Page d’accueil © Alessia Contu UNE AUBE BORAINE Théâtre Epique Lorent Wanson 2013-2015 Edito dans le folklore, réinvente avec ses moyens démunis du sacré, dans le sens le plus noble ou rudimentaire du terme. Le sacré, tel que l’esquisse Pasolini, mais tel aussi qu’il perdure comme par Lorent Wanson une résistance dans cette région frontalement bousculée par Directeur artistique et metteur en scène l’histoire économique et sociale du siècle, cette région qui ne se cache pas, (même si on la regarde peu) qui crie à la fois Un projet comme “Une Aube Boraine” se clôture-t-il? Ce n’est son déclin et sa renaissance, qui le crie, le chante, avec cette pas sa vocation. Il restera de ces deux années complètement franchise rare, qui ne joue pas et ne dissimule pas non plus ses folles du visible et puis beaucoup d’invisible. Il y aura eu des abattements. tonnes d’éphémère et des essais de pérennité, des graines semées au vent dont nous ne pouvons savoir si elles porteront Il fut fondamental pour nous de travailler ici, là où les leurs fruits, et d’ailleurs ces fruits que nous espérons, ce ne simulacres ne font pas le poids, car les populations en ont subi seront déjà plus les nôtres mais ceux de celui ou celle qui les tant qu’on ne leur fera plus une promesse sans qu’une tournée entretiendra. générale ne suive. Ce furent deux années magnifiques, dangereuses, humbles mais d’une ambition démesurée, deux années où nous avons tenté d’arracher de la lumière là où stagnait l’ombre ou plutôt de tenter d’éclairer ce qui n’a jamais cessé d’être là, et cette région, bien souvent, pas toujours, nous l’a rendu. Nous ne pouvions savoir,deux ans auparavant, quand nous avons déposé ce projet que son titre serait si révélateur, car l’aube est un moment qui ne choisit pas, elle est le témoignage d’une vibration, d’une incertitude, un moment que nous avons voulu étendre deux années, avec des moments d’éclats, de retrouvailles, des petites veillées où des badauds, des artistes venus de partout, des piliers de comptoir, des musiciens du dimanche, se retrouvaient, pas pour faire spectacle, mais pour partager des espaces de parole, de fête, de tendresse. Car l’Aube Boraine n’a jamais voulu être un spectacle et n’en n’est jamais devenu un, elle est la mise en scène de l’instant. Nous avons tenté que la vie s’invite partout dans nos pratiques artistiques et qu’inversément l’art s’invite au zinc, se faufile Théâtre Epique - Une Aube Boraine Voilà, il est paradoxal que ma pratique théâtrale ait fermenté il y a une quinzaine d’années ici même dans cette Salle culturelle, cette Maison du Peuple pour les répétitions de Sainte Jeanne des Abattoirs, et qu’il me fallut errer en Serbie, au Congo, au Chili, écouter et tenter de donner écho aux silences où sont relégués la majorité des êtres, acteurs de l’histoire mais que les livres ne mentionnent jamais, pour en fin de compte revenir ici, là où ma culture bat, là où résonnent mes propres silences, là où purulent mes propres plaies, là où s’entament mes fous rires et où surgissent mes larmes… Paradoxal qu’ici nous ayons nous-mêmes tout au long de ces deux ans compris le sens du mot silence, et de marginalité. Sans doute que les douleurs ou les trahisons ne s’entendent qu’avec la distance de l’exotisme. Au moment de, sinon refermer ce chapitre, de l’ouvrir à d’autres vents, de laisser les « enfants » de l’Aube Boraine suivre leur propre marche, nous savons qu’il ne nous sera pas possible, ni dans ce journal, ni ailleurs de raconter ce que fut Une Aube Boraine : une compilation d’instants qui ne sont enregistrés nulle part, un sentiment peut-être d’avoir appartenu à ces instants, une complicité pour une chose qui n’était plus ni du théâtre, ni de l’action socio-culturelle, une aventure humaine qui n’avait d’autre ambition que d’exhorter du mouvement, de la pensée, de la joie, de l’amicalité. Sur “Une Aube Boraine”, nous avons frôlé des fins et rebondi sans cesse, sans avoir l’ambition d’arriver à une conclusion, mais juste offrir la vibration nécessaire à ce que le monde résiste à la modélisation, à la formalisation de l’époque. Un espace-temps de deux ans, où l’on pu tout à la fois réfléchir l’histoire et tricoter du futur, dans un présent à réinventer sans cesse. Alors peut-être, ces (dé)marches, ces vins chauds et amusegueule, ces fontaines de voix, ces temps de cuisson qui importent, ces Alions retrouvés, ces auberges boraines et autres match amicaux, ces Van Gogh que nous sommes tous, ces balades entre haine et trouille, et les quelque 11 ou 12, on ne compte plus, spectacles mis en germe au cours de ces deux ans, ne sont-ils pas grand chose, ne sont-ils pas l’événement majeur, spectaculaire, mais un chemin vers une autre sorte de lumière, celle d’une aube hésitante qui porte en elle tous les possibles sans en occulter tous les démons. Il est frustrant d’écrire un éditorial qui brosserait tous les contours de cette aventure, c’est pourquoi je promets aux quelque 300 personnes qui y ont participé activement et aux quelques milliers de spectateurs et complices qui nous ont suivis, aux associations sportives, culturelles, aux cafés etc… sans le dévouement desquels ce projet aurait été impossible et improbable, que nous en ferons germer plus qu’un spectacle, mais des anecdotes qui, pas après pas, feront l’Histoire... 1 Page d’accueil Page d’accueil Folklore sPORTS sciences metiers Culture patrimoine voyages faits divers portraits manifeste pAGES 04-05 pAGES 06-09 pAGE 10 pAGE 11 pAGEs 11-18 pAGES 19-20 pAGES 21-22 pAGEs 23-24 pAGES 25-26 pAGE 27 D epuis janvier 2013 et jusqu'en août 2015, Lorent Wanson et des artistes de renommée associés au Théâtre Epique ont parcouru le Borinage à travers des ateliers, rencontres, performances et autres actions poético-civiques impliquant des populations boraines. Entre théâtre, folklore, création musicale, expression populaire, improvisation et événement…Une Aube boraine est un projet artistique et citoyen mouvant, qui vise à remettre en lumière les histoires, à réinscrire la population comme partie prenante d’une Histoire en marche. “Une Aube Boraine” Un vivier de projets artistiques initiés par le Théâtre Epique «Une Aube Boraine» est un projet polyforme, il se décline de différentes manières: ateliers participatifs, projets artistiques, évènements culturels et festifs, en voici les grandes lignes... Les ateliers participatifs Organisation d’ateliers participatifs de longue haleine avec les populations et qui débouchent sur des présentations soit uniques et circonstentielles, soit s’inscrivant dans des événements plus larges et existant au préalable dans le tissu socio-culturel régional : carnavals, processions, fêtes de quartiers… © Roger Van Vooren Entre la haine et la trouille, Slam oratorio Projet mené toute l’année, intra-générationnel entre les petits-enfants et leurs arrières grands-parents sur les quotidiens. Quelle était la journée d’un mineur de fond? Quelle est la journée d’un enfant grandissant sans réelles perspectives d’avenir? En collaboration avec Sempai et la Plate-Forme, Maison des Jeunes de Colfontaine. Une Aube Boraine est une production du Théâtre Epique /Compagnie Lorent Wanson, soutenue par la Fédération Wallonie Bruxelles, en coproduction avec la Fondation Mons 2015 et le Centre culturel de Colfontaine. L’Alion Relecture d’une procession païenne abandonnée depuis 1895 et qui remonte à la fin de l’Antiquité. Un enfant est perdu dans la forêt, la cité envoie des prêtresses pour le ramener à la cité et à la vie. C’est une fête, comme beaucoup, célébrant de façon quasi animiste le renouveau, la nouvelle saison, l’espoir et la demande à la nature d’une année de récolte riche. Avec tous les symboles de la germination. C’est une procession réalisée avec des enfants, par une série d’ateliers musicaux, de cirque, de danse, de prise de parole et d’écriture, conjointement organisés par des Maisons de Jeunes, des écoles de devoirs, des écoles, des académies de musique. La première édition a eu lieu le 10 mai 2014 dans les rues de la commune de Colfontaine, en collaboration avec le Centre Culturel de Colfontaine dans le cadre de son parcours poétique. La seconde édition a rassemblé 200 enfants et a eu lieu le 26 avril 2015 dans le cadre du Grand Ouest de Colfontaine. Le Ha Cra borain Projet ludique d’un rituel nouveau, création d’une danse de supporters et de joueurs afin de les inscrire durablement dans le quotidien des gens. En avant ou après match, en collaboration avec le Royal Sporting Club de Wasmes et peut-être d’autres club de foot ou de rugby de la région. En partenariat avec le manège.mons/centre dramatique, la Fabrique de Théâtre, Service des Arts de la scène de la Province du Hainaut, le Théâtre de la Communauté, le Mac’s, Musée des Arts Contemporains, le Centre des Arts Scéniques, Arts & Publics, ARTS² Ecole supérieure des Arts, section Art Dramatique, la Charge du Rhinocéros, le Royal Sporting Club de Wasmes, le club Som Thai Gym de Frameries, la Plateforme, maison des Jeunes de Colfontaine, l’Ensemble instrumental de Colfontaine, le Cargo X, Kilombo asbl, Had Ominem, Les Blés d’or, Far Forward Music, l’asbl Garance, La Baleine noire asbl, Marcasse et sa mémoire asbl, Télé MB, les chorales Les Alouettes, Les Grillons, Crescendo, la Chorale des Jeunes de Soignies et les élèves du cours de Chant d’Ensemble de l’Académie de Colfontaine, les écoles fondamentales de Colfontaine, le No Maison, la Maison du Peuple de Pâturages… 2 Théâtre Epique - Une Aube Boraine Nous sommes tous des Van Gogh Un travail avec des artistes du Borinage autour de la figure de Van Gogh et de l’éloge de l’anonymat. Ces artistes se sont rassemblés autour de Lorent Wanson durant les vacances de Pacques 2015 pour élaborer des œuvres invisibles, des propositions artistiques et humaines dont la seule volonté serait d’offrir un gueuloir à l’inaudible. Le résultat de cet atelier a été présenté le samedi 25 avril 2015 au Charbonnage de Marcasse lors de notre évènement du même nom «Nous sommes tous des Van Gogh» dans le cadre du Grand Ouest de Colfontaine. Théâtre Epique - Une Aube Boraine Regarder l’aube, l’étendre... Un exercice de fin d’études des étudiants de la classe d’Art dramatique de Frédéric Dussenne, Ecole Arts² (Mons), en immersion dans le Borinage. Ces 12 jeunes artistes se sont jetés avec curiosité en immersion dans le Borinage, à la rencontre des gens, de la Région et d’eux-mêmes...12 artistes en marche jusqu’aux 27 et 28 juin 2015 où nous leur avons donné rendez-vous pour partager avec le public leurs expériences et découvrir leurs aubes de passage de l’école à la vie professionnelle, avec le Borinage en écho et en miroir... Des spectacles issus et nourris de la participation Ces spectacles ont été initiés, produits ou coproduits par le Théâtre Epique dans le cadre d’«Une Aube Boraine» : Porteur d’eau de Denis Laujol, portrait de Florent Mathieu, coureur cycliste de la fin des années 40, originaire de Quaregnon. Domestique des leaders, porteur d’eau comme on dit, mais au courage et au dévouement sans borne. Il fut néanmoins une star dans la région, quasiment son symbole de courage et d’abnégation… Ma Pucelette de Laura Fautré, portrait de différentes pucelettes de la tradition dans leur quotidien d’aujourd’hui, de l’écolière à la mamie, de l’institutrice, à la mère de famille. FIGHT d’Emilie Maréchal. Une salle d’entrainement à Frameries. Une rencontre avec Thong, ancien champion du monde, Jason, son fils, qui entame une carrière professionnelle. Un moment de théâtre, de cinéma et de démonstration sportive. Entre rituel et sport, transmission des coups, valeurs et spiritualité. Cerebrum, le faiseur de réalités d’Yvain Juillard. Biophysicien spécialisé dans la plasticité cérébrale devenu acteur, Yvain Juillard propose d’interroger le fonctionnement du cerveau afin de questionner, à travers des expériences simples et ludiques, la nature multiple de nos réalités. Notre cerveau étant l’organe qui construit notre réalité sensible, découvrir sa plasticité ouvre un champ immense quant à notre propre capacité à être libre ou à être formaté. Cette conférence-spectacle a pour enjeu d’amener la connaissance scientifique dans de nouveaux espaces publics, de la rendre accessible et d’interroger l’avenir. Kalach’ de Julie Jaroszewski. Kalach’ est la prise d’otage d’un théâtre par une terroriste wallonne qui n’a d’autre revendication que le martyre. Au fur et à mesure du compte à rebours de la tragédie, la terroriste laisse apparaître sa fragilité et les causes de sa violence, déclenchée par un linguicide et une acculturation. Alors qu’elle marche vers sa mort et celle du public, un autre récit sous-tend au texte jusqu’à le supplanter, celui d’une réconciliation, d’une Andalousie mythique et minière, qui la ramènera chez elle et aux siens. Le chant, tel une balise, jalonne son parcours. HORS-JEU de Violette Pallaro. Il était une fois, au pied du terril des Vanneaux, le Royal Sporting Club de Wasmes.Il était une fois une poignée de bénévoles qui se donnaient corps et âme pour que perdure ce club de football, au coeur d’une région désertée et en friche. Et puis, soudain, à quelques pas du stade, alors que s’ouvre la 93 ème saison, la fermeture de l’usine. 400 ouvriers perdent soudainement leur travail. Parmi eux, le gérant du club… Tu n’advanchras d’jamin tou seû de Sébastien Bonnamy. Sur Quaregnon, on en dit des choses, mais tout ce qu’on nous raconte, est-ce vrai? Promenade dans les langues, les a priori...un éloge à la débrouillardise. Penser avec les mains Une création collective basée sur la valorisation des métiers manuels et plus largement des processus de création, à l’adresse de publics nouveaux, peu habitués à la chose artistique. Ce spectacle a été écrit et créé à partir de témoignages d’artisans, maçons, ferroniers, ébénistes, couturières, etc… C’est presqu’au bout du monde Spectacle musical et mosaïque autour de la chanson Youkali de Kurt Weill et Roger Fresnay. 3 comédiennes et 1 pianiste voyagent dans toutes les beautés et contradictions de cette chanson, à partir d’immersions dans des homes, des CPAS, des maisons de jeunes ou des rencontres fortuites. La chanson se promène ainsi d’une langue migratoire à une autre, dans un espace confiné et de transit. Un camp de réfugiés où les migrants de passage ne pensaient pas y passer le reste de leur vie. Tout un travail de collecte de témoignages et de photographies, de portraits a été réalisé tout au long du processus. L’autre aspect essentiel est de faire interpréter cette chanson par une grande diversité d’ensembles musicaux borains allant de l’harmonie au hard rock, en passant par le jazz ou la musique contemporaine. Un prélude fut par ailleurs proposé à la Salle culturelle de Colfontaine le 15 Février, avec la participation de 6 chorales (une petite centaine d’enfants ayant chanté Youkali lors d’une soirée festive et participative). Les moments de retrouvailles, les évènements Les évènements, autant d’étapes qui constituent la pierre angulaire du projet «Une Aube Boraine»...Ces soirées tentent de recréer du lien social, voire même du « sacré » dans le sens pasolinien du terme. Nous tentons de créer des atmosphères festives propices à la prise de parole et au partage des expériences de vie. Nous les proposons à un rythme soutenu afin de créer un lien véritablement profond avec les populations, une forme de fidélisation et de rituel, comme les veillées en étaient il n’y a pas si longtemps, avant que la télévision et toutes les formes de modélisation des populations ne prennent toute la place. Chacun des apéros-rencontres développe une approche différente. Le but n’y est pas de présenter des formes finies, mais des chantiers, où la parole du spect-acteur se tisse avec les expériences artistiques les plus diverses. 