1o Les penseurs grecs étaient à la
recherche d’une explication ‘naturelle’
des phénomènes de la nature ne faisant
pas intervenir ni dieu ni divinité.
Donnons un exemple. Thalès de Milet
(env. 625-545 av. J.-C.) expliquait les
tremblements de terre de la façon
suivante. La plupart des Grecs croyaient
que le dieu des mers -- Poséidon -- était à
l’origine des tremblements de terre.
Thalès faisant l’hypothèse que la Terre
était soutenue par de l’eau. Les
tremblements de terre se produisent
donc , soutenait Thalès, lorsque la Terre
est ébranlée par l’agitation des eaux sur
lesquelles elle flotte. Remarquez que
l’idée que la Terre flotte sur l’eau est une
idée que l’on rencontre dans de
nombreux mythes babyloniens,
égyptiens, et plus près de nous, chez les
amérindiens. Si simpliste que soit
l’explication de Thalès, sa grande
nouveauté est qu’elle ne fait appel à
aucune divinité, mais simplement à
l’idée d’un effet de la nature physique
résultant d’une cause physique.
2o Les penseurs grecs étaient des
adeptes, dirons-nous, de la discussion
rationnelle.
En effet, les premiers
penseurs grecs pratiquaient la discussion
critique et rationnelle. Chacun
connaissait les théories des autres et
chacun critiquait les idées des autres. Par
“ critique ”, on ne doit pas comprendre
que les Grecs avaient l’esprit
“ grincheux ”, jamais satisfait de rien. On
doit plutôt entendre que les penseurs
grecs évaluaient leur théorie d’après ce
qui leur paraissait logique, c’est-à-dire
Je me réfère ici à l’ouvrage de Geoffrey E.R. Lloyd, Une
histoire de la science grecque, Paris, Éditions La
Découverte, 1990, chapitre 1, p. 23.
rationnelle. Comme on dit souvent, ils
aimaient le gros bon sens. Chacun avait le
souci de trouver la meilleure explication,
la théorie la plus adéquate. Chacun
devait ainsi présenter ce qui peut donner
raison à leurs idées, soit les observations,
soit les arguments appuyant leurs idées.
À la différence des autres penseurs, ils
avaient le sentiment qu’une raison est
plus ou moins correcte qu’une autre, ou
qu’une croyance pût être plus ou moins
bonne qu’une autre suivant qu’elle
repose sur de meilleures ou de moins
bonnes raisons. C’est ce qu’on entend
par ‘discussion rationnelle ou critique’ :
la recherche des meilleures raisons de
croire ce que nous croyons.
À l’instar des premiers
philosophes, nous allons pratiquer la
discussion rationnelle et critique. Soyez,
sans crainte, nous ne discuterons pas de
n'importe quelle manière, et personne ne
va perdre son précieux temps. Nous
allons nous donner des règles de
procédure afin que notre discussion soit
enrichissante au plan de l'apprentissage
du “ savoir-être philosophe ”. Voici
comment nous allons procéder
aujourd’hui.
1. Chacun choisit une question qu’il
aimerait discuter. Le groupe des participants
s’entend ensuite de la (des) question (s) qu’il
désire discuter. Nous convenons de l’importance
de cette question et nous aimerions en faire une
discussion de fond.
2. La discussion n’est pas un débat
compétitif. Chacun coopère à la recherche
d’éléments de réponse à la question que nous
nous posons. Il n’est pas interdit de critiquer ceux
qui émettent leurs idées, mais cela doit être fait
dans un esprit fait d’ouverture, de respect et de
tolérance. De plus, notre discussion se fait dans
un esprit démocratique : chacun est sur le même