la FEUILLE VERTE JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – VILLE DE GENÈVE DÉPARTEMENT DES AFFAIRES CULTURELLES – N° 36 – DÉCEMBRE 2005 sommaire BRÈVES ACTUALITÉS Editorial / mot du magistrat – Transversalité Présentations – Le nouveau Jardinier-chef Passage de témoin 3 4 Contributions thématiques Ambiguë, la relation plantes-insectes Nouvelles du rucher du Jardin botanique Lutte biologique aux CJB 5-6 7-9 9 CJB – Jardin Les désinfections, pourquoi? comment? 4e voie CFF Le Carrousel des Fables 10 10 11 Le Conservatoire Préservation et conservation à la bibliothèque 12-13 L’herbier de Johannes Hedwig et son catalogue de types 14-16 Rétrospective Le XVIIe congrès international de botanique Rétrospective photographique annuelle Rencontre annuelle de l’AJCBS 17 18-19 20 21-22 23 Education Formation continue pour les enseignants aux CJB Nouveaux projets pédagogiques «l’Art et les enfants» 24-25 25 Partenaires La Flore de Suisse en ligne (CRSF) Le billet du président de l’AAJB Rapports amicaux ou masos entre asticots et végétaux Les Fermes de l’Arche (PSR) 26 27 27 28 Coopération Nouvelles du Jardin Ethnobotanique à Dakar Projet EPY au Paraguay impressum Brèves Plus précisément à Dakar, dans le Parc de Hann où nous avons créé un Centre d’éducation à l’environnement. Voici quelques nouvelles de notre cheffe de projet sur place, Altiné Traoré ous avons un petit problème dans le parc. Suite aux pluies diluviennes de la semaine passée, la mare a débordé. Le centre et une partie du jardin botanique sont sous l’eau. Une toute petite quantité d’eau est entrée dans les locaux. Pas de dégâts. Je n’ai pas pu accéder au bâtiment. C’est ce matin que j’ai demandé à ce qu’on me sorte la machine pour que je puisse travailler sur les rapports. Je l’ai déposée à la direction du parc mais ces derniers ont des problèmes d’électricité. C’est terrible mais au Sénégal, rien ne fonctionne pendant l’hiver. Cette année, c’est pire parce qu’on a voulu tester les pluies artificielles (un des fameux projets du chef de l’Etat) et le résultat c’est une inondation dans tout le pays. Nos Nous avons une cité derrière le parc, c’est cette cité qui a été envahie par l’eau et les sapeurs pompiers, en pompant ont tourné les tuyaux vers le mur du parc. ce dernier s’est effondré et l’eau s’est dirigée vers la mare et cette dernière a débordé. La Direction des EF est en train d’évacuer l’eau mais malheureusement nous sommes en période hivernale et chaque fois qu’on évacue une partie (trois moto-pompes ont été installées), il pleut le soir ou le lendemain et la situation redevient comme avant. Nous espérons que la situation sera réglée sous peu. (Courriel du 5 septembre 2005) EXPOSITIONS circulent… Pour la première fois, les CJB produisent une exposition qui voyage Programme 2006 Expositions et animation en 2006 A vos agendas! Des INONDATIONS aussi en… AFRIQUE es «Envahisseurs!», car c’est de cette exposition qu’il s’agit, circulent depuis cet été. L’exposition co-produite avec le Musée du Léman est présentée en version bilingue dans l’Espace nature du Bois de Finges (L’Ermitage), en Valais près de Sierre, depuis le mois de juin. Il en va de même pour l’exposition «Ambiguë, la relation plante-insecte» qui, après avoir obtenu un très grand succès l’été dernier dans la serre tempérée du jardin botanique, a pu être présentée en partie dans le cadre des Floralies du 10 au 20 novembre. Une excursion a été dirigée dans ce cadre fin août, par Daniel Jeanmonod, commissaire genevois de l’exposition, sous le titre : «Les pestes: les plantes envahissantes en Valais». Une autre grande voyageuse est l’exposition «Cap au Sud», ou plutôt une partie de celle-ci, qui sera présentée dès le printemps 2006, dans une version espagnole, au Jardin botanique d’Asuncion au Paraguay. un CONCERT classique Donné dans le cadre de l’exposition «Ambiguë,la relation plante-insecte» 29 30 2 & 31 Rédacteur responsable D. Roguet Rédacteurs P. von Auw; B. Bäumler; C. Bavarel; F. Bieri; P. Boillat; A. Breda; P. Clerc; D. Gautier; G. Gonzales; C. Lambelet; P.-A. Loizeau; P. Martignano; B. Messerli; P. Mugny; J. Parra; A. Pin; M.-J. Price; D. Roguet; R. Spichiger; F. Stauffer; M. Stitelmann; A. Traoré; R. Tripod Photographies B. Renaud; D. Roguet Conception graphique M. Berthod – G. Schilling Impression Imprimerie Nationale, Genève Le journal des Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève paraît une fois l’an. © 2004 Conservatoire et Jardin botaniques, Genève. Toute reproduction intégrale ou partielle des textes ou des illustrations de cette édition est strictement interdite sans accord préalable auprès des CJB. es nuisances sonores rendant difficile la pratique de la musique classique dans le cadre des Conservatoire et Jardin botaniques, c’est à une grande première que nous avons assisté le 18 septembre dernier lors de notre exposition estivale en collaboration avec le Conservatoire de Musique. Un concert était en effet programmé dans le cadre des butinages proposés lors de l’exposition et dans la grande salle de la Place-neuve : le trio Desarzens-Ehinger-Fuchs (violoncelle, clarinette, piano), avec au programme: Brahms, Tajcevic... et une improvisation sur le thème «Ambiguë, la relation plante-insecte». Cette décentralisation de la manifestation fut une réussite, comme les autres proposées dans le cadre de notre exposition, et ne demande qu’à être renouvelée. FLORA ALPINA primé e 19 novembre 2005, l’ouvrage Flora alpina a fait l’objet d’une distinction spéciale lors de la XXIIIe édition du Prix Gambrinus «Giuseppe Mazzotti» pour la littérature de montagne, d’exploration et de sciences naturelles. Une cérémonie a eu lieu dans le Parc Gambrinus de San Polo di Piave à Trévise. Le jury a relevé que Flora alpina est un «livre complexe et rigoureux, qui comble une lacune importante à propos des connaissances sur le patrimoine végétal alpin, un véritable catalogue officiel, utile au botaniste professionnel comme à l’amateur». Cette distinction récompense les efforts des Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève sur une décennie pour élaborer Flora alpina (voir aussi La Feuille verte 35: 11-16. 2004). De juin à septembre derniers, les Conservatoire et Jardin botaniques ont proposé une exposition au titre en forme de question: «Ambiguë, la relation plante-insecte» e sujet, à mi-chemin entre les mondes animal et végétal, pouvait également être ressenti comme le signe de la transversalité qui caractérise l’exposition et toutes ses déclinaisons. En effet, autour de ce projet, le public a également pu apprécier des expositions satellites, dont l’«Herbier Humerose» – des photographies géantes accrochées dans l’Allée des platanes. La visite se poursuivait avec «Concordances», une série de photographies présentant en comparaison des photos prise au microscope électronique à balayage représentant d’une part une section d’animal et un détail de végétal d’autre part. Une troisième exposition, montrant le foisonnement des insectes dans la bande dessinée, reflétait également la collaboration entre le CJB, le Muséum d’histoire naturelle et les Bibliothèques municipales. Plus loin encore, c’est l’ensemble des institutions culturelles genevoises qui ont collaboré autour du thème du monde des insectes, mais en fonction de leur patrimoine ou de leurs compétences propres : aux Bibliothèques municipales ou à la «Fureur de lire», avec des ouvrages ou des spectacles sur le même thème, au musée de l’Ariana, avec un «parcours-découverte» de céramiques représentant des insectes, au Musée d’art et d’histoire, avec des entretiens proposés sur le thème de la protection du patrimoine contre les insectes nuisibles, sans parler d’Insectissimo, la grande exposition proposée par le Musée d’histoire naturelle sur ce thème dès octobre, à l’occasion du centième anniversaire de la Société Genevoise d’entomologie. Dans le cadre de tels projets interinstitutionnels, la transversalité représente une véritable valeur ajoutée. En plus de bénéfices évidents en matières didactique et pédagogique – avec des activités programmées de manière concertée –, le fait que les diverses institutions participant au projet fassent référence les unes aux autres permettent de démultiplier les occasions d’informer les publics sur les expositions. Au plan médiatique, cette convergence thématique et cette multiplication des points de vue permet d’avoir un impact plus important avec une communication commune particulièrement efficace suscitant l’intérêt au-delà des spécialisations dans lesquelles certains journalistes sont quelquefois cantonnés (ex: art contemporain, sciences naturelles, jardinage, etc.). Sans mentionner, au plan interne – et à plus long terme – que le succès de tels projets permettra d’encourager dans le futur d’autres événements de même envergure. Editorial Transversalité P. Mugny conseiller administratif en charge du Département des affaires culturelles de la Ville de Genève américaines (Asuncion, Sao Paulo, La Paz, Joao Pessoa) avec pour principes de base la valorisation de la biodiversité naturelle et de la diversité culturelle qui lui est liée. Cette volonté de partenariat culturel permet aux Conservatoire et Jardin botaniques, musée vivant de la cité, de travailler depuis presque dix ans sur différents projets de coopération liés au développement durable. Basé sur la valeur patrimoniale de la transmission des savoirs (botanique appliquée et ethnobotanique), ces microprojets utilisent l’éducation environnementale comme vecteur privilégié. Ils sont financés, en grande partie et sans intermédiaires, par le Fonds de coopération de la Ville de Genève. On le voit, le principe de transversalité – mis à profit par le biais des expositions thématiques ou d’autres projets pédagogiques au plan international, est particulièrement fructueux. Gageons que les Conservatoire et Jardin botaniques continueront sur cette voie dans les années qui viennent. Plus globalement, la transversalité, c’est aussi, d’une certaine manière, l’abolition des frontières. Des accords de collaboration culturelle ont par exemple été signés avec des villes africaines (Dakar, Ouagadougou) et latino- Marié, deux enfants Alexandre Breda, nouveau jardinier-chef. Extrait d’une biographie près un cursus scolaire quelque peu en dents de scie, Alexandre se tourne vers l’Ecole d’Horticulture de Lullier où il obtient son diplôme d’horticulteur paysagiste. Pendant ses loisirs, il bricole des nichoirs à chouette, se bat pour la protection des orchidées sauvages du parc... Mais il a pris goût aux études, à tel point qu’il décide de les poursuivre à l’Ecole d’Ingénieurs de Lullier, d’où il ressortira son diplôme d’ingénieur en gestion de la nature en main. Il créé ensuite sa propre entreprise avec deux collègues. Membre du conseil d’administration, il est également technicien/chef d’équipe dans le secteur «mise en œuvre de projets environnementaux et paysagés». A ce poste il gère les devis et les soumissions, s’occupant également de toute la gestion administrative et financière de l’entreprise. Alexandre est ensuite engagé comme technicien dans le «Secteur Vert» chez Boccard Parcs et Jardins SA, tout en restant au conseil d’administration de son entreprise. Il a alors l’occasion de démontrer ses aptitudes à mener ses équipes de travail. Une place de technicien en gestion des milieux naturels est proposée à Alexandre à l’Etat de Genève au sein du DIAE - Service des Forêt de la Protection de la Nature et du Paysage. Il va pouvoir se donner à fond pour la conservation de la nature à Genève. Ce poste va rapidement évoluer et son rôle d’adjoint au Conservateur de la Nature sera vite reconnu. Pour ses vacances, la petite famille Breda se déplace souvent en Italie, le plus près possible du parc national des Abruzzes afin de pouvoir y observer... les loups et les plantes endémiques, bien sûr. A part cela, la voile, c’est la grande détente sur le lac, et le vélo. LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N° 3 PASSAGE de témoin Le 30 septembre 2005, Raymond Tripod, jardinier chef des Conservatoire et Jardin botaniques partira à la retraite après 38 ans passés au service de la Ville de Genève ils d’un berger-fromager, Raymond Tripod a vécu son jeune âge et son adolescence dans le milieu rural. En campagne vaudoise, dans les années cinquante, des enfants en dessous de 7 ans pouvaient être libérés temporairement d’une présence en classe pour suivre les parents durant les transhumances aux alpages. Ainsi, sous le contrôle de l’inspectorat des écoles et sous l’autorité parentale, on apprenait à lire, écrire et compter sur un coin de la table du chalet. En dehors des devoirs scolaires et des tâches journalières auxquelles ils n’échappaient pas, les bambins avaient loisir de gambader dans les pâturages, contexte très favorable à l’éveil à la nature. Sans doute, cette période a été décisive pour le choix du métier que Raymond entreprendrait plus tard. Là-haut, parmi les troupeaux et les grandes gentianes, prélevant quelques pattes de chat, campanules, benoîtes ou potentilles, Raymond se souvient avoir jardiné d’éphémères plates-bandes ou ronds de cailloux garnis de joubarbes. Au printemps 1961, il est admis à l’Ecole d’horticulture de Châtelaine. Au terme de trois ans de formation, désirant se perfectionner, il ira travailler au Jardin botanique de BerlinDahlem. Cette année de formation complémentaire dans le plus grand jardin botanique du continent va lui procurer un excellent bagage qui sera à l’origine d’un réseau professionnel aussi dense que solide. Après avoir travaillé dans le secteur privé en Suisse et en Allemagne, Raymond revient définitivement en Suisse en 1967, engagé comme jardinier aux CJB par Jean Iff. Il se voit confié l’espace de multiplication des plantes de rocailles et l’entretien de la parcelle de «La Console». En 1969, on le charge de la formation des apprentis et des stagiaires. Très disponible pour transmettre des connaissances, il collabore avec les centres de formation des métiers de la terre et les milieux professionnels. Il donnera des cours de floriculture et de botanique élémentaire. Afin de répondre aux conditions requises pour la formation, il obtient le diplôme de Maître horticulteur-floriculteur en 1977. Sollicité par l’Ecole d’horticulture de Lullier, il y enseignera pendant une vingtaine d’années dans la section d’architecture du paysage de l’Ecole d’ingénieurs. Ses compétences reconnues par tous en font bientôt le bras droit du jardinier chef. Délégué auprès des bureaux d’architectes, il participe à l’élaboration des plans et des dossiers de restauration du jardin (étape bot IV). De 1977 à 1985, une grande partie de son temps est ainsi absorbée par les séances et réunions de chantier. R. Spichiger directeur La bonne connaissance des parcelles et des bâtiments, les expériences acquises durant son parcours professionnel, la conscience précise des exigences pour une bonne gestion du jardin, tout cela le destine naturellement à la succession de Jean Iff. En accord avec ce dernier, il postule à la fonction de jardinier chef. Sur préavis de la direction, le Conseil administratif le nomme à partir du 1er mars 1985. Il va poursuivre le travail de son prédécesseur mais de nouvelles réalisations vont encore élargir l’offre du jardin: la convention de cession du Domaine de Penthes signée avec l’Etat en 1989 permettra d’héberger l’Exposition nationale ProSpecieRara en 1996; sur la Terre de Pregny, c’est l’installation du Jardin des Senteurs et du Toucher, inauguré en 1991; suite à une donation par l’Etat de Genève, c’est la réhabilitation, entre 1994 et 1995, des anciennes serres du Baron Rothschild; restauration entre 1997 et 1998 du Jardin d’hiver, la plus ancienne de nos serres; enfin, l’aménagement paysager dans le cadre des travaux de la construction de la 3e voie CFF Genève – Coppet. Le jardinier chef est un personnage clé ; il assure la marche quotidienne du service, la conduite du personnel du jardin – environ 30% de l’ensemble du personnel –, la gestion des bâtiments, la planification des plantations, expositions, manifestations, etc. En bref, l’image des CJB, leur rayonnement local et international dépendent en grande partie de l’investissement du jardinier chef. Il va sans dire que Raymond Tripod a rempli l’ensemble de ses tâches avec une conscience professionnelle, un dévouement et une compétence scientifique et technique exceptionnelles. Raymond est un des meilleurs connaisseurs de la flore au sein des CJB. Il fait jeu égal avec les meilleurs botanistes du Conservatoire, et Dieu sait si notre institut regorge de spécialistes reconnus mondialement. Son savoir englobe aussi bien les variétés horticoles – en fait, le domaine de compétence des horticulteurs –, que les espèces sauvages. Projetant et dessinant le jardin, organisant l’emploi du temps de chacun, jonglant avec les horaires, les remplacements et autres absences prévisibles ou non, Raymond s’est fait une réputation qui dépasse largement nos frontières. Même le prestigieux Jardin des plantes de Paris nous envie cet organisateur hors pair. Ce sens de l’organisation mis au service de la semaine de travail telle que la conçoit Raymond, à savoir 7 jours sur 7, garantissait un fonctionnement du jardin sans faille. Il est vrai que le stakhanovisme du jardinier chef n’avait pas grand-chose à envier à celui de ses subordonnés directs. Bref, avec de pareils collaborateurs, la direction n’a pas eu de soucis à se faire. En ce qui concerne la transversalité chère au conseiller administratif (voir préface de M. Mugny), Raymond a eu le constant souci d’intégrer le fonctionnement du jardin à celui du conservatoire. Collaborant avec les scientifiques, il a favorisé les initiatives originales consacrées à la conservation d’espèces menacées et à la lutte biologique. Il a également développé les relations avec les autres services «verts» de la Ville et de l’état, ainsi qu’avec les groupements de professionnels et d’amateurs (Société Genevoise d’Horticulture, Arboretum du Vallon de l’Aubonne, Société des Roses, Associations des Jardins botaniques de Suisse, de France, etc). Depuis 1989, Raymond supervise la gestion du Jardin alpin de «La Linnaea» à Bourg-Saint-Pierre. Dans le cadre des programmes de coopération soutenus par la Ville de Genève, Raymond s’est investi dans la création ou la restauration de jardins botaniques au Sénégal et au Mali, et cela parfois au péril de sa santé. Nos partenaires ont été impressionnés par sa puissance de travail et sa modestie, lorsque sous le soleil de Dakar, il prêchait par l’exemple le travail bien fait auprès de jardiniers sénégalais qui n’avaient pas l’habitude de voir les «patrons» travailler la terre à leur côté. Responsable de chefs de culture et d’horticulteurs hautement qualifiés, ses compétences scientifique et d’organisation, reconnues de tous, lui ont permis d’être un patron respecté malgré une gentillesse et une recherche du consensus parfois peu compatibles avec une telle fonction. Si je devais relever un point fort dans ma carrière de directeur, je mentionnerais l’excellente collaboration entre Raymond et moi. Cette estime professionnelle a d’ailleurs débouché sur une amitié réciproque qui a permis de régler bien des problèmes. Je ne peux que souhaiter à nos successeurs une telle harmonie. PAGE N° 4 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES la relation plante-insecte e te mange. Tu me dégustes. Je t’aime. Tu me repousses. Je me défends. Tu te fais belle. Je te fais la cour. Tu me trompes. Tu as une jolie trompe. J’adore ton parfum. Tu me fais peur. Je ne peux me passer de toi. Tu as des couleurs magnifiques. Je m’habille comme toi. Tu me nourris. Je t’attrape. Tu me plais. Je te hais. Tu es le soleil de mes jours. Je suis le bonheur de tes nuits. Je vais chercher mes copines. Je préfère la fidélité. Tu me pollinises. J’agonise. Tu me décoiffes. Je t’ai dans la peau. Tu aides ton prochain. Je le repousse. Tu adores la société. Je vis seul. Tu changes de vie. Je te survis. Tu survoles. Je me cramponne. Je m’intègre. Tu résistes. Tu produis des toxines. J’hallucine. Tu imites. Je mimétise. Tu t’éternises… Et si on se faisait une bonne bouffe…» Allégorie de la vie, la relation plante-insecte est passionnelle. Elle est riche en contradictions et pleine d’ambivalences. Elle transcende notre vision de la nature et lui rend tout son pouvoir de fascination. Cette exposition nous a fait entrer de plein pied dans un monde fusionnel et sensoriel où se mêlaient tour à tour couleurs, parfums et sons. L’attraction, la répulsion, la fascination et le dégoût, autant de sentiments mitigés, souvent