3 Folklore Folklore Quels sont les dragons d’aujourd’hui? La Pucelette de Wasmes, revisitée par Laura Fautré. © Ingra Soerd L’Alion, une procession paienne millénaire disparue depuis 110 ans, réactualisée depuis 2014 © Julie Jaroszewski Accompagnés par l’équipe artistique, associés au Théâtre Epique, les enfants du Borinage défilent dans les rues de Colfontaine et de Wasmes pour fêter le printemps et le renouveau de la Région. L A l’image des terrils qui reverdissent avec la force anarchique de la nature, la procession de Alion célèbre un élan nouveau: c’est une main tendue que les jeunes, au cœur de la procession, offriraient à une époque qui ne leur promet plus grand chose, d’autant plus dans cette région où l’avenir a du mal à se dessiner. Comme une revanche à l’histoire industrielle: c’est la célébration des valeurs universelles du partage et du respect, la revendication sacralisée de cette formidable et impérissable liberté que chacun a devant soi... © Cédric Le Goulven ’Alion est une procession sortie du fond des âges qui racontait cette simple fable: que fait-on de l’enfant qui est perdu en forêt (la forêt comme métaphore de la perte de sens et de l’angoisse)? La communauté allait le rechercher et le ramenait dans la cité, sans le condamner de son errance. Elle faisait de cet enfant perdu, de ce délinquant (dirait-on aujourd’hui) le symbole d’un renouveau, d’une germination printanière, d’une nouvelle ère basée sur l’humain, fragile, dont les bourgeons ne sont pas encore mûrs mais qui donneront des fruits magnifiques... 4 C Deux éditions déjà! Dans le cadre d’une Aube Boraine (2014) et du Grand Ouest de Colfontaine (2015)... ’est dans le cadre de l’évènement “Une Aube Boraine # 7 L’Alion r’trouvé” le 10 mai 2014 que la procession de l’Alion a refait surface dans les ruelles du Borinage. Une cinquantaine d’enfants ont suivi des stages créatifs, encadrés par des artistes associés au Théâtre Epique et au Centre culturel de Colfontaine afin d’élaborer cette toute première procession. Char, bannières, chansons, numéros de cirque ont été directement intégrés dans la procession. Cette première édition résulte d’un partenariat avec le Centre culturel de Colfontaine, la Maison Ouvrière de Quaregnon, le Service Jeunesse de la Province de Hainaut, l’Ecole des Devoirs en Chocolat. Laurence Van Oost, directrice du Centre culturel de Colfontaine, partenaire complice de l’ensemble du projet “Une Aube Boraine”, a souhaité donner à cette procession sa pérennité, en collaboration avec le Théâtre Epique Ainsi, le 26 avril 2015, dans le cadre du Grand Ouest de Colfontaine, plus de 150 enfants ont participé à cette deuxième édition, traversant les rues de Colfontaine et de Wasmes, frappant à toutes les portes pour inviter les habitants à les rejoindre pour célébrer le renouveau de la nature et surtout du Borinage. Une série d’ateliers créatifs se sont déroulés dans les écoles de l’entité de Colfontaine afin de préparer la procession. Et comme souvent, c’est par une fête au Charbonnage de Marcasse que la procession a pris fin, avec un goûter géant et un concert d’après les chants retrouvés de l’Alion. Des souvenirs pour rêver à l’édition 2016... Ma Pucelette, une relecture du mythe La Pucelette est cette petite fille de 4 ans qui arpente les rues de Wasmes les lundis et mardis de Pentecôte en donnant généreusement aux citoyens un salut porte-bonheur. “Il n’y a qu’à Wasmes que ça existe. Le dragon, c’est l’histoire du dragon, oui c’est ça. En fait, le Doudou de Mons, l’origine, c’est Wasmes. On fait toutes les festivités à Mons mais… c’est pas, c’est pas juste. Evidemment Wasmes c’est un village et Mons c’est une ville et l’origine de… de… de la Pucelette, c’est Wasmes. Tu connais l’histoire, vous connaissez l’histoire du dragon… Mais l’origine, c’est à Wasmes.” E Extrait du texte de Ma Pucelette n 1133, une légende raconte qu’un certain Gilles de Chin aurait délivré une petite fille de 4 ans des griffes d’un dragon. Celle-ci devient alors connue sous le nom de « Pucelette ». Depuis lors, à la Pentecôte, cette petite est célébrée à Wasmes, elle détient la clé de la ville entre ses mains, devient reine d’un jour, envoie des baisers et salue son public… Depuis plusieurs mois, Laura Fautré enquête sur des pucelettes de différentes générations, ces petites filles qui ont pris place au coeur des processions dont l’impact et le sens ont évolué avec le temps. Qu’est-ce qu’une petite fille peut comprendre de cette légende? Les musiciens Eric Wattier et Jean-Jacques Renaut ont détérrés et réarrangés les chants de l’Alion lors de sa première édition en 2014. “Y faut pas que Ze fais tomber ma couronne” Eloise, Pucelette 2015 Qu’est-ce que la Pucelette aujourd’hui ? Qui à part les Wasmois connaissent ce personnage? Le dragon du Doudou, oui, Saint George, oui, mais Gilles de Chin ? Et cette fillette de 4 ans qui aurait été sauvée des griffes du Dragon ? La légende se perd petit à petit, les gens sont de moins en moins nombreux à faire les 16 km 700, le fameux tour de Wasmes. Cette fillette de 4 ans, qui est-ce ? Ce dragon qui est-ce ? Pourrait-on faire un parallèle avec le grand méchant loup de Belgique ? Qui, lui aussi, semble aimer les grottes pour y cacher ses victimes! Dans la légende, le dragon fut tué et la petite fille libérée, et ensuite célébrée chaque année. La réalité n’est pas tout à fait la même. La légende existait avant l’affaire Dutroux, mais n’est-elle pas plus importante à raconter maintenant ? La pucelle d’aujourd’hui est-elle en danger? L’icône de la jeune fille est mis en avant par différents concours, mini-miss, beauté, chant, danse, acrobaties etc. Le monde est à la recherche de talents et la jeunesse fait partie des premières cibles. Partout valorisée, presque commercialisée, plus on est jeune et talentueux, plus les médias s’affolent, et l’honneur réel n’est pas envers l’enfant mais les parents. Y a-t-il un lien à faire entre Pucelette et minimiss ? Jeunesse et innocence ? Pureté et séduction ? Une fois cette fillette vieillie, elle n’est certainement plus la vedette du jour. Laura Fautré Qu’est-ce qu’une petite fille peut comprendre de cette légende ? Est-elle vraiment consciente d’être l’icône de la pureté, de l’innocence? Ne se prend-elle pas pour la mini miss de Wasmes? Que veut devenir la petite fille aujourd’hui, Mini-miss, Princesse, où Pucelette? La mini-miss est à la fois cette princesse pucelle d’un soir. C’est avant tout un honneur et une fierté pour les parents, ainsi qu’un remerciement à la Vierge. Une enfant de 4 ans ne choisit pas. Quel souvenir va-telle garder ? A-t-elle son mot à dire ? Mon but est de répondre à ces questions, de rencontrer des anciennes ainsi que des futures Pucelettes et de récolter leurs témoignages. © Anne-Sophie Costenoble Théâtre Epique - Une Aube Boraine Théâtre Epique - Une Aube Boraine 5 Sports Sports une super soirée de communion avec toute la troupe de comédiens. Je crois simplement que c’est mon Père et ma Mère, de là-haut, qui ont tout fait pour que je me trouve, avec vous, ce jour de lancement. Cette vidéo, que Franco a postée sur facebook, cette équipe de comédiens qui se retrouvent avec moi au foot, et bien sûr, ma nièce Violette que je retrouve ici à Wasmes. Tous ces signes ne peuvent pas être de simples coïncidences . Je profite de ce moment magique de témoignage pour rendre un hommage à mon Père qui est venu mourir à petit feu dans la mine pour que mon frère et moi puissions avoir un avenir meilleur. MERCI PAPA Salvatore Frisa © Camille Meynard Famille de Salvatore Frisa Georges Piscart et René Fourmois, du Royal Sporting Club de Wasmes En marche dans le Borinage à la recherche de légendes de sorcières, Violette Pallaro remarque un club de foot au pied d’un terril. De sa rencontre avec le gérant du club, Salvatore Frisa, délégué syndical à l’usine Doosan, est né le spectacle HORS JEU E n juin 2013, Lorent Wanson, metteur en scène du projet Aube Boraine, m’invite à récolter des légendes de sorcières, en m’envoyant marcher dans le Sud du Borinage, du côté de la forêt de Sauwartan. Mais j’ai toujours eu un mauvais sens de l’orientation… Après deux heures de marche, je me suis retrouvée complètement à l’ouest, au Royal Sporting Club de Wasmes ! banc de touche. Carton rouge pour trois centaines de travailleurs. Une règle simple de la sorcellerie capitaliste. D’un coup, la notion de HORS JEU prenait tout son sens. Et pas uniquement dans le Borinage. J’ai alors décidé de partir à la rencontre d’autres hommes et femmes qui se sont retrouvés brusquement HORS JEU. Qui les avait exclus ? Là, au pied du terril, j’y ai rencontré des footballeurs. L’arbitrage était-il impartial ? Comment changer On était loin des histoires de sorcières. Salvatore, les règles du jeu ? Quel sera le prochain match ? le gérant bénévole du club, ouvrier ajusteur, me prit sous son aile, me présenta à tout le monde comme Et si je me retrouvais, moi aussi, un jour, sa nièce, et m’apprit l’histoire du club. soudainement sur le banc de touche ? Les règles du football, le corner, le tir au but, le coup franc, la deuxième tranche, le classement en poule, je dois vous avouer que j’y comprenais pas grand chose. Mais j’ai toujours aimé écouter les gens raconter leur histoire. Tellement que j’ai fini par acquérir un appareil enregistreur, qui m’a permis - et me permet encore aujourd’hui- de les garder en mémoire. Violette Pallaro Jusqu’à ce que, à l’automne 2014, Salvatore apprenne que son usine allait fermer brusquement. J’ai décidé de l’y accompagner, avec mon appareil enregistreur, jusqu’à la fermeture définitive. Pendant plusieurs mois j’y ai rencontré des ouvriers démunis, errants dans une usine silencieuse quasiment à l’arrêt. Du jour au lendemain, cette entreprise, en partant s’installer sur des terres plus « rentables », abandonnait ses ouvriers sur le Violette Pallaro joue HORS JEU dans le cadre de notre neuvième évènement Nous sommes tous des Van Gogh au sein du Grand Ouest de Colfontaine le 24 avril 2015 au Charbonnage de Marcasse eorges Piscart est secrétaire du club depuis 42 ans. Il a aussi été Président du Comité provincial du Hainaut pendant 19 ans. A choisir, il préfèrerait de loin assister à un match du RSC de Wasmes avec sa femme que d’aller voir jouer le standard. “Un véritable clubman” me confie René Fourmois, arrivé au RSC de Wasmes en 1977, actuellement entraineur des équipes de jeunes et de l’équipe première, ancien joueur de Mons en D3 et de La Louvière en D1. Ces deux hommes-là, c’est une histoire de foot et d’amitié qui les relie, et elle n’est pas courte. Un regard sur le terrain où quelques jeunes joueurs exécutent des acrobaties, le soleil dans les yeux, poursuivis par leurs parents (c’est déjà l’heure de rentrer) et Georges et René me racontent un peu le club. Lettre publique de Salvatore Frisa J ’aimerais faire bénéficier, à tous mes amis, d’une petite histoire de ces derniers temps. Il y a quelques semaines, une troupe de comédiens arrivent ici au foot (RSC Wasmes). Après la présentation de leurs projets ambitieux, certains comédiens ont pris part à notre traditionnel match amical entre parents et amis du RSC Wasmes qui clôture notre tournoi de Pentecôte. L’histoire du Royal Sporting Club de Wasmes, c’est une histoire boraine, avec un grand H. Fondé il y a plus de quatre-vingt ans, le club a été longtemps la propriété du Charbonnage. A cette époque, on venait assister aux matchs par tous les moyens, en train, en car, en camion, en vélo et à pied...le nombre de supporters grandissant, il a parfois fallu poser des gradins sur le terril pour accueillir tout le monde. Dans les années 60 les usines ferment et le Royal Sporting Club de Wasmes vit tant bien que mal, porté par ses bénévoles à bras le corps, jusqu’au rachat des installations en 1972 par l’administration communale de Wasmes. Aujourd’hui le Dernièrement, un ami a posté, sur sa page Facebook , une émission sur l’histoire de l’immigration. J’ai bien sur regardé cette émission avec énormément d’émotions. Dernièrement, une comédienne lâchée cinq jours dans la nature dans le Borinage, comme d’autres comédiens de la troupe, elle se retrouve ici au club, un vendredi soir, lors du souper de nos amis les corpos. Violette, la jeune comédienne de la troupe, se présente à moi par l’intermédiaire de notre ami Claude qui avait fait des commentaires sur les belles vues du haut du terril près du stade du pont d’Arcole (installations du RSC Wasmes). Notre comédienne, plongée dans cette région pour préparer ce projet, passe la soirée avec nous, recueillant des témoignages de toutes ces personnes présentes au barbecue, la plupart enfants d’immigrés Italiens, des témoignages riches en souvenirs et en émotions. Je suis retournée au club, un an durant, j’ai couru sur le terrain, joué avec les minimes, hurlé avec les corporatistes, chanté avec les anciens. Ballon au pied, sifflet en bouche et bière à la main. G Violette dépose des invitations pour la soirée de lancement de leur projet UNE AUBE BORAINE, au départ, je ne pouvais pas participer à cette opération de lancement. Pour des raisons presque inexplicables, je suis à nouveau disponible le lundi 10 en soirée, je retrouve l’invitation et je me fais déposer au Charbonnage de Marcasse où j’ai passé Théâtre Epique - Une Aube Boraine L © Camille Meynard C'était dimanche 24 mai, il faisait beau à Wasmes, au pied du terril. Au Royal Sporting Club de Wasmes, c'était le tournoi de la Pentecôte et la journée des Anciens. Violette Pallaro jouait HORS JEU sur le terrain, "à domicile", devant les membres du club qu'elle avait interviewés, les supporters et de jeunes footballeurs qui, médailles au cou et tee shirt rouge et jaune, n'étaient pas peu fiers d'être là. A la buvette, derrière la baie vitrée avec vue sur le terrain, j'ai rencontré Georges Piscart et René Fourmois. Une comédienne rencontre un club de foot et une usine 6 Violette Pallaro et Salvatore Frisa avant la représentation de HORS JEU le 24 avril 2014 au Charbonnage de Marcasse. chômage n'a pas reculé dans le Borinage. Des hommes comme René et Georges continuent de porter ce club, entretenant le lien social, offrant aux 200 jeunes qui le fréquentent un espace d'apprentissage nécessaire, l'esprit d'équipe, le mental. Le journée s'étire dans la cafétéria du Royal Sporting Club de Wasmes. Au pied du terril quelques irréductibles terminent leur bières, les stands de saucisses-frites sont presque démontés, on range les bancs, la comédienne discute avec