Le climat - DSDEN de Lot-et

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Le climat de la vallée de la Garonne : un climat propice à l’agriculture ?
La vallée de la Garonne est réputée depuis longtemps pour sa douceur de vivre et ses paysages
humanisés qui l’ont fait souvent comparer à la Toscane. Cette réputation est en grande partie liée
aux caractères généraux de son climat sans excès notable. Pourtant à y regarder de plus près, le
climat du Val de Garonne n’est pas sans nuances, ni exempt de violences. La variabilité des
précipitations comme celle des températures peuvent avoir des conséquences importantes sur les
rythmes agricoles ; mais plus encore que la variabilité générale, connue de tous, ce sont les accidents
climatiques, par définition imprévisibles qui sont les plus dangereux. Cette étude tente de mettre en
exergue les principaux risques encourus par l’agriculture liés aux accidents climatiques principaux
que sont ici le gel et la grêle. Dans une troisième partie, nous nous attacherons aussi à montrer les
problèmes que pose le réchauffement climatique annoncé et déjà à l’œuvre en particulier pour les
vignobles de la vallée de la Garonne.
I - Un climat tempéré de transition.
Le climat de la vallée de la Garonne appartient à la famille des climats tempérés, et à la sous famille
des climats de type océanique ; une transition de plus en plus nette se produit de l’aval vers l’amont,
pour aboutir dans la région toulousaine à un climat aux nuances méditerranéennes marquées.
1- Les données générales1.
La rareté des températures extrêmes.
Si l’on ne prend en compte que les températures moyennes annuelles, il y a une évidente
homogénéité du val de Garonne : + 12,8° à Bordeaux, + 12,7° à Agen, et + 12,9° à Toulouse. De la
même façon, l’amplitude thermique moyenne se situe entre 9,6° à Bordeaux et 9,8° à Agen pour 9,7°
à Toulouse. Quelques nuances peuvent cependant être mises en valeur au niveau de la vallée.
En effet, si l’on observe les températures moyennes, entre le mois de mai et octobre, c’est à
Toulouse qu’il fait le plus chaud. A l’inverse entre novembre et mars c’est à Bordeaux que l’on
relève les moyennes les plus douces. Cette différence s’explique facilement par la position des deux
villes. Bordeaux bénéficie d’un climat franchement ouvert aux influences maritimes, alors que
Toulouse plus à l’intérieur des terres, est moins bien régulée. Entre les deux, Agen se caractérise par
un hiver légèrement plus frais.
Les amplitudes thermiques montrent que le climat bordelais connaît d’assez fortes irrégularités en
hiver et au printemps. Dans le Toulousain, c’est surtout l’été qui peut se révéler caniculaire.
L’agenais enfin, se singularise par les plus fortes amplitudes de la vallée sur l’ensemble de l’année.
L’analyse du nombre de jours avec gelée confirme les premières données de l’analyse
thermométrique. Agen connaît les gelées les plus étendues dans le temps avec 40,7 jours en moyenne
par an, contre 38 à Bordeaux et 36,9 à Toulouse. Statistiquement les gelées se produisent toutes entre
octobre et avril avec la même répartition en fréquence sur l’ensemble de la vallée : janvier,
décembre, février, mars puis novembre sont les mois les plus risqués par ordre décroissant. En
octobre et en avril les gelées sont plus exceptionnelles, mais elles peuvent avoir de grands effets sur
l’agriculture de la vallée. Plus que les jours avec gelée, il faut en fait considérer le nombre de jours
de gel. Au minimum on se situe entre 11 et 15 jours par an. A l’opposé, les années les plus
rigoureuses totalisent entre 55 jours à Toulouse et 65 jours à Bordeaux (parmi celles-ci, 1962, 1964,
1965, 1970 et 1973 sont restées gravées dans les mémoires).
Une pluviométrie capricieuse.
La hauteur annuelle des précipitations montre des différences plus marquées que pour les
températures. On enregistre à Bordeaux 923,1 mm contre seulement 716 mm à Agen et 655,7 à
Toulouse. Ces différences importantes traduisent simplement l’effet de la baisse de l’influence
océanique lorsque l’on se déplace d’aval en amont dans la vallée.
A Bordeaux, les précipitations sont à la fois relativement abondantes et régulièrement distribuées.
Le diagramme pluviométrique forme un « V » presque parfait montrant un maximum d’hiver, un été
relativement sec et des saisons intermédiaires moyennes. Au total, les précipitations s’étalent sur un
peu plus de 170 jours en moyenne par an, avec un minimum de 11 jours en juillet et 17 jours au plus
en janvier.
Dans le Toulousain, la distribution annuelle traduit une nette tendance au maximum de printemps,
avec un creux très relatif en été et en automne. Cette répartition confirme l’influence
méditerranéenne sensible jusque dans le Toulousain. Contrairement à une idée communément
répandue, toutefois, les précipitations sont assez fréquentes puisqu’elles s’étalent sur 146 jours en
moyenne. Par contre la répartition mensuelle est beaucoup plus tranchée que dans le Bordelais.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, Agen ne constitue pas un type intermédiaire entre
Bordeaux et Toulouse sauf en ce qui concerne le total des précipitations et le nombre de jours de
pluie par an. Pour le reste, l’Agenais développe des caractères propres (décalage du creux d’été en
septembre en particulier).
2- Les caractères spécifiques du climat garonnais.
Le régime des vents : des grands flux d’ouest au vent d’autan2.
Concernant le régime des vents, il est rare de rencontrer sur un espace aussi restreint une telle variété
de cas de figures.
Située en position sub-littorale, largement ouverte sur l’océan et par ailleurs à l’abri d’aucun relief
particulier dans quelque direction que ce soit, Bordeaux présent une rose des vents assez équilibrée.
