Partie I TEMPS, EVOLUTION DES ETRES VIVANTS ET GENETIQUE Chapitre V : INNOVATIONS GENETIQUES et EVOLUTION (3 exemples) Très complexe ! 3 exemples pour expliquer certains aspects ; cette partie ne peut pas faire l’objet d’une question de type I au bac ! Prérequis : L’évolution phénotypique des espèces au cours des temps géologique est toujours provoquée d’abord par des innovations génétiques mais seules les innovations germinales peuvent être transmises d’une génération à l’autre et donc être conservées A : Evolution d’une population de moustiques soumise à un insecticide : exemple montrant comment le milieu de vie peut favoriser l’expansion d’une innovation génétique non neutre au sein d’un population : mise en évidence de la sélection naturelle et de la microévolution L’évolution de la population de moustiques est caractérisée par le passage d’une majorité d’individus présentant le phénotype sensible au DDT à celui d’une majorité présentant le phénotype résistant : cela s’explique par 2 mécanismes : un mécanisme totalement aléatoire et non orienté par les caractéristiques du milieu, les duplications géniques qui apportent aux individus qui en sont porteurs une résistance potentielle au DDT très importante. Ces duplications ont précédé l’épandage de DDT un mécanisme non aléatoire et orienté par les caractéristiques du milieu que l’on nomme la sélection naturelle : le changement de milieu a en effet favorisé, trié, les individus présentant dans leur génotype les duplications car elles leur assurent une meilleure survie dans un milieu enrichi en DDT : la population est devenue alors majoritairement résistante En généralisant, si une innovation germinale quelle qu’elle soit (duplication ou mutation ss : voir autre exemple dans le livre p.100-101), fortuite, apporte aux individus une probabilité de survie ou une aptitude à la reproduction meilleure que celles des autres dans un milieu donné, alors cette innovation tend à se répandre dans la population au fur et à mesure des générations : on nomme sélection naturelle positive cet avantage pris par certains génotypes (ex AAAAAA) dans un environnement donné. Dans le cas inverse, on parle de sélection naturelle négative. Selon les cas, le milieu qui « sélectionne » est constitué par des facteurs climatiques, physico-chimiques (ex : insecticide) ou par des facteurs biologiques (espèces : sources de nourriture ou espèces : prédatrices ou parasites : ex phalène.) La sélection naturelle ne s’exerce qu’aux conditions suivantes : Existence d’une variation phénotypique déterminée génétiquement (sinon, elle ne peut se répandre dans une population grâce à la reproduction sexuée) Existence d’une relation entre cette variation phénotypique et la survie et/ou l’aptitude à se reproduire des divers phénotypes dans un environnement donné La sélection naturelle permet l’adaptation d’une population à son environnement, contribuant ainsi à différencier génétiquement (la fréquence allélique des gènes change) plusieurs populations au sein d’une même espèce en fonction du milieu qu’elles occupent (doc 26 p.53) La notion d’allèle favorable ou défavorable dépend des conditions du milieu. En d’autres termes, la valeur sélective des différents phénotypes d’une population en termes de survie n’est pas absolue mais relative à un milieu (cf activité 6 p.102 ) un allèle (récessif) sélectivement défavorable (on dit « morbide ») peut être néanmoins conservé dans un certain milieu au sein des hétérozygotes car il présente un autre avantage sélectif dans ce milieu L’allèle HbS (ou G6PD-) pourtant défavorable car responsable de la synthèse d’une hémoglobine anormale (anémie falciforme) est cependant maintenu avec une certaine fréquence dans les populations vivant dans les régions infestées par le paludisme. En effet, sa présence au sein des hétérozygotes confère à l’individu une meilleure survie car il est plus résistant au paludisme (le plasmodium semble se développer moins dans les hématies contenant à la fois HbA et HbS Remarques importantes : -Le changement de milieu n’a pas provoqué la mutation « favorable » mais a sélectionné l’allèle favorable ! -La sélection naturelle s’exerce sur des individus, mais par leur intermédiaire, elle sélectionne des génotypes donc des allèles B - L’évolution des chaînes alpha de l’hémoglobine : exemple montrant comment les innovations neutres peuvent néanmoins être conservées au sein des organismes par dérive génétique mais sans les faire évoluer phénotypiquement, en faisant seulement évoluer leurs molécules (séquence) Les mutations (sens large) neutres, qui ne modifient pas le phénotype macroscopique d’un organisme, et donc qui n’ont pas d’impact sélectif, peuvent néanmoins se répandre au sein d’une population, selon les aléas des croisements entre individus : on parle alors de dérive génétique pour ce phénomène. C’est ce que nous montre l’existence des différentes séquences existant pour les chaînes alpha de l’hémoglobine chez les diverses espèces de Vertébrés. Ces différences sont dues à l’accumulation au cours du temps de mutations germinales neutres puisque les chaînes alpha ont toutes conservées le même rôle (transport d’O2). Ces mutations neutres ne sont pas déterminantes pour l’évolution phénotypique des espèces, mais elles expliquent l’évolution des séquences des molécules homologues appartenant à des espèces différentes au cours du temps. Chaque molécule a une vitesse d’évolution qui lui est propre : si cette vitesse est connue et constante (ex chaîne α de l’hémoglobine), on peut utiliser cette vitesse pour dater un