Salvatore, le gérant du club. Il est des spectacles qui sont aussi des hommages. Je salue les femmes de René et Georges, qui ont passé la journée ici à accueillir les gens. Je salue aussi un autre homme avec ses petits-enfants, parce qu'on m'a dit que cet homme a été joueur ici, comme son fils, et comme son arrière petit-fils qu'il vient d'inscrire. Comme quoi le club, c'est aussi une histoire de famille. Avec “Porteur d’eau”, un ancien coureur cycliste rend hommage à Florent Mathieu es porteurs d’eau sont ces obscurs qui servent leur leader dans les courses cyclistes : ils le protègent, l’amènent à la victoire, lui filent leur vélo quand le leader casse le sien, supportent ses excès… Bref, les sans-grades, ces hommes (forts) de l’ombre… Denis Laujol s’inspire d’abord de la vie d’un de ces coureurs belges de l’immédiat après-guerre, Florent Mathieu, gloire boraine locale, qui fit plusieurs tours de France, et dont on donna le nom à un rond-point orné d’un monumental vélo, sur la place de Quaregnon. Ce gars-une vraie bête- fit demi-tour au sommet d’un col du Tour, pour récupérer son chef d’équipe qui avait crevé… et grimpa le col une deuxième fois. Il était sponsorisé en nature par son boucher (un steak par course), et voulait à toutes forces que ses enfants échappent à la mine. Avec Porteur d’eau, on plonge dans une époque, ce qui est passionnant, et on passe avec une justesse déconcertante du particulier à l’universel… Théâtre Epique - Une Aube Boraine Car le spectacle n’est pas la succession d’une série d’anecdotes nostalgiques, tendres et drôles; Denis a entamé lui-même une carrière de coureur dans son Sud-ouest natal et a remporté plusieurs courses en catégorie jeunes. Son gabarit aurait probablement fait de lui un porteur d’eau. Mais il fait à 21 ans le choix du théâtre, part en Belgique, met en scène et joue abondamment pour Michel Dezoteux , Armel Roussel, Selma Alaoui, Aurore Fattier, Antoine Laubin… Dans “Porteur d’eau” -probablement le plus personnel des spectacles de Denis-, il met en scène son propre personnage, en même temps que celui de Mathieu, part sur une réflexion sur l’héroïsme, le courage, le travail et l’humilité. Réussissant la gageure de la philosophie et de l’humour, Denis fait intervenir Armstrong, Merckx et Sancho Pancha… Olivier Blin, La Charge du Rhinocéros 7 Sports Sports De la transmission des règles et des valeurs, de champion à champion, de père en fils, en fille Denis Laujol sent remonter une passion lointaine, il vit à travers l’histoire de Florent Mathieu comme un double fantasmé de lui-même © Stéphane Arcas Pour commencer, puisqu’il faut bien commencer quelque part, ces pas me menèrent devant un café (fermé à l’époque) de la place de Quaregnon, le Galibier. Un Galibier à Quaregnon ? Mon sang de cycliste ne fit qu’un tour (et de fait, ce café s’appelait auparavant le Tour...de France, bien sûr). J’appris bientôt qu’il avait été tenu pendant plus de trente ans par un ancien cycliste, un certain Florent Mathieu... et Lorent me dégotta bien vite un livre rare, une biographie de ce Borain de Légende, par Jean Godin, et nous en fîmes une petite forme théâtrale, présentée et enrichie lors de plusieurs étapes de l’Aube Boaine, et notamment lors d’une mémorable inauguration du rond-point Florent Mathieu, sur la place de Quaregnon, en présence du bourgmestre, du député, de la fanfare municipale, de deux des fils de Florent Mathieu, et surtout de nombreux Borains enthousiastes, qui me posèrent mille questions sur mon propre parcours sportif... Peu à peu, cette aventure fit renaître en moi la passion du cyclisme, et me donna l’envie de raconter une autre histoire, la mienne, qui vient s’entremêler avec celle de Florent, comme un double fantasmé, peutêtre. Ce spectacle s’est donc constitué par strates successives, et s’est enrichi peu à peu du limon déposé par la vie qui passe ; il se fait tout seul en fait, ou plutôt avec vous, spectateurs, à chaque représentation, puis qu’au-delà de l’anecdote, il parle de nous tous, de nos aspirations, de nos renoncements, de nos rêves et de notre lutte. Denis Laujol ©Théâtre Epique Q uand Lorent Wanson m’a proposé en juin 2013 de rejoindre l’exercice des marches dans le Borinage , j’étais bien loin de m’imaginer que mes pas allaient me mener vers une aventure qui occuperait une si grande place dans les années suivantes... I Ancien champion du monde, il crée un club de Muay-Thaï à Frameries Son fils rêve de devenir champion à son tour Emilie Maréchal prépare FIGHT l y a un an et demi, dans le cadre d’”Une Aube boraine”, projet initié par Lorent Wanson, pour Mons 2015, je suis partie quelques jours dans le Borinage, avec mon sac à dos, et une carte de la région. Le but de cette marche : prendre un premier contact avec le Borinage et aller à la rencontre des Borains, entendre leurs histoires. Mon voyage curieusement se polarisa entre la spiritualité, fréquentant nombre d’églises, de temples et pasteurs et par des expériences flirtant avec la violence. Le dernier jour de cette marche, je rentrais par hasard dans le hall de sport désert de Frameries, et fit une rencontre qui rassembla ces deux extrémités : celle de Thong, 44 ans, entraîneur de boxe thaïlandaise. Il formait alors une jeune femme de 20 ans, Samantha. © marieaurore J’étais intriguée, fascinée par ce couple étrange. La violence de l’entraînement, l’acharnement, les pleurs de dureté. Mais aussi par le très grand respect et les prières de remerciements à Bouddha, affiché sur les murs de la salle. Porteur d’eau, dans le cadre de l’inauguration du monument à Forent Mathieu sur la place de Quaregnon le 19 avril 2014 8 Théâtre Epique - Une Aube Boraine Thong m’invita à assister à leur entraînement, et même à y participer. Ce fut la première fois que je mis des gants de boxe. Puis nous avons discuté, 2 heures durant après cet entraînement. Théâtre Epique - Une Aube Boraine Thong m’apprit qu’il était double champion du monde, double champion d’Europe et champion de Belgique. Qu’il fut un des premiers boxeurs de boxe thaïlandaise à montrer et à inculquer en Europe cette pratique. Qu’il est aujourd’hui président de sa propre fédération, et qu’il entraîne et forme dans le Borinage de futurs grands champions, comme Samantha. Enfin, il m’apprit que, dans quelques mois, cette année donc, il livrerait à Frameries son dernier combat, le dernier combat de sa vie. Je racontais cette rencontre à Lorent, qui me proposa d’emblée de travailler à une forme théâtrale autour de Thong. Lorent voyait aussi un rapport direct entre la boxe et moi, une sorte d’évidence entre cette discipline et la manière dont j’aborde le travail. Entre la persévérance, la dureté, l’acharnement, le dépassement de soi et sa mise en danger, inhérente. J’ai donc revu Thong, plusieurs fois, je suis allée aux entrainements de son club. Et c’est là que je rencontrais Jason, le fils de Thong, âgé de 17 ans. Cette rencontre acheva de me persuader d’entreprendre cette écriture. si Jason gagne les cinq combats de ces prochains mois, il passera en catégorie professionnelle. La boxe deviendra alors son métier. J’avais mon sujet : un père qui livre son dernier combat et son fils qui prend la relève. Le début d’un sujet qui résonnait aussi fatidiquement avec ce que je vivais avec mon propre père, malade, ne pouvant plus se battre, alors que moi commençant ma vie active je menais mes premiers combats. En assistant aux entraînements, je sus aussi très vite que je souhaitais filmer ces corps qui se battent. L’évidence de l’image était là, les corps des boxeurs appelaient à cette proximité. J’ai alors demandé à Camille Meynard, un ami réalisateur, de venir avec sa caméra. Notre duo commença. Pendant plusieurs mois, nous avons suivi, avec sa caméra, Thong et Jason, qui nous laissèrent les filmer. Filmer leur intimité, leur quotidien, leurs premiers et derniers combats. Je commençais à écrire FIGHT. Emilie Marechal Jason, boxeur semi-professionnel, veut devenir un grand champion, comme son père. Et c’est celuici qui l’entraîne. Cette année est pour lui aussi un moment aussi crucial qu’il ne l’est pour son père : 9 Métiers Sciences Cerebrum, le faiseur de réalité: un scientifique devenu comédien Penser avec les mains, sur l’artisanat Représenté plus d’une centaine de fois au Théâtre de la Communauté de Liège (entre autre), pour un public de tous âges et de tous horizons... quelques réactions: Les gestes de l’artisan font partie de son être. Ils sont mémorisés et incorporés. Ils lui donnent une richesse intérieure et une capacité d’agir avec contrôle et précision. Et toi, ton grand-père, il faisait quoi comme métier ? U n spectacle participatif, coproduit par Le Théâtre de la Communauté (Liège) et le Théâtre Epique, qui a pour but de remettre les métiers manuels à l’honneur et s’interroger sur la frontière habituellement posée entre l’artisanat et les travaux intellectuels. “Penser avec les mains” est une création collective sur base de rencontres d’artisans et d’intervention des publics durant la représentation. Une pièce de théâtre mouvante, en constante redéfinition. “Il était prof de français. Mais pas ici hein, là-bas, au bled” “Mon grand-père a construit les premiers chemins de fer de Belgique!” “Mes grands-parents étaient dans l’armée en Russie. Mon grandpère dans les tanks, ma grand-mère infirmière” “Je ne sais pas...” “Papa, il faisait quoi papy?” “J’ai vraiment l’impression d’avoir 10 ans d’être face à un tableau noir et de ne rien comprendre. Et d’me trouver nul, mais nul ! […] Ben oui, moi j’étais nul en dictée ! Voilà ! » Yvain Juillard, le comédien principal n’hésite pas à raconter ses propres faiblesses pour mettre le public à l’aise. Démarrant sur un quiproquo, la pièce instaure une complicité naturelle entre lui et les spectateurs… à tel point qu’ils finissent par dialoguer. Au moment d’écrire ces lignes, “Penser avec les mains” a déjà été vu par une centaine de groupes en scolaires. Tous y ont trouvé leur compte car la force de ce spectacle est de donner une place légitime aux spectateurs, de leur montrer que, quels que soient leurs savoir-faire, quels que soit le métier qu’ils voudraient apprendre – manuel, intellectuel, ou les deux –ils ont de la valeur.” Dans ton métier, tu fais quoi avec tes mains? “Ah ça, le jour où je ne sais plus me servir de mes mains je ne peux plus travailler” C’est quoi votre métier? “Kiné” “La première chose c’est toucher”. “Toucher quoi?” “Le bois” “Tu es menuisier?” “Oui, enfin, j’apprends” “Il construisait des ponts” Mélodie Mertz, Théâtre de la Communauté Combien d’années pour apprendre ton métier? C’est combien de temps la formation que tu fais? “euh... toute une vie, non?” “Ébéniste, c’est trois ans” “Cinq ou trois ans selon l’école, mais pas moins de trois ans en tout cas” “Toute la vie, mais pas forcément à l’école” Le thème du spectacle “Penser avec les mains” est l’artisanat : son importance, sa pratique et la transmission des savoir-faire qu’il nécessite Titre de la photo : “Parole au corps”. Dans le cadre des représentations au Théâtre la Balsamine en janvier 2014 (Bruxelles) Ta réalité, ma réalité, notre réalité, leur réalité… Qu’est-ce que c’est que cette chose qui semble se transformer au fur et à mesure de nos expériences, qui fluctue d’un individu à l’autre, d’une culture à l’autre, qui nous empêche parfois de nous comprendre ? Quelle est cette chose que j’appelle « ma réalité » ? Ancien biophysicien spécialisé dans la plasticité cérébrale, aujourd’hui acteur, Yvain Juillard vous propose lors d’une conférence-spectacle d’interroger ensemble le fonctionnement du cerveau afin de questionner la nature multiple de la réalité. Une proposition faite aux nouvelles générations de franchir les frontières qui nous séparent trop souvent des connaisances scientifiques qui seront à la base des enjeux de demain “Cerebrum, le faiseur de réalités” est une proposition faite aux nouvelles générations de franchir les frontières qui nous séparent trop souvent des connaisances scientifiques qui seront à la base des enjeux de demain. En particulier les connaissances sur notre cerveau, qui n’ont jamais été aussi importantes et opèrent une véritable révolution dans la compréhension de qui nous sommes, une révolution unique dans l’histoire de l’humanité. Nous sommes notre cerveau, notre cerveau c’est nous, mais comment fonctionne-t-il ? Qui sommes-nous ? Qu’est-ce que notre réalité ? Avant de repenser l’avenir, ne faudrait-il pas apprendre à se repenser soi-même, au delà de ses préjugés, de ses a priori, de ses croyances ? Pourquoi ne pas accepter d’entrer dans les propositions 10 fascinantes des neurosciences sur le fonctionnement de notre cerveau ? La science démocratisée a toujours libéré l’Homme de ses dogmes, de l’esclavage par sa remise en cause perpétuelle des croyances trop bien établies et trop souvent au service d’intérêts particuliers... La science est l’inverse d’un dogme, d’une vérité absolue. Elle est une tentative, la plus sincère et la plus objective, qu’ont créé les humains pour tendre vers une vérité insaisissable qui les concerne directement. Par ailleurs, ce projet s’étant constitué par étapes successives toujours en dialogue, avec la participation des “spectacteurs”, il gardera cette dynamique de rencontre et d’évolution permanente afin, comme notre cerveau, de rester plastique. Ainsi, entre chaque représentation, se poursuivront des phases de recherches... © S Alain Janssens C e projet s’est concrétisé suite aux rencontres qui ont eu lieu autour du spectacle “Penser avec les mains” de Lorent Wanson et des marches effectuées dans le Borinage dans le cadre du projet artistique et participatif Une Aube Boraine. Lorent et moi avons pu être à l’écoute des préoccupations présentes d’adolescents et de jeunes adultes, d’apprentis mécaniciens, d’étudiants en fin d’humanité mais aussi de personnes en fin de vie, tous inquiets pour leur avenir. Il est beau de voir une intuition se poursuivre et se préciser sans cesse, tisser perpétuellement des liens au fil des rencontres. Yvain Juillard Théâtre Epique - Une Aube Boraine Théâtre Théâtre Epique Epique -- Une Une Aube Aube Boraine Boraine Photographie prise durant les représentations au festival des Rencontres Jeune public de Huy en 2014 1111 © Ingra Soerd Culture Culture Des évènements pour rassembler, reportage photo En Appétit! (C’est le temps de cuisson qui importe) Différentes étapes ont balisé notre aventure, autant de rendez-vous entre les artistes et les populations pour se rencontrer, échanger et faire la fête! Quelques photographies d’instants suspendus sur le parcours d’une Aube Boraine... Deux jours de fête, de scènes ouvertes, des concerts, des spectacles en chantier, des ateliers d’expression artistique et sportive, des films, des improvisations nocturnes, des expositions, des conférences déjantées, un barbecue géant, une fanfare, des cocktails improbables …un événement culturel et participatif majeur à la Fabrique de Théâtre à La Bouverie les 5 et 6 avril 2014 pour se retrouver et fêter les 25 ans du Théâtre Epique/Cie Lorent Wanson! Des marches L’Alion r’trouvé © Alessia Contu © Alessia Contu © Barbara Dulière Point de départ d’”Une Aube Boraine”, une quinzaine de comédiens ont marché à travers le Borinage durant plusieurs jours pour tisser des liens avec les gens de la région. Cette traversée a été mise en scène et en partage durant deux rendez-vous festifs au Charbonnage de Marcasse les 18 et 23 juin 2013. Plusieurs centaines de personnes, du Borinage et d’ailleurs, se sont retrouvées pour échanger, partager leurs points de vue, s’appuyant sur les témoignages poétiques des comédiens. Les spectacles initiés dans le cadre d’”Une Aube Boraine”sont nés de ces échanges. Le 10 mai 2014, dans les rues de Colfontaine, ont défilé une cinquantaine d’enfants: la procession de l’Alion a été remise sur pied pour la première fois depuis plus de 100 ans! Les enfants de la procession ont suivi des stages créatifs, le résultat de ces stages (char, bannières, chansons, numéros de cirque) a été directement intégré dans la procession. Vin chaud et amuse-gueules Fontaine de voix En prélude au projet musical et théâtral « C’est presqu’au bout du monde», 6 chorales ont travaillé durant quelques mois le chant «Youkali» de Kurt Weill. Nous avons invité leurs parents et tous autres publics à venir partager leurs chants et témoignages. Cette manifestation a suivi une journée d’ateliers expressifs et créatifs animés par les actrices du projet. Le 15 février 2014, ce rendez-vous a rassemblé plus ou moins 300 personnes, en collaboration avec le Centre Culturel de Colfontaine. 