Les vents modérés (2 à 4 mètres par seconde) sont assez largement dominants et représentent plus de
la moitié des fréquences cumulées. Cependant ce sont des fractions Ouest-Nord-Ouest et Sud-Ouest
que viennent la très grande majorité des vents forts, c'est-à-dire au-delà de 8 mètres par seconde
(m/s) pouvant aller jusqu’à la tempête. Les vents forts se concentrent essentiellement en hiver et dans
une moindre mesure au printemps, l’automne étant la saison où les directions s’équilibrent le mieux.
A l’autre extrémité du Val de Garonne, le Toulousain présente une situation bien différente. La rose
des vents y est très déséquilibrée. Les fréquences les plus élevées se situent d’une part dans le quart
Nord-Ouest et d’autre part dans le quart Sud-Est. La première direction trahit les influences
océaniques, alors que la seconde relève de la composante méditerranéenne. Dans les deux cas, la
proportion de vents forts est très nettement supérieure à ce que l’on enregistre dans le Bordelais.
Toulouse n’est donc à l’abri ni des tempêtes océaniques, ni du vent d’autan. Sur l’ensemble de
l’année la ville connaît 39,1 jours de vent violent (vitesse supérieure à 16m/s) contre seulement 33,5
à Bordeaux. A l’automne et au printemps souffle l’autan noir, le plus redouté. En hiver et au
printemps les flux océaniques se font davantage sentir. Plus rarement en hiver (lié à un beau temps
froid et sec), et encore plus rarement en été lié cette fois à un temps très chaud) l’autan blanc peut
faire sentir ses effets.
L’Agenais enfin, représente un troisième type encore distinct des deux précédents. Il est marqué par
la très grande faiblesse moyenne des flux aériens ; 40 % des vents n’atteignent pas 2m/s. Par ailleurs,
l’effet couloir joue ici à plein et explique la très grande prépondérance des flux d’Ouest et d’Est. Les
vents forts ne sont présents en moyenne que durant 20,4 jours dans l’année. En hiver, ils ne sont que
les échos lointains des turbulences océaniques ; parfois également le vent d’autan arrive à faire sentir
quelques effets, surtout au printemps, mais on est là aux limites de son aire d’influence.
Brumes et brouillards de vallée3.
Malgré les difficultés inhérentes à l’étude de phénomènes aussi fugaces et localisés que les brumes et
les brouillards, toutes les données concordent pour dire que le Val de Garonne appartient aux régions
françaises qui connaissent le plus grand nombre annuel moyen de jours avec brouillard. Si l’on ne
compte que 38 jours en moyenne par an de brouillard à Toulouse, on monte à 59 jours à Bordeaux et
65 à Agen. La situation agenaise s’explique par le fait que l’air froid des basses couches est bloqué
par l’effet vallée ; il joue ainsi le rôle de couvercle pour l’humidité liée au fleuve et à ses environs.
En même temps, le contact entre la masse d’air froid stationnaire dans le fond de la vallée et l’eau
relativement plus chaude du fleuve provoque une condensation importante, qui génère des brumes et
des brouillards d’une grande stabilité. L’automne et l’hiver sont les saisons les plus touchées.
II - Altération des rythmes et accidents climatiques.
L’analyse des données générales et des caractères spécifiques a permis de dégager une personnalité
climatique du Val de Garonne, nuancée suivant que l’on se situe en amont ou en aval. Mais au-delà
de l’affirmation des grands traits du climat, les oscillations dans le temps sont nombreuses, et de
divers ordres. Contrairement à une idée communément admise, la variabilité climatique est forte et
les accidents climatiques sont fréquents. Les conséquences sur l’agriculture sont loin d’être
négligeables.
1- L’altération des rythmes climatiques normaux.
Une variabilité climatique sensible4.
L’observation de la variabilité pluviométrique fait ressortir une différence assez nette entre Bordeaux
d’un côté et Agen et Toulouse de l’autre. C’est à Bordeaux que les précipitations apparaissent les
plus irrégulières et sur la plus large période. Le quintile supérieur montre que de mai à novembre le
quintile supérieur dépasse l’indice 150. A Agen et Toulouse seuls deux mois sont concernés
(respectivement septembre-octobre et août-octobre). Si l’on observe le quintile inférieur, c'est-à-dire
les mois déficitaires par rapport à la moyenne, on retrouve à peu près le même constat. A Bordeaux,
sept mois de l’année peuvent tomber au dessous de l’indice 50 de juin à décembre, quatre seulement
à Agen et six à Toulouse. On peut donc tirer de cette analyse deux conclusions principales. La
première est que contrairement à une idée généralement répandue, le climat océanique bordelais est
beaucoup plus fantasque de celui de l’Agenais et a fortiori du Toulousain. Toutefois les
conséquences de la variabilité pluviométrique sur l’agriculture ne sont pas identiques dans tous les
cas. Dans le Bordelais, l’excès d’eau que l’on constate une année sur cinq en moyenne entre le
printemps et l’automne est souvent préjudiciable à la viticulture de qualité. Au contraire, et bien
qu’étant plus rare, les excès constatés en Agenais et dans le Toulousain entre l’été et le début de
l’automne sont beaucoup mieux perçus dans une région dominée par la maïsiculture et
l’arboriculture fruitière. Inversement, le manque d’eau n’est pas fondamentalement dommageable
pour la vigne, alors qu’il peut s’avérer catastrophique pour les autres cultures.
L’analyse de la variabilité thermique selon le même procédé est moins riche d’enseignements. Deux
faits seulement sont notables ; d’une part la quasi identité de comportement d’un bout à l’autre de la
vallée. La seule différence vient de ce que les excès dans un sens ou dans l’autre sont plus importants
à Toulouse et à Agen qu’à Bordeaux, ce que l’on savait par ailleurs. Paradoxalement, le fait le plus
important concerne les froidures éventuelles en mars-avril qui peuvent se révéler très menaçantes en
fonction de l’état végétatif des cultures. On retrouve ce risque une année sur cinq environ.
