Entretien de Charles Ridoux avec Armand d`Aigleville

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Interview de Charles Ridoux par Armand d’Aigleville
Depuis quelques années, l’évolution de mes travaux astrologiques n’a pas manqué de décontenancer
plusieurs de mes lecteurs, et tout particulièrement les astrologues qui ne sont pas habitués aux références et
aux schémas que j’utilise dans le cadre de « l’astrologie globale » que je m’efforce de pratiquer. Au cours
d’une rencontre dans le Sud de la France, notre ami Armand d’Aigleville s’en est fait le porte-parole et m’a
posé une série de questions destinées à mieux cerner les contours de ma pratique astrologique, et à en
montrer les liens avec l’astrologie classique. C’est cet échange que je me propose de partager ici avec
l’ensemble des personnes qui s’intéressent à mes travaux, dans l’espoir de leur rendre peut-être plus
intelligible le sens de ma démarche.
C.R.
I. DE L’ASTROLOGIE CLASSIQUE À L’ASTROLOGIE GLOBALE : RÉSUMÉ D’UN
ITINÉRAIRE INATTENDU
Armand d’Aigleville - Comment en êtes-vous venu à l'astrologie ?
Charles Ridoux - Je peux déjà dire que j'y suis venu à un moment astrologiquement fort, puisque
j'ai relevé la date de mon premier cours d'astrologie à Paris, le 22 octobre 1986 à 19h, et il se trouve
qu'Uranus transitait exactement à l'opposé de sa position natale. Par ailleurs, cette découverte s'est
faîte dans la mouvance d'un transit de Pluton à l'Ascendant qui a correspondu à ma découverte de
l'œuvre de René Guénon. Ainsi l'astrologie est venue pour moi dans la foulée de ma découverte de
Guénon au printemps 1984. Après cette ouverture à l'ésotérisme traditionnel, je me suis mis à
pratiquer le yoga, et dans ce milieu j'ai découvert des personnes s'intéressant à l'astrologie. J'avais
d'abord pensé dans un premier temps à étudier le Tarot, puis j'ai opté pour l'astrologie, sans doute pour
son ancrage dans le temps et dans les cycles.
Après deux ans de formation élémentaire, mon horizon s’est élargi au travers de diverses
rencontres. Le plus important, pour moi, fut la prise de conscience que l’astrologie pouvait s’appliquer
aussi bien à l’histoire collective des peuples et des nations qu’à celle des individus. Ce fut un article de
la revue L’Astrologue, traitant de la guerre d’Espagne, qui m’a ouvert ce nouveau champ, passionnant
pour un historien de formation : j’étais désormais pleinement acquis à l’astrologie ! J’eus assez vite
l’occasion de participer aux séminaires d’Yves Lenoble, qui présentait pour moi l’intérêt d’appliquer à
l’étude de thèmes individuels une approche cyclique.
Ayant découvert l'existence de l'astrologie mondiale et ne disposant pas à l'époque d'ordinateur, je
me suis mis à faire des éphémérides graphiques à la main sur de grands cahiers. Il se trouve qu'un jour,
passant à la librairie des Cahiers astrologiques, rue Condorcet, un lieu assez convivial où des
astrologues pouvaient venir discuter « à l'ancienne », j'y fis la rencontré d’un monsieur d'un certain âge
auquel j'ai parlé de mes travaux et montré mes cahiers. Après m'avoir demandé mon thème et donné
rendez-vous quelques jours plus tard, il m'a dit que l'on pouvait travailler ensemble : c'était Claude
Ganeau, mon premier mentor en astrologie mondiale.
Cela m'a confirmé dans mon intérêt pour l'astrologie mondiale, et par l'entremise de Roselyne
d'Ormesson1, j'ai pu rencontrer André Barbault qui m'a très généreusement ouvert les colonnes de sa
revue L'Astrologue, et, en 1991, j'ai écrit mon premier article. J'ai eu une collaboration également avec
la revue Urania, qui ne me satisfaisait que moyennement avec ses visées pédagogiques un peu
excessives à mon goût.
En 1993, alors que j'étais pleinement engagé dans mes travaux de médiéviste, j'ai passé une année
entière à traduire d'anglais en français The Mundane Astrology de Charles Harvey, Nicholas Campion,
et Michael Baigent. Cela m'a permis de faire un « saut qualitatif », puisque j'ai découvert des pratiques
astrologiques courantes dans le monde anglo-saxon, slave ou germanique, mais pratiquement ignorées
en France, notamment les techniques des mi-points, des harmoniques et de l’astrocartographie. Sur
cette question précise des mi-points j'ai été mis en relation avec Henri Latou, jumeau astral d’André
Barbault, traducteur de l'œuvre d'Ebertin et à qui je suis allé rendrez visite à Fréjus.
1
Roselyne d’Ormesson nous a quitté le 5 mars dernier. Je garde de sa personnalité chaleureuse et bienveillante un souvenir
ému.
Au début des années 1990, un moment important a été ma collaboration aux séminaires organisés
à Laval par Philippe Lavenu, auxquels participait Jean Phaure. C'est dans ce cadre que j'ai commencé à
approfondir ma réflexion sur la cyclologie traditionnelle, qui est devenue une de mes préoccupations
principales, même si jusqu'à présent je n'ai pas encore produit grand chose dans ce domaine. Toujours
avec Philippe Lavenu, j'ai animé en 1994 un séminaire au château de Bellignies dans l'Avesnois. Un
autre grand moment a été le colloque que j'ai organisé au printemps 2002 au château de Rambures,
réunissant – fait exceptionnel - à la fois des médiévistes et des astrologues, colloque dont le thème
était « L'Astrologie hier et aujourd'hui ».
En 2001, j'avais rencontré l'équipe d'Univers-site, fondé par Fanchon Pradalier. Cela fut aussi
l'occasion pour moi de trouver un milieu astrologique stimulant, et qui me permettait de présenter des
travaux très régulièrement, puisque, d’une part, j’avais à commenter l’actualité mondiale dans divers
articles et que, par ailleurs, je préparais des cours de haut niveau ayant pour objet à la fois des
éléments théoriques fondamentaux et des exemples d’application pratique en astrologie mondiale –
chose unique alors, et qui le demeure encore à ma connaissance. C'est d'ailleurs dans ce cadre que j'ai
fait la connaissance de Paul Bernard, auteur d’un livre très original sur les Blasons astrologiques, qui
est devenu un grand ami et avec qui je travaille depuis plus de six ans. Malheureusement celle belle
entreprise d’Univers-site a tourné court du fait de l'intrusion d'un nouvel esprit marqué par la
théosophie, et assez vite tout le monde s'est retiré. C'est dommage, car l'idée était excellente et serait
peut-être à reprendre un jour ou l'autre... Mais la vie astrologique en France ne le permet peut-être
plus. Grâce à Univers-Site j'ai publié mon ouvrage Évolution géopolitique du monde.