14 Théâtre Epique - Une Aube Boraine © Cedric Le Goulven © Cedric Le Goulven © Maxime Pistorio © Maxime Pistorio Deuxième rendez-vous artistique et festif, Vin chaud & amuse-gueules s’est déroulé le 20 décembre 2013 dans la Salle des Fresques de l’ICET de Cuesmes. Spctacles en chantier, scène ouverte aux artistes du Borinage et d’ailleurs, l’évènement peut se définir comme une mise à disposition d’un espace singulier de prise de parole pour les populations locales et venues d’ailleurs. L’aube(rge) boraine Un grand Cra-Raoké borain ouvert à tous, le 26 octobre 2014 à la Maison du Peuple de Pâturages. Scènes ouvertes, présentations de spectacles en chantier… un vrai moment de fête et de partage, pour inaugurer les bureaux du Théâtre Epique! Théâtre Epique - Une Aube Boraine 15 Culture Culture Nous sommes tous des Van Gogh L’Ensemble instrumental de Colfontaine © Gaetano Barrile © Gaetano Barrile © Gaetano Barrile “Une Aube Boraine” est une aventure. Tout au long du chemin, des liens se sont tissés entre les artistes et les populations du Borinage. Avec l’atelier “Nous sommes tous des Van Gogh”, nous avons convié plusieurs artistes et personnalités complices à élaborer, dans le cadre de la série d’évènement “Van Gogh, la folle légende” du projet Grand Ouest de Colfontaine, des propositions artistiques et humaines dont la seule volonté serait d’offrir un gueuloir à l’inaudible, un éloge de l’anonymat. Samedi 25 avril, sous le chapiteau planté pour l’occasion au Charbonnage de Marcasse, nos amis ont pris la scène et la parole. Des spectacles en chantier ont également été présentés. L’Alion © Ingra Soerd © Ingra Soerd © Ingra Soerd Plus de cent cinquante enfants, issus des écoles fondamentales de Colfontaine ont participé à cette deuxième édition le 26 avril 2015 dans le cadre du Grand Ouest de Colfontaine. Le soleil et la pluie ont rythmé la procession, jusqu’au Charbonnage de Marcasse où les chants de l’Alion ont pu résonner, repris en choeur par les enfants, dans tout le Borinage! Témoignage de Fabian Fiorini, compositeur I l est des expériences de création qui vous remettent réellement au travail, qui tendent à radicalement changer le regard que vous portiez jusqu’alors sur le monde, l’expérience induite par Lorent Wanson dans le cadre de l’Aube Boraine est bien de celles-là. Je vais développer en quelques points les intuitions, les ressentis, les souvenirs liés à cette grande aventure. D’abord, cette réunion, la première du projet, Lorent me parle, en mot tous simples : des jeunes acteurs vont sillonner le borinage pour se rendre compte de l’intérieur, par l’intérieur, de ce que c’est vraiment cette région, de ce que sont vraiment les gens qui y vivent comme entre deux mondes… Je suis déjà impressionné. Une telle expérience ne peut être que fondatrice et libératrice… Retrouver le temps de flâner, tout en recueillant des impressions, être ouvert aux autres comme on n’en a plus jamais le temps. Formidable ! Et, en effet, la première séance de retour, je veux dire lorsque les acteurs nous ont fait un compte-rendu quasi exhaustif de leur cheminement, l’émotion était telle qu’elle était à la limite du soutenable. Chacun, chacune, après avoir été déposé dans un coin très différent du Borinage avait, évidemment, des tonnes d’anecdotes, drôles, moins drôles, sur tout ce qui lui était arrivé. Et ce qui leur était arrivé, c’était une profonde transformation de leur statut d’acteur. Ils n’étaient plus acteur de théâtre, uniquement, mais ils étaient redevenus plus intensément que jamais des acteurs du monde, tout simplement. Ce monde que l’on n’a plus le temps de rencontrer, et que l’on ne connaît presque plus que par les livres, la télévision, les journaux. Là, pendant les trois jours de marche, ils avait renoué avec ce grand monde, ce lieu magique et troublant qui est le creuset de toutes les vies, de toutes les passions. Dans ce chaudron particulièrement bouillonnant qu’est le Borinage, ils s’étaient plongés et en étaient revenus avec un cœur ouvert et sensible…. 16 Lors des présentations publiques de ces aventures, acteur, artiste, musicien, et spectateur avait renoué avec un sens quasi primaire de l’art : on a partagé et transmis une parole qui ne peut se dire hors de son lieu habituel, pour l’offrir avec les autres par le biais de la scène. Tous, public et artistes, nous étions les colporteurs de toutes ces vies, de toutes ces formidables épopées de vie que chaque être porte, avec courage, intimité, fierté et parfois aussi douleur ou inconscience. Et presque à chaque fois, les larmes remplaçaient les mots qui ne pouvaient se dire. Et puis comment ne pas évoquer la rencontre avec l’Ensemble Instrumental de Colfontaine… Moi je disais toujours « la fanfare ». Ils m’ont expliqué que c’était péjoratif. Je n’ai pas compris pourquoi mais ce que j’ai compris c’est que quand des musiciens jouent avec le cœur, quels que soient leurs niveaux, la musique qui en ressort est toujours magnifique, touchante et complètement surprenante. Je me souviendrai toute ma vie être devant eux, pour travailler l’enregistrement de la chanson « Youkali », pour le spectacle « C’est presque au bout du monde ». J’ai ressenti cette volonté, cette puissance de vouloir se donner à fond pour que quelque chose advienne au centre du son. Je terminerai par Laurence, la directrice du centre culturel de Colfontaine, qui nous a accueillis comme des rois, toujours complètement investie dans ce projet de manière époustouflante. A chaque étape, donnant ses retours, critiques, mais toujours de façon à faire avancer cette aventure. Elle a donné à Lorent la confiance « Boraine » nécessaire pour chaque pas soit réellement légitime dans cette folle aventure qui touche bientôt à sa fin (provisoire…). C’est presqu’au bout du monde, HORS-JEU, la Conférence-Concert sur la Danse Barbare de Fernand Carion... cet Ensemble instrumental de plus de cent ans est un partenaire incontournable du projet “Une Aube Boraine”. S i vos pas vous conduisent un dimanche près de la Maison du Peuple de Pâturages, vous entendrez sans doute la rue chanter. De la magie? Sans doute. Dans la salle du haut répètent les musiciens de l’Ensemble instrumental de Colfontaine, fidèles à leur rendez-vous musical depuis plus de cent ans. Cet ensemble instrumental, c’est un peu la mémoire du Borinage. Créé à la fin du XIXème siècle en pleine lutte ouvrière, il se nommait à l’origine la « Fanfare Ouvrière Socialiste », jusqu’à la fusion des communes en 1972 où les différentes sociétés musicales périclitantes se sont rassemblées en un ensemble du même nom: l’Ensemble instrumental de Colfontaine. Les musiciens prennent place dans l’aile gauche de la Maison du Peuple (aujourd’hui inaccessible pour cause de délabrement) jusqu’à ce que le plafond s’écroule sur les timbales d’André Bouillon.... Si la plupart des sociétés musicales ont aujourd’hui disparues, il reste quelques musiciens qui résistent encore et toujours à l’envahisseur. Ils et elles sont une quarantaine, âgé(e)s de 16 à 80 ans, qui retardent diners de famille et autre festivités dominicales pour interpréter ensemble et avec la même passion autant de grands classiques que des chansons régionales, de la « Romance » de Beethoven à la chanson “Enn c’est nie co Fram’ri’s” de Joseph Dufrane, en passant par des standards de jazz, Stevie Wonder, la chanson française et la musique de films italiens… Autrefois anciens ouvriers, les membres de l’Ensemble instrumental représentent à présent tous les corps de métiers: gardien de prison, ancien soudeur inox (qui a soudé les cuves de toutes les grandes brasseries de Belgique), institutrice, cardiologue retraité, tailleur de pierre, musicien professionnel, étudiant en médecine…c’est toute la diversité sociale que j’écoute jouer ce dimanche matin (bien que personne ici ne connaisse vraiment le métier de l’autre, comme si savoir de quel instrument il ou elle joue leur suffit). A la fin de la répétition, nous descendons au café. J’avale une petite bière entre deux joyeuses blagues de musiciens accoudés au comptoir, et rejoins Mélanie Bouchez et Daniel Delhaye, les deux chefs d’orchestre. Ils me confient leurs voyages musicaux, de l’inauguration du parlement wallon à l’enregistrement de la bande son du magnifique documentaire “D’arbres et de charbon” de Bénédicte Liénard, des interventions musicales sur l’album “Vis ta vie en harmonie” de Lazare jusqu’à la Conférence-concert sur la Danse barbare de Fernand Carion interprétée en avril 2014 à La Fabrique de Théâtre dans le cadre de notre Aube Boraine et reprise le 23 août 2015 lors de notre évènement de clôture...ces rendez-vous musicaux et festifs ponctuent leur programmation traditionnelle: des concerts de Ducasse, de noël et de printemps où on fait la fête depuis des générations, bercés par les sons d’un ensemble centenaire. C’est avec émotion que je pousse la porte du café. A l’intérieur les gens rient encore, autour d’une bière dominicale levée au plaisir simple de jouer ensemble, pendant encore 100 ans, nous l’espérons tous. Fabian Fiorini Théâtre Epique - Une Aube Boraine Théâtre Epique - Une Aube Boraine 17 Culture Patrimoine Le Photomaton de Cédric Le Goulven Des Marches en juin 2013 en passant par les portraits projettés dans le spectacle “C’est presqu’au bout du monde”, Cédric Le Goulven n’a jamais quitté son appareil photo. Témoignage d’un parcours. T out avait commencé par une marche, une errance un quasi vagabondage…il s’agissait de se perdre, par les soirs bleus d’été, d’aller par les sentiers comme l’écrivait le poète ; de se laisser suspendre et, dans cet entretemps embelli de sa plus parfaite inutilité, laisser vaguer son imaginaire au gré des humeurs, étrangement s'étonner. J’étais donc cet étranger dans cette région terreuse, minière, moi qui suis d’un pays de marins aux horizons tendus vers les Amériques. Il me fallait à présent descendre dans les puits sur les traces du jeune Van Gogh qui ne s’imaginait pas encore peintre, à la recherche des traces d’un passé qui m’était inconnu, « presque au bout du monde » dans cet autre Finistère qu’est le Borinage…. Enquêteur en quête, de cette histoire refoulée, elle qui bâtit notre monde, cette Europe en perpétuel recherche d’une histoire commune, il avait bien fallu aller la chercher quelque part cette foutue énergie qui fit rouler les trains et forgea l’acier des villes. Cette histoire elle est là, en représentation permanente, c’est le décor, la toile peinte qui reflète la région : c’est les montagnes, c’est les prairies, c’est les rocheuses, c’est Niagara, Madeleine, mon Amérique à moi, c’est la vallée de la mort aussi…Ici on enterre dans la même terre que celle qu’on a sorti à coup de pioche pour faire un terril. Et si la mémoire est affaire de sensation alors on en a pour son pesant de gayettes. Tout vous ramène à la mine comme quand toute la région y travaillait : des mineurs aux lavandières impossible d’y échapper ça vous brosse un destin, aujourd’hui c’est l’chômage mais on s’en fout l’important c’est ce qu’on est, et ici : on est Borain ou on est rien… ! C’est dans cette topographie un rien imaginaire que je les ai croisés les Borains, le temps d’une chope, d’une escale, d’un portrait. Alors me v’là photographe ! Faut que j’leur tir’ l’portrait à ces gueules noires? « La photographie est un art peu sûr » a écrit Roland Barthes et je n’en menais pas large en effet. Mais tout le monde a défilé, simplement, dans la joie, avec une confiance dans le regard, mon regard, qui m’a édifié et honoré. Une bonne photo c’est d’abord une rencontre, faut attendre que quelque chose se passe c’est un art de chasseur ou de pêcheur de carpe. Quand derrière le rideau de fer qui s’ouvre et se ferme devant le miroir de l’appareil une émotion s’impose et se fraye un chemin jusqu’à la pellicule pour se révéler (autrefois c’était du sel d’argent aujourd’hui c’est du sable sur une carte mémoire, une histoire minérale de toute façon ) c’est d’abord un étonnement que l’on voit puis on distingue un territoire, une carte : là aussi il y en a des rivières qui ont coulé, des ravines que le temps a creusé, des défaites qui ont fait les fossés, des rires comme des tempêtes, des coups de grisou, des terrils à gravir, c’est dans la boue que poussent les diamants m’avait dit une fois un enfant…C’est une topographie de l’âme que j’y ai rencontré. Mais avant tout il y a surtout la dignité, profonde et forte, qui fait les femmes et les hommes des paysages uniques. Dans la vieille mythologie, Orphée, un mineur lui aussi, qui était descendu dans une mine de sel pour retrouver son amour perdu, avait coutume de se définir ainsi : « je suis fils de la terre et du ciel étoilé…et j’ai soif. » Quand on est au fond écrivait Van Gogh à son frère Théo, la lumière du jour est comme une étoile brillante que l’on distingue sur un ciel noir. Alors qui mieux que les Borains peuvent se prétendre fils de la terre et du ciel étoilé (on hérite tous de quelque chose) et tiens ! J’ai soif… ! J’vais m’en j’ter une au Macédonia avec Yannis, Sabino et Michel les trois pr’miers gars qu’j’ai photographiés, c’était à Wasmes par un soir bleu d’été où comme Rimbaud pendant un instant j’ai senti que l’amour infini me montait dans l’âme …Le retour fut moins poétique, plus zig-zag, j'étais rentré ému en tout cas avec comme me l'avait dit Sabino d'un air entendu: "pour brair avec mam birout dans l' main..." Cédric Le Goulven La Maison du Peuple de Pâturages Depuis plus d'un an, le Théâtre Epique a installé ses bureaux à La Maison du Peuple de Pâturages, s'immergeant dans ce Borinage que nous avons traversé depuis plus de deux ans déjà dans le cadre de notre Aube Boraine. Descendre