incontrôlables qui prévalent lorsque l’on aborde le sujet ou côtoie ces organismes vivants. Nos collègues du Jardin botanique du Parc de la Tête d’Or à Lyon (France) avaient commencé l’analyse de cette rencontre passionnante. Nous l’avons poursuivie en changeant de décor et en y ajoutant notre grain de sel. Un grain de sel qui s’est matérialisé dans notre musée vivant par le travail de recherche d’une équipe de scientifiques, qui s’intéresse à la pollinisation et à la coévolution, ceci à l’exemple d’une famille tropicale, les Gesnériacées. Cette dernière met parfaitement en exergue la magie d’un processus évolutif parallèle. Une serre, ouverte au public et interprétée, est consacrée à cette famille botanique depuis l’hiver 2004. La thématique de l’exposition était par essence transdisciplinaire, puisqu’elle se plaçait à la frontière entre deux mondes, celui des insectes et celui des plantes. Elle nous a poussés à trouver d’autres axes de vision, à Syndrome floral et Gesneriacées La grande diversité des formes florales des plantes tropicales a impressionné les premiers explorateurs. Au XIXe siècle, l’essor de la culture en serre a permis de faire connaître ces beautés exotiques à un large public. Au-delà du côté esthétique de ces fleurs aux couleurs vives ou aux contours étranges, le biologiste souhaite comprendre comment une telle diversité a pu être produite par la nature. Darwin a montré dans sa théorie de l’évolution le rôle de la sélection naturelle qui conduit les organismes vivants à s’adapter non seulement aux conditions du milieu, mais aussi à d’autres organismes. Parmi ces adaptations, l’influence des organismes pollinisateurs sur les plantes est reconnue comme ayant contribué à la diversification des plantes à fleurs. Dans les forêts denses et luxuriantes des tropiques, les rapports fleurs/pollinisateurs sont particulièrement variés. Des familles telles que celles des Orchidées, Bromeliacées, Gesneriacées, des hyménoptères (groupe des abeilles), des papillons de jour et de nuit, des coléoptères, des oiseaux nectarivores et même certaines chauves-souris jouent un grand rôle dans la reproduction. Cependant, dans leur grande majorité, les rapports sont relativement peu spécifiques: une espèce de plante ne dépend pas que d’une espèce de pollinisateur, mais est visitée par plusieurs organismes, dont certains sont des pollinisateurs effectifs. On observe toutefois chez des fleurs appartenant à différentes familles une convergence des caractères morphologiques correspondant à une adaptation à des classes de pollinisateurs. Ainsi, les corolles tubulaires et étroites, de couleur rouge, produisant du nectar et sans odeur sont préférées par les colibris, tandis que les corolles très longues, de couleur crème et parfumées attirent des papillons de nuit. Ces caractères floraux constituent des syndromes, c’est à dire un ensemble de caractéristiques de forme, couleur, odeur ou sécrétion de substances telles que nectar ou résine, qui correspond à un type de pollinisateur (tiré de A. Chautems, Feuille verte, 1999). D. Roguet conservateur Contributions thématiques AMBIGUË, susciter des collaborations, à tisser des liens et à construire des passerelles avec d’autres acteurs culturels à Genève, que ce soit dans les musées ou auprès des Bibliothèques municipales et du Conservatoire de musique. Il en a résulté un programme complet, ludique et éducatif qui a tissé sa toile (attention les araignées se sont pas des insectes!) pendant tout l’été 2005, du 7 juin au 25 septembre, dans et autour de notre serre tempérée, proche de la route de Lausanne. Cadre sublime pour présenter différentes facettes de la relation ambiguë tissée entre insectes et plantes, la serre a abrité tout un petit monde vivant d’insectes (sauterelles, coléoptères, papillons, phasmes, abeilles) et de plantes (orchidées, insectivores, mirmécophiles, mellifères) spectaculaires. Une médiation a été assurée en continu grâce aux «jobs d’été de la ville» pendant les mois de juillet et août. Des ateliers d’été, montés en collaboration avec les autres musées genevois pour le jeune public, ont été proposés au début juillet. Une bonne façon de commencer ses vacances, de cultiver son sens de l’observation et de l’école «butinière»! Des expositions artistiques, les «satellites», ont accompagné la présentation centrale en offrant des regards différents sur ce monde fascinant : photographies géantes de l’«Herbier Humerose» accrochées dans l’Allée des platanes; «Concordances», des microstructures végétales et entomologiques photographiées au microscope électronique à balayage par Jean Wuest ; cheminement des insectes dans la bande dessinée et sculptures d’insectes géants en fil de fer. Enfin des «butinages» ont complêté cet ensemble, thématique et éclectique tout à la fois. Prolongements des expositions, ils ont accompagné votre été au Jardin botanique, mais également bien au-delà dans différents musées, fêtes et lieux culturels de la République. Musique, porcelaine, «Fureur de lire», spectacles, lectures, conférences et carrousels ont prolongé la découverte par des LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N° 5 moments de transversalité culturelle qui ont ravi nos publics par des événements populaires, décalés, informatifs et ludiques. A l’occasion du 100e anniversaire de la Société entomologique genevoise, les entomologistes du Muséum d’histoire naturelle, ont concocté le plus beau des prolongements à notre manifestation dans le cadre de cette année consacrée à l’insecte: l’exposition Insectissimo. Nous ne pouvons que vous encourager à aller la visiter. Elle est ouverte depuis le 25 octobre et jusqu’en septembre 2006. (Programme complet auprès du Muséum d’histoire naturelle www.ville-ge.ch/mhng dès le mois de septembre). Revenons à nos insectes, ceux qui butinent mais qui se font manger aussi par les «méchantes» plantes carnivores… des collections du Jardin botanique! Sujet de recherche dans les domaines de la co-évolution, de la phylogénie et de la pollinisation, ces insectes sont omniprésents dans la vie des CJB. Pollinisateurs tout d’abord, ils favorisent les croisements, parfois intempestifs et non-souhaités. Ils produisent aussi, indirectement et quasi-miraculeusement, fruits et graines de nombreuses espèces végétales récoltées par notre grainier. Butineurs, ils produisent le miel du jardin botanique et offrent un sujet d’observation et d’études sans fin aux nombreuses classes qui nous rendent une visite éducative. Ravageurs, ils pourraient occasionner des dégâts irréversibles aux collections inestimables de notre bibliothèque et de nos herbiers, si un contrôle et des désinfections drastiques n’étaient pas périodiquement effectués. Destructeurs, ils s’attaquent parfois aux collections vivantes et doivent être combattus, le plus souvent possible avec les moyens de la lutte intégrée, technique utilisant des prédateurs naturels de ces ravageurs. Enfin bio-indicateurs de diversité et de salubrité, leur simple présence donne toute sa dimension d’espace naturel de conservation au Jardin botanique, à deux kilomètres seulement du centre ville. Henri Fabre, éminent entomologiste français, aurait apprécié cette dernière qualité. Il nous prend par la main et nous emmène en balade : «Devisant de choses et d’autres, par un sentier bordé d’hièbles et d’aubépines, où déjà la Cétoine dorée s’enivrait d’amères senteurs sur les corymbes épanouis, on allait voir si le Scarabée sacré avait fait sa première apparition au plateau sablonneux des Angles, et roulait sa pilule de bouse, image du monde pour la vieille Égypte; on allait s’informer si les eaux vives de la base de la colline n’abritaient point, sous leur tapis de lentilles aquatiques, de jeunes Tritons, dont les branchies ressemblent à de menus rameaux de corail; si l’Épinoche, l’élégant petit poisson des ruisselets, avait mis sa cravate de noces, azur et pourpre; si, de son aile aiguë, l’Hirondelle, nouvellement arrivée, effleurait la prairie, pourchassant les Tipules, qui sèment leurs œufs en dansant; si, sur le seuil d’un terrier creusé dans le grès, le Lézard ocellé étalait au soleil sa croupe constellée de taches bleues; si la Mouette rieuse, venue de la mer à la suite des légions de poissons qui remontent le Rhône pour frayer dans les eaux, planait par bandes sur le fleuve en jetant par intervalles son cri pareil à l’éclat de rire d’un maniaque; si… mais tenons-nous en là; pour abréger, disons que, gens simples et naïfs, prenant un vif plaisir à vivre avec les bêtes, nous allions passer une matinée à la fête ineffable du réveil de la vie au printemps.» (Jean Henri Fabre, Souvenirs entomologiques) Cette exposition a rencontré un succès inégalé au Jardin botanique. Beaucoup d’entre-vous ont fait la fête à l’insecte, parfois ravageur, souvent séducteur et pollinisateur, parfois effrayant! Vous les avez découverts sous un jour nouveau, tel un papillon sortant de sa chrysalide. Continuez cette initiation au delà de cette année entomologique, suivez Fabre dans sa balade et laissez-vous surprendre par une pairie, un tableau, une porcelaine ou une note de musique évocatrice de ce monde tour à tour fascinant, étonnant, parfois grouillant et affolant, mais toujours surprenant… Les artistes, et en particulier les écrivains, ont souvent loué l’ambiguïté du monde de l’herbe et des feuillages, à l’exemple d’André Gide: «Les plus beaux sujets de drame nous sont proposés par l’entomologie». C’est l’essence même de cette ambivalence du rapport planteinsecte, qui est souvent à l’image de notre monde! PAGE N° 6 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Contributions thématiques Nouvelles du RUCHER du Jardin botanique M. Stitelmann & F. Bieri Dans les autres colonies, la récolte de nectar se poursuit sans problème. La profusion de fleurs renouvelée chaque jour accentue la croissance des colonies. Et les hausses à miel se remplissent quotidiennement un peu plus. Grâce à cette flore abondante, et à la présence de grands arbres plus que centenaires qui apportent nectar et miellat, je récolte un miel de mille parfums différents dont on ne se lasse jamais. Juin Ruches en bois fabriquées à la menuiserie du Jardin botanique JOURNAL DE L’APICULTEUR 10 et 11 mars 05 Un long hiver laisse enfin la place à deux journées ensoleillées et douces. Aux planches d’envol des quatre ruches du Jardin botanique, les ouvrières s’activent. Pour la première fois de l’année, les abeilles sortent butiner. Les crocus qui jusque-là rentraient la tête sous la neige s’ouvrent enfin, offrant aux abeilles le pollen dont elles ont besoin au sortir de la torpeur hivernale. On peut effectivement voir des abeilles rentrer à la ruche leurs pattes ornées de belles pelotes de pollen, preuve que leurs reines commencent à pondre. Les «anciennes» nées en 2004 vont se dédier à l’élevage de la nouvelle génération dès ces premiers beaux jours. En soupesant une ruche à la fin de l’hiver, je peux estimer s’il reste suffisamment de nourriture. Fin mars Je peux enfin ouvrir les ruches par une température supérieure à 15°C pour la première visite de printemps, et je constate que tout va bien. Le développement des colonies se poursuit sans encombre. Avril La population augmente considérablement, grâce à la floraison intense. Je donne aux colonies des cadres de cire gaufrée à bâtir, et je place les hausses en vue d’une future récolte de miel. Cela m’aide à prévenir l’essaimage qui est pénalisant pour l’apiculteur désireux de faire une récolte de miel. En effet, avec l’essaim, la plupart des butineuses quittent la ruche. Je limite également l’essaimage en élevant des reines sélectionnées pour leur douceur, indispensable dans un lieu public. Leur jeunesse est aussi un atout, car il est préférable de ne pas garder des reines de plus de trois ans d’âge pour avoir des colonies vigoureuses. Mai Malgré ces précautions, le 11 mai, une ruche essaime tout d’un coup. Je récupère tout ce petit monde que j’introduis tout de suite dans une ruche vitrée de démonstration, en vue de l’exposition «Ambiguë». Pour une fois, et pour peupler cette ruche, l’essaim est bienvenu! Au début juin, c’est le moment de la première récolte. Le 15 juin, la floraison de tilleul bat son plein. Tant mieux, cela calme les abeilles qui sont un peu énervées par la période de di-sette passagère qui suit souvent la récolte. Chaque année, une seconde période de miellée me permet de récolter à nouveau vers le 15 août, alors que le moment est venu de retirer les hausses à miel et de commencer à préparer l’hivernage. UN PEU D’HISTOIRE C’est en 1998 que le rucher du Jardin botanique y a trouvé sa place, tout près du jardin des plantes mellifères, au sein des Terrasses La colonie au fil de l’année ne colonie d’abeilles se constitue d’une reine (femelle fertile, mère de tous les individus de la colonie), de milliers d’abeilles (encore appelées ouvrières, ce sont des femelles non fertiles; elles exercent de nombreux métiers au sein de la colonie), et de quelques centaines de faux-bourdons (mâles). Une ruche est une maison pour abeilles; chaque ruche abrite une seule colonie. Le cycle biologique de la colonie d’abeilles est directement lié à celui de la végétation. La colonie hiverne de décembre à février environ, période durant laquelle la population et l’activité est réduite (normalement il n’y a pas de ponte si la température est assez basse). La floraison massive printanière leur fournit pollen et nectar durant plusieurs semaines. Ces ressources induisent une ponte importante de la part de la reine, le nombre d’abeilles et de faux-bourdons augmente de jour en jour. Enfin, la colonie d’abeilles se reproduit en essaimant. Ensuite, la population se stabilise, les floraisons mellifères sont moins abondantes; par contre c’est la période des pucerons et de la production de miellat. Enfin, les ressources diminuent drastiquement, la ponte également. Par conséquent, la population diminue. Quand la température baisse pour l’hiver, la reine cesse de pondre. La colonie hiverne en grappe dans une ruche ou une cavité. Les abeilles d’automne doivent survivre pour élever les jeunes au printemps. Les colonies consomment beaucoup plus de réserves au premier printemps que durant tout l’hiver, parce que c’est à ce moment-là que de nombreuses jeunes abeilles sont élevées, alors qu’il y a encore peu de butineuses. A la fin de l’hiver, l’apiculteur doit estimer les réserves pour s’assurer qu’elles suffiront jusqu’à la nouvelle floraison. LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N° 7 des Officinales et Utilitaires. La situation du rucher favorise l’observation par les visiteurs de ce qui s’y passe tout au long de l’année, discrètement abrité des grosses chaleurs d’été par un magnifique Sophora du Japon ou «pagode japonaise» (Sophora japonica). Cet arbre ne sort ses feuilles que tardivement, permettant aux ruches de se réchauffer aux rayons de soleil printaniers. De plus, il offre aux abeilles une floraison abondante dès juillet. Pour contribuer à la sauvegarde de «l’abeille suisse du pays» (Apis mellifera nigra), avec l’antenne romande de Pro Specie Rara, une première colonie a alors été établie, provenant du rucher d’un éleveur spécialisé de Suisse allemande. Ce type d’abeilles, réputé pour sa grande facilité d’adaptation, a pourtant mal réagi aux conditions genevoises. En conséquence, notre première colonie a essaimé rapidement. Frédéric Bieri, jardinier et apiculteur, introduisit Races d’abeilles En plus de notre abeille à miel (Apis mellifera), il n’existe que 6 autres espèces appartenant au genre Apis. Elle est représentée aujourd’hui de par le monde par de très nombreuses races, qui se distinguent entre elles par la coloration, de petites différences morphologiques et des différences de comportement. On peut noter qu’elle était absente du continent américain jusqu’à son introduction par les Européens. A. mellifera mellifera est une race qui se rencontre à l’ouest et au nord de l’Europe. Elle est nommée parfois «abeille noire» (Apis mellifera nigra), et un type particulier appelé «race du pays» est rencontré principalement en Suisse centrale. Apis mellifera carnica (abeille grise ou carniolienne) se rencontre habituellement au sud-est de la zone alpine, mais elle s’est implantée chez nous depuis très longtemps. Elle occupe le nord, l’est et l’ouest de la Suisse. (Source: «L’abeille et l’apiculture en Suisse», Cahiers du MHN No. 4, éditions de la Girafe, CH-2300 La Chaux-de-Fonds) Récolte de miel durant l’Atelier vert sur le rucher alors des reines de race carniolienne (Apis mellifera carnica) de son propre élevage à la tête des essaims. Cette race d’abeilles a fait ses preuves depuis de nombreuses années en Suisse, tant concernant sa docilité (peu d’essaimage) que sa douceur (proximité au public). Si Frédéric Bieri avait choisi de maintenir l’abeille du pays, il aurait dû chaque année acquérir des reines, en raison de l’essaimage fréquent des colonies. Aujourd’hui, ce sont les abeilles de quatre colonies de carnioliennes qui butinent dans tous les secteurs du Jardin botanique et ses alentours. REPRODUCTION A ce sujet, il convient de donner quelques détails sur le phénomène de l’essaimage. Les colonies d’abeilles se reproduisent en divisant leur population, c’est-à-dire en essaimant. Si la reine est bien la mère de tous les individus d’une ruche, on peut dire, en quelque sorte, que la colonie est la mère de l’essaim. Une partie des ouvrières et des faux-bourdons quitte la ruche avec la reine, laissant à l’autre partie qui demeure le soin d’élever une nouvelle reine à partir d’un œuf fraîchement pondu. Qui a déjà vu un essaim d’abeilles en plein vol se souvient certainement tant du son vrombissant que du nuage de points tournoyant. Et l’étonnement de découvrir un peu plus tard une grappe d’abeilles (5 à 20000 individus) pendue à une branche d’arbre restera dans la mémoire de tous les apprentis apiculteurs. A Genève, c’est en mai que les colonies essaiment, alors que les floraisons sont intenses depuis déjà deux mois. Encore une question à éclaircir: pourquoi l’apiculteur aurait-il dû, pour maintenir l’abeille du pays, acquérir chaque année des reines? Parce que les jeunes reines d’abeille sont fécondées en vol, tout de suite après la période de l’essaimage. Les mâles qui les fécondent ne sont pas forcément de la même race qu’elles, parce que les faux-bourdons et les reines en provenance de plusieurs kilomètres à la ronde se «fréquentent» dans certains espaces aériens privilégiés, aux conditions environnementales particulières. Alors leur progéniture aura donc les caractéristiques des deux, souvent un comportement peu adéquat à une apiculture moderne. Pour maintenir une race, il faut contrôler la fécondation des reines, ce qui est difficile. Toutefois, les apiculteurs ont trouvé des moyens leur permettant d’obtenir de faire féconder les reines par des mâles sélectionnés. Ils élèvent des reines à partir d’œufs de provenance connue et sélectionnée, qu’ils mènent à des stations de fécondation isolées géographiquement, où sont élevés des faux-bourdons également sélectionnés. Un autre moyen plus utilisé pour la recherche et la sélection que dans la pratique, est l’insémination artificielle. AUX VISITEURS Si d’aventure vous avez la chance de passer près du rucher au moment où l’apiculteur, avec son voile blanc, lance discrètement de son enfumoir quelques volutes de fumée parfumée, vous en oublierez probablement de vous hâter vers vos occupations. Le charme de l’abeille opère ainsi, dans une ambiance calme, bourdonnante, parfumée. C’est l’occasion rêvée d’assister aux travaux saisonniers d’entretien de nos colonies. Celles-ci inaugurent ce printemps de nouveaux logis! Le menuisier des CJB, Jean-Pierre Morier, a fabriqué de toutes pièces quatre ruches, en bois provenant exclusivement du Jardin botanique. De type Dadant, les mesures standard sont respectées. Leurs chapiteaux sont entièrement recouverts de tavillons en pin, au nombre de 425 par bâtisse. Un beau travail pour ce petit monde! L’observation de l’activité d’une ruche au trou d’envol est le meilleur moyen de savoir ce qu’il s’y passe. Le va-et-vient des butineuses, légères au décollage, plus lourdes au retour, les pattes parfois ornées de pelotes de pollen… Les butineuses empruntent presque toutes le même chemin entre les branches du Sophora; s’aventurer dans leur champ de vol, c’est risquer une collision accidentelle, qui peut s’avérer «piquante»! Parfois, à la belle saison (avril à juillet), vous aurez la chance d’observer ce que l’on appelle «le feu d’artifice». L’activité est momentanément plus intense devant une des