Dossier
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Décibels :
attention danger !
S
endormir avec un baladeur
sur les oreilles, laisser les
enfants jouer devant des
caissons de basses dans les tes
de village, travailler dans un atelier
bruyant sans protection… Autant
de situations à risque pour nos
deux oreilles ! Le bruit peut cons-
tituer un danger fatal. Si les niveaux
sonores élevés ne font pas éclater
le tympan comme il est souvent dit,
ils agissent de façon plus insidieuse
en altérant et décimant les cellules
sensorielles de loreille interne. Or,
ces cellules qui sont en nombre
restreintne se renouvellent pas.
Il est donc indispensable d’être
vigilant et de prendre soin de ses
oreilles dès le plus jeune âge. Les
initiatives concernant la pvention
se multiplient.
« Nous menons des actions d’infor-
mation auprès des mairies pour les
restaurants scolaires, les enfants
restent près d’une heure, et qui sont
souvent très bruyants. Cela peut être
amélioré en mettant une peinture
Cinq millions de Français
sont malentendants.
Ces problèmes daudition
ne sont pas uniquement
liés à lâge : lexposition
au bruit peut provoquer
une diminution
de laudition et ce,
dès le plus jeune âge.
Les messages
de prévention et les actions
de sensibilisation
se multiplient.
spéciale par exemple. Des limiteurs
de bruit sont également instals dans
des salles de conférence », explique
Huguette Cloux, à l’origine de la
Journée nationale de laudition qui
a lieu en mars, depuis dix ans.
I120 dB :
le seuil de douleur
En mars dernier, cette joure
était consacrée aux jeunes et à la
musique amplifiée. Lécoute sans
discernement de musique ampli-
fiée conduit à des situations irré-
médiables. Dans des concerts de
rock ou techno, le niveau sonore
dépasse souvent 120 dB, ce qui
constitue le seuil de douleur. À la
sortie d’un concert de ce genre, un
traumatisme sonore (sifflements
permanents et/ou écoute doulou-
reuse) peut apparaître. Ces signes
peuvent disparaître en quelques
heures ou devenir définitifs si les
Au travail, la réglementation est sévère. Lorsque le niveau dépasse 90 dB,
l’employeur doit établir un programme technique de réduction du bruit.
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Dossier
Vrai/Faux
« Jécoute la musique à fond. Je n’ai jamais eu de problème
auditif parce que ma chaîne hi-fi est de très bonne qualité. »
FAUX. La qualité de la musique ne joue aucun rôle dans la nocivité.
Seule l’énergie sonore, c’est-à-dire le niveau et la durée d’exposition, reçue
par l’auditeur conditionne le risque.
« Il est dangereux dutiliser des cotons-tiges pour se nettoyer
les oreilles. »
VRAI. Enfoncés trop profondément, ils peuvent blesser le tympan.
De plus, ils risquent de pousser le cérumen au fond du conduit auditif plutôt
que de l’extraire. Alors, la solution ? « Théoriquement, il ne faudrait pas
toucher à l’oreille, elle est faite pour se nettoyer toute seule. Il faut nettoyer
l’extérieur mais pas le conduit de l’oreille », précise un ORL.
expositions sonores se répètent.
Autre cas : à plus long terme, l’alté-
ration va se manifester par une
presbyacousie (acui auditive qui
baisse avec l’âge) précoce, appa-
raissant vers 35-40 ans alors que,
normalement, elle se présente vers
la soixantaine.
L’intensité des sons est exprimée
en décibels (dB) dans une échelle
allant de 0 dB, seuil de l’audition
humaine au-dessous duquel aucun
son nest perceptible, à 120 dB,
niveau très élevé nocif pour
loreille (voir graphique ci-dessus).
En écoutant de la musique avec
un baladeur, ou en discothèque
les niveaux sonores sont souvent
très élevés (plus de 100 dB), il faut
ménager ses oreilles en sobligeant
à faire des pauses. Un décret du
15 décembre 1998 se référant aux
discothèques et lieux diffusant de
la musique amplifi ée limite la pres-
sion acoustique à un niveau moyen
de 105 dB. « Les dégâts ne sont pas
forcément perceptibles immédiate-
ment, mais le mal est fait », précise
Christian Gélis, biophysicien, pré-
sident de la Journée nationale de
laudition.
Et si environ 5 millions de Fran-
çais sont malentendants, près de
2,5 millions de personnes souffrent
dacouphènes, qui se manifestent
par une perception prolongée de
sons d’intensité variable (bour-
donnements, siffl ements, grésille-
ments…), en l’absence de toute
simulation sonore. Lacouphène
survient à tout âge, il peut appa-
raître spontament, ou après
> 120 : niveaux exceptionnels : avions, fusées, explosions.
90 - 120 : sons nocifs : musique amplifi ée, sports mécaniques,
bruits industriels.
