Gestion des Frontières et Communautés Frontalières dans le Sahel Femmes, Droits humains et sécurité dans le commerce transfrontalier au Sahel 1 Table des matières Sigles Résumé Introduction 2 Sigles ALG : Autorité du Liptako Gourma CEDEAO : Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest CEEAC : Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale CEMAC : CEN-SAD CILSS ECOSIT : : : Communauté Economique et Monétaire des Etats de l’Afrique Centrale Communauté des Etats Sahélo Sahariens Comite Permanent Inter Etats de Lutte contre la Sécheresse au SAHEL Enquête sur la Consommation des Ménages et le Secteur Informel au Tchad Réseau Nigérien des Femmes Transformatrices, Artisanes, Commerçantes, Chefs d’Entreprises/Nouvelle Génération RENIFTACE/NG : SAFEM : Salon de l’Artisanat pour la Femme SODELAC : Société de Développement du Lac Tchad OMVS : Organisation pour la Mise en Œuvre du Fleuve Sénégal UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africaine UMA : Union du Maghreb Arabe 3 Résumé Le manque d’accès aux opportunités économiques notamment aux circuits de commercialisation : enclavement de certaines zones, absence d’infrastructure de stockage ou de transformation, manque d’information sur les marchés, faible organisation pour la vente des produits constitue un obstacle majeur à la participation économique des femmes. Les stratégies de développement et de promotion du genre n’ont pas toujours considéré et analysé cette contrainte essentielle. En effet, plus que pour les hommes, les projets se sont limités aux aspects de production sans considérer l’approche filière qui prend en compte tant l’amont que l’aval de la production. L’accès aux marchés reste un maillon faible qui limite l’émergence des femmes. 4 I- INTRODUCTION L’histoire de l’Afrique a été marquée par des échanges commerciaux entre différentes parties du continent. En effet, dès le XIIIème siècle, le négoce caravanier avait permis de réunir sur le plan économique des territoires allant du Maghreb aux zones soudaniennes 1. Ces échanges étaient dominés par les Touarègues qui maitrisaient beaucoup plus l’espace géographique et régulaient les échanges en imposant des taxes pour le passage, la protection ou l’escorte des caravaniers et de leurs marchandises. La colonisation va, par la suite, fortement modifier les pratiques commerciales de cette époque. Apres les indépendances, les nouvelles frontières vont être utilisées comme cadre d’échanges et de redynamisation des activités commerciales. De nouveaux espaces régionaux (CEDEAO, UEMOA, CEEAC, CEMAC, CEN-SAD, UMA, OMVS…) se créent pour transcender les clivages frontaliers et impulser l’intégration et le développement en facilitant les échanges entre les communautés. Le Sahel n’échappe pas à cette dynamique. Cette région mobilise l’attention de la communauté internationale depuis plusieurs décennies pour des questions humanitaires, économiques, politiques et sécuritaires. Cinq pays se retrouvent au centre de la mobilisation internationale en raison de leur plus grande vulnérabilité aux différentes crises qui secouent le Sahel. Ces pays regroupés dans le G52 Sahel, sont confrontés à des défis similaires qui freinent leur développement et les positionnent parmi les derniers en matière de développement humaind’après les indices du PNUD. En 2015, sur 188 pays, les pays du G5 Sahel se retrouvent respectivement à la 156 ème place (Mauritanie), 179ème (Mali), 183ème (Burkina Faso), 185ème (Tchad), 188ème (Niger) parmi les pays au développement humain faible.Le revenu par habitant représente en moyenne 59 % de celui del’Afrique sub-saharienne. Par ailleurs, malgré les efforts entrepris par ces Etats pour instaurer un environnement propice à l’égalité de genre suite à la prise de conscience de l’interrelation entre le développement durable et l’égalité entre les hommes et les femmes, force est de constater que, dans plusieurs domaines, les femmes continuent de subir des discriminations ; ce qui les rend plus vulnérables à la pauvreté. En effet, les inégalités structurelles font des femmes, les premières victimes des différentes crises économiques. Elles ont un accès limité aux services sociaux de base, au travail et à l’emploi. Dans le secteur formel, les femmes occupent 4 emplois sur 10 et gagnent en moyenne deux tiers du salaire de leurs collègues masculins. (African Gender Equality Index 2015). Pour améliorer leur condition de vie et celles de leur famille, elles ont été obligées d’investir le secteur commercial qui a été pendant longtemps dominé par les hommes. Ce faisant, elles bouleversent le paradigme social de leurs communautés qui fait de l’homme le représentant de l’autorité et le pourvoyeur de ressources au sein des ménages.En Afrique de l’ouest par exemple, les femmes, dans le commerce informel transfrontalier, emploient en moyenne 1,2 personnes dans leurs entreprises à domicile, et prennent en charge en moyenne 3,2 enfants. En plus de leurs enfants, elles soutiennent 3,1 personnes qui ne sont ni leurs enfants ni leurs conjoints (ONUFEMMES). 1 Julien Brachet, Le négoce caravanier au Sahara central : histoire, évolution des pratiques et enjeux chez les Touaregs Kel Aïr (Niger), Cahier d’outre-mer, Avril-Septembre 2004 2 Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad, pays se trouvant au centre de la majorité des initiatives et stratégies de la communauté internationale dans le Sahel et qui en février 2014 se regroupés dans le G5 Sahel afin de coordonner leurs politiques de développement et de sécurité 5 Les femmes du Sahel s’affirment comme des acteurs économiques, poussées vers le commerce et surtout le petit commerce et le commerce transfrontalier par l’absence d’alternatives. Les activités commerciales transfrontalières se font dans des contextes ou les femmes font face à une multitude de défis, allant du vol, du harcèlement et abus sexuels, de l'exploitation de plusieurs acteurs dans le circuit commercial, commerçants masculins et des fonctionnaires publics, au cadre juridiques, politiques et institutionnels insensibles au genre. A ces difficultés rencontrées par les femmes dans différentes parties du continent, s’ajoute pour les femmes commerçantes du Sahel, les questions sécuritaires liées à la gestion des frontières et des zones frontalières dans le Sahel. Les zones frontalières dans les pays du G5 Sahel sont de grands espaces qui échappent au contrôle des Etats. Elles deviennent des lieux de transit pour des acteurs non étatiques violents, des groupes terroristes et groupes criminels impliqués dans le trafic illicite d'armes, de drogues et d'êtres humains. Les activités criminelles dans les espaces frontaliers ont amené les Etats à prendre des mesures sécuritaires imposant des restrictions à la libre circulation des personnes et des biens, affectant les communautés locales, en particulier les femmes commerçantes dans les régions frontalières. C’est dans ce contexte qu’ONUFEMMES et le PNUD, dans le cadre de la Stratégie des Nations Unies pour le Sahel, ont initié la présente étude dans les pays du G5 sahel. Cette étude porte essentiellement sur les femmes impliquées dans le commerce transfrontalier dans l’espace des 5 pays membres du G5 Sahel (Mali, Mauritanie, Burkina Faso, Niger, Tchad). Son objectif est de trouver des réponsesaux questions suivantes : Quelle est l'ampleur et la portée des activités commerciales transfrontalières des femmes dans la région du Sahel et quelles relations entretiennent t’elles avec les services administratifs?Quel est l'impact de l’insécurité actuelle dans les zones frontalières du Sahel sur les moyens de subsistance des femmes commerçantes transfrontalières et sur leurs familles et leurs communautés? Quelles priorités doivent être considérées dans les secteurs de l’éducation/formation, ressources et au crédit, communication/information, sécurité, transport et infrastructure, réseautage, afin de mettre en place un environnement favorable pour les commerçantes transfrontalières? 1-1- OBJECTIFS DE L’ETUDE Objectif général Cette étude vise à proposer une analyse permettant de mieux cerner l’ampleur et la portée des activités des femmes dans le commerce transfrontalier dans les pays du G5 Sahel - - - Objectifs spécifiques Mieux faire connaître les contributions des femmes commerçantes transfrontalières au développement économique et à la promotion de la cohésion sociale dans les zones frontalières de Sahel ; Identifier les possibilités d'atténuation des effets des conflits, de l'insécurité et de l'extrémisme violent sur les activités de subsistance des femmes commerçantes transfrontalières dans le Sahel ; Identifier les stratégies et possibilités pour favoriser un environnement propice à l’autonomisation des femmes commerçantes transfrontalières dans le Sahel. 6 3 1-2- APPROCHE METHODOLOGIQUE Le présent document se fonde sur l’analyse des données recueillies grâce à la revue documentaire et des entrevues réalisées auprès des acteurs clés du 02 Février au 21 Mars à Dakar (Sénégal), Niamey et Diffa (Niger), Ouagadougou et Dori (Burkina Faso -31), Ndjamena et Bol (Tchad), Nouakchott (Mauritanie), Bamako et Gogui (Nioro du Sahel) (Mali). Au total ….personnes ont été interviewees dont femmes et hommes. Revue documentaire La revue documentaire a portéen un premier lieu sur l’analyse des instruments juridiques internationaux, régionaux que nationaux telles que le Pacte International sur les Droits Economiques et Sociaux Culturels, la Convention sur l’Elimination de toutes les Discriminations à l’Egard des Femmes, le Protocole àla Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux Droits de la Femme en Afrique, les codes du commerce, des douanes, des impôts des 5 pays. Elle a été poursuivie par celle des politiques nationales des développements ou de croissance accélérée, les politiques ou stratégies nationales genre, ainsi que les politiques commerciales. Les résultats des derniers recensements de la population et de l’habitat des 5 pays concernés par la recherche, les données statistiques (répertoires spécialisées, QUIBB, MICS, IDISA …) ont mis à contribution ainsi que les données sectorielles des différentes institutions concernées. Les rapports des donateurs et des partenaires techniques et financiers, les publications de la CEDEAO, de l’UEMOA, de la CEMAC, de la BAD, de la Banque Mondiale sur le commerce transfrontalier, les publications sur le commerce informel dans certains pays du Sahel, les rapports sur la CEDEF et le protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux droits de la femme en Afrique, les RNDH et RMDH antérieurs disponibles et les rapports OMD des pays du Sahel ont mis à contribution. Les informations descriptives sur les différentes dimensions des activités commerciales des femmes au niveau des frontières ont privilégiées. Les études similaires conduites dans d’autres pays, d’autres régions ont également nourri l’analyse. Il s’agit entre autres des études suivantes : - Women and Cross Border Trade Project in Nigeria, (Femmes et projet de commerce transfrontalier au Nigeria) LIFI, 2012, Libéralisation commerciale et commerce transfrontalier: les expériences des commerçantes et des femmes entrepreneurs, CEDEAO, Part 1, 2007 ; Part 2, 2009 ; USAID, Les rapports commerciaux des femmes : une évaluation préliminaire du commerce transfrontalier féminin en Afrique Occidentale, 2000 ; Dr SOULE Bio Goura et Dr BORGUI Yerima, Le Genre, les femmes et le Commerce transfrontalier en Afrique, Echanges régionaux, 2010 International Alert, Kristof Titeca avec Célestin Kimanuka, Marcher dans l’obscurité: Le commerce informel transfrontalier dans la région des Grands Lacs ; Septembre 2012 3 Le tableau des personnes interviewees se trouve en annexe 7 Collecte d’information L’approche qualitative a été privilégiée pour pouvoir appréhender de façon approfondie la question dans les 5 pays du Sahel. Elle nous a permis de rencontrer différentes catégories d’acteurs et de recueillir leurs perceptions sur les activités des femmes dans le commerce transfrontalier. La collecte d’information a été faite dans les cinq pays grâce à des entrevues individuelles et des entretiens de groupes dans les cinq