J'ai eu ensuite l'occasion, au printemps 2005, de transmettre tous ces travaux dans un séminaire
donné à Vilnius, qui m'a causé beaucoup de satisfaction. Une autre étape marquante aura été ma
participation au congrès international d’York, organisé par l’Astrological Association britannique, où
j'ai présenté deux conférences et où j’ai été invité à animer un séminaire sous la présidence de Robert
Hand, qui a bien voulu reconnaître la qualité de mes travaux, ce qui était pour moi un grand honneur.
Durant toute cette période, j'ai été invité régulièrement à des conférences, et j'ai donné des cours
dans le cadre d'Agapè à Paris. Très régulièrement, à Bruxelles, au premier lundi du mois de mai, je
présentais les astralités de l'année à venir à l'invitation du président du CéBéSIA (d'abord Gilbert
Decamp, puis Etienne Cosyns, malheureusement disparus tous deux en l’espace de deux ans). Depuis,
j'ai malheureusement l'impression d'avoir connu ces dernières années une sorte de traversée du désert.
Je suppose que cela n'est pas sans lien avec l'évolution qui m'a conduit de plus en plus à m'intéresser
aux travaux de l'École de Hambourg jusqu’à intégrer pleinement le cadre de l'astrologie uranienne.
Néanmoins, j'ai pu vivre sans trop de désagrément cette étape grâce à la création de mon site
personnel, qui m'a permis de transmettre mes travaux astrologiques, aussi bien d'ailleurs qu'une part de
mes travaux de médiéviste ou sur la littérature, que ce soit la littérature française, russe ou le monde de
Tolkien qui a été un des bonheurs de mon existence.
AA - Comment en êtes-vous arrivé à l'astrologie uranienne ?
CR - Comme je l'ai expliqué dans le n° 2 de la Revue d’astrologie mondiale (RAM), l'astrologie
uranienne s'est imposée à moi de manière très progressive et non sans les plus vives réticences au
début. C'est sans doute grâce à l'insistance et à l'obstination amicale de Jacques Rauffet - auteur d'une
brochure sur cette question avec Danièle Jay et Lionel Lechevalier - que je suis devenu peu à peu
capable d'entrer dans l'esprit de cette école. Cheminement rendu d'autant plus difficile que la
présentation faite par nos confrères de l'École de Hambourg a longtemps été des plus rébarbatives. Ce
qui a contribué à faciliter cette évolution ce fut, en 2006, lors d'un bref séjour en Italie du Nord, la
lecture d'un dossier consacré à l'astrologie uranienne par l’excellente revue américaine The Mountain
Astrologer. Durant ce séjour, il s'est trouvé que j'ai passé une journée dans les Grisons, et que je me
suis trouvé inopinément face à la maison où avait habité Nietzsche, et que le lendemain je me trouvais
à Venise, passant devant le palais où était mort Richard Wagner ! Ce séjour dans une vallée alpine m’a
conduit à imaginer les rapports entre les planètes classiques et les planètes transneptuniennes sous la
forme d'un double paysage : par temps couvert, celui d'une vallée où l'on ne voit que des paysages
verdoyants, et par temps ensoleillé, celui d'une vallée derrière laquelle se profilent les crêtes
majestueuses des montagnes enneigées. Cette image m'a conduit à faire figurer sur mes thèmes les
planètes classiques en noir et les transneptuniennes en bleu.
C'est durant l'année 2006 que j'ai vraiment opéré le tournant vers une astrologie uranienne. Dans
la foulée de la lecture de ce dossier, à l'occasion d’un colloque à Lille où j'évoquais la vie et l'œuvre de
J.R.R. Tolkien au regard de l'astrologie, j'ai été amené pour la première fois à présenter quelques
éléments qui intégraient des Transneptuniennes : dans le thème de la publication du Seigneur des
Anneaux, le 29 juillet 1954, dans celui de la sortie du film de Peter Jackson (le 19 décembre 2001), et
dans le thème de la fin de la rédaction de mon ouvrage Tolkien, le Chant du monde (27 mai 2003).
Je peux signaler encore une étape marquante et précise dans le temps, le 19 février 2007 :
travaillant ce jour-là sur le cycle Uranus-Pluton de 1710 en lien direct avec la Révolution française, je
me suis rendu compte qu'il était à mettre en relation avec le cycle Hadès-Kronos, dont la prochaine
conjonction en 2031 est un moment crucial dans le cadre de la cyclologie traditionnelle. Il se trouve
que ce jour-là, Pluton transitait à 0° Capricorne sur le mi-point Hadès-Kronos à 0° Cancer. La prise de
conscience de ce lien avec mes travaux a suscité une grande joie intérieure et m'a stimulé dans la suite
de mes travaux.
Durant les années suivantes, j'ai continué à utiliser de plus en plus les Transneptuniennes tout en
les situant dans un degré hiérarchique soumis aux planètes classiques, et en éprouvant de plus en plus
un sentiment de gêne du fait que je ne savais pas vraiment ce que pouvaient signifier ces entités. C'est
grâce à des rencontres très fructueuses avec mon ami Paul Bernard, polytechnicien et mathématicien
de haut vol, que j'ai pu enfin aboutir à une hypothèse fondée, qui demeure valable, et qui était
largement exposée dans le premier numéro de la RAM en juin 2014, à savoir que les
Transneptuniennes ne sont pas à considérer comme des planètes mais comme des « centres actifs »
reliés à une série de vingt centres actifs structurels, dont l'ordonnancement est fonction de la loi de
Bode. C'est à l'occasion d'une rencontre historique qui a eu lieu à Amfroipret les 31 décembre 2013 et
1er janvier 2014 que Paul Bernard et moi avons procédé à une grande opération « transgenre » qui
consistait à faire des huit planètes « transneptuniennes » de l'école de Hambourg des facteurs
« transneptuniens ». Durant cette même nuit fut baptisé le dernier des centres actifs structurels F20,
qui porte désormais le nom d' « Eschaton ».