85 - 90 : limite de nocivité pour le système auditif.
60 - 80 : lieux de vie : magasins, rues, communication parlée.
30 - 50 : lieux de repos ou de travail intellectuel : chambre,
bibliothèque, bureaux.
0 - 30 : lieux très calmes : campagne, studios d’enregistrement.
0 dB : seuil de perception de l’oreille humaine.
Échelle des sons
É
chelle des sons
120908560300
Lors de concerts de musiques amplifi ées,
il est vivement conseillé d’utiliser
des bouchons d’oreilles.
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Jean-Yves Michel, audioprotsiste dans le Gard
« La prévention des risques auditifs dans l’entreprise passe
par l’exemple »
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cibels : attention danger !
Chiffres clé
7,5 millions.
Cest le nombre esti-
de Français qui
ont des problèmes
d’audition. Parmi
eux, 5 millions
sont malentendants
et 2,5 millions
souffrent régulière-
ment d’acoupnes.
Les sons nocifs ne se rencon-
trent pas uniquement dans
les loisirs, le milieu profes-
sionnel peut également être
bruyant. « Au travail, la
glementation est sévère.
Lorsque le niveaupasse
90 dB, l’employeur doit éta-
blir un programme technique
de réduction du bruit et prendre
toutes les dispositions pour que
les protecteurs individuels soient
utilis. Entre 85 dB et 90 dB,
des protecteurs sont à la dis-
position des travailleurs. Une
directive européenne prévoit
d’abaisser ses seuils de 5 dB.
Nous attendons la loi française »,
explique Christian Gélis.
IDes bouchons
ou des casques au travail
Pour les professionnels les plus
expos, il existe des bouchons
alisés sur mesure par l’audio-
prothésiste, très efcaces qui
ne déforment pas le son. Des
casques (serre-nuque ou intégral)
existent également. « Il faut se
protéger, insiste Huguette Cloux.
Certains disent que ce n’est pas
joli, que ça les gêne, qu’ils n’en-
tendent pas quand on les appelle.
Mais la parole passe, c’est une
question d’attention. »
Il faut prévenir, certes, mais égale-
ment penser au dépistage. À partir
de 60 ans, mais également plus
jeune si l’on a la sensation de ne
pas entendre aussi bien quavant.
« Pour la vue, nous avons une
référence : on ne peut plus lire le
journal. Pour laudition, cest plus
difficile car ce n’est pas forcément
flagrant : nous pouvons croire que
cest notre interlocuteur qui parle
un stress, une dépression, et est
souvent consécutif à une exposi-
tion récente ou ancienne au bruit.
Après avoir perçu lacouphène,
une majorité de patients nest pas
affectée, alors que pour d’autres,
environ 25 %, il constitue un han-
dicap considérable. « Si lon souffre
dacouphènes, il ne faut surtout pas
sisoler et ne pas hésiter à en parler »,
indique le professeur Gélis.
Pour que cela marche, il faut que le
chef d’équipe porte aussi les pro-
tections individuelles auditives que
l’entreprise fournit à tous les salariés. »
Pour Jean-Yves Michel, audioprotsiste
mutualiste dans le Gard, la prévention
des risques auditifs dans l’entreprise
passe par l’exemple. « Ce n’est pas
toujours acceppar les salariés de de-
voir porter un casque et des bouchons
d’oreilles parce qu’il y a un frein psycho-
logique. Certains se sentent diminués,
montrant une faiblesse », poursuit-il.
Le bruit au travail a été largement
analydans l’enquête Sumer du minis-
tère du Travail et de la Direction de
lanimation de la recherche, des études
et des statistiques (Dares) en 2003. Près
de 7 % des salariés sont exposés à des
bruits nocifs et 25 % à dautres bruits,
moins dangereux pour la santé mais
pas sans conséquence. Les salariés de
l’industrie et de la construction sont
les plus touchés. Ces secteurs sont
ceux qui mettent à disposition le plus
fréquemment des protections audi-
tives. Il nen reste pas moins que 32 %
des personnes exposées à des bruits
nocifs n’ont pas de protection audi-
tive à leur disposition selon lenquête
Sumer. Le milieu ouvrier est le plus
Jean-Yves Michel, audioprotsiste dans le Gard
« La prévention des risques auditifs dans l’entreprise passe
par l’exemple »
Jean-Yves Michel : « Le plus efficace
pour la prévention des risques auditifs
en entreprise est de former les jeunes. »
touché (secteur agricole, artisanal…).
« Le plus efficace pour la prévention des
risques auditifs en entreprise est de former
les jeunes à construire leur férence avec
des protections auditives. C’est le sens
du travail que lon ne depuis trois ans
avec le service Promotion de la san de
la Mutuali Fraaise en allant rencon-
trer les lycéens qui se préparent à des
tiers à risques : métalliers, menuisiers
carrossiersS’ils apprennent leur tier
en mettant des protections individuelles
qui atténuent les bruits, ils garderont bien
mieux celles que leur futur employeur
mettra à leur disposition car leurs repères
nauront pas changé », conclut l’audio-
prothésiste mutualiste.