pays. Les focus group ont eu lieu avec les femmes commerçantes à Niamey (08), Dori (12), Bol (25) et Gogui (13). A Diffa, pour des raisons d’agenda des femmes, le focus group n’a pu être réalisé avec les femmes commerçantes. Aux lieu et place, des entrevues individuelles ont été réalisées avec (05) femmes commerçantes. Les entrevues individuelles avec des représentants des ministères en charge du genre et de la promotion de la femme, du commerce, de l’administration territoriale, de la sécurité, les représentants des services de gestion des frontières, police, douane, gendarmerie, des leaders communautaires religieux et traditionnels ; des responsables des organisations de la société civile (OSC); des femmes commerçantes; des organisations internationales et des partenaires techniques et financiers. La collecte des données s’est faite avec l’appui des assistants nationaux au Burkina Faso, au Tchad et en Mauritanie. Au Mali et au Niger, cet appui a été fait par des personnes déléguées par les bureaux d’ONUFEMMES. La collecte a été faite avec l’appui des bureaux de ONUFEMMES, des VNU en charge de la mise en œuvre des projets du PNUD dans les zones frontalières de mise en œuvre du projet Dori (Burkina Faso) et Diffa (Niger). Les points focaux du PNUD pour le projet « Gestion des Frontières et des Communautés transfrontalières » ont apporté leur appui logistique et facilité les contacts avec les acteurs dans les cinq pays. L’entreprise ne fut pas aisée tant les informations ne sont pas précises, complètes et documentées. Les résultats présentés ne peuvent prétendre décrire la réalité. Ce sont essentiellement les perceptions des acteurs rencontrés étayées par des données produites au niveau national. Dans le Liptako Gourma, la région frontalière Burkina Faso –Niger, dans la région du Lac Tchad, les régions frontalières Tchad – Niger et Niger- Tchad, la zone frontalière entre la Mauritanie et le Mali du coté de Nioro du Sahel. La zone du Lac Tchad a été privilégiée compte tenu de la multiplicité des activités terroristes dans la zone.Toutefois, des disponibilités en moyens de transports sécurisés nous ont empêché la mission de se rendre dans la zone de Bassikounou (Zone frontalière Mauritanie – Mali). La solution alternative a été de faire des entrevues à des personnes ressources ayant une bonne connaissance des réalités de cette zone. L’accès aux postes frontières a été restreint compte tenu des problèmes sécuritaires qui prévalaient dans les pays du G5. La mission n’a pu toucher que le seul poste frontière de Gogui entre la Mauritanie et le Mali, une zone frontalière poste qui constitue une illustration parfaite du commerce transfrontalier de proximité. Elaboration du rapport Le rapport est la résultante du croisement des informations provenant des différentes sources et d’une analyse critique des témoignages recueillis.Il est reparti en sept points : l’introduction à l’étude (1), l’analyse du contexte (2), l’autonomisation économique de la 8 femme et les politiques commerciales(3), femmes et échanges transfrontaliers dans le Sahel (4), les perceptions de la contribution des femmes au développement par les différents acteurs (5), les défis auxquels sont confrontées les femmes dans le commerce transfrontalier (6) et une conclusion qui fait la synthèse des principaux résultats en présentant les recommandations aux acteurs (7). II- contexte de l’étude 2.1. Profil démographique La région du Sahel est géographiquement située entre le désert du Sahara au nord et les savanes soudaniennes au Sud. C’est une région aride, vaste mais très peu peuplée. Les pays du G5 Sahel, objet de cette étude, totalisent une superficie de 5 096 200 Km2 avec une population estimée à environ 75 625 4344 d’habitants soit une densité de 14 hbts/km2. Cette densité n’est pas homogène et varie d’un pays à un autre. Le Tchad et le Niger ont une superficie de près de 1,3 millions de km2 chacun, et sont les 5ème et 6ème pays les plus étendus du continent. En termes de densités, ils ont respectivement 8,6 et 12,4 habitants/km2. Ils sont suivis en termes de superficie par le Mali et la Mauritanie avec des densités de 8 et 3 habitants/km2, selon les derniers chiffres des instituts nationaux de statistiques. Le Burkina Faso constitue une exception avec une densité de 51,8 hbts/km 2 selon les données du dernier recensement publié par l’Institut National de la Statistique et de la Démographie (2006). Les pays du G5 Sahel, à l’instar de plusieurs pays africains, ont une population inégalement répartie sur le territoire. La majeure partie de la population est concentrée dans les centres urbains, surtout dans les capitales et leurs périphéries. Bien que les densités soient relativement faibles dans les zones rurales, elles sont plutôt fortes autour des capitales comparativement au reste du territoire. En ce qui concerne les zones frontalières, elles présentent les mêmes caractéristiques que le reste des zones rurales des différents pays visés. La population de Dori, zone frontalière du Liptako au Burkina Faso présente une densité de 38,6 hbts/km2 tandis qu’au niveau national, on note une densité de 51,8 hbts/km2 (INDS, 2006). À Diffa, la densité est de 2,9 hbts/km2 tandis qu’elle est de 12,4 hbts/km2 pour l’ensemble du Niger (INS/MEF, 2011). Tableau 1 : Évolution du profil démographique de Diffa ANNÉE 2010 2011 Pays/région Niger Diffa Niger Diffa Population en âge de travailler (15-65 ans) 45% 47% 48% 47% 55% 53% 52% 53% 120% 112% 108% 112% Population dépendante Taux de dépendance démographique Source : INS/MEF (2010 ; 2011) 4 Calcul effectué d’après les données du Département des Affaires Economiques et Sociales des Nations Unies. 9 La population de ces différentes zones est relativement jeune et la majorité a moins de 15 ans. Dans les 5 pays, on note une forte dépendance de cette population jeune qui est supportée par la classe en âge de travailler. Au Tchad par exemple, selon les données du dernier recensement (2009), la population jeune est estimée à 50,9 % de la population tandis que celle en âge de travailler est estimée à 44,9%. La population âgée de 15 ans et plus est estimée à 5 205 789 personnes. Sa répartition par milieu de résidence fait ressortir un poids assez important du milieu rural où une grande majorité de la population résidant dans ce pays vit. En effet, le poids démographique de la population rurale est estimé à 80,3%. Selon le lieu de résidence, la ville de N’Djamena abrite environ 9% de cette population contre seulement 10,7% pour les autres milieux urbains. Ce qui donne à l’ensemble urbain un poids démographique de 19,7%. Ce poids démographique constitue une charge pour les actifs de ce pays malgré le constat d’une croissance soutenue ces dernières années. Cette pression démographique est accentuée dans les zones rurales frontalières des pays du G5 Sahel. Le tableau 1 présente l’évolution du profil démographique de Diffa au Niger par rapport à l’ensemble du pays. Le taux de dépendance démographique est en recul pour l’ensemble du pays tandis qu’elle demeure constante et plus élevée pour la zone de Diffa. Les indicateurs statistiques des zones frontalières des autres pays du G5 Sahel présentent les mêmes tendances. De façon générale, l’un des principaux défis du Sahel réside dans l’inversion des tendances démographiques pour une meilleure redistribution des fruits de la croissance. Le taux de dépendance démographique devra être réduit à travers des politiques appropriées en matière de gouvernance, d’éducation et de santé. 2.2. Le contexte économique L’économie des 5 pays cibles est essentiellement basée sur le secteur primaire. Il s’agit essentiellement de l’exploitation des ressources minières et de la production agricole. Malgré une tendance à la décroissance, la contribution du secteur agricoleau PIB est encore importante. Elle représente environ 40% sauf pour la Mauritanie ou la part du secteur agricole dans le PIB est estimée à moins de 20% (Perspectives économiques futures du Sahel, Construire des résiliences, Pierre Jacquemot, Septembre 2015). Les activités de transformation du secteur secondaire ainsi que le secteur tertiaire occupent une place moins importante. Les flux économiques du secteur tertiaire dans tous ces pays demeurent sous-comptabilisés à cause d’une forte présence de l’économie informelle. Dans les zones frontalières, la structure économique y est également désarticulée et ne permet pas de présenter les statistiques relatives au commerce transfrontalier. Selon la Banque mondiale, la prédominance du secteur informel s'expliquerait par de nombreux facteurs, comme la charge fiscale disproportionnée pour les petits exploitants, les barrières administratives, et la faible application des lois et règlements. Tchad Au Tchad, l’économie est fortement axée sur l’exploitation pétrolière et la production agricole. Selon les chiffres de la Banque Mondiale (2014), son PIB était de 1024 dollars par habitant. La faible pluviométrie de 2015 a entrainé une baisse de la production agricole. Cette baisse a été aggravée par la chute des cours du pétrole et la résurgence de nouvelles menaces sécuritaires. Les performances économiques du Tchad pourraient donc chuter pour l’année en cours surtout que les investissements dans les secteurs secondaire et tertiaire 10 n’ont pas permis au pays de modifier le profil de son économie. L’insécurité a également entrainé une hausse des coûts commerciaux et contribué à l’augmentation du taux d’inflation qui a atteint un niveau de 4,2% au mois de novembre 2015 (Banque Mondiale, 2015). Le commerce, d’une manière générale occupe plus les femmes des zones urbaines que celles des zones rurales ; 34,7% contre 3,7% (INSEED, ECOSIT3, 2011). Dans le commerce transfrontalier, il est noté une absence de données désagrégées par sexe et ces flux ne sont même pas comptabilisés dans l’économie nationale. Malgré la croissance des dernières années, le Tchad connaît des problèmes de redistribution des excédents. Répartition (en %) des emplois par secteur d’activité selon le milieu de résidence et le sexe au Tchad Urbain M F Rural Ens. M F Ensemble Ens. M F Ens. Secteur d’activités Agriculture 19.8% 22.8% 20.8% 85.4% 82% 83.9% 74.1% 74.6% 74.3% Industrie 15.7% 22.3% 17.9% 4.3% 11.6% 7.4% 6.2% 12.9% 9.1% Commerce 24.2% 34.7% 27.8% 4.1% 3.7% 3.9% 7.5% 7.6% 7.5% Services 40.4% 20.2% 33.4% 6.3% 2.7% 4.8% 12.1% 4.9% 9.1% Total 100 100 100 100 100 100 100 100 100 Source: INSEED, ECOSIT3, 2011 Niger Tout comme pour le Tchad, l’économie nigérienne est fortement orientée vers le secteur primaire. Les principales sources de revenus de l’État sont la production de pétrole, l’extraction de l’uranium et l’agriculture faiblement mécanisée. Le système agricole est conditionné par la nature du climat. Ces dernières années, le Niger a connu de bons niveaux de production, ce qui lui a permis d’avoir une croissance économique de 7,1% en 2014 contre 4,1% en 2013 (UEMOA, Rapport 2014 de la surveillance commerciale dans l’espace UEMOA).Malgré les défis sécuritaires, la croissance est estimée à 6,0% en 2015 et à 6,5% en 2016. Le commerce transfrontalier est pour l’essentielinformel et occupe une faible proportion de la population. L’économie nigérienne est fortement endettée et dépend énormément de l’aide extérieure. République Islamique de la Mauritanie L’économie de la Mauritanie est tirée par les secteurs de l’exploitation minière et de la pêche. L’activité industrielle est concentrée dans les wilayas de Nouadhibou, Nouakchott, Inchiri et Tiris Zemmour. Les activités agricoles et pastorales traditionnelles occupent la majeure partie de la population active et ont engendré deux modes de vie juxtaposés : en règle générale, les agriculteurs sont sédentaires tandis que les éleveurs sont nomades et se déplacent à longueur d’année à la recherche des pâturages dans un mouvement de transhumance pouvant les conduire dans les pays limitrophes comme le Mali et le Sénégal. Selon l’enquête nationale de référence sur l’emploi et le secteur informel de 2012, le taux d’activité, le taux d’activité de la population est à 46,63% en 2014 contre 44,3% en 2012, avec une forte disparité hommes (69%) femmes (27,47%). L'emploi informel représente 11 près de 75% de l'emploi total et environ 37% du PIB total (PNUD, 2007). Le chômage des femmes (19,28%) reste plus élevé que celui des hommes (9,92%). En milieu urbain, le taux de chômage des femmes urbaines est estimé à 24,76%, niveau supérieur à celui des hommes ruraux. En milieu rural, le constat est semblable avec un taux de chômage des femmes estimé à 11,72% contre 4,65% des hommes. L’économie doit être diversifiée pour relever les défis de développement. En 2014, le PIB par habitant est de 1 275 USD. Tableau : Estimation comparée de la contribution économique des hommes et des femmes par secteur d’activité Secteur d’activité 1988 1988 2000 2000 Hommes Femmes Hommes Femmes Agriculture Elevage 76,7% 23,3% 68,9% 31,4% Industrie Manufacture 76,7% 23,3% 60,7% 39,3% Commerce Secteur informel 76,0% 24,0% 77,2% 22,8% Source : RGHP 1988, 2000 Mali Au Mali, en 2015, la croissance de l’économie a chuté. Elle est passée de 7,2% en 2014 à 4,9%.. La croissance économique est portée principalement par les secteurs primaire et tertiaire. L’activité économique se déroulerait dans un contexte de maîtrise de l’évolution des prix. Le taux d’inflation annuel moyen est projeté à 2,1% contre 0,9 % en 2014. Les perspectives macroéconomiques à moyen terme sont favorables la reprise et l’économie devrait se consolider en 2016 avec des taux de croissance du PIB à 5,1%. Cette croissance devrait être de nouveau tirée par les secteurs agricole et tertiaire, outre le retour des investisseurs. Burkina Faso Malgré la crise politique et la baisse des cours de l’or et du coton au Burkina Faso, l’activité économique a enregistré en 2015 une croissance de 4,4%. Le secteur tertiaire a un niveau de croissance estimé à 5,2% pendant que les secteurs primaire et secondaire sont autour de 3,4%. Le taux d’inflation a été de 0,7% en 2015 contre -0,5% en 2014. Avec un niveau élevé de pauvreté, la gestion de la rente minière dans l'optique d'une croissance plus inclusive, reste le principal défi en matière de gestion des finances publiques. La bonne tenue des élections législatives et présidentielles devrait rassurer les investisseurs si toutefois, la sécurité est renforcée. 2.3. Profil Genre dans les pays du G5 Sahel Les femmes représentent environ 50,3% de la population totale au Burkina Faso et au Tchad, 50% au Mali, et 49,7% en Mauritanie et au Niger. Les réalités socio culturels créent des disparités entre les hommes et les femmes dans les domaines de l’éducation/formation, l’emploi et la sécurité sociale, des soins de santé et aux ressources. Indice de l’Egalite de genre5 2015 5 Indice mesurant l’égalité de genre sur la base de l’égalité dans les opportunités économiques, l’égalité dans le développement humain et l’égalité dans les lois et institutions sur une échelle de 0 à 100. 12 Rang Pays Score global Opportunités économiques Développement Lois et Humain institutions Score rang Score Rang Score Rang 21 Burkina Faso 56,6 63,3 23 60,1 31 46,4 22 44 Tchad 42,2 70,7 11 24,2 51 31,5 34 45 Niger 42,2 50,5 40 41,5 45 34,5 32 46 Mauritanie 41,9 53,2 35 58,6 33 13,9 47 50 Mali 32,2 50 46,7 42 21,3 43 33,4 Extrait des résultats de l’indice d’égalité de genre 2015, Groupe de la Banque Africaine de Développement, Autonomiser les femmes Africaines, Plan d’Action. Indice de l’Egalite du Genre en Afrique 2015. Education et formation D’une manière générale, le taux de scolarisation des filles est inférieur à celui des garçons. Cette disparité se retrouve au niveau de l’alphabétisation des adultes avec des écarts importants selon les milieux urbains et ruraux. Au Burkina Faso, des progrès ont été réalisées au cours de la dernière décennie en matière d’éducation de base. Le taux brut de scolarisation a augmenté passant de 44,4% en 2001 à 79.6% en 2011. Cette évolution a été remarquée également en matière de scolarisation des filles. Le TBA des filles a augmenté, passant de de 44,5% en 2002 à 83,8% en 2011 et le TBS est passé de 41% à 71,2% soit une augmentation de 74% environ. Il est note une réduction de la disparité du genre dans le secteur, le taux de masculinité est passe de 142 en 2001 à 112 en 2011. Le secteur de l’éducation non formelle a enregistré également une évolution. Toutefois, le taux d’alphabétisation demeure encore bas par rapport aux prévisions,49,8% en milieu urbain et de 10,8% en milieu rural. Quant à la formation professionnelle, moins de 20% des jeunes de 15-24 ans y ont accès.6 Au Mali, le Taux brut de scolarisation (TBS) a connu une évolution graduelle passant de 26% en 1990 à 69,70% en 2013, soit une multiplication par 2,68 en 23 ans. Cette évolution s’est faite avec une réduction de l’écart entre les filles et les garçons. Le TBS des garçons dans le primaire a été multiplié par 2,06 en passant de 33,2% en 1990 à 68,50% en 2013 tandis que celui des filles l’a été par 3,75 passant de 18,9% en 1990 à 70,90% en 2013. Donc, le TBS/filles progresse beaucoup plus vite que celui des garçons permettant ainsi d’améliorer progressivement le niveau de scolarisation des filles au Mali. Au primaire, la courbe a été inversée depuis 2010-2011 en faveur des filles qui étaient largement dominées par les garçons en 1990. Pour ce qui est de l’alphabétisation, le taux chez les personnes âgées de 15 à 24 ans est passé de 23,5% en 1998 à 38,7% en 2009 (INSTAT, 2011a) avec un indice de parité hommes/femmes de 0,636. Le taux d’alphabétisation des femmes étant de 30,4%, contre 47,8% pour les hommes. Des disparités sont notées selon le milieu (urbain : 53.2% et 6 Rapport national Beijing+20 ,2014 13 rural : 21.6%) et la classe sociale (ménages les plus riches : 48.6% et ménages les plus pauvres : 16.3%). En Mauritanie, à partir de 2004, le TBS est plus élevé chez les filles que les garçons au niveau du fondamental. Ainsi en 2008, une différence de 5 points est note entre le pourcentage des filles et celui des garçons. Le TBS des filles était de 93,5%. Cet accroissement ne s’est pas fait sentir au niveau secondaire, le TBS est de 32,7% pour les garçons et de 28,4% pour les filles. Des fortes disparités sont également notées entre le milieu urbain (53,5%) et le milieu rural (12,8%). Pour ce qui concerne l’éducation non formelle, 61,5% de la population âgée de 15ans et plus est alphabétisée. Ce pourcentage est de 50,3% en milieu rural contre 73,3% en milieu urbain. Une disparité est également notée en matière de genre, les hommes alphabétisés sont de 70,3% contre 54,4% de femmes. L’évolutiondu secteur de l’éducation est observée au Nigerégalement. Ainsi, entre 20082011, le taux brut de préscolarisation est passe de 2,5% à 6,3% en 2011. Le pourcentage de filles s’est également accru : de 48% en 2008/2009, ce taux passe à 50% en 2010/2011. D’une manière générale, de 1992 à 2012, le taux de scolarisation de la fille a considérablement augmenté, passant de 12,6% à 58,5%7 Au Tchad, l’indice de parité filles/garçon dans l’éducation est passé de 0,29 en 2000 à 0,32 en 2008‐2009. Dans l’enseignement primaire, 61,0% des garçons de 6‐15 ans fréquentent un établissement scolaire contre 48,7% pour les filles, soit un écart de 12,3 points pour les garçons. Au secondaire, l’écart entre les deux sexes s’est accentué, il est de 30,6 points, soit 57,5%pour les garçons contre 26,9% pour les filles. Dans le dernier groupe de 21‐24 ans relatif au supérieur, le niveau de scolarisation des garçons est supérieur de 23,6 points à celui des filles (37,5% contre 13,9%) Dans le domaine de l’Enseignement Technique et formation professionnelle, les filles représentent 38% des effectifs. Une faible proportion de filles est enregistré dans la branche industrielle alors que cette proportion est supérieur à 50% dans la filière commerciale qui comprend plus de 2/3 des effectifs de l’enseignement technique. Il est note une faible couverture géographique du secteur, sur les 23 régions que compte le Tchad, 13 seulement disposent d’une structure d’enseignement technique ou de formation professionnelle. Le taux d’analphabétisme est encore très élevé, En 2009, il est de 86% chez les femmes et de 69% chez les hommes. Santé Une mauvaise santé limite la capacité des individus de produire et de gagner leur vie. En Afrique les hommes et les femmes rencontrent des problèmes similaires quant à ce qui concerne l’accès aux services de santé, mais les femmes sont plus affectées quand il s’agit de la santé reproductive. La principale difficulté rencontrée dans le domaine sanitaire est la question de l’accessibilité. Elle se pose en termes d’accessibilité technique, financière géographique. Au niveau national, les indicateurs sectoriels indiquent que le nombre de centre de santé communautaire (CSCOM) a augmentéà partir de 2010. Toutefois, il est dénombré 131 aires de sante non encore doté de CSCOM. « La proportion de la population vivant à moins de 5 km d'un CSCOM fonctionnel a augmenté d’un point (58% en 2010 à 59% en 2011), pour une prévision de 64% dans le Programme de Développement Sanitaire et Social (PRODESS II) et dans le Cadre Stratégique de Croissance de Réduction de la Pauvrete 7 Sources : EDSN-MICS 1992, 1998, 2006, 2012, dans Rapport national Beijing+20 14 (CSCRP). La proportion de la population vivant dans un rayon de 15 Km a augmenté de 2 points (89% en 2010 à 91% en 2011). » (Rapport du Mali, Beijing+20) Le taux d’accouchements assistés est resté stable à 57% de 2010 à 2011 alors que le taux d’utilisation de la consultation prénatale (CPN) est passé de 90% en 2009 à 79% en 2010, puis à 76% en 2011.Toutefois, il est très inégal en fonction des régions : il atteint 97% à Bamako alors qu’il reste inférieur à 33% dans les régions du Nord en 2009 (Gao : 24%, Tombouctou : 33% et Kidal : 29%) (Banque Mondiale). En revanche, le nombre moyen de CPN par femme enceinte est passé de 2,08 en 2009 à 2,09 en 2010 et à 2,16 en 2011. Autrement dit, la part des femmes enceintes qui recourent à la CPN est de plus en plus faible mais celles qui y recourent, consultent de plus en plus fréquemment. (EDSM-II) Quant au taux de mortalité maternelle, il est de 464 décès pour 100 000 naissances vivantes en 2006, contre 582 pour 100 000 naissances vivantes en 2001. Enfin, le taux de prévalence du VIH/SIDA pour la population de 15-49 ans est estimé à 1,3% en 2006, contre 1,7% en 2001. Pour les jeunes femmes dans la tranche de 15 à 24 ans, le taux de prévalence du VIH/SIDA est de 0,9% contre 0,5% chez les jeunes garçons de la même tranche d’âge (EDSMIV), d'où un indice de parité de 0,996. Participation des femmes à l’économie nationale La participation des femmes à la vie économique n’est pas toujours visible. Les activités économiques des femmes sont souvent sous estimées, non comptabilisées surtout pour ce qui concerne l’économie familiale et domestique. Le travail traditionnel des femmes qui ne génère pas de revenus directs se trouve dévalorisé face à la monétarisation et aux changements socioéconomiques.Les données disponibles sont très limitées, parcellaires et biaisées. Elles ne reflètent pas le rôle joué par les femmes dans l’économie nationale. 38,5% (Banque Mondiale, 2012) des femmes maliennes âgées de 15 à 64 ans ont un travail rémunéré. Elles sont plus actives dans les secteurs informels. 95% des femmes actives sont concentrées dans l’agriculture, l’élevage et la pêche, le commerce, les activités de transformation, l’hôtellerie et la restauration, les activités économiques (BAD 2011) En Mauritanie, les femmes continuent de subir une discrimination par rapport aux hommes dans le domaine de l’emploi. Selon les résultats de l’enquête EPCV 2014, le taux d’activité est estimé à 46,6% en 2014 contre 44,3% en 2012 (Enquête Nationale de Référence sur l’Emploi et le Secteur Informel ENRE-SI de 2012). Le taux d’activité des hommes (69%) reste largement supérieur à celui de femmes (27,5%).La situation des femmes sur le marché du travail est marquée par le fait que certains secteurs ou professions sont moins ouverts aux femmes (armée, police, ingénierie.) qu’aux hommes. Ainsi les femmes ont moins accès au travail salarié qui occupe 12,4% de femmes et 27,3% d’hommes en 2000. Le chômage n’a cessé de croître, il atteint environ 30% et pénalise surtout les femmes 45,6%. Le taux de chômage est surtout très élevé pour les femmes dans la tranche des 16-24 ans vu le taux élevé de déperdition scolaire des filles. Compte tenu de leur faible niveau d’instruction et de leur manque de formation professionnelle, elles ne peuvent prétendre qu’à des emplois précaires.Le secteur informel a connu une expansion rapide sous l’influence de l’urbanisation. Il est le secteur refuge de la plus grande partie des Mauritaniennes actives. Dans ce secteur, les femmes évoluent dans le commerce, l’artisanat moins dans les services. 35,8% des entreprises informelles sont dirigées par des femmes. Elles ont surtout le statut 15 d’indépendantes (84,3%). Dans le secteur informel, la plupart des activités sont réalisées grâce aux crédits octroyés par des groupes solidaires ou à travers des organismes d’octroi de crédit à faible taux d’intérêt. Au Tchad également, le taux d'activité des hommes est supérieur à celui des femmes quel que soit la classe d’âge. Cette différence est plus remarquée pour la classe d'âge 30-50 ans, le taux d'activité des hommes est de près de 20 points supérieur à celui des femmes. Ce constat reste patent que ça soit en milieu urbain ou en milieu rural. 16 III- Autonomisation commerciales économique des femmes et Politiques L’Organisation Mondiale du Commerce reconnait un lien étroit entre le commerce, la réduction de la pauvreté et le développement. La dernière décennie a vu l’émergence d’une meilleure prise de conscience des rapports entre commerce, développement et égalité des sexes (Bridge, Genre et Commerce, 2006). Dans les zones pauvres, où le commerce a généré la création des emplois, il a eu des effets bénéfiques pour les femmes. Toutefois les politiques commerciales peuvent affecter les femmes si une analyse selon le genre ne précède pas la formulation de ces politiques. Les politiques commerciales dans le G5 Sahel sont régies par les mesures prises au niveau international et régional en prenant en considération l’appartenance des pays du G5 à trois regroupements régionaux, la région ouest de l’Afrique, la région du centre et le Monde arabe et sont soumis à des accords multilatéraux ou bilatéraux. Les textes nationaux de ces pays tentent de s’aligner sur les directives internationales et régionales en matière commerciale. Le Burkina Faso, le Mali et le Niger sont membres de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA). Bien qu’ayant quitté la communauté économique de l’Afrique de l’Ouest, la Mauritanie a toutefois, conservé des relations commerciales et douanières privilégiées avec les pays membres. Depuis 1963, des accords bilatéraux sont signés entre la Mauritanie et le Mali. En outre un Accord de Partenariat Economique est initié entre la Mauritanie et la CEDEAO pour la facilitation des échanges. Depuis 2000, la Mauritanie est également membre de l’Union du Maghreb Arabe (UMA). Le Tchad appartient à la fois à la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC) et à la Communauté Economique et Monétaire des Etats de l’Afrique Centrale. A l’exception de la Mauritanie, les autres pays font partie de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) et a une même zone monétaire, le Franc CFA. 3.1. Effectivité des Droits Economiques des Femmes par la mise en place d’un environnement favorable au commerce transfrontalier 3.1.1. Les engagements internationaux et régionaux Les cinq pays se sont engagés à travers la ratification de la Convention sur l’Elimination de toutes les forces de discrimination à l’Egard des Femmes (articles 13 et 14) à prendre des mesures appropriées pour créer des conditions favorables pour l’autonomisation économique des femmes des zones urbaines et rurales, notamment en favorisant leur accès à l’instruction et à l’alphabétisation fonctionnelle, leur accès au crédit financier (hypothécaire, agricole), aux services de commercialisation et aux technologies appropriées. Le Burkina Faso, le Mali et la Mauritanie ont, en outre, pris l’engagement de créer les conditions pour promouvoir et soutenir les métiers et activités économiques des femmes, en 17 particulier dans le secteur informel ; et de mettre en place un système de protection et d’assurance sociale en faveur des femmes travaillant dans le secteur informel et les sensibiliser pour qu’elles y adhèrent. Cette obligation découle de l’article 13 du Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux droits de la femme en Afrique ratifié par ces trois Etats. Par ailleurs, le Burkina Faso, le Mali et le Niger se sont engagés à travers le Traité de la CEDEAO sur “ les Femmes et le Développement” à formuler, harmoniser, coordonner et mettre en place des stratégies et des mécanismes appropriés pour le renforcement des conditions économiques, sociales et culturelles des femmes. 3.1.2.La promotion de l’entreprenariat féminin dans les politiques de développement En voulant matérialiser ces engagements juridiques au niveau national, les pays ont intégré dans les documents programmatiques au niveau national la question de l’autonomisation économique de la femme. Le Burkina Faso a adopté en 2009, une Politique Nationale Genre et son plan d’action opérationnel en 2010. A travers les objectifs 1 et 2 de l’axe stratégique 2, le PNG vise à créer des conditions de développement et des opportunités de promotion économique à travers l’amélioration de l’accès aux ressources naturelles, à l’emploi et aux revenus et ensuite permettre un accès équitable des femmes à la terre afin d’accroitre leurs productivités notamment leur revenu. Au-delà de tout précède il veut aussi améliorer de manière équitable la capacité entrepreneuriale de la femme en leur facilitant l’accès à l’information du monde des affaires. En 2015, la stratégie nationale de promotion de l’entreprenariat féminin (SNPEF) a été adoptée au Burkina Faso. Cette stratégiequi couvre la période de 2016-2025 vise les renforcements du dispositif juridique en faveur de l’entrepreneuriat féminin (i), de la formation technique et professionnelle des femmes (ii) ; des capacités managériales et de réseautage des femmes entrepreneures (iii), la mise en place d’un dispositif pérenne de financement de l’entrepreneuriat féminin (iv) ; l’amélioration de la productivité des entreprises des femmes (v), des capacités de stockage et de conservation des produits (vi), de la capacité de commercialisation des entreprises des femmes. Au Mali, développer un capital humain (femmes et hommes) apte à affronter les défis du développement socioéconomique du pays, de la réduction de la pauvreté, de l’intégration africaine et de la mondialisation (i) et reconnaitre la contribution des femmes au développement économique par leur insertion aux circuits productifs et l’accès égal aux opportunités d’emploi et aux facteurs de production sont deux orientations stratégiques de la PNG visant l’autonomisation économique de la femme. Au Niger, la Politique Nationale du Genre vise la promotion équitable du potentiel et de la position de la femme et de l’homme au sein de l’économie du ménage et dans l’économie de marché. En outre, le cadre d’orientation stratégique de la PNG, en vue de permettre l’autonomisation de la femme et sa participation à la vie économique du pays, s’est donné pour objectif de réduire le temps et la pénibilité des tâches domestiques (i), d’accroître les rendements, la productivité et la qualité des productions réalisés par les femmes (ii), de promouvoir le pouvoir économique des femmes (iii) et d’améliorer la visibilité des contributions des femmes à l’économie domestique et de marché (iv). 18 L’intégration systématique de la dimension genre dans les systèmes de planification, de budgétisation, de mise en œuvre, et de suivi/évaluation des stratégies, politiques et programmes de développement à tous les niveaux est un des objectifs stratégiques visés par la Politique Nationale Genre adoptée par le Tchad en 2011. Atteindre ce résultat sousentend l’assurance d’une participation efficace et efficiente des femmes de toutes les couches sociales. 3.2.La création d’environnement favorable à la facilitation des échanges commerciaux Membres de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC), les cinq pays œuvrent pour l’accroissement des échanges commerciaux en prenant des mesures pour la levée des obstacles tels que les droits de douane, les interdictions à l’importation ou la limitation des quantités importables. Aussi, ces pays attachent ils une importance à la mise en place d’un système commercial ouvert et équitable pouvant relancer la croissance et réduire la pauvreté. 3.2.1. La libre circulation des personnes La CEDEAO, dans son traité constitutif, autorise les ressortissants de la communauté à entreprendre des activités commerciales et industrielles dans tous les pays membres. Ils sont dispensés de visa et de carte de séjour. Par ailleurs, en 1979 un protocole relatif à la libre circulation des personnes, qui confère le statut de citoyen de la communauté à tous citoyens des Etats membres et demande à ces derniers « d'abolir tous les obstacles à la libre circulation et à la résidence à l'intérieur de la Communauté». De même, l’UEMOA a, tout en apportant de limitations, institué la libre circulation des personnes et le droit à l'exercice d'une activité professionnelle, mais avec de nombreuses limitations. Ainsi les ressortissants des pays membres du Liptako Gourma peuvent circuler librement d’une frontière à une frontière munis d’une pièce d’identité nationale. Au sein de la CEMAC et de l’UMA, la libre circulation des personnes entre des ressortissants des pays membres sont des résultats que ces regroupements régionaux visent à atteindre. Par ailleurs, des accords entre ces pays dispensent de visa pour des courts séjours. Ainsi les ressortissants de pays du Liptako Gourma sont exemptés de visa pour se rendre en Mauritanie pour de courts séjours. Cette dispense réciproque de visa touche également le Niger et le Tchad ainsi que le Tchad et la Mauritanie. 3.2.2. La libéralisation des échanges /Libre circulation des biens La libéralisation des échanges suscite deux positions. Les tenants d’une politique commerciale ouverte au reste du monde comme gage d’une croissance économique soutenue dont seraient les premiers bénéficiaires les populations pauvres (FMI, Perspectives de l'économie mondiale, mai 1997 ; T.N. Srinivasan et Jagdish Bhagwati) et ceux qui considèrent qu’une ouverture totale des marchés comportent des risques importants pour le développement des pays en développement, notamment en ce qui concerne les marchés agricoles et alimentaires. Les communautés économiques auxquelles appartiennent les pays du G5 Sahel ont opté pour une libéralisation progressive. Avant d’ouvrir leurs marches, ils choisissent de renforcer les échanges intra régionaux par l’élimination entre les Etats membres d’une communauté les droits de douane à l’importation et à l’exportation de marchandises et l’abolition des 19 barrières non tarifaires. Ainsi entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger, les produits de l’agriculture et de l’élevage, les produits issus de la pêche en mer, rivière ou lac, les produits miniers, les objets d’artisanat les marchandises industrielles originaires de ces pays ou d’autres de la CEDEAO sont assujettis aux mêmes droits et taxes qui frappent les produits nationaux. Ces produits peuvent traverser les frontières de part et d’autre sans être soumis aux droits de douane et autres droits et taxes qui touchent habituellement les produits étrangers à l’entrée d’un territoire. Un certificat d’origine est exigé pour les produits ayant subi des transformations ou ayant été produits à partir des matières premières locales. Un Tarif Extérieur Commun est institué aussi bien dans la CEMAC que dans l’espace UEMOA et la CEDEAO.Ainsi selon les différentes catégories, un produit en provenance d'un pays extérieur à ces communautés sera taxé au même taux quel que soit son point d'entrée dans la zone. Cat. TEC de la CEDEAO TEC CEMAC 0 Biens sociaux essentiels 0% 1 Biens de première 5% nécessité, matières premières de base, biens d’équipement, intrants spécifiques Biens de première nécessité 2 Intrants et intermédiaires produits 10% Matières premières et biens 10% d’équipement 3 Biens de consommation 20% finale Biens intermédiaires et divers 20% 4 Biens spécifiques pour le 35% développement économique Biens de courante 5% consommation 30% Tableau comparatif des TEC de la CEDEAO et de la CEMAC Certains produits de consommation tels que la viande et les abats, les produits laitiers, les animaux, les espèces bovines et porcines sont surtaxes en vue de favoriser et protéger la production locale. La protection de la production locale devrait avoir un effet sur le commerce transfrontalier des femmes étant donné qu’elles sont essentiellement dans le commerce des produits de première nécessité et que les produits agroalimentaires et ceux transformes localement sont exempts de droits de douane. 