans la lune grâce à ce stratagème des deux mois embolismiques. Le deuxième de
ces mois inséré en octobre/novembre s'appelait quant à lui Mens in Dueixtionu,
pour "mois en duplication" abrégé en MIDX dans le calendrier de Coligny.
La constellation du Serpentaire (Ophiucus) servait jadis chez les druides comme marqueur de l'initiation du
nouvel an, c'est-à-dire au moment de l'entrée du soleil en Scorpion. (crédits : M.-G. Boutet)
Durée des cycles planétaires
- Lune : 19.00011 ans, lunaison sur le même degré zodiacal pour un cycle
métonique ;
- Soleil : 33.00004 ans, pour retourner à la même position zodiacale à la même
heure du jour ;
Positions des luminaires dans le zodiaque :
Soleil en
PL (pleine
DQ (dernier quartier) en
lune) en
Balance Bélier
Cancer
Scorpion Taureau Lion
Sagittaire Gémeaux Vierge
Capricorne Cancer
Balance
Verseau Lion
Scorpion
Poissons Vierge
Sagittaire
Bélier
Balance Capricorne
Taureau Scorpion Verseau
Gémeaux Sagittaire Poissons
Cancer
Capricorne Bélier
Lion
Verseau Taureau
Vierge
Poissons Gémeaux
PQ
NL
(premier
(nouvelle
quartier)
lune) en
en
Balance Capricorne
Scorpion Verseau
Sagittaire Poissons
Capricorne Bélier
Verseau Taureau
Poissons Gémeaux
Bélier
Cancer
Taureau Lion
Gémeaux Vierge
Cancer
Balance
Lion
Scorpion
Vierge
Sagittaire
Le combat des arbres tel qu'illustré sur le célèbre chaudron de Gundestrup issu de la culture Pontique celtique
(daté ca. 250 è.v. +/- 50 à 150 ans). Notez le mat à peine émondé figurant l'axe du monde. Les guerriers
représentent les jours, symbolisme dû à un jeu de mots en celtique : Latis = "héros", "guerrier" et "jour"
calendaire. Le calendrier se disait Lation. Les attributions de lettres respectant les données médiévales et la
philologie ne sont pas ici fortuites mais bien dans la logique traditionnelle des Celtes. Détails qui confirment la
relation des lettres avec les arbres guerriers au symbolisme constellaire ! (crédits : M.-G. Boutet)
LE COMBAT DES ARBRES
À partir d'un passage de l'Ogygie de Roderick O'Flaherty dans lequel l'auteur
mentionne que le Beth-Luis-Nion (ainsi que le Boibel-Loth) est "une authentique
relique du Druidisme transmise oralement jusqu'à nous à travers les siècles" (p.
189) et que les plus anciennes lettres étaient au nombre de treize. Il n'en fallait pas
plus pour que ce dernier parte à la recherche des treize lunes du calendrier de
arbres. Robert Graves avait l'ultime certitude que l'alphabet des oghams était
originaire de la Paphlgonie et du Pont alors que Macalister lui donnait une origine
tardive, Irlandaise médiévale, copié sur les alphabets grecs et latins. De formation
classique plutôt que celtique, Graves n'eut aucune peine à tirer les conclusions qu'il
fallait à partir de ses intuitions inspirées par sa muse, la "Déesse Blanche". Ou
comme il le dit lui-même, "Une objection contre le fait de regarder le Beth-LuisNion comme un alphabet complet vient de ce qu'il ne contient que treize consonnes
dont l'une, NG, est sans utilité alors que deux lettres anciennes, Q et Z, contenues
dans le Boibel-Loth, et connues en ogham sous le nom de Quert et Straif n'y
figurent pas (p. 230-231). Mais comme le remarque Peter Berreford Ellis dans "The
Fabrication of 'Celtic Astrology' " l'ogham est constitué de 25 lettres, 20 consonnes
et 5 voyelles. On est loin des 13 consonnes et 5 voyelles d'O'Flaherty chères à
Graves. Là où je diverge d'opinion avec Berresford Ellis c'est où il réfute que les
arbres aient pu être utilisés comme symboles astrologiques. Si M. Berresford Ellis
est d'avis que l'alphabet des arbres est désespérément confus et en défaut avec luimême (the 'tree alphabet is hopelessly confused and at odds with itself'), c'est que
ses sources l'ont, lui aussi, conduit sur une fausse piste.
Malgré le fait que j'ai souvent tendance à donner raison à M. Berresford Ellis, je ne
suis pas tout à fait prêt à le suivre sur ce sentier perdu. Des donnés linguistiques
tirées du fameux calendrier de Coligny viennent confirmer le fait que les arbres
étaient chez les druides étroitement associés au symbolisme des étoiles. Le
calendrier porte plusieurs inscriptions du type Samoni Prin. ou encore Equi Prin..
