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LE MUTUALISTE J U I N 2 0 0 6
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Décibels : attention danger !
Chiffres clé
7,5 millions.
C’est le nombre esti-
mé de Français qui
ont des problèmes
d’audition. Parmi
eux, 5 millions
sont malentendants
et 2,5 millions
souffrent régulière-
ment d’acouphènes.
Les sons nocifs ne se rencon-
trent pas uniquement dans
les loisirs, le milieu profes-
sionnel peut également être
bruyant. « Au travail, la
réglementation est sévère.
Lorsque le niveau dépasse
90 dB, l’employeur doit éta-
blir un programme technique
de réduction du bruit et prendre
toutes les dispositions pour que
les protecteurs individuels soient
utilisés. Entre 85 dB et 90 dB,
des protecteurs sont à la dis-
position des travailleurs. Une
directive européenne prévoit
d’abaisser ses seuils de 5 dB.
Nous attendons la loi française »,
explique Christian Gélis.
IDes bouchons
ou des casques au travail
Pour les professionnels les plus
exposés, il existe des bouchons
réalisés sur mesure par l’audio-
prothésiste, très efficaces qui
ne déforment pas le son. Des
casques (serre-nuque ou intégral)
existent également. « Il faut se
protéger, insiste Huguette Cloux.
Certains disent que ce n’est pas
joli, que ça les gêne, qu’ils n’en-
tendent pas quand on les appelle.
Mais la parole passe, c’est une
question d’attention. »
Il faut prévenir, certes, mais égale-
ment penser au dépistage. À partir
de 60 ans, mais également plus
jeune si l’on a la sensation de ne
pas entendre aussi bien qu’avant.
« Pour la vue, nous avons une
référence : on ne peut plus lire le
journal. Pour l’audition, c’est plus
difficile car ce n’est pas forcément
flagrant : nous pouvons croire que
c’est notre interlocuteur qui parle
un stress, une dépression, et est
souvent consécutif à une exposi-
tion récente ou ancienne au bruit.
Après avoir perçu l’acouphène,
une majorité de patients n’est pas
affectée, alors que pour d’autres,
environ 25 %, il constitue un han-
dicap considérable. « Si l’on souffre
d’acouphènes, il ne faut surtout pas
s’isoler et ne pas hésiter à en parler »,
indique le professeur Gélis.
Pour que cela marche, il faut que le
chef d’équipe porte aussi les pro-
tections individuelles auditives que
l’entreprise fournit à tous les salariés. »
Pour Jean-Yves Michel, audioprothésiste
mutualiste dans le Gard, la prévention
des risques auditifs dans l’entreprise
passe par l’exemple. « Ce n’est pas
toujours accepté par les salariés de de-
voir porter un casque et des bouchons
d’oreilles parce qu’il y a un frein psycho-
logique. Certains se sentent diminués,
montrant une faiblesse », poursuit-il.
Le bruit au travail a été largement
analysé dans l’enquête Sumer du minis-
tère du Travail et de la Direction de
l’animation de la recherche, des études
et des statistiques (Dares) en 2003. Près
de 7 % des salariés sont exposés à des
bruits nocifs et 25 % à d’autres bruits,
moins dangereux pour la santé mais
pas sans conséquence. Les salariés de
l’industrie et de la construction sont
les plus touchés. Ces secteurs sont
ceux qui mettent à disposition le plus
fréquemment des protections audi-
tives. Il n’en reste pas moins que 32 %
des personnes exposées à des bruits
nocifs n’ont pas de protection audi-
tive à leur disposition selon l’enquête
Sumer. Le milieu ouvrier est le plus
Jean-Yves Michel, audioprothésiste dans le Gard
« La prévention des risques auditifs dans l’entreprise passe
par l’exemple »
Jean-Yves Michel : « Le plus efficace
pour la prévention des risques auditifs
en entreprise est de former les jeunes. »
touché (secteur agricole, artisanal…).
« Le plus efficace pour la prévention des
risques auditifs en entreprise est de former
les jeunes à construire leur référence avec
des protections auditives. C’est le sens
du travail que l’on mène depuis trois ans
avec le service Promotion de la santé de
la Mutualité Française en allant rencon-
trer les lycéens qui se préparent à des
métiers à risques : métalliers, menuisiers
carrossiers… S’ils apprennent leur métier
en mettant des protections individuelles
qui atténuent les bruits, ils garderont bien
mieux celles que leur futur employeur
mettra à leur disposition car leurs repères
n’auront pas changé », conclut l’audio-
prothésiste mutualiste.■