3.2.3. La facilitation de la création d’entreprise Au-delà de ces communautésrégionales, à l’exception de la Mauritanie, les autres pays sont membre de l’Organisation pour l’Harmonisation des Droits des Affaires (OHADA). Depuis 2006, les États membres de l’OHADA ont réduit de plus de 60 % en moyenne le délai nécessaire pour créer une entreprise. Le nombre total de jours nécessaires pour créer une entreprisea diminué de 31 % en moyenne, et le coût total de 68 %. Une autre réforme intervenue dans l’espace est la mise en place des guichets uniques pour les formalités de création d’entreprise. 20 Dans le domaine de la facilitation des affaires, les pays du G5 Sahel ont connu une évolution en dents de scie au cours des 5 dernières années. Le tableau ci-après montre l’évolution des pays d’après les rapports Doing Business Classements Pays Burkina Faso 2012 150ème 2013 153ème Mali 146ème 151ème 2014 154ème . 155ème Mauritanie 2015 167ème 2016 143ème 146ème 143ème 176ème 168ème Niger 173ème 176ème 176ème 168ème 160ème Tchad 183ème 184ème 189ème 185ème 183ème Extrait des rapports Doing Business de Groupe de la Banque Mondiale Ainsi, le Mali a pris des mesures législatives et réglementaires visant à améliorer l’environnement juridico-institutionnel et à simplifier les procédures de création d’entreprises privées, mises en œuvre depuis 1990. Ces mesures concernent la suppression de l’article n° 4 du Code du commerce (Loi n°92-002 du 27/08/1992) concernant l’autorisation maritale pour l’exercice de la profession de femme commerçante et l’élargissement de la capacité d’exporter aux artisans inscrits à l’Assemblée Permanente des Chambres des Métiers du Mali ( APCMM) et aux coopératives et associations d’agriculteurs, d’éleveurs et de pêcheurs inscrites au registre de l’Assemblée Permanente de la Chambre des Artisans du Mali (APCAM).. Les autres mesures concernent la simplification des procédures administratives par la mise en place de guichets uniques pour les formalités de création d’entreprises et du commerce extérieur ; la mise en œuvre du schéma d’intégration économique au plan sous-régional (Application du tarif extérieur commun (TEC) dans l’espace UEMOA) ; la diminution de la pression fiscale sur les entreprises (mise en place de la taxe synthétique et l’institution d’une vignette spéciale pour les petits contribuables) ; et l’assainissement de l’environnement juridique et judiciaire de l’investissement. 21 IV- FEMMES ET ECHANGES TRANSFRONTALIERS DANS LES PAYS DU G5 SAHEL 4.1. Données généralisées sur le commerce dans le G5 Sahel Les flux commerciaux transfrontaliers sont tridimensionnels (Désiré Axel Nassa, 2006) : les flux de proximité avec les échanges entre localités villageoises proches, ceux de courte distance organisés autour de villes proches des frontières et de longue distance avec les grandes villes comme point de départ vers les pays limitrophes mais transitant par les villes régionales. Le commerce inter Etat en Afrique est très faible. Tandis que le taux des échanges commerciaux pour les pays de l’Union Européenne représente 60% de la valeur des transactions, il est de 12% pour les pays membres de la CEDEAO et de 3% pour ceux de la CEMAC (Cadot et al, 2005). Le même constat est fait au sein des pays membres du G5 pour lesquels les flux commerciaux sont plus élevés en direction d’autres continents, d’autres pays y compris d’autres pays limitrophes. Au Burkina Faso, en 2013 et 2014, le premier fournisseur des marchandises est la République Populaire de Chine. Seul pays du G5 à se retrouver dans les 10 premiers partenaires du Burkina, le Mali se retrouve à la dernière place. Pour le deuxième trimestre 2014, le taux des importations du Mali est 0.5% tandis que deux autres pays frontaliers, la Cote d’Ivoire et le Togo, il est respectivement de 10.1% et de 4.9%. Pour ce qui concerne les exportations, la Suisse est le premier pays vers lequel le Burkina exporte. Au cours du deuxième trimestre de 2014, il a totalisé 60% des exportations tandis que les exportations vers deux autres pays frontaliers non membre du G5 la Cote d’Ivoire et le Ghana représentaient 6.3% et 1.6%. Le Mali, en particulier les régions du nord, Gao, Kidal et Tombouctou ont des échanges très développés avec l’Algérie. 4.640 tonnes de marchandises sont échangés hebdomadairement entre l’Algérie et le Mali. 1990 tonnes sont en transit vers le Niger et le Nigeria (Sami Bensassi, Anne Brockmeyer, Mathieu Pellerin, Gaël Raballand, 2015). Les importations du Tchad pour l’année 2013 sont évaluées à 379,135 milliards de FCFA pour un poids de 564 131 tonnes. En tête de liste des pays de provenance des importations du Tchad, se trouve le Cameroun et à la troisième place le Nigeria. D’après les entrevues, la faiblesse des échangés entre les pays du G5 se justifient par l’enclavement des pays du G5 a l’exception de la Mauritanie qui a une façade maritime. Ces données sur le commerce extérieur proviennent essentiellement des services de la Douane et constituent un récapitulatif des produits ayant fait l'objet d’une déclaration d'exportation ou d'importation. Pour ces services, il est difficile voire impossible de connaitre la part des femmes dans ces échanges. L’identité sexuelle de l’opérateur économique n’étant pas prise en compte dans la déclaration des marchandises. Le commerce transfrontalier de proximité qui concerne 22 notamment les denrées alimentaires et autres produits de nécessité ne sont pas comptabilisées. L’ampleur des activités commerciales des femmes est estimée par rapport à leurs mouvements sur les zones frontalières. Par ailleurs, les échanges transfrontaliers sont tolérés de part et d’autre des frontières car il constitue pour les populations locales, connues pour la plupart des services de gestion des frontières, des sources de revenus et de création d’emplois. 4.2. Profil des femmes dans le commerce transfrontalier 4.2.1. Caractéristiques des femmes dans le commerce transfrontalier : Des femmes essentiellement engagées dans le secteur informel Les femmes remplissant les conditions exigées par les règlementations8 pour avoir le statut de commerçant constituent une faible minorité comparée à la totalité des femmes alimentant les flux commerciaux de part et d’autre des frontières. Pour un responsable des services de gestion des frontières, Bol dans la région du Lac Tchad ne compte pas de femmes commerçantes. Ces femmes qui effectuent des actes de commerce régulièrement ont du mal à se faire reconnaitre par les autorités de tutelle, notamment les agents de gestion des frontières et des commerce parce qu’elles ne sont pas immatriculées au registre de commerce et n’ont pas d’identité fiscale. Cette situation se retrouve dans les autres communautéstransfrontalières. Ainsi aucune des 13 femmes commerçantesrencontrées sur le marché hebdomadaire de Gogui ne disposent de carte d’opérateuréconomique. A Diffa, en 2008, 2 femmes sur 47 hommes sont immatriculées au registre du commerce et de Crédit Mobilier. En 2012 et 2013, le nombre d’inscrites est passe à 3 contre 130 et 64 Hommes. Au Mali, la dizaine de femmes rencontrées constituent une exception. Elles sont des bénéficiaires du projet « Promotion des femmes engagées dans le commerce informel transfrontalier pour devenir des opératrices économiques » dont l’un des résultats visés était d’accompagner ces femmes pour l’immatriculation et l’obtention du numéro d’identité fiscal. L’une des principales causes est que les femmes ne perçoivent pas la nécessité de se doter d’une carte d’opérateur économique. « Cela fait plus de quinzeans que je fais ce commerce, je ne me suis pas inscrite au registre du commerce parce que cela ne changera rien à mes activités. » Commerçante à Dori « J’ai eu ma carte d’opérateur économique pour soumissionner pour un marché publique. J’ai remporté le marché et j’ai fait un emprunt pour son exécution. Apres j’ai été remboursée mais je me suis rendue compte qu’après le prélèvement des impôts de l’Etat, les intérêts de la banque, je me suis retrouvée à zéro. J’ai fait tous ces efforts pour rien. Je n’ai plus recommence. Je préfère continuer avec mes activités traditionnelles. » Commerçante a DIFFA Au niveau des capitales. Il est fait mention d’un nombre plus élevé de femmes répondant aux normes exigées. Ces femmes se retrouvent plus dans le commerce transfrontalier grande distance et/ou dans le commerce international. 8 OHADA et Code du Commerce de la Mauritanie 23 Parmi les catégories de femmes faisant les échanges commerciaux, il y’a les commerçantessaisonnières et occasionnelles qui périodiquement font des opérations d’achat et de vente des marchandises à travers les frontières. Q : Comment en êtes-vous venus à l’exercice du commerce transfrontalier ? R : Les femmes ne peuvent pas toujours dépendre de leurs maris. Elles ont beaucoup d’activité sociale et elles doivent apporter leurs contributions à l’économie familiale. Q : Pourquoi avoir choisi le commerce transfrontalier ? R : Le commerce transfrontalier m’offre plus d’opportunités. Je reviens avec des marchandises qui n’existent pas chez et je peux les revendre à des prix intéressants. La qualité des produits aussi importe. Certaines femmes ont pour activité principale l’élevage ou l’agriculture. D’autres sont dans des emplois formels, agents de l’Etat ou du secteur privé. « Je suis dans le commerce transfrontalier depuis que je travaillais dans la fonction publique. Toutes les deux semaines, je me rendais au Nigeria pour aller chercher de la marchandise. Je venais livrer à crédit à d’autres collègues et d’autres clients. Cela me permettait d’améliorer mes revenus » Un point commun pour les 5 pays est le faible niveau d’instruction des femmes dans le commerce transfrontalier, en particulier celles qui sont dans le commerce de proximité. 4.2.2. Secteur d’activités Les femmes sont présentes dans la transformation des produits agroalimentaire, dans la production artisanale et dans l’importation et exportation des produits de première nécessité. Au Burkina Faso, les femmes sont dans la transformation des produits locaux, le lait en yaourt, fromage et lait pasteurisé, le haricot local en pâtes alimentaires, la fabrication de produits cosmétiques, savon et beurre de karité, les cultures maraichères, le tissage et la teinture des pagnes (Faso Danfani) ; Elles vont également l’élevage bovin et ovin. Tous ces biens fabriqués ou transformés à partir des produits locaux leur permettent d’animer les marchés transfrontaliers et transnationaux. En plus, elles font le petit commerce des produits manufacturés, de céréales (mil, mais, sorgho). Les membres du groupement Kossam Saye sont dans la transformation et la commercialisation du lait pasteurise et du yaourt. La Transformation des produits vivriers prend plusieurs formes au Niger : sirop, confitures, et granules. Les produits transformés sont essentiellement des oignons séchés piment assaisonné, le niébé transformé en gâteau, la poudre et le yaourt de souchet, les spaghetti et couscous de pomme de terre, arome 100% bio pour les diabétiques et les hypertendus, gingembre en poudre, de la viande de volailles ou de bovins. Ces produits sont exportés et commercialisés essentiellement à travers les foires nationales et régionales. Le poivron, le poisson, l’encens sont des produits commercialisés aussi par les femmes nigériennes essentiellement celles de la région de Diffa. 