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Testez votre audition
> 1 - Avez-vous du mal à suivre
une conversation dans un lieu
bruyant ?
> 2 - Faites-vous parfois répéter
vos interlocuteurs ?
> 3 - Augmentez-vous souvent
le son de la télévision et de
la radio ?
> 4 - Avez-vous du mal à entendre
la sonnerie de la porte
ou du téléphone ?
> 5 - Dans la rue, êtes-vous parfois
surpris par l’arrivée
d’un véhicule ?
> 6 - Au cinéma, vous avez du mal
à comprendre les films étrangers
en version française ?
> 7 - Avez-vous du mal à
comprendre dans l’obscurité ?
> 8 - Dans la nature, vous
n’entendez plus très bien
le bruissement des feuilles ou le
chant des oiseaux ?
> 9 Au téléphone, vous comprenez
difficilement les noms propres
et les nombres (adresse, numéro
de téléphone) ?
Toute réponse positive à lune
de ces questions doit entraîner
un contrôle de laudition.
Dossier
Audition Mutualiste : 190 centres en France
Depuis plus de 20 ans, la Mutualité Française s’est engagée sur le terrain de la
prévention. Elle s’est mobilisée avec d’autres partenaires, notamment dans le
cadre de la Journée nationale de l’audition. Objectif : sensibiliser le public et
plus spécialement les jeunes, les professionnels et les pouvoirs publics aux
risques qui pèsent sur l’audition, ainsi qu’aux moyens de prévenir et de faire
face aux troubles auditifs. Pour y répondre, elle s’appuie sur un réseau
professionnel, Audition Mutualiste, qui compte aujourd’hui 190 centres
d’audioprothèse répartis sur toute la France. Les adresses de ces centres sont
disponibles dans les agences de votre mutuelle ou sur le site www.fnmf.fr
trop vite par exemple », explique
Christian Gélis. Au-delà de 60 ans,
une personne sur deux a une perte
auditive significative. Mais seule-
ment 30 % des personnes âgées ont
conscience d’une gêne auditive. Le
pistage est donc nécessaire pour
détecter la perte d’audition qui est
progressive et insidieuse. « Trop de
personnes qui deviennent sourdes
ne veulent pas le faire savoir car
pour eux, cest synonyme de handi-
cap. Il faut changer les mentalités
et dédramatiser la surdité », ajoute
Huguette Cloux.
IDes appareils
onéreux
C’est pourquoi il faut consulter
un spécialiste dès le début de la
soixantaine, puis gulrement
tous les un à deux ans. L’oto-
rhino-laryngologiste est le méde-
cin spécialisé dans l’examen et
le traitement médical de l’oreille.
Pour un bilan auditif, l’ORL réalise
un audiogramme. Il fait écouter aux
Après une visite chez l’ORL,
l’audioprothésiste procède à un test auditif avant lappareillage.
© FNMF/N. Mergui
patients des sons, des plus aigus
aux plus graves. Il trace ensuite
la courbe du seuil de perception
sonore en fonction de la fréquence.
Il peut également tester la compré-
hension de mots ou de phrases. En
fonction de ce bilan, un appareil
de correction sera prescrit ou pas.
C’est alors l’audioprothésiste qui
procède à l’appareillage. En France,
environ 340 000 aides auditives
sont délivrées chaque année par
2 000 audioprothésistes.
Depuis quelques années, les
aides auditives numériques ont
permis d’accroître la discré-
tion, la fiabilité et le confort des
appareils qui « filtrent » les sons
forts tout en permettant l’écoute
des niveaux faibles. Il existe des
appareils de type contour, portés
sur le pavillon de l’oreille et des
intra-auriculaires plus ou moins
dissimulés dans le conduit auditif.
Et depuis peu, des mini contours
avec des tubes très fins sont des-
tinés aux personnes ayant une
presbyacousie. Lappareillage est
un investissement important. Le
coût d’un appareillage pour les
deux oreilles se situe entre 1 500 et
4 000 . La Sécurité sociale prend
en charge une partie des frais sur
prescription dicale. Pour les
plus de 20 ans, le remboursement
seffectue sur la base de 65 % d’une
somme forfaitaire xée à 199,71
par appareil. La mutuelle permet
d’améliorer ce remboursement
selon la garantie souscrite.
Qu’il sagisse d’une perte d’audi-
tion brutale ou d’une baisse liée
à l’âge, il est primordial de ne pas
attendre de ne plus entendre pour
aller consulter un spécialiste. Faire
la sourde oreille dans ce cas-
peut être irréversible
Cécile Pelé
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