Un véritable saut qualitatif s'est opéré à la fin de l'été 2014, qui m'a conduit à avoir une pratique
radicalement nouvelle qui consiste en une « exploration abyssale » des structures profondes d'un
thème à partir d'un point d'ancrage sur la surface zodiacale. De mois en mois, cette pratique s'affine
tout en se simplifiant, et j'ose espérer que ce processus finira par aboutir à la présentation de figures et
de textes lisibles par le plus grand nombre, à condition naturellement de faire tout de même un certain
effort qui est inévitable... Dans le même temps d'ailleurs, je m'efforce d'approfondir ma réflexion sur
un bon usage du Regelwerk qui nous a été laissé par Alfred Witte, afin d'aboutir à une interprétation
des facteurs transneptuniens et classiques au regard de l'astrologie mondiale. Curieusement, cette
astrologie « abyssale » s'est présentée à moi à un moment où j'étais baigné, lors d'un séjour dans le
Cotentin, dans des thèmes océaniques : une visite à la Cité de la Mer de Cherbourg avec le sous-marin
le « Redoutable » et une exposition sur le Titanic, et dans le même temps le visionnage des films de
James Cameron Titanic et Abyss. C'est toute une constellation océanique qui s'est soudainement
imposée à moi !
Dans la foulée de ces recherches, un autre moment important pour moi a été la relecture de mon
propre thème natal, avec la découverte, surprenante, de la conjonction Neptune-Poséidon et du fait que
cette conjonction était reliée, en structure profonde, au mi-point Soleil-Lune et à d'autres points de
mon thème natal. Le tout se focalisant sur Mercure à 13° Lion. Et voici que tout récemment je
découvre qu'à 13° Cancer se trouve un autre point focal de mon thème natal, cette fois-ci sur le mipoint Soleil-Vulcanus, qui active toute une configuration reliant le Soleil à de nombreux autres
facteurs. C'est ainsi que le développement de l'astrologie globale telle que je la pratique commence à
donner des fruits aussi bien en astrologie mondiale qu’en astrologie individuelle. En outre, je prends
de plus en plus conscience des liens subtils existant entre le thème de l'astrologue et les thèmes qu'il
étudie, ce que je nomme volontiers les « affinités électives ».
AA - Quel rapport établissez-vous entre astrologie classique et astrologie uranienne ?
CR - On pourrait supposer, bien à tort me semble-t-il, qu'il n'y en a pas. Ce serait une grave
erreur, car il n'y a qu'une astrologie, qui nous est donnée par les cycles planétaires auxquels s'ajoutent
tous les éléments de la tradition astrologique au sens large. Par ailleurs, les liens ne sont peut-être pas
évidents à première vue. Il me semble que l'on pourrait revenir à l'image que j'ai évoquée tout à l'heure
des montagnes enneigées et du paysage ordinaire. Les montagnes enneigées sont toujours là, mais
elles ne sont pas toujours visibles. Quand il se produit, en astrologie, une sorte de mutation ou de
« saut qualitatif », cela correspond, et je ne suis pas le premier à le dire, à une mutation de la
conscience humaine, dans des conditions historiques nouvelles - André Barbault l'a déjà signalé. Ce
fut le cas notamment durant la période de la découverte des transsaturniennes entre 1781 avec Uranus
et 1930 avec Pluton. Nous sommes passés, durant cette période, du paradigme de l'astrologie ancienne
au paradigme de l'astrologie classique, dont André Barbault et d'autres membres de sa génération sont
d'éminents représentants. Il se trouve que, depuis l'invention des Transneptuniennes par Alfred Witte à
partir de 1923, s'ouvre la perspective d'un nouveau paradigme de l'astrologie, qui n'est pas sans être en
relation avec l'extraordinaire ouverture des connaissances que l'astronomie nous apporte relativement
au système solaire ainsi qu'à notre compréhension de l'univers en général. Il y a donc élargissement de
la conscience.
Maintenant, il faut bien préciser que le nouveau n'abolit jamais l'ancien mais l'exhausse à un
niveau supérieur. L'astrologie classique n'a pas aboli l'astrologie ancienne ; on observe d'ailleurs un
regain d'intérêt pour celle-ci, qui s'est développé dans les dernières décennies du XXe siècle
(redécouverte de William Lilly, etc.). Mais en même temps, j'ai peine à concevoir qu'un astrologue
contemporain se refuse à intégrer dans sa pratique les transsaturniennes. Dans le même sens, je dirais
donc que l'astrologie uranienne ne va en aucun cas détrôner l'astrologie classique, mais je pense
vraiment que dans les décennies à venir elle va de plus en plus occuper une place marquante sinon
prépondérante.
La distinction entre ces trois paradigmes apparaît nettement si l'on examine, par exemple, un
thème aussi fondamental que celui de l'homme sur la Lune le 20 juillet 1969. J'en ai longuement fait
part dans la RAM n°2. Là où, dans l'astrologie ancienne, nous n'avons à faire qu'à une conjonction
Lune-Jupiter à 0° Balance, dans l'astrologie classique, celle d'André Barbault, nous voyons un
phénomène beaucoup plus extraordinaire : une triple conjonction Lune-Jupiter-Uranus à 0° Balance,
ce qui est déjà d'une rareté absolue. Là où les choses deviennent vertigineuses, c'est lorsque, sous le
prisme de l'astrologie uranienne, nous voyons une quadruple conjonction Lune-Jupiter-UranusApollon sur ce degré ! Rappelons qu'il s'agissait de l'aboutissement de la mission Apollo 11 ! Ce qui
nous entraîne dans des réflexions métaphysiques, car cela signifie que le cours d'Apollon était fixé
pour l'ensemble de l'Histoire, et que sa découverte par Friedrich Sieggrün s'est faite pour que l'homme
du XXe siècle puisse contempler cette découverte inouïe. Observons par ailleurs que ce même thème
de la triple conjonction Jupiter-Uranus-Apollon à 0° Balance marque les thèmes de deux personnalités
éminentes, chacune à leur façon : celui d'une des femmes les plus puissantes au monde, Blythe
Masters, et celui de Félix Baumgartner qui a établi le record du plus spectaculaire saut en chute libre
de l'Histoire2 !
AA - Pourquoi parlez-vous d'astrologie « globale » et pas tout simplement d'astrologie
uranienne ?