ruches. De nombreuses abeilles volent face au trou d’envol, avec un bruissement assez fort. Elles ne s’éloignent guère, alors que les butineuses ne perdent pas de temps et vont droit aux sources de nectar. Ce sont les jeunes abeilles qui ont terminé leur période de travail domestique, et se préparent à devenir butineuses à leur tour. Pour cela, il leur faut tout d’abord apprendre à reconnaître leur ruche et sa situation dans l’espace. Ce vol si particulier est le signe d’une colonie à la population vigoureuse et en croissance. Vous pourrez aussi observer les mésanges, postées sur la barrière du rucher, et qui plongent régulièrement au pied des ruches. Elles ramassent les abeilles mortes. D’autres prédateurs nous rappellent l’équilibre de la nature, comme les grenouilles dans les Rocailles, guettant les butineuses au pied des fleurs, ou encore les frelons qui les happent en plein vol. EDUCATION Les abeilles sont très aimées de tous (bien que seuls les «piqués» apprécient leur contact rapproché). Au-delà du miel de nos tartines et de nos tisanes, ces insectes ont une valeur symbolique et spirituelle qui fait partie de notre Fabrication d’une bougie durant l’Atelier vert PAGE N° 8 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES aux CJB C. Bavarel, jardinier aux Serres La lutte biologique en collection botanique est pratiquée au Jardin Botanique depuis l’an 2000 héritage culturel. Leur rôle économique, essentiel, de pollinisateurs d’un grand nombre de plantes cultivées est bien connu. Il ne fait certainement qu’accroître l’intérêt qu’on leur porte de façon générale. Sans abeilles, plus de nourriture à moyen terme! Avec une foule d’autres agents pollinisateurs, nous leur devons aussi la richesse de la diversité des plantes à fleurs. D’ailleurs, c’est l’un des volets abordés dans le cadre de l’exposition «Ambiguë, la relation plante – insecte» présentée à la Serre Tempérée au cours de l’été 2005, dans laquelle une ruche transparente a été présentée au public. Ainsi, on ne peut parler d’abeilles sans parler de plantes. Notre rucher est une vitrine permanente qui rappelle ce lien très ancien dans l’évolution du vivant. Les visiteurs montrent un grand intérêt, notamment lorsque que l’apiculteur vient, devant eux, prendre soin de ses protégées. Les opportunités d’échanger avec lui et d’en savoir un peu plus sont variées: visite guidée tous publics, Ateliers verts pour enfants, médiation dans le cadre de projets d’écoles, formation d’enseignants, et bien sûr, les rencontres au bord du chemin avec l’apiculteur. Les enfants apprennent comment s’approcher du rucher pour l’observer sans risque. Ils ont moins peur de se faire piquer par la suite. Ils les aimeront encore un peu plus, ayant observé parmi les fleurs des Terrasses des Officinales comment les abeilles dansent avec les fleurs une danse d’amour et d’entraide. Certains auront appris, à l’issue d’un atelier, à aimer le miel, car ils auront humé et porté le rayon encore chaud de la chaleur animale de la ruche. Les abeilles feront désormais partie de leur vécu, et ils leur prêteront une attention particulière quand ils les croiseront sur leur chemin. Si vous souhaitez des informations sur l’apiculture en Suisse, voici quelques suggestions de sites Internet: Société d’ Apiculture Romande (SAR): www.abeilles.ch Société Genevoise d’Apiculture: www.abeilles-de-geneve.com Section apicole de la Station fédérale de recherche: http://www.apis.admin.ch Apiculture biologique: www.apibio.ch a lutte biologique en collection botanique est pratiquée au Jardin Botanique depuis l’an 2000. A l’intérieur des serres, nous avons profité de l’arrivée d’une collection de plantes en provenance de la nature, et de même origine géographique, pour mettre en place une protection phytosanitaire ne recourant pas aux produit de synthèse. En effet, les méthodes de luttes chimiques ne nous donnaient plus de résultats satisfaisants vis-à-vis de la mouche blanche et d’autres ravageurs. Nous étions enfermés dans une spirale de traitement, ce qui nous a poussé vers de nouvelles méthodes: la lutte biologique. Celle-ci comporte deux méthodes principales: l’introduction d’auxiliaires (insectes, acariens ou autre entom ophages, parasites, etc.), et la lutte au moyen de produits issus de la nature (par ex. extrait de fleur de pyrèthre). Les bons résultats obtenus sur cette culture nous ont poussé à étendre l’expérience aux autres collections sous verres. Ces collections avaient été cultivées de manière conventionnelle. Nous avons rencontré des difficultés dans l’introduction des auxiliaires en raison vraisemblablement de la forte rémanence des produits de synthèse utilisés précédemment. Dans une collection botanique, en raison du faible nombre de plantes par taxon (entre deux et trois, contre des milliers en cultures commerciales), nous ne pouvons faire des expériences de cultures statistiquement valable et de ce fait, le jardinier est appelé à utiliser son intuition (c’est-à-dire, la somme de ses expériences et de ses savoirs kinesthésiques). Il travaille par essai-erreur ainsi qu’avec un faisceau d’informations qu’il peut réunir sur la plante à cultiver ou sur des plantes de même famille. Ce mode de travail empirique est adapté à la situation mais complique souvent la communication avec les milieux scientifiques. L’approche de la lutte biologique que nous avons eu au Jardin Botanique participe aux mêmes démarches. SEUIL DE TOLÉRANCE En culture commerciale, il est relativement aisé d’établir des seuils de tolérance (moment où l’intervention avec un produit biologique de type pyréthrine devient indispensable), mais en collection botanique, du fait du faible nombre de plantes par taxon, il est extrêmement difficile, voire impossible d’établir un seuil de tolérance. Seul, le savoir des jardiniers et la confiance dans les techniques de la lutte biologique rentrent en ligne de compte. De plus, les plantes de collection, sont souvent fragiles sous serre ou ex-situ car, il est extrêmement difficile de reproduire exactement de manière artificiel leur milieu naturel (par exemple, les plantes de sous-bois de milieu tropical humide et les plantes de canopée de milieu tropical humide dans la même serre). Contributions thématiques Lutte biologique PERMANENCE DES CULTURES La pérennité des cultures nous aide dans les collections botaniques. En effet, dans les cultures commerciales, il y a une interruption de la culture qui créé un vide sanitaire utile en lutte chimique. En lutte biologique, la présence permanente de plantes dans nos serres permet de conserver les populations d’auxiliaires. Celles-ci hivernent dans nos cultures et seul un lâcher d’appoint à l’automne et au printemps sont nécessaires. Nous avons donc une évolution plus au moins parallèle des populations de ravageurs et d’auxiliaires. Par exemple, lorsque la population de ravageurs augmente, la population d’auxiliaires trouvant plus de nourriture se met à croître aussi, jusqu’à exercer une pression suffisante sur la population de ravageurs qui régresse et la population d’auxiliaires ne trouvant plus suffisamment de nourriture régresse aussi. CONTRÔLE DES COÛTS Les deux ou trois premières années, l’explosion des coûts due à la lutte biologique est manifeste; par la suite lorsque les équilibres de population sont atteints, nous arrivons à une similitude, voire une diminution de coût en comparaison avec la lutte chimique. CONCLUSION En collection botanique, les plantes sont spécialement fragilisées. Leurs substrats de culture ne sont jamais parfaitement adaptés et le climat non exactement reproduit. Les plantes sont spécialement sensibles aux attaques des ravageurs. De plus, la rareté des plantes créé une inquiétude chez le cultivateur. La lutte biologique demande au jardinier de poursuivre sa formation, de lire et de se documenter en permanence sur les nouvelles découvertes en lutte biologique. Dans les cultures, le jardinier se doit d’observer les ravageurs et auxiliaires lors de contrôles réguliers. Il doit aussi effectuer des prélèvements afin de les observer à la loupe binoculaire. La lutte biologique lui demande de s’interroger sur ses pratiques culturales et leurs influences sur l’état phytosanitaires des plantes. Il doit enfin accepter la présence de quelques ravageurs sur ses plantes. C’est plus d’une révolution culturelle qu’il s’agit que d’un simple changement de technique. Pour information, voici la liste des auxiliaires lâchés dans nos cultures Adalia bipunctata; Amblyseius cucumeris; Aphelinus abdominalis ; Aphidius ervi ; Aphidius colemani ; Aphidoletes aphidimyza; Cryptolaemus montrouzieri; Macrolophus caliginosus; Phytoseiulus persimilis. LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N° 9 Les DÉSINFECTIONS, pourquoi? comment? P. von Auw, jardinier La désinfection n’est pas la stérilisation comme on l’apprenait il y a une trentaine d’années. La stérilisation détruit les ferments de toute nature qui se trouvent dans le sol, alors que la désinfection est la purge de ce qui infecte ce sol. Assainir ce dernier afin de le purifier ésinfecter permet donc de laisser en vie certaines substances utiles pour les plantes, de ne pas les détruire, comme l’humus et certaines bactéries utiles à la végétation et de maintenir une proportion d’engrais. Il s’agit en fait de nettoyer les quinze premiers centimètres du sol en éliminant les adventices, les bactéries, les champignons, les insectes et les larves de ces derniers. Les plantes introduites par la suite dans un terrain travaillé et propre ne sont pas concurrencées. Leur reprise est ainsi largement simplifiées et le plus souvent assurée. Cette désinfection peut être effectuée par trois moyens différents: 1. le premier, que nous employons beaucoup, consiste à élever la température du sol, ou du mélange terreux à l’aide de vapeur d’eau. Au moyen d’une chaudière, munie d’un brûleur à mazout, l’eau est chauffée jusqu’à la vapori- sation. La vapeur surchauffée à cent dix degrés (afin de maintenir l’état gazeux, la surchauffe est obligatoire) est appliquée sur notre terrain à nettoyer. Le terrain ameubli auparavant est recouvert d’une bâche, qui nous permet d’élever la température de notre surface jusqu’à quatrevingt cinq à nonante degrés. Cette opération procure un nettoyage sur douze à quinze centimètres d’épaisseur et pour une durée de trois mois environ. Elle a certes l’inconvénient d’employer des moyens techniques importants comme le courant électrique et une citerne contenant le mazout, (ou un récipient contenant du gaz, selon le modèle de brûleur). Il faut aussi une alimentation en eau de la chaudière, des tuyaux pour l’alimentation en eau et le transport de la vapeur, des cloches ou des bâches et un diffuseur pour répartir notre vapeur. Des précautions sont à prendre également pour la chaleur, aussi bien pour l’usager que pour l’environnement. Un tuyau très chaud traversant une pelouse laisse bien évidemment une trace jaune. Le dégagement de vapeur dans un arbre également. Le grand avantage de cette méthode reste dans le fait que dès que le refroidissement est terminé, nous avons la possibilité de planter si besoin. minimum, est suivi du «test du cresson». Si le cresson germe après trois jours, on peut en principe remettre en culture. Une quatrième semaine est ainsi à prévoir. Cette technique est très peu utilisée au Jardin botanique. 2. la seconde méthode utilisée pour la désinfection des mélanges uniquement et des petites quantités est le passage de la terre entre des plaques chauffantes électriques. Si le même résultat est obtenu, cela prend beaucoup de temps et la quantité d’énergie absorbée reste importante, même en opérant la nuit où le coût énergétique est plus favorable. 3. troisième possibilité: le recours à la chimie. Après le travail de surface on répartit sur celle-ci un granulé chimique, que l’on introduit dans le sol par binage ou crochetage, puis l’on arrose et recouvre le sol d’un film plastique. Notre granulé solide se transforme en gaz toxique qui agit par asphyxie des éléments à détruire. Les inconnues sont malheureusement nombreuses concernant cette méthode. La régularité de l’épandage de la matière première, celle de l’arrosage ou la température, autant de la toxicité de tel produits pour l’usager et pour la faune sont mal connues. Le temps d’action, en général de trois semaines Désinfection à la vapeur e 4 voie CFF Une voie de chemin de fer dans un Jardin botanique: un projet unique au monde! P. Clerc & C. Lambelet, conservateurs e jeudi 16 juin 2005 les Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève ont inauguré la 4e voie CFF située derrière la bibliothèque, le long de la voie de chemin de fer Genève-Lausanne. Cette inauguration a marqué l’aboutissement d’un projet dont les détails ont déjà été rapportés dans la Feuille Verte n° 34 en mars 2004. UN NOUVEAU MILIEU DANS LE JARDIN BOTANIQUE C’est tout un milieu qui a été recréé à cet emplacement, non seulement au niveau de sa structure physique et biologique (sable, ballast, gravier, pavés, mur de pierres sèches naturelles), mais également au niveau visuel, anthropologique (rails, butoir, petit wagon, cloche, panneau indicateur, etc.). LES PLANTES RUDÉRALES SONT MENACÉES Introduire une voie de chemin de fer dans un Jardin botanique peut paraître complètement loufoque au premier abord. Sauf si l’on sait que ce milieu particulièrement sec abrite une flore extrêmement intéressante, celle des plantes rudérales, et que cette dernière est sensiblement menacée sur le Plateau suisse. Les plantes rudérales occupent le terrain que l’homme laisse ouvert mais ne cultive pas (bords de chemins, terrains piétinés, terrains vagues, voies de chemin de fer, etc.). Habitant primairement la campagne, elles ont été sacrifiées au dogme de la rentabilité par l’emploi d’herbicides, l’uniformisation des milieux et le bétonnage. Après les plantes aquatiques et de marais, les plantes rudérales sont le type de plantes le plus menacé de Suisse avec plus de 40% de ses espèces sur la Liste Rouge. Il se trouve que les villes avec leur richesse en milieux divers (dont les abords de voies de chemin de fer) sont une excellente zone de repli pour ce type de plantes. Malheureusement, là aussi, elles sont menacées, principalement par la poursuite obsessionnelle d’un ordre parfait, d’une philosophie du «propre en ordre» assimilant l’apparition de ces plantes à l’évidence d’un entretien négligé. Alors, on cimente les joints, on bétonne, on nettoye, on asphalte les chemins, etc. Inauguration de l’espace rudéral UN CONSERVATOIRE DE LA BIODIVERSITÉ Ce nouveau milieu rudéral au sein des CJB se veut: 1. Un endroit d’observation, de découverte et d’émerveillement. Assis sur un petit banc dans une zone pavée colonisée par la végétation, on pourra s’immerger dans ce milieu au son des trains qui défilent quelques mètres plus haut sur la voie de chemin de fer Genève-Lausanne. C’est en entre avril et juin que la diversité des espèces et des coloris est maximale, avec plus de 60 espèces sur une toute petite surface. 2. Une surface de conservation et de protection avec une partie cultivée – on y introduit des espèces menacées du canton qui peuvent vivre ici en toute tranquilité – et une partie ouverte à la colonisation spontanée par les espèces typiques de ce genre de milieu. C’est l’un des endroits les moins «contrôlés» du jardin où presque n’importe quelle «mauvaise herbe» peut venir spontanément et librement s’installer sans risquer de se faire arracher. 3. Une surface éducative dans laquelle on peut montrer, d’une part que les milieux urbains abritent, eux-aussi, de belles fleurs et qu’il est nécessaire de les protéger, et d’autre part qu’un peu de spontanéité et de désordre sont favorables à la biodiversité, illustrant combien les activités humaines sont importantes pour le maintien de cette biodiversité qui nous tient tellement à coeur. PAGE N° 10 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES P. Martignano, Copyrart le Jardin Le CARROUSEL des Fables Plusieurs équipes ont travaillé sur ce projet devenu, au fil du temps, la figure emblématique d’une Association: Copyrart a construction a commencé en 1999. Il est constitué de métal et de bois. Une équipe de travail a dessiné et sculpté de grands animaux mobiles, tout droit sortis des Fables de La Fontaine, qu’il est permis de toucher, caresser, chevaucher. Cette réalisation a permis à un bon nombre de personnes (450) à la recherche d’un emploi, de s’exprimer artistiquement et, pour la plupart d’entre elles, de retrouver une activité professionnelle. Pour améliorer la sécurité, quelques modifications et une adaptation aux normes européennes de sécurité, entrées en vigueur en 2002, ont été effectuées. Chaque année, la population genevoise retrouve le Carrousel des Fables sur une place ou dans un parc de la ville. En 2002, de septembre à novembre, le Carrousel trônait majestueusement sur la place du Rhône pour la plus grande joie des passants et des usagers. Durant l’été 2003, de juillet à octobre, il a été remonté et installé, par les collaborateurs de Copyrart, au Jardin Anglais. D’avril à octobre 2004, dans le cadre du 100e anniversaire des Conservatoire et Jardin botaniques de la ville de Genève, nous avons pu voir tourner les nacelles du manège ; la population genevoise et les enfants en particulier ont retrouvé avec bonheur cette magnifique construction. Pendant cette période, les animaux du manège ont accueilli 22 686 personnes. Par ailleurs, des classes enfantines sont venues tourner sur les animaux pendant leurs courses d’école. L’accueil des enfants était organisé par 12 personnes provenant du RMCAS, grâce à l’excellente collaboration dont nous disposons avec leurs conseillers ou conseillères. Durant l’automne et suite au bilan positif de notre collaboration avec le Jardin botanique, nous avons pu signer une convention avec la ville de Genève afin que le carrousel des Fables retrouve cet endroit idyllique dans les années à venir. Nous souhaitons remercier ici la direction du Jardin botanique et l’appui qu’elle nous a fourni tout au long de l’année. En 2005, il a retrouvé la pelouse du Jardin botanique. D’avril à juin 2005, nous avons ouvert 27 demi-journées. 