Première détection de CO dans Uranus
Une équipe de l'Observatoire de Paris, animée par Thérèse Encrenaz (LESIA), vient de
détecter pour la première fois la molécule de monoxyde de carbone (CO) dans l'atmosphère
d'Uranus. L'origine de cette molécule est sans doute externe à la planète, par exemple due à
des micrométéorites.
En dépit de leur statut commun de "géantes glacées" dans le système solaire extérieur, les planètes géantes Uranus
et Neptune, de taille et de densité voisines, présentent de surprenantes différences. En particulier, les molécules CO
et HCN ont été observées en abondance dans la stratosphère de Neptune, par spectroscopie millimétrique, alors
qu'elles n'ont pu être détectées sur Uranus par cette technique. La forte abondance du monoxyde de carbone CO
sur Neptune (environ mille fois plus forte que sur Jupiter et Saturne) suggère que cette molécule provient
essentiellement de l'intérieur de la planète, ce qui a des implications sur son scénario de formation. En effet, son
abondance est de plusieurs ordres de grandeur supérieure à ce qui pourrait être apporté par des flux d'origine
externe.De nouvelles mesures, réalisées dans le domaine de l'infrarouge, viennent de permettre la détection de CO
dans l'atmosphère d'Uranus.
Cette mesure a été rendue possible par la très grande sensibilité du spectromètre infrarouge ISAAC placé au foyer
du télescope de 8 mètres UT1 (Antu) du VLT (Very Large Telescope) de l'ESO au Chili. Les signatures spectrales de
la molécule CO apparaissent en émission, et s'expliquent par un mécanisme de fluorescence, les molécules étant
excitées par le rayonnement solaire. Une modélisation complète du spectre montre que la molécule CO est présente
dans la basse stratosphère d'Uranus (avec une abondance environ trente fois inférieure à celle de Neptune), mais
qu'elle est sans doute moins abondante dans la troposphère profonde. Ce résultat, s'il est confirmé, semble indiquer
que le monoxyde de carbone d'Uranus est d'origine externe, et non interne. Il proviendrait alors, de même que l'eau
également détectée dans la stratosphère d'Uranus comme dans celle des autres planètes géantes, d'un flux de
micrométéorites interplanétaires happées par le champ de gravité de la planète. Quant à la faible abondance de CO
dans la troposphère d'Uranus, elle pourrait être l'indice de différences structurelles entre les deux "géantes glacées".
L'atmosphère de Neptune paraît en effet beaucoup plus turbulente que celle d'Uranus, et la chaleur interne de
Neptune, mesurée par la sonde Voyager 2, est aussi nettement plus intense. L'énergie interne de Neptune
alimenterait l'agitation atmosphérique par convection, et favoriserait la remontée du monoxyde de carbone produit en
profondeur, tandis que ce mécanisme serait absent dans le cas d'Uranus.
Copyright © Observatoire de Paris centre de recherche et enseignement en astronomie et astrophysique relevant du Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.Page 2/2