CR - Le terme d'astrologie uranienne s'est développé à partir du moment où les principes de
l'école de Hambourg se sont répandus aux États-Unis puis à travers le monde après la Seconde Guerre
Mondiale. Il me semble que la mutation en cours à la fois des connaissances scientifiques et de
l'astronomie, et l'élargissement de la conscience astrologique par le biais des Transneptuniens est tel
que pour désigner le paradigme qui est en train de se profiler à la suite de l'astrologie ancienne et
classique, il m'a semblé approprié de choisir le terme d’« astrologie globale ». Par ailleurs, ceux qui se
revendiquent de l'astrologie uranienne visent en général, du moins il me semble, à demeurer dans un
prolongement assez étroit avec les travaux de l'École de Hambourg. Il se trouve que, dans ma pratique
de la mondiale, peut-être du fait des limitations sémantiques du Regelwerk, j'ai été, sans trop le
vouloir, conduit à chercher une procédure d'établissement et d'analyse des thèmes qui aboutit à ce que
l'on pourrait appeler une astrologie abyssale combinée au recours à des outils de recherche qui en font
2
Ce record a été battu, le 23 octobre 2014, par Alan Eustace, vice-président de Google.
également une astrologie « au laser », tout cela dans la perspective d'une astrologie plus contemplative
que prédictive. Dans la phase actuelle de mes recherches, qui est encore en pleine évolution, j'ai
conscience, bien sûr, de m'inscrire désormais dans la foulée des travaux de l'École de Hambourg et de
l'astrologie uranienne, mais j'ai en même temps le sentiment d'apporter une touche singulière avec
l'espoir de rendre ce type d'astrologie globale plus accessible aux astrologues de toutes obédiences que
ne l'ont été l'École de Hambourg et l'astrologie uranienne.
On peut enfin dire que l’une des caractéristiques de l’astrologie globale est qu’elle intègre des
dimensions inouïes dans l’espace et dans le temps. C’est ainsi que mon espace spatio-temporel actuel
se déploie, dans l’espace, dans cette zone frontière où s’efface le vent solaire et où l’on pénètre dans
l’immensité de l’espace interstellaire, là où les astronomes situent l’hypothétique Nuage d’Oort ; et
dans le temps : à soixante millions d’années, durée de la révolution d’Eschaton autour du Soleil.
II. LA PRATIQUE DE L’ASTROLOGIE GLOBALE : QUESTIONS DE MÉTHODOLOGIE
AA - Comment peut-on comprendre vos articles et les thèmes que vous présentez quand on
ne pratique pas l'astrologie uranienne ?
CR - Comment pensez-vous que l'on puisse comprendre mes articles et ceux de tous les autres
astrologues quand on ignore tout de l'astrologie classique ? Il y a dans notre discipline un minimum
d'éléments techniques incontournables. Personnellement, j'estime souhaitable pour l'astrologue de
s'efforcer d'être en même temps dans le cadre de deux registres, qui sont celui du chercheur et celui du
vulgarisateur.
Il faut d'abord accorder au chercheur toute liberté pour avancer dans ses découvertes sans avoir à
tenir compte de leur réception par un plus grand public. A ce niveau, un chercheur qui apporte
véritablement quelque chose d'original ne trouvera que quelques esprits capables de le suivre. C'est
normal, et c'est le cas dans toutes les sciences. Mais en même temps, il faut bien que les
développements de l'astrologie puissent peu à peu pénétrer dans le milieu astrologique et si possible
dans le milieu cultivé de gens qui ne pratiquent pas l'astrologie mais peuvent s'intéresser à ses résultats
et à ce qu'elle peut apporter.
Au stade actuel de mes publications, j'ai bien conscience que la plupart de mes lecteurs sautent
tout simplement les éléments techniques de mes écrits, et je subodore même que ceux que je risque
d'horrifier le plus sont mes confrères astrologues eux-mêmes, accoutumés qu'ils sont aux éléments
techniques de l'astrologie ancienne ou classique, et qui ne peuvent qu'être choqués par des thèmes dans
lesquels il n'y a pratiquement ni maisons, ni signes, ni aspects classiques, ni même parfois de
planètes ! J'imagine la tête que j'aurais fait moi-même devant un écrit semblable ! Aussi, l’un de mes
soucis premiers, maintenant que j'ai atteint un certain degré dans mes recherches, est de trouver les
biais pour rendre intelligibles mes travaux. Il m'arrive d'ailleurs de constater que lorsque j'explique à
des amis qui ne connaissent rien à l'astrologie classique mes travaux en cours, ils comprennent avec
une grande facilité ma démarche ! J'incline à penser que d'ici une ou deux générations l'astrologie
globale ne posera plus le moindre problème à personne…
Ainsi donc, c’est une méthode qui se construit dans le cadre d’une démarche de chercheur, d’où
une certaine radicalité temporaire qui peut apparaître comme choquante. A l’avenir, l’astrologie
globale réintégrera sans doute tout naturellement les éléments traditionnels, d’ailleurs toujours
présents dans les pratiques de l’École de Hambourg.
Pour revenir à la question de la compréhension de mes écrits, il convient de distinguer ceux qui
sont destinés à la recherche pure et que l'on trouvera dans le cadre de la RAM, des articles d'analyse
géopolitique rédigés pour le BAM, qui vise un public plus large.
Pour le BAM, j'ai connaissance qu'un certain nombre de mes lecteurs font l'impasse sur les
éléments techniques et se contentent de lire les analyses d'ordre géopolitique. Cela me parait
parfaitement légitime et ne pose pas de problèmes. Maintenant, il me semble souhaitable que des nonpraticiens de l'astrologie puissent être à même d'entrer peu à peu dans une compréhension de
l'astrologie globale. Quelle est pour ce faire ma pratique actuelle ? D'une part il y a les schémas, dans
des diapositives PowerPoint, qui sont de véritables concentrés d'information, et qui nécessitent, pour
être compris, l'accompagnement du texte qui se trouve généralement au-dessous, et parfois même à
l'intérieur, puisque j'essaie d'intégrer dans les schémas eux-mêmes des interprétations fondées sur le
Regelwerk. J'en suis arrivé à n'indiquer dans la construction de ces schémas que le réseau des ondes de
mi-points attachés à tel ou tel point d'ancrage, et faisant apparaître sur le schéma l'ensemble des mipoints concernés. Dans le texte qui explicite le schéma, j'ai tendance maintenant à éviter de noyer le
lecteur sous une avalanche d'éléments techniques et à proposer simplement un tableau récapitulatif de
l'ensemble de ces mi-points. La lecture de ces tableaux ne pose aucun problème, me semble-t-il, même
à un lecteur qui ignore tout de l'astrologie. Je compte donc poursuivre dans ce sens. Il n'en demeure
pas moins qu'il restera toujours des éléments techniques, mais que j'essaye de les concentrer dans des
schémas qui demeureront incontournables.
