RÉSUMÉ
La prévention des infections dans les établissements de santé est un sujet d’actualité.
Malgré la promotion de mesures de prévention, on constate qu’elles ne sont pas
complètement appliquées. Toutefois, s’attarder uniquement à ces manques offre une prise
limitée pour améliorer la prévention, en ignorant d’autres mesures que le personnel pourrait
avoir développées. L’objectif de la recherche est de décrire les pratiques, formelles et
informelles, de prévention de la transmission des infections, utilisées par diverses
catégories de personnel hospitalier, ainsi que d’explorer les représentations reliées à ces
pratiques. L’approche qualitative utilisée permet une vision systémique des activités de
prévention. Nous avons effectué, à Montréal, 27 entrevues et 186 heures d’observation de
personnel infirmier, de préposées aux bénéficiaires et de préposées à l’entretien sanitaire,
tous expérimentés, dans quatre unités de soins dont deux de courte et deux de longue durée.
Les résultats montrent que les mesures de prévention ne sont pas des actes isolés mais
qu’elles font partie d’un processus débutant par l’identification des risques à partir de trois
familles d’informations: la contamination du patient, celle de l’environnement et les
difficultés d’interaction avec le patient. Nous avons identifié certaines pratiques permettant
de pallier des situations où les mesures de prévention prescrites sont jugées insuffisantes et
révèlent des compétences méconnues du personnel. Ces pratiques peuvent notamment faire
appel au travail d'équipe, faisant ressortir l’importance de la dimension collective du travail
pour la prévention des infections. L’analyse des représentations du risque relié au
Clostridium difficile montre de plus que les participantes à la recherche craignent de le
transmettre aux patients et à leur propre famille et adoptent en conséquence des pratiques
spécifiques de prévention, au travail et hors travail. À cause de situations mettant en échec
la prévention, certaines participantes pensent de plus être des porteuses saines de ce
microorganisme et craignent son activation si elles sont affaiblies. Certains aspects de
l’organisation du travail peuvent aussi entraver leurs efforts : l’absence de moments de
concertation, la présence de personnel non régulier et le manque de formation. Nous
concluons sur l’importance d’appuyer les efforts de prévention basés sur des stratégies qui
font appel au travail d’équipe, qui semblent avoir un potentiel intéressant pour la
prévention des infections, et sur la nécessité de prendre en compte les préoccupations du
personnel dans les interventions éducatives le concernant.