du bus 2, longer la Place du Peuple jusqu'à ce que devant nous l'imposante façade se découvre, avec en son front “Le Triomphe du Travail”, la fresque de Paul Cauchie nous rappelant à nous, passants, ces mineurs descendus puiser l'or noir au fond des mines dans des conditions désastreuses, hissant la Wallonie au rang des plus grandes puissantes d'Europe. Cette Maison du Peuple est devenue autant un lieu de rendez-vous presque quotidien qu'elle n'est un monument, traversant le temps, abritant sous ses arcades Art nouveau les tumultueuses réunions des ouvriers du XXème siècle jusqu'aux conseils d'administration du Théâtre Épique, entre autres activités... Lieu de partage, de passage et d’histoires, tenu à bout de bras par son gérant, Gaetano Barrile. Gaetano Barrile, gérant de La Maison du Peuple de Pâturages Le 7 juillet à la Maison du peuple de Pâturages Depuis deux jours, nous répétons Kalach’, la monogravie de Julie Jaroszewski, à la Maison du Peuple de Pâturages. Le soleil déjà étire ses derniers rayons roses le long des nuages, nous sortons de la Salle culturelle pour un verre de fin de travail. Derrière son comptoir, devant son billard ou au bord d’une table, Gaetano, toujours alerte, nous accueille quelques bières au bout des doigts, comme le repos promis du chevalier repus. Il y a des lieux qu’on traverse comme on rentre à la maison. C’est ce que je me dis souvent quand je pose mes calepins et mon ordinateur dans cette Maison du Peuple qui, depuis que Gaetano l’a reprise, a véritablement retrouvé son nom. Gaetano, nous cohabitons ensemble depuis plus d’un an, dans le cadre de cette Aube Boraine que nous construisons ensemble. J’interroge sa mémoire, son plus beau souvenir ici, et je m’étonne à peine de sa réponse...c’est une photo, prise lors de notre évènement du 26 octobre lorsque nous fêtions notre pendaison de crémaillère. Parmi les chants, concerts et récits improvisés, entre deux spectacles en chantier, Victoria et Louisa ses deux filles se sont regardées dans un battement de tambours, complices et liées comme deux sœurs peuvent l’être parfois. Derrière le bar, au coin d’une table, au bord d’un billard, on se retrouve parfois comme en famille. Des gens d’ici et d’ailleurs se croisent et se rencontrent. Ce mardi de fin de journée je regarde du coin de l’œil la tante de la femme de Gaetano: elle vient ici les mardis avec son petit-fils Kylian pour regarder les joueurs de billards s’entrainer parce que Kylian est fan. Et il joue bien. Au bout du comptoir un nouveau client, sirotant son verre de blanc, laissant errer son regard le longs des murs où nos affiches sont toutes là comme autant de traces de notre passage : photos, affiches de spectacles et d’évènements, et le tableau réalisé par Victoria, symbole de tous les voyages évoqués dans le spectacle “Nous sommes tous des Van Gogh” interprété par des artistes borains. “Une Aube Boraine” habite ces murs. Julie Jaroszewski retraverse son texte dans un coin de table, Lorent Wanson relit dans le journal les derniers évènements du tour de France : on est bien ici dans notre Maison du Peuple, dans cette familiarité des lieux qui résonne comme une habitude, à la fois réconfortante, presque douillette, et pourtant toujours surprenante et nouvelle. La photo de gauche et celle du haut à droite ont été prises lors de la marche de Cédric dans le Borinage en juin 2013. la photo en bas à droite est un portrait de personnes résidants dans le home de Cuesmes La Reposée, pour le spectacle “C’est presqu’au bout du monde” 18 Théâtre Epique - Une Aube Boraine Théâtre Epique - Une Aube Boraine ©Théâtre Epique C’est un coup de foudre qui l’a amené là. Il a vu à travers les vitres crasseuses d’un abandon de plusieurs mois un rêve de convivialité en jachère. Une Maison du Peuple comme il en existait autrefois, avec ses espaces de fêtes et de rencontre, espace du quotidien des gens, dernier refuge où le lien social s’exerce sans avoir à se définir. Depuis sa reprise le 15 novembre 2013, il en a fait du chemin: sa Maison du Peuple, qui a dû dans les premiers mois reconquérir sa place au sein du quotidien des gens, est devenue café, espace de championnat de billard en D1 et D2, espace culturel avec les activités du Théâtre Epique et les répétitions de l’Ensemble Instrumental de Colfontaine et même école d’acteurs de théâtre, avec l’installation des Blés d’or il y a quelques semaines seulement... 19 Voyages Patrimoine Immersion dans le Borinage pour étudiants sortants de la classe d’Art dramatique de l’Ecole Arts² de Mons Le Charbonnage de Marcasse Un pont entre le passé et l’avenir "Tu veux une nuit étoilée?" Me demande Nadine Gravis, un après-midi d'été, dans la petite cour juste à l'entrée du charbonnage. La nuit étoilée, c'est une bière en hommage à Van Gogh, artiste de passage dans les mines du Borinage mis à l'honneur par la Fondation Mons 2015. Cet après-midi, on est loin de la noirceur des mines de charbon, des hommes harassés remontés des entrailles de la terre pour en extraire la houille, sous le regard inquiet d'une Saine Barbe de pierre. Plus de 60 ans après la fermeture du Charbonnage, le soleil dore les genêts, des chevaux trottent librement le long du terril verdoyant et le silence d'un après-midi d'été au pied du châssis à molette immobile incite à la rêverie. 1994-2015, plus de 20 années de combats acharnés pour tenter de démontrer la valeur du site aux autorités. Et pourtant le Charbonnage a fait parler de lui, revisité par des artistes, des historiens, des promeneurs, fascinés par son éclat si particulier. Minelli y tourne le film "La vie passionnée de Vincent Van Gogh" en 1955, et plus récemment en 2015, Henri De Gerlache revient sur le site pour tourner son documentaire "Le choix de peindre" sur l'expérience de Van Gogh au Charbonnage. Depuis 3 ans le Centre culturel de Colfontaine y organise son parcours poétique. C'est ici que Le Grand Ouest de Colfontaine a eu lieu, coordonné par le Centre culturel, fédérant plus de trois mille personnes, artistes, bénévoles des associations et populations d'ici et d'ailleurs au pied du terril, dans ce paysage d'arbres et de charbon. C'est ici, aussi, qu'”Une Aube Boraine” a débuté en juin 2013: nos artistes, après de jours de marche et de rencontres dans le Borinage, ont donné rendez-vous pour la première fois aux gens du coin et de plus loin, pour vivre ensemble leurs premières émotions, et partager la parole dans une esprit de fête. Des promeneurs passionnés de nature et d'Histoire guidés Filip Depuydt aux jeunes architectes fascinés par la beauté du site, le Charbonnage de Marcasse est un rêve partagé qui rayonne bien au-delà de Colfontaine. © Margaux Fontaine Le Charbonnage de Marcasse d’autrefois © Alessia Contu "Si t'as pas la passion, je ne sais pas si ça peut marcher" me confie Nadine. Et il s'agit bien là d'une passion, entre elle, Ricardo et ce charbonnage, avec tout son paradoxe: entre incertitude et foi profonde. C'est en 1993 que Nadine Gravis et Riccardo Barberi sont tombés amoureux de ce lieu. Ils ont vu dans ces ruines la force de la mémoire et la promesse d'un renouveau. Le Charbonnage de Marcasse, tristement célèbre par ses coups de grisou à répétition, et en particulier la catastrophe du 13 janvier 1953 qui provoqua la mort de 24 mineurs, est demeuré depuis en l'état. La nature y a repris sa place, reverdissant ces lieux autrefois noir charbon. Dans les années 90, un promoteur rachète le site, abattant certains bâtiments branlants, pour y construire un lotissement. Cependant la zone étant déclarée zone verte, il revend le site à Nadine et Ricardo, laissant derrière lui des tas de gravats que Ricardo déblayera durant des mois, avec une brouette et une scoupe..."On ne savait pas que Van Gogh était venu ici à cette époque. Mais bon, Ricardo qui déblaye le terrain avec sa scoupe et sa brouette, c'était un peu la même folie". C'est en 1994, avec la visite de Madame Livingston de National Geographic, que le passage de Van Gogh au Charbonnage de Marcasse est découvert par ses nouveaux propriétaires. Cette nouvelle oriente leur rêve: faire de ce site un lieu de mémoire, en hommage aux mineurs, mais aussi un lieu culturel. Ce rêve, ils le portent à deux, jusqu'à la naissance de l'asbl Marcasse et sa mémoire où quelques passionnés, architectes, guide nature, amoureux des lieux et de l'Histoire joignent leur force pour faire valoir le projet auprès des décideurs. Sophie Guisset lors Des Marches en juin 2013, arborant le chapeau de Van Gogh, offert par l’une de ses rencontres 20 ans d'actions donc pour faire exister ce site, avec au bout du chemin un rêve actif porté par quelques-uns seulement (ils sont toujours trop peu, ces fous qui ont changé le monde): préserver le patrimoine historique comme une mémoire vivante, emblématique de la Région; faire valoir le patrimoine architectural: le charbonnage est très original dans la conception même de ses bâtiments, on y trouve notamment le seul réservoir à eau rectangulaire (il fait d'ailleurs l'objet d'une étude menée par la Faculté polytechnique de Mons, en vue d'un classement); ouvrir une taverne et des gites, pour permettre aux gens de passage de s'y reposer et de prendre le temps de découvrir la région, construire des espaces culturels, des salles d'exposition et de spectacles...préserver les ruines, sauver le site du délabrement, lui donner une deuxième vie et l'ouvrir en partage aux populations locales et à ceux et celles venues d'ailleurs. "20 ans qu'on se bat. J'aimerais voir ce site revivre, avant qu'on soit din l'terr a petote", me confie Ricardo, ce fils de mineur qui a racheté la mine comme on boucle l'histoire, la petite, celle des gens, pour donner du sens à la grande. On retrouve, dans l'âme du Charbonnage de Marcasse, un petit quelque chose de la folie de ce peintre de passage. Si c'est une folie, elle est douce et presque sage, cette entreprise de redonner au site sa valeur historique et symbolique, d'en faire un pont entre le passé et l'avenir, tenter de lui donner sa place au sein de l'entité communale et régionale: un patrimoine historique et humain devenu aujourd'hui presqu'incontournable. 20 Les élèves de la classe d’Art dramatique de Frédéric Dussenne de l’Ecole Arts² de Mons rejoignent le projet Une Aube Boraine dans le cadre de leur exercice de fin d’étude. Les étudiants d’Arts², de la classe d’Art dramatique de Frédéric Dussenne préparent leur aube boraine Arts², mardi 28 avril 2015. "Numéro 622!" 1er carnets de route pour les élèves de la classe d'Art dramatique de Frédéric Dussenne, embarqués dans notre Aube Boraine. Récits théâtralisés de leurs premières marches à travers le Borinage. Dans la salle : une grande table, un accordéon, une lampe de mineur, le maillot de foot d'Eden Hazard, des photos de charbonnages, de gens croisés au hasard des ruelles et des cafés...en farandole. Des boissons (diverses), des serpentins, la musique à fond, des gens qui chantent...on arrive ici comme au milieu d'une grande fête. Du silence s'impose parfois autour du miro. Il est des histoires de vie qu'on raconte presque recueillis, comme celle de l'Eglise de la Grand Place d'Hornu, témoin discret de toute une existence, "ce lieu, cette ville, cette vie, tout ça c'est moi. (...) La mort n'est rien, je suis juste dans la pièce d'à côté. " Des témoignages, en marche. Un terril (fief de Lambrechies), gravi comme un long pèlerinage, où 57 mineurs ont trouvé la mort lors du coup de grisou de 1934. Au détour d'une rue, près du Laminoir (Jemappes), une plaque commémorant 33 borains massacrés par des soldats allemands le 3 septembre 1944. "Numéro 609!" Le Grand Ouest de Colfontaine, avril 2015. Une scène au pied du terril. Théâtre Epique - Une Aube Boraine 12 jeunes artistes se sont jetés avec curiosité en immersion dans le Borinage, à la rencontre des gens, de la Région et d’eux-mêmes... Ils sont venus poser les premières pierres d’une rencontre sincère avec la région et ses populations, afin de rendre compte du pouls d’un territoire, d’un état du monde. 12 artistes en marche jusqu’aux 27 et 28 juin 2015 où nous leur avons donné rendez-vous pour partager avec le public leurs expériences et découvrir leurs aubes de passage de l’école à la vie professionnelle, avec le Borinage en écho et en miroir... Les passages sont tirés au sort. Des accents colorés, des vierges aux lions, des voyages en mer avec des ventres arrondis en cadeau, des syndicalistes timides (sauf devant les patrons), l'élection de miss Borinage... entrecoupés de danses collectives, de chants populaires, de tubes des années 80, d'hymnes nationaux... Théâtre Epique Epique -- Une Une Aube Aube Boraine Boraine Théâtre "Numéro 606! " Entre les ruelles des corons, on voyage du Borinage en Russie, dans un urbanisme kafkaïen organisé pour le profit des patrons, pour le contrôle des militaires. Du fond de la mémoire surgit le légendaire brigand Moneuse, aventurier sanguinaire décapité en 1798... Des guérisons miraculeuses à la grotte Notre-Dame de Lourdes à Quaregnon (dont personne ne se souvient), des chemins de traverse, des ruelles anonymes, des ronds-points (beaucoup) à Hornu, Jemappes, Wasmes, Quaregnon... Des promenades silencieuses dans les cafés désertés, au bord des commerces à l'abandon, des hangars désaffectés... Les histoires des lieux et des gens, des gens qui ont hanté ces lieux, des lieux qui sont comme la mémoire des gens, vivent et revivent autour de cette table de fête. Et doucement se dévoile un Borinage, généreux, mystérieux et pourtant encore et toujours insaisissable. Et puis bon, c'est une habitude dans notre Aube Boraine, comme un rituel: tout ça s'est fini par une danse à travers les images, les objets ponctuant les murs du conservatoire comme autant de témoins de ces errances, dans une odeur de frites froides à la sauce brazil... 