AA - Sur quoi fondez-vous l'interprétation de l'astrologie uranienne ?
CR - Nous venons d'évoquer quelques problèmes posés par la technicité propre à l'astrologie en
général et à l'astrologie uranienne en particulier. Une autre question essentielle est évidemment celle
de l'interprétation de ce qui apparaît dans nos thèmes, qu'ils soient uraniens, classiques ou anciens. En
ce qui concerne l'astrologie classique, dans le domaine de la mondiale, nous bénéficions des acquis des
travaux menés pendant près de trois quarts de siècle par André Barbault mais aussi des apports de nos
confrères étrangers ; je pense notamment au grand livre Mundane Astrology de Charles Harvey et
Nicholas Campion que j'ai eu l'honneur de traduire. Je voudrais dire quelques mots sur la méthode et
sur le champ d'application de cette astrologie mondiale classique. Dans son ouvrage Les Astres et
l'Histoire, André Barbault nous a donné une sorte de bréviaire ; les auteurs de Mundane Astrology ont
présenté toute un gamme de techniques dont plusieurs mériteraient d'être approfondies. Par ailleurs,
dans sa pratique de l'astrologie mondiale, André Barbault a exploré essentiellement et « à fond »
quelques cycles privilégiés qui correspondaient d'ailleurs à son propre thème : le cycle JupiterNeptune et la France, le cycle Saturne-Neptune et la Russie, Jupiter-Saturne et Uranus-Neptune pour
l'Europe, et le cycle Saturne-Pluton associé à la fois à la Chine, l'Inde, l'Allemagne et Israël. On peut
se demander s'il ne serait pas souhaitable de prendre en compte des triplicités cycliques afin de mieux
distinguer ce qui s'applique par exemple à la Chine, au Japon et à l'Inde. J'ai émis l'hypothèse, dans
mon livre Évolution géopolitique du monde, selon laquelle l'évolution de la Chine pourrait se référer à
la triplice Saturne-Uranus-Pluton, et celle de l'Inde à une triplice Saturne-Neptune-Pluton (à vérifier).
Ce type de question reste en suspens et peut être généralisé à d'autres pays. Quant au champ
d'application, j'observe qu'aussi bien André Barbault que les trois auteurs de Mundane Astrology ont
tendance à se limiter à un champ historique très étroit, qui englobe essentiellement les XIXe et XXe
siècles, avec certaines projections sur le cours du XXIe siècle.
Depuis que je me suis occupé d'astrologie mondiale, j'ai toujours eu tendance de partir, pour
interpréter les thèmes, des éléments les plus lents et d’aller ensuite jusqu'aux plus rapides. Je conçois
la disposition de l'ensemble planétaire comme étant constitué de deux plateaux qui s'emboitent.
D'abord le plateau des lentes avec le socle des transsaturniennes (les cycles Neptune-Pluton, UranusNeptune, Uranus-Pluton), ensuite les cycles de Jupiter et de Saturne avec les transsaturniennes. Un
second plateau est constitué par les rapides (Mercure, Vénus, Mars) et par les luminaires.
Conformément à la pensée antique synthétisée dans l'œuvre de Ptolémée, les luminaires apparaissent
comme constitutifs de toute interprétation. J'estime donc qu'il est naturel d'accorder attention aux
Ingrès, aux Lunaisons et aux Éclipses : ce que l'on appelle les « constitutions universelles ».
Cependant, je persiste à penser, à la suite d'André Barbault, qu'il convient de situer ces lunaisons dans
le cadre des cycles en cours à tel ou tel moment de l'Histoire. C'est ainsi que les lunaisons parlantes se
situeront dans une relation directe avec les configurations lourdes de telle ou telle époque ; pour toute
la période 2008-2017, c'est naturellement autour de l'axe Uranus-Pluton que cela se passe. Les autres
lunaisons, qui ne sont pas en rapport avec les éléments constitutifs d'une conjoncture de base, peuvent
être considérés comme anodines. Elles ont sans doute leur valeur propre dans le cadre de thèmes
individuels, où elles entrent en résonance avec des configurations personnelles, mais pas pour la
mondiale. Si d'aventure, elles entraient en résonance avec un évènement mondial retentissant, il
faudrait alors effectuer une exploration en profondeur du thème et recueillir peut-être au fond des
abysses la perle précieuse qui nous indiquerait quel axe fondamental est agissant. C'est ainsi que pour
l'analyse de l'année 2015, j'avais commencé par ne prendre en compte que l'axe Uranus-Pluton (qui se
trouver coïncider avec l'axe Uranus-Zeus qui forme l'ossature majeure des astralités en cours), mais j'ai
pris conscience qu'il fallait tenir compte en même temps de l'axe Saturne-Admète. Ainsi donc
deviennent « parlantes » non seulement les lunaisons accrochées à la zone des axes Uranus-Pluton et
Uranus-Zeus, mais également celles accrochées à la zone de l'axe Saturne-Admète.
A présent que je pratique une astrologie globale, j'ai conservé le même type d'approche qui était
le mien dans le cadre de l'astrologie classique. Le principe en est simple : partir du plus lent pour aller
au plus rapide. Simplement, il se trouve que le plus lent est très lent ! Dans le cadre de l'astrologie
classique, le plus lent, c'était cinq siècles (un cycle Neptune-Pluton). Aujourd'hui, avec l'astrologie
globale, le plus lent c'est 8 800 ans (le cycle synodique d'Apollon-Admète, celui de VulcanusPoséidon n'étant « que » de 6000 ans). Cela entraine naturellement une extension considérable dans le
champ des possibilités de l'astrologie mondiale, et ouvre la voie d'une part à une exploration sérieuse
de l'histoire des civilisations au regard de l'astrologie mondiale - qui fait d'ailleurs l'objet de l'un de
mes deux séminaires virtuels dont rend compte la RAM - et d'autre part ouvre des perspectives
impensées jusqu'à présent vers la fondation d'une astrologie géologique.