Or Prin. se trouve être l'abréviation de prinnios qui veut dire mot à mot
"arborescence". Joseph Monard traduit Prinnios par : "constellation zodiacale",
"période zodiacale". Autre détail intéressant : prennos||qrennos (de *curesno P.I.E.),
qui désigne "arbre (de haute futaie)", "bois d'arbre sur pied", peut aussi dans la
forme prinnos||qrinnios désigner une cuspide, une pointe, l'entrée d'un luminaire
dans une maison. Si le zodiaque grec est imaginé comme un bestiaire fantastique,
c'est avec des arbres que le prinnion||qrinnion celtique est illustré. Les
Coiluprennoi||Coiluqrennoi ne sont-ils pas les bois de la divination?
Bref, l'idée de Robert Graves n'est pas si bête après tout, seulement ce n'est pas d'un
calendrier dont il s'agit avec les arbres mais bien d'un zodiaque. Alors, pourquoi les
meilleurs spécialistes de la matière Irlandaise n'ont pas pu discerner la "haute
futaie" dans le firmament? La raison est simple! Les oghams servaient à exprimer
une qualité de langue forte archaïsante. À ce niveau on plus proche du vieux
celtique, voire du gaulois, que du vieil irlandais.
Pour vous en donner une petite idée, voici la remontée étymologique des sigles
oghamiques qualifiés de confus par bien des experts :
A) Interprétation traditionnelle (tirée du livre de Ballymote avec
interprétations du gaélique par Meroney et al.):
b B beth (bouleau)
l L luis (orme/sorbier); luise? (flamme)
f F fern > fearn (aulne)
s S sail > saile (saule)
n N nin > nuin (frêne); nin (fourche)
h H uath > huath (aubépine, terrible)
d D daur dur > duir (chêne)
t T tine > tinne (cyprès ou sureau); tindi (tige de fer)
c C coll (coudrier/noisetier)
q Q qert quert (croisier/pommier sauvage); ceirt (chiffon)
m M muin muinn > mediu (vigne,); muin estime
g G gort (lierre,); gort (champs)
p NG ngetal ou gilcach (roseau); cetal (charme)
z ST (Z) straif ou draighean (épine-vinette); straiph (souffre)
r R ruis ou graif (sureau,); ruis (rouge)
a A ailm (pin); ?
o O onn ohn (genêt,); onn (roue)
u U ur (bruyere,); ur (humus)
e E edad edhadh/eadha (peuplier); ?
i I ioho > ida (sic) > idad/ioda idho iubhar (if); ?
2 EA ebad (sic) : ehad > eahadh eashadh (tremble) ou CH choad (taillis); ?
4 OI oir (?) ou feorusoir (fusain)TH ou tharan (chêne vert); oir (or ?)
3 UI uilléan (chèvrefeuille) ou P peith/pethbol (obier); uilllend (coude)
5 IO iphin > ifin (groseiller) ou PH féa/phia ou phogos > féa (hêtre)
6 AE amancoll/emancholl > aemhancholl (orme blanc ou de montagne) ou péine
(?) et/ou XS xi mòr (grand 'X') emancoll (double C).
B) Remontée étymologique celtique (Monard) avec jeux de mots bardiques
(Boutet) :
b b beth < betua (bouleau) Bitu (monde);
l l luis < lusis (sorbier) Louxs (lumière)
n n nuin < onna (frêne), si ce n'était nertos (myrte) Ninnos (faîte, cime)
f w (W) fearn < uernos (aulne) Uernos (bon)
s s saile salixs (saule) Sauelios (soleil)
h h SC (SQ/SP) huath < squiats/spetes (aubépine) Scatos (ombre)
d d daur < daruos/deruos (chêne) Duora (porte)
t t tinne < tennos (houx) Tenes (feu)
c c coll < coslos (coudrier) Celos (abri), Coliia (troupe)
q C quert < qertocos (pommier sauvage) Qrennacon/Prennacon (domaine boisé)
m m muin < monia (ronce) muinia/uiniia (vigne) Moniio (montagne)
g g gort < gortia (lierre) Gortia (enclos)
p N 'N (NC/NG) ngetal 'ngaitalis ingaitalis (roseau) 'Ncu . Ancou (fatalité)
z D straif < sdragenos/dragenos (épine-vinette) Dira/Sdira(étoile)
r r ruis < rusca (sureau) si ce n'était Roudios (rouge), Rixs (roi) reusmen (aulne
glutineux)
a a ailm alamios (pin) Alamos (troupeau)
o o ohn ocstino (ajonc) si ce n'était onna (frêne) Ona/Ono (eau)
u u (OU) ur < uroica (bruyère) Ur (feu, sacré)
e e (É) eoda < idato/esados (tremble) Itauis (brandon)
i i (J/Y) ioho < iuos (if) Iuos (clair)
2 cc X (CH) choad < coiton/caiton (taillis) Xodonios (chtonien), caclauos
(cailloux) élément terre si ce n'était xassanos < cassanos (chêne)
4 T TH tharan < taranos/tannos (chêne vert, yeuse) Taranos (tonnere), tepnon
(feu) élément feu
3 p P peith < petios (obier) padis (pin) Pottos (pot), (p)Idsca (eau) élément eau
5 P PH féa < phogos < bagos Phrudis (cascade), auella (vent) élément air
6 XS (KS) 'xslemos < uxslemos/uanocoslos 'Xson < Uxson (éther) élément éther
(orme blanc, orme montagnard)
L'erreur consiste à interpréter les sigles selon des termes aux formes tardives
évoluées qui n'étaient déjà plus comprises par les transcripteurs médiévaux. La
faute de la plupart des spécialistes a été de ne pas voir que les plus anciennes
inscriptions étaient dans une langue archaïque qui ne pouvait être attribuable qu'aux
druides. Les lettres dites obscures servaient donc à exprimer une langue sacrée plus
ancienne que le vieil irlandais. L'erreur de Robert Graves a été de ne pas avoir
recours à la linguistique moderne. Et, selon toute logique, les arbres sont en fait des
cuspides et ne peuvent être que regroupés par deux (2 x 12 = 24), le vingtcinquième représentant la grille solaire. Malheureusement, Graves s'est laissé plus
emporter par sa muse de poète que par le souci d'exactitude. C'est à se demander
qui était sa muse au juste? La Dame Blanche, était-ce Uindasoibra, le spectre blanc
des fantômes dans le placard, ou Uinda Branna, "la corneille blanche" des champs
de batailles littéraires?
