Généralités sur l`origine des cancers. Notion de facteurs génétiques

1
LES FORMES HEREDITAIRES DES CANCERS DIGESTIFS
Docteur Bruno Buecher, Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris & Comité de Rédaction
du site web de la Fédération Francophone de Cancérologie Digestive
Date de mise en ligne: Janvier 2009
Ce document est destiné à l’information des malades, de leurs proches et « du grand public ».
Il a été rédigé dans un souci de simplification et de concision. N’hésitez pas à interroger vos
médecins en cas d’incompréhension ou si vous avez besoin d informations complémentaires.
Généralités sur l’origine des cancers. Notion de facteurs génétiques et de
facteurs d’ « environnement ».
L’origine des cancers reste actuellement mal connue dans la majorité des cas. Leur apparition
implique généralement différents facteurs qui peuvent être regroupés en facteurs génétiques et
en facteurs dit d’ « environnement » tels que les habitudes alimentaires, la consommation
d’alcool et de tabac, l’exercice physique, l’obésité, des agents infectieux … L’augmentation
modérée du risque de cancer d’un type donné chez les apparentés au premier degré (c’est-à-
dire chez les parents, frères et sœurs et enfants) d’un individu atteint est une observation
ancienne. Elle se vérifie pour de nombreux types de cancers, en particulier pour le cancer du
gros intestin (côlon) et du rectum, le cancer de l’estomac et le cancer du pancréas. Elle
s’explique vraisemblablement par le « partage » partiel de facteurs génétiques et
d’environnement entre les individus atteints et leurs apparentés.
Qu’entend-on par « formes héréditaires de cancers » ?
Dans un petite minorité de cas, la génétique est prépondérante dans l’apparition des cancers
en raison de l’altération par mutation d’un gène qui exerce normalement une fonction de
protection vis-à-vis de l’apparition d’un cancer d’un type donné. On parle de gène
suppresseur de tumeur. La perte de la fonction de ce gène chez un individu est associée à un
risque spontané très élevé de survenue d’un cancer au cours de son existence. Cette mutation
est généralement héritée de l’un des parents et transmissible aux enfants. On parle de formes
héréditaires de cancers. Il existe différentes formes héréditaires de cancers du côlon et du
rectum, de l’estomac et du pancréas. Elles impliquent une altération de gènes suppresseurs de
tumeurs différents.
2
Pourquoi est-il important d’identifier les formes héréditaires de cancers ?
Les formes héréditaires de cancers sont des maladies très rares. Il est cependant essentiel de
les identifier en raison du risque spontané très élevé de survenue d’un ou de plusieurs
cancers chez les individus porteurs de la prédisposition génétique. Cette situation justifie la
mise en place d’une surveillance particulière dont l’objectif est de prévenir ou d’identifier
précocement les cancers, à un stade la chirurgie permet de le guérir. L’enjeu est donc
majeur, à la fois pour l’individu chez lequel une forme héréditaire de cancer est suspectée et
pour ses apparentés.
Quand faut-il évoquer une forme héréditaire de cancers ?
Les principaux éléments devant faire évoquer la possibilité d’une forme héréditaire de cancers
sont les suivants :
Plusieurs cancers d’un même type (par exemple, plusieurs cancers du côlon) ou de types
différents mais « génétiquement associés » (par exemple, cancer du côlon et cancer du corps
de l’utérus), diagnostiqués simultanément ou successivement chez un individu donné.
Plusieurs cas de cancers d’un même type ou de cancers « génétiquement associés »
diagnostiqués chez plusieurs individus issus d’une même famille et plus précisément d’une
même branche parentale (branche paternelle ou branche maternelle).
Diagnostic de l’un ou de plusieurs de ces cancers à des âges inhabituellement jeunes (en
règle générale, inférieur à 60 ans).
D’autres circonstances ou manifestations sont également évocatrices : présence de multiples
polypes au niveau du côlon et du rectum (on parle de « polypose »); association à diverses
lésions bénignes de la peau et/ou des muqueuses (lèvres, gencives, langue …) ou à des
malformations variées ; cancer de l’intestin grêle ou du duodénum …
Ces éléments soulignent l’importance du recueil des informations concernant les
antécédents médicaux d’un individu chez lequel a été diagnostiqué un cancer mais
également de ses apparentés.
En pratique, le diagnostic est parfois très facile à évoquer lorsqu’il existe importante
agrégation familiale de cancers et/ou une présentation clinique caractéristique chez un ou
plusieurs individus. Dans des situations moins évocatrices, le diagnostic peut être plus
difficile à établir et nécessiter la réalisation d’examens complémentaires. L’aide d’un médecin
généticien spécialisé dans l’identification des prédispositions génétiques aux cancers (appelé
onco-généticien) peut être précieuse.
3
Cas particulier : les formes héréditaires de cancers du gros intestin (côlon)
et du rectum.
Les formes héréditaires des cancers du côlon et du rectum sont les mieux connues. Elles ne
sont responsables que de 5% environ de l’ensemble des cancers colorectaux. On distingue