5887 enfants et adultes ont tourné sur les animaux. Beaucoup d’écoles du canton de Genève sont venues au Jardin botanique pour effectuer leurs course d’école de fin d’année. Nous avons ouvert spécialement pour eux le carrousel, 806 enfants ont été accueillis sur une période de 15 jours. Le carrousel de Copyrart au Jardin botanique LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N° 11 Préservation et conservation à la bibliothèque: du temps des CONSTATS aux ACTES CIBLÉS L’entretien d’une collection documentaire exige une veille constante et la mise en place de stratégies multiples. La transmission du Savoir et l’avancement de la Science en sont à ce prix ent quatre-vingt-une années d’accumulation d’ouvrages documentaires à la bibliothèque des Conservatoire et Jardin botaniques correspondent à trois kilomètres linéaires de rayonnages occupés aujourd’hui. Au risque de véhiculer une image peut reluisante de notre bibliothèque par l’utilisation du terme «accumulation», ce dernier illustre cependant une réalité fondamentale du lieu : tout ouvrage enregistré et intercalé dans nos collections l’est à titre définitif. Cette «contrainte» se justifie par la perpétuelle actualité des ouvrages réputés anciens pour la recherche scientifique actuelle. La Science demeurant toujours demandeuse de ceux-ci, il est donc nécessaire de les conserver ad vitam aeternam. Les grands principes étant posés, très vite, néanmoins, la réalité nous rattrape et nous précipite dans une lutte inéquitable où le facteur temps tient le premier rôle. Inévitablement, l’entropie aidant, nos trésors retourneront à l’état de poussière. Notre devoir est donc de retarder autant que faire se peut ce processus irrémédiable, source de cauchemardesques prospectives pour qui regarde un tant soit peu vers l’horizon du futur. Si le combat est permanent, il offre quand même moult compensations. Le doyen de nos livres, un incunable de 14851, tient bon contre Chronos. On ne saurait en dire autant de certains opuscules de la seconde moitié du XIXe siècle. Car la lutte n’est pas linéaire; un grand âge ne signifie pas forcément une plus grande sénescence. La qualité des matériaux composant l’objetlivre constitue bien le nerf de la guerre et la cause de nos plus grands soucis. L’application cohérente d’une politique préventive de conservation offre l’arme la plus efficace contre ces périls. Toutes nos précautions ne peuvent exclure une donnée fondamentale: l’environnement. Les livres ne gravitent pas dans un univers aseptisé. Bien au contraire. Et les interactions avec cet environnement, si ce dernier est délétère, auront des incidences profondes et durables sur nos livres. Et là, nous sommes perdants. Certes la bibliothèque n’est pas soumise directement aux caprices météorologiques – entendez par là qu’un toit et des murs englobent l’ensemble. Certes encore, la collection a échappé jusqu’à présent à ses deux pires ennemis que sont le feu et l’eau. Cependant, les bâtiments hébergeant les bibliothèques de phanérogamie et de cryptogamie raillent, avec abnégation et constance, depuis plus de 30 ans pour l’un et 100 ans pour l’autre, quasi toutes les normes de conservation internationalement reconnues. P. Boillat, bibliothécaire principal A l’image des herbiers bien protégés dans leur blockhaus souterrain, les livres exigent aussi un milieu climatique stable, tant des points de vue de la température que de l’humidité relative et une luminosité indirecte et tamisée. Les utilisateurs réguliers de la bibliothèque souriront à l’évocation de ces contraintes, tant l’enveloppe architecturale les bafoue allègrement. Le décor étant posé et les faiblesses du cadre bâti prises en compte comme contraintes incontournables, comment maximaliser les chances de conservation et de préservation de la collection ? La quantité – trois kilomètres linéaires de livres – et la conservation pour l’éternité nécessitent de développer des stratégies de lutte, d’une part, dans la limite des budgets disponibles en regard des besoins de la collection et, d’autre part, s’inscrivant dans la durée avec des répercussions négatives sur les documents les plus ténues possibles. A l’immobilité faussement sécuritaire du document endormi paisiblement sur son étagère et semblant traverser langoureusement les ans répond une surveillance obligée de la collection quand bien même cette dernière est peu manipulée comme c’est généralement le cas aux CJB. A l’exclusion des éléments atmosphériques déjà énoncés, le bibliothécaire s’attaquera à la redoutable et insidieuse poussière qui par accumulation se métamorphose en garde-manger potentiel à des myriades de petites bêtes qui en appelleront de plus massives et plus gloutonnes. C’est la fameuse pyramide alimentaire. Ces animaux, d’ailleurs, savent apprécier l’objet-livre non pour son contenu mais pour son contenant : cuirs, cellulose (papier), colle sont des friandises recherchées. N’en déplaise à nos collègues mycologues, les champignons sont aussi de redoutables et redoutés ennemis. La prohibition drastique de toutes victuailles ou boissons dans l’enceinte de la bibliothèque concourt à maintenir cette bonne hygiène. L’achat d’un aspirateur portable en 2004, à la fois puissant et doux, a accru notre efficacité dans le dépoussiérage des rayonnages et aussi directement des ouvrages. S’il est une partie du livre plus exposée aux aléas du temps, c’est bien la reliure. L’ancienneté de notre collection nous offre quantité de cuirs. Ce matériau vieillit fort mal. Heureusement des campagnes régulières pour nourrir les cuirs avec des baumes proposés par des institutions reconnues, notamment la Bibliothèque nationale de France, redonnent un lustre et une robustesse bienvenus aux dos et aux plats. Pour soulager les reliures de l’usure De gauche à droite Fig. 1 Dos et deuxième plat avant restauration de l’ouvrage ACHART, A. Dj. – Quinze cents plantes dans l’Inde – Pondichéry: [s.n.], 1905 Fig. 2 Dos et deuxième plat après restauration du même ouvrage, accompagné de son emboîtage PAGE N° 12 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Catalogue de la BIBLIOTHÈQUE vers une INFORMATISATION totale La valorisation de la collection hébergée par la bibliothèque des CJB passe inévitablement par la création d’outils recensant son contenu documentaire physique et chimique (acidité), la bibliothèque ambitionne d’habiller les ouvrages les plus précieux d’un emboîtage en carton neutre. Un premier lot de ces protections a été acquis en 2003. 2005 voit se poursuivre ce programme. Certains fascicules de périodique, non encore reliés, sont entreposés dans des boîtes vétustes à la qualité douteuse (encore une fois la problématique de l’acidité). Depuis 2004, leur remplacement est en cours par des boîtes dites d’archives, en carton neutre. Certains livres requièrent des traitements plus incisifs qui entraînent l’hospitalisation des documents chez un restaurateur. Des interventions plus ou moins lourdes, mais toujours proportionnées, renforcent ou réparent des ouvrages menacés de déliquescence (fig. 1 et 2); nous sommes loin de l’époque, somme toute pas si éloignée, où l’on refaisait quasi à neuf un livre au mépris de son histoire et de son identité2. Ces opérations sont néanmoins condamnées à demeurer ponctuelles à l’échelle de la collection, ne serait-ce que pour des raisons trivialement pécuniaires. La préservation et la conservation de ce patrimoine documentaire s’inscrivent également dans des actions plus pointues, mais concourant toujours à élever un cadre favorable à cette politique. Ainsi, l’achat en 2004 de signets en carton neutre nous évite de devoir coller les codesbarres – éléments essentiels à la gestion de la bibliothèque3 – directement sur les livres les plus précieux en les apposant plutôt sur ces petits cartons qui sont ensuite glissés entre les pages (fig. 3). Cette mesure épargnera aux livres des dégâts ultérieurs produits par les colles, véritables fléaux dont même les restaurateurs aguerris peinent à contrer les balafres. La manipulation des ouvrages précieux ou de grand format occasionne souvent des accrocs ou la fragilisation de parties plus exposées à l’usure mécanique, telles que les charnières des reliures. L’acquisition en 2004 de sets de lutrins en mousse répond au souci de maintenir la consultation de ces livres dans de bonnes conditions, tant pour le confort du lecteur que pour l’intégrité du livre. Issus du monde muséal, ces prismes en mousse épousent la forme du livre et garantissent un angle d’ouverture inférieur à 180°, soulageant le codex d’un brutal couchage à plat (fig. 4). Les trois grandeurs de ces supports s’adaptent merveilleusement à quasi tous les formats de la collection. On l’aura bien compris, la gestion d’une collection documentaire exige une action préventive globale afin d’assurer des conditions minimales de bonne conservation. Les politiques de préservation et de conservation ont définitivement le vent en poupe. L’élan impulsé aux CJB face au joyau que constitue ce patrimoine doit se poursuivre avec plus de force. S’il est un chantier à envisager dans un avenir proche, c’est bien celui de la désacidification en masse des ouvrages publiés sur un papier de mauvaise qualité – grosso modo pour la période 1850-1950. Cet intervalle temporel donne la mesure de la tâche qui nous attend. Les remèdes sont connus et éprouvés. Heureusement, car ce mal aurait condamné un pan de notre richesse à l’effritement! Travail de longue haleine, la préservation et la conservation repoussent toujours plus loin les griffes du temps. C’est là notre mission première. De haut en bas Fig. 3 Signet avec cote et code-barres du ACOSTA, Père José de. – Histoire naturelle et moralle des Indes, tant orientelles qu’occidentelles… – Paris: M. Orry, 1598 Fig. 4 Lutrin en mousse présentant le THEVENOT, Jean. – Relation d’un voyage fait au Levant… – Paris: L. Billaine, 1665 Notes 1. Herbarius Patavie impressus anno demi et cetera lxxxv. – Passau: J. Petri, 1485. 2. Pour la description précise des étapes d’une restauration, le lecteur peut se reporter à l’article rédigé par F. Maiullari dans la Feuille verte n° 33(2003), pp. 8-10. 3. L’importance des codes-barres pour la gestion de la bibliothèque a fait l’objet d’un entretien dans la Feuille verte n° 34 (2004), p. 20. Figure 1 Reproduction de l’«Atelier de restauration Netz», avec autorisation de Mme et M. Netz pour la publication Figure 2, 3 et 4 Photographies de B. Renaud (CJB) es catalogues demeurent les voies privilégiées pour «entrer» dans une telle collection. Longtemps constitués de fiches papier intercalées dans d’innombrables tiroirs, les catalogues sont, de nos jours, généralement informatisés. Les CJB n’échappent pas à cette règle et ont d’ailleurs effectués le saut du numérique fin 1984. Cependant, la masse d’information antérieure à 1984 du catalogue papier excluait sa migration vers l’électronique sans un renfort de l’équipe de bibliothécaires. Depuis le milieu des années quatrevingts, l’utilisateur était donc condamné à recourir aux deux catalogues pour effectuer ses recherches. La fusion de ces deux catalogues constituait bien un objectif majeur pour la bibliothèque. Ce dernier est en train de devenir une réalité, grâce à l’octroi d’un budget extraordinaire par le Conseil municipal de la Ville de Genève. Ce budget nous permet d’engager deux bibliothécaires à 50 % pour une durée de deux ans qui, nous l’espérons, viendront à bout des quelques 15 000 à 20 000 volumes de monographies recensés sur fiches. Néanmoins, il ne sera pas possible de ressaisir le contenu de toutes les fiches du catalogue papier. Effectivement, les tirés-à-part, au nombre de 60 000, ne pourront être traités lors de ce financement, par manque de temps. Rendez-vous donc en été 2007 pour un catalogue en ligne – presque – unifié! LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N ° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N ° 13 L’HERBIER de Johannes Hedwig AUX CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES DE LA VILLE et son CATALOGUE DE TYPES DE GENÈVE M. J. Price, conservatrice L’herbier de Johannes Hedwig est l’un des plus précieux herbiers bryologiques au monde. Nous présentons son histoire, son importance internationale et son influence sur la taxonomie et la systématique actuelle. Le travail que nous avons mené sur cette collection a permis de fournir un catalogue des types avec une version informatisée disponible sur le site Web des CJB ‘herbier des Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève comprend des collections de plantes vasculaires (plantes à fleurs et gymnospermes), de cryptogames vasculaires (fougères) et de cryptogames (algues, lichens, bryophytes). Vous trouverez une introduction sur les plantes cryptogamiques (les organismes, les collections de cryptogames et la recherche) dans un article récemment paru dans la Feuille Verte (volume 35, pages 4-10). Johannes Hedwig est né en 1730 en Hongrie (à cette époque la Transylvanie). Il a vécu à Vienne, Chemnitz et Leipzig avant sa mort en 1799. Hedwig a pratiqué la médecine mais a entretenu un intérêt actif pour la botanique tout au long de sa vie, en particulier pour l’étude des bryophytes (Florschütz, 1960; Geissler, 2000). Il était à Chemnitz lorsqu’il a débuté ses nombreuses récoltes, en commençant par les plantes à fleurs, puis a porté son attention sur les bryophytes. Pour ses études en bryologie il avait besoin d’un microscope qu’il reçut en cadeau de son ami et collègue Johann Daniel Schreber (1739-1810). Ce premier microscope, un «Rheintalersches Mikroskop», ne possédait qu’un grossissement 50 x. L’acquisition d’un microscope à plus fort grossissement (170-290 x) permit plus tard à Hedwig d’étudier les détails microscopiques des bryophytes et d’ouvrir de nouvelles perspectives pour la taxonomie et la systématique de ce groupe de plantes. Il fit de nombreuses découvertes, par exemple il fut le premier à observer, dessiner et décrire les organes sexuels mâles et femelles des mousses (anthéridies et archégones). Hedwig a publié ses observations innovatrices (et révolutionnaires pour l’époque) sur les bryophytes dans ses ouvrages, incluant les anthéridies, les archégones, le protonéma et sa croissance et les sporophytes des bryophytes (figures 1 et 2). Il a également décrit quelques nouvelles espèces de mousses. Sa plus grande contribution à la bryologie fut son ouvrage Species Muscorum Frondosorum (figure 6), publié à titre posthume en 1801 par Christian Freidrich Schwägrichen (1775-1853), un de ses étudiants. Cet ouvrage de Johannes Hedwig contient les descriptions de 372 espèces de mousses venant essentiellement d’Europe et d’Amérique du Nord, ainsi que quelques espèces tropicales. Toutes les descriptions d’espèces ont été basées sur les spécimens issus de sa propre collection. Hedwig a décrit et nommé 75 nouvelles espèces dans Species Muscorum Frondosorum. Cependant la plupart des noms d’espèces employés dans cet ouvrage étaient ceux donnés par d’autres auteurs comme Bridel (Muscologia Recentiorum, 1798), Dillenius (Historia Muscorum, 1741), Linnaeus (Species Plantarum, 1753, 1762), ou encore par Hedwig lui-même (Stirpes Cryptogamicae, 1787-1797). Tous ces noms d’espèces ont plus tard été attribués à Hedwig lorsque son Species Muscorum Frondosorum fut désigné comme point de départ pour les noms de mousses par la communauté scientifique. Des informations détaillées sur Hedwig et Species Muscorum Frondosorum ont été publiées par Florschütz (1960) et Margadant (1968) ainsi que dans les contributions au «2000 Hedwig Symposium». Différents articles contiennent des informations sur sa vie et son travail (Frahm, 2000; Wagenitz, 2000; Wissemen, 2000), sur l’herbier d’Hedwig-Schwägrichen (Geissler, 2000) ainsi que sur l’influence qu’il a exercé sur la classification actuelle des mousses (Vitt, 2000). DE L’IMPORTANCE DE SPECIES MUSCORUM FRONDOSORUM ET DE L’HERBIER D’HEDWIG L’ouvrage Species Muscorum Frondosorum a donc été désigné par la communauté internationale des bryologues comme le point de départ de la nomenclature des mousses (sauf pour le genre Sphagnum L). La collection d’Hedwig est aujourd’hui d’importance internationale, en particulier les spécimens utilisés pour la description des noms donnés par Hedwig dans Species Muscorum Frondosorum. Cette collection exceptionnelle est déposée dans l’herbier général des Conservatoire et Jardin Fig. 1 Encalypta streptocarpa Hedw. dessinée par Hedwig lui-même Fig. 2 Illustration des organes sexuels de quelques espèces de mousses PAGE N° 14 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Fig. 3-4-5 Quelques publication d’Hedwig parues entre 1782 et 1801 LES PRINCIPALES PUBLICATIONS PAR JOHANNES HEDWIG SUR LES CRYPTOGAMES ET LES BRYOPHYTES HEDWIG, J. 1782. Fundamentum historiae naturalis muscorum frondosorum HEDWIG, J. 1784. Theoria generationis et frutificationis pantarum cryptogamicarum HEDWIG, J. 1787-1797. Descripto et adumbratio microscopico-analytica muscorum frondosorum ou également sous le titre «Stirpes cryptogamicae novae aut dubiae iconibus adumbratae, additaque historia analytica» HEDWIG, J. 1798. Theoria generations et frutifications plantarum cryptogamicarum HEDWIG, J. 1799. Filicum genera et species recentiori methodo accomodatae analytice descriptae a Ioanne Hedwig Tous ces livres ont été brillament illustrés par Hedwig lui-même botaniques de la Ville de Genève. L’herbier d’Hedwig a été acheminé à Genève indirectement: d’abord acheté par Schwägrichen après la mort du fils d’Hedwig; il a ensuite été racheté, à la mort de Schwägrichen, par Jean-Etienne Duby (1798-1885), un ami du botaniste Augustin-Pyramus de Candolle (1778-1844). Enfin William Barbey (18421914) acquit une partie de la collection de mousses de Duby pour l’herbier Boissier, une des collections les plus importantes en termes historiques de l’herbier de Genève. Schwägrichen a aussi rédigé les volumes supplémentaires de Species Muscorum Frondosorum (Schwägrichen, 1811-1816, 1823-1827, 1827-1830, 1842) et il a ajouté ses propres spécimens dans l’herbier d’Hedwig. Pour cette raison l’herbier d’Hedwig est aujourd’hui nommé à plus juste titre l’herbier d’Hedwig-Schwägrichen. UN CATALOGUE DES TYPES Un catalogue de types est une liste du matériel d’herbier représentant les types des espèces d’une collection donnée (par exemple le catalogue de types de l’herbier d’un individu ou de l’herbier d’un jardin botanique). Pour la notion de type (voir l’encadré en page 16) «Les types d’herbier: quelques définitions». Un spécimen type est le matériel d’origine qui a été utilisé pour la description d’une nouvelle espèce. Ce même spécimen type est cité dans la description originale de l’espèce (protologue). Les types sont conservés dans les collections des conservatoires, des jardins botaniques, des universités ou des musées d’histoire naturelle. Ils sont importants pour l’établissement d’une nomenclature stable, concrétisée par l’étude des espèces et des relations entre elles (taxonomie et systématique), ainsi que pour l’intérêt historique des collections. LE CATALOGUE DES TYPES DE LA COLLECTION D’HEDWIG Un catalogue de types provenant de la collection d’Hedwig a été compilé avec une base de données des spécimens ainsi que des images de planches d’herbier (figure 7). C’est une liste de tous les types, ou types potentiels de sa collection présents dans l’herbier général des CJB. Ce catalogue servira de référence pour le matériel (types ou types potentiels) de l’herbier d’Hedwig. Il présente toutes les données nécessaires sur ce matériel et comprend donc le statut de typification des noms. Tous les noms de types sont donc présentés dans le catalogue, incluant l’information des protologues et les détails des étiquettes originales. Les typifications publiées pour 210 noms de mousses donnés par Hedwig ont été listées. Un total de 351 photographies de planches d’herbier d’Hedwig est disponible dans le catalogue. Il faut noter que pour 43 espèces du catalogue la collection ne comprend pas de spécimens d’herbier. L’information fournie dans ce catalogue sera bientôt publiée dans Boissiera (Price, 2005). Les données sont d’ores et déjà disponibles dans une base de données accessible sur le site Web des CJB (Price et al., 2004: http://www.ville-ge.ch/cjb/ - rubrique «bases de données»). Ces deux formes de publication – papier et électronique – faciliteront la conservation à long terme de cette importante collection de bryophytes. Ce projet sera poursuivi avec la rédaction du catalogue concernant la partie Schwägrichen de la collection (voir ci-après). PROJET EN COURS UTILISANT LES DONNÉES DU CATALOGUE DES TYPES DE L’HERBIER D’HEDWIG L’étude des spécimens et des types (holotype, isotype, syntype, lectotype…) contribue largement à la systématique. Comme l’ouvrage Species Muscorum Frondosorum avait été désigné comme point de départ de la nomenclature des mousses, il fallait désormais examiner tous les spécimens de sa collection de façon critique, et les typifier. Certaines études sur les typifications de ces noms ont déjà été faites par des chercheurs internationaux (Cardot, 1899; Hedenäs & Geissler, 1999; Koponen, 1979; Geissler, 2000; Pursell, 1986) mais il reste beaucoup de noms à typifier. Ceci est d’ailleurs l’objet d’un projet spécifique qui sera mené tout prochainement aux CJB. Un exemple de typification de noms donnés par Hedwig est illustré ici par Weissia calycina Hedw., une espèce tropicale décrite par Hedwig dans Species Muscorum Frondosorum (page 70). Cette typification est basée sur les spécimens de Jamaïque récoltés par Olof Swartz de Stockholm, Suède. Cette espèce est aujourd’hui reconnue comme Holomitrium calycinum (Hedw.) Mitt. Descript. Stirps erectiuscula, declinataque, divisa. Folia e latiuscula, concavula basi imbricata, in linearem processum, ductulorum fasciculo quoque percursum, protensa: perigonialia longissima, interiora fructum exsuperantia. Pedunculus semuncialis, pallidus. Sporangium ventricoso oblongum, erectum. Hedwig, 1801 – Species Muscorum Frondosorum, p. 70. Lorsque la planche d’herbier originale de Weissia calycina Hedw. fut examinée en 2002, en fonction des critères de la taxonomie moderne, deux espèces différentes ont été distinguées parmi les quatre échantillons examinés (Holomitrium calycinum (Hedw.) Mitt. et Holomitrium olfersianum Hornsch.). Un des deux échantillons d’Holomitrium calycinum (Hedw.) Mitt. devait être désigné comme type. Pour le nom Weissia calycina Hedw. (Price, 2002), un lectotype a été choisi après une vérification taxonomique, et l’examen de l’illustration (figure 8) et de la description originales (Price, 2002). Fig. 5 Trichostomum fontinaloides LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N ° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N ° 15 LES TYPES D’HERBIERS: QUELQUES DÉFINITIONS La notion de type s’applique aux spécimens employés par des auteurs pour donner un nom à une nouvelle espèce (holotype…), ou au matériel de type qui n’est pas clairement défini au début, afin de désigner un spécimen comme type (lectotype) Holotype L’holotype du nom d’une espèce ou d’un taxon infraspécifique est le seul spécimen ou l’illustration que l’auteur a utilisé pour sa description Isotype Un isotype est un double quelconque de l’holotype; c’est toujours un spécimen Syntype Un syntype est un des spécimens cités dans le protologue lorsque aucun holotype n’a été désigné, ou lorsque un ou plusieurs spécimens ont été désignés simultanément comme types Paratype Un paratype est un spécimen cité dans le protologue qui n’est ni l’holotype, ni un isotype, ni un syntype mais constitue deux spécimens ou plus qui ont été désignés simultanément comme types Lectotype Un lectotype est un spécimen ou une illustration désigné parmi le matériel original comme type nomenclatural. Il est sélectionné si aucun holotype n’a été indiqué au moment de la publication, ou si l’original est manquant ou semble appartenir à plus d’un taxon UN PROJET À RÉALISER PROCHAINEMENT: LE CATALOGUE DES TYPES POUR LA COLLECTION DE SCHWÄGRICHEN Les informations concernant les spécimens de la collection de Schwägrichen ont déjà été introduites dans la base de données en préparation pour la publication du Catalogue des Types de Schwägrichen, planifiée pour 2006-2007. QUELQUES RÉFLEXIONS La contribution d’Hedwig à l’étude des bryophytes, et, particulièrement des mousses, est considérable. Ses publications illustrées avec talent et sa collection de mousses ont une grande importance historique. Après la désignation de son livre Species Muscorum Frondosorum comme point de départ de la nomenclature des mousses, l’herbier d’Hedwig, déposé dans l’herbier général des Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève, a pris une place d’importance internationale. Un équivalent de l’herbier original de Linnaeus, dans le domaine de la bryologie. REMERCIEMENTS Patrick Perret et Patrick Bungener (éditions CJB – Boissiera); Matthieu Berthod et Gérard Schilling (graphisme Fig. 7 Type de Mnium cuspidatum Hedw. et mise en page du catalogue) ; Laurent Kneubuehl et Raoul Palese (informatique et site Web); Carol Price et Eva Maier (vérification des données et relecture des étiquettes originales); Ariane Cailliau et Matthieu Chabanon (corrections en français) et Magali Stitelmann pour la relecture du texte. Enfin, l’équipe des bryologues des CJB (Laurent Burgisser, Ariane Cailliau, Matthieu Chabanon, Eva Maier, et Anne Streiff) pour leur enthousiasme. RÉFÉRENCES BRIDEL, S. E. 1798. Muscologia Recentiorum. Volume 2 (1). C.G. Ettinger: Gotha, Germany. CARDOT, J. 1899. Études sur la flore bryologique de l’Amérique du Nord. Révision des types d’Hedwig et de Schwaegrichen. Bull. Herb. Boissier 7: 300-336, 338-380. DILLENIUS, J. J. 1741. Historia muscorum. Oxford: England. FLORSCHÜTZ, P. A. 1960. Introduction to Hedwig’s «Species Muscorum», pp. VXXII. In Facsimile edition to J. Hedwig’s Species Muscorum Frondosorum. H. R. Engelmann (J. Cramer), Weinheim. GEISSLER, P. 2000. The Hedwig herbarium and its importance for the nomenclature of mosses. Nova Hedwigia 70: 15-23. HEDENÄS, L. & P. GEISSLER. 