24 La Mauritanie met dans le cadre de ces échanges des textiles, voile léger prisé par les femmes de la sous-région, des produits manufacturés et des produits transformés localement, notamment le couscous arabe. 4.2.3.Produits commercialisés, provenance et destination Une des constances de l’étude est que les activités commerciales des femmes entre les pays du G5 Sahel sont faibles. Cette constance rejoint les données nationales du commerce extérieur. Cette faiblesse est due selon la majorité des personnes rencontrées au fait que les pays concernés, à l’exception de la Mauritanie, sont des pays sans littoral, offrant peu d’opportunités d’affaires et de débouchés. Les échanges se font plus avec les pays côtiers. Les commerçantes du Niger font plus d’échanges avec le Benin, le Togo, le Ghana et le Nigeria, les Maliennes privilégient le Sénégal et la Cote d’Ivoire, l’Algérie ; celles du Burkina Faso se dirigent plus vers le Togo, la Cote d’Ivoire, le Ghana. « Dans la région du Lac, nous sommes une vingtaine de commerçantes qui font le commerce au-delà des frontières. Nous allons soit au Nigeria, soit à Cotonou, Lomé en traversant le Niger. Nous prenons les bus et cela nous prend en moyenne 7 Jours pour aller à Cotonou via Niamey. » Certaines commerçantes vont également chercher les produits dans les capitales ou d’autres plus développées économiquement pour venir vendre dans les zones frontalières. Des produits céréaliers ou de pêches sont envoyés vers les grandes villes en échanges de produits vestimentaires, ustensiles de cuisine, produits manufacturés. « Les femmes commerçantes de la région du Lac achètent du Nigeria des glacières, des chaussures, des étoffes, etc. Elles exportent des poissons fumés en direction du Nigeria via le Niger » « Nous allons au Niger acheter tous les produits d’embellissements des maisons, draps, lits. Nous exportons du Niger également l’oignon dans la période de soudure au Burkina Faso. » Marchandises importées et exportées Frontières Pays de Produits provenance agricoles Burkina Faso Niger Niger Produits transformés localement Produits maraichers (Oignon Céréales (sorgho, mil Produits manufacturés Matériels d’embellissement des maisons (nattes, tapis, tissus, parures, rideaux, literie) Ustensiles cuisine Chaussures Burkina Faso de Produits laitiers Beurre de 25 Karité Savon thérapeutique local Burkina Faso Mali Niger Tchad Mali Mauritanie Mali Burkina Faso Niger Tchad Mali Mauritanie Mangues Amande karité de Bazin Textiles Habillement Bijoux en or Poisson Encens Oseille de guinée Oignon séché Feuille de Piment séché baobab Piment Lait caille Viande séchée Couscous 4.2.4. Foires commerciales Les foires commerciales ont une place importante dans la promotion des activités commerciales des femmes et dans les échanges transfrontaliers dans les pays du Sahel. Ces foires offrent aux femmes l’opportunité de commercialiser leurs produits et de développer des relations avec des femmes commerçantes d’autres pays. Pour le Réseau Nigérien des Femmes Transformatrices, Artisanes, Commerçantes, Chefs d’Entreprise/Nouvelle Génération (RENIFTACEING), ces foires constituent également un cadre d’échanges et de partage de savoir et d’expérience. En activité depuis 5 années, le réseau a participé plusieurs fois aux foires et salons organisés au Mali, Burkina Faso, Ghana, Cote d’Ivoire, Nigeria (Lagos, Kaduna, Kano, Abudja), Benin, Togo et Sénégal. En 2015, le réseau a eu au niveau national, le prix du meilleur stand amenant des sollicitations de formation au niveau national et des organisations de femmes de la sous-région. Les résultats du programme « Soutenir des coopératives de femmes du Mali pour une meilleure valorisation des produits transformés », montrent que la participation aux foires fait augmenter de 25% la vente des produits. Dans la région, ces opportunités d’affaires sont offertes aux femmes à travers : - La foire commerciale des femmes opératrices économiques de l’UEMOA organisée pour la première fois au Mali en 2012 ; - Le SAFEM, organisé tous les deux ans au Niger promeut les activités des femmes artisanes, transformatrices et commerçantes afin de leur d’élargir leur réseaux de distribution et d’augmenter leurs chiffres d’affaires. Pour chaque édition, les femmes d’une région du Niger sont mises à l’honneur. - A ces foires centrées sur les femmes, les femmes de la région participent également au SIAO (Burkina Faso) à la FIDAK (SENEGAL) 4.3. Source de financement des activités des femmes commerçantes transfrontalières 26 Le cout du commerce est élevé. Le financement des activités des femmes dans le commerce transfrontalier provient des sources suivantes: - - - - - L’autofinancement : Le financement des activités commerciales provient de l’économie personnelle réalisée par les femmes. Pour certaines, ces fonds proviennent de la vente des produits agricoles, maraichers ou des produits d’élevage. Pour d’autres ils sont prélevés sur des épargnes constitues à partir des rémunérations de leurs activités professionnelles. Le financementgrâce aux fonds d’appui du Gouvernement : Ces fonds d’appui aux initiatives génératrices de revenu des femmes sont créés dans les 5 pays. Il s’agit des fonds qui appuient directement les activités de femmes et d’autres fonds qui appuient les activités du secteur informel ou des AGR des communautés défavorisées qui profitent également aux femmes. Le Burkina Faso a mis en place le Fonds d’Appui au Secteur Informel (FASI); le Fonds d’Appui aux activités génératrices des Femmes (FAARF) et le Fonds d’Appui à la promotion de l’entreprenariat féminin. Au Mali, le Fonds d’Appui aux Femmes et Enfant a été mis en place. Dans le cadre du projet d’Appui aux commerçants détaillants, 1075 femmes ont bénéficié du financement de l’Etat à travers la Banque Malienne de Solidarité de 2010 à 2014. Le financement par les groupements de femmes. Les femmes font des tontines qui sont reversées à un des membres pour financer les activités commerciales. Une partie de ces fonds est prélevée pour financer les actions de solidarité envers les membres des groupements. L’octroi de crédit aux femmes par les institutions de microfinance. Il s’agit des institutions de microfinance faisant aux femmes des offres de proximité. Elles accompagnent les femmes et les groupements de femmes dans l’élaboration des business plan, des études de marche. Elles sont présentes dans la plupart des villages. Leurs conditions sont flexibles. Une caution solidaire est demandée aux membres des groupements. Les crédits varient entre 50 000 et 10 000 000 de Francs CFA. Les garanties exigées vont des appareils électro ménagers au titre immobilier. Outre les opérations financières, ces instituions appuient ont servi les campagnes d’information et de communication sur les problèmes sociaux notamment ceux touchant les questions d’égalité de genre telles que la scolarisation des filles, les mutilations génitales féminines … ASUSU BANK et le MECREF au Niger, la Nissa Bank en Mauritanie Le crédit de marchandises et les échanges de marchandises. Certaines femmes débutent leurs commerces en prenant les marchandises à crédit chez des grossistes. Cette pratique qui se base sur les relations sociales qui existent au niveau des communautés se retrouve au niveau du commerce transfrontalier. Une femme commerçante de Diffa pense que cette pratique profite plus aux hommes qui disposent de plus de moyens, sont spécialisés dans un secteur précis et ont la possibilité de passer de grosses commandes. Ils peuvent donc contacter leurs partenaires qui confient les marchandises aux sociétés de transport. Les femmes exerçant dans le petit commerce sont obligées de se déplacer et chercher sur place les grossistes qui leur feront la meilleure offre. La pratique des échanges de marchandises se développe à travers les relations nouées au cours des foires commerciales ou par les partenariats développés de part et d’autre des frontières.Cette pratique permet de limiter les déplacements et de 27 réduire le prix de revient des marchandises. Pour la secrétaire de la section artisanat de la chambre régionale du commerce de Diffa, cette pratique facilite les échanges commerciaux. Ainsi les accords sont conclus par téléphone et elle envoie sa marchandise à ses partenaires commerciaux au Burkina Faso et au Mali. Elle reçoit en retour d’autres marchandises de même valeur vénale. 4.4. Ampleur et Portée des activités des femmes dans le commerce transfrontalier Les effets du commerce transfrontalier pour les femmes sont indéniables car il contribue à la réduction de la pauvreté. Autour des femmes commerçantes gravitent des personnes qui bénéficient de ces activités. Il s’agit des transporteurs, des passeurs qui font passer les marchandises d’une frontièreà l’autre, des conducteurs de taxi moto, des agents des services de gestion des frontières. « Une fois mes achats effectues, je confie mes marchandises au transporteur qui me les ramènent au pays. Je paie le cout du transport et les frais pour faciliter la traversée des douanes » La modification des relations de genre au sein des ménages est une des principales conséquences de cette activité. Les femmes sont devenues des acteurs économiques. Elles prennent en charge les frais de scolarité de leurs enfants et contribuent à l’entretien du ménage. Par ailleurs elle appuie également les membres de leur famille. « Avec mon commerce, j’ai pu prendre en charge les frais de scolarité de mon enfant pour qu’il ait son BTS à Niamey. Sans cette activité, mon fils n’aurait pas pu faire cette formation. Son père, retraité, ne dispose plus de ressources financières suffisantes pour lui assurer cette formation. » « La guerre civile au Tchad a poussé les femmes Tchadiennes vers le commerce pour assurer la survie familiale et de satisfaire leurs propres besoins. Elles y ont pris gout par la suite et se sont libéralisées. Ces femmes font leur trafic vers le Mali, Niger, Benin (Cotonou), Cameroun, Sénégal pour pratiquer un commerce visible et contribuer à l’économie Nationale du Tchad » L’une des destinations des bénéfices que les femmes tirent de leur commerce est de contribuer aux diverses manifestations sociales organisées dans les familles et dans les communautés. C’est une préoccupation qu’on retrouve chez les femmes commerçantes des 5 pays. Q : Que faites-vous des revenus de votre commerce R : J’appartiens à des organisations de femmes. Au sein de notre organisation, il nous arrive de nous aider mutuellement. Quand une des membres veut organiser le mariage de sa fille ou un baptême, il nous arrive d’apporter notre contribution. Cette contribution varie selon les évènements, la personne qui organise et le montant que cette personne vous a offert dans les mêmes circonstances. 4.5. Les réseaux des femmes commerçantes 28 Plusieurs catégories de regroupements des femmes commerçantes existent dans les pays du Sahel. Les plus fréquents sont les groupements dont l’une des principales missions est servir de caution pour les membres lors des conventions de crédit avec les institutions financières. Au-delà de ces groupements a la base, des associations et autres réseaux de femmes commerçantes ou opératrices économiques existent mais peinent à fonctionner normalement. Ces associations ou réseaux qui naissent des fois des initiatives des communautés régionales se concurrencent sur le terrain et sont confrontés à des problèmes récurrents de leadership. Le Réseau des Femmes Opératrices Economiques (REFOE), l’Association des Femmes Chefs d’Entreprise et d’autres organisations sont constituées des mêmes membres dans les différents pays. « Les femmes manquent de culture associative. Elles sont membres des organisations mais refusent de remplir leurs obligations, notamment les participations aux réunions et le paiement des cotisations statutaires. Elles attendent la veille de certaines opportunités dont le bénéfice est conditionne par le paiement des cotisations pour chercher à se mettre à jour. » Deux exemples positifs peuvent être mis en exergue. Le REFOE –Mali, contrairement à l’organisation dans les autres pays de l’UEMOA a su maintenir une certaine coordination et a établi un partenariat avec l’Etat qui leur accorde une subvention annuelle. En Mauritanie, les femmes réunies au sein de l’Union Mauritanienne des Femmes Entrepreneures et Commerçantes ont construit un marché de 647 boutiques dont les propriétaires sont des femmes. Le marché a été construit sur un terrain octroyé par l’Etat avec un financement sollicite auprès des institutions financières. L’UMAFEC a également mis en place une mutuelle de Crédit et d’Epargne pour le Commerce, les petites et Moyennes Entreprises, le Tourisme et l’Artisanat. Il n’existe pas de réseau ou d’associations regroupant uniquement les femmes commerçantes transfrontalières leur permettant de partager les expériences et de tirer leçons des bonnes pratiques. 