Cependant, l’étude statistique ne sert ici qu’à mesurer un aléa (occurrence). Pour étudier le risque
réel il faut aller beaucoup plus loin dans l’analyse.
Variations climatiques : l’impact d’une période de sécheresse.
Document 1 : Les précipitations annuelles à Agen.
Source : J.F. Berthoumieu : Réchauffement climatique et conséquences. Août 2007. Diapo 33/128.
2- Des accidents climatiques durement ressentis.
Des gelées printanières assez fréquentes mais dont l’occurence est en voie de
diminution.
L’étude du gel s’avère particulièrement délicate, surtout lorsqu’il s’agit d’appréhender ses
conséquences dans le domaine agricole. Celles-ci dépendant en effet d’au moins cinq facteurs
déterminants5. Concrètement l’analyse des données disponibles montre que les risques sont élevés
dans la vallée de la Garonne. Entre 1970 et 1991, il n’y a pas eu une seule année sans gelée entre les
mois de mars et de mai. Historiquement, les plus sévères d’entre elles, celles qui ont provoqué le plus
de dégâts ont été celles de 1954, 1955, 1956, 1962, 1967, 1970, 1975, 1977, 1991, 1993.
Historiquement cependant, une étude plus large menée par l’ACMG, montre que l’occurrence du
nombre de nuits gélives diminue lentement. On est passé d’une moyenne de 12 nuits de gel par an
avant 1980 à 8 aujourd’hui. Il ne faut surtout pas se tromper sur l’interprétation de cette tendance. La
diminution du nombre moyen de nuits gélives enregistrées chaque année ne signifie pas leur
disparition. D’autre part comme nous pouvons le voir sur le document 2, les dégâts ne sont pas
proportionnels au nombre de jours de gel ; une seule journée en 1977 et deux jours en 1991 ont suffit
pour provoquer des pertes généralisées. Inversement, en 1985 de nombreuses journées de gel ne se
sont pas traduites par des dégâts importants ; en 1987, où des gelées ont eu lieu jusqu’au mois de
mai, il n’y a pas eu de dégâts significatifs non plus. C’est que le risque est lié à la combinaison de
plusieurs facteurs. Cela signifie que la diminution du nombre de jours de gel n’élimine en rien le
risque agricole ; on peut cependant craindre que certains exploitants n’anticipent cette situation, et ne
prennent pas en compte ce risque dans le calcul de rentabilité économique de leur exploitation.
Document 2 : Les gelées et leurs dégâts en Val de Garonne entre 1977 et 1991.
Année Dates des gelées
Stade
A(vance)
Seuil
T° à 1,5 m
végétatif
N(ormal)
critique
du sol
(a)
R(etard)
du pêcher
(d)
(b)
(c)
30-31/03
I
A
- 1,3
- 2,0 à – 5,5
1977
1978
08-09/04
06-08/03
18-19/03
10-12/04
15-17/04
21-22/04
I
B-D
C-F
F-H
G-I
F-I
A
R
R
R
R
R
- 1,0
- 3,0 à – 3,5
- 2,5
- 1,5
- 1,0
- 1,0
- 1,0
- 1,2
- 2,2
- 1,2
- 1,2 à – 2,5
0,0
1979
26-28/02
04-05/05
A-C
H-I
AàN
N
Non
- 1,0 à – 1,7
- 6,2
- 1,3
02-05/03
13/03
22/03
29/03
03/04
06/04
09-10/04
23/04
A-D
C-G
A
A
Non
- 2,2
- 2,4
- 4,8
E-H
A
- 1,5
- 3,2
G-I
A
- 1,0
- 1,3
16-19/03
17-28//04
C-F
G-J
A
A
- 2,4
- 1,0
- 2,2
- 1,5
1980
1981
Dégâts occasionnés
Dégâts importants et généralisés.
Dégâts sur pêchers, pruniers et
poiriers surtout dans les vallées. Les
gelées et la faiblesse des T° durant
l’hiver, combinées à une pluviométrie
importante ont provoqué de fortes
chutes physiologiques et une faible
récolte.
Destruction des bourgeons au stade C
sur pêchers et nectarines, russeting
sur golden.
Dégâts faibles. Cependant, dans le
courant du mois de mai, une
importante chute physiologique laisse
supposer une influence a posteriori es
basses T° du mois de mars
Quelques dégâts sur pêchers les plus
précoces. Du 18 au 28 avril peu de
dégâts sur fruitiers, mais surtout sur
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
(a)
(b)
(c)
(d)
23/02
05-07/03
13-15/03
24-26/03
10-18/04
25/04
02-10/05
16-20/03
28-30/03
03/04
12-15/04
18/04
28/04
Mars
02-04/04
7-13/04
16-19/04
05-10/03
12-21/03
29/03
28/04
19/03
21/03
03/04
10-14/04
15-21/03
30/03
11/04
14-15/04
08/05
14-18/05
21/05
24/02-06/03
9-15/03
27/03
07-09/03
13/03
17-20/03
25/03
22/04
26/04
02-06/03
14/03
23, 26, 29/03
03/04
20-22/04
fraises, pommes de terre et vignes.
Peu de dégâts apparents.
B-E
B-F
A
A
- 2,8
- 1,8
- 4,2
- 3,7
F-I
A
- 1,0
- 1,0
I
C-F
A
N
Non
- 2,2
- 0,1
- 0,8
E-H
N
- 2,6
- 1,2
?
C-G
R
R
?
- 1,8
?
- 3,5
Aucun dégât au mois de mars.
Peu de dégâts au mois d’avril, seules
deux nuits ont été critiques.
B-G
R
- 1,2
- 5,6
Pas de dégâts en raison du retard
végétatif.