Qu'est-ce que cela donne en pratique ? Je vais essayer d'expliquer comment je procède. Mon point
de départ est ce que j'appelle le « point d'ancrage » : il s'agit de discerner dans le thème un degré du
Zodiaque sur lequel se focalise l'interaction généralisée des éléments constitutifs du thème. Par
exemple, pour l'année 2015, en mondiale, c'est, à mes yeux, le mi-point Uranus-Pluton. La même
démarche est valable dans un thème individuel : c'est ainsi que j'ai découvert, en ce qui me concerne,
que Mercure, à 13° Lion, constitue un des points d'ancrage essentiels de mon thème. Ce point
d'ancrage peut être occupé soit par une planète classique, soit par un Transneptunien, soit par
n'importe quel élément du thème (AS, MC ou mi-point). A partir de ce point d'ancrage, le logiciel
d'Auréas nous permet d'obtenir très facilement une liste des autres facteurs et des mi-points du thème
qui sont en résonance selon des aspects classiques ou encore plus « fins » qui sont propres à
l'astrologie uranienne et que l'on appelle « harmoniques » (notamment l'aspect de 22°30 qui
correspond à l'Harmonique 16).
Pour ce qui est de l'interprétation proprement dite, dans l'état actuel de mes connaissances et de
ma pratique de l'astrologie uranienne, je continue à m'appuyer en premier lieu sur les indications du
Regelwerk de Witte-Lefeldt. Cet ouvrage est une sorte de manuel qui a été demandé à Alfred Witte par
ses élèves et qui donne de brèves formules d'interprétation attachées à chacune des figures constituées
par les facteurs du thème. Ainsi, par exemple, durant la période 2014-2016 prédomine la figure
Uranus-Zeus. Le Regelwerk consacre une page à cette figure, en la définissant d'abord en tant que telle
dans une rubrique où sont indiqués les éléments suivants : « volonté, feu soudain, explosion de feu,
foudre, irruption soudaine de la guerre, moteur électrique, dynamo ». Le reste de la page présente des
formules de même nature où la formule de base Uranus-Zeus est combinée avec tous les autres
éléments possibles. Par exemple, UR-ZE=PV (Point Vernal) : « acte de violence durs, virulents,
tempêtes, éruptions, collectivité soumise à une contrainte, tendue, stressée ». Ou encore UR-ZE=PL
(Pluton) : « développement de la volonté, augmentation brutale du rendement ». On observera tout de
suite que les rubriques du Regelwerk ne font pas la distinction entre ce qui s'applique à l'individu et au
collectif, ce qui limite souvent leur utilité en astrologie mondiale. De sorte que ma première démarche
consiste à faire un tri assez sévère dans les rubriques, ne gardant que ce qui, à mes yeux, peut être
utilisé en mondiale. Mais cela ne suffit pas ; il faut aller plus loin en adaptant encore les interprétations
données par le Regelwerk.
Un exemple. L'axe Admète-Poséidon est entièrement orienté par l'interprétation du Regelwerk
vers deux champs : l'idée de « formation, instruction, apprentissage, éducation, profondeur d'esprit »,
et des éléments qui ressortissent à la physique nucléaire : « matérialité subtile, rayonnement, radiation,
atome ». Quand, dans un thème de mondiale, je tombe sur un axe Admète-Poséidon valorisé, il y a de
fortes chances pour que le sujet dont il est question ne concerne aucun de ces deux champs
d'application. Il me faut donc soit abandonner l'interprétation de l'axe Admète-Poséidon, soit trouver,
pour cet axe, un autre champ d'application possible. Ce fut le cas, par exemple, dans le thème de
fondation du Parti communiste chinois : ayant associé à cet axe le terme de « propagande », j'avais une
clef qui rendait très éloquent l'ensemble de ce thème. Il est aussi possible de partir des significations
fondamentales de chacun des éléments pris en compte : Admète indique un principe d'inertie et de
concentration, Poséidon un principe de lumière ; on voit se dégager l'idée d'un rayonnement intense,
mais qui peut être pris au sens physique, intellectuel ou spirituel. Cela ouvre la voie à divers champs
d'interprétation. Là encore, la difficulté est double : il s'agit de trouver une synthèse entre les deux
idées fondamentales qui soit éclairante pour le sujet dont on traite et également de discerner un champ
d'application de ces idées qui corresponde à la nature du thème traité. On voit qu'ici l'intelligence et
l'intuition de l'astrologue sont vivement sollicitées ; mais c'est aussi par là que sa subjectivité propre
peut orienter l'interprétation dans un sens ou dans l'autre. Naturellement, un astrologue honnête
s'efforcera de n'être pas trop partisan...
Un autre exemple mérite d’être signalé. Du fait de connotations distinctes attachées en allemand
et en français à la dénomination de « Cupidon », la première transneptunienne découverte par Alfred
Witte peut sembler au premier abord de médiocre importance en astrologie mondiale, d’autant
qu’Alfred Witte lui-même l’utilisait dans le champ sémantique du mariage et des histoires d’amour.
Cupidon a pris du poids dans mes lectures de thèmes à partir du moment où je l’ai associé aux idées
d’« alliance » et de « communauté » ; du coup, Cupidon a son mot à dire dans tout ce qui concerne les
relations entre États ainsi que dans les questions communautaires.
Ce qui rend l'interprétation extrêmement délicate et quasi-interminable, c'est la richesses des
« ondes » de mi-points qui participent à un même réseau autour d'un point d'ancrage. Dans la pratique,
il m'arrive souvent de ne tenir compte que d'un nombre limité de ces mi-points, mais j'essaye avant
tout de trouver l'idée générale de la figure d'ensemble. C'est certainement dans ce domaine de
l'interprétation que j'ai le sentiment d'avoir encore beaucoup de travail devant moi !
On pourrait encore évoquer un autre outil qui nous est donné par l'école de Hambourg : la « clef
thématique » de Hans Niggemann. Alors que le Regelwerk organise ses rubriques autour des couples
planétaires, la clef de Niggemann les regroupe sous la forme d'un dictionnaire présentant toutes sortes
de notions. Ainsi, en mondiale, il peut être utile d'aller voir les observations relatives aux thèmes
« Guerre et paix », « Richesse et pénurie », etc. C'est sans doute un instrument très utile, mais j'ai le
sentiment de ne l'avoir pas encore utilisé autant qu'il le mérite. Naturellement, ce « dictionnaire »
propose des entrées qui concernent aussi bien l'astrologie individuelle que mondiale. On pourrait
d'ailleurs imaginer de constituer une sorte de répertoire où figurerait toute une liste d'évènements
historiques accompagnés des ondes de mi-points qui s'y rapportent.
AA - N'auriez-vous pas le sentiment que, quel que soit le « point d'ancrage » que vous
choisissez, on trouvera toujours matière à interprétation ?
CR - Je pense que cette question appelle une double réponse, affirmative et négative. Affirmative,
parce que, en fait, dans l'astrologie globale telle que je la conçois aujourd'hui, il y a en permanence une
interaction de tous les facteurs du thème sur tous les autres facteurs, de sorte que, avec tous les
éléments pris en compte (planètes classiques, transneptuniens et autres facteurs), on peut
raisonnablement s'attendre à ce que pratiquement tous les degrés du Zodiaque soient porteurs d'un ou
plusieurs éléments à interpréter. Cela explique pourquoi je n'intègre plus du tout dans mes analyses ni
les maisons, ni les signes, ni même aucun élément isolément pris, ce qui peut naturellement
déconcerter tout astrologue bien né ! Si on s'en tenait à une telle approche absolument globale, on
satisferait sans doute les neptuniens et les poséidoniens accomplis, mais je pense pour ma part, bien
que jouissant dans mon thème d’une conjonction Neptune-Poséidon, qu'il est plus raisonnable de
concentrer l'interprétation sur quelques points cruciaux. Rappelons que le mot « intelligence » vient du
latin intelligere qui veut dire « choisir ». Pratiquons donc une astrologie globale intelligente !
La réponse est donc dans le même temps négative. En réalité, lorsqu'on se trouve devant un
thème, on arrive à déterminer quelques points d'ancrage qui constituent autant de réseaux autour
desquels se concentrent les éléments essentiels de l'analyse générale du thème. Il arrive souvent qu'au
simple regard du thème natal englobant à la fois les planètes classiques et les Transneptuniens, il se
dégage de manière évidente un ou deux points d'ancrage potentiels. Quand cela n'est pas le cas, je
recours à un examen du thème uranien (fourni par le logiciel Auréas de Francis Santoni) qui rend
lisible à l'écran des points d'ancrage potentiels. Il ressort de ces recherches, très faciles et très rapides,
la détermination d'un point d'ancrage dominant et d'un ou deux points d'ancrage secondaires. Cette
démarche rappelle donc celle de l'astrologie classique consistant à déterminer des dominantes dans un
thème.
AA - Vous avez évoqué tout à l'heure les « affinités électives » qui peuvent exister entre
l'astrologue et les thèmes qu'il étudie ; pourriez-vous en donner quelques exemples ?
CR - Ce phénomène des affinités électives m'apparait de plus en plus évident et constamment
présent dans ma pratique. L'idée première est déjà exprimée par André Barbault lui-même, lorsqu'il
parle de son thème et qu'il montre comment son intérêt pour les cycles planétaires s'inscrit, dans son
thème natal marqué par une conjonction Soleil-Lune et par la succession des planètes lentes. L'on
observe effectivement, dans ses travaux, qu'il traite avec prédilection certains couples planétaires
(Soleil-Lune, Jupiter-Neptune, Saturne-Neptune, Uranus-Neptune). Alors que, par exemple, les cycles
Jupiter-Pluton et Saturne-Pluton sont moins présents dans ses travaux, sans être pour autant absents.
En ce qui me concerne, je ne suis même plus étonné quand dans un thème de mondiale, la zone de 20°
des signes Mutables est occupée de façon significative, et c'est même plutôt maintenant l'absence de
facteurs importants sur cette zone qui me surprend ! Je me sens ainsi en accointance avec les thèmes
les plus importants dans l'astrologie mondiale relative à notre temps : le thème des États-Unis, de la
Chine, de la Russie, de l'Allemagne... Et je vois, dans ces affinités astrologiques, la confirmation de
ma vocation pour l'astrologie mondiale.
Peut-être serait-il judicieux de faire le parallèle avec ce qui se passe dans le domaine de la
physique quantique, où l'on a constaté une interférence entre l'observateur et le champ d'observation. Il
n'est d'ailleurs pas sans intérêt de relever que l'astrologie globale repose sur la prise en compte de flux
d'« ondes énergétiques » constituées par les réseaux de mi-points, ce qui peut apparenter cette
démarche à celle de la physique quantique.
AA - Quel lien peut-on faire entre astrologie uranienne et cyclologie traditionnelle ?
CR - J'ai été amené à la découverte et à la pratique de l'astrologie à la suite de ma lecture de
l'œuvre de René Guénon en 1984, et il est donc naturel que, dans mon approche de l'astrologie, j'aie
cherché à trouver un lien entre l'étude des cycles planétaires qui sont du ressort de l'astrologie
mondiale et la cyclologie traditionnelle telle qu'elle est exposée dans quelques articles de René
Guénon, et développée par ses épigones, notamment Gaston Georgel ou Jean Phaure. Pendant très
longtemps, je me suis résolu à l'absence de liens apparents entre les deux domaines. Les cycles
fondamentaux de l'astrologie mondiale n'entrent pas véritablement en résonance avec la logique
cyclique traditionnelle qui repose sur la Tetraktys pythagoricienne et le découpage des temps du
monde en quatre périodes dont la durée va diminuant selon l'ordre 4+3+2+1. Par ailleurs, l'astrologie
mondiale telle qu'elle est pratiquée dans l'Occident moderne a pour principal objectif de comprendre,
ou de prévoir, les développements historiques en relation avec le jeu des puissances. La cyclologie
traditionnelle a une visée beaucoup plus vaste et plus haute, qui est d'aborder les fins ultimes et donc
aussi les commencements primordiaux de l'histoire de ce monde.
Il se trouve que dans mon lent cheminement vers l'astrologie uranienne, j'ai eu le bonheur de
constater qu'il pouvait y avoir une éventuelle relation entre ces deux domaines, sans doute due au fait
que les cycles transneptuniens sont d'une durée infiniment plus longue que les cycles classiques, et
peuvent ainsi entrer en résonance avec les découpages de la cyclologie traditionnelle. J'ai pu constater
notamment un point de jonction qui se situe autour de l'année 2031 : ce sera alors la conjonction
Hadès-Kronos dont la dernière en date remonte à 863 (cinquante ans après la mort de Charlemagne) et
je n'ai pas manqué de faire le lien avec les indications de la cyclologie traditionnelle concernant cette
date qui fait l'objet de plusieurs mentions.
Il me semble qu'il y a là tout un champ de recherche. Depuis que Paul Bernard nous a livré des
logiciels capables d'explorations dans le temps presque sans limites, nous disposons du moyen de
rechercher d'autres points de convergence éventuels. Par ailleurs, j'envisage de publier prochainement
une Revue de cyclologie traditionnelle dans laquelle ce genre de question sera abondamment traité.
III. LA DIFFUSION DE L’ASTROLOGIE GLOBALE : UN SITE ET TROIS REVUES
AA - Comment vous venue l'idée de transmettre vos recherches par un site personnel et à
travers un panel de revues distinctes ?
CR - Il y a deux moments à prendre en considération ici : celui de la création du site le 12 janvier
2008 et celui de la conception d'une série de revues qui s'est produite lors d'une promenade dans mon
village le jour d'une lune bleue, le 20 août 2013 !
La création du site a été, dans une certaine mesure, la conséquence du sentiment de blocage dans
lequel je me trouvais durant la période de « traversée du désert » que nous avons évoquée plus haut. A
cette époque, le cadre stimulant d'Univers-site n'existait plus, et la revue De Sphaeris créée par Didier
Castille à Lille n'a pas rempli les espérances que l'on pouvait attendre d'elle. Dès le début, mon site n'a
pas été consacré uniquement à l'astrologie, même si celle-ci occupait une grande part, mais également
à mes divers travaux sur le Moyen-Âge, sur la littérature française et russe, et sur Tolkien et
Čiurlionis. Une part assez restreinte est également consacrée à quelques textes sur la Tradition au sens
guénonien du terme, et à l'accueil de travaux divers qui m'ont été proposés et que j'héberge en hôte
bienveillant.
En juillet 2013, je venais de terminer un immense travail qui m'avait occupé sept ans durant : la
préparation d'une édition de la correspondance entre les deux pères fondateurs des études médiévales
en France que sont Gaston Paris et Paul Meyer, auxquels j'avais déjà consacré sept ans à l'occasion de
mon doctorat d'État sur les études médiévales en France de 1860 à 1914. Étant déjà libéré de mes
charges d'enseignant depuis 2010, je me trouvais alors dégagé de la charge de cette édition et
pleinement disponible pour - enfin - me livrer entièrement ou presque à mes travaux astrologiques et à
mes recherches sur la cyclologie traditionnelle. C'est dans ce contexte que m'est soudain venue au
cours d'une promenade l'idée de regrouper mes divers travaux dans le cadre d'une série de revues
spécialisées. Ce 20 août 2013 était celui de ce que l'on appelle une « lune bleue »3, ce qui a peut-être
contribué à stimuler mon imagination créatrice ! C'est ainsi qu'est né le BAM (Bulletin d’astrologie
mondiale) destiné à des commentaires réguliers de l'actualité mondiale à travers le prisme de
l'astrologie : le premier numéro paraissait le 31 août sur le site. (Curieuse coïncidence : il se trouve que
ce jour-là s'est produit au plan mondial un évènement d'une importance majeure : le monde a failli
sombrer dans une troisième guerre mondiale comme cela avait été le cas lors de la crise des fusées à
Cuba, et c'est le recul du Président Obama qui a stoppé le lancement de l'offensive prévue contre la
Syrie). Très vite, j'ai ressenti la nécessité de compléter le bulletin par une revue d'astrologie, organe de
recherche que j'ai eu l'idée de structurer autour de deux séminaires virtuels consacrés l'un à l'histoire
des civilisations, l'autre à une réflexion sur un nouveau paradigme de l'astrologie au regard des percées
scientifiques dans le domaine astronomique durant les premières décennies du XXIe siècle. De fait, les
trois premiers numéro de la RAM ont porté sur une étude fondamentale relative à l'ordonnancement du
système solaire, grâce à une collaboration des plus fructueuses avec Paul Bernard, et sur deux numéros
consacrés à la question des Transneptuniens, à leur découverte et à la façon de les utiliser en astrologie
mondiale. Durant l'année 2015, les numéros de la RAM porteront sur une étude des trois grandes
puissances (États-Unis, Chine, Russie), et ce n'est qu'après ce détour que j'entrerai dans le vif de mes
deux séminaires virtuels !
Dans la mouvance de la RAM ont été publiés quelques numéros de RAM-Histoire dont l'objet est
de traiter d'évènements historiques précis en résonance avec l'année en cours : ont paru jusqu'à présent
des numéros consacrés à la naissance de Saint-Louis, à l'abdication de Napoléon Ier, et à la bataille de
Tannenberg. Pour l'année 2015, sont en préparation deux numéros, l'un sur Waterloo et l'autre sur la
mort de Louis XIV.
Récemment, a été publié le premier numéro des Études astrologiques consacrées à des écrits qui
ne concernent pas l'astrologie mondiale, inaugurés par une belle étude de vous-même sur le Cardinal
de Richelieu. De nombreux autres numéros suivront, que je souhaite consacrer à divers hommages
astrologiques rendus en particulier à des écrivains ou des artistes qui me sont chers, tels Alexandre
Soljénitsyne, J.R.R. Tolkien, Vladimir Volkoff, Jean Parvulesco, Ernst Wiechert, M.K. Čiurlionis,
Nicolas Roerich...
A cela viendra s'ajouter bientôt, je l'espère, une grande nouveauté : la Revue de cyclologie
traditionnelle que nous avons évoquée. Elle sera pour une grande part consacrée à la présentation des
travaux d'auteurs marqués par un sens aigu de l'actualité de l'eschatologie : Jean Phaure, Raoul
Auclair, Vlaicu Ionescu...
Enfin, ce sera une grande joie pour moi que de voir naître la dernière de ces revues : les Cahiers
de la Lune bleue, dans lesquels seront présentées diverses études non astrologiques, relatives à la
littérature ou aux arts.
25 mars 2015
3
On considère comme « lune bleue » la seconde Pleine Lune qui a lieu lors d’un même mois. L’expression, qui vient de
l’anglais blue moon, n’a rien à voir avec une modification de la teinte de la lune.
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