Le calendrier des arbres de Robert Graves :
Taureau
B: bouleau : 24 décembre;
L: sorbier : 21 janvier ;
N: frêne : 18 février ;
F: aulne : 18 mars ;
S: saule : 15 avril ;
Lion
SS (Z): prunier : 15 avril ;
H: aubépine : 15 mai ;
D: chêne : 10 juin ;
T: houx : 8 juillet ;
C: coudrier : 5 août ;
Serpent
CC (Q): pommier : 5 août ;
M: vigne: 2 septembre ;
G: lierre : 30 septembre ;
NG: roseau : 28 octobre ;
R: sureau : 25 novembre ;
I: if : 25 novembre ;
Aigle
(Y): gui : 23 décembre ;
E: peuplier tremble : 23 décembre ;
U: bruyère: 23 décembre ;
O: ajonc : 23 décembre ;
A: épicéa/pruche: 23 décembre ;
AA: palmier : 24 décembre ;
Le zodiaque des arbres de Robert Graves :
Solstice d'hiver
A/I: épicéa/if
Sagittaire: B/R: bouleau/sureau
Capricorne: L: sorbier
Verseau: N: orme.
Équinoxe du printemps
O/E: ajonc/peuplier
Poissons: F: aulne
Bélier: S: saule
Taureau: H: aubépine
Solstice d'été
U: bruyère
Gémeaux : D/T : chêne / houx
Cancer: C: coudrier
Lion : Q : pommier
Équinoxe d'automne
E/O : peuplier/ajonc
Vierge: M: vigne
Balance: G: lierre
Scorpion: NG: roseau
Tout ceci évidemment repose sur des interprétations tardives tirées du livre
d'Ogygia,écrit par le barde Roderick O'Flaherty vivant au dix-septième siècle.
O'Flaherty disait tenir ses renseignements de Duald MacFirbis, un barde titré du
clan O'Brien. Des érudits réputés, et non le moindre R.A.S. Macalister, entre autres,
insistent sur le fait que les affabulations oghamiques données par O'Flaherty étaient
des "artifices" n'ayant aucun rapport avec les interprétations originales données aux
oghams (Nigel Pennick 1991).
Si ces rêvasseries s'inspirent de la tradition bardique, il faut comprendre alors que
ces adaptations ne sont pas seulement à une bonne distance de la tradition
médiévale, mais à plus forte raison de la païenne antique. Il est fort peu probable,
puisque les écoles bardiques étaient franchement chrétiennes depuis belle lurette,
que les oghams conservent un contenu druidique significatif.
En comparaison, voici la proposition passablement crédible de Hageneder qui
semble se fier sur des sources traditionnelles solides :
Les arbres symboles de Friedrich Hageneder :
I- Arbres chefs et stations pour les festivals trimestriels :
A
O
U
E
I
Ailm (sapin!) - au lendemain du solstice d'hiver
Onn (genêt!) - à l'équinoxe du printemps
Ura (tilleul!) - au solstice d'été
Eadha (tremble) - à l'équinoxe d'automne
Iohu (if) - au solstice d'hiver
II- Les treize arbres-symboles, d'une durée de plus de 4 x 7 = 28 jours chacun,
à partir du solstice d'hiver :
B
H
M
L
D
G
N
T
Z
F
C
R
S
Beth (Bouleau)
Huath (Aubépine)
Muir (Roncier)
Luis (Sorbier)
Duir (Chêne)
Gort (Lierre)
Nion (Frêne)
Tinne (Chêne-vert, Yeuse)
Straif (Prunellier)
Fearn (Aune)
Coll (Coudrier)
Ruis (Sureau)
Saille (Saule)
Cette étrange version sans prétention présentée par Hageneder avec mise en garde
telles que : "il n'est prouvé qu'un tel calendrier fut utilisé... cependant, je voulais
utiliser ce système pour garder à l'esprit les arbres : ils ont plus que jamais besoin
de notre soin et attention".