1999. Lectotypification of Hedwig names: holarctic pleurocarpous mosses. Candollea 54: 417-432. HEDWIG, J. 1782. Fundamentum historiae naturalis muscorum frondosorum, concernens eorum flores, fructus, seminalem propagationem, adjecta generum dispositione methodical, iconibus illustrates. 2 vols. Lipsiae [Leipzig]. HEDWIG, J. 1784. Theoria generationis et frutificationis plantarum cryptogamicarum Linnaei mere propriis observations et experimentis superstructa; dissertation quae praemio ab Academia imperiali Petropolitana pro anno 1783 proposito ornate est; auctore Joanne Hedwig…Petropoli [St. Petersberg] HEDWIG, J. 1787-1797. Descripto et adumbratio microscopico-analytica muscorum frondosorum nec non aliorum vegetantium e classe cryptogamica Linnaei novorum dubiisque vexatorum auctore Joanne Hedwig. M.D. 4 vols. Lipsiae [Leipzig]. NB. Published in four volumes under title ‘Stirpes cryptogamicae novae aut dubiae iconibus adumbratae, additaque historia analytica’ see TL2. 2527. HEDWIG, J. 1798. Theoria generations et frutifications plantarum cryptogamicarum Linnaei, retracta et aucta. C. tab. Coloratis. Ed. 2. Lipsae [Leipzig]. HEDWIG, J. 1799. Filicum genera et species recentiori methodo accomodatae analytice descriptae a Ioanne Hedwig… iconibusque ad naturam pictis illustratae a Romano Adolpho filio… Lipsae [Leipzig]. HEDWIG, J. 1801. Species muscorum frondosorum descriptae et tabulis aeneis lxxvii coloratis illustratae. Opus posthumum editum a Frederico Schwaegrichen… Lipsae [Leipzig]. I–IV. 1-352. KOPONEN, T. 1979. Miscellaneous notes on Mniaceae (Bryophyta), IV. Typification of Hedwig’s species of Mniaceae. Ann. Bot. Fennici 16: 79-89. LINNAEUS, C. 1753. Species plantarum. Salvius, Holmiae. LINNAEUS, C. 1762. Species plantarum,…ed. 2. Salvius, Holmiae MARGADANT, W. D. 1968. Early bryological literature. A descriptive bibliography of selected publications treating Musci during the first decades of the Nineteenth Century and especially the years of 1825, 1826 and 1827. I-XI, 1-277. Pittsburgh, Hunt Botanical Library. PRICE, M. J. 2002. Designation of a lectotype for the moss Weissia calycina Hedw. (Holomitrium calycinum (Hedw.) Mitt.). Candollea 57: 45-53. PRICE, M. J., PALESE, R. & L. KNEUBUEHL. 2004. Catalogue des Types d’Hedwig: Electronic Publication: http://www.ville-ge.ch/cjb/bd/hedwig/index.php PRICE, M. J. 2005. Catalogue of the Hedwig-Schwägrichen herbarium (G). Part 1. List of type material and a review of typifications for the Hedwig moss names. Boissiera 61: 1-383. (in press). PURSELL, R. A. 1986. Typification of Hedwig’s species of Fissidens. Bryologist 89: 35-41. SCHWÄGRICHEN, C. F. 1811-1816. Species Muscorum Frondosorum, Supplementum Primum. Leipzig (J. Barth) & Paris (Treuttel & Würz). SCHWÄGRICHEN, C. F. 1823-1827. Species Muscorum Frondosorum, Supplementum Secundum. Leipzig (J. Barth) & Paris (Treuttel & Würz). SCHWÄGRICHEN, C. F. 1827-1830. Species Muscorum Frondosorum, Supplementum Tertium. Leipzig (J. Barth) & Paris (Treuttel & Würz). SCHWÄGRICHEN, C. F. 1842. Species Muscorum Frondosorum, Supplementum Quartum. Leipzig (J. Barth) & Paris (Treuttel & Würz). VITT, D. H. 2000. The classification of mosses: Two-hundred years after Hedwig. Nova Hedwigia 70: 25-36. WAGENITZ, G. 2000. Bibliography of biographical literature on Johann Hedwig (1730-1799). Nova Hedwigia 70: 61-64. WISSEMANN, V. 2000. Bibliographie der Drucke und Manuskripte von Johannes Hedwig (1730-1799). Nova Hedwigia 70: 45-60. Fig.8 Weissia calycina Hedw. PAGE N° 16 – N° 35 – DÉCEMBRE 04 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES e Le XVII Congrès INTERNATIONAL de Botanique P.-A. Loizeau, sous-directeur des CJB La communauté des scientifiques botanistes s’est retrouvée à Vienne en Autriche, du 11 au 23 juillet 2005. Huit collaborateurs des CJB, à des titres divers, ont fait le déplacement. Ce congrès, organisé par l’International Association for Plant Taxonomy (IAPT), a lieu tous les 6 ans a première semaine est traditionnellement consacrée à la révision du Code de Nomenclature, l’ouvrage de référence qui depuis 1867 règle la façon dont on nomme les plantes. Il faut ici rappeler que le premier Code de Nomenclature a été publié à cette date par Alphonse Louis Pierre Pyramus de Candolle, fils d’Augustin-Pyramus de Candolle. Ce code est revu pratiquement tous les 6 ans depuis une centaine d’années. Ce ne sont pas moins de 626 propositions de modifications qui étaient soumises au vote de près de 250 membres de l’IAPT. RECONNAISSANCE DE GENÈVE Chaque membre présent a droit à une voix. Les représentants des institutions ont droit en plus à un nombre de voix proportionnel à la dimension de leur herbier et à une estimation de l’activité taxonomique de leurs chercheurs. Genève obtient le maximum de voix, à savoir 7 voix. Cette dotation est une reconnaissance internationale de la valeur de nos collections et de la qualité de nos recherches. LE LATIN DES DIAGNOSES La procédure de vote est la suivante: un premier tour est effectué par courrier avant la session. Seuls les votes des membres sont sollicités à ce stade. Toutes les propositions qui sont refusées par plus de 75% des votants sont rejetées d’office. Parmi celles-ci, on notera le rejet de la suppression du latin au profit de l’anglais comme langue originale pour la publication des nouvelles espèces. Le latin reste donc obligatoire au moins encore pour 6 ans. Personnellement, je pense que même si l’anglais est manifestement la langue de communication des scientifiques, le fait d’obliger les botanistes à effectuer tout ou partie de la diagnose originale en latin renforce la dimension universelle et intemporelle des fondements de la botanique. PUBLICATION ÉLECTRONIQUE SOUS CONDITION Une proposition qui avait été rejetée lors du vote préliminaire a été réétudiée grâce à une motion émanant de l’assemblée. Il s’agit de la possibilité de publier de nouvelles espèces dans des journaux électroniques (et consultables à travers Internet). La majorité des chercheurs des CJB, sinon tous, est opposée à cette solution. En effet, la pérennité de l’information n’est pas assurée par son stockage sous forme électronique. Or nous publions des références qui devront être consultables dans des dizaines ou des centaines d’années. Que pouvons-nous lire des documents stockés sur disquettes 5 pouces il y a seulement 15 ans, dans des formats qui ne ressemblaient en rien aux traitements de texte actuels? La version imprimée de ces documents est encore et toujours accessible, avec un coût de stockage relativement faible, alors que le transfert de la version électronique et le maintien de l’information dans un format moderne demanderait beaucoup plus d’investissement, ce travail étant sans fin et augmentant en volume avec les années. Une solution intermédiaire a été trouvée dans la recommandation suivante: une version électronique ne peut être l’unique support d’une nouvelle espèce. Par contre, s’il y a publication électronique, il doit y avoir obligatoirement publication antérieure d’une version papier, les deux versions étant identiques et la version papier largement distribuée. Dès lors, la consultation d’une référence électronique peut être admise, ce qui pourrait faciliter dans une certaine mesure la diffusion de l’information, particulièrement vers les pays émergeants, qui ont de plus en plus souvent un lien Internet avec le monde, mais pas de bibliothèque botanique de référence. LES ACACIAS RESTENT AUSTRALIENS Un autre point important fut largement débattu: le changement du nom de genre Acacia. En effet, des études phylogénétiques montrent que le genre devrait être séparé en deux, avec d’un côté les Acacias africains et sud-américains, et de l’autre les australiens, 10 fois plus nombreux. Selon le code de nomenclature, le nom Acacia aurait dû être attribué à la branche africano-sud-américaine pour des questions d’antériorité de date de publication du nom original. Mais pour des raisons économiques, tant au niveau agro-forestier que touristique, la commission spécialisée en charge de la préparation de ce dossier a proposé de conserver le nom Acacia pour les espèces australiennes. L’assemblée plénière, après moult joutes oratoires, et la consultation de centaines de courriels de soutien, affichés dans les couloirs de la session, envoyés essentiellement par des scientifiques et des politiciens australiens, a voté pour la conservation à une courte majorité. Ainsi les Acacias restent australiens, et les espèces africaines et sud-américaines devront changer de genre! A moins que des études complémentaires ne présentent d’autres conclusions. Quelques-uns des 4000 congressistes présents à Vienne 1600 CONFÉRENCES EN UNE SEMAINE La seconde semaine a vu affluer à Vienne plus de quatre mille congressistes venant du monde entier. Il s’est tenu jusqu’à 17 sessions en parallèle, traitant de tous les aspects de la botanique, en allant de la génétique moléculaire, à la conservation des plantes, en passant par la biologie des populations, la phytochimie, l’écophysiologie, la morphologie, la systématique, les effets du climat, l’ethnobotanique, etc. La palette était immense et les choix douloureux. A raison de 3 conférences par heure et par session, les congressistes ubiquistes auraient pu assister à 50 conférences par heure. Près de 1600 conférences ont été données, dont 32 conférences magistrales. Ceci dit, il n’était matériellement pas possible d’assister à plus de 106 conférences, soit 6,6% de l’offre. Nous sommes rentrés de Vienne la tête foisonnant d’informations, desquelles surgiront peut-être les idées permettant de faire avancer la recherche de chacun. Certains d’entre nous ont aussi eu l’occasion de présenter leur recherche par le biais de conférences ou de posters. L’organisation de tels congrès demande des moyens de plus en plus importants. Les coûts de participation semblent augmenter en proportion. Cette «Grand messe» permet aux scientifiques du monde entier de communiquer. Pourtant on peut se demander si les dimensions ne deviennent pas ingérables, tant du point de vue de l’organisation que de la possibilité pour le simple congressiste de participer à tout ce qui pourrait l’intéresser et d’absorber toute l’information dispensée. SIX RÉSOLUTIONS FINALES L’assemblée générale de fin de congrès prend habituellement un certain nombre de résolutions. Pour ce congrès de Vienne, la première consiste à entériner les décisions prises pendant la session de nomenclature. La seconde s’inquiète de l’augmentation du dioxyde de carbone dans l’atmosphère et sollicite des fonds pour des études à l’échelle des écosystèmes. La troisième affirme que l’évolution est le principe central de la biologie moderne, affirmation rendue nécessaire dans le cadre du débat propre aux américains entre créationnistes et évolutionnistes. La quatrième insiste sur l’importance de la taxonomie, comme base de tout travail de gestion d’espèces et de conservation, et sollicite des efforts particuliers pour la publication de flores régionales et mondiale. La cinquième rappelle que les deux tiers des espèces seront menacées d’extinction au cours du 21e siècle, et que des déclarations ont été faites par de nombreux gouvernements pour diminuer la perte de biodiversité. Le congrès demande donc que toutes ces déclarations se concrétisent entre autres par des appuis financiers des gouvernements et des sponsors afin d’assurer l’étude et un suivi de l’évolution de la biodiversité, par la mise en place de stratégies de conservation, ou par un soutien renforcé aux musées en charge de la conservation de spécimens d’herbier et de littérature. La dernière résolution fixe le prochain congrès de l’IAPT du 23 au 30 juillet 2011 à Melbourne en Australie LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N ° 35 – DÉCEMBRE 04 – PAGE N ° 17 3 4 5 Exposition «Ambiguë, la relation plante-insecte» 6 1 Ambiguë, cette mouche géante qui vous dévisage à l’entrée de l’exposition? 2 Reprise de l’exposition dans le cadre des Floralies 1 2 3 Un public d’adolescents très intéressé par un «butinage BD» 4 Les magnifiques suspensions photographiques d’Alan Humerose 5 Visite guidée par le commissaire de l’exposition «Ambiguë» 6 Un nombreux public (plus de 50000 visiteurs), passionné par les insectes Fidèle à sa tradition, la Feuille Verte vous présente une rétrospective photographique des événements marquants l’année écoulée Rétrospective Evénements aux CJB 7 Visite guidée pour les parlementaires fédéraux (juin 2005) 8 Stand d’UNI GE et des CJB au S-Dev (plateforme internationale pour un développemment durable à Palexpo du 11 au 13 octobre 2005) 9 Inauguration de notre exposition sur la Flore alpine (mai 2005) 10 La basse-cour des CJB en quarantaine, en prévision de l’arrivée de la grippe aviaire… (octobre 2005) 11 Passage de témoin et repas champêtre 12 Cours professionnel interservice (CJB – SEVE): une première! 7 8 9 11 10 12 PAGE N° 18 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES 13 14 15 16 17 L’art, les enfants et des spectacles 13 L’art, la science et les enfants: créations automnales et land art aux CJB (collaboration: DIP) 14 Parterre de fleurs artificielles pour l’expo «L’art et les enfants» (DIP) à la Salle du Chêne 15 Spectacle de la Chorale des Bains fort réussi aux serres de Pregny (septembre 2005) 16 Aubert & Siron butinent en serre pour la Fureur de lire (septembre 2005) 17 Catherine Gaillard conte au Jardin botanique pour la Fureur de Lire C’est notre manière de relater la multiplicité des rapports que nous entretenons avec nos différents publics. Qu’ils en soient ici remerciés! ANNUELLE Ateliers, variations botaniques et formation continue 18 Stage de formation continue des enseignants du DIP 19 Variation botanique (visite guidée) autour de l’arbre 20 Atelier vert sur l’herbier: une vocation précoce? 21 Les animaux: un sujet d’atelier toujours très prisé 18 20 21 19 22 Le «théâtre des oiseaux» (atelier vert, 2 novembre) 22 LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N ° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N ° 19 RENCONTRE annuelle 2005 de l’Association des JARDINS et COLLECTIONS botaniques suisses Depuis 1972, les responsables techniques des jardins botaniques suisses se réunissent régulièrement Raymond Tripod, chef jardinier et organisateur de ces journées n 1998, pour renforcer leur action, une association a été créée sous le nom de «Hortus Botanicus Helveticus» H.B.H. Sans but lucratif, ses objectifs visent principalement à: La mise en valeur des capacités techniques et du savoir faire des institutions et jardins membres, ainsi que de leur personnel en matière de façons culturales, de gestion des collections, de sauvegarde des espèces menacées, de l’aménagement du paysage, de pédagogie, d’échange des informations avec les différents réseaux de jardins botaniques européens et hors continents. La conservation et le développement de collections botaniques au niveau national et international. La promotion d’actions d’intérêt public en étroite collaboration avec les directions respectives des jardins botaniques suisses. Le développement d’un réseau actif pour l’échange des compétences et du personnel. La mise sur pied de journées techniques pour la formation continue du personnel spécialisé de ses membres. La promotion et la publicité des jardins botaniques auprès des Autorités et des offices du tourisme. Enfin, pour toutes les collections publiques et privées du pays, elle est le partenaire de l’Office Fédéral de l’Environnement, des Forêts et du Paysage (O.F.E.F.P.) pour la mise en œuvre et l’application de la «Convention sur la diversité biologique» (C.D.B.), générée par la Conférence de Rio 1992, ratifiée par la Suisse en 1993. Aujourd’hui, l’association réunit 20 membres collectifs, 37 individuels, 15 bienfaiteurs représentant l’ensemble des institutions officielles publiques et la quasi-totalité des collections d’initiatives privées. Chaque année, il incombe à un responsable technique de proposer un programme pour la rencontre annuelle des adhérents dans lequel l’assemblée générale tient une place prépondérante. Organisée cette fois-ci aux Conservatoire et Jardin botaniques, du 14 au 16 septembre derniers par notre jardiner-chef, ce ne sont pas moins de 83 participants qui se sont déplacés pour tout ou partie de ces journées d’échange. Le 1er jour comprenait un parcours dans la Terre de Pregny, le Domaine de Penthes et une visite des ex-serres du Baron Rothschild à Pregny où chacun, en complément des aspects conservation, a eu loisir de goûter à la palette des fruits et raisins présentés pour l’occasion sous forme d’une échoppe botanique dans la plus grande des serres. Après une courte restauration à la cafétéria du B.I.T. et un déplacement en train régional jusqu’à Versoix, le groupe a été accueilli par Madame Véronique Schmied, Maire, dans le parc de la Mairie pour un bref historique du lieu, agrémenté d’un verre de l’amitié. Puis, au fil de l’eau, sur un bateau «Belle époque» de la C.G.N. à destination d’Yvoire, les participants ont été reçus au «Jardin des Cinq Sens», dans l’ancien potager du château, par Madame Anne-Monique d’Yvoire pour une présentation détaillée des plantations et du labyrinthe végétal inspirés des jardins clos du Moyen-Age. Incités à la méditation, les sens en éveil, contemplatifs, nous avons apprécié la disposition des thèmes et la maintenance exemplaire de l’aménagement. Nul ne saurait quitter la paisible cité médiévale sans avoir savouré les tradition- nels filets de perche, spécialité de l’endroit. Tel fut le cas avant d’embarquer pour un