Sports Sports
Théâtre Epique - Une Aube Boraine Théâtre Epique - Une Aube Boraine
6 7
Une comédienne rencontre un club de foot et une usine
© Camille Meynard
En juin 2013, Lorent Wanson, metteur en scène
du projet Aube Boraine, m’invite à récolter
des légendes de sorcières, en m’envoyant marcher
dans le Sud du Borinage, du côté de la forêt de
Sauwartan. Mais j’ai toujours eu un mauvais sens
de l’orientation… Après deux heures de marche,
je me suis retrouvée complètement à l’ouest, au
Royal Sporting Club de Wasmes !
Là, au pied du terril, j’y ai rencontré des footballeurs.
On était loin des histoires de sorcières. Salvatore,
le gérant bénévole du club, ouvrier ajusteur, me prit
sous son aile, me présenta à tout le monde comme
sa nièce, et m’apprit l’histoire du club.
Les règles du football, le corner, le tir au but, le
coup franc, la deuxième tranche, le classement
en poule, je dois vous avouer que j’y comprenais
pas grand chose. Mais j’ai toujours aimé écouter
les gens raconter leur histoire. Tellement que j’ai
ni par acquérir un appareil enregistreur, qui m’a
permis - et me permet encore aujourd’hui- de les
garder en mémoire.
Je suis retournée au club, un an durant, j’ai couru
sur le terrain, joué avec les minimes, hurlé avec
les corporatistes, chanté avec les anciens. Ballon
au pied, sifet en bouche et bière à la main.
Jusqu’à ce que, à l’automne 2014, Salvatore
apprenne que son usine allait fermer brusquement.
J’ai décidé de l’y accompagner, avec mon appareil
enregistreur, jusqu’à la fermeture dénitive.
Pendant plusieurs mois j’y ai rencontré des ouvriers
démunis, errants dans une usine silencieuse
quasiment à l’arrêt. Du jour au lendemain, cette
entreprise, en partant s’installer sur des terres
plus « rentables », abandonnait ses ouvriers sur le
En marche dans le Borinage à la recherche de légendes de sorcières, Violette Pallaro remarque un club de foot au pied d’un
terril. De sa rencontre avec le gérant du club, Salvatore Frisa, délégué syndical à l’usine Doosan, est né le spectacle HORS JEU
banc de touche. Carton rouge pour trois centaines
de travailleurs. Une règle simple de la sorcellerie
capitaliste. D’un coup, la notion de HORS JEU
prenait tout son sens. Et pas uniquement dans le
Borinage.
J’ai alors décidé de partir à la rencontre d’autres
hommes et femmes qui se sont retrouvés
brusquement HORS JEU. Qui les avait exclus ?
L’arbitrage était-il impartial ? Comment changer
les règles du jeu ? Quel sera le prochain match ?
Et si je me retrouvais, moi aussi, un jour,
soudainement sur le banc de touche ?
Violette Pallaro
Violette Pallaro joue HORS JEU dans le cadre
de notre neuvième évènement Nous sommes
tous des Van Gogh au sein du Grand Ouest de
Colfontaine le 24 avril 2015 au Charbonnage de
Marcasse
J’aimerais faire bénécier, à tous mes amis, d’une petite
histoire de ces derniers temps. Il y a quelques semaines,
une troupe de comédiens arrivent ici au foot (RSC Wasmes).
Après la présentation de leurs projets ambitieux, certains
comédiens ont pris part à notre traditionnel match amical
entre parents et amis du RSC Wasmes qui clôture notre
tournoi de Pentecôte.
Dernièrement, un ami a posté, sur sa page Facebook ,
une émission sur l’histoire de l’immigration. J’ai bien sur
regardé cette émission avec énormément d’émotions.
Dernièrement, une comédienne lâchée cinq jours dans la
nature dans le Borinage, comme d’autres comédiens de la
troupe, elle se retrouve ici au club, un vendredi soir, lors du
souper de nos amis les corpos.
Violette, la jeune comédienne de la troupe, se présente à
moi par l’intermédiaire de notre ami Claude qui avait fait
des commentaires sur les belles vues du haut du terril près
du stade du pont d’Arcole (installations du RSC Wasmes).
Notre comédienne, plongée dans cette région pour préparer
ce projet, passe la soirée avec nous, recueillant des
témoignages de toutes ces personnes présentes au barbecue,
la plupart enfants d’immigrés Italiens, des témoignages
riches en souvenirs et en émotions.
Violette dépose des invitations pour la soirée de lancement
de leur projet UNE AUBE BORAINE, au départ, je ne
pouvais pas participer à cette opération de lancement.
Pour des raisons presque inexplicables, je suis à nouveau
disponible le lundi 10 en soirée, je retrouve l’invitation et je
me fais déposer au Charbonnage de Marcasse où j’ai passé
Lettre publique de Salvatore Frisa
Georges Piscart et René Fourmois, du Royal Sporting Club de Wasmes
C'était dimanche 24 mai, il faisait beau à Wasmes, au pied du
terril. Au Royal Sporng Club de Wasmes, c'était le tournoi de la
Pentecôte et la journée des Anciens. Violee Pallaro jouait HORS
JEU sur le terrain, "à domicile", devant les membres du club qu'elle
avait interviewés, les supporters et de jeunes footballeurs qui,
médailles au cou et tee shirt rouge et jaune, n'étaient pas peu
ers d'être là. A la buvee, derrière la baie vitrée avec vue sur le
terrain, j'ai rencontré Georges Piscart et René Fourmois.