Je dis bien étrange car sa séquence sylvestre est modelée sur le cycle
hebdomadaire. Nous tenons pour acquis que c'est un concept universel. Il faut
savoir cependant que les anciens Celtes ignoraient la semaine de sept jours. Il faut
dire aussi que le schéma de sept jours est compliqué et difficile à manier. Ceci étant
dit, la suite de sept n'est ni compatible avec le cycle solaire, ni compatible avec les
cycles lunaires. Comme je l'ai déjà dit, la proposition du séquençage oghamique de
Hageneder n'est qu'une proposition de seconde main empruntant librement à
l'Ogygia de Roderick O'Flaherty, qu'il a lui même emprunté à Duald Mc Firbis. (J.
Monard)
L'Astrologie celtique selon Carol Carnac
L'autre exemple d'un faiseur d'almanach qui se prend pour un astrologue est celui
de Carol Carnac avec "L'Astrologie Celtique". Malgré son côté fort intuitif et
parfois même éblouissant, il n'arrive pas à nous expliquer comment ce système
unique a pu parvenir jusqu'à lui sans laisser de traces au passage. Tout ce qu'il nous
dit c'est qu'il l'a trouvé dans des sources orales qui remontent à l'âge mégalithique!?
Et comme dans le cas de Graves, aucune de ses sources n'est donnée ni même son
informateur.
Donc, s'il y avait un lignage ininterrompu de conteurs du domaine cosmologique en
Bretagne remontant jusqu'à la Préhistoire, ce détail à lui seul est fort important. Il
va sans dire que notre curiosité a été piquée.
Encore, là, si cet informateur est un autre celtomane, on peut certainement
comprendre sa discrétion à son sujet.
Ceci étant, le zodiaque de Carnac fonctionne sur une suite d'arbres spéciaux en lien
avec des constellations tout aussi originales, certaines trop au sud. En fait, sa suite
ne semble pas suivre celle des oghams hiberniens, encore moins celle du Cat
Goddeu brittonique. On s'y attendrait cependant, puisque la tradition bretonne ne
pouvait diverger de sa soeur galloise à ce point.
Pire, son système astral ne peut en aucun temps être considéré comme un zodiaque
solaire parce que :
•
•
1: Il ne couvre pas les constellations sidérales usuelles visitées par le
soleil durant l'année; et
2: Il ne reflète pas non plus le passage mensuel de la lune puisque son
zodiaque est divisé comme un almanach de 36 parts, c'est-à-dire qui
peut être pris comme tel avec chaque part correspondant à un tiers du
douzième zodiacal de l'année tropique à peu près.
De plus, les dates assignées sont sans relation avec les bases de computation
astronomique pour un recyclage du zodiaque.
L'Astrologie celtique de Carol Carnac
15 mars - 24 mars : Le roi - sureau
25 mars - 4 avril : La princesse enchaînée - poirier
5 avril - 14 avril : La reine - orme
15 avril - 24 avril : Le triangle - chêne
25 avril - 4 mai : Le fleuve de vie - tilleul
5 mai - 15 mai : Le héros solaire - épicéa
16 mai - 25 mai : Le lièvre - hêtre
26 mai - 5 juin : Le chasseur - cerisier
6 juin - 15 juin : Le cocher - gui
16 juin - 25 juin : La petite-ourse - sapin
26 juin - juillet 5 : Le grand chien (Canis Major) - figuier
6 juillet - 16 juillet : La grande ourse - marronnier
17 juillet - 26 juillet : Le petit chien (Canis Minor) - noyer
27 juillet - 6 août : L'hydre - saule
7 août - 17 août : Le vaisseau (Navis) - l'if
18 août - 27 août : Le chaudron (Crater) - sorbier
28 août - 6 septembre: Le centaure - cognassier
7 septembre - 17 septembre: Le corbeau (Corvus) - genévrier
18 septembre - 27 septembre : Le bouvier (Bootes) - micocoulier
28 septembre - 7 octobre : Le héros terrestre - peuplier
8 octobre - 17 octobre : La couronne hyperboréenne (Corona Borealis) - noisetier
18 octobre - 27 octobre : Le serpent - bouleau
28 octobre - 6: novembre : Le dragon (Draco) - cornouiller
7 novembre - 16 novembre : Le loup (Lupus) - aulne
17 novembre - 26 novembre : L'homme-serpent (Serpentaire / Ophiuchus) - pin
27 novembre - 6 décembre : L' autel (Ara) - buis
7 décembre - 16 décembre : La couronne australe (Corona Australis) - aubépine
17 décembre - 26 décembre : La lyre (Lyra) - charme
27 décembre - 5 janvier : L'aigle (Aquila) - frêne
6 janvier - 14 janvier : La flèche (Sagitta) - prunier
15 janvier - 24 janvier : Le cygne (Gygnus) - pommier
25 janvier - 3 février : Le dauphin (Delphinus) - mélèze
4 février - 13 février : Le poisson austral (Piscis Austrinus) - érable
14 février - 23 février : Le petit cheval (Equuleus) - cyprès
24 février - 4 mars : Le cheval ailé (Pegasus) - néflier
5 mars - 14 mars : La Baleine (Cetus) - châtaignier
L'Astrologie gauloise selon Edgar Bliss
L'astrologie gauloise d'Edgar Bliss est un autre exemple semblable. Son
séquençage en 36 parties est du même ordre que celui de Carnac (plus 4 pour
équinoxes et solstices). Naturellement, son modèle a la même structure que
l'astrologie celtique de Carol Carnac mais pas les mêmes dates de coupure ni le
même ordre de signes.
