Sommaire :
Editorial
L’Algérie et la COP21, espoirs et déceptions
Ewa Berezowska-Azzag
p.1
>
Changement climatique et ses effets sur la ville.
Assia Fernini-Haffif
p.4
>
Climat et ville, le couple infernal.
Ewa Berezowska-Azzag
p.9
Dossier
Alger et changements climatiques, quelques contributions de la recherche.
p.12
Mazia Chaker
> Optimisation du métabolisme urbain à Alger.
p.13
Leila Lalaoui
> Prospective sur les risques d’inondation et de submersion marine des communes
côtières d’Alger.
p.16
Meriem Naimi-Ait Aoudia
> Capacité de charge hydrique à Alger face aux changements climatiques.
p.19
Asma Bouattou
> Rafraichissement urbain pour adaptation au futur climat local.
p.22
Mohamed Srir
> Oued El-Harrach, corridor écologique au service d’adaptation climatique.
p.25
Soufiane Boukarta
> Densité, énergie et changements climatiques, quelle résilience ?
p.28
Nour El Houda Baba Slimane
> Rentabilité économique des actions de maitrise d’énergie dans le secteur
résidentiel en Algérie.
p.30
Houda Saci
> Agriculture urbaine au service de sécurité alimentaire.
p.33
Infos VUDD
Textes de lois / Prix national de la ville verte / Energies renouvelables / Echos de la
COP21 / Appel à contribution / Séminaire / Soutenance Thèse / Publication
d’ouvrage.
p.35
[LE CLIMAT
DANS TOUS SES ETATS]
Newsletter
VUDD
N°
2
. Mars 2016
Ecole Polytechnique d’Architecture et d’Urbanisme
Laboratoire Ville Urbanisme etveloppement Durable
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Newsletter VUDD 2, mars 2016
L’Algérie et la COP21, espoirs et déceptions
Par Ewa BEREZOWSKA-AZZAG, Professeur
Chef d’axe Qualité Urbaine, Environnement et Développement Durable, QUEDD, VUDD,
EPAU Alger
La 21e Conférence des Parties sur le Climat COP21 tenue
à Paris du 30 au 13 décembre a clôturé sous
applaudissements nourris l'année 2015, avec la signature
d'un accord âprement négocié entre les 196 pays
participants, dont 195 l'ont finalement approuvé. Non
contraignant, financé seulement à partir de 2020, cet
accord est cependant loin des nécessités d'action
immédiate qu'impose la trajectoire actuelle qui nous
mènerait vers C de réchauffement à l'horizon 2050, jugé
catastrophique par le GIEC. Il ne sert à rien de se
lamenter aujourd'hui sur l'inertie habituelle des Etats qui,
bien qu'adhérents aux principes de l'accord, sont obligés
de négocier en coulisses en fonction des enjeux des
multinationales du marché énergétique mondial ou en
fonction des différences des objectifs nationaux de
développement.
L'objectif central commun finalement adopté par la COP21 est de contenir les changements
climatiques en dessous de C et de poursuivre l'effort pour limiter l'élévation de température à
1,5°C par rapport à la période préindustrielle, à l'horizon 2050. Les pays développés devraient
ainsi montrer la voie et les pays en voie de développement continuer à accroître leurs efforts
d'atténuation. L'adaptation est reconnue comme nécessaire, mais la revue du dispositif de l'adaptation
est différée pour 2017 (Rahmani, 2015). Pourtant, sans l’effort d'adaptation oriensur l'économie de
l'eau, la mutation de l'agriculture, la maîtrise de l'énergie ou la protection des milieux fragiles, des
grandes catastrophes nous attendent.
La contribution initiale de l'Algérie, proposée à la COP21, adoptée par le Conseil des Ministres le 24
mai 2015 et engagée sur la riode 2021-2030 (CPDN, 2015), concerne essentiellement 6 secteurs-
clés: l'énergie, l'industrie, le transport, l'agriculture et les forêts, le bâtiment et l'environnement. Cette
feuille de route a été adoptée définitivement par le Conseil Interministériel le 3 septembre 2015, à
l'issue d'une large consultation intersectorielle avec la participation de la société civile lors de la
Conférence Nationale de Concertation sur le Climat du 28 juillet 2015 (collectivités locales,
associations économiques, socioprofessionnelles, environnementales, acteurs institutionnels et socio-
économiques).