retour dans la rade illuminée de Genève. La matinée du jeudi, sous la conduite des chefs de culture aidés de conservateurs et scientifiques, a été consacrée à la visite des collections vivantes de notre jardin, des heures privilégiées pour les cultivateurs. C’est sur l’esplanade du jardin d’hiver que s’est clôturé ce volet, moment pour notre direction qui avait accepté d’être le support de ces journées, à Monsieur Spichiger d’accueillir officiellement les participants et de livrer un message de circonstance. Au cours de l’apéritif servi pour l’occasion, Madame Suzanne Bollinger, vice-présidente de l’Association adressa, au nom de tous, de chaleureux remerciements aux Conservatoire et Jardin botaniques. Puis, dans le cadre enviable de la buvette, un repas apprêté par la Famille Berron précéda la présentation des herbiers et la bibliothèque, des biens culturels botaniques inestimables, propriété de la Ville de Genève, que plus d’un n’avaient pas encore découvert. En prolongement et conformément aux dispositions statuaires l’assemblée générale prévoyait l’élection d’un comité pour un nouveau mandat de deux ans. Déposant le sien, pour cessation d’activité et après dix années de présidence, le soussigné ne s’est pas représenté. Pour lui, ce fût l’heure de remercier vivement ses collègues pour le travail réalisé au profit de tous les jardins du pays. Il s’agissait, en plus, d’élire un représentant-observateur des jardins botaniques suisses au Consortium des jardins botaniques européens. De notre institution, Madame Sophie Dunand-Martin, adjointe au jardinier-chef, a été appelée pour cette fonction. Honorés de la présence de Madame Maîté Delmas, Présidente des Jardins botaniques de France, cette riche journée s’est terminée dans le vignoble de Satigny, une façon de proposer, dans la convivialité, des saveurs spécifiques au terroir genevois à nos collègues francophones, d’outre Sarine et du Sud des Alpes. Le lendemain, dernier jour, une excursion au jardin botanique du Parc de la Tête d’Or de la Ville de Lyon a clôturé le programme de cette rencontre 2005. Nous étions 52 présents pour l’accueil réservé par Monsieur Frédéric Pautz, Directeur, accompagné de ses proches collaborateurs qui composèrent plusieurs groupes. Tour à tour, guidés dans les grandes serres d’exposition, de plantes succulentes, d’orchidées, de broméliacées, d’insectivores, de Madagascar ou d’Afrique du Sud, dans le jardin mexicain extérieur, les secteurs alpin et floral, l’école de botanique, les locaux de la graineterie et du laboratoire de culture, chacun trouva réponse à ses intérêts. Pour honorer cette très complète visite, les participants ne se sont contentés que d’un pique-nique emporté, consommé à l’ombre du platane ancestral du Parc. Comblés par nos collègues, reconnaissants pour leur grande disponibilité et la foison d’informations données, des remerciements d’usage ont clôturé l’après-midi de ce rapprochement dont chacun conservera un vivant souvenir. PAGE N° 20 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Le programme des expositions et animations aux CJBG pour 2006 s’annonce fort intéressant. Axé sur les diversités, il mettra principalement en scène, en collaboration avec nos collègues du Musée d’histoire naturelle, deux expositions-promenades qui feront écho sur la rive gauche à l’exposition «Toile de vie» du Museum omme l’an dernier et probablement comme pour les années qui viennent, nous présenterons à nos public, autour d’une ou plusieurs expositions, la palette de collaboration culturelle la plus large possible. Ces regards croisés sur une thématique ont magnifiquement fonctionné pendant la manifestation «Ambiguë, la relation plante-insecte» de l’été 2005. Le grand public a particulièrement apprécié ces éclairages scientifiques, mais aussi tour à tour musicaux, plastiques, théâtraux ou littéraires. «Une année – une thématique», cela pourrait être notre slogan pour les années à venir, tant nous nous efforcerons de proposer des visions, certes multiples et transdisciplinaires, mais surtout cohérentes d’un même sujet tout au long de notre «saison» (avril à novembre). C’est ainsi que pendant ce «long été», nous proposerons, souvent en collaboration avec nos collègues des autres musées, tout un florilège de rencontres pédagogiques (ateliers d’été ou ateliers verts, formations continues, forums, visites thématiques, etc.), d’animations ludiques ou scientifiques (goûters, cinéma, conférences, Nuit de la science, etc.) ou de moments artistiques (expositions d’artistes, vernissages, installations, etc.) autour du thème des diversités. Vous en trouverez une liste provisoire ci-dessous mais nous vous prions de vous référer au programme officiel de «DIVERSITE(S)» qui sera disponible dès février 2006 et sur notre site http://www.ville-ge.ch/cjb/ Programme 2006 Programme 2006 EXPOSITIONS-PROMENADES ANIMATIONS Biodiversité et Humanité / 9 mai – 22 octobre Proposée sous l’égide de la Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme et l’Association Noé-Conservation, cette exposition internationale sera présentée en grande première hors des frontières françaises dans les collections du Jardin botanique Nuit de la Science / 8 et 9 juillet (thème «Evolution et révolution») Les CJB auront un stand commun avec le MHN pour cette 6e Nuit de la Science. Nous présenterons lors de ces deux journées (et nuit) un espace dédié à la biodiversité et une question existentielle: «sommes-nous en train de vivre la 6e extinction?». Jeux, expositions, interactions avec des experts scientifiques seront au programme. Diversité végétale en Suisse, état de la question / 9 mai – 22 octobre Exposition maison, ce parcours proposera aux visiteurs une vision imagée de la phytodiversité en Suisse et des menaces qui pèsent sur elle Parcours Alph@: Questions de conscience / 5 – 21 juin Troisième parcours à thème créé par le Réseau romand Science et Cité, cette série de panneaux stimulant l’imagination et l’intérêt pour les sciences sera présenté pour la première fois à Genève, dans le Jardin botanique, en juin 2006 Ateliers verts et variations botaniques (selon programmation, voir www.ville-ge.ch/cjb) Atelier des musées en été (21 - 25 août 2006) Programmation musicale, contes, carrousel et jeux pour enfants (Dates et heures selon programmation ultérieure) Diversité(s) En collaboration avec le Musée d’Histoire naturelle et sa programmation centrée sur la diversité biologique (exposition «Toile de vie»), les Conservatoire et Jardin botaniques proposeront dès le printemps 2006 des éclairages sur la biodiversité en général, son rapport avec l’homme et plus particulièrement avec le monde végétal La Biodiversité est-elle si importante à conserver? Cette question provocatrice n’est pas sans échos dans le monde politique et il nous est apparu comme très important de donner les clés qui permettent au public de répondre à ce type de questionnement en connaissance de cause et de manière objective. Cette réflexion s’inscrira muséologiquement dans les collections du Jardin botanique à travers deux expositionspromenades: – Diversité végétale en Suisse, état de la question (production CJB) – Biodiversité et humanité (Ministère français des affaires étrangères) Des panneaux, de magnifiques photographies, toute une muséographie de plein air seront proposés aux publics pour une balade initiatique dans nos collections à la découverte de la phytodiversité régionale et des enjeux liés à sa drastique diminution au niveau planétaire. 1. Diversité végétale en Suisse, état de la question Les 10 panneaux qui composent cette évocation de la richesse du monde végétal en Suisse seront présentés dans le Jardin botanique. De petits jardins suspendus évoqueront le monde des mousses, des hépatiques, des lichens, des fougères et des plantes à fleurs. Un éclairage particulier sera consacré aux listes rouges, aux espèces menacées, à la conservation et aux espèces néophytes envahisseuses (sujet fétiche des CJB). Un choix d’ouvrages sur la flore régionale et sa conservation seront présentés par la bibliothèque, ainsi qu’à notre boutique. Une mise à plat des connaissances objectives en la matière, mais aussi une interpellation très forte sur notre rôle et celui de notre civilisation souvent décadente, gaspilleuse et irrespectueuse du patrimoine naturel et des valeurs qui lui sont liées. Processus irréversible ou non, c’est à nous et à vous de jouer. Les Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève jouent un rôle de pointe, souvent primordial et pionnier, ici et là-bas, dans la connaissance et la gestion raisonnée des ressources végétales naturelles. 2. Biodiversité et humanité Cette exposition, produite par La Fondation Nicolas Hulot et l’association Noé-Conservation pour le Ministère français des affaires étrangères et grâce à l’aide de nombreux scientifiques de renom, est tout à fait remarquable. Elle dresse un bilan thématique de la situation environnementale et de ses rapports conflictuels avec le monde des humains qui gère la planète. La biodiversité contribue au bien-être de l’humanité. Déclarations et conventions internationales le réaffirment. Sa conservation reste pourtant un des défis du XXIe siècle. LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N ° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N ° 21 L’affaire de tous La biodiversité nous fournit abri, nourriture, eau potable, vêtements et médicaments. Dans sa diversité et sa complexité, elle garantit le bon fonctionnement des écosystèmes, qui rendent des services irremplaçables à l’humanité. Patrimoine naturel, elle est le pendant de nos monuments et œuvres d’art au niveau culturel. Elle a forgé la diversité de nos sociétés et remplit des fonctions récréatives, esthétiques et spirituelles qui n’ont pas de prix. Héritage pour les générations futures, il est de notre responsabilité et de notre intérêt de la protéger. Une affaire d’États Le Sommet de la Terre de Rio, en 1992, marque la signature de la Convention sur la Diversité Biologique. Ce traité définit 3 objectifs: la conservation de la diversité biologique, la valorisation durable des ressources et le partage équitable des bénéfices provenant de son utilisation. Dix ans après, en 2002, les États s’engagent à nouveau, lors du Sommet de Johannesburg, à une «réduction substantielle de la perte de la diversité biologique d’ici 2010». La conservation de la biodiversité, qui a pourtant un coût, n’est pas ressentie comme une priorité à court terme dans les stratégies de développement. Cet investissement à long terme doit être partagé dans les efforts de solidarité internationale, pour l’émergence d’une civilisation planétaire écologique et diversifiée. 50% de la surface de la terre a été modifié par l’usage de l’homme, et il n’existe pratiquement plus de territoires véritablement vierges. Un premier geste pour la planète: consommer moins! L’empreinte écologique mesure la pression qu’exerce l’Homme sur la nature. L’unité employée correspond au nombre d’hectares de terre nécessaire pour produire les aliments et le bois que consomment les habitants, l’équipement qu’ils utilisent, et pour absorber le CO2 produit par les combustibles fossiles. Le prix à payer Selon le WWF, si tout le monde vivait comme un Français ou un Suisse, il faudrait 3 planètes. Et si tout le monde avait le mode de vie d’un Américain, il en faudrait 5! La croissance démographique et l’augmentation de la consommation accentuent la pression sur les ressources naturelles et les espaces sauvages. La pauvreté amplifie la spirale de dégradation de l’environnement. «Il ne sert de rien à l’homme de gagner la lune, s’il vient à perdre la Terre.» François Mauriac, écrivain français (1885-1970) PARCOURS Alph@: Des énigmes sur la conscience aux CJB Un sentier didactique et ludique – le Parcours Alph@ – sera mis en place au printemps 2006 par le Réseau romand Science et Cité (RRSC) aux Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève rente-quatre affiches au format mondial vous inviteront à vous dégourdir l’esprit, à vous muscler les neurones, sous le titre Questions de conscience: des énigmes pour petits et grands sur les mystères du cerveau, les illusions d’optique, les perceptions humaines et animales… Petit cousin du célèbre Parcours Vita, le Parcours Alph@, est une sorte de quiz géant, un Trivial Pursuit® en plein air, qui vise à populariser les sciences de la nature et les sciences humaines. Une création collective à laquelle ont collaboré dix-huit musées ou centres de culture scientifique, membres du RRSC. Créé en 2002 à l’initiative de l’Université de Lausanne et de la Fondation Science et Cité, le Réseau regroupe actuellement 31 partenaires des six cantons romands, des institutions qui sont en majorité des musées, mais aussi des hautes écoles, des centres de nature et des jardins botaniques. Le Réseau romand Science et Cité souhaite contribuer à la démocratisation des sciences et des techniques de diverses manières – notamment par la création d’un site Internet qui donne un agenda très complet des manifestations de culture scientifique en Suisse romande (www.rezoscience.ch). Des créations comme le parcours Alph@ montrent qu’il est possible de faire descendre les sciences dans la rue, dans l’espace public, de les faire s’évader des murs des institutions qui les abritent pour les rendre accessibles aux promeneurs. Le Parcours Alph@ a été inauguré en juin 2004 simultanément à Lausanne et à Genève, lors de la Nuit de la science, avec deux premiers modules thématiques: Mystères du quotidien et Matières à réflexion. Démontables et réutilisables, ces installations nomades ont ensuite circulé à Nyon, Neuchâtel, Yverdon-les-Bains et Vevey. Questions de conscience est la troisième thématique développée par le RRSC, à l’occasion du dernier Festival Science et Cité (2005). Il n’a jamais été présenté à Genève. Toutes les énigmes de ces trois parcours thématiques sont en ligne sur le site www.rezoscience.ch, avec des réponses souvent plus développées que sur les panneaux d’affichage. Le Parcours «Questions de conscience» sera présenté au Jardin botanique de Genève du 5 avril au 21 juin. Pour tout renseignement : [email protected] (021 692 20 69) PAGE N° 22 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES ATELIERS VERTS du jardin botanique 1.3.05 Palmiers, dattiers et compagnie 3.5 Jeux de piste dans les rocailles Promenade et observations scientifiques Découvre la diversité des plantes de montagne des quatres coins du monde Expériences au laboratoire de biologie moléculaire des CJB 10.5 8.3 Découverte de la cellule d’une plante et de l’extraction de son ADN Mousse-tic, mousse-haillon, mousse au chocolat… et pourquoi pas mousse tout court! Promenade et observations scientifiques 15.3 Voyage en Amazonie Sensibilisation à la diversité naturelle et culturelle 17.5 Programme 2006 A vos AGENDAS! VARIATIONS BOTANIQUES - VISITES GUIDÉES Le désir d’en savoir plus sur le monde végétal qui nous entoure ou simplement une envie de prendre un bol d’air? Que diriez-vous d’une visite thématique de notre musée vivant et de ses collections par un spécialiste, horticulteur, botaniste ou conservateur? Venez découvrir nos «VARIATIONS BOTANIQUES», les visites guidées thématiques du Jardin botanique Le mardi de 12h30 à 13h30 Programme disponible sur notre site Internet http://www.ville-ge.ch/cjb/ Ces visites sont offertes gratuitement et sur inscription par téléphone (022 418 51 00) ou par email ([email protected]) Les familles sont les bienvenues. Rendez-vous devant la Villa du Chêne (proche du parc aux animaux, entrée nord-est du Jardin botanique, ch. de l’Impératrice 1) 1+1=1, une addition qui est juste… chez les lichens! Découvre des organismes surprenants 22.3 Collectionne les plantes et réalise un herbier (1) 31.5 Récolte et séchage 29.3 Apprends à cuisiner des plantes qui sentent bon Un jardin de légumes oubliés (1) Etonne tes amis en cultivant des plantes potagères menacées 7.6 Prépare des abris et cultive des plantes pour les accueillir 26.4 Collectionne les plantes et réalise un herbier (2) Cactus et succulentes: le monde des plantes à épines A la découverte des plantes des régions désertiques Un jardin pour les insectes 5.4 Des odeurs et des couleurs pour tous les goûts 14.6 Un jardin de légumes oubliés (2) Etonne tes amis en cultivant des plantes potagères menacées Réalisation d’un herbier EXPOSITIONS À LA SALLE DU CHÊNE Le succès des Ateliers Verts est renouvelé chaque année! Le goût des bénévoles de l’Université de troisième âge à transmettre leur passion pour la nature aux plus jeunes n’a d’égal que la curiosité et l’attention que ceux-ci leur démontrent! C’est avec enthousiasme que nous suscitons l’intérêt pour notre environnement et ce travail est jalonné de belles rencontres avec de jeunes vocations: artistes, botanistes, entomologistes, connaisseurs de plantes magiques et j’en passe! 21 mars – 9 avril Claudine de Montmollin 4 juillet – 6 août «Natures calmes» sur bois ancien Valérie Glasson «Comme un herbier» Deux suites gravées: «Sous la voûte des cerisiers en fleurs», «Rouge est le sang de l’érable» «Vibrations», Peintures de fleurs Encres et gouaches 8 août – 27 août 11 avril – 30 avril L’observation, le jeu ou le dessin; multiples seront les moyens interactifs proposés en collaboration avec les médiateurs des CJB pour favoriser la rencontre de nos jeunes participants avec le monde des spécialistes des mousses, des lichens et des palmiers. Côté jardin et ethnobotanique également, nous proposons plusieurs nouveautés grâce à diverses collaborations. Olivier Delhoume Liliane Stucki 2 mai – 21 mai Céramiques Jérôme Blanc Les ateliers verts du Jardin botanique débutent dorénavant en octobre, ceci en collaboration avec UNI3, l’AAJB et le SLJ (D.I.P.) et la collaboration ponctuelle du CAD (HG). Vous trouverez le programme des ateliers de ce printemps ci-dessus. Le programme annuel figure sur un dépliant que vous pouvez obtenir à la réception du Jardin botanique ou auprès d’UNI3, ainsi que sur notre site internet: www.ville-ge.ch/cjb/ Tournage sur bois contemporain Renseignements et inscriptions auprès du secrétariat d’UNI3 les mardi et vendredi matin de 9h30 à 11h30, tél.: 022 379 70 68 13 juin – 2 juillet 29 août – 24 septembre Beat Bäumler & Andreas Gygax 23 mai – 11 juin Yatchi Itoh «Jardin de paradis» «Oiseaux de Suisse» Photographies Présentation du livre («Les oiseaux de Suisse»): Lionel Maumary, Laurent Vallotton & Peter Knaus Wendy Gibbs 26 septembre – 15 octobre «Une année en Provence» Aquarelles botaniques & Master classes Verena Darmon Sculptures LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N ° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N ° 23 FORMATION continue pour les enseignants aux CJB Afin de répondre au mieux à la demande des enseignants, plusieurs modules de formation ont été mis sur pied M. Stitelmann, médiatrice scientifique Fig. 1 Visite interactive du Jardin d’hiver Fig. 2 Transmettre des connaissances relatives aux collections Fig. 3 Aborder l’éducation environnementale et citoyenne en partant de la plante utile ombreux sont les enseignants des trois ordres de l’enseignement public qui nous contactent afin de savoir ce que les CJB proposent en termes d’animation pédagogique et d’aide à la visite des collections. En effet, si la visite de notre musée vivant est agréable et intéressante en soi, faire partager cette expérience à une classe et intégrer cette démarche dans les objectifs pédagogiques est une tâche qui requiert une préparation bien pensée! Le secteur d’Education environnementale répond actuellement à ces demandes de médiation en proposant des modules de formation continue (www.webpalette.ch). Par ce biais, les enseignants sont amenés à guider et animer eux-mêmes la visite de leurs classes. Ils ont ainsi la possibilité d’adapter le contenu et le discours de façon personnalisée à leur projet de classe ou d’école. Au cours d’une journée de formation, nous leur présentons tout d’abord les Conservatoire et Jardin botaniques, leurs rôles, leurs missions. Dans un second temps, nous portons tout d’abord un regard d’ensemble sur les espaces et les collections, puis plus spécifique selon le thème de la formation. Nous abordons ensemble les contenus techniques et scientifiques qui y sont liés. Enfin, des propositions d’activités à réaliser avec les classes leur sont soumises. Les expériences de participants des volées précédentes sont mises en commun. Cette approche favorise les collaborations entre enseignants d’une même école pour des projets multidisciplinaires. En premier lieu, les nouveaux aménagements muséographiques du