21 mars, équinoxe du printemps : Chêne (la force),
22 - 31 mars : Noisetier (la prospérité),
1 - 10 avril : Sorbier (la fertilité),
11 - 20 avril : Érable (la combativité),
21 -30 avril : Noyer (le charisme et le mystère),
1 - 14 mai : Peuplier (l'au-delà, le monde des héros morts au combat),
15 - 24 mai : Châtaignier (la prévoyance),
25 mai - June 3 juin : Frêne (l'arbre du monde),
4 - 13 juin : Charme (la voie),
14 - 23 juin : Figuier (l'abondance),
24 juin , Solstice : d'été : Bouleau (la vie),
25 juin - 4 juillet : Pommier (amour et beauté),
5 - 14 juillet : If (éternité),
15 - 25 juillet : Orme (obscurité, protecteur des bêtes),
26 juillet - 4 août : Cyprès (longévité, protecteur des voyageurs),
5 - 13 août: Peuplier (l'au-delà),
14 - 23 août : Micocoulier (le secret),
24 - août - 2 septembre : Pin (la permanence et le pouvoir matériel),
3 septembre - 12 août: : Saule (divination et prophétie),
13 août - 22 septembre : Tilleul (amitié et compassion),
23 septembre, Équinoxe d'automne : Olivier (lumière, feu, chaleur),
24 septembre - 3 octobre : Noisetier (prospérité),
4 - 13 octobre : Sorbier (fertilité),
14 - 23 octobre : Érable (combativité),
24 octobre - 2 novembre : Noyer (charisme et mystère),
3 - 11 novembre : Peuplier (l'au-delà, le monde des héros morts),
12 - 21 novembre : Châtaignier (prévoyance),
22 novembre - 1 décembre : Frêne (l'arbre du monde),
2 - 11 décembre : Charme (la voie),
12 - 21 décembre : Figuier (l'abondance),
22 décembre, Solstice d'hiver : Hêtre (renouveau).
23 décembre - 1 Janvier : Pommier (amour et beauté),
2 - 11 janvier : If (éternité),
12 - 24 janvier : Orme (obscurité, protecteur des bêtes),
25 janvier - 3 février : Cyprès (longévité, protecteur des voyageurs),
4 - 8 février: Peuplier (l'au-delà),
9 - 18 février : Micocoulier (secret),
19 - 29 février : Pin (permanence et pouvoir matériel),
1 - 10 mars : Saule (divination et prophétie),
11 - 20 mars : Tilleul (amitié et compassion).
Commentaire sur les propositions de Carnac et de Bliss
Malgré que leurs propositions d'arbres zodiacaux provoquent de sérieuses
objections, la notion d'un zodiaque coupé en périodes de temps du type décan,
procédé connu depuis l'Antiquité celtique, s'explique très bien. La langue gauloise
savait bien désigner cette notion par le terme Decamnoctiacon, littéralement :
"séquence de dix nuits".
Dans ce séquençage d'arbres-signes proposé par Bliss, on remarque le micocoulier
et l'olivier. Cela pose un problème car ces arbres ne poussent que dans la Gaule
méridionale et que ces essences n'étaient pas rustiques dans la plupart des régions
du monde celtique du nord-ouest (J. Monard).
L'astrologie celtique selon Helena Paterson
Voici un autre très bon exemple de bricoleurs faisant fi d'une méthodologie
sérieuse. L'Astrologie Celtique d'Helena Paterson, qui s'inspire directement de
Robert Graves, se veut un modèle pour la plupart des amateurs d'ésotérisme
nouvel-âge et des pseudo-druides auto-proclamés. Pas surprenante donc
l'affabulation de "zodiaque lunaire des anciens druides". En fait, Mme Paterson, qui
ignore tout des druides anciens, fait paraître ceux-ci comme des vieillards
lunatiques atteints de sénilité.
Mme Paterson accorde aussi beaucoup de crédit, comme si on devait la croire, à des
sources tout aussi contestables que Iolo Morganwg et son "Barddas des Îles de
Bretagne" qu'elle qualifie de "sagesse ancienne" et de "savoir ésotérique" des
druides.