D-I
B-E
N
R
- 1,0
- 2,8
- 0,1
- 2,0
C-G
D-F
C-D
R
R
R
- 1,8
- 1,0
- 2,2
- 2,2
- 2,5
- 5,4
Quelques dégâts sur cultures basses.
Malgré un nombre important de jours
de gel, peu de dégâts à cause du
retard végétatif.
E-H
R
- 0,6
+ 0,2
H-J
R
- 0,6
+ 1,4
B-F
B-G
A pêchers
R poiriers
pommiers
- 2,2
- 1,8
- 6,6
- 3,9
C-H
N
- 2,8
- 0,5
De la fin février à fin mars 14 jours
de gel. Dégâts sur pêchers précoces y
compris vergers
de coteaux ;
déformation des fraises.
Quelques dégâts minimes.
G-I
A
- 1,0
+ 0,3
Aucun dégât majeur.
?
?
?
?
- 2,2
- 1,2
- 2,5
- 1,8
Non renseigné.
?
G-I
?
A
- 0,6
- 1,0
- 3,0
- 3,5
Seuls quelques vergers de pêchers et
kiwis ont été touchés.
Importante chute physiologique sur la
plupart des fruitiers et fraisiers.
Aucun dégât significatif.
Dégâts les plus sévères depuis 1977
en raison des T° basses pour la
saison, de l’avance végétative et des
pluies juste avant le gel.
Le stade végétatif est ici donné pour les principales espèces cultivées dans la région soit : poiriers, pêchers, pruniers, pommiers,
cerisiers.
L’avance, le retard et la normalité des stades phénologiques sont évalués suivant des moyennes portant sur 18 ans d’observation.
Le seuil critique de sensibilité est celui de l’espèce la plus fragile au stade considéré, soit en général le pêcher.
Les T° données sont celles qui ont été relevées à la station de l’ACMG sur l’aérodrome d’Agen-la-Garenne.
Source : M.Mouton : Le Val de Garonne : économie agricole d’une région géographique. Thèse de doctorat d’université.
P 226-227
Document 3 : L’occurence de gel à Agen de février à mai entre 1951 et 2006.
Source : J.F. Berthoumieu : Réchauffement climatique et conséquences. Août 2007. Diapo 5/128.
Orages et grêles.
Appartenant aux régions les plus exposées, le Val de Garonne se signale par un nombre moyen de
jours avec orage partout élevé : 30,7 à Bordeaux, 30,1 à Agen et 25,8 à Toulouse. La répartition
mensuelle de ces orages est remarquablement uniforme d’un bout à l’autre de la vallée. Le mois
d’août est toujours le plus risqué, suivi dans l’ordre décroissant des mois de juillet, juin, mai et
septembre. Si les ascendances orageuses sont presque toujours générées par les mois les plus chauds,
les années de canicule sont particulièrement frappées. Il y a eu par exemple 43 jours d’orage à
Bordeaux en 1976, 55 à Agen En 1983 et 38 à Toulouse la même année.
Comme de nombreuses vallées du Sud-Ouest de la France, la vallée de la Garonne est un couloir
gréligène majeur. L’effet de couloir peut se constater visuellement, en particulier dans la zone de
confluence du Lot et de la Garonne, où la masse orageuse peut parfois se diviser et remonter
séparément chaque vallée.
De la même façon que pour les gelées, l’étude des épisodes orageux et gréligènes est rendue difficile
en raison principalement de leur caractère très localisé. Une analyse fine des documents montre
toutefois que le risque est élevé. Le document 4 permet de tirer quelques enseignements importants ;
en tout premier lieu, le graphique montre que le risque de grêle est quasi permanent. En effet, sur une
durée de 41 ans, seules 3 années se sont révélées sans orage de grêle. En moyenne ce sont 2,7 jours
par an sur l’ensemble de la période qui sont soumis à ce type d’évènement. Le second trait tient à ce
que contrairement à une idée reçue, l’analyse de la répartition par période des chutes de grêle montre
que l’on a plus de chances de subir un orage entre novembre et avril (60 jours cumulées sur la
période considérée), qu’entre mai et octobre (52 jours). En termes de dommages toutefois, les deux
périodes ne sont pas équivalentes. La période la plus redoutée est l’été et l’automne, pendant laquelle
les orages très violents peuvent provoquer des dégâts irréversibles sur certaines cultures céréalières,
mais aussi sur la production fruitière ou la vigne. Ce constat a justifié l’équipement massif en
quelques années de filets paragrêle par les arboriculteurs de la région.
La comparaison avec Astaffort et Sérignac, deux communes qui appartiennent aussi à la vallée de la
Garonne mais qui sont situées sur les coteaux, montre que les rythmes ne sont pas exactement les
mêmes. Les moyennes mobiles montrent une occurrence de grêle un peu supérieure à la région
d’Agen puisqu’on se situe ici entre 3 et 4 jours par an en moyenne (3,2). Il n’y a là rien que très
normal compte tenu du caractère toujours très localisé des orages de grêle.
Document 4 : Le nombre de jours de grêle à Agen de 1961 à 2001.
M.Mouton. d’après sources statistiques ACMG.
Document 5 : Le nombre de jours de grêle à Astaffort et Sérignac.
M.Mouton. d’après sources statistiques ACMG.
III - Le Val de Garonne face au réchauffement climatique : le cas des vignobles.
Le réchauffement climatique ne représente pas en lui-même un aléa ; il est même perçu par de
nombreux acteurs de terrain comme un bienfait dans la mesure où les récoltes des ces dernières
années se sont avérées globalement de bonne qualité, grâce à des étés plus chauds et secs en
moyenne ; certains n’ont pas hésité à parler de millésime du siècle à plusieurs reprises. Ce qui nous
importe ici, c’est de voir quelles sont les conséquences du réchauffement climatique sur le vignoble;
l’étude est infiniment plus délicate qu’il n’y paraît au premier abord, car les méthodes culturales ont
beaucoup évolué depuis un demi-siècle. C’est pour cette raison que nous avons fait porter notre
enquête de terrain sur trois segments de la vallée et trois vignobles différents (cépages et types de
vins élaborés).