L'expo des motifs de la proposition mentionne le contexte difficile dans lequel se trouve
actuellement l'Algérie. A l'instar des pays de la région méditerranéenne et de l'Afrique, l'Algérie est
confrontée aux fis liés à la curité alimentaire, à l'affaiblissement de la résilience de ses
écosystèmes naturels, aux risques majeurs et à la raréfaction des ressources naturelles. Les crises
énergétique et économique, conjuguées à une forte croissance démographique qui augmente les
besoins d'année en année, compromettent son développement socioéconomique futur. Pourtant, selon
le document présenté, des actions d'atténuation sont déjà en cours en Algérie, par exemple avec la
réalisation des centrales hybrides ou la diminution des émissions des gaz torchés.
2
Newsletter VUDD 2, mars 2016
La proposition algérienne évoque d'abord une rie des mesures d'atténuation (voir le tableau 1), se
référant au scénario Business As Usual BAU du 4e rapport du GIEC (2007), relatives à l'émission des
GES (CO2, CH4 et N2O). Une réduction des émissions de ces gaz de 7 à 22% à l'horizon 2030 est
prévue, les 7% devant être réalisés avec les moyens nationaux, le reste étant subordonné aux soutiens
financiers extérieurs. L'effort est réparti entre les activités énergétiques, industrielles, agricoles,
forestières et de gestion des déchets. La mise en place des instruments spécifiques de planification est
prévue sous l’égide de l’ANCC (Plan National Climat PNC, PNAE-DD, système national de
Mesurabilité, de Reporting et de rification MRV sur 2016-2020). Il s'agit donc d'agir à la source
des émissions. Mais le programme semble imprécis, ne propose pas d'actions concrètes et ne fixe pas
d’échéances contraignantes au niveau national, bien qu'une Stratégie et un Plan d'Action National
pour le Climat aient été élaborés en 2001 (voir le projet national ALG/98/G31, Communication
nationale initiale, mars 2001, financé dans le cadre du Fonds Mondial de l'Environnement FEM
conformément à la COP de Genève en 1996) et qu'un Plan National Climat ait été propoen 2013
par le Ministère de Ressources en Eau et de l'Environnement MREE avec l'aide de l'agence de
coopération allemande GIZ. Enfin, un ComiNational Climat CNC installé en juillet 2015 à Alger,
auprès du Ministère en charge de l'Environnement, renforce le dispositif institutionnel national pour
assurer la coordination, le suivi et l'évaluation des politiques et programmes nationaux relatifs aux CC.
Tableau 1. Actions phares d'atténuation par secteur (2021-2030)
4 piliers d'atténuation
Secteur de gouvernance
De conception et de recherche (ANCC)
De coordination et de suivi (CNC)
De planification (Plan National Climat PNC, MEAT)
De vérification (système MRV)
Secteur de l'Energie
27% d'intégration des Energies Renouvelables dans l'électricité à 2030
Généralisation de l'éclairage performant (HPE)
Isolation thermique de logement
Augmentation des parts du GPL et du GN dans les carburants
Réduction du volume des gaz torchés à moins de 1% à 2030
Secteur des Déchets
Valorisation des déchets
Compostage des déchets organiques et verts
Valorisation énergétique du méthane des centres d'enfouissement technique et des
stations de traitement des eaux usées
Secteur des Forêts
Boisement et reboisement
Prévention des incendies de forêts
Modernisation des moyens de lutte contre les incendies
Secteurs d'information,
d'éducation et de formation
Information, sensibilisation et communication sur les enjeux climatiques
Programme national d'éducation, de formation et de recherche sur les changements
climatiques
Source: CPDN, Algérie, 2015
Pour le volet d'adaptation, le document provisoire ne va pas suffisamment en profondeur. L'objectif
principal est la promotion d'une société et d'une économie plus résiliente aux effets des CC, avec la
priorité à la protection des populations, préservation des ressources naturelles et des infrastructures
contre les risques des phénomènes extrêmes. Les secteurs particulièrement concernés sont, selon le
document, l'agriculture, l'hydraulique, la santé humaine et les transports. Cependant, si les mesures
d’adaptation sont mentionnées sommairement (voir le tableau 2), aucune n'est concrètement
développée. La ville, avec son cortège des effets néfastes dus à l'urbanisation, n'y est même pas
considérée et le secteur de l'habitat, de l'urbanisme et de la ville (MHUV) n'y figure pas comme acteur
d'adaptation. Or, c'est bien la ville qui est à l'origine de la majorité des émissions des GES et c'est bien
en ville que les effets des CC sont les plus catastrophiques, du fait de la concentration des enjeux.