29 V- DIFFICULTES ET DEFIS AUXQUELS SONT CONFRONTES LES FEMMES DANS LE COMMERCE TRANSFRONTALIER Le commerce transfrontalier des femmes est une force motrice pour le développement des communautés frontalières et pour l’économie des pays de la région du Sahel. Toutefois, la faible règlementation du secteur expose les femmes àdes difficultés. Les inégalités de genre constituent des freins aux opportunités économiques. Le manque ou la faible consultation des organisations de femmes lors de l’élaboration des politiques commerciales limitent la capacité des femmes à s’adapter aux politiques commerciales et bénéficier des reformes découlant de l’évolution de l’environnement international. Les femmes ont un accès limite à la formation et à l’information, aux ressources financières et aux crédits. Leur participation à la gouvernance du secteur est très faible. 5.1. Méconnaissance des mesures règlementant le secteur Une connaissance limitée des mesures règlementant le commerce et les échanges transfrontaliers est l’une des principales difficultés que rencontrent les femmes dans l’exercice de leurs activités. Elles méconnaissent également les droits qui leur sont conférés par les traités et protocoles régionaux et semblent accepter les exactions et autres violations de leurs droits. Pour les femmes commerçantes, essentiellement celles qui font le petit commerce à travers les frontières, les agents de gestion des frontières réservent un traitement différencié aux femmes instruites, informées sur les normes et procédures et les femmes pas ou peu instruites. « Les femmes exerçant le petit commerce transfrontalier ont un comportement qui, dès le départ, les rendent vulnérables et les exposent aux exactions. Elles se positionnent 30 comme étant en fraude et prennent des chemins illégaux pour traverser les frontières, encourant ainsi de nombreuses violations de droits. Elles gagneraient à se conformer à la règlementation, qui sur certains plans les protègent9 » La méconnaissance des droits que leur confèrent les traités et protocoles commerciaux exacerbe les problèmes auxquels les femmes sont confrontées lors de leurs transactions. Il arrive qu’elles soient contraintes de verser des pots-de-vin ou harcelées par des douaniers et agents d’immigration. Les femmes dans le commerce méconnaissent la règlementation régissant le monde des affaires, les procédures d’enregistrement au registre du commerce, les tarifications douanières, les mesures de facilitation des échanges commerciaux. « Les douaniers et policiers se comportent différemment lorsqu’ils sont en présence des femmes instruites connaissant leurs droits, qu’en face de nous autres qui ne maitrisons pas les règles de procédures. Les exactions ne sont faites qu’à de celles qui ne maitrisent pas la matière » Femmes commerçantes à Dori (Burkina Faso) 5.2. Absence ou Insuffisance des structures d’accueil ou d’hébergement Les femmes commerçantes font dans certains plusieurs jours de voyage. Certaines d’entre elles arrivent à la fermeture des frontières. Elles sont dans ce cas obligées de passer la nuit au niveau des zones frontalières ou dans les gares des transporteurs. Q : Ou dormez-vous lors de votre voyage ? R : Nous dormons à la station de SONEF dans les pays. Q : Comment sont-ils organises ? Avez-vous des chambres ? R : On nous distribue des nattes sur lesquelles nous nous couchons sous les hangars Q : Et pour faire votre toilette et autres ? Avez-vous des sanitaires séparés de celles des hommes ? R : Les sanitaires sont séparés mais souvent la séparation n’est pas respectée. Il arrive que des hommes aillent dans celles des femmes 5.3. Les tracasseries routières et douanières Les tracasseries routières et douanières sont l’une des principales difficultés que rencontrent les femmes dans le commerce transfrontalier. Des nombreux points de contrôle sont installés tout au long des axes routiers. Un ancien agent des douanes affirme que les perceptions illégales de taxes, les contrôles inopportunes ainsi que les harcèlements de différentes natures constituent un sérieux handicap aux activités commerciales des femmes dans les zones frontalières. De nombreux témoignages corroborent cette affirmation. 9 Propos recueillis auprès d’un responsable des questions de genre au Niger 31 « Je voyage de Bamako à Ouaga. Arrivée à la frontière, le transporteur demande à chaque client de donner 1000 Francs CFA pour traverser la douane. Je lui fais comprendre que j’ai tous mes papiers en règle, et que je n’ai pas besoin de donner de l’argent pour traverser la frontière. Il s’est énervé ainsi que les autres passagers. Pour une fois, j’ai décidé de tenir bon. Finalement, ils m’ont laissé continuer le voyage sans que je n’aie eu à verser un franc. Mais il arrive des jours ou je capitule parce que n’ayant pas envie de trop discuter ou parce la pression est trop forte. » « Lors d’un de mes voyages, je suis tombé sur des agents des forces de l’ordre qui essayaient de racketter des femmes commerçantes. J’ai essayé d’intervenir pour leur faire comprendre qu’elles n’ont pas à obtempérer aux injonctions des agents. Mais, la plus âgée du groupe me demande de les laisser faire car je ne serai pas tout le temps pour gérer cette affaire à leur place. Elles sont habituées et finissent par trouver un terrain d’entente» Responsable d’ONG au Niger. Les exactions corporelles semblent avoir diminué dans les pays du G5 Sahel. Même si différents acteurs rencontres font état des violences physiques, des harcèlements et autres violences sexuelles sur les femmes commerçantes, celles rencontrées au cours de l’enquête affirment n’avoir jamais été confrontées a ce genre de problèmes. Les agents de gestion des frontières pensent que les différentes formations qu’ils reçoivent dans le domaine du genre et des droits humains leur ont fait prendre conscience de la nécessité de prendre des précautions. Ainsi, en cas d’absence de personnel féminin dans un poste frontière, ils font appel à des femmes, personnes ressources de la communauté pour procéder aux fouilles corporelles. Sur les agents de police des frontières rencontrés dans les cinq pays, un seul a déclaré ce qui suit : « Les agents de force de l’ordre sont comme des médecins. En cas de nécessité, ils procèdent aux fouilles sur tous les usagers sans distinction de sexe. » 5.4. L’accès aux ressources financières et au crédit L’accès au crédit bancaire est quasi inexistant en raison du manque de documentation comptable et financière et de manque de garantie demandée par les institutions bancaires. Les femmes recourent donc aux institutions de micro finance dont les taux sont parfois très élevés et le délai de recouvrement faibles. Par ailleurs, le manque de liquidités est un autre facteur qui empêche les femmes commerçantes de prospérer. « Lorsque vous introduisez la demande d’ouverture de crédit, le délai de décaissement est tellement long que vous perdiez l’opportunité d’affaire qui s’est présentée à vous. Vous acceptez toutefois ce crédit qui ne vous est plus utile dans l’immédiatet vous retrouvez endettée. » Femme commerçante a Dori 5.4. Faible représentativité des femmes dans les institutions consulaires Les femmes sont très peu représentées dans les institutions consulaires. Pour pallier à cette situation, un décret présidentiel au TCHAD impose un quota de 30%. Dans le nouveau bureau mis en place en janvier 2016, il est enregistré l’entrée de 4 femmes pour 15 membres. L’une des raisons qui justifie la faible présence des femmes est que ces dernières ne répondent pas toujours aux normes exigées par ces institutions pour faire partie du bureau. 32 5.5. Inadéquation entre les systèmes de perception des recettes fiscales et douanières et les activités des femmes Les taxes fiscales sont considérées par les femmes comme trop élevées. Celles qui ne sont pas enregistrées contribuent également aux recettes fiscales en payant des taxes journalières sur les marchés.Ces taxes quotidiennes sont dans l’ordre de 100 FCFA ou de 100UM « Les méthodes de perception des taxes ne sont pas adaptées aux activités des femmes commerçantes, en particulier les femmes qui sont dans le petit commerce. L’Etat doit réfléchir pour trouver un mécanisme de perception adaptée au profil des femmes dans le petit commerce. Pourquoi pas un régime préférentiel pour ces femmes » 5.6. Absence de cadre formel d’échanges Il n’existe pas de cadre formel d’échanges entre les femmes commerçantes elles même et entre les femmes commerçantes et les structures administratives compétentes. Les différents groupements mis en place ne se concertent pas entre eux. 5.7. Les effets de l’insécurité et du terrorisme sur le commerce transfrontalier Le marché transfrontalier a été perturbé par les différentes crises sécuritaires qui prévalent dans le SAHEL. Le volume des échanges a considérablement baissédepuis les déplacements des populations. Dans le nord du Mali, le commerce transfrontalier a subi une crise multiforme : une diminution de la demande en raison de l'afflux de réfugiés et de personnes déplacées hors du Mali à partir de 2012; une diminution des approvisionnements parce que les commerçants ont fui vers la Mauritanie ou au Niger, ou ont été déplacés à Bamako; l'insécurité croissante sur les routes commerciales qui décourage les commerçants qui sont restés sur place et enfin la fermeture de la frontière algérienne, qui a considérablement réduit les volumes d'échanges depuis le début de 2013. Les estimations sont présentées en détail dans le tableau Estimation du chiffre d’affaires en 2014 Produit Chiffres d’affaires Chute en 2011 (en commerciale millions de Francs CFA) Inflation % Chiffres d’affaires 2014 (en millions de Francs CFA) Farine 188 60 30 97.8 Pate 189 66 30 83.5 (45 Tombouctou) Semoule 104.3 84 75 29.2 (230 Tombouctou) Carburant 114.7 84 100 18.4 33 Sucre 38.5 50 25 24.1 Lait en poudre 166.8 80 120 73.4 Dattes 169.2 100 Appareils 40.7 80 25 10.2 Autres 70.6 80 40 19.8 0 1081.8 356.3 Extrait de Sami Bensassi, Anne Brockmeyer, Mathieu Pellerin, Gaël Raballand, Mali- Algeria Trade, The normality of the informality Les effets de l’insécurité sur le commerce transfrontalier ont eu des répercussions sur le prix des marchandises. Certaines marchandises qui étaient moins dans les zones frontalières ont vu leur prix augmenter du fait de la limitation des échanges. Ainsi le lait en poudre coute nettement moins cher à Bamako qu’à Tombouctou. 