1- Le cas du Frontonnais.
Il faut être particulièrement prudent lorsque l’on veut mesurer les conséquences du réchauffement
climatique à la lumière de la date de la première vendange. D’un point de vue scientifique il faut en
effet veiller à obtenir des séries homogènes qui ne portent que sur une seule exploitation d’une part,
sur un seul cépage, récolté par ailleurs dans la perspective de la même finalité, et enfin sur le sérieux
des données fournies. Un fois ces précautions prises, ce que nous avons fait pour les séries
considérées dans le cadre de cette étude, il faut aussi tenir compte d’un certain nombre d’autres
facteurs pouvant influer sur la date des vendanges. Si l’on prend le cas de l’exploitation viticole de
monsieur A. Pradier dans le Frontonnais, trois grandes séries de facteurs ont pu exercer une influence
sur la date des vendanges ; il s’agit en premier lieu du statut juridique de la vigne. Le vignoble de
Fronton n’a en effet été classé en A.O.C qu’en 1975. Le classement s’est accompagné de règles de
cultures beaucoup plus strictes en particulier en ce qui concerne le rendement. C’est ainsi qu’avant
classement les rendements moyens se situaient autour de 80 hectolitres par hectare ; dans de telles
conditions on peut raisonnablement penser que les ceps étant très chargés en grappes, la maturité
était quelque peu retardée ; inversement, depuis le classement en A.O.C, les rendements sont limités
à moins de 50 hectolitres par hectare. Les ceps étant moins chargés en grappes, on peut penser que la
maturité est plus précoce. Cependant, un autre phénomène vient contrecarrer (et compenser ?) ce
premier constat. Avant classement, le raisin était ramassé pour faire des vins qui ne titraient guère
qu’aux alentours de 10,5 degrés d’alcool, c'est-à-dire à un stade où la concentration en sucres n’était
pas encore très importante. Inversement, à l’heure actuelle le ramassage ne se fait guère avant que le
vin ne puisse titrer 12 degrés ce qui se traduit par un certain retard à la récolte.
Un autre facteur pourrait avoir une influence non négligeable sur la date des récoltes, sans que l’on
puisse en déterminer comme dans le cas précédent le rôle exact. Il s’agit du mode de conduite de la
vigne. L’observation empirique semblerait montrer que le non travail du sol agirait dans le sens
d’une maturité plus précoce. Dans l’ancien mode de culture en effet, le sol était systématiquement
labouré ; même peu profond, le travail du sol obligeait la vigne à développer des racines profondes.
Depuis longtemps maintenant, les modes culturaux ont changé, le sol d’est plus travaillé. Il a fait
l’objet dans un premier temps d’un désherbage intégral, remplacé aujourd’hui à l’inverse par un
enherbement entre les rangs de vigne. La conséquence en est un développement des racines
superficielles de la vigne ; or, cette nouvelle conduite semblerait accentuer la précocité de la maturité
des raisins.
Un troisième facteur allant dans le sens d’une plus grande précocité, reposerait sur le mode de
vendanges. Avant 1975 quand le vignoble de Fronton était encore en appellation V.D.Q.S, la
négrette représentait un assez faible pourcentage des vignes plantées, et les hybrides comptaient
encoure pour beaucoup dans les surfaces viticoles. La négrette était ramassée en même temps que les
autres cépages, ce qui est un facteur de retard supplémentaire. D’autre part, autrefois la vendange
était manuelle, et il fallait être sûr que le raisin était à bonne maturité avant de commencer la récolte
car l’on ne pouvait pas se permettre de fractionner le travail de vendangeurs. Aujourd’hui, la récolte
est mécanisée, ce qui permet de commencer la récolte au moment choisi, et peut ainsi contribuer à
accentuer la précocité.
Toutes ces précautions posées, on peut constater une tendance forte à l’avancement de la date des
vendanges, que traduisent à la fois la courbe des moyennes mobiles et la tendance linéaire. Si l’on
s’en tient à cette dernière, on peut constater que depuis les années 1970 les vendanges ont été
avancées de 24 jours en moyenne en avançant du 3 octobre au 9 septembre. La courbe des moyennes
mobiles montre que c’est véritablement dans les années 1980 que la tendance s’est inversée. L’année
de la récolte la plus tardive est 1980 (23 octobre), et celle de la récolte la plus précoce 2003 (2
septembre).
Document 6 : Evolution de la date du premier jour de vendange dans le Frontonnais pour le cépage négrette6
M.Mouton : d’après sources statistiques recueillies par enquête.
2- Le cas du Sauternais.
Comme dans le cas précédent, on ne saurait de contenter des données brutes sans prendre un
minimum de précautions avant toute comparaison. Par rapport au cas du Frontonnais il faut ici
éliminer un facteur. Il n’y a pas eu dans le cas présent de changement de statut juridique, le château
de la Tour Blanche appartenant au domaine d’appellation AOC dès l’origine. Les exigences légales
de culture n’ont donc théoriquement pas évolué sur l’ensemble de la période qui nous concerne.
Toutefois, à l’intérieur e cette règlementation, les méthodes de culture ont sensiblement évolué. En
effet jusqu’au début des années 1980, il semble que les rendements aient été poussés au maximum
légal ; ceci s’explique par le fait que le vin de Sauternes était quelque peu passé de mode et avait du
mal à se vendre, ou tout au moins que les prix de vente étaient bas. Pour augmenter leurs revenus, de
nombreux viticulteurs ont donc augmenté au plus haut possible les rendements. Inversement depuis
lors, le marché est redevenu porteur, de sorte que les rendements ont été revus à la baisse pour
augmenter la qualité. On est ainsi passé de rendements autour de 25 hectolitres par hectare à 12-15
hectolitres par hectare, du moins en ce qui concerne la Tour Blanche. Comme dans le même temps
on a poussé la maturité le plus loin possible pour obtenir des raisins avec un potentiel de 21 à 22
degrés d’alcool (soit 360 à 380 grammes de sucre par litre de jus), la date de la récolte s’en est
trouvée d’autant retardée. Cette évolution dans la culture va à l’encontre de l’évolution traduite par la
courbe.