Helena Paterson, dans Celtic Astrology (p. xvi) écrit : "La tradition bardique
Galloise a une ancienne ascendance et si les autres enseignements par example
ceux du Barddas - une collection de manuscrits anciens copiés par Olo Morganwg
et présentés par la société galloise des manuscrits en 1862 - ont un certain mérite,
confirme une science ancienne d'un savoir ésotérique."
Son "Zodiaque lunaire Celtique" (sic) suit la suite des lettres du beth-luis-nion...
comme le fait Hageneder. Cependant, là où Hageneder propose "straif" en avantdernière syllabe, elle préfère "ngetal" (utilisant le calendrier des arbres de Robert
Graves).
Le "zodiaque lunaire des anciens druides" à 13 signes de Helena Paterson :
Période du calendrier civil : Arbre-signe : Planète dominante : Symbole celtique :
24 décembre - 20 janvier : Beth/Bouleau Soleil cerf blanc
21 janvier - 17 février : Luis/Sorbier Uranus (Brigantia) dragon vert
18 février - 17 mars : Nion/Frêne Neptune (Lir) trident (cheval de mer)
18 mars - 14 avril : Fearn/Aulne Mars (Maurth) pentacle (épervier)
15 avril - 12 mai : Saille/Saule Lune (Llun) serpent de mer
13 mai - 9 juin : Uath/Aubépine Vulcain (Govannan) calice
10 juin - 7 juillet : Duir/Chêne Jupiter (Jovyn) cheval blanc (ou roue d'or)
8 juillet - 4 août: Tinne/Houx Terre (Abred) licorne (ou lance de feu)
5 août - 1 septembre : Coll/Coudrier Mercure (Mugher) saumon arc-en-ciel
2 - 29 septembre : Muine/Vigne Vénus (Gwena) cygne blanc
30 septembre - 27 octobre : Gort/lierre Perséphone ("couverte par la lune")
papillon
28 octobre - 24 novembre : Ngetal/Roseau Pluton (Pwyll) lévrier blanc (ou pierre)
25 novembre - 22 décembre : Ruis/Sorbier Saturne (Sadorn) cheval noir (ou
corbeau)
Commentaires sur ce pseudo-zodiaque lunaire des anciens druides :
À première vue, cette formule semble ingénieuse, sinon habile, mais
malheureusement n'est pas à la hauteur de la promesse de nous livrer un zodiaque
cohérent. L'échafaudage s'écroule comme un jeu de cartes puisqu'il ne s'agit ni d'un
zodiaque solaire à cause de ses 13 périodes distribuées contrairement à la division
en 12 parties de l'écliptique, ni d'un almanach lunaire à cause de sa durée et des
dates fixes rappelant les stations solaires.
De plus, il ne peut s'agir en aucun cas d'une "Astrologie des anciens druides" pour
ces raisons :
•
1- Parce qu'il commence au solstice d'hiver;
•
2- Pour ses références à des planètes non observées avant les "temps
modernes" : sauf Uranus peut-être ?, Neptune et Pluton ?,
certainement pas! ;
•
3 - À cause du manque de caractère celtique de plusieurs divinités non
celtiques citées ;
•
4 - Pour son ignorance des noms celtiques de plusieurs planètes et/ou
divinités attestées dans la mythologie, textes classiques, livre de
Ballymote et sources épigraphiques; et
•
5 - À cause de l'utilisation erronée du Gallois récent et de noms
gaéliques des planètes et/ou des divinités. (J. Monard)
La plupart des noms fictifs que Paterson a donnés aux planètes n'ont rien de
druidique comme elle le prétend. Le ton au passé laisse croire au lecteur qu'il s'agit
d'un fait historique alors qu'il s'agit plutôt d'une fiction. Elle nous assure que Celi
était "le grand dieu invisible des Druides" (p. xvi). Celi (si ce nom dérive de la
racine Cel- , Celô = "cacher, garder de la vue") a certainement échappé à la plupart
des mythologues de la matière celtique.
Malheureusement, car tout au long de son ouvrage on constate sa piètre
connaissance de la linguistique. Par exemple, elle donne Luis (sorbier) comme
dérivant de Luisiu quand on sait que le terme général pour sorbier est Alisos. En
fait, Luis dérive de Lusis terme qui veut dire "frêne montagnard", ce qui n'est pas le
sorbier (d'Amérique).
Elle écrit aussi à la page xxi, que les bardes Gallois appelaient les druides
"Naddreds" ou "Couleuvres", un terme littéral pour "sages". Natro (serpent,
couleuvre en celtique) cependant, a toujours désigné l'animal à sang froid; ce n'est
qu'au Moyen-Âge que le mot a pris son sens péjoratif pour dénigrer les Druides.
Disons que Natro est un jeu de mots avec Nadrô "glisser, ramper" (Nadromi,
"glisser comme une couleuvre").