Tableau 2. Mesures d'adaptation prévues par le Plan National Climat
Institutionnelles
Adaptation du cadre institutionnel
Renforcement des capacités institutionnelles et humaines pour la lutte contre les CC
Règlementaires
Adaptation du cadre règlementaire de planification et de gestion de la résilience des écosystèmes
Mise en place des moyens de financement des mesures d'adaptation spécifiques
Opérationnelles
Elaboration de plans régionaux et locaux d'adaptation aux CC
Mise en place d'un dispositif de veille et d'alerte
Renforcement des capacités pour la gestion des événements climatiques extrêmes
Source: CPDN, Algérie, 2015
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Newsletter VUDD 2, mars 2016
Suite à l'accord de Paris, à l'instar de tous les pays participants, l'Algérie devrait réajuster sa stratégie
climatique avant novembre 2016, en fonction des décisions prises par cet accord, dont l'entrée en
vigueur est soumise à la ratification par les pays signataires durant la période de 22 avril 2016 au 21
avril 2017. Pour la ratification, à l'instar d'autres pays en développement, l'Algérie réclame notamment
l'accès aux ressources financières extérieures sur le Fonds Vert et le Fonds pour l'Environnement
Mondial FEM des Nations Unies, qui doit mobiliser 100 milliards de dollars avant 2020. La question
de transfert de technologies propres, soulevée entre autres par l'Algérie comme l'une des conditions
pour la mise en œuvre d'une stratégie nationale efficace, n'a pas été résolue par la conférence en raison
du statut privé et des droits de propriété intellectuelle des brevets innovants, qui compliquent les
procédures de transfert (Rahmani, 2015). C'est donc plutôt le développement de la recherche locale
qui est explicitement encouragé, avec l'aide d'un Comité de Paris sur le renforcement des capacités
d'adaptation, d'atténuation, de la formation, de l'éducation et de la sensibilisation.
Etant donné que la responsabilité historique du pays en matière d'accumulation des GES n'est
nullement engagée, l'Algérie insiste sur l'absolue nécessité de respecter les trois droits fondamentaux:
droit au développement des peuples, droit à l'environnement pour tous et le respect des droits de
l'Homme, dans l'application de toute stratégie de lutte contre les changements climatiques au niveau
mondial, afin de dépasser les inégalités de développement héritées de l'histoire. Selon l'accord, qui
s'engage à respecter ces droits, les bilans des actions engagées devraient être produits par l'ensemble
des pays signataires, développés et en développement, tous les deux ans et sous contrôle d'un
mécanisme de transparence à mettre en place. L'évaluation des résultats obtenus sera, quant à elle,
effectuée tous les 5 ans, en rapport avec les scénarios du dernier 5e rapport du GIEC (2013-2014, 3
volumes).
Bien qu'encourageant, l'accord de Paris ne répond pas aux espoirs suscités par la COP21. Il met en
place un cadre général, mais sa mise en route réelle reste incertaine. Des difficultés majeures de sa
ratification par l’ensemble des pays signataires commencent à se manifester déjà. Dans ce contexte, le
dossier qui suit se veut apporter une modeste contribution à l'action, issue des réflexions développées
au sein du Laboratoire VUDD à travers les recherches en cours ou récemment soutenues.
Références:
* CPDN (2015), Contribution Prévue terminée au niveau National, CPDN-Algérie, RADP,
Premier Ministère, 03 septembre 2015, 11 pages
* Rahmani Ch., (2015), La conférence de Paris, l'accord pour le climat, Contribution de Chérif Rahmani
* MREE, (2013), Plan National Climat, Ministère des Ressources en Eaux et de l'Environnement, Alger
* MATE, (2001), Elaboration de la stratégie et du Plan d'Action National des changements climatiques,
Communication nationale initiale, mars 2001, Ministère de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement,
Alger, 155 pages
* www.cop21.gouv.fr; www.unfccc.int
Abréviations:
ANCC
Agence Nationale des Changements Climatiques
BAU
Business As Usual
CC
Changements Climatiques
CCNUCC
Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques
GES
Gaz à effet de serre
GIEC
Groupe Intergouvernemental d'Experts sur le Climat
CNC
Comité National Climat
COP21
21e Conférence des Parties
MHUV
Ministère de l’Habitat, de l’Urbanisme et de la Ville
MRV
Système national de Mesurabilité, de Reporting et de Vérification
PNAE-DD
Plan National d'Action pour l'Environnement et le Développement Durable
PNC
Plan National Climat
PRG
Potentiel de Réchauffement Global (GWP Global Warming Potential)
UNFCCC
United Nations Framework Convention on Climate Change
Changement climatique et ses effets sur la ville
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Newsletter VUDD 2, mars 2016
Changement climatique et
ses effets sur la ville.