schématiquement les formes dites « polyposiques », c’est-à-dire associées à la présence de
multiples polypes du côlon et du rectum et les formes non polyposiques, également appelées
syndrome HNPCC (Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer) ou syndrome de Lynch.
Les formes polyposiques sont faciles à identifier en raison de la présence de nombreux
polypes à la coloscopie. Il en existe différents types en fonction de la nature des polypes.
Dans tous les cas, elles témoignent de la présence d’un facteur génétique de prédisposition et
constituent une indication de consultation spécialisée (gastroentérologie et/ou génétique) afin
de préciser le type et de rechercher la mutation causale.
Les formes non polyposiques sont plus difficiles à identifier. Le diagnostic n’est pas basé
sur les données de la coloscopie qui ne sont pas spécifiques mais sur les arguments énoncés
ci-dessus : multiples cas chez un même individu ou chez plusieurs individus issus d’une
même branche parentale et précocité des diagnostics. Cette forme héréditaire est également
associée à une augmentation du risque d’autres types de cancers chez les sujets atteints :
principalement cancer du corps de l’utérus (endomètre), mais également cancers de l’intestin
grêle ; des voies urinaires (bassinets et uretères) ; des voies biliaires ; des ovaires et de
l’estomac. L’association de ces cancers aux cancers du côlon et du rectum dans une même
famille est donc évocatrice de ce diagnostic.
Quels sont les objectifs de la consultation de génétique oncologique ?
L’objectif de la consultation de génétique est d’évaluer la probabilité qu’une « histoire
individuelle et/ou familiale » soit le reflet d’une prédisposition génétique majeure aux
cancers, c’est-à-dire, qu’il existe une forme héréditaire de cancer dans cette famille.
Elle permet parfois de rassurer les individus en écartant ce risque. Parfois au contraire, ce
diagnostic est retenu (d’emblée ou après la réalisation d’examens complémentaires). Dans
cette situation, il convient d’essayer d’identifier l’anomalie génétique responsable. La
recherche d’une mutation dans un gène suppresseur de tumeur est une opération complexe qui
n’est réalisée que dans un nombre limité de laboratoires spécialisés. Elle cessite d’avoir
accès au patrimoine génétique de l’individu testé, c’est -à-dire à son ADN qui se trouve dans
le noyau des cellules de l’organisme et contient l’information génétique. Pour des raisons de
facilité, elle s’effectue le plus souvent à partir de l’ADN contenu dans les globules blancs
obtenus au moyen d’une simple prise de sang. L’analyse génétique n’est jamais imposée mais
uniquement proposée et sa réalisation est conditionnée par l’obtention préalable d’un
consentement écrit de l’individu concerné. Elle ne peut être réalisée que chez un individu
ayant lui même eu un cancer et non à partir d’un apparenté indemne. Le temps d’analyse est
4
long et le résultat n’est généralement pas disponible avant plusieurs mois. Il est rendu
uniquement à la personne chez laquelle l’analyse a été réalisée dans le cadre d’une
consultation dédiée.
Lorsque la mutation est finalement identifiée, sa recherche peut être proposée dans un
second temps aux apparentés de l’individu porteur. C’est à lui qu’il revient d’informer, s’il
le souhaite, les membres de sa famille de l’identification d’une mutation prédisposant à la
survenue de cancers et de la possibilité de déterminer s’ils en ont ou non hérité et donc s’ils
doivent faire ou non l’objet d’une surveillance spécifique. Dans cette situation en effet, le fait
de ne pas la retrouver la mutation familiale chez un apparenté permet d’affirmer sans
ambiguïté que ce dernier n’a pas hérité du syndrome de prédisposition au cancer.
Il est importer de noter que l’absence d’identification d’une mutation dans une famille
(recherche initiale faite à partir d’un individu ayant eu un cancer) ne permet pas
nécessairement d’éliminer une forme héréditaire de cancer qui impliquerait l’altération de
gènes de prédisposition non encore identifiés au moment de l’analyse. L’interprétation d’un
résultat négatif est donc délicate. Dans une telle situation, l’évaluation du niveau de risque et
l’établissement d’un programme de dépistage adapté seront basés sur les données de l’histoire
familiale et il n’est pas possible de proposer d’étude génétique aux apparentés des individus
atteints.
Que faire si vous vous interrogez sur l’existence d’une forme héréditaire de
cancer dans votre famille ?
Si vous ou vos apparentés vous interrogez sur la possibilité d’une forme héréditaire de cancer
dans votre famille et que ce point n’a pas été abordé spontanément par vos médecins ou
chirurgiens, il est important que leur fassiez part de votre inquiétude en leur rapportant aussi
précisément que possible vos antécédents personnels et familiaux. Si ces données le justifient,
ils pourraient être amenés à vous orienter vers une consultation de « génétique oncologique »,
également appelée consultation d’ « oncogénétique ».
1 / 4 100%

Généralités sur l`origine des cancers. Notion de facteurs génétiques

La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !