1er trimestre 2007 – 2,50 – www.frm.org
RECHERCHE
&SANTÉ
Soutenir la Fondation pour la Recherche Médicale
N°109
6LA RECHERCHE EN DIRECT
Infecions nosocomiales,
une nouvelle arme préventive
25 LA FONDATION ET VOUS
Le site Internet
de la Fondation fait
peau neuve
Cancer
de la prostate
préserver « l’homme »
15 DOSSIER
couv FRM109 4/12/06 14:42 Page 1
RECHERCHE & SANTÉ lpage 2l 109 • 1er trimestre 2007
page
5
page
8
page
15
page
25
JANVIER2007
13 ENTRETIENS CROISÉS
À quoi sert la recherche médicale :
à soigner les malades ou la maladie ?
15 DOSSIER CANCER DE LA PROSTATE
Préserver « l’homme »
17 Recherche : les prémices d’un nouveau traitement
18 Témoignage : « Que les hommes sachent »
19 Point de vue du DrXavier Rebillard : Le dépistage,
« une priorité de santé publique »
20 EN IMAGES
La prostate, un organe exclusivement masculin
22 Troubles urinaires et sexuels : il faut se battre
23 VIE PRATIQUE
Prévenir : hygiène de vie ; Dépister : détecter précocement ;
Traitement : un choix éclairé ;
Vivre avec : soigner les conséquences
25 LA FONDATION ET VOUS
25 Notre site Internet fait peau neuve
26 Victoires de la médecine : Anne Eichmann, meilleur espoir
de la recherche médicale
27 Claude Siraut, donateur : « Que les objectifs de la Fondation
soient en phase avec l’intérêt du public »
29 En régions : Hérault, pleins feux sur la Fondation
31 NRJ et la Fondation : sur la même longueur d’onde
32 VOS QUESTIONS/NOS RÉPONSES
Hypothyroïdie : de la baisse d’hormone à la baisse de forme
34 Le don en ligne, simple et économique
35 ON SE DIT TOUT
4 LA RECHERCHE EN DIRECT
4Maladie d’Alzheimer : des souris retrouvent la mémoire
5Mélanome : l’espoir de la thérapie génique
6Infections nosocomiales : une nouvelle arme préventive
8 LE POINT SUR
Leucémie lymphoïde chronique :
une maladie à plusieurs visages
Touchant la personne âgée, la leucémie lymphoïde
chronique est une maladie du sang qui a vu apparaître
ces dernières années plusieurs traitements efficaces.
Mais aucun ne parvient à éliminer les rechutes
11 Neurologie : par la seule force de la pensée
12 Ophtalmologie : les caroténoïdes protègent nos yeux
XSOMMAIREX XÉDITORIALX
RECHERCHE & SANTÉ lpage 3l 109 • 1er trimestre 2007
Àl’aube de cette nouvelle année qui marquera le soixan-
tième anniversaire de la Fondation pour la Recherche
Médicale, nous sommes heureux de vous annoncer
que, grâce à votre générosité, nous avons pu initier plu-
sieurs grands programmes d’aide à la recherche.
Ainsi, c’est près de 6 millions d’euros qui ont été engagés
dans le cadre du programme « Grands Équipements ». Nous
allons pouvoir doter 23 plates-formes de recherche, situées
dans toute la France, de matériels de très haut niveau tech-
nologique indispensables à une recherche moderne.
Un