Par Assia FERNINI- HAFFIF
Doctorante en urbanisme et environnement,
Maitre assistante, Laboratoire VUDD
Les villes sont des écosystèmes en constante
évolution. Divers changements les
formalisent : d’ordres démographiques,
économiques, culturels, technologiques et
autres. Ces perpétuelles mutations, quand elles
n’atteignent pas des niveaux néfastes pour la
ville, sont nécessairement des leviers de
développement, contrairement aux
changements climatiques qui font planer
différentes menaces sur la ville et exigent de
ce fait l’augmentation de la capaci de leur
résilience aux effets induits par ces
changements.
La nette augmentation du taux d’urbanisation
en Europe, puis dans le reste du monde au
lendemain de l’avènement de la révolution
industrielle, a été un tournant décisif dans
l’accroissement massif de la proportion des
citadins et donc de la dynamique des villes. Le
seuil de 60% de la population mondiale vivant
en ville vient d’être franchi, et ce taux ne cesse
d’augmenter, ce qui augure d’une
concentration évidente de risques urbains
générés par le changement climatique en
cours.
Les impacts du changement climatique sont
actuellement étudiés à partir de scénarios qui
font valoir la nécessité de se préparer à
l’occurrence des phénomènes extrêmes et
d’anticiper leurs impacts en milieu urbain.
Partant d’une hypothèse de réchauffement du
climat, l’un de ces scénarios envisage par
exemple dans les contextes urbains des
phénomènes extrêmes récurrents tels que
l’accroissement des ilots de chaleur urbains,
les vagues de chaleur et l’accroissement de la
pollution urbaine aux conséquences sanitaires
néfastes. Selon les chercheurs, « les niveaux
de pollution baissent, mais la morbidiet la
mortalité liées à cette pollution reposent sur
l’exposition continue aux polluants ; (…) la
qualité de l’air urbain dans 50 ans dépendra
des facteurs comme la mobilité, l’étalement
urbain, les technologies utilisées pour
répondre aux besoins en énergie ; (…) il est
probable, compte tenu de l’augmentation des
températures, que des risques de nuisances
soient cumulés, que les populations soient plus
sensibles, que des exigences de sécurité
environnementale soient plus fortes, que de
nouvelles méthodes de surveillance (micro-
capteurs, satellites, modèles) soient
nécessaires… » (Verdier, 2009).
Les changements climatiques affectent la
socié humaine dans sa globalité, leurs
impacts en milieu urbain, d’ordre sanitaire,
environnemental et économique, sont
inextricablement liés, complexes et se
conjuguent souvent en ville pour nérer des
risques multiples et compromettre le confort
urbain.
Les impacts sanitaires
Il a été prouvé que le changement climatique
influe essentiellement sur les populations
pauvres des villes, sur les résidents des zones
d’habitat informel et les autres groupes
sociaux vulnérables, telles que les femmes, les
enfants, les personnes âgées et les
handicapées. Parmi les impacts cus au
quotidien, figurent surtout ceux sur la santé
humaine, la qualité de vie en ville, la quali
de l’air et de l’eau, les moyens de subsistance
et particulièrement la nourriture, ainsi que les
biens matériels. Ces derniers sont nérés par
la fréquence des phénomènes météorologiques
extrêmes, tels que les élévations de
température, les submersions marines, les
précipitations accrues causant des inondations
et autres.
- La pollution atmosphérique, conséquence
des émissions du CO2
Les activités humaines, tels que le bâtiment, le
transport ou l’industrie, ont des effets sur
l’écosystème urbain à bien des égards. Elles
affectent la qualité de l’air, la quantité et la
qualité de l’eau et le sol. Une aggravation des
pollutions atmosphériques locales est causée
par certains polluants comme l’ozone, créés
par l’action de la chaleur et de la lumière du
soleil sur certains gaz d’échappement. De ce
fait les émissions dues au trafic automobile
entre autre sont coupables de la détérioration
de la qualité de l’air et lapparition de
maladies diverses conquentes à cette
pollution.
Les émissions de gaz à effet de serre (GES) se
sont considérablement accélérées depuis 1900,
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