2211 Faits divers Voyages Il tombe en panne dans le Borinage, le soir C’est presqu’au bout du monde...du Borinage aux utopies “Youkali, c’est le pays de nos désirs” Roger Fernay Interroger cet élan, cette nécessité du départ pour toucher du doigt le rêve d'un monde meilleur, d'un paradis perdu L a Belgique fêtait en 2014 les 50 ans de l'immigration marocaine. Dans ce contexte, le Théâtre Epique a voulu interroger cet élan, cette nécessité du départ pour toucher du doigt le rêve d'un monde meilleur, d'un paradis perdu, dans une dimension multiculturelle, universelle. "C'est presqu'au bout du monde" traite de la quête d'idéal qui motive les départs et de la confrontation avec le réel. Ce spectacle voyage entre différentes cultures, rassemblées sur un territoire et un temps donné. "C’est presqu' au bout du monde" donne la parole aux aventures et mésaventures du quotidien, et celles de tous les voyages pour trouver la paix ou la fortune à travers des chœurs parlés, chantés, des mots de poètes, des chansons célèbres ou inédites inspirées de témoignages croisés, entre autre sur la route d’Une Aube Boraine. Hommage aux petites histoires personnelles, aux résistances, à la violence sociale d’hier et d’aujourd’hui et à la question du droit au voyage, du droit à la dignité. C’est une rêverie fragile sur notre capacité à nous remettre en mouvement dans un monde qui nous contraints à la stagnation. La nouvelle création de Lorent Wanson nous entraîne dans un espace imaginaire, entre musique et théâtre, à la source et à la croisée de tous les rêves… Sous le regard bienveillant de ceux que nous avons croisés au cours du projet “Une Aube Boraine”, aux rythmes de leurs interprétations par le blues, le rock, le folk, le jazz, la chorale ou l’harmonie. Pour interroger cette vaste matière, nous sommes allés à la rencontre des pensionnaires de homes, d’allocataires du CPAS, d’enfants dans des Maisons de Jeunes et de bien d’autres témoins de la Région de Mons-Borinage. ©Théâtre Epique A partir de cette chanson bouleversante de Kurt Weill, Lorent Wanson et le Théâtre Epique voyagent à travers les espoirs et désillusions, les utopies et renoncements d’une région, de cultures, d’un monde. Trois comédiennes - Sara Amari, Delphine Gardin et Julie Jaroszewski - chantent et interprètent avec force une mosaïque de portraits accompagnées par Fabian Fiorini, magitral pianiste et compositeur. © Alessio Mucedda Entre l’intime des rêves inaboutis et le monde d’aujourd’hui C ’est presque au bout du monde revêt la forme d’un patchwork tant musical que visuel. Ses textures sont rythmiques, linguistiques, corporelles, alliant chants, témoignages, petites formes improvisées à la manière des traditions orales archaïques. Avec différents voyages proposés entre l’intime des rêves inaboutis et le monde qui aujourd’hui comme de tout temps cherche une paix. Entre des influences musicales qui puisent dans le plus populaire et parfois le plus élevé ou contemporain, entre les racines diverses qui par strates tentent de donner corps à une universalité qui n’assimile pas, mais faire résonner toutes les nuances de ses échos. Ce spectacle tricot, qui semble se tricoter au fur et à mesure, tente de créer de l’intime dans un cadre immense et déchevêtré, industriel, un espace où stocker de la main-d’œuvre ou des déplacés politiques ou économique. Au sable des origines, d’or ou d’ocres, se mêlent des restes de houille, d’anthracite, points de chute de bien des immigrés. Le Borinage, terre multculturelle: extrait de la monogravie de Lily Noel dans l’exercice théâtral “Regarder l’aube, l’étendre” « Tu n’avanch’ras djamin tou seû », c’est le Pourquoi écrire sur Quaregnon? nom du spectacle de Sébastien Bonnamy, sur base des rencontres qu’il a pu effectuer Les discussions avec Lorent Wanson, qui m’accompagnait depuis le début de cette lors d’une panne sèche dans le Borinage. C Parti au bord de sa BMW, car il devait donner une représentation dans la région, Sebastien a pu, grâce à un vaste réseau multiculturel de débrouillardise, reprendre Et c’était parti! finalement sa route, pour la joie de nos Quaregnon, ce sont mes racines, j’y suis né, j’ai spectacteurs! On dénote quelque peu il faut le dire, mais sur l’autre trottoir, celui des belges, on dénoterait aussi. aventure, ont été nombreuses, et même sinueuses...Puis Lorent m’a dit: « Tu as une panne de voiture, à Quaregnon, et tu dois dois jouer un spectacle! Voilà , maintenant, écris! » Sebastien, pourquoi jouer cette pièce? Parce que j’avais envie de jouer ce bout de vie, de l’offrir au public. La facilité de ce fond, c’est que j’écrivais ce que je jouais, et que je jouais ce que j’écrivais; ce qui m’offrait donc une infinité de possibilités, d’ouvertures. La difficulté, par contre, était de ne pas réduire cet écrit, qu’il ne soit pas uniquement destiné à une minorité. En effet, les personnes que je rencontre dans ce périple sont italiens, grecs, marocains, borains en somme... Mais j’étais certain qu’il était nécessaire de partager ce récit qui s’intitulera « Tu n’avanch’ras djamin tou seû... » (trad: Tu n’avanceras jamais tout seul), issu du chant de supporters du football club de Liverpool, « You never walk alone », chant devenu universel. grandi à Quaregnon. Quaregnon, c’est la mine et ses charbonnages; c’est aussi la multitude de nationalités, donc des cultures différentes, réunies dans un village du Borinage, près de Mons. Et puis, ce seul en scène est universel, car si ma source est Quaregnon et ses environs, chaque être peut s’identifier à ce personnage ainsi qu’à tous ceux qui gravitent autour de lui. Pour conclure, « Tu n’avanch’ras djamin tou seû », qu’on aurait pu aussi appeler « L’éloge de la débrouillardise » (dixit Lorent Wanson) , parle à tous et à chacun d’entre nous. Le besoin de le jouer est aussi fort que le besoin de le raconter; bref, ce spectacle est le partage d’un Borain. © Francine Servranckx A partir des parcours intimes des actrices et de différents témoins du Borinage et d'ailleurs, avec toutes les branches universelles qu’ils proposent, accompagnés par le piano préparé de Fabian Fiorini sautant d’une influence à l’autre, nous racontons le réel, le mythologique, l’histoire et le quotidien. “C’est presqu’au bout du monde” a été créé en juillet 2014 dans le cadre du Festival au Carré au Théâtre Le Manège (Mons-Belgique) Théâtre Epique - Une Aube Boraine hez moi, chaque trottoir représente un pays. Le trottoir de droite c’est la Bel-gique, avec le banquier, l’architecte et la vieille dame. Et le trottoir de gauche, c’est l’Italie. Mes voisins : Filipo, Mario, Fabricio, Michael, Julio, Enza,… et nous! Je vous explique, ma mamy se dit montoise depuis 4 générations, jusque là je suis accepté sur le trottoir de droite. Mon papy lui, et c’est là que ça se complique vient d’une vague d’immigration,… en réalité plusieurs… Son père est né à Zlatary en Tchécoslovaquie en 1905. Il s’installe d’abord en Ukraine et en 1939 vient travailler au fond des mines à Quaregnon en Belgique. Sa mère est née en Carnegie aux Etats-Unis en 1909, venant d’une première immigration de ses parents ukrainien. D’ailleurs elle était fière de dire que pour immigrer ses parents avait pris un immense bateau comme le Titanic…Mais bien avant que celui-ci n’existe. C’est bien plus tard qu’elle retourne en Ukraine. En résumé, il faudrait que ma maison se trouve sur un trottoir à la fois belge, tchécoslovaque, américain et ukrainien. Ce qui devient de plus en plus compliqué. Ou alors sur un trottoir tchèque. Oui, en fait dans les années 50, les gens se re-groupaient par nationalité dans les quartiers. Y avait les Belges, les trucs, les grecs, les italiens et les Tchèques. Que tu sois Russe, Polonais ou Ukrainien, tu étais appelé le Tchèque ou la Tchèque. Mon papy, lui, se dit plus belge qu’un belge ! Car à ses 15 ans, on lui a demandé de faire un choix de patrie, il a choisi d’être belge ! D’ailleurs, quand il entend la brabançonne, il se met debout la main sur le coeur et il pleure… Je ne l’ai jamais vu le faire sur l’hymne ukrainien… ni américain, ni… bon soit. Moi, dans toute cette histoire, je suis un peu paumé. Ce dont je suis sûr, c’est que je descends de gueule noire, des deux côtés, car le grand-père de mon père était mineur à Charleroi. Je suis donc une gueule noire Belgo-ukrainienne. Au final, je n’ai toujours pas trouvé mon trottoir,… Et je crois qu’aucun d’entre nous n’a vraiment trouvé le sien. Heureusement, non? Nous les remontons, « les trottoirs » de notre enfance et de notre passé, en avançant à reculons ou en reculant vers l’avant. Le moindre de nos souvenirs se charge d’épices, d’accents qui nous sont familiers ou inconnus. Nous portons tous, chacun à notre manière, le monde. Nous avons tous autant de trottoirs que de chemin. Un écran de fortune, sur lequel se projette les images des orchestres et des témoins rencontrés dans notre immersion boraine et qui auront joué pour nous des versions multiples, parfois justes deux trois mesures répétées à l’envie, une chorale d’une centaine d’enfant projetée fixement. Lorent Wanson 22 Sebastien Bonnamy, quaregnonnais et comédien , en route pour interpréter son dernier spectacle, est tombé en panne sèche entre deux ronds-points de Quaregnon. Représentation de Tu n’avanch’ras djamin tou seû à la Maison du Peuple de Pâturages durant notre évènement l’Aube(rge) boraine en octobre 2014 Théâtre Epique Epique -- Une Une Aube Aube Boraine Boraine Théâtre 2233 Faits divers Portraits Une Kalach pour chanter contre l’acculturation Compagnons de route, amis borains ou non, artistes, bénévoles, personnes associées à ce vaste projet qui est devenu le nôtre... merci à tous ceux que nous avons rencontrés au hasard des chemins! N ous avons toujours chanté dans ma famille. Depuis petite-fille, les fêtes et repas se transformaient en d’énormes banquets où l’occasion était saisie de reprendre un à un les différents personnages de notre village, les anecdotes et aussi les chansons qui accompagnaient ceux-ci. Le français et le wallon s’y mélangeaient allègrement, j’y ajouta même adolescente l’anglais et quelques airs de Whitney Houston. Annina et Nikos Antoniadis I ls sont là depuis le début, personnalités complices d’Une Aube Boraine, on les retrouve dans la plupart de nos évènements: des Marches en juin 2013 au Charbonnage de Marcasse, à Vin chaud & amuse-gueules dans la Salle des Fresques de l’ICET de Cuesmes en décembre 2013, en passant par l’exposition-rencontre autour des robes cosmiques d’Anna à la Fabrique de Théâtre à Frameries en avril 2014 jusqu’à Nous sommes tous des Van Gogh au Charbonnage de Marcasse en avril 2015...Anna et Nikos ont toujours eu quelque chose à partager. Pour les 80 ans de ma grand-mère, je suis allée passer quatre jours chez elle, et je l’ai enregistrée. Le jour de la fête de ses 80 ans, j’avais préparé une vingtaine de CD de la compilation de Ses plus belles chansons et son cadeau fût d’en offrir un à chacun. De transmettre, encore. Pourtant petite, en dehors des fêtes, ma grand-mère n’était pas très encline à transmettre le wallon, cette langue de « sainsie » (paysan). Petite fille à l’école, elle aussi, se faisait taper sur les doigts si elle venait à utiliser sa langue maternelle. Sa mère, mon arrière-grand-mère ne parlant pourtant uniquement que le wallon (de Solre-sur-Sambre!) et comprenant à peine le français. Borains d’origines italienne et grecque, ils sont ensemble depuis 1960, installés dans une maison à Cuesmes où les murs regorgent de photos de famille, de pierres, de poèmes, de sculptures...on entre chez eux comme dans un poème. Sur la table, le pagnon de Quaregnon rivalise avec des biscuits italiens: on aime à penser que le café soit grec. Drôle de procédé qui éloigne ainsi les générations en les coupant de la sémantique du syncrétisme liée au terroir et donc aux activités issues de la terre et de la culture. Anna, son regard est suspendu vers un coin de la pièce. Elle peut voir dans un reflet une éclipse de soleil, dans une pierre la silhouette d’un être prisonnier, dans un rayon de lumière un labyrinthe. Anna, c’est la créativité. Des robes cosmiques, des poèmes et pièces de théâtre spirituels aux sculptures énergétiques, je vis avec elle le croisement des mondes. Anna me parle de la robe de l’Aube Boraine, qu’elle va réaliser pour l’évènement de clôture Toutes nos aubes en aout 2015. Cette robe, elle la raconte comme l’union de la lumière et de l’obscurité de la nuit, dans leur éphémère rencontre. Sortir de l’ombre, mettre en lumière, des vêtements pour le dire. Mon premier travail consista donc à la convaincre d’accepter de transmettre. « Mais pourquoi est-ce que vous voulez apprendre ça? » « Ça ne sert plus à rien! » « Tu chantes si bien en anglais! ». En effet, l’on m’a toujours poussée à partir plus loin et à ne pas rester perdue dans « le trou du cul de la Wallonie ». Ce que je fis... Je passais beaucoup de temps avec les gitans en Andalousie, à apprendre et percevoir les formes d’organisation du flamenco. Son rapport direct à la terre et au travail de la forge. Son rapport à l’oralité et au territoire, le flamenco se faisant le support du récit en mouvement perpétuel de l’histoire des familles gitanes ayant traversé les cultures et les peuples sur la route de l’exil permanent. En Afrique aussi, et plus particulièrement au Burkina Faso, j’intégrais les palabres: grandes causeries codifiées permettant de réguler la vie sociale et faisant même office de « tribunal de justice de paix ». Toujours, ces chemins, ces voix et ces voies, me ramenaient au cercle, à la tradition orale, à la culture populaire et donc forcément aux chants de ma grand-mère et aux veillées que nous avions partagées depuis ma plus tendre enfance. Lorsque Lorent Wanson initia le vaste et beau projet d’”Une Aube Boraine”, et qu’il m’invita à rejoindre l’aventure, j’échangeais avec lui sur ce parcours, et il nous apparut d’emblée à tous les deux qu’il y avait là, entre ces Voix et ces Voies, un lien dont nous devions prendre soin. La violence d’un déracinement et d’une acculturation se dévoilait aussi. Ainsi nous posâmes, par la distance et l’humour du théâtre, le postulat d’une prise d’otage par la protagoniste, revendiquant sur scène et par son récit les ambiguïtés et les rêves d’internationalisme déchus d’un indigénat blanc. C’est ainsi que naquît le texte : Kalach’ Julie Jaroszewski Nikos, arrivé à 23 ans dans le Borinage, 12 ans de mine, 30 mouvements sociaux plus tard, me confie ceci de son immigration: “nous avons laissé le mauvais derrière nous. On a eu le Borinage en héritage”. Cet héritage, K alach’ nait tout d’abord d’une longue collaboration entre Lorent Wanson et Julie Jaroszewski, commencée sur les « bancs » de l’INSAS, poursuivie au Théâtre National, reprise dans le cadre du projet culturel et participatif Une Aube Boraine. C’est le temps d’une maturation entre ces deux artistes, de questions laissées en friche pendant dix ans, et une envie de dire ensemble autour d’obsessions communes : la culture populaire, le chant, les laissés pour compte de l’histoire, les histoires tues et la violence des rapports de domination. Le titre initial du projet s’appelait « Des Voix et des Voies », Lorent Wanson avait demandé à Julie Jaroszewski, dans le cadre du projet Une Aube Boraine, de raconter les routes des chemins empruntés de part le monde et dans la rencontre des cultures populaires, dans l’apprentissage de leurs chants et histoires. En quoi, cela l’avait elle ramené chez elle ? Et où était ce chez soi ? En quoi la résistance des peuples au Nicaragua ou au Burkina Faso face à l’impérialisme, dans ses 24 formes d’organisation culturelles, l’avait-elle amené à constater son acculturation et le linguicide opéré à l’encontre de la langue de ses grands parents : le wallon. Quels avaient étaient les mécanismes silencieux de colonisation à l’oeuvre ? Car s’il est bien une chose qui nous rassemble aujourd’hui, à l’heure des grands débats sur l’identité nationale, c’est la manière de « faire peuple ». À trouver les endroits où nos histoires nous rassemblent plutôt que nous divisent. Kalach’, se veut donc une tentative d’articulation d’éléments de recherche sur ces questions contemporaines par la force du rire et du chant. Car si Kalach’ est un texte, où le jeu de la situation de base est donné de manière burlesque, par la prise d’otage, c’est aussi un concert, où par le chant, émerge les corps des peuples oubliés, les rêves