ancêtre commun à 2 taxons à partir de la distance génétique existant entre les molécules homologues de ces 2 taxons : cette molécule sert donc d’horloge : on parle d’horloge moléculaire. Les vitesses d’évolution des molécules sont variables (cf courbes) et cette variabilité dépend du rôle que joue la protéine pour la survie d’un organisme et du nombre d’acides aminés indispensable à la fonction de la protéine: plus ils sont nombreux, moins la molécule évolue vite car une mutation qui les touche n’est pas conservée (élimination par la sélection naturelle car elle rend la protéine inactive entraînant la mort de l’individu) : ainsi les gènes des histones évoluent très lentement alors que les gènes des hémoglobines évoluent plus vite ) → Si les mutations neutres ne font pas évoluer phénotypiquement les espèces, leur accumulation au sein des molécules, à des vitesses à peu près constante, peut être utilisée pour tracer (dater) l’évolution. C – Les mutations des gènes du développement, responsables de la macroévolution Activité 7 p.104-5 et livre p.108-9 Les gènes du développement sont des gènes qui codent des protéines régulatrices (activation ou inhibition) des gènes de structure. Ils interviennent au cours du développement embryonnaire d’un individu, durant des périodes bien délimitées, et dans des territoires bien particuliers : de leur expression dépend la mise en place du plan d’organisation d’un organisme. Parmi ces gènes, certains dits homéotiques contrôlent la mise en place du plan antéro-postérieur d’un organisme : on les appelle encore des gènes « architecte » ou « maîtres ». Ils sont présents chez la plupart des espèces vivantes et sont homologues chez les animaux (p.90) (Ne pas confondre la notion d’homologue et d’homéotique !) Les conséquences phénotypiques des mutations concernant ces gènes peuvent être alors morphologiquement beaucoup plus importantes que celles affectant des gènes de structure en modifiant par exemple le territoire ou la durée d’expression des gènes. Dans le cadre de la macroévolution, ces mutations ont joué probablement un rôle très important, en permettant notamment de comprendre comment un nouveau plan d’organisation a pu apparaître suite seulement à quelques évènements minimes au niveau du génome : quelques exemples : 1 – Transformation du membre chez les Vertébrés : passage du type « nageoire » au type « patte » (innovation propre aux Tétrapodes) (doc 30 et 31 p.105 et p109) La transformation des nageoires en pattes, innovation propre au clade des Tétrapodes il y a 360 MA pourrait être une simple mutation concernant un gène homéotique Hox D13 : une mutation aurait modifié le territoire d’expression du gène Hox D13. 2 - Apparition des caractères dérivés propres à la lignée humaine (Document p.109) ex : chez le jeune chimpanzé, on observe un basculement du trou occipital du centre vers l’arrière au cours de sa phase juvénile (4 – 5 ans ) : à l’âge adulte, il est donc principalement quadrupède. Ce basculement n’a pas lieu chez l’homme : quelques mutations affectant des gènes du développement contrôlant la construction du crâne ont pu réduire la durée de leur expression (hétérochronies) ce qui a provoqué le non basculement du trou occipital et contribuer ainsi à l’acquisition de la bipédie exclusive dans la lignée humaine. De même, l’innovation responsable de l’augmentation du volume cérébral dans la lignée humaine (2ème innovation) serait une mutation d’un gène homéotique qui aurait provoqué un allongement du début de la période embryonnaire chez l’homme par rapport à celle des autres Hominidés (2 à 8 semaines) → la multiplication des neurones, qui marque le début du développement embryonnaire, est alors beaucoup plus importante, d’où l’augmentation du volume cérébral. Conclusion ; Le Hasard d’abord (les innovations) puis la nécessité (sélection naturelle) font évoluer (F.Jacob) - Les innovations germinales peuvent être favorables, défavorables ou neutres pour la survie de l’individu et donc de l’espèce dans un environnement donné - Les innovations favorables touchant des gènes de structure se répandent davantage au sein d’une population (sélection naturelle) et font donc évoluer phénotypiquement une population d’individus au sein d’une espèce : on parle de microévolution - Les mutations neutres peuvent aussi se répandre, au hasard : on parle de dérive génétique ; elles font évoluer la séquence des molécules (nucléotidiques et polypeptidiques) mais non le phénotype des organismes. - Les innovations touchant les gènes de développement peuvent avoir des conséquences morphologiques beaucoup plus importantes et laissent envisager comment a pu s’effectuer la macroévolution : « de petites causes ont pu produire de grands effets ! » - l’évolution est dite « contingente » c’est-à-dire qu’elle est imprévisible, dépendante du hasard et des variations du milieu: elle est le résultat d’une interaction entre les organismes et le milieu dans lequel ils se trouvent : même s’il existe des « tendance évolutives » cela ne signifie pas qu’il existe un plan établi par un « grand organisateur » vers un état de plus en plus parfait qui serait : « l’homme ! » ) ; en d’autres termes, l’évolution n’a pas de sens (domaine SCIENTIFIQUE) ! … mais cela ne signifie pas qu’il ne faille pas donner un sens à notre existence (domaine SPIRITUEL OU MORAL) Une bactérie n’est pas moins évoluée que l’homme : elle a évolué autant que l’homme mais les innovations qui mènent de notre ancêtre commun (LUCA) aux bactéries actuelles sont seulement différentes de celles entre LUCA et nous !