35 000 FCFA contre 50 000 FCFA. La tonne de farine subi une inflation de 30% et celle du sucre 25%. Cette situation de hausse de prix se retrouve également dans les autres zones. Ainsi, avant la recrudescence des attentats terroristes dans la région du Lac Tchad, les échanges entre le Tchad, le Niger et le Nigeria étaient quasi quotidiens. Le lac Tchad était l’axe permettant de relier les trois pays. La traversée se fait en pirogue, aller-retour en une journée. Depuis la multiplication des attaques de Bokho Haram, les échanges ont été limités faisant grimper le prix des matières importées essentiellement du Nigeria. De part et d’autres des frontières, la circulation a été interdite sur le Lac Tchad, le commerce du carburant ainsi que les taxis motos. L’interdiction de vente de carburant a affecté les activités des femmes agricultures et celles qui font du maraichage. « Les mesures prises par l’Etat pour lutter les mouvements djihadistes ont criminalise une activité légale dans la zone. Une activité économique a été suspendue pour empêcher que cela ne profite à Bokkho Haram. Les femmes sont restées à la maison et cela sert les intérêts du groupe qui pense que les femmes doivent rester à la maison. » Responsable d’ONG de défense des droits humains Dans ce contexte dangereux, les activités des femmes ont été récupérées par les hommes créant des risques de concurrence 34 VI- PERCEPTIONS DE DE LA CONTRIBUTION DES FEMMES AU DEVELOPPEMENT PAR LES DIFFERENTS ACTEURS 6.1. Les leaders religieux et traditionnels Les mêmes communautés se retrouvent de part et d’autre des frontières et les zones frontalières constituent des espaces favorables au brassage culturel se fait au niveau des zones frontalières. L’islam donne à la femme les droits dans les domaines, économique, politique et culturel. Du temps du prophète, les femmes ont eu à occuper des postes de responsabilités dans le domaine intellectuel, politique et commercial. Hadidja, la femme du prophète a été une grande commerçante. Elle était dans l’exportation et l’importation des marchandises entre Medine et la Mecque et le Yemen, Medine et la Syrie, Jordanie, Israël. Pour le Conseil Islamique du Niger, les activités des femmes contribuent au brassage culturel au niveau des frontières. Cette position est partagée également par d’autres leaders religieux et traditionnels. Ainsi pour le chef de canton de Bol (région du Lac Tchad), il n’y a aucune contrainte culturelleou religieuse à l’exercice des activités commerciales des femmes. Elles contribuent à l’économie familiale et elles ont la volonté manifeste d’être autonomes. « Ma propre femme fait du commerce transfrontalier depuis des années et je n’y voie aucun inconvénient. Ce n’est qu’une question d’organisation » Il s’appuie sur l’exemple de sa propre femme en l’invitant de venir partager ses expériences avec nous. Selon sa femme, les femmes sont fatiguées d’attendre tout de la part 35 de leurs maris. Cela est une raison de plus pour elle d’exercer le commerce dans le but de participer financièrement aux évènements sociaux tels que le mariage, le décès, la naissance, etc. « garce à mes activités commerciales, je me sens un peu autonome » a-t-elle appuyé. Elle a commencé son commerce avec une somme de 500.000 frs et détient aujourd’hui une économie de 3 à 4 millions. Pour ce qui est du partage des parcelles des polders, les femmes sont impliquées et reçoivent la moitié que celle reçue par les hommes 7.2. Les membres de la communauté Les crises économiques ont eu un effet indirect sur l’évolution des sociétés africaines. Un changement de mentalités a été noté concernant la répartition du rôle socialement attribué aux hommes et aux femmes. Les femmes exerçant le commerce en général et le commerce transfrontalier ne sont plus catégorisées comme des femmes légères. De manière générale, toutes les personnes rencontrées reconnaissent l’importance des activités des femmes dans les échanges transfrontaliers et dans l’économie des ménages. Au Mali, un douanier rencontré dans le cadre de la collecte des données a affirmé que les activités commerciales des femmes contribuent au bien-être familial. « Mon mari m’aide dans l’exercice de mes activités commerciales. Des fois, c’est lui qui prend à ma place les commandes et expédie aux clients le produit fini au cas où je suis empêchée 7.3. Les services de gestion des frontières : Police et Douane Les services de gestion des frontièresrencontrées durant la collecte des données sont unanimes. Des femmes des communautés frontalières sont dans le petit commerce. Elles bénéficient d’auprès des agents de gestion des frontières d’un traitement préférentiel en ce sens qu’elles sont bien connues de ces agents qui leur accordent des facilités pour traverser. Les mêmes familles se retrouvent de part et d’autre des frontières. Les femmes commerçantes traversent les frontières pour aller animer les marches transfrontaliers de la même manière que d’autres membres de la communauté la traversent pour aller cultiver leurs champs. Pour les agents de gestion des douanes, celles qui viennent des zones éloignées et traversent fréquemment ces frontières sont assez bien connues aussi. Elles sont 36 des dames respectables et ne créent pas de problèmes. Toutefois, ces zones frontalières sont tres peu animées sur le plan commercial, peu de marchandises transitent par ces frontières. . 7.4. Les services en charge du genre et de la promotion de la femme et du commerce Pour la secrétaire Générale Adjointe du ministère de l’action sociale du Tchad, son ministère est un ministère transversal qui travaille en collaboration avec le ministère de commerce afin de rendre formelles les activités commerciales des femmes formelles. Le ministère appui également les femmes à mieux s’organiser, et déplore en même temps qu’il n’existe pas malheureusement une politique spécifique sur le commerce transfrontalier. Toutefois, le sujet ne manque d’être évoqué dans les discussions au niveau du Ministère. VII1) CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS Ampleur et portée des activités des femmes dans le commerce transfrontalier - La majorité des acteurs rencontrés s’accordent à reconnaitre la présence indéniable des femmes dans le commerce transfrontalier et les effets de leur activité sur le développement de leur famille et communauté ; - Deux catégories de femmes sont présentes dans le commerce transfrontalier : celles qui animent les marches hebdomadaires transfrontaliers et celles qui sont dans le commerce régional voire international qui participent aux échanges au-delà des zones frontalières ; - Les produits transformés par les femmes au niveau local ne répondent pas toujours aux normes de qualité exige par les marches internationaux ; - La communauté linguistique entre les espaces situés de part et d’autre des frontières facilitent les activités commerciales essentiellement l’approvisionnement des produits de première nécessité. Certains produits en provenance des pays voisins se trouvent à des prix abordables dans les villes frontalières qu’au niveau des capitales ou grandes villes ; - Les revenus générés par les activités commerciales des femmes leur permettent de prendre en charge les frais de scolarité et d’entretien de leurs enfants et de participer aux charges générées par les activités sociales (baptême, mariage, funérailles…) 37 - Les données disponibles sont très limitées, parcellaires et biaisées. Elles ne reflètent pas le rôle joué par les femmes dans l’économie nationale ; 2) Produits échangés, provenance et destination - Les femmes sont dans presque tous les secteurs (produits manufactures, produits du cru) avec une prédominance pour les produits agroalimentaires et les produits artisanaux ; - Les échanges entre les pays du G5 Sahel sont minimes comparativement aux échanges de ces pays avec les pays côtiers ; - Les foires commerciales et les salons constituent un important cadre d’échanges commerciaux pour les femmes du Sahel ; 3) Relations des femmes commerçantes transfrontalières avec les services en charge du secteur (Commerce, Finances, Transport, douane, police…) - Les femmes sont faiblement représentées dans les institutions consulaires ; - Elles méconnaissent la règlementation régissant le monde des affaires, les procédures d’enregistrement au registre du commerce, les tarifications douanières, les mesures de facilitation des échanges commerciaux ; - La grande majorité des femmes exerçant le commerce transfrontalier sont dans l’informel et sont de ce fait peu considérées par les structures en charge du commerce et des douanes ; - Le système de fiscalité et de douane n’est pas adapté aux activités des femmes dans le commerce transfrontalier ; - Les institutions de micro finance octroient plus de crédits aux femmes au sein des groupements qu’aux femmes prises individuellement. Elles servent de caution solidaire les unes pour les autres. Ces crédits sont toutefois limités et - La distance entre les centres frontaliers et les centres urbains, ou les centres décisionnels (économique, politique, sécuritaire, etc.) favorise le sentiment d’abandon exprimé par les femmes impliquées dans le commerce transfrontalier. 4) Effet de l’insécurité et de l’extrémisme violent sur les activités commerciales des femmes 38 - La réussite des femmes dans le commerce transfrontalier est un rempart contre l’oisiveté, le chômage et le risque de radicalisation ; - Les frontières sont aujourd’hui pour les femmes commerçantes des zones d’insécurité; - Les attentats et autres attaques terroristes ainsi que les mesures sécuritaires prises par les Etats constituent un frein aux activités commerciales des femmes ; - Le ralentissement des échanges transfrontaliers ont eu un effet sur la hausse des prix des marchandises ; 2.2. Recommandations Les recommandations émanent essentiellement des femmes commerçantes transfrontalières et d’autres personnes rencontrées durant la collecte des informations. Ces recommandations visent à améliorer leur condition de travail et à mettre en place un environnement favorable. Renforcement de capacités - Mettre en place un programme de renforcement de capacités des femmes dans le domaine de l’entreprenariat, les politiques commerciales ; Catégoriser les appuis aux femmes commerçantes (fonds de roulement, fond d’équipement) ; Renforcer le leadership des femmes ; Mettre en place une plateforme d’échanges et de partage des femmes commerçantes transfrontalières dans le Sahel. Données statistiques - Générer des statistiques sur le commerce transfrontalier des femmes ; Mettre en place un système de collecte de données désagrégées par sexe et par âge au niveau de tous les intervenants ; Régionaliser/mutualiser les efforts de collecte de statistiques en initiant des programmes communs entre les instituts nationaux de statistiques, en collaboration avec les communautés régionales (CEDEAO, CEMAC, UMA) Sécurité/Politiques - Faire une revue des instruments légaux régissant le commerce transfrontalier pour établir le niveau de mise en œuvre, et des mécanismes de suivi ; Susciter l’élaboration des politiques ou stratégies nationales sur l’entreprenariat féminin, qui tiennent compte des spécificités du commerce transfrontalier ; 39 - Assurer une politique sécuritaire régionale, qui intègre les besoins des femmes commerçantes régionales, y compris les besoins sanitaires, d’hébergement, de stockage, etc. Bibliographie USAID, Les rapports commerciaux des femmes : une évaluation préliminaire du commerce transfrontalier féminin en Afrique Occidentale, 2000 Dr SOULE Bio Goura et Dr BORGUI Yerima, Le Genre, les femmes et le Commerce transfrontalier en Afrique, Echanges régionaux, 2010 International Alert, Kristof Titeca avec Célestin Kimanuka, Marcher dans l’obscurité: Le commerce informel transfrontalier dans la région des Grands Lacs ; Septembre 2012 International Centre for Trade and Sustainable Development, Revue Passerelles, Analyses et informations sur le commerce et le développement durable en Afrique Sami Bensassi, Anne Brockmeyer, Mathieu Pellerin, Gaël Raballand, Mali- Algeria Trade, The normality of the informality 1Banque mondiale: Globalization, Growth, and Poverty: Facts, Fears and an Agenda for Action INSEED, Emploi au Tchad, Troisième Enquête sur la Consommation et le Secteur Informel au Tchad (ECOSIT 3), Aout 2014 40 Groupe de la Banque Africaine de Développement, Autonomiser les femmes africaines, plan d’action. Indice d’égalité du genre en Afrique, 2015 République du Tchad, Institut National de la Statistique, des Études Économiques et Démographiques (INSEED), Statistiques du Commerce Extérieur Nancy Benjamin et Ahmadou Aly Mbaye avec Ibrahima Thione Diop, Stephen S. Golub, Dominique Haughton et Birahim Bouna Niang, Les entreprises informelles de l’Afrique de l’Ouest francophone, Taille, productivité et institutions Club du Sahel, Laurent Brossard, Les régions maliennes de Gao, Tombouctou et Kidal, Perspectives nationales et régionales, Octobre 2015 Référence électronique Désiré Axel Nassa, « Commerce transfrontalier et structuration de l’espace au nord de la Côte d’Ivoire », Territoire en mouvement Revue de géographie et aménagement [En ligne], 2 | 2006, mis en ligne le 29 juin 2011, 41