d’internationalisme déchus, et où seule la musique encore est capable de rassembler au-delà du signifiant en faisant choeur. Julie Jaroszewski Théâtre Epique - Une Aube Boraine il l’apporte sur la table de la cuisine comme en cadeau: des piles de fardes reprenant documents officiels, poésies (c’est Nikos qui a écrit le poème sur la sculpture représentant la lampe de mineur de la place de Cuesmes), extraits de journaux comme autant de traces de son passage, de ses actions dans la Région. La géographie se confond entre les histoires de ce résistant grec sauvé des nazis alors qu’il était berger et qui le reconnaitra 40 ans plus tard, à ses actions pour défendre les droits des immigrés en Belgique, et celles pour replacer l’Eglise au cœur des ouvriers borains (parce que l’Eglise, ça ne peut pas être que pour les riches), les histoires de Nikos sont une véritable épopée teintée d’idéalisme et d’humanité. Il y a du courage et de la dureté dans ces histoires boraines. Du secret aussi, presque du repli sur soi parfois. Les ouvriers borains, qui pour la plupart venaient d’ailleurs, ont fait de cette région une des plus puissantes du monde, dans des conditions de vie désastreuses. Ce que nous faisons ensemble avec l’Aube Boraine, selon Nikos et Anna, c’est mettre en mouvement, en parole, en lumière, cette partie de la population, fragile, oubliée. “On a tous quelque chose à dire. Mais on est face à des portes fermées. Il faut parfois quelqu’un pour avancer d’un pas” dit Anna. Cette phrase résonne comme en écho à une phrase de son texte intitulé La Liberté: “Quand le soleil aura changé de place Quand on aura retrouvé les pierres du langage et qu’on les aura comprises Ce jour là, nous serons au rendez-vous” Et parce que “le hasard des petites choses donne les réponses pour son chemin”, je croise plus tard, dans un café devant la grande lampe de mineur, Michel, un ami de Nikos. Il est bon de dire d’où l’on vient, ça prédispose Laurence Van Oost, directrice du Centre culturel de Colfontaine Depuis, nous conduisons ensemble ce projet fou, du Charbonnage de Marcasse « La culture, ce n’est pas important, c’est inévitable. » jusqu’à la Maison du Peuple de Pâturages, en passant par le Royal Sporting club Laurence Van Oost de Wasmes et la Fabrique de Théâtre, notamment...des petites routes sinueuses D it-elle dans ce café montois avant d’avaler une gorgée de thé au lait, en toute élégance. Laurence Van Oost, cette ancienne prof de français et de morale, qui après un passage au Théâtre de la Guimbarde et aux Jeunesses musicales, dirige à bout de bras le Centre culturel de Colfontaine depuis sa création en 1996, avec ce rêve de culture participative, accessible à tous. Il faut batailler ferme pour mettre au cœur de la vie des gens, inclure dans leur quotidien même, la chose artistique. “La culture? C’est l’ensemble des repères qui permettent aux gens de se définir par rapport à un milieu et donc à agir sur lui. Le travail artistique est un outil, parmi d’autres, pour réhabiliter, légitimer ce qui fait que les gens sont ce qu’ils sont”. J’envisage à ce moment de commander un thé au lait, de le lever pour trinquer à cet enjeu qui nous rassemble, qui est au cœur du projet Une Aube Boraine que nous conduisons ensemble depuis deux ans, à bout de bras, à travers les chemins tortueux et les ruelles parfois embourbées du Borinage. Nous n’aimons pas les autoroutes. Laurence Van Oost, c’est une voix douce dans un chaos de sons, de tempêtes et de bouleversements multiples et variés. Personnalité complice du Théâtre Epique depuis Sainte-Jeanne des Abattoirs, spectacle créé en 1998 dans le Borinage et à Mons, où des cellules de crises et répétitions ouvertes ont été mises en place pour inclure les habitants dans le processus même de création...C’est vers elle, comme une évidence, que se tourne Lorent Wanson quand il a imagine le projet Une Aube Boraine. Ensemble, ils rêvent à ce processus de création qui puise ses racines dans le quotidien des populations locales, afin de rendre compte de l’état d’une Région, en partant du micro local, pour parler du monde. Théâtre Epique - Une Aube Boraine traversées dans la petite auto rouge de Laurence Van Oost en regardant passer les terrils, comment raconter cette aventure commune, cette épopée où il nous a fallu tout réinventer ensemble, des moyens de production jusqu’aux processus de créations artistiques? Avril 2015. Laurence Van Oost coordonne le Grand Ouest de Colfontaine. Plus de cinquante associations ont participé à cet évènement majeur, 3000 personnes se sont déplacées au Charbonnage de Marcasse. Une évènement d’envergure, porté par le Centre culturel de Colfontaine...nous étions présents avec une série de spectacles en chantier, rassemblée sous le titre “Nous sommes tous des Van Gogh”, pour faire l’éloge des anonymes, des oubliés des livres d’Histoire. Avec Le Grand Ouest, c’est tout le secteur artistique et associatif local qui a pu être valorisé, ce sont plus de 1000 artistes et bénévoles dont l’implication dans la vie locale a été mise en lumière. La culture a été, une fois de plus ici, replacée au cœur de la vie des gens. Porter un Centre culturel ou un projet comme Une Aube Boraine implique un engagement profond, presqu’une foi. C’est batailler ferme, inventer quotidiennement, errer, et ne jamais rien lâcher. Ce soir-là, dans ce café montois, j’observe les yeux cernés de la fine équipe que nous sommes. Un peu tremblants, un peu fatigués, mais encore aptes à rêver, entre deux éclats de rires, une frite fumante partagée et quelques verres renversés. En se disant que peut-être nos rêves nous dépassent et se poursuivront au-delà de nous, qui sait. 25 Manifeste Portraits Une Aube Boraine Ou de l’Art « Contemborain » Emmanuel Vinchon T andis que les comédiens du Théâtre Epique parcouraient le Borinage sac au dos, Emmanuel Vinchon, responsable des projets territoriaux pour la Fondation Mons 2015, avançait carte en main dans les zones cachées de la Région. C'est Rencontrer Les cartes ont des zones d’ombre et de lumière qui parfois se rejoignent au hasard des chemins. Avec les projets Grand Huit et Grand Ouest, le territoire de Mons 2015/Capitale européenne de la culture s’élargit. Emmanuel et son équipe sont chargés d’associer les communes avoisinantes à l’opération. Leur job? Créer des espaces de doute: ouvrir autant de portes et de fenêtres sur l’Art à travers une vaste opération culturelle réunissant des opérateurs culturels, associatifs, des instances politiques, des artistes, des habitants au cœur de chantiers communs comme on ouvre les coulisses de la culture pour en saisir le poids et la valeur. ©Théâtre Epique Invité par Lorent Wanson à la toute première étape d’”Une Aube Boraine”, séduit par l’envie de travailler ensemble, Emmanuel s’égare en juin 2013 à travers les chemins sinueux du Borinage, ratant son premier rendez-vous au Charbonnage de Marcasse -site qu’il retrouvera quelques mois plus tard pour l’organisation du Grand Ouest de Colfontaine- tandis que les comédiens d’Une Aube Boraine partageaient leurs premières rencontres et expériences du Borinage avec les populations locales et d’ailleurs intriguées par tous ces randonneurs de l’Art et de la Culture. Ce matin, nous le retrouvons au café, fraichement descendu de ses Hautes montagnes qu’il arpente depuis toujours. Ensemble nous parlons de ces cartes qui ne cessent de se redessiner, à la lumière des évènements portés par quelques-uns, par toute une collectivité parfois. Comme souvent lors de nos rencontres, nous débattons sur les thématiques de l’Art et de la Culture. Du rassemblement des quartiers autour d’un projet commun au delà des cloisonnements sociaux. De la nécessité de donner aux gens les moyens de découvrir, à leurs manières, dans l’intimité d’un silence ou dans le partage d’une fête, des œuvres d’art en réappropriation permanente. Nous nous frottons aussi sur des mots: nous qui voulons redonner de la visibilité à ce que nous nommons “les invisibles”, terme qu’il conteste, car d’emblée excluant. Emmanuel Vinchon et Lorent Wanson au Grand Ouest de Colfontaine, en avril 2015 au Charbonnage de Marcasse De frottements en partages, il nous arrive aussi d’être d’accord: là où il s’agit de faire quelque chose avec son voisin, de créer des ponts objectifs dans un projet commun, de donner les moyens de créer le terrain pour que les gens en redeviennent acteurs. Nous débattons avec l’espoir et le doute que ce que nous avons semé continue à avancer par son propre chemin. De la flamme vacillante aux grands feux provoqués par une étincelle. En marche. Brèves Art, science & fiction Pour 50c, t’as de l’art Spartakus et D’Orazio Au MAC’S (Musée des Arts Contemporains au Grand Hornu), en janvier 2013, autour de l’exposition Art, science & fiction : les deux comédiennes Emilie Maréchal et Violette Pallaro ont dispensé deux semaines d’ateliers à une classe de cinquième année du collège Saint-Stanislas et à une classe de deuxième année de la HEC/ISEP de Mons. A travers les oeuvres et les thématiques de l’exposition, la volonté était de plonger dans les imaginaires, les rêves et les réalités de cette trentaine de jeunes de la région de Mons-Borinage, pour construire avec eux une performance sur l’utopie et les espaces parallèles. Le 4 janvier 2015, au musée Constantin Meunier à Ixelles, en collaboration avec Arts & Publics, les comédiens Emmanuel De Candido et Réal Siellez, en collaboration avec leThéâtre Epique/ Cie Lorent Wanson, ont proposé une intervention : “Pour 50c, t’as de l’art: sur les pas de Constantin Meunier”. Une pièce de théâtre originale autour de l’œuvre de Constantin Meunier. Cette pièce de théâtre a été jouée par la suite pour des publics scolaires en avril 2015. Un reportage sur toute l’opération intitulé “Pour 50c, t’as plus rien” sera bientôt diffusé. Roberto D’Orazio a participé à “Une Aube Boraine” en présentant une première étape de “La révolte de l’ex-esclave Spartakus raconté par l’ex syndicaliste D’Orazio” dans le cadre de l’ évènement “Vin Chaud & Amuse-Gueules” en décembre 2013 à la Salle des Fresques de l’ICET de Cuesmes. Spectacle à découvrir prochainement.... Ha Cra borain “Penser avec les mains” fût présenté une centaine de fois au Théâtre de Le Communauté de Liège, à la Fabrique de Théâtre à La Bouverie, au Botanique... Inauguration du monument à Florent Mathieu sur la place de Quaregnon Le Théâtre Epique était présent le 19 avril 2014 à Quaregnon pour l’inauguration du monument en hommage à Florent Mathieu. Denis Laujol y a interprété Porteur d’eau, devant une centaine de spectateurs. Un hommage vivant, émouvant et festif. Hommage à Paul Meyer Le film majeur de Paul Meyer “Déjà s’envole la fleur maigre” tourné dans le Borinage en 1959 nous a accompagné tout au long de l’aventure Une Aube Boraine. Notre projet lui est infiniment reconnaissant. Nous voudrions associer à cet hommage le film de Bénédicte Liénard “ D’arbres et de Charbon” qui fût aussi un de nos films de chevet. Démonstration de Boxe Thai à la Maison du Peuple Dans le cadre de l’évenement Une Aube(rge) Boraine, le clubs de Boxe Muy Thai de Thong sont venu faire une démonstration de leur sport à la maison du Peuple de Colfontaine, accompagnant ainsi les premières ébauches du projet d’Emilie Marcéchal: FIGHT. 26 Sébastien Bonnamy distille, à l’occasion de nos évènements, ses cours de Ha-cra borain, inspirés des Haka des joueurs de Rugby de Nouvelle-Zélande. Plusieurs clubs de la région s’y sont déjà essayés à maintes reprises. Une école de théâtre à la Maison du Peuple de Pâturages L’école Les blés d’or, initiée par Sébastien Bonnamy s’installe elle aussi à la Maison du Peuple de Paturages. Renseignements au +32 479/23 42 08 Le Théâtre Epique a fêté ses 25 ans à la Fabrique de Théâtre C’était dans le cadre de l’événement « C’est le temps de cuisson qui importe” que la compagnie de Lorent Wanson a fêté ses 25 ans d’existence. Depuis le spectacle “Faz héro” en 1988 jusqu’à “C’est presqu’au bout du monde” en 2014, en passant par “Sainte -Jeanne des Abattoirs” répété déjà dans le Borinage en 1998, exposition, affiches des spectacles, interview...un temps d’arrêt pour se souvenir et rêver du futur. Match amical entre le Royal Sporting Club de Wasmes et le Théâtre Epique Match amical entre Une Aube boraine et une équipe composée de minimes et de vétérans du Royal Sporting Club de Wasmes, le 9 septembre 2014. Nous avons perdu 7-2. Plus de 1000 personnes ont participé aux représentations de “Penser avec les mains” Porteur d’eau, déjà 90 étapes Plus de 90 représentations prévues pour “Porteur d’eau” pour la saison 2015-2016. Suivez-le à partir du Théâtre de Liège, en passant par la Maison de la Culture de Tournai, le Théâtre Le Public, le Centre Wallonie-Bruxelles à Paris etc...toutes les informations à la Charge du Rhinocéros, www.chargedurhinoceros.be C’est quoi un Cra-Raoké Borain? Initié par Jean-Jacques Renaut et l’équipe du Théâtre Epique, chacun peut venir soit chanter, soit témoigner, soit s’essayer à la musique, au théâtre, à la poésie, à l’écriture... Des acteurs sont là pour lire les témoignages, ou pour les retranscrire, les jouer aux cas où. Une grande scène ouverte aux petites et grandes histoires, aux petites et grandes musiques, aux murmures et aux cris. La chambre d’écoute des bouts de monde Anne Festraets et Olivia Barisano ont proposé lors de l’évènement à la Fabrique une double installation: un hommage aux femmes du Congo qui portent chaque jour des dizaines de kilos de nourriture pour aller les vendre quelques vingtaines de kilomètres plus loin parfois, et l’aménagement d’une chambre où déposer ses rêves d’avenir, tout en se souvenant des violences du quotidien et de leur mythologies si proches. Certains de ces témoignages ont servi de matière pour le spectacle “C’est presqu’au bout du monde”. Théâtre Epique - Une Aube Boraine Depuis que nous avons débuté nos marches, nous n'avons cessé de croiser et d'inviter des gens, des borains, des groupes musicaux, sportifs, des piliers de comptoirs, des enfants qui chantent, qui slament, des vieux qui racontent la souffrance et la joie. Nous avons surtout rencontré une soif de parole énorme, débordante des années de frustration et de silence. Comme reverdissent les terrils, quelque chose d'un nouveau souffle apparaît dans cette région qui a vu naître dans les années 1825, les premiers puits de mine qui lanceront la révolution industrielle et ainsi feront de la Wallonie, la région la plus prospère du monde. Ce sont les pas des soubassements et des ressacs de cette histoire essentielle pour comprendre notre présent, que nous voulons suivre... En Marche. C'est Transmettre Depuis les 25 ans que Lorent Wanson a commencé son chemin au plus près des blessures du quotidien, que ce soit à Bruxelles, à Belgrade, à Kisangani, à Santiago de Chile, à Kaboul, et dans les ateliers qu'il a essaimés tant dans le Borinage que dans bien des régions de Wallonie, de Flandre, ou du monde, toute sa philosophie s'est basée sur le partage des expériences et des savoirs. La transmission ne peut jamais se faire dans un seul sens. Les vieux ont à apprendre des jeunes, les artistes