Voici des exemples d'anachronismes commis par Paterson
(NB: les points d'interrogations et d'exclamation (? ) (!?) sont de l'auteur) :
Soleil: Sul
Uranus: Brigantia (?)
Neptune (!?): Lir (?)
Mars: Maurth
Lune: Llun
Vulcain (!?): Gouannan (?)
Jupiter: Jovyn
Terre (!?): Abred (?)
Mercure: Mugher
Vénus: Gwena
Perséphone (!?) Arianrhod/Rhiannon (?)
Pluton (!?): Pwyll
Notez bien que Maurth, Mugher, Gwena et Jovyn sont d'étymologie latine tardive
alors que Brigantia, Lir, Gouannan, Abred, Arianrhod et Pwyll sont fictives. Pour
ce qui est de l'ajout de la Terre, elle n'a pas sa place dans la ceinture zodiacale
puisque le regard des Anciens est avant tout géocentrique, la terre en tant que
planète se disait Crundion (sphère) et non Abred!
Comparez ces noms avec ceux connus (par les sources épigraphiques et
manuscrites) ou sentis (par des moyens linguistiques = *) de la celticité antique
:
Soleil : Sauelios, Sonnos/Sonna, Grannos/Greina
Lune : Luxna, Leucara/Leucaros, Diuon, Eidsciia
Mars : Cocidios (livre de Ballymote), *Roudios
Mercure : *Lugos, Luxtos (livre de Ballymote), Boudios
Jupiter : Tectos (livre de Ballymote), *Taranis
Vénus : Reiia/Riia (livre de Ballymote / épigraphie), Uasnia
Saturne : Melnos (livre de Ballymote), Uosiros, Nucturos.
Et peut-être Uranus ? (peut-être parce que les Anciens arrivaient à peine
l'apercevoir par temps très clair ou au moyen d'un cristal grossissant): Cenos (>
Cean < Cian) selon une interprétation d'une inscription tirée du livre de Ballymote
(sigla 8).
La plupart de ces symboles figurent aussi dans l'art et la numismatique des Gaulois.
Ce livre ne peut donc plaire qu'aux romantiques marginaux, aux paresseux
intellectuels, et à tous ces gens de la mouvance nouvel-âgiste, néo-païenne ou
pseudo-néo-druidisante, et aux autres farfelus qui ne sont aucunement gênés par le
grand manque de rigueur démontré par l'auteur de ce bêtisier.
Le calendrier chamanique de Kaledon Naddair
Un autre exemple de calendrier, le calendrier chamanique (Shamanistic Calendar),
est celui de Kaledon Nadair (qu'on ne peut reproduire). Au moins son auteur n'a pas
la prétention de le considérer comme un zodiaque. Il n'est malheureusement
disponible qu'en anglais.
Ce chercheur écossais est beaucoup plus crédible que les autres. Cependant, le vice
majeur de son système réside dans sa désignation "chamanique" de sa roue du
temps car on sait que les chamanes n'ont rien à voir avec les Celtes, encore moins
avec les druides.
Je m'explique : son système ne peut être considéré comme un système luni-solaire
complet car il se base uniquement sur l'année tropicale du cours solaire et des
douze constellations zodiacales. Bref, il est solaire et non luni-solaire. Nous savons
que le schéma druidique ancien était basé sur le modèle des maisons lunaires. De là
la notion d' "arbres" cuspides pour désigner les constellations.
Malgré tout, les consignations arbres-signes suivent un ordre fidèle aux oghams. Et
si on oublie la désignation "chamanique", on peut considérer que ce calendrier est
celtique dans son essence. Chaque douzième de l'année correspond à un arbre
zodiacal. Du fait qu'il suit le patron oghamique, il offre plusieurs possibilités de
rapprochement avec la culture gaélique pour les raisons suivantes :
•
1- grâce à une réconciliation Ogham/Coelbreni, son système est aussi
traduisible du côté brittonique ;
•
2- chaque quart de l'année solaire est gouverné par un arbre chef ;
•
3- comme le voudrait la tradition antique, l'identification à plusieurs
divinités et animaux par mois zodiacal permet l'introduction de décans
(J.Monard) ;
- Si c'est chamanique, ça veut dire que c'est pré-celtique, donc pas celtique!
Joseph Monard et les fondements de l'astrologie antique des Celtes
Oublions donc toutes ces tentatives plus ou moins ratées! Le modèle le plus
crédible et le mieux structuré constituant une base zodiacale celtique est celui de
Joseph Monard. M. Monard, un érudit de la matière celtique et de la linguistique, et
qui plus est connaît très bien les sources antiques s'est fié principalement aux
données astrologiques trouvées dans le calendrier de Coligny.