Jardin d’hiver ont inspiré un programme intitulé «Plantes et société : à la découverte des plantes utiles du Jardin d’hiver». Pour la deuxième année scolaire consécutive, nous avons proposé en février 2005 une journée de formation continue sur ce thème pour les enseignants du primaire genevois. Cette offre permet aux enseignants d’exploiter le Jardin botanique durant la saison froide. RÉPONDRE À L’IMPORTANTE DEMANDE DES ÉCOLES Transmettre des connaissances relatives aux collections aux enseignants, expérimenter ensemble in situ les activités à réaliser avec leurs classes, les rendre le plus autonome possible dans leur visite au Jardin, bénéficier d’un retour d’information de leur part et à l’attention de leurs collègues: la liste des objectifs est longue pour ces intenses journées. Pour approcher les plantes utiles du Jardin d’hiver, histoire, géographie, développement durable et commerce équitable font bon ménage avec la botanique et l’horticulture. De même l’expérimentation sensorielle et artistique avec les mathématiques et les langues. Aborder l’éducation environnementale et citoyenne en partant de la plante utile, c’est aussi favoriser un travail pédagogique élargi qui s’orientera vers un projet d’école, entre deux ou plusieurs classes, voire la constitution d’un groupe de travail pour produire des outils pédagogiques. Plus de 60 enseignants ont déjà participé à cette formation, et une nouvelle session à eu lieu à la rentrée scolaire 05. Nombre d’entre eux sont rapidement passés à la pratique avec leurs classes. Par exemple, Mesdames J. Cornioley et I. Jeanneret, enseignantes à l’école de la Roseraie, ont trouvé un large écho parmi leurs collègues pour un projet sur le thème de la Route des Epices (géographie, histoire, sciences, français, chant, arts plastiques…). Incluant l’école entière durant l’année scolaire 2004-05, le projet a démarré par une visite dans le Jardin d’hiver. Par la découverte des plantes vivantes et de leurs produits, une sensibilisation in situ sur le thème des plantes à épices est proposée aux élèves. A l’école de la Roseraie, l’année a été dense en travail et en réalisations. Madame Cornioley raconte: «… Nous avons quitté les épices après la visite au Jardin Botanique pour nous consacrer à l’élaboration de dossiers de lecture: l’un sur la Route des épices et leur commerce, un autre sur le ver à soie (Route de la Soie) et le troisième sur Marco Polo. Ensuite nous avons travaillé à l’écriture d’une pièce en 5 tableaux qui raconte le voyage de Marco Polo en Orient. L’écriture et la mise en scène ont été faites par les enseignants. Les représentations pour les parents ont eu lieu 2 soirs, les 25 et 26 avril. Ce travail a été titanesque puisque nous avons réalisé une partie des costumes et des décors (dans notre salle de gym) avec l’aide des maîtres spécialistes. Certains costumes ont été empruntés au Grand Théâtre. Avec la maîtresse de couture, les élèves ont confectionné des coussins en soie et batik (teintures végétales), et des classeurs recouverts de jute brodée pour y mettre les dossiers étudiés. Ils ont aussi fait divers bricolages avec l’enseignante de travaux manuels (une partie des accessoires pour la pièce ont été faits avec ses élèves). Une petite exposition de ces travaux d’élèves a été réalisée. Le professeur de gymnastique a travaillé les numéros de jonglage et les chorégraphies de batailles avec les enfants. Notre professeur de chant a travaillé la musique et les percussions avec eux. Enfin, une collègue douée en danse a proposé et fait travailler les chorégraphies des danses (arabes et des ombrelles chinoises)… Ainsi, en fin de compte, le départ «épices» nous a mené dans une aventure beaucoup plus large! Nous avons surtout travaillé la lecture, la compréhension écrite et orale, l’expression orale, l’apprentissage par coeur (textes de la pièce), la collaboration et la discipline dans le groupe, la posture et la tenue (et la patience!). Nous espérons aussi avoir développé l’imaginaire et nourri la culture générale des élèves!». Dans une autre école, deux enseignants ont travaillé ensemble avec deux classes de degrés différents (E et 6P). Ils ont fait des plantations en classe, et le travail de l’année a culminé par une visite interactive du Jardin d’hiver sur le thème des fruits et des épices. Chaque petit élève à la main d’un grand, les enfants sont partis à la découverte d’une plante utile munis d’une photographie récente. Une fois cette plante trouvée, ils ont goûté un produit provenant de cette plante. Au cours de ces visites de classe, les classes ont souvent l’occasion de rencontrer les horticulteurs(trices) du secteur des serres. C’est toujours un moment très riche pour les élèves. Il arrive qu’une gousse de vanille soit prête à être cueillie, ou qu’un régime de banane caché derrière le feuillage soit dévoilé aux enfants, enchantés. Faire la connaissance de la personne qui fait pousser la plante qu’ils viennent découvrir (le vanillier par exemple) suscite chez les enfants un intérêt accru. Une fois, un petit garçon soudain s’est exclamé : «…mais, comment elles poussent les plantes ?…»! Quelque chose s’est passé pour lui au cours de cette visite ; notre objectif est atteint. PAGE N° 24 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES «l’ART et les ENFANTS» NOUVELLE OFFRE DE FORMATION CONTINUE POUR LE CYCLE D’ORIENTATION Les enseignants du secondaire sont également demandeurs de formation continue aux Conservatoire et Jardin botaniques car ils souhaitent pouvoir proposer à leurs élèves des visites et des activités en lien avec le monde végétal. Pour la première fois plusieurs cours à leur attention figurent au programme de la rentrée 05, grâce à la collaboration des intervenants qui développeront les intitulés suivants: Utiles tropiques; Identification des plantes; Initiation à l’apiculture; Ethnologie, matériaux et botanique (ce dernier en collaboration avec le Musée d’Ethnographie). LA COLLABORATION CJB – DIP AU BÉNÉFICE DES CLASSES D’ACCUEIL DU CO EST RELANCÉE Toujours au secondaire, les classes d’accueil visitent beaucoup les CJB. En effet, pour les enseignants qui souhaitent favoriser l’intégration et l’apprentissage chez les jeunes qui arrivent à Genève de tous les pays du monde, le Jardin botanique est un support pédagogique privilégié. Le végétal est omniprésent dans la vie quotidienne de chacun, sur tous les continents! Notre Direction a reçu une demande de la part de M. Gianadda, coordinateur des classes d’accueil du Cycle d’Orientation du Canton, pour que des activités conjointes soient reprises. En effet, plusieurs projets avaient été développés par le passé (Roguet, D., 2004). Plusieurs enseignants ont continué à pratiquer les modules mis sur pied précédemment. Ils souhaitaient les remettre à jour, voir proposer de nouvelles idées. D’autres, novices aux CJB, avaient exprimé un intérêt et des attentes. Leur coordinateur et le secteur d’Education environnementale du Jardin botanique les ont donc invités à une réunion préliminaire. Au cours de celle-ci, il a été convenu qu’un groupe de travail sera formé à la rentrée. Celui-ci définira des objectifs et fera des choix pour préparer des outils pédagogiques à l’attention de l’ensemble des enseignants de classes d’accueil. Ces outils une fois prêts, un module de formation continue in situ pourrait être proposé aux enseignants des classes d’accueil du CO qui souhaiteront les utiliser, afin de les aider à en prendre possession. Bibliographie Roguet, D. (2004). Education environnementale aux CJB et instruction publique. La Feuille Verte no 34: 32-33. Une journée de formation a eu lieu le 1er septembre 2004 aux Conservatoire et Jardin botaniques à l’attention des maîtres spécialistes du Service d’art visuel, rythmique et musique du Département d’expression plastique du DIP ne journée de formation a eu lieu le 1er septembre 2004 aux Conservatoire et Jardin botaniques à l’attention des maîtres spécialistes du Service d’art visuel, rythmique et musique du Département d’expression plastique du DIP. Après le départ à la retraite de Monsieur M.-A. Thiébaud, conservateur, les stages proposés avec sa participation scientifique dans le cadre de «l’Art et les Enfants» n’ont pu être maintenus au programme. Il s’agissait dès lors de mettre en commun les envies respectives des enseignants et des médiateurs pour renouveler l’offre de stages au Jardin botanique. Dans un premier temps, les enseignants des différentes disciplines artistiques se sont réunis avec les médiateurs des CJB afin d’explorer ensemble les propositions et envies respectives. Nous leur avons présenté notre musée vivant, ses espaces et ses collections. Nous avons abordé quelques thématiques d’approche au végétal de notre intérêt. Ensuite, les enseignants ont travaillé en groupe pour élaborer des concepts de projet en fonction de leurs spécialités, et développer la partie logistique. Après cette journée de travail en commun, le suivi nécessaire pour concrétiser ces projets a été mené à bien. La section du Jardin a répondu favorablement à la demande de collaboration pour la mise en place d’un espace planté spécifiquement pour ces projets. Les efforts fournis de part et d’autre ont enfin permis d’offrir trois nouveaux stages aux classes genevoises qui figureront dans le catalogue de «l’Art et les Enfants» 05-06. Un premier stage alliant Education Nouveaux projets pédagogiques M. Stitelmann, Med-SCI la sensibilisation au végétal avec les arts visuels, l’éducation musicale et la rythmique s’intitule «À l’écoute des Aulnes glutineux et du Micocoulier goulu». Pour ce projet, un espace interactif – jardin musical – a été planté par le secteur EEGD du Jardin, le long de la route qui longe les voies CFF. Un deuxième stage intitulé «Art floral» proposera aux classes du dessin d’observation dans les collections vivantes et les mènera dans un deuxième temps au Musée de l’Ariana, pour y découvrir les motifs de l’Art floral dans la collection de céramique. Enfin, le stage intitulé «Le tapis de saison» donnera aux élèves l’occasion de redécouvrir les matériaux végétaux tels que feuilles, pives, pétales, morceaux de branches, pour réaliser une œuvre d’art impermanente. ÉCOLES/ MUSÉES Le numéro précédent de la «Feuille verte» annonçait la mise sur pied de la Commission écoles – musées (DIP – DAC) La création et mise en ligne d’un portail Internet était la première des tâches que ce groupe proposait de réaliser afin d’atteindre ses objectifs. (Lire FV no 35, p. 35-36). Le 25 avril 2005, le site a été officiellement lancé. S’il est conçu en premier lieu pour les enseignant-e-s, il s’adresse également à tout amateur de musée. Ce site donne les dernières informations en matière de projets écoles- musées, des adresses et des idées pour visiter les musées de la Ville de Genève. A visiter: www.geneve.ch/ecoles-musees/ Le groupe de travail diffuse également une feuille d’information périodique, «Antenne», disponible sur le site en question. Pour s’abonner, vous êtes prié d’envoyer votre adresse électronique à: [email protected] LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N ° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N ° 25 RÉTROSPECTIVE & PERSPECTIVES La Flore de la Suisse EN LIGNE Une mise à jour importante de l’Atlas de distribution de la flore de Suisse disponible sur le nouveau site internet du CRSF hargé de centraliser l’ensemble des données floristiques de notre pays, le Centre du Réseau Suisse de Floristique (CRSF) s’est aussi donné comme objectif la valorisation des informations contenues dans sa base de données, ce qu’il effectue par le biais de publications telles que la seconde édition de la Liste rouge [1], les Fiches pratiques pour la conservation d’espèces rares et menacées de Suisse [2] ou encore l’Index synonymique de la Flore de Suisse[3], dont une seconde édition est actuellement en préparation. Le site internet du CRSF [4] est son autre vitrine sur l’extérieur. Une version entièrement remaniée du site est prévue pour l’automne 2005 : outre des informations générales sur le CRSF, il offrira au public diverses données scientifiques liées aux plantes suisses telles que leur écologie, leur degré de menace et de protection ou encore leur synonymie. Pour certaines d’entre elles, des photographies seront également visualisables, leur nombre devant augmenter avec le temps. Une nouveauté importante du site sera également la possibilité de consulter en ligne les cartes de distribution des espèces de la flore de Suisse, qui seront présentées sous deux formes. Le premier type de cartes reprendra les données de l’Atlas de distribution de Welten & Sutter [5] (qui constitue toujours la référence plus de 25 ans après sa parution), tout en y intégrant les informations plus récentes (figure 1). Cependant, la distribution des espèces sur ces cartes étant basée sur des secteurs «naturels» de 60 à 100 km2 de superficie, elles ne permettent pas de mettre à profit la précision des données actuelles stockées dans la banque de données du CRSF. Ces données y sont en effet enregistrées avec leurs coordonnées géographiques précises. Pour remédier à cette lacune, un second type de cartes a donc été élaboré, présentant les données selon un maillage de 4 km x 4 km (figure 2). Les données «secteurs naturels» des cartes de l’Atlas y ont été converties en points, leur nombre pour un secteur donné correspondant au nombre de mailles qui le recouvrent. Pour les données de l’Atlas, l’intérêt d’une telle conversion semble limité, si ce n’est que les cartes sont ici basées sur un système de mailles toutes identiques de 16 km2 plutôt que sur des secteurs hétérogènes. Mais le réel avantage de ces cartes est de permettre de cartographier toutes les nouvelles données reçues beaucoup plus finement que ne le permettait le système de secteurs de l’Atlas. Cette précision accrue met par ailleurs en valeur le travail effectué par les nombreux botanistes de terrain du pays dans des cadres divers: inventaires fédéraux (comme le Monitoring de la biodiversité en Suisse [6] ou l’Inventaire des prairies sèches [7]) ou cantonaux (par exemple Genève [8]), travaux scientifiques (Bâle [9], Fribourg [10], Neuchâtel [11]) ou tout simplement herborisations de bénévoles soucieux de communiquer leurs découvertes. A noter que ce nouveau service proposé sur internet en trois langues se fait en accord avec «swiss web flora» [12], qu’il A A J B 2004 – 2005 RETROSPECTIVE AAJB 2004 – 2005 Cours B. Bäumler, directeur remplacera à terme. L’élaboration d’un nouveau cadre pour la cartographie des espèces de la flore suisse pourrait d’ailleurs être le point de départ pour un nouvel inventaire au niveau national. Il est permis de rêver… 1. MOSER, D., A. GYGAX, B. BÄUMLER, N. WYLER & R. PALESE (2002). Liste Rouge des fougères et plantes à fleurs menacées de Suisse. Ed. Office Fédéral de l’Environnement, des Forêts et du Paysage (OFEFP), Berne; Centre du Réseau Suisse de Floristique (CRSF), Chambésy; Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève (CJBG), Chambésy. Série OFEFP «L’environnement pratique». 2. KÄSERMANN, C. & D. M. MOSER (1999). Fiches pratiques pour la conservation – Plantes à fleurs et fougères. OFEFP, série «L’environnement pratique». 3. AESCHIMANN, D. & C. HEITZ (1996). Index synonymique de la flore de Suisse et territoires limitrophes. CRSF/ZDSF. 4. http://www.crsf.ch 5. WELTEN, M. & R. SUTTER (1982). Atlas de distribution des Ptéridophytes et des Phanérogames de la Suisse. 2 tomes. Birkhäuser, Bâle. 6. http://www.biodiversitymonitoring.ch 7. EGGENBERG, S., T. DALANG, M. DIPNER & C. MAYER (2001). Cartographie et évaluation des prairies et pâturages secs d’importance nationale. Rapport technique. Série OFEFP «Cahiers de l’environnement». 8. THEURILLAT, J.P. & C. LATOUR (à paraître). Atlas de la flore du canton de Genève. WWF Genève – Soc. Bot. Genève – CJBG. 9. BRODTBECK, T., M. ZEMP, M. FREI, U. KIENZLE & D. KNECHT (1998). Flora von Basel und Umgebung 1980-1996. Teil I+II. Verh. Naturf. Ges. Basel 2+3. 10. PURRO, C. & G. KOZLOWSKI (2003). Flore de la ville de Fribourg. Société fribourgeoise des sciences naturelles, Fribourg. 11. PAROZ, R. & M.-M. DUCKERT-HENRIOD (1998). Catalogue de la Flore du Canton de Neuchâtel. Editions du Club Jurassien, Neuchâtel. 12. http://www.webflora.ch Connaissance des champignons Les 18, 25 octobre et 1er novembre 2005, sortie le 22 octobre, avec la Société Mycologique de Genève Détermination des plantes Les 2, 9, 23 et 30 mai, 6 et 13 juin, avec Laurent Burgisser Détermination des bourgeons le 24 février 2005 avec Laurent Burgisser Voyages et autres sorties botaniques Dardagny, l’automne dans les vignes «4-Saisons» octobre 2005, avec Christine Kürsner Heurs et malheurs des plantes ligneuses en ville (Lausanne) septembre 2005, avec Alain Dessarps et Bernard Messerli Lötschberg 30-31 juillet 2005, avec Robert Badoux et Christian Guerne Dardagny, l’été dans les vignes «4-saisons» 9 juillet 2005, avec Christine Kürsner Distillerie de Bassin 2 juillet 2005, avec Bernard Messerli Les Colombiers, plantes méditerranéennes 18 juin 2005, avec François Roman et J.-P. Frez Dardagny, le printemps dans les vignes «4-Saisons» 30 avril 2005, avec Christine Kürsner et Christiane Guerne l’Etournel, sortie bourgeons 6 mars 2005, avec Laurent Burgisser et Ariane Cailliau Le Rhône (les Tattes de Verbois) «4-Saisons» botanique et ornithologie, 27 novembre 2005, avec Roméo Gex, Daniel Vité et André Schlüssel Coups de cœur du jeudi Ceux qui ont bâti la science du végétal 9 décembre 2004, avec Joëlle Magnin-Gonze Tour des modes (de multiplication des plantes) en 80 minutes 18 novembre 2004, avec Bernard Messerli Le Bhoutan 14 octobre 2004 avec Christiane Guerne PERSPECTIVES: PROJETS AAJB 2005 – 2006 Cours Détermination des arbres en hiver par les bourgeons 15 février 2006, avec Laurent Burgisser Flore et végétation des Alpes Les 7, 14 et 28 février 2006, avec David Aeschimann Détermination des plantes au printemps 2006 * Voyages et autres sorties botaniques Fig. 1 Exemple de carte de répartition par «secteurs naturels» Arboretum d’Aubonne sortie écorce, 26 novembre 2005, avec Bernard Messerli Dardagny, l’hiver dans les vignes «4-Saisons» février 2006, avec Christine Kürsner Pâturages boisés au Marchairuz 17 juin 2006, avec Pascal Vito et Bernard Messerli * Les dates seront fixées ultérieurement. On les trouvera sur le site www.cjb.unige.ch (puis Hôtes, puis AAJB) Fig. 2 Exemple de carte de répartition par mailles de 4x4 km Sortie du cours de détermination, juin 2005 PAGE N° 26 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Vous en prendrez bien une TRANSE… Partenaires AAJB – Le billet du président «Transdisciplinaire», «transcende», «transversalité». Ces trois mots transités au hasard des discours qui ont marqué le vernissage de l’exposition «Ambiguë, la relation planteinsecte» ont subi un transfert particulier en mon attention transitoire B. Messerli, président a thématique de l’exposition est par essence transdisciplinaire, puisqu’elle se trouve entre deux mondes, celui des insectes et des plantes». Le philosophe Basarab Nicolescu (dans son livre «La transdisciplinarité») en a donné une définition large : «La transdisciplinarité concerne ce qui est à la fois entre les disciplines, à travers les différentes disciplines et au-delà de toutes disciplines». Ce qui joue assez bien, en l’occurrence, puisque la présentation (botanique et entomologique ; francosuisse) a suscité des collaborations avec des acteurs de secteurs culturels, éducatifs, ludiques… «Allégorie de la vie, la relation plante-insecte est complexe et pleine d’ambivalence. Elle transcende notre vision de la nature…». Nous voilà ici projetés dans un état supérieur, difficultés extrêmes, forment ce que l’on nomme des interprofessions, interfaces entre milieux de la production, de la transformation et de la distribution. Au moment où je m’apprête à passer la main côté présidence de l’AAJB, je repense à ces fructueux échanges, transferts de connaissances entre naturalistes de tous poils. Comme fugacement expliqué lors de notre assemblée générale, dans un esprit «trans», j’avais imaginé la mise en place d’une plateforme entre sociétés sœurs. Le projet n’a pas émergé. D’une vision positive, on peut se dire que la situation n’exige pas de trans et que l’on peut encore se contenter de cis (chacun de son côté). Le brassage de réflexions autour de feu la plateforme tricéphale est en passed’induire un effet cis-trans, promesses de nouvelles synergies. Sic transit… au-delà de l’approche habituelle, nous dégageant des principes de base, des habitudes de conception… Quitte à transpirer