ont à apprendre des gens, les professeurs et animateurs ont à apprendre de leurs élèves, ainsi de suite et inversement. De la structure de production au travail pratique sur le terrain, nous sommes animés de ce tricot infini à coudre. Du temps où des pensionnés racontent la vie de leurs petits-enfants au temps où ces enfants racontent le quotidien passé de leurs vieux. Le présent ne se comprenant qu'à l'aune de l'Histoire et celle-ci ne faisant écho que si elle est revisitée par le présent le plus tangible... En Marche. C'est Participer Le maître mot de notre démarche est la citoyenneté et celle-ci ne peut s'opérer qu'en créant des espaces. C'est pourquoi nous tenons à articuler des liens imprévus. Des pièces de théâtre se préparent dans des buvettes. Et des démonstrations sportives dans des théâtres et centres culturels. La participation ainsi s'organise à divers étages Tant dans l'organisation d'ateliers de longue haleine, celle de semaines de travail intensif, celle de rencontres, de théâtre d'appartement avec des petites présentations pour susciter et exciter les témoignages. Celle ensuite de la prise de parole directe à toute occasion, lors de nos apéro-rencontres, avec la mise en place de studio de campagne où enregistrer les témoignages par l'image ou le son, par le fait de proposer à des ensembles musicaux divers de collaborer en adaptant des musiques composées par nous, ou à des ensembles musicaux reconnus Théâtre Epique - Une Aube Boraine et célèbres de s'approprier le répertoire musical, théâtral ou plus généralement la culture métissée du Borinage... En Marche. C'est répéter et créer Une des thématiques principales d’Une aube boraine est la relation que nous avons au temps. Nous vivons dans des temps d'urgences qui ne permettent à aucun projet conséquent d'aboutir, tant au niveau artistique, qu'au niveau sociétal. Nous souffrons de ne pas avoir le temps du recul, le temps de simplement vivre, de renouveler notre regard sur ce qui nous paraît insignifiant et qui néanmoins est notre richesse profonde. Répéter, c'est créer une forme de rituel qui s’incarnera à un moment donné. Ce sont des rythmes donné à la vie. Une répétition est un endroit de réunion important, presque de communion. Aucun des projets d’Une aube boraine n'a de fin en soi. Nous voudrions profondément créer de la pérennité : Qu'une procession païenne abandonnée dans le Borinage depuis plus d'un siècle se réinscrive dans le quotidien. Que, comme avec l'équipe des All Blacks de rugby de Nouvelle-Zélande, nous inscrivions durablement ce que nous appelons un « Ha-Cra Borain ». Que nos apéros-rencontres ne s'arrêtent pas à l'Aube boraine, mais se perpétuent. Nous voudrions enfin que les spectacles qui sortiront de nos expériences, vivent leur vie autonome et qu'ainsi le Borinage se déplace, en Wallonie et dans le monde. Nous rêvons qu’Une aube boraine soit un concept qui dépasse le Borinage. Qu'il soit le point de départ d'une reprise de parole de la société entière. Nous voudrions pour se faire, produire et créer des projets d'une très haute exigence artistique et d'une grande probité. Créer, c'est avant tout rendre l'impossible possible, l'imaginaire tangible et c'est « sacraliser » le présent. Notre ambition est là, toute entière : Répéter, recréer des habitudes, des rituels et sacraliser, tout en le démystifiant, l'instant... En Marche. C'est Partager la parole Nos apéros-rencontres ne sont rien d'autres que des rendez-vous. Chacun y vient avec ce qu'il est. Personne ne lui demande de jouer un rôle. L'horizontalité manque ostensiblement à notre modèle de société. Plus personne ne sait qui représente qui. Les gens élisent des gens qu'ils estiment ne plus les représenter, tant au niveau politique, qu'au niveau syndical, qu'au niveau associatif. Partager la parole, c'est aussi accepter que cette parole soit dérangeante, périlleuse, c'est écouter les frustrations et les espoirs, les souvenirs et les projets. Nous espérons ne jamais instrumentaliser les paroles, et ne jamais empêcher les débats. Nous voulons sortir du malaise sociétal par le haut, et pas par la négociation des espoirs déçus. Nous pensons que force et fragilité ne s'affrontent pas mais se conjuguent, que l’intelligence ne se trouve pas seulement dans ceux qui manient le verbe, mais dans toutes les expériences... En Marche. C'est Fêter Chacune de nos opérations doit se terminer par la fête. Tant les spectacles, que les projets participatifs, que les apéro-rencontres, doivent ouvrir et non se clôturer. Ceux qui étaient spectateurs doivent rejoindre ceux qui étaient acteurs pour partager la troisième mitemps. Communiquer une émotion ou un rejet ou un doute ou un emballement doit faire intrinsèquement partie de notre démarche. L'après est aussi fondamental que le pendant et nous voudrions que cet après devienne lui-même un pendant. Les événements ne sont pas seulement la rencontre avec des œuvres, mais tout ce qui l'entoure. Notre manière de fêter, nous la voulons dès l'annonce de nos événements, jusqu’à l'après. Nous voulons concevoir l'ensemble de ce projet comme une promenade continue où les objets ne sont plus que de la matière à la fête du sens, de la démocratie, et du partage des expériences... En Marche. C'est Essaimer Une aube boraine se conjuguera par une quinzaine d'activités artistiques et participatives autonomes, dont nous espérons qu'elles suivront leur chemin. Nous voulons tout autant que notre projet fermente des choses dans le Borinage lui-même, qu'il emmène le Borinage partout ailleurs. Sans doute un spectacle final verra-t-il le jour, mais il ne sera que le témoignage d'une plongée joyeuse dans la vie, le spectaculaire et l'intime, que des expressions diversifiées d'une parole qui veut jaillir, et c'est bien la vivacité de cette parole que nous voulons communiquer tant localement qu'en dehors. Pour faire ce projet, nous nouons des contacts avec une multitude d'organismes et de gens de tous types. Tout le monde à la fin sera, à sa mesure, comme ambassadeur du tout. Une aube boraine, ce n'est que l'essai d'un réseau imaginaire et improbable dont le but ultime est de semer les germes d'une chose qui la dépassera... En Marche. Lorent Wanson 27 Ils ont participé Art, science & fiction Animatrices Emilie Maréchal et Violette Pallaro. Avec les élèves des classes de cinquième année du collège Saint-Stanislas et de deuxième année de la HEC/ISEP de Mons. En partenariat avec le Mac’s, Musée des Arts Contemporains (Grand-Hornu) Des Marches Avec Sara Amari , Sebastien Bonnamy, Morgane Choupay, Emmanuel De Candido, Sophie Guisset, Julie Jaroszewski, Yvain Juillard, Denis Laujol, Cédric Le Goulven, Emilie Maréchal, Violette Pallaro, Gregory Praet, Benoit Randaxhe. Assistante à la mise en scène Anne Festraets. Accompagnement musical Fabian Fiorini. Travail chorégraphique Johanne Saunier. Régisseur général Stephen Ferrari. Avec la participation d’Adriano. En partenariat avec Marcasse et sa mémoire asbl. Avec l’aide de la Fabrique de Théâtre, Service des Arts de la Scène de la Province de Hainaut (La Bouverie) et du Centre des Arts scénique. Penser avec les mains Création collective sur une proposition de Lorent Wanson et Daniel Lesage Écriture Lorent Wanson et Yvain Juillard, sur base de rencontres d’artisans et d’improvisations. Avec la participation de Carmelo Cirrincione. Artisans témoins Jacques Wanson [forgeron], Madame Hariga [couturièremaroquinière], Laurent Demarche [menuisier], Freddy Cirrincione [polisseur], Roger Bonhomme [ébéniste], Patrick Bernard [maçon]. Avec Yvain Juillard et la participation de Chloé Verbaert, Amélie Dubois, Carmelo Cirrincione et Adnan Insel. Mise en scène Lorent Wanson. Scénographie Daniel Lesage, assisté de Chloé Verbaert, Maryse Antoine, Adnan Insel et Caroline Pultz. Composition musicale Fabian Fiorini. Régisseur général Carmelo Cirrincione. Support vidéo Chloé Verbaert et Ludo Burczykowski. Diffusion Roxane Stubbe. Une coproduction Théâtre de la Communauté/ Théâtre Epique. Vin chaud et amuse-gueules Avec Julie Jaroszewski, Denis Laujol, Violette Pallaro, Roberto D’Orazio, Sempai, Annina Antoniadis, Nikos Antoniadis, la fanfare Sensillo, Philippe Tasquin, Sebastien Bonnamy. Régisseur général Stephen Ferrari. Fontaine de voix Chanteuses-animatrices Sara Amari, Delphine Gardin, Julie Jaroszewski. Accompagnement musical Fabian Fiorini. Avec les enfants des chorales Les Alouettes, Les Grillons, Crescendo, la Chorale des Jeunes de Soignies et les élèves du cours de Chant d’Ensemble de l’Académie de Colfontaine. En partenariat avec Le Centre culturel de Colfontaine. En Appétit! (C’est le temps de cuisson qui importe) Avec Violette Pallaro, Julie Jaroszewski, Denis Laujol, Yvain Juillard, Sebastien Bonnamy, Cédric Le Goulven, l’Ensemble Instrumental de Colfontaine, Annina Antoniadis, Anne Festraets, Olivia Barisano, Cédric Legoulven, Sempai, Yannick Molle, The Voek,Trikzin. Régisseur général Stephen Ferrari. Régisseurs Max Delannoy et Julien Cantigniau. Avec l’aide de l’équipe technique et des stagiaires de la Fabrique de Théâtre. En partenariat avec la Fabrique de Théâtre, Service des Arts de la Scène de la Province de Hainaut (La Bouverie). L’Alion r’trouvé Conception musicale, danse et percussions Jean-Jacques Renaut. Animations de l’atelier chanson et accompagnement conté de la procession Eric Wattiez. Animation de l’atelier char Stéfano Console. Animation de l’atelier cirque Arnaud Stevens. Animation de l’atelier bannières Sabri Kasbi. Costumes Bertille Gibourdel. Avec les enfants qui ont participé aux stages durant les congés de Pâques au Centre culturel de Colfontaine, les enfants de la Maison Ouvrière de Quaregnon et de l’Ecole des Devoirs en Chocolat.. En partenariat avec le Centre culturel de Colfontaine, la Maison Ouvrière de Quaregnon, le Service Provincial de la Jeunesse de la Province de Hainaut, l’Ecole des Devoirs en Chocolat. C’est presqu’au bout du monde Ecriture collective. Mise en scène Lorent Wanson. Compositions et arrangements musicaux Fabian Fiorini, d’après l’œuvre originale de Kurt Weill et Roger Fernay. Comédiennes – chanteuses Julie Jaroszewski, Sara Amari et Delphine Gardin. Assistanat à la mise en scène et musical Sarah Sleiman. Stagiaire à la mise en scène Cédric Celorio Lopez. Scénographie Lorent Wanson et Sarah Sleiman. Costumes Olivia Barisano. Lumières Guy Simard. Régisseur général Stephen Ferrari. Avec la participation de témoins du Borinage, de l’Ensemble Instrumental de Colfontaine, des chorales d’enfants rassemblées pour la journée Fontaine de Voix, The Voeks, Yannick Molle, Giuseppe Millaci, Mathieu Robert, Triczin. Photos Cédric Legoulven. Vidéo Chorale d’enfants Mathias Hogne. Captation sonore Vincent Debast. Régie générale Stephen Ferrari. Une coproduction Théâtre Epique/ Le manège.mons/Centre dramatique. L’aube(rge) boraine Animation musicale Jean-Jacques Renaut. Avec Yvain Juillard, Emilie Maréchal, Sébastien Bonnamy. Régisseur général Stephen Ferrari. En partenariat avec La Maison du Peuple de Pâturages et le club Somthai Gym de Frameries. Nous sommes tous des Van Gogh/Grand Ouest de Colfontaine Avec Annina et Nikos Antoniadis, Victoria Barrile, Khadija Azzaoui Ihda, Sempai, Yannick Van Hemelryck, Violette Pallaro, Laura Fautré, Sarah Sleiman. Travail Chorégraphique de Charlotte Villalonga. Régisseur général Stephen Ferrari. En partenariat avec Le Centre culturel de Colfontaine. L’Alion, deuxième édition Avec notamment Eric Wattiez et Jean-Jacques Renaut en accompagnement musical. Animations chorégraphie de bâtons, costumes et accessoires Arnaud Stevens et Sabri Kasbi. Avec les enfants des écoles communales Saint-François, Busieau, du Centre et de la Rampe Anfouette, du CEC Les Tournesols, de l’asbl Garance, de l’Ecole des Devoirs en Chocolat 28 de la Maison ouvrière de Quaregnon, du Conseil communal des enfants, de l’Ecole I tre Ponti. Dans le cadre du Grand Ouest de Colfontaine coordonné par le Centre culturel de Colfontaine. Regarder l’aube, l’étendre Un projet collectif de Charline Avril, Emeline Billat, Iacopo Bruno, Lara Ceulemans, Gaetano Crapanzano, Salomé Crickx, Alexandre Croissiaux, Juliette Manneback, Lily Noel, Alexandra Pierre, Marie-Charlotte Siokos, Merlin Vervaert. Direction artistique Lorent Wanson assisté de Sarah Sleiman. Chorégraphie Charlotte Villalonga. Accompagnement musical Agathe Regnier. Régisseur lumière Renaud Ceulemans. Régisseur général Sarah Sleiman. En partenariat avec ARTS² Ecole supérieure des Arts, section Art Dramatique. Toutes nos aubes Avec Julie Jaroszewki, Violette Pallaro, Laura Fautré, Sebastien Bonnamy, Emilie Maréchal, Annina Antoniadis, Nikos Antoniadis,Victoria Barrile, Khadija Azzaoui Ihda, Sempai, Yannick Van Hemelryck, la branque de l’Alion, Cédric Le Goulven, l’Ensemble instrumental de Colfontaine. Régisseur général Gaylord Tricart. Régisseurs Medhi Mejri, Cyrielle Kahn, Olivier Mahy, Baptiste Wattier, Bastien Godry, Teilo Delor. En partenariat avec La Maison du Peuple de Pâturages, Le Royal Sporting Club de Wasmes, le club Somthai Gym de Frameries. Porteur d’eau De et avec Denis Laujol. Sous le regard de Lorent Wanson et de Julien Jaillot. Son Marc Doutrepont. Lumières Nathalie Borlée. Scénographie Stéphane Arcas. Régisseur générale Frédéric Nicaise. Une coproduction Théâtre Epique/Théâtre de Namur/Théâtre de Liège/ Théâtre Le Public/Maison de la Culture de Tournai/Ad Hominem/Charge du Rhinocéros. Avec le soutien de la Fabrique de Théâtre/Province de Hainaut. Ma Pucelette De et avec Laura Fautré. Mise en scène de Lorent Wanson. FIGHT De et avec Emilie Marechal. Oeil extérieur Lorent Wanson. Vidéo Camille Meynard. Diffusion Fabien Defendini. Une coproduction Théâtre Epique/Pudding ASBL. En partenariat avec Le Somthai Club de Frameries Cerebrum, le faiseur de réalités De et avecYvain Juillard. Œil extérieur Lorent Wanson, Jo Lacrosse. Conseil dramaturgique Dominique Roodthooft. Conseil scientifique Céline Cappe. Diffusion Arnaud Timmermans et Yvain Juillard. Une coproduction entre Les Faiseurs de réalités, soutenue par la Fédération Wallonie-Bruxelles/COPIC et Le Théâtre Epique. Avec le soutien de la SACD, de la Balsamine, du Théâtre universitaire de Liège, du Corridor. Kalach’ De et avec Julie Jaroszewski. Mise en scène de Lorent Wanson. Collaboration pour la réalisation des vidéos Pauline Fonsny. En partenariat avec La Baleine noire asbl. HORS-JEU De et avec Violette Pallaro. Mise en scène de Lorent Wanson. Collaboration à la mise en scène Emmanuel De Candido. Création vidéo Camille Meynard. Création musicale Fabian Fiorini. Interprétation mucicale Ensemble Instrumental de Colfontaine. En partenariat avec le Royal Sporting Club de Wasmes Tu n’avanch’ras djamin tout seû De et avec Sebastien Bonnamy. Mise en scène de Lorent Wanson. Diffusion Sarah Sleiman. Rédactrice: Caroline Bondurand Théâtre Epique Cie Lorent Wanson Direction artistique Lorent Wanson Production Sarah Sleiman Communication Diffusion Caroline Bondurand [email protected] www.theatreepique.be Maison du Peuple Place du Peuple 1 à 7340 Pâturages Nous nous excusons auprès de ceux que nous aurions oubliés! Théâtre Epique - Une Aube Boraine