Cette tendance est contredite (et compensée ?) par une autre modification dans le mode de culture.
En effet, pendant longtemps chaque période de risque de maladie (pour le mildiou en particulier)
était systématiquement traitée préventivement par une pulvérisation de bouillie bordelaise. Or le
cuivre qui forme la base de ce traitement a pour conséquence d’épaissir la pellicule des grains de
raisin. Aujourd’hui, les traitements sont beaucoup plus limités. On a donc une peau des grains de
raisin qui est beaucoup plus fine, ce qui favorise la pénétration de la lumière et la concentration en
sucre ; l’effet le plus remarquable en ce qui concerne notre sujet est donc une tendance à
l’avancement de la maturité.
Pour le reste, l’évolution des modes de conduite de la vigne a été sensiblement la même que dans le
Frontonnais, sans que là non plus, on ne puisse en déterminer l’influence exacte en dehors de
l’observation empirique. Dans un premier temps le sol était donc labouré ; puis on est passé au
désherbage total ou partiel, pour revenir aujourd’hui à des sols retravaillés, dont la conséquence la
plus visible est de provoquer un enracinement de la vigne plus profond ; d’autres parties sont au
contraire enherbées afin de diminuer la vigueur de la vigne par concurrence de l’herbe.
Par contre aucun changement n’est intervenu dans le mode de vendanges qui sont toujours faites à la
main et par tries successives.
Au total les conditions sont donc sensiblement différentes de celles qui prévalent dans le
Frontonnais, même si certains traits d’évolution peuvent sembler communs. Il est aussi important de
souligner qu’il s’agit d’un produit très différent de ce qui est élaboré par ailleurs, puisque sa qualité
est basée sur une sur-maturation provoquée par un champignon, le Botrytis cinerea (ou pourriture
noble) qui se développe dans des conditions très particulières. Malgré cela on peut constater une
tendance forte également à l’avancement de la date du début des vendanges. Comme dans le
Frontonnais on a gagné en moyenne 24 jours, la date de la première récolte passant en moyenne du 7
octobre au 13 septembre. L’année de la récolte la plus tardive est 1980 (20 octobre), et celle de la
récolte la plus précoce 1997 (28 août).
Document 7: Evolution de la date du premier jour de vendange dans le Sauternais7.
M.Mouton : d’après sources statistiques recueillies par enquête.
3- Le cas du Marmandais.
L’intérêt de l’analyse de ce vignoble est ici multiple, en particulier par rapport aux cas précédents.
Nous disposons d’une série un peu plus longue puisqu’elle s’étend sur 53 ans de récoltes. 1958
marque en effet la première vendange de la cave de Cocumont créée en 1957. Par ailleurs, et
contrairement aux cas précédents, la date de début des vendanges ne concerne pas une seule
exploitation, mais elle s’applique à l’ensemble des coopérateurs ; la date est en effet fixée par
assemblée générale des coopérateurs. Nous avons considéré ici uniquement la date du ban des
vendanges pour les blancs de ce vignoble. Comme dans les autres cas, un certain nombre de
précautions sont nécessaires avant de pouvoir interpréter les résultats.
Dans la première période qui va grossièrement de 1958 au milieu des années 1970, de nombreux
éléments concourent à la précocité des récoltes. En effet, le vignoble de la cave de Cocumont est
certes classé pour partie en VDQS, mais la cave fournit aussi des vins ordinaires aussi bien en blanc
qu’en rouge. Les techniques de traitement de la vigne ne sont qu’imparfaitement maîtrisées, ainsi que
la vinification ; d’autre part, pour la plupart des coopérateurs, la règle est la polyculture ; la vigne ne
fournit dans ce cadre qu’un complément de revenus, et elle n’est guère l’objet d’une attention
particulière. Enfin, le vignoble lui-même est mal maîtrisé encore et la majorité des plantations sont
composées d’hybrides comme le grappu ou bouchalès. Autant de raisons qui peuvent expliquer des
dates de début de vendanges précoces. Les viticulteurs n’hésitent pas à ramasser le raisin à la
première menace de pourriture dès le début de l’automne ou à la fin de l’été, quitte à ne pas attendre
la pleine maturité. C’est ce qui explique le faible degré alcool des premières récoltes. En 1958 par
exemple les vins rouges ordinaires de la cave titraient 9°1, les vins rouges VDQS 10°2, les blancs
ordinaires 10°9 et les blancs VDQS 11°9.