un peu! «En marge de l’exposition, des «butinages» proposent de compléter notre regard par des moments de transversalité culturelle que nous espérons populaires, décalés, informatifs et ludiques». Sûrs qu’ils seront décalés dans leur axe; à 90 degrés, pour répondre à la transversalité. Voici maintenant la raison de ma «transe» réflexive. L’exposition, dans sa riche complétude, reflète bien le transvasage des trois vocables susmentionnés, confirmant que l’union fait non seulement la force, mais aussi la beauté, subtilité, pédagogie et autres bénéfices. Cela me conforte un peu quant aux sentiments tirés de trois ans d’observations chez les agro-bipèdes qui, face à des Relation plante-insecte au Jardin botanique Rapports AMICAUX ou MASOS entre asticots et végétaux «AMBIGUË, La relation plante-insecte»: sous ce titre plein de promesses, les CJB ont proposé une exposition assortie de présentations satellites, sous le signe de la transversalité e qui différencie la plante de l’animal, c’est la mobilité. Les plantes ont souvent utilisé les insectes pour compenser leur manque en ce domaine». Le directeur des Conservatoire et Jardin botaniques de Genève (CJB) ajoute qu’on ne peut parler de physiologie ou de biologie végétale sans aborder ces sciences sous l’angle animal. «Lorsque disparaît une espèce végétale, on perd une dizaine d’espèces animales, voire plusieurs dizaines pour les arbres». Pour faire ressentir la diversité de ces rapports pleins d’ambiguïtés, les responsables de l’exposition ont utilisé, façon comptine, une série de phrases imagées: «Tu me plais. Je te hais. Tu es le soleil de mes jours. Je suis le bonheur de tes nuits…». Les panneaux didactiques sont plus explicites: «A travers un cheminement dans notre serre tempérée, nous vous proposons de découvrir les différentes facettes de la relation plante-insecte. Laissez- vous émerveiller par ce monde d’interactions, où l’animal et le végétal rivalisent d’astuces pour gérer leurs conflits ou établir des alliances». Côté conflits, on met en avant les explosions démographiques du criquet pèlerin en Afrique du nord, du hanneton dans nos régions et du phylloxéra sur les racines des vignes. Sans entraide, pas de fruits se présente principalement sous la forme de nectar… Au gré de leur butinage, ces visiteurs transporteront malgré eux le pollen entre fleurs de même espèce, assurant ainsi la reproduction croisée des plantes». A ce sujet, Matthieu Perret, commissaire scientifique de l’exposition, précise que sans les pollinisateurs on ne mangerait ni pomme ni cerise. Ce chercheur et son équipe sont un peu les pères spirituels de la manifestation. A force de chercher les molécules responsables de l’attraction des colibris, abeilles et chauves-souris par un groupe de plantes (les gesnériacées) dans le but d’expliquer la co-évolution animal-plante, ces spécialistes ont stimulé et encadré les présentations. Côté alliances, on mentionne «Le cas d’entraide le plus célèbre est le rôle pollinisateur de nombreux insectes. Ceux-ci cherchent dans les fleurs leur source de nourriture qui «Ce qui réjouit, c’est la transversalité!». Le conseiller municipal à la tête de la culture genevoise, Patrice Mugny, relève les multi- Avec un éclairage particulier sur ce dernier point en montrant le greffage de vignes européennes, sensibles au puceron des racines, sur des pieds américains résistants; illustration de la sélection agronomique orientée vers des plantes résistantes, sinon tolérantes aux attaques de ravageurs. ples collaborations (Jardin botanique de Lyon, Université de Neuchâtel, Papiliorama de Chiètres…) qui ont permis la richesse et diversité offertes au public. On mentionnera notamment Concordances, photos prises au microscope électronique à balayage par Jean Wüest du Muséum d’histoire naturelle qui fascinent par l’analogie de structure entre des détails observés sur l’œuf et la graine, les poils et les crochets de feuilles et de pattes… Quant à ceux qui auront voulu se prendre pour un insecte abordant le monde végétal, ils n’auront pas eu besoin de se réduire comme Alice au pays des merveilles et de se blottir sous une touffe de graminées, les étonnantes photos d’Humerose leur auront facilité l’exercice! LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N ° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N ° 27 Les FERMES de l’ARCHE ProSpecieRara Ni zoo, ni cabinet de curiosité animale, les «Fermes de l’Arche» ProSpecieRara offrent à tous ceux qui s’intéressent aux animaux rares l’occasion d’aller à leur rencontre dans une exploitation agricole as d’observation derrière des barrières d’exposition, mais un moment de partage avec les animaux et leurs éleveurs. Les Fermes de l’Arche sont des exploitations agricoles qui intègrent le travail de sauvegarde de races animales et de variétés végétales menacées au sens de ProSpecieRara. Elles proposent des activités didactiques à la découverte du monde fascinant des animaux de rentes et des plantes cultivées. Elles offrent également à la dégustation et en vente directe de savoureux produits issus de leur exploitation. Ce projet a été inauguré officiellement en mai 2005, avec la pose de la première enseigne «Ferme de l’Arche ProSpecieRara» à Düderhof dans le canton de Lucerne. En Suisse romande, l’exploitation la «Licorne bleue» c’est jointe à ce réseau. Cette ferme, située à La Joux, dans la Glâne fribourgeoise, au carrefour entre Romont et Bulle, offre un magnifique panorama qui s’étend de l’Oberland bernois jusqu’au Mont-Blanc. Ce domaine est exploité par deux femmes: Evelyne, qui travaille partiellement en tant que psychologue à l’université de Fribourg, et sa fille Tatjana, qui a son atelier de céramiste sur place. Elles proposent un projet pédagogique, thérapeutique et divertissant, une manière «d’alphabétiser les ignorants de leurs émotions et de celles des autres en développant leurs compétences émotionnelles et relationnelles». Les animaux sont au centre de cette approche et en particulier les races menacées ProSpecieRara réputées pour leur calme et leur docilité (cheval des Franches-Montagnes originel, cochon laineux, skudde, chèvre d’Appenzell, chèvre paon, oie de Diepholz, canard de Poméranie, poule appenzelloise huppée et barbue). A la «Licorne bleu», tous les animaux peuvent être caressés, pour autant que le bien-être soit réciproque. La ferme est ouverte au public le premier week-end de chaque mois, de 14h à 15h45. Sur demande, il est possible de participer à des veillées de contes, des sorties à cheval ou des cours de céramique. Il est également possible de loger sous tipi et, durant les vacances scolaires, de participer à des camps. 1 D. Gautier, antenne romande PSR Ce vaste programme a été présenté en mai dernier à «Cropettes en campagne», une manifestation organisée dans le parc se trouvant derrière la gare de Cornavin. Une occasion de mettre en relation le rat des villes avec son frère des champs et durant laquelle les canards de Poméranie des Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève (CJB), qui avaient fait le déplacement pour l’occasion, ont fait la joie des petits et des grands. POUR EN SAVOIR PLUS Localisation et adresses complètes des différentes Ferme de l’Arche ProSpecieRara sur le site: www.ville-ge.ch/cjb/psr/fermedel’arche 2 3 1 «Cropettes en Campagne»: Les canards de Poméranie des CJB 2 La «Licorne bleue», une Ferme de l’Arche ProSpecieRara 3 «Cropettes en campagne»: Jeu de Memory géant PAGE N° 28 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Un SUPPORT PÉDAGOGIQUE pour les écoles de la VILLE DE DAKAR A. Traoré coordinatrice du CEEH M. Stitelmann médiatrice scientifique Une application pratique et interactive des cours scolaires RAPPEL HISTORIQUE e Jardin botanique de Dakar fut créé en 1934 par l’ingénieur Guy Marcailloux originaire d’Arméric pour développer l’introduction et la recherche sur l’acclimatation d’espèces végétales en Afrique Occidentale Française. De nombreuses espèces y transitèrent pour être ensuite envoyées à l’intérieur du pays et vers les pays voisins. En 1950, le jardin botanique fut placé sous l’autorité du Gouverneur général de l’A.O.F (Afrique Occidentale Française). Ce jardin botanique est situé au sein des Parcs Forestier et Zoologique de Hann (PFZH) dont il fait partie intégrante, lesquels dépendent du Ministère de l’Environnement. Il a été laissé à l’abandon pendant plus d’une décennie, puis a été réhabilité grâce à l’appui de la Mairie de Genève par le biais des Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève (CJBG), ce dans le cadre du programme cadre pour un développement durable au Sud. Un ancien bâtiment a également été réhabilité pour abriter le Centre d’éducation à l’environnement du Parc de Hann (CEEH). PRÉSENTATION DU JARDIN ETHNOBOTANIQUE Le Jardin s’étend sur deux hectares et il est entretenu actuellement par six jardiniers dont trois sont subventionnés par la Ville de Genève. Aujourd’hui, ce jardin botanique se consacre principalement à la présentation de plantes utilisées par l’Homme, et des différentes utilisations qu’il en fait. C’est pourquoi il a été renommé Jardin Etnobotanique. Comme le montre le plan ci-dessous, treize secteurs thématiques y ont été mis en place selon la proposition de MM. Raymond Tripod et Didier Roguet respectivement Jardinier chef et Conservateur - Ethnobotaniste aux CJB. De nombreuses espèces ont été introduites pour y être conservées et présentées au public. Dûment étiquetées et documentées par des panneaux explicatifs, ces collections permettent aux visiteurs de renforcer leurs connaissances sur le monde végétal. Le Jardin Ethnobotanique commence donc maintenant à remplir une de ses fonctions à savoir l’éducation des populations et en particulier des jeunes. Sa réhabilitation et le renforcement de sa collection botanique vivante, en harmonie avec les différentes conventions internationales en particulier celle de Rio, contribueront à améliorer le cadre de vie des populations, à préserver et à conserver la diversité biologique. LES ACTIVITÉS PÉDAGOGIQUES DU CEEH AU JARDIN ETHNOBOTANIQUE Le Jardin Ethnobotanique du Parc de Hann, à l’image des autres jardins botaniques du monde, abrite des collections vivantes de végétaux à des fins d’éducation mais aussi de conservation, de recherche scientifique et d’exposition, d’où l’importance des visites qu’il reçoit. Les collections du Jardin Ethnobotanique de Hann permettent aux professeurs d’élargir leurs enseignements par une application pratique et interactive de leurs cours. De nombreux enseignants et élèves visitent le Jardin Ethnobotanique et y réalisent différentes activités proposées par le personnel du CEEH. En voici quelques-unes: – Atelier de jardinage avec les élèves au niveau de la maternelle (apprendre aux enfants comment préparer la terre, semer une graine et récolter des fruits ou légumes) Coopération Le Jardin Ethnobotanique du Parc de Hann : – Séquence pédagogique sur l’importance des arbres, en tant que plantes alimentaires, médicinales, et productrices de bois d’œuvre, de service et de chauffe – Séquence pédagogique sur les menaces qui reposent sur certaines plantes (plantes à protéger pour la Conservation de la biodiversité) – Séquences pratiques lors de Travaux Pratiques (TP) de biologie et de botanique, ou récolte de matériel végétal pour la confection d’herbiers ou TP – Exercices d’identification d’espèces végétales, ou transmission des savoirs sur certaines espèces Plus de 24 enseignants et 850 élèves ont bénéficié de l’offre pédagogique de l’équipe du CEEH et son Jardin Ethnobotanique, soit visites, ateliers et pratiques botaniques, de janvier à avril 2005. Ils ont étudié les plantes utilisées en médecine traditionnelle au Sénégal, les plantes de cueillette et les espèces fruitières et forestières. L’accueil pédagogique comprend aussi bien un enseignement en botanique et biologie, que la transmission de pratiques horticoles et la sensibilisation à l’omniprésence du végétal dans notre vie quotidienne et l’importance de sa sauvegarde. D’autres visiteurs ont été reçus récemment au Jardin Ethnobotanique de Hann, qu’il s’agisse de visites officielles, ou émanant d’instituts, ou encore de la population dakaroise en général, par les soins du responsable du Jardin ou ceux des jardiniers qui l’entretiennent. Nous souhaitons élargir cet accueil afin de toucher un public le plus large possible. Plan du jardin botanique LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES – N ° 36 – DÉCEMBRE 05 – PAGE N ° 29 Projet «Etnobotanica PARAGUAYA» (EPY) Cultivons pour conserver: des pépiniéristes en formation pour consolider leurs «pharmacies communautaires» epuis 2001, le projet «Etnobotánica Paraguaya – EPY» soutient la formation de nombreux pépiniéristes membres de l’organisation nommée Tesaî Reka Paraguay – TRP (ce qui veut dire «à la recherche de la santé»). EPY est largement subventionné par la Ville de Genève dans le cadre du Programme cadre pour un développement durable des Conservatoire et Jardin botaniques. Par l’intermédiaire de la Croix-Rouge Suisse au Paraguay, EPY est rentré en contact avec cette organisation TRP dans le but de fournir un soutien pour la culture de plantes médicinales, et l’établissement et la gestion de jardins communautaires de plantes médicinales. Le siège de TRP se situe dans le département de San Pedro (Punta Suerte-San Estanislao), au nord du pays. Les membres d’EPY planifient au début de chaque année les ateliers qui seront réalisés, ainsi que les visites de supervision des jardins. Une partie des modules de formation est conduite dans la collection médicinale centrale, située au sein du Jardin botanique de la Ville d’Asunción. La formation y est assurée par le personnel du Centre d’éducation et de conservation environnementale (CCEAM) de la Direction Environnementale de la Ville d’Asunción. A ses débuts, avec 19 organisations communautaires, TRP démarra en tant que Programme pour la promotion de la santé communautaire. Aujourd’hui, TRP est devenue une organisation non gouvernementale (à but non lucratif), qui regroupe 27 organisations réparties dans sept départements de la région orientale du pays. A. Pin (EPY), G. González (EPY) J. Parra (TRP) Paraguay M. Stitelmann (CJB) traduction Les objectifs de Tesaî Reka Paraguay sont de conserver les connaissances et de promouvoir l’utilisation des plantes médicinales ; d’établir des jardins de plantes médicinales pour que les familles et les communautés disposent de leurs propres «pharmacies» et sachent utiliser correctement les plantes qui y poussent, en fonction des besoins qui se présentent au quotidien, conservant par là-même cette pratique culturelle paraguayenne de grande valeur. Pour 2005, TRP a décidé de réorganiser la coordination des jardins de plantes médicinales. Ceux-ci dépendent désormais du département de production de TRP. De plus, six jardins régionaux situés géographiquement à équidistance ont été choisis pour y mener les formations. Cette nouvelle organisation facilite les déplacements pour les supervisions de travaux et les journées de formation des pépiniéristes. De plus, il est ainsi possible de concentrer les efforts pour conserver des espèces indigènes représentatives des différents milieux naturels de chaque région. Au cours de l’année écoulée, trois modules de formation d’une durée de trois jours chacun ont eu lieu à San Pedro et Asunción alternativement. Des visites techniques de suivi ont été réalisées auprès des jardins de plantes médicinales de Caaguazu, Canindeyu, Concepción, San Pedro et Itapua. Au cours du mois de juin 2005, le contenu des modules de formation a été revu et mis à jour, ce avec la participation de Madame Dominga Noguera. Dirigeante communautaire, technicienne en médicine naturelle et agent promoteur de santé de TRP, elle a été désignée par Tesaî Reka Paraguay tout particulièrement pour travailler ce sujet avec l’équipe du projet EPY. PAGE N° 30 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES BRÈVES ACTUALITÉS «Flore-Alpe» «La Linnaea» À L’HONNEUR A Aigle, du 20 au 24 avril, s’est tenue la 9e édition du Comptoir d’Aigle et du Chablais R. Tripod, Chef jardinier 6e réunion du réseau EUNOPS Les 27 et 28 mai 2006, la sixième réunion du réseau EUNOPS (European Network of Palm Scientists) aura lieu aux Conservatoire et Jardin botaniques de la Ville de Genève F. Stauffer, conservateur et évènement, qui se tient chaque année dans un pays européen différent, réunira les spécialistes de la famille Palmae les plus renommés de ce continent. L’objectif principal de la réunion est l’échange de connaissances scientifiques associées au groupe des palmiers, sur divers thèmes allant de la phylogénie moléculaire à la biologie structurale et l’écologie. L’événement représente une tribune importante non seulement pour les chercheurs confirmés mais également pour les étudiants de master et de doctorat des universités européennes. EUNOPS a été créé en 2001, et depuis cette date le réseau s’est réuni chaque année au Danemark, en Angleterre, en Espagne et en France. Des chercheurs de quelque 12 pays européens ont ainsi eu l’occasion de présenter des résultats intermédiaires de la recherche qu’ils mènent sur le groupe des palmiers. S’il s’agit effectivement d’une réunion de chercheurs européens, les résultats obtenus le sont hors limites géographiques et incluent tous les palmiers du monde, particulièrement de régions à grande diversité taxonomique comme les zones tropicales asiatiques et américaines. ette manifestation organisée tous les deux ans, a rassemblé quelques 180 exposants de tous les milieux de la région. Hôte d’honneur: le Pays du Saint-Bernard. Sur une plate forme réservée, l’office du tourisme réunissant les Communes d’Orsières, Liddes, Bourg-Saint-Pierre, La Foully et Champex, regroupait la promotion de l’Entremont. Au cœur de l’exposition, les vallées d’Entremont et de Ferret disposaient d’une grande surface pour les activités locales, la mise en valeur du patrimoine, les coutumes et spécialités du terroir montagnard. Un espace idéalement placé, dans un passage obligé, a été le théâtre d’animations temporaires et de productions ponctuelles : l’artisanat, la fromagerie d’alpage, l’apiculture en altitude, les coutumes et chorales, etc. Le plateau de présentation des incontournables chiens de race de l’Hospice du Grand-SaintBernard n’échappait pas aux regards attendris des visiteurs et une porte ouverte du Fort de Champex illuminant les yeux des anciens, livrait quelques secrets aux plus jeunes. La devanture de cette cour d’honneur a été proposée aux deux jardins alpins valaisans avec lesquels les CJB entretiennent d’étroits liens, une opportunité de composer ensemble et de réaliser à trois un stand commun de valorisation des sites. De plus, la richesse de la palette florale printanière permettait, sans difficulté, la garniture colorée d’un aménagement paysager rocailleux. Les idées réunies, le projet planifié, Jean-Luc Poligné, responsable à Flore-Alpe, a rassemblé la majeure partie des matériaux et sélectionné un assortiment de plantes saxatiles de la collection en poterie. Une délégation de l’équipe des rocailles des CJB, tout en assurant la logistique et l’apport des végétaux ligneux en bacs a prêté main forte à la mise en œuvre. A très peu de frais, un bijou en résultat et une carte postale de deux clins d’oeils juxtaposés de ces jardins en altitude. Saxifrages et autres genres des rochers pour l’un, assortiment de la flore locale pour l’autre, les deux entités mariées laissaient aisément deviner leur complémentarité. Durant la manifestation, chacun des partenaires s’était engagé à une présence ponctuelle de diffusion d’informations. De l’expérience dans cette exposition à caractère essentiellement commercial et agricole, nous retenons l’exemplaire respect des visiteurs qui se sont attardés sur les quelques 10 m2 de ces jardins en miniature. A portée de mains, sans protection, aucune plante, aucune étiquette n’a été déplacée ou prélevée et les posters, pourtant situés dans les accès, n’ont pas été endommagés. Visiblement, un témoignage d’intérêt de la population s’est dégagé envers notre participation commune. Cela n’a pu être que bénéfique à une fréquentation accrue à «Flore-Alpe» et à «La Linnaea» durant toute la saison. Merci aux organisateurs de l’événement de nous avoir proposé un rôle promotionnel. PAGE N° 31 – N° 36 – DÉCEMBRE 05 – LA FEUILLE VERTE – JOURNAL DES CONSERVATOIRE ET JARDIN BOTANIQUES Imprimé sur papier écologique sans chlore Case postale 60 – Chemin de l’Impératrice 1 – CH-1292 Chambésy/Genève – tel. 022/418 51 00 – Fax 022/418 51 01 – www.ville-ge.ch/cjb/