L’économie informelle Méditerranéenne: Cas de la rive sud Méditerranéenne. Au cours des années 1980 et plusieurs, nombre de travaux ont été consacrés à identifier et circonscrire un domaine qui a fait l’objet d’un riche florilège sémantique: économie informelle, souterraine, occulte, non officielle, non enregistrée, invisible...De prime abord, il semble que nous avons à faire à un Objet d’Analyse Non Identifié(OANI). ce domaine recouvre en fait des activités de diverses nature dont le caractère commun réside dans le fait qu’elles échappent à la réglementation sociale et fiscale en vigueur dans les pays concernés, ainsi qu’à l’enregistrement statistique et comptable. A l’instar de Machlup(1963) on conviendra que la discipline économique, peut d’abord être définie par ce que font les économistes, quelles qu’en soient les raisons. De plus, par delà la curiosité intellectuelle relative à ce domaine, d’autres enjeux importants en matière de politique économique sont sousjacents. L’économie informelle est une appellation commode et courante pour designer ces activités dont l’analyse s’est affinée Latu sensu, au plan macro-économique, celle-ci recouvre la production et l’échange de biens et services marchands et non marchands. Stricto sensu, il convient, d’une part, de distinguer les biens et les services marchands, qui relèvent principalement du (travail au noir), des biens et sévissons marchands qui relevant du (travail domestique) D’autre part, parmi les activités marchande, il y a lieu de distinguer les activités qui ne présentent pas un caractère intrinsèquement illicite par elles-mêmes( sinon au regard de la réglementation sociale et fiscale en vigueur) qui désignent l’économie souterraine, des activités strictement prohibées qui relèvent du domaine des activités criminelles proprement dites: trafic de stupéfiants, jeux clandestins, proxénétisme, blanchissement et transferts illégaux d’argent et de devises, corruption..(Barthe, 1988). Il convient toutefois de reconnaître que le chevauchement des critères complique la construction de nomenclatures sur l’épistémologie desquelles il s’agit de s’interroger. Par ailleurs, l’existence d’une interaction entre le marchand et le non-marchand ne saurait être négligée; d’un point de vue micro-économique, en particulier, ceci conduit à messire l’accent sur l’analyse des comportements des agents et leurs stratégies de mobilisation des ressources. L’économie informelle recèle des enjeux et soulève des problèmes, tant en ce qui concerne les pays industrialisés- notamment en Europe-, qu’en ce qui concerne les pays en développement et en transition vers l’économie de marché (Archambaut & Greffe, 1984) 1) Pays industrialisés. Dans les pays industrialisé, plusieurs mutations profondes affectent l’activité économique et l’emploi depuis les années 1980. On observe tout d’abord que le caractère cyclique de l’activité économique s’est accentué aussi bien en France qu’en Europe: la croissance du PIB, ralentie au début des années 1980, a connu une phase d’expansion consécutive au contrechoc pétrolier de 1986 qui va perdurer jusqu’à la guerre du Golfe; au net ralentissement du début des années 1990 succède une récession brutale en 1993. Ces fluctuations s’accompagnent d’une augmentation du chômage et d’une modification des formes de l’emploi. L’évolution du marché du travail est notamment caractérisée par deux tendances qui sont, d’une part, l’extension de l’activité professionnelle des femmes, d’attraper, l’essor de la flexibilité et de la précarité de l’emploi (Mignonne & Magali, 1994) A cet égard, on peut s’interroger sur la question de savoir si les fluctuations de l’activité économique et les modifications du marché du travail n’induisent pas une extension de l’économie informelle. Autrement dit, l’économie informelle estelle un “amortisseur de crise”, dont l’importance varierait au gré de la conjoncture; ou bien représente-elle un phénomène largement structurel induit par les contraintes réglementaire et fiscales qui affectent les revenus et le travail? L’essor du temps libre et le recours aux services non marchands, exercent une influence non négligeable (Adair, 1989) Cette interrogation très générale sur le caractère conjoncturel et/ou structurel de l’économie informelle peut se décliner sous la forme de quatre réflexions distinctes mais congruentes. Il s’agit, en premier lieu d’évaluer l’ampleur de l’économie informelle; en second lieu, d’en identifier les acteurs et les secteurs d’activité concernés; en troisième lieu, d’étudier les facteurs favorables à cette extension, voire les théorie visant à expliquer l’existence d’une telle économie; enfin, en dernier lieu, d’examiner les conséquences que celle-ci peut engendrer en matière de concurrence, d’emploi, et de revenus, ainsi que les remèdes qu’il conviendrait d’envisager. En premier lieu, plusieurs modalités d’évaluation permettent d’apprendre l’économie informelle: -l’approche par la comptabilité nationale (Carson, 1984), La mesure statistique efficace. L’économie souterraine en France-”travail noir” et fraude - fiscale confondus- s’élevait à quelque 4% du PIB en 1985, dont 1% seulement pour le “travail noir (Willard, 1989) -L’analyse de l’offre implicite de travail (Barthélémy et alili, 1990). En Italie, la part de la valeur ajoutée correspondant à l’offre implicite de travail a été calculée et réintégrée dans le PIB, lequel a ainsi été officiellement réévalué de quelque 17%. Cette démarche est récusée par les autres pays européens. Ces modalités relèvent de chams d’investigation distincts, dont les sources et les instruments d’analyse ne sont pas nécessairement compatibles ni