2 ème partie Administration générale du territoire lundi

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André CHASSAIGNE
Député du Puy-de-Dôme
Loi de finances pour 2012 – 2ème partie
Administration générale du territoire
lundi 14 novembre 2011 – 2ème séance
Explication de vote
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, voici donc un budget central
dans la bonne conduite des politiques publiques et le respect de l’intérêt général !
Qu’il y ait une hausse due à l’organisation d’élections majeures en 2012, il y va de notre
démocratie, mais comment cautionner, même en période de crise, la baisse affectant le
fonctionnement de nos administrations préfectorales, d’autant que les réductions déjà
drastiques dont nous sommes témoins aujourd’hui pourraient s’aggraver, à en croire
l’alarmisme du Premier ministre ?
La semaine dernière, notre collègue Marc Le Fur se félicitait qu’entre 2009 et 2011, il n’ait
été procédé – je le cite – qu’à un recrutement pour quatre, voire cinq départs à la retraite…
Cela va bien au-delà du non-remplacement d’un poste sur deux, qui est la règle.
La majorité continue de présenter la révision générale des politiques publiques comme étant
destinée – je le cite toujours – à mieux satisfaire les usagers, à dynamiser les politiques
publiques sur le territoire, à réaliser un gain de productivité grâce à une organisation plus
performante des services, et à s’en satisfaire !
M. le Fur, toujours, insiste sur le souci constant d’améliorer le service rendu, et rappelle les
délais courts de délivrance des passeports. Nous ne vivons décidément pas dans le même
monde !
En Seine-Saint-Denis, par exemple, les cartes nationales d’identité, les passeports ou encore
les titres de séjour obligent à une très longue attente. Je ne parle même pas de la manière dont
sont traités les étrangers – qu’ils soient en situation régulière ou irrégulière –, car ils ne
parviennent plus à déposer leur dossier ou à obtenir un rendez-vous auprès des services. Ils
sont systématiquement renvoyés vers des plateformes téléphoniques où, au mieux, ils
attendent très patiemment et, au pire, voient leur communication coupée après de longs
moments d’attente. De la même manière, ils sont renvoyés vers des services Internet qui ne
fonctionnent pas ou qui ne disposent pas des informations nécessaires au traitement du
dossier.
En Seine-Saint-Denis – mais il en est ainsi dans nombre de villes –, la seule évocation de la
préfecture de Bobigny suscite les pires cauchemars, une vision kafkaïenne de l’administration,
aussi lente qu’inefficace !
Aux interminables files d’attente qu’il faut prendre dès quatre heures du matin pour que sa
requête soit éventuellement prise en compte vient s’ajouter l’humiliation de voir cette dernière
rejetée avant même qu’elle ne soit instruite. Nous ne comptons plus les cas où le dossier ne
peut être déposé sans raison valable : un jour, le nombre de dossiers acceptés est fixé à vingt ;
un autre, il faut remplir tel critère ; un autre encore, ce sont des critères temporels qui entrent
en ligne de compte. L’humiliation est totale, l’incompréhension majeure et l’image de notre
République dégradée au plus haut point !
L’obligation d’instruction de toute demande, qui répond à des critères légaux, n’est plus de
mise et illustre un grave dysfonctionnement. Là où l’État devrait être fort pour faire face à des
demandes nombreuses, il ne cesse de s’affaiblir.
D’ailleurs, dans son dernier bilan annuel remis le 21 mars 2011, le Médiateur de la
République va dans le même sens en dressant un sévère bilan de l’administration : « Le
service public ne porte plus son nom. Contacter les administrations est devenu compliqué.
L’administration a perdu sa capacité à faire du sur-mesure pour les personnes en difficulté »
déplore Jean-Paul Delevoye, qui regrette par ailleurs les « restrictions budgétaires », le
manque de moyens et de personnel qui se traduisent par « un service dégradé, de plus en plus
complexe et de moins en moins accessible ».
Jérôme Lambert lui-même reprenait les propos de Jean-François Verdier, directeur général de
l’administration et de la fonction publique, qui estimait que, « dans certaines préfectures ou
sous-préfectures, on est arrivé, en termes de réduction d’effectifs, à la limite au-delà de
laquelle certaines missions ne peuvent plus être remplies ». Je pourrais vous citer l’exemple
de la sous-préfecture d’Ambert dans le Puy-de-dôme, où, à la suite de la révision générale des
politiques publiques, on n’assure plus le service des cartes grises. La population, qui est âgée,
modeste, qui achète des voitures d’occasion et qui en change souvent, doit se rendre à
Clermont-Ferrand, à quatre-vingts kilomètres, ou à Thiers, à cinquante kilomètres, pour
obtenir une carte grise. Est-ce acceptable ?
Tous ces signes venus de l’intérieur du système devraient vous alarmer. Au lieu de quoi, vous
utilisez la crise pour couper plus encore dans les caisses de l’État, au détriment des secteurs
qu’il faudrait protéger afin que le plus grand nombre soit lui-même protégé.
Nous pensons au contraire que la politique doit reprendre le dessus sur les seuls impératifs
économiques et financiers. La garantie d’un traitement égalitaire des citoyens, quels que
soient les territoires où ils habitent, leur situation sociale et économique, est un rempart
majeur contre les effets de la crise dans la société. Protégés dans leurs droits fondamentaux
par une République respectueuse, les citoyens se sentent plus forts et plus confiants.
La baisse des crédits adossée à une imparable RGPP régule le désengagement de l’État. Cela
va à l’encontre d’une certaine idée de l’État dans l’exercice de ses missions de service public.
C’est pourquoi nous ne voterons pas ce budget. En disant cela, je pense aux personnes âgées
de cet arrondissement enclavé qui, dans leur sous-préfecture, ne peuvent plus obtenir leur
carte grise alors que, dans d’autres secteurs, ce service est maintenu.
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