© Camille Meynard
Georges Piscart est secrétaire du club depuis 42 ans. Il a aussi été
Président du Comité provincial du Hainaut pendant 19 ans. A choisir,
il préfèrerait de loin assister à un match du RSC de Wasmes avec sa femme
que d’aller voir jouer le standard. “Un véritable clubman” me cone René
Fourmois, arrivé au RSC de Wasmes en 1977, actuellement entraineur des
équipes de jeunes et de l’équipe première, ancien joueur de Mons en D3
et de La Louvière en D1. Ces deux hommes-là, c’est une histoire de foot
et d’amitié qui les relie, et elle n’est pas courte. Un regard sur le terrain où
quelques jeunes joueurs exécutent des acrobaties, le soleil dans les yeux,
poursuivis par leurs parents (c’est déjà l’heure de rentrer) et Georges et
René me racontent un peu le club.
L’histoire du Royal Sporting Club de Wasmes, c’est une histoire boraine,
avec un grand H. Fondé il y a plus de quatre-vingt ans, le club a été
longtemps la propriété du Charbonnage. A cette époque, on venait assister
aux matchs par tous les moyens, en train, en car, en camion, en vélo et
à pied...le nombre de supporters grandissant, il a parfois fallu poser des
gradins sur le terril pour accueillir tout le monde. Dans les années 60 les
usines ferment et le Royal Sporting Club de Wasmes vit tant bien que mal,
porté par ses bénévoles à bras le corps, jusqu’au rachat des installations
en 1972 par l’administration communale de Wasmes. Aujourd’hui le
chômage n'a pas reculé dans le Borinage. Des hommes comme René et Georges
continuent de porter ce club, entretenant le lien social, offrant aux 200 jeunes qui le
fréquentent un espace d'apprentissage nécessaire, l'esprit d'équipe, le mental.
Le journée s'étire dans la cafétéria du Royal Sporting Club de Wasmes. Au pied
du terril quelques irréductibles terminent leur bières, les stands de saucisses-frites
sont presque démontés, on range les bancs, la comédienne discute avec Salvatore,
le gérant du club. Il est des spectacles qui sont aussi des hommages. Je salue les
femmes de René et Georges, qui ont passé la journée ici à accueillir les gens. Je
salue aussi un autre homme avec ses petits-enfants, parce qu'on m'a dit que cet
homme a été joueur ici, comme son ls, et comme son arrière petit-ls qu'il vient
d'inscrire. Comme quoi le club, c'est aussi une histoire de famille.
une super soirée de communion avec toute la
troupe de comédiens.
Je crois simplement que c’est mon Père et ma
Mère, de là-haut, qui ont tout fait pour que je
me trouve, avec vous, ce jour de lancement.
Cette vidéo, que Franco a postée sur facebook,
cette équipe de comédiens qui se retrouvent avec
moi au foot, et bien sûr, ma nièce Violette que
je retrouve ici à Wasmes. Tous ces signes ne
peuvent pas être de simples coïncidences .
Je prote de ce moment magique de témoignage
pour rendre un hommage à mon Père qui est venu
mourir à petit feu dans la mine pour que mon
frère et moi puissions avoir un avenir meilleur.
MERCI PAPA
Salvatore Frisa
Avec “Porteur d’eau”, un ancien coureur cycliste
rend hommage à Florent Mathieu
Les porteurs d’eau sont ces obscurs qui servent leur leader dans les courses
cyclistes : ils le protègent, l’amènent à la victoire, lui lent leur vélo
quand le leader casse le sien, supportent ses excès… Bref, les sans-grades, ces
hommes (forts) de l’ombre…
Denis Laujol s’inspire d’abord de la vie d’un de ces coureurs belges de l’immédiat
après-guerre, Florent Mathieu, gloire boraine locale, qui t plusieurs tours de
France, et dont on donna le nom à un rond-point orné d’un monumental vélo,
sur la place de Quaregnon. Ce gars-une vraie bête- t demi-tour au sommet
d’un col du Tour, pour récupérer son chef d’équipe qui avait crevé… et grimpa
le col une deuxième fois. Il était sponsorisé en nature par son boucher (un steak
par course), et voulait à toutes forces que ses enfants échappent à la mine. Avec
Porteur d’eau, on plonge dans une époque, ce qui est passionnant, et on passe
avec une justesse déconcertante du particulier à l’universel…
Car le spectacle n’est pas la succession d’une série d’anecdotes nostalgiques,
tendres et drôles; Denis a entamé lui-même une carrière de coureur dans son
Sud-ouest natal et a remporté plusieurs courses en catégorie jeunes. Son gabarit
aurait probablement fait de lui un porteur d’eau. Mais il fait à 21 ans le choix
du théâtre, part en Belgique, met en scène et joue abondamment pour Michel
Dezoteux , Armel Roussel, Selma Alaoui, Aurore Fattier, Antoine Laubin…
Dans “Porteur d’eau” -probablement le plus personnel des spectacles de Denis-,
il met en scène son propre personnage, en même temps que celui de Mathieu,
part sur une réexion sur l’héroïsme, le courage, le travail et l’humilité.
Réussissant la gageure de la philosophie et de l’humour, Denis fait intervenir
Armstrong, Merckx et Sancho Pancha…
Olivier Blin, La Charge du Rhinocéros
Famille de Salvatore Frisa
Violette Pallaro et Salvatore Frisa avant la
représentation de HORS JEU le 24 avril 2014
au Charbonnage de Marcasse.