véritablement exhaustifs, bien qu’ils soient parfois recoupés. Si l’estimation des activités informelles semble avoir progressé, l’élaboration de mesures homogènes et comparables - notamment à l’échelle de l’Europe- demeure un enjeu non négligeable en matière de politique sociale et fiscale (impayé, fraude ...) (Debare, 1992) En second lieur l’identification des acteurs et des secteurs d’activités de l’économie informelle est requise. A cet égard, il convient de distinguer le statut des acteurs selon qu’il s’agisse d’employeurs et d’employés, d’une main d’oeuvre salaries ou indépendante, d’une activité régulière ou occasionnelle. Plusieurs études font ressortir que sont principalement concernées des branches d’activités employant une main d’oeuvre salariée nombreuse et peu protégée ( bâtiment, confection), dont l’activité peut être de caractère saisonnier ou régulier. D’autre part, l’essor des services et le maintien de l’artisanat conduisent à mettre l’accent sur le rôle du travail indépendant (Klatzmann, 1982) En troisième lieu, les facteurs favorables au maintien voire à l’extension de l’économie informelle et les théories explicatives proposées méritent d’être étudiés. Il s’agit, entre autre, de s’interroger sur l’existence et la nature de relations entre chômage et économie informelle, charges fiscales (et sociales) et “travail au noir”. La flexibilité accrue du travail et la précarité des formes d’emploi encouragent-elles les activités informelles? Le poids des prélèvements obligatoires, notamment au regard du coût salarial, est un argument souvent invoqué: à cet égard, les approches inspirées par la courbe de Laffer sont-elles pertinents? (D’Arvisenet, 1984; Fleurbaey, 1987; Théret & Uri, 1988) En dernier lieu, l’examen des effets engendrés par l’économie informelle- en matière de concurrence, d’emploi, et de revenu-, et les remèdes qu’ils conviendrait d’envisager- au regard des critères d’efficacité et d’équité- doivent être pris en considération. Certains économistes considérant que les activités informelles sont inhérentes à l’économie de marché et qu’il serait vain, voire nuisible, de réglementer; ou estiment qu’ils s’agissent d’activités qu’il convient de “blanchir” dans certains cas. En tout état de cause, l’économie informelle constitue un enjeu non négligeable de politique économique (Houston, 1987) 2) Pays en développement et pays en transition vers l’économie de marché Dans les pays en transition vers l’économie de marché, qu’il s’agisse de pays en développement ou qu’il s’agisse des pays rompu avec la planification centralisée, se posent les même questions relatives à l’évaluation, aux acteurs, aux facteurs explicatifs et aux enjeux de l’économie informelle. Cependant, le cadre institutionnel et la situation économique différent, tant au regard du marché du travail et du marché des biens, qu’en ce qui concerne les modalités de financement. Dans les pays en transition vers l’économie de marché, autrement dit les pays d’Europe Centrale et Orientale (PECO), l’importance et les fonctions que recouvrent l’économie et la finance informelle varient notamment selon les rémanences de “l’économie de rationnement” et le degré d’avancement des réformes d’envergure susceptibles de faire émerger l’économie de marché embryonnaire. A cet égard, l’ex RDA- maintenant partie intégrante de l’Allemagne réunifiée- représente l’exemple le plus avancé. Dans les pays en développement, là encore, il convient de distinguer entre les pays dont la logique antérieure de rationnement tend à se perpétuer, à l’exemple de l’Algérie, et ceux qui tendent à assurer une promotion rapide de l’économie marché, à l’exemple de la Tunisie et du Maroc. Dans ces pays, notamment en Afrique du Nord et en Afrique de l’Ouest, les études du BIT et de la Banque Mondiale ont mis en évidence l’importance du “secteur non structuré” et le rôle de la “finance informelle” à cet égard. Le secteur non structuré est le plus souvent constitué de micro-entreprises de nature artisanale ou commerciale, dont il convient de se demander si elles relèvent d’activités traditionnelles, voire de survie, ou bien si elle préfigurent l’émergence d’une économie de marché moderne(Turnham et alii, 1991) La finance informelle recouvre des formes variées et parfois très sophistiquées de mobilisation de l’épargne et de distribution du crédit, dont les associations rotatives d’épargne et de crédit (“tontines”) sont l’une des plus répandues, voire une forme universelle (Adams & Fitchett, 1994). S’agit-il d’institutions archaïques qui subsistent, faute pour le secteur non structuré de pouvoir accéder aux systèmes de paiement moderne et à l’intermédiation bancaire? Ou bien sontelles appelées à se maintenir en raison d’avantages comparatifs au regard du système moderne de financement? (Germidis et lai, 1991) Cette recherche a fait l’objet d’une communication lors de la journée d’étude : L’ECONOMIE INFORMELLE : Pays industrialisés/ pays en transition et en développement. Faculté de Sciences Economiques & Gestion. Jeudi 15 Juin 1995 ; et la publication d’un article : L’économie informelle au Maroc et en Tunisie; dans le n° 9, deuxième semestre 1995, des cahiers du G.R.A.T.I.C.E (Groupe de Recherche et d’Analyse des Théorie Institutions et Conventions Economiques) analysant le rôle de l’économie informelle au Maroc et en Tunisie sous l’angle des aspects comptables et financiers, de l’emploi et des salaires. Ils montrent notamment dans quelle mesure les circuits de financement informels du Maroc et de la Tunisie différent, dans les perspectives de la création d’une zone de libre-échange Euro-méditerranéenne (U.E-Maroc/Tunisie/Israël)