En fait, Monard a été le premier chercheur à constater que le calendrier (des
druides) était structuré selon des bases astrologiques. Comme nous l'avons vu, ce
calendrier est annoté des inscriptions Prin., Prinn. pour PRENNOS: ou Uidus =
"arbre" , c'est-à-dire cuspide, un point mathématique marqué par l'ascendant d'une
maison; et Prinni pour PRINNIOS: - constellation zodiacale , - période zodiacale,
littéralement, "arborescence". Il n'y a donc plus de raison d'ignorer le fait que les
symboles sylvestres correspondent aux signes oghamiques, les Prenes < Prinnoi,
qui eux-mêmes désignent les constellations. Bref, les recherches de M. Monard
dépassent tout ce qui a pu être écrit sur l'astrologie celtique.
La base astrologique de Joseph Monard
(Note : les noms celtiques pour les signes sont entre parenthèses)
LIBRA (MANTA) , la Balance; CANTLI PRINNIOS (des Chants, le chant de la
roue, bouclage de cycle), Septembre/Octobre, arbre signe: Lemos (Orme).
SCORPIO (SGORPIU), le scorpion; SAMONI PRINNIOS (du rassemblement, fin
d'été), Octobre/Novembre, arbre signe: Sappos (Sapin).
SAGITTARIUS (UARCUSTOS), l'archer; DUMANNI PRINNIOS
(assombrissement), Novembre/Décembre, arbre signe: Salixs (saule).
CAPRICORNIUS (GABROS ou IOCOS), la Chèvre; RIURI PRINNIOS (gelé,
gelée), Décembre/Janvier, arbre signe: Olioiaccetos (Gui).
AQUARIUS (DUPROSOPOS) , le verseau; ANAGANTI PRINNIOS (inactif,
calamiteux), Janvier/Février, arbre signe : Aballlos (Pommier).
PISCES (EISCOI), les Poissons ; OGRONI PRINNIOS (froid, des serpents),
Février/Mars, arbres signes: Padis (Pin), Scopos (Genêt).
ARIES (PUTIOS||QUTIOS), le Bélier ; CUTI PRINNIOS (fougueux, des béliers),
Mars/Avril, arbre signe: Deruos (Chêne).
TAURUS (TARUOS), le Taureau, GIAMONI PRINNIOS (germinal, fin d'hiver),
Avril/Mai, arbre signe : Squiats/Spetes (Aubépine).
GEMINI (EMNI) les Jumeaux, Dioscures, SEMIUISONI PRINNIOS (aux brises
capricieuses, semi-venteux), Mai/Juin, arbre signe; Uernos (Verne, Aulne).
CANCER (CARABOS), le Crabe, EQUI PRINNIOS (ajusté, jeux de mots avec
equos/epos = "cheval"), Juin/Juillet, arbre signe : Abolos/Opulos||Cormisio
(Sorbier).
LEO (LEU), le Lion, ELEMBIUI PRINNIOS (faon, des plaintes), Juillet/Août,
arbre signe: IUOS/EBUROS (If).
VIRGO (MAGULA), la Vierge, EDRINI PRINNIOS (des arbitrages, connotation:
"flux brûlant" Aedrinios), Août/Septembre, arbre signe: Idato/Critacos (Tremble).
Mogh Ruith, de Magus Retas, le serviteur de la roue (cosmique du temps comparable à la Kalachakra des Vedas)
et son identification stellaire suivant les indications mythologiques. (crédits: M.-G. Boutet)
En guise de conclusion
Il est malveillant de faire dire aux druides des sottises comme celles exprimées par
ces auteurs de zodiaques qui sont en fait des almanachs. Loin d'être ces magiciensmages fakirisés du légendaire médiéval récent , les druides n'étaient en fait pas très
différents des mathematici méditerranéens, des rishis et des mages aryens ou encore
des chaldéens assyriens. Soyons clairs, les druides n'étaient certainement pas des
"deux de pique"! Selon certains auteurs, ils auraient confondu les cycles lunaires de
12 à 13 mois avec celui du soleil de 12 mois zodiacaux, ce qui contredit tout ce que
nous savons à travers les sources classiques, César inclus! En fait, cela témoigne
plus d'un état de confusion de nos faiseurs de zodiaques modernes que d'une
véritable connaissance de la science antique.
En tant qu'observateurs attentifs et subtils du ciel, les druides pratiquaient, comme
tous les anciens, l'astronomie à "oeil nu", c'est-à-dire de l'observation directe.
Évidemment, ces observations difficiles dans certaines latitudes par temps couvert
exigeaient une solide compréhension des cycles des corps célestes. Les Anciens
pouvaient donc selon l'expérience accumulée au cours des siècles spéculer sur
l'existence de tel ou tel astre. Par précaution, ils ne comptaient pas plus de cinq
planètes, excluant les deux luminaires. Uranus peut être ajouté à une liste d'astres
considérés comme étant fantomatiques appartenant à l'art divinatoire ou à la science
spéculative.
Bref, il ne faut surtout pas remplir le vide avec de l'air, mais avec du concret. Avant
d'inventer n'importe quoi, la science comparatiste moderne aidée de l'archéologie
peut maintenant nous permettre de mieux saisir l'état des connaissances du ciel
dans le monde antique.
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