Cahier du « Monde » No 22075 daté Mercredi 6 janvier 2016 - Ne peut être vendu séparément
Au Kenya, l’énigme des plus vieux outils
La récente découverte des plus vieilles pierres taillées connues de l’histoire humaine, datant de 3,3 millions d’années, aux abords du lac Turkana,
ébranle l’hypothèse selon laquelle « Homo habilis » aurait inventé la technologie. Reportage dans ce « Far West » de l’humanité
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Déjouer les apparences
Les éditions des Belles Lettres viennent de
publier une version bilingue et commentée
d’un livre qui marqua une étape décisive de
l’histoire de l’astronomie. Dans son De revolu-
tionibus orbium coelestium (« des révolutions des orbes
célestes »), publié l’année de sa mort, le chanoine ca-
tholique Nicolas Copernic (1473-1543) présentait une
nouvelle doctrine cosmologique selon laquelle la Terre
et les autres planètes tournent autour du Soleil. Quali-
fiée plus tard de révolutionnaire, cette proposition
s’opposait frontalement à la thèse, tenue pour vraie
depuis des temps immémoriaux, selon laquelle la
Terre est immobile au centre du monde.
Les implications cosmologiques de l’inversion des
places occupées par la Terre et le Soleil sont considéra-
bles et la plus audacieuse concerne la distance des étoi-
les fixes. En effet, s’il est vrai que la Terre tourne autour
du Soleil, alors la position apparente des étoiles devrait
notablement changer selon la position qu’occupe notre
planète sur son orbite. N’ayant pas constaté cet effet de
parallaxe des étoiles, le plus grand observateur du
XVIe siècle, l’astronome danois Tycho Brahe (1546-1601),
refusa de souscrire à l’hypothèse copernicienne. Pour
échapper à cette objection et sauver la révolution an-
nuelle de la Terre, Copernic déclara que les étoiles se
trouvent à une distance si considérable que la course
de la Terre le long de sa trajectoire héliocentrique ne
modifie en rien le paysage stellaire. Autrement dit,
alors que les Anciens tenaient la dernière sphère pla-
nétaire, celle de Saturne, pour voisine de celle des étoi-
les fixes, Copernic introduit entre elles un immense
espace vide de tout corps.
En 1610, Galilée (1564-1642) publie le Sidereus nuncius,
un traité dans lequel il révèle ce qu’il a vu grâce à sa lu-
nette astronomique : la Lune a un relief, Jupiter possède
quatre satellites, les étoiles fixes sont bien plus nom-
breuses que celles vues à l’œil nu. Il proclame en même
temps son ralliement à l’héliocentrisme de Copernic. La
suite est connue. Galilée ayant eu l’audace de contour-
ner les interdits des théologiens en publiant en 1632 un
livre prenant le parti de Copernic, la congrégation du
Saint-Office lui impose d’abjurer l’héliocentrisme. Les
observations qui démontreront la révolution de la
Terre autour du Soleil ne viendront que bien plus tard.
La mise en évidence de la parallaxe des étoiles était
l’obsession des astronomes car elle apporterait la
preuve directe du mouvement de la Terre autour du
Soleil, validant ainsi l’hypothèse de Copernic. En cher-
chant à observer la parallaxe, l’astronome anglais Ja-
mes Bradley découvrit en 1725 un effet qui eut la même
conséquence : il constata que la position apparente des
étoiles variait périodiquement au cours de l’année avec
une très faible amplitude de 20 secondes d’arc. Bradley
interpréta cet effet comme résultant de la composition
de la vitesse de la Terre sur son orbite avec la vitesse
de la lumière qui parvient des étoiles, phénomène que
l’on nomme aujourd’hui aberration de la lumière. La
découverte de Bradley mit fin au débat sur l’héliocen-
trisme qui durait encore, presque deux siècles après les
travaux de Copernic et de Galilée.
Depuis la révolution copernicienne, les découvertes
scientifiques ont radicalement transformé notre des-
cription du monde. C’est par une procédure rigoureuse
alliant imagination, observations et expériences que
les sciences ont permis de déjouer les apparences qui
s’imposent à nos sens limités.
L’archéologue Sonia Harmand, directrice de la mission préhistorique française au Kenya et découvreuse des plus anciens outils de pierre connus à ce jour, au Muséum de Nairobi. NICHOLE SOBECKI POUR « LE MONDE »
PORTRAIT
SYLVAIN DELZON,
JEUNE POUSSE DE L’INRA
→PAGE 7
ÉPIGÉNÉTIQUE
LES LOIS DE L’HÉRÉDITÉ
CHAHUTÉES
→PAGE 3
NEUROLOGIE
EN INDE, GUÉRIR LA CÉCITÉ
ÉCLAIRE LA RECHERCHE
→PAGE 2
carte blanche
Roland
Lehoucq
Astrophysicien,
Commissariat à l’énergie
atomique et aux énergies
alternatives
(PHOTO: MARC CHAUMEIL)