Hume 1. Introduction 1.1 Les sources de sa pensée. 1. 2 Biographie « doux, maître de moi-même, d'une humeur gaie et sociale, capable d'amitié mais très peu susceptible de haine, et très modéré dans toutes mes passions. » 2. Philosophie 2.1 Empirisme vs Rationalisme « L'esprit est une table rase & la réflexion Supposons donc qu'au commencement, l'Âme est qu'on appelle une Table rase, vide de tous caractères, sans aucune idée, quelle qu'elle soit. Comment vient-elle à recevoir des idées ? Par quel moyen en acquiert-elle cette prodigieuse quantité que l'imagination de l'Homme, toujours agissante et sans bornes, lui présente avec une variété presque infinie ? D'où puise-t-elle tous ces matériaux qui font comme le fond de tous ses raisonnements et de toutes ses connaissances ? À cela je réponds en un mot, de l'Expérience : c'est le fondement de toutes nos connaissances, et c'est de là qu'elles tirent leur première origine. Les observations que nous faisons sur les objets extérieurs et sensibles, ou sur les opérations intérieures de notre âme, que nous apercevons et sur lesquelles nous réfléchissons nous-mêmes, fournissent à notre esprit les matériaux de toutes ses pensées. Ce sont là les deux sources d'où découlent toutes les idées que nous avons, ou que nous pouvons avoir naturellement... Mais comme j'appelle l'autre source de nos idées Sensation, je nommerai celle-ci Réflexion, parce que l'âme ne reçoit par son moyen que les idées qu'elle acquiert en réfléchissant sur ses propres opérations. C'est pourquoi je vous prie de remarquer, que dans la suite de ce discours, j'entends par Réflexion la connaissance que l'âme prend de ses différentes opérations, par où l'entendement vient à s'en former des idées. Ce sont-là, à mon avis, les seuls Principes d'où toutes nos idées tirent leur origine; à savoir les choses extérieures et matérielles qui sont les objets de la Sensation, et les Opérations de notre Esprit, qui sont les objets de la Réflexion. » Locke, Essai concernant l'entendement humain, 1690. 2.2 Un empirisme antimétaphysique “...the science of man is the only solid foundation for the other sciences...” « Il est évident que toutes les sciences, d'une façon plus ou moins importante, ont une relation à la nature humaine, et que, si loin que l'une d'entre elles peut sembler s'en écarter, elle y revient toujours d'une façon ou d'une autre. Même les mathématiques, même la philosophie naturelle et la religion naturelle dépendent dans une certaine mesure de la science de l'HOMME, car elles tombent sous la connaissance des hommes et sont jugées par leurs pouvoirs et leurs facultés. Il est impossible de dire quels changements et quelles améliorations nous pourrions faire dans ces sciences si nous connaissions entièrement l'étendue et la force de l'entendement humain [...] » Perceptions : « Les perceptions qui entrent avec le plus de force et de violence, nous pouvons les nommer impressions ; et sous ce terme, je comprends toutes nos sensations, passions et émotions, telles qu’elles font leur première apparition dans l’âme. » Idées : « Par idées, j’entends les images affaiblies des impressions dans la pensée et le raisonnement. Telles sont, par exemple, toutes les perceptions excitées par le présent discours, à l’exception seulement de celles qui proviennent de la vue et du toucher, et à l’exception du plaisir immédiat ou du désagrément qu’il peut occasionner. » « Chacun, de lui-même, percevra facilement la différence entre sentir et penser. » Hume, Enquête sur l'entendement humain (Paris, Flammarion, 1983, note 1, p. 68) « Que signifie inné ? Si inné équivaut à naturel, alors il faut accorder que toutes les perceptions et toutes les idées de l'esprit sont innées ou naturelles en quelques sens que nous prenions ce dernier mot, que ce soit en l'opposant à peu commun, à artificiel ou à miraculeux. Si, par inné, on signifie contemporain de notre naissance, la discussion semble frivole ; cela ne vaut pas la peine de rechercher à quel moment commence la pensée, avant, après, ou à notre naissance. En outre, le mot idée est couramment pris par Locke et par les autres dans un sens très imprécis, semble-t-il : il représente toutes nos perceptions, nos sensations et nos passions aussi bien que nos pensées. Or, si l'on accepte ce sens, je désirerais savoir ce qu'on peut vouloir dire quand on affirme que l'amour de soi, ou le ressentiment des injustices subies, ou la passion entre les sexes ne sont pas innés. Mais, si l'on admet ces termes impressions et idées, au sens exposé ci-dessus et que l'on entende par inné ce qui est primitif, ce qui n'est copié d'aucune perception antérieure, alors nous pouvons affirmer que toutes nos impressions sont innées et que nos idées ne le sont pas. Pour être franc, je dois avouer que, à mon avis, Locke fut, sur cette question, la dupe des gens de l'École qui, employant des termes sans les définir, étirèrent leurs controverses et les allongèrent fastidieusement sans jamais toucher le point en discussion. Une ambiguïté semblable et de semblables ambages courent, semble-t-il, à travers les raisonnements de ce philosophe sur ce sujet