Le processus de féodalisation
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Le comte est entouré d'auxiliaires : des vicomtes (choisis par le comte et placés sous son autorité) et des
centeniers (nommés par le comte au niveau du village). Leurs fonctions sont très étendues : pouvoir de police,
fonctions judiciaire, militaire et fiscale ; il préside le tribunal de police des francs.
- l'utilisation des structures ecclésiastiques à des fins d'administration : l'église est organisée selon une
hiérarchie dont la tradition remonte à l'antiquité romaine. Cette hiérarchie souffre durant la période mérovingienne,
mais est remise en vigueur sous les carolingiens, quand le pape Adrien remet à Charlemagne la collection canonique
Dionysiana-Hadriana. Charlemagne décide en 774 de réformer l'Eglise pour restaurer cette hiérarchie. Il réalise
la reforme au début du IX
ème
= création d'une province ecclésiastique à la tête duquel on place un archevêque,
rattaché directement au pape. Il légifère et est juge en matière religieuse. A l'échelon inférieur, le diocèse est dirigé
par un évêque. C'est l'élément le plus important de la hiérarchie : il est entouré de chanoines qui forment son conseil
= le chapitre. Il a seul pouvoir d'ordre = il administre, enquête et juge dans sa circonscription.
Les diocèses sont fractionnés en archidiaconés dirigés par des archidiacres. Ils sont fractionnés en doyennés, elles-
mêmes fractionnées en paroisses. Théoriquement, les évêques restent élus par le clergé et par le peuple de leur église,
mais en pratique, leur nomination est contrôlée par le pouvoir royal ou impérial. Charlemagne s'est même octroyé le
droit de refuser ou d'agréer certains candidats. En échange de sa fidélité à l'empereur, l'évêque recevait une gratification
sous forme de terre = le temporel de l'Eglise.
L'épiscopat doit en période de mobilisation assurer la transmission des ordres, voire organiser la mobilisation.
Les abbayes dans certains cas doivent mettre des troupes à la disposition de l'état. Un capitulaire de 817 distingue les
abbayes qui prient, celles qui apportent de l'argent, et celles qui recrutent.
L'Eglise est aussi associée en matière d'administration générale via le mécanisme des immunités = un
domaine est soustrait à l'action des agents ordinaires du roi et est rattaché directement à l'administration centrale
devant laquelle le propriétaire du domaine sera personnellement responsable de la plupart des services administratifs.
L'immuniste a tous les pouvoirs pour agir au nom du souverain, et doit veiller à l'exécution de ses ordres (surtout
à la perception des impôts). En contre partie, il bénéficie d'une grande liberté d'action et a de nombreux avantages
financiers. Ce régime est très vite devenu le régime normal des abbayes et des églises. Dès que les immunistes
considèrent qu'il n'y a plus d'intérêt supérieur à défendre, ils estiment que les pouvoirs qui leur ont été
délégués leur appartiennent. Un tel système risque donc de créer des zones potentielles d'autonomie.
- le contrôle de l'administration ordinaire = les missi dominici ont été créés par Charlemagne pour porter
remède aux négligences et à la corruption qui risque de miner l'autorité. Ils vont toujours par deux (un laïc et un
ecclésiastique). Ils sont envoyés dans tout le territoire pour faire connaître les ordres et les volontés du
souverain. Leur institution est généralisée à partir de 802. Ils ont des pouvoirs très larges non précisément énumérés
: ils effectuent un travail de contrôle de toute l'administration comtale et épiscopale.
Malgré tous ces efforts, l'encadrement des populations est insuffisant, et les rois carolingiens ont recours à des
institutions supplétives.
* Les institutions supplétives : leur but est de multiplier les convois de transmission entre les pouvoirs et les
individus = encadrer les individus. Les carolingiens ont créé des réseaux efficaces de fidélité. C'est une vieille
technique mérovingienne (la commandatio) qu'ils ont adapté et transformé en un mécanisme de vassalité.
La vassalité = le contrat de vasselage est un contrat privé passé entre 2 personnes de condition libre. Au
terme de ce contrat, le vassal s'engage aux services d'un autre homme = le seigneur qu'il reconnaît pour maître.
Le vassal rend des services et le seigneur doit protection. Ce contrat s'est répandu à l'époque mérovingienne car il y
avait une forte insécurité et les hommes libres recherchaient protection auprès des plus puissants, qui se créaient des
réseaux de clients. A l'époque carolingienne, l'octroi d'un bienfait (= un bénéfice) est généralisé = le vassal est
chasé. Les carolingiens ont encouragé les comtes et les grands ecclésiastiques à entrer dans leur vasselage : il y a
donc eu 2 liens entre le comte et le roi = celui qui unit tout fonctionnaire aux représentants de l'état et le lien
personnel de fidélité qui unit le comte au monarque. De plus, la monarchie a incité les hauts fonctionnaires à
multiplier leurs vassaux = dangers à partir du IX
Eme
, car la remise d'un bénéfice à chaque vassal nécessite un
grand réservoir de terre et l'extension du territoire devient une nécessité vitale ; le roi a favorisé la constitution de
clientèles, et les vassaux obéissent d'abord à leur seigneur puis au roi, or un seigneur puissant doté de nombreux
vassaux peut envisager de se révolter contre l'autorité royale = danger de sédition ; en intégrant la vassalité dans
le système de gouvernement, le roi fait naître des confusions : le comte vassal du roi a une double relation avec le
roi, a deux biens (dotation foncière et bénéfice) = il est facile de considérer que la dotation foncière et le bénéfice se
confondent et que la fidélité que les comtes doivent au roi est simplement d'origine contractuelle et non pas liée à la
fonction publique qu'assume normalement le comte.