Du milieu des années 1970 à 1990 l’évolution est considérable. On assiste à un certain nombre
d’évènements qui vont dans le sens d’un retardement global des débuts de vendange. Quatre dates
peuvent ici être retenues. En 1975 la cave de Cocumont obtient une extension de zone. Jusque là en
effet, seules 3 communes étaient habilitées à livrer le raisin à la cave de Cocumont (Cocumont,
Romestaing et Saint-Sauveur-de-Meilhan). Avec l’extension de zone, ce sont 9 communes qui
entrent dans l’aire d’appellation du marmandais. Il s’agit, outre les communes déjà citées, de
Bouglon, Guérin, Marcellus, Meilhan-sur-Garonne, Montpouillan, et Samazan. Or cette extension a
été le prélude à la spécialisation viticole. En effet, elle s’est accompagnée d’une étude importante
des différents terroirs, les secteurs retenus sur les différentes communes étant uniquement des sols
de graves. Par ailleurs, la mise en service de l’autoroute A 62, effective en 1977 a eu pour corollaire
de renforcer cette orientation ; en étant traversées par le projet autoroutier les exploitations agricoles
se sont trouvées dans l’obligation de préciser leur orientation. Ainsi l’autoroute a-t-elle accéléré la
disparition des vignes mal situées (en particulier pour les parcelles situées dans la basse vallée), au
bénéfice des plantations sur les graves des croupes des terrasses supérieures. 1980 constitue la
troisième étape de ce tournant majeur. Cette année là est marquée par une restructuration du
vignoble, qui profite des primes à l’arrachage octroyées par la CEE. Comme on peut s’en douter, ce
sont les exploitations les moins spécialisées qui profitent le plus de cette aubaine, ce qui se traduit
aussi par l’élimination d’un grand nombre de parcelles en hybrides. En 1990, le vignoble du
Marmandais est enfin consacré par l’obtention de l’AOC, pour laquelle la première demande avait
été opérée en 1972. Depuis lors, le vignoble a continué de se contracter sous le double effet de la
spécialisation et des difficultés de commercialisation communes à l’ensemble des petits vignobles du
Sud-Ouest. Ajoutons pour être complet, que le Marmandais a aussi connu des changements
importants dans les modes de culture et de conduite de la vigne, avec les mêmes effets que ceux
observés sur les autres vignobles.
Au total, et pour un cas là encore très différent des autres vignobles étudiés, on constate une même
tendance à l’avancement du début de la vendange. La courbe de tendance linéaire étant établie sur
une période un pu plus longue que dans les autres cas, l’avancement mesuré porte ici sur 16 jours, en
passant du 270e jour (27 septembre) à la fin des années 1950 au 254e jour (11 septembre) en
moyenne actuellement. Les années de la récolte la plus tardive ont été 1978 et 1980 comme dans les
cas précédents. L’année de la récolte la plus précoce est 1997, comme dans le Sauternais.
Document 8: Evolution de la date du premier jour de vendange de la cave de Cocumont8.
M.Mouton : d’après sources statistiques recueillies par enquête.
3- Des similitudes frappantes dans l’évolution des trois vignobles.
Au terme de cette étude, les similitudes d’évolution entre les trois vignobles qui s’étalent le long de
la vallée de la Garonne sont frappantes. Malgré des histoires assez différentes, le document 9 montre
une grande similitude de comportement au regard de la date de l’ouverture des vendanges. Les
rythmes sont quasi identiques même si le vignoble du Sauternais se distingue partiellement des autres
par un retard plus prononcé, ce qu’explique en grande partie le type de culture. Les courbes montrent
que le plus grand retard au début de vendange a été atteint partout dans les années 1977-1981. Dans
tous les cas l’année 1980 marque un sommet. A partir de là, selon un rythme faisant apparaître quatre
sous-périodes, la précocité au début des vendanges n’a cessé de progresser ; 1997, 2003 et 2006 sont
les années les plus précoces selon les cas.
Tous les acteurs de terrain interrogés sont unanimes à considérer que les années 1960 et 1970 ont été
globalement mauvaises quant à la qualité, en raison de différents aléas climatiques. Les années 1980
semblent marquer partout un tournant important, mais c’est surtout les vingt dernières années à partir
de 1990 qui sont considérées comme les meilleures. On le doit à une série d’années cumulant pour la
viticulture des conditions climatiques exceptionnelles. Parmi celles-ci, il semble incontestable pour
les acteurs de terrain que le réchauffement climatique joue un rôle prépondérant. Pour notre part,
l’analyse semble aller dans le même sens ; toutefois, nous avons vu que de nombreux autres facteurs
peuvent interférer et troubler la relation apparemment simple entre climat et date des vendanges. Par
ailleurs, et en admettant que le climat a une influence importante sur la date du début des vendanges,
il resterait à déterminer quelle part revient au rythme saisonnier des températures (printemps, été et
automne), et quelle part à celui des précipitations dont le rôle est tout aussi fondamental dans la
maturation des grappes9.
Enfin, si le réchauffement climatique semble être pour le moment plutôt bénéfique en termes de
qualité phytosanitaire de la récolte et de millésime pour le produit final, il n’en demeure pas moins
qu’il fait peser une menace sur l’avenir du vignoble ; en effet, de plus en plus de viticulteurs sont
inquiets de voir la tendance à l’augmentation continue du degré alcoolique de leur vin ; certains se
demandent si dans les années qui viennent, ils ne vont pas devoir changer les cépages traditionnels,
au risque de modifier la personnalité culturelle des vins produits.
Document 9 : Comparaison de la date du début de vendanges dans les vignobles garonnais.
M.Mouton.
Conclusion :
A terme de cette étude, nous pouvons apporter une réponse à la problématique de départ. Certes, le
climat de la vallée de la Garonne apparaît d’une grande douceur générale, et donc relativement
propice au développement de l’agriculture. Une analyse plus précise montre cependant que les
risques climatiques sont importants bien qu’irréguliers ; aux premiers rangs de ceux-ci, il faut citer le
gel et la grêle. Ces aléas sont de plus en plus pris en compte par les exploitants ; c’est ce qui explique
la quasi généralisation des filets paragrêle en arboriculture fruitière en particulier dans la moyenne
vallée qui est la plus exposée. Les producteurs de légumes limitent les risques d’exposition aux
accidents en recourant de plus en plus aux serres plastique (petits et grands tunnels), voire aux serres
verre dans le cas de la tomate. Tous ces équipements ont cependant un coût, et pèsent sur le budget
d’exploitations qui souffrent par ailleurs de la concurrence avec les productions espagnoles ou
marocaines. Le réchauffement climatique a pu apparaître comme un bienfait en particulier pour la
viticulture : plus grande précocité des vendanges et meilleure maturation des raisins. Mais le
réchauffement est aussi une menace pour le futur de la viticulture régionale ; les cépages utilisés
aujourd’hui seront de moins en moins adaptés à l’évolution climatique ; c’est une grande partie de
l’économie régionale qui risque de s’en trouver bouleversée.
Mots clés : brumes ; brouillards; climat tempéré ; climat océanique ; Frontonnais ; gel ; grêle ;
Marmandais; réchauffement climatique ; régime des vents ; Sauternais; Val de Garonne ; variabilité
climatique.
Résumé : La vallée de la Garonne est réputée depuis longtemps pour sa douceur de vivre. Cette
réputation est en grande partie liée aux caractères généraux de son climat sans excès notable
apparent. Pourtant à y regarder de plus près, le climat du Val de Garonne n’est pas sans nuances, ni
exempt de violences. La variabilité des précipitations comme celle des températures peuvent avoir
des conséquences importantes sur les rythmes agricoles ; mais plus encore que la variabilité générale,
ce sont les accidents climatiques, ici le gel et la grêle qui sont les plus dangereux. Le réchauffement
climatique enfin, se traduit en premier lieu par l’avancement continu de la date des vendanges ; mais
au-delà de ce simple effet mécanique, il fait aussi peser un danger sur la pérennité de la viticulture
traditionnelle dans la région.
Abstract : The valley of the Garonne has long been known for its relaxed lifestyle. This reputation is
largely related to the general characteristics of its climate without significant apparent excess. Yet if
we look closer, the climate of the Val de Garonne is not straightforward, nor free from violence.
Rainfall variability like temperatures may have important consequences on the agricultural rhythms,
but more general than the variability, it is the climatic accidents, by frost and hail are the most
dangerous. Finally, global warming, is reflected primarily by the continued advancement of the
harvest date, but beyond this simple mechanical effect, it also poses a threat to the sustainability of
traditional viticulture in the region.
1
Les documents qui ont été utilisés pour la thermométrie et la pluviométrie sont tirés des données de Météo-France. Ils
portent sur une période de calcul de 1961à 1990.
2
Pour le régime des vents, les données sont issues aussi de Météo-France, mais elles portent sur la période de 1951à
1980, sauf pour les vents violents pour lesquels nous avons pu disposer des données 1961-1990.
3
Source Météo France. Site http://france.meteofrance.com/content/2008/4/33890-48.pdf. Les données portent ici sur la
période 1971-2000.
4
Les précipitations indiciaires comme les températures indiciaires ont été calculées en ramenant dans un premier temps
les moyennes mensuelles à l’indice 100. A partir delà, et pour chaque mois, les quintiles supérieurs et inférieurs ont été
calculés, permettant ainsi pour chaque station de faire apparaître le degré de variabilité. Exemple Bordeaux :
Pmm
Quintile sup
Quintile inf
Valeurs réelles
juin
56,2
86,7
22,6
Indice
Mode de calcul
100
154
40
(86,7/56,2)*100
(22,6/56,2)*100
5
On peut synthétiser la plus ou moins grande sensibilité au gel de la végétation et donc le plus ou moins grand risque de
dégâts dans le tableau suivant :
Facteur de risque --Risques
+++
6
Température
Spéculation
Stade phénologique
Peu froid
Prunier pommier, poirier
Végétation en retard
Stade C ou D (gonflement des bourgeons)
Grand froid
abricotier, pêcher
Végétation en avance
Stade I (jeune fruit)
Exposition
Etat atmosphérique
S ou S-W
Nuageux et sec
N ou N-E
Ciel clair et humide
La série obtenue nous a été aimablement fournie par monsieur Alain Pradier exploitant viticulteur sur la commune de
Fronton en Haute-Garonne. L’exploitation couvre 65 hectares. Les valeurs en ordonnées correspondent au jour de
l’année. Ainsi sur 41 récoltes répertoriées, la date du début de récolte le plus précoce est celle du 2 septembre en 2003
qui correspond au 245e jour de l’année ; inversement, la date la plus tardive se situe en 1980 où la récolte n’a commencé
que le 23 octobre, ce qui correspond au 297 e jour de l’année (année bissextile).
7
La série obtenue nous a aimablement été fournie par monsieur Faure, maître de chai du château La Tour Blanche situé
sur la commune de Bommes dans le Sauternais. La superficie en vignes est de 40 hectares (70 hectares pour l’ensemble
de l’exploitation), dont 37 hectares en vignes classées en AOC Sauternes. Les cépages utilisés sont le Sémillon pour 83
% de la superficie, le Sauvignon pur 11,9 % et la muscadelle pour 5,1 %. Comme dans le cas du Frontonnais, les valeurs
en ordonnées correspondent au jour de l’année. Ainsi, sur ce domaine depuis 1975, la date de début de récolte la plus
précoce a été le 28 août 1997 ce qui correspond au 240 e jour de l’année ; inversement, la date la plus tardive se situe le 20
octobre 1980 ce qui correspond au 294 e jour de l’année (année bissextile).
8
La série obtenue nous a été aimablement fournie par la cave de Cocumont. Nous tenons à remercier particulièrement
son directeur, monsieur Costella, la secrétaire Marie-Claude, madame Valverde et monsieur Mourguet ancien directeur.
Comme pour les autres exemples les dates en ordonnées correspondent au jour de l’année. Sur les 53 années répertoriées,
c’est en 1978 que le début des vendanges a été le plus tardif soit le 9 octobre (en 1980 le 282 e jour correspond au 8
octobre car l’année était bissextile). Inversement la date la plus précoce de vendange est 1997, le 237 e jour correspondant
ici au 25 août.
9
Toutes ces interrogations nous rendent particulièrement circonspects vis-à-vis de l’inflation de courbes que l’on a pu
constater dans de nombreuses publications et qui font un lien direct sans aucun commentaire entre réchauffement
climatique et avancement des dates de vendange.
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