aussi bien que sur la plupart des autres questions. » 2.3 Les limites de la raison 2.4 La causalité Hume, Abrégé du traité de la nature humaine, Paris, Aubier-Montaigne, 1971, p.69-71. « On suppose communément qu'il y a une connexion nécessaire entre la cause et l'effet, et que la cause possède quelque chose que nous appelons pouvoir, force, ou énergie. La question est la suivante : quelle idée s'attache à ces termes ? Si toutes nos idées ou pensées dérivent de nos impressions, ce pouvoir doit lui-même se manifester soit à nos sens, soit à notre sentiment interne. Mais tant s'en faut qu'aucun pouvoir se manifeste de lui-même aux sens dans les opérations de la matière, que les cartésiens ne se sont fait aucun scrupule d'affirmer que la matière est complètement dépourvue d'énergie et que toutes ses opérations sont éxécutées uniquement par l'énergie de l'Être suprême. Mais la question revient toujours : quelle idée avons-nous de l'énergie ou du pouvoir, même dans l'Être suprême ? Toute notre idée d'une divinité (d'après ceux qui nient les idées innées) n'est autre chose qu'une composition de ces idées que nous acquérons en réfléchissant sur les opérations de notre propre esprit. Or, pas plus que la matière, notre esprit ne nous fournit la notion d'énergie. Lorsque nous considérons a priori notre volonté ou volition, en faisait abstraction de l'expérience, jamais nous ne sommes capables d'en inférer un effet quelconque. Et lorsque nous nous appuyons sur l'expérience, celle-ci nous montre seulement des objets contigus, successifs et conjoints de manière constante. En sommes donc, ou bien nous n'avons pas du tout d'idée de la force et de l'énergie, et ces mots sont entièrement dépourvus de signification ; ou bien ils ne peuvent rien signifier d'autre que cette détermination de la pensée, acquise par l'habitude, à passer de la cause à son effet ordinaire. » « Si donc nous désirons nous satisfaire au sujet de la nature de l’évidence qui nous donne la certitude des faits, il faut que nous recherchions comment nous arrivons à la connaissance de la cause et de l’effet. J’oserai affirmer, comme une proposition générale qui n’admet pas d’exception, que la connaissance de cette relation ne s’obtient, en aucun cas, par des raisonnements a priori ; mais qu’elle naît entièrement de l’expérience, quand nous trouvons que des objets particuliers sont en conjonction constante l’un avec l’autre. Qu’on présente un objet à un homme dont la raison et les aptitudes soient, par nature, aussi fortes que possible ; si cet objet lui est entièrement nouveau, il sera incapable, sans examiner avec la plus grande précision ses qualités sensibles, de découvrir l’une de ses causes ou l’un de ses effets. Adam, bien qu’on admette l’entière perfection de ses facultés rationnelles dès son tout premier moment, n’aurait pu inférer de la fluidité et la transparence de l’eau que celle-ci le suffoquerait, ou de la lumière et de la chaleur du feu que celui-ci le consumerait. Nul objet ne découvre jamais, par les qualités qui paraissent aux sens, soit les causes qui les produisent, soit les effets qui en naissent ; et notre raison ne peut, sans l’aide de l’expérience, jamais tirer une conclusion au sujet d’une existence réelle et d’un fait. » Hume, Enquête sur l’entendement humain, IV, p. 87 2.5 La croyance 2.6 La pensée et la pratique « Tous les objets de la raison humaine ou de nos recherches peuvent naturellement se diviser en deux genres, à savoir les relations d’idées et les faits. Du premier genre sont les sciences de la géométrie, de l’algèbre, de l’arithmétique et, en bref, toute affirmation qui est intuitivement ou démonstrativement certaine. Le carré de l’hypoténuse est égal au carré des deux côtés, cette proposition exprime une relation entre ces figures. Trois fois cinq est égal à la moitié de trente exprime une relation entre ces nombres. Les propositions de ce genre, on peut les découvrir par la seule opération de la pensée, sans dépendre de rien de ce qui existe dans l’Univers. Même s’il n’y avait jamais eu de cercles ou de triangles dans la nature, les vérités démontrées par Euclide conserveraient pour toujours leur certitude et leur évidence. Les faits, qui sont les seconds objets de la raison humaine, on ne les établit pas de la même manière ; et l’évidence de leur vérité, aussi grande soit elle, n’est pas d’une nature semblable à la précédente. Le contraire d’un fait quelconque est toujours possible, car il n’implique pas contradiction et l’esprit le conçoit aussi facilement et aussi distinctement que s’il concordait pleinement avec la réalité. Le soleil ne se lèvera pas demain, cette proposition n’est pas moins intelligible et elle n’implique pas plus de contradiction que l’affirmation : il se lèvera. » Hume, Enquête sur l’entendement humain, IV, p.85 « sur ce point, la nature ne nous a pas laissés libres de choisir, et elle a sans doute estimé que l’affaire était de trop d’importance pour pouvoir être confiée à nos spéculations et à nos raisonnements incertains. » Hume, Traité sur l’entendement humain, I, IV, II, p. 270. A. Critique de certaines idées 3. Conclusion