INTRODUCTION HISTORIQUE AU DROIT
HISTOIRE DES INSTITUTIONS ET DU DROIT FRANÇAIS 5e-18e SIÈCLES
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Le long règne de Louis IX (1226-1270), saint Louis pour la postérité, accroît considérablement le rayonnement
moral de la monarchie, faisant de la France la première puissance politique, économique et surtout culturelle du
monde européen (le « temps des cathédrales », mais aussi des universités, de la théologie et du droit canon…).
Philippe IV le Bel (1285-1314), est le premier monarque prenant avec autorité des initiatives dans les domaines
les plus divers : il innove en réunissant les États généraux, pour appuyer sa politique par l’assentiment des
population, met en place pour des raisons militaires un impôt royal bientôt permanent, manipule la monnaie, fait le
procès des Templiers, entre en conflit avec le pape, a des démêlés avec les grands seigneurs...
Les progrès de la monarchie capétienne sont mis à mal par la grave crise dynastique qui éclate en 13164. Le
principe de masculinité, retenu pour écarter du trône les femmes et leur progéniture, sert de prétexte au
déclenchement de la fameuse Guerre de Cent Ans par le roi d’Angleterre Édouard III qui aurait dû hériter de la
couronne (1336).
Économiquement, l’essor des 10e et 11e siècles se prolonge. Si les foires de Champagne déclinent, c’est au profit de celles
de Chalon-sur-Saône, de Lyon et de Beaucaire. Comme il est normal, la renaissance du commerce crée un besoin de
numéraire. Les grands seigneurs et les évêques frappent des monnaies d’argent ; les villes italiennes, comme Venise, qui
s’enrichit par le commerce avec Byzance, parfois des monnaies d’or. Saint Louis donne prééminence à la monnaie royale
d’argent et la fait accepter dans tout le royaume. En 1266, il va plus loin en frappant des monnaies d’or (l’écu d’or) et en
déclarant qu’il en a seul le droit. L’activité bancaire n’est pas absente du renouveau économique et le procédé du crédit est
fréquemment utilisé dans les transactions.
Les conséquences sociales de cette activité économique sont de deux sortes : 1° La noblesse, uniquement propriétaire de
terres, s’appauvrit par les partages successoraux, la fixité des redevances des paysans, les dépenses occasionnées par les
départs aux Croisades ; 2° Une bourgeoisie aisée apparaît, dont une partie est détentrice de capitaux, nouvelle forme de
puissance.
§ 3. La guerre de Cent Ans (14e et 15e siècles).
Cette guerre constitue une épreuve fort rude pour la France. Le pays connaît alors :
1° des désastres militaires (Crécy, 1346 ; Poitiers, 1356, où le roi de France est fait prisonnier ; Azincourt,
1415).
2° des difficultés financières aiguës
3° des crises sociales avec les révoltes de paysans (les paysans s’insurgent en particulier parce qu’ils sont ruinés
par les bandes de soldats qui circulent dans le pays entre les différentes opérations militaires. Ces jacqueries
paysannes sont souvent violentes : il arrive que l’on massacre les nobles et que l’on incendie les châteaux)
4° des crises politiques extrêmement graves, dues notamment à la situation de régence, souvent répétée, durant
la captivité en Angleterre du roi Jean II le Bon (1356-1360)5, ou durant le règne désastreux de Charles VI (1380-
1422)6, qui voit une véritable guerre civile opposer les factions politiques rivales, et l’héritier du trône, le dauphin
Charles, désavoué par son père fou.
4 Voir infra, la partie du cours consacrée aux règles de transmission de la couronne…
5 Un catastrophique mouvement de désagrégation du pouvoir central se produit : les grands (tel Charles le Mauvais, roi de Navarre)
fomentent des troubles pour appuyer leurs ambitions ; les États généraux, réunis presque sans interruption de 1355 à 1358, essayent de
substituer leur autorité à celle du régent, s’alliant pour cela au mouvement insurrectionnel parisien : Le premier soulèvement est conduit par
Étienne Marcel, prévôt des marchands, qui tente, lui, aussi de s’emparer de la direction du royaume en 1356 et 1357 (l’année suivante il est
assassiné à coups de hache par le bourgeois de Paris Jean Maillart). Le peuple étant lassé des troubles, le régent, le dauphin Charles (futur
Charles V le Sage), homme modéré, peut rétablir la situation.
6 C’est tout d’abord, en 1381, l’insurrection parisienne des Maillotins, qui s’opposent à la perception de nouvelles taxes. Puis, dans les
premières années du 15e siècle, le boucher Simon Caboche prend la tête des 500 bouchers parisiens et bourgeois, domine Paris quelque
temps et impose à Charles VI, en mai 1413, l’Ordonnance Cabochienne préparée par l’Université de Paris et contenant en 258 articles une
véritable charte constitutionnelle tendant au contrôle de la monarchie. (L’ordonnance est révoquée quelques mois après). Pendant la folie
intermittente du roi, les membres de la famille royale se disputent le pouvoir alors que la guerre continue toujours. Une farouche guerre
civile oppose le parti des Bourguignons, mené par l’oncle du roi Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, à celui des Armagnacs, conduit par
le duc d’Orléans, frère du roi. Les Bourguignons contrôlent la région parisienne, s’alliant le cas échéant avec les Anglais ; les Armagnacs,
recrutés plutôt dans le Sud-Ouest, en Bretagne et en Lorraine, sont partisans de l’indépendance française. En 1420 est signé le « honteux »
traité de Troyes : le roi fou, circonvenu par la reine Isabeau de Bavière, déshérite son fils Charles et nomme son gendre, le roi d’Angleterre
Henri V, régent du royaume de France et héritier de la couronne.
Deux ans plus tard, en 1422, meurent coup sur coup Henri V et Charles VI. Le jeune Henri VI, roi d’Angleterre, et en principe
également roi de France, étant âgé seulement d’un an, c’est son oncle, le duc de Bedford, qui devient régent. La lutte s’engage entre les
Anglais qui occupent tout le nord de la Loire, et le jeune dauphin Charles VII, le « petit roi de Bourges » (où il s’est installé pour
reconquérir la couronne), déshérité par son père. La lutte est indécise jusqu’en 1429, date de l’entrée en action de Jeanne d’Arc