Introduction
Rappelons d’abord que nous parlons exclusivement du travail du sexe exercé par
des femmes adultes. La question de la prostitution ou d’autres formes de travail
sexuel exécuté par des mineures amène des enjeux différents.
Depuis maintenant vingt ans, les mouvements féministes mondiaux débattent les enjeux du travail
du sexe
et de la prostitution sans arriver à de réels consensus. Au Québec, les derniers grands
débats se sont déroulés dans les années soixante-dix et ont provoqué une division au sein des
féministes, entre les groupes de défense des travailleuses du sexe et certaines alliées, d'une part, et
la plupart des autres groupes de femmes, d'autre part. Depuis lors, très peu de discussions ont eu
lieu.
Depuis, les groupes de femmes impliqués dans la Marche mondiale des femmes et les travailleuses
du sexe du Québec tentent un rapprochement. Étant préoccupé par la situation de toutes les
femmes, le Comité violence de la Coalition nationale des femmes contre la pauvreté et la violence a
décidé d'aborder cette problématique. Un des objectifs de la Marche est de soutenir les luttes des
femmes particulièrement stigmatisées et discriminées telles que les travailleuses du sexe. Il n’y a
pas unanimité entre les féministes, au Québec comme ailleurs, quant au travail du sexe. Comme
vous le verrez dans ce texte et dans l’annexe, les opinions et analyses divergent énormément quant
à l’explication des origines du travail du sexe et de ses causes, ainsi que de ses répercussions sur
les femmes et les hommes qui le pratiquent ou y ont recours.
Bien que plusieurs femmes ressentent un profond malaise en regard du travail du sexe, elles
demeurent généralement malgré tout solidaires de la situation vécue par les travailleuses
concernées. Nous pensons que l’ambivalence qui traverse le mouvement féministe face au travail
du sexe ne doit pas nous empêcher de travailler à améliorer les conditions de vie de ces
travailleuses par l'apport de nouvelles solutions féministes. Les féministes de toutes allégeances se
sont battues pour le respect des droits fondamentaux de toutes les femmes. Malheureusement des
femmes, encore aujourd’hui, vivent une double ou une triple discrimination, que ce soit à cause de
leur orientation sexuelle, de leur condition physique, de leur origine ethnique, ou du travail qu’elles
exercent, comme c’est le cas des travailleuses du sexe.
La plupart des femmes reconnaissent que la pauvreté et la violence qui caractérisent les conditions
de vie des travailleuses du sexe sont inacceptables. C'est à partir de notre expérience commune,
comme femmes, de la pauvreté et de la violence que nous vous proposons de travailler. Nous (du
Comité violence) croyons indispensable de faire une distinction importante entre les positions que
nous pouvons avoir, toutes et chacune, quant au travail du sexe et les préoccupations que nous
avons face aux conditions de vie et de travail des travailleuses. Nous vous invitons à réfléchir et à
débattre dans cette perspective avec vos amies, vos collègues de travail et les militantes dans vos
organisations. Tous les débats certes nécessaires au sujet du travail du sexe ne se feront donc pas
lors de l'adoption de la revendication pour la Marche québécoise. Nous entamerons la discussion et
Définition du travail du sexe : Toute activité où il y a échange d'argent ou de biens (y compris de la drogue)
contre un ou des services sexuels. Le travail du sexe comprend la prostitution de rue, les services d'escortes,
la danse nue, le massage érotique, le téléphone érotique commercial, le fait d'agir à titre de modèle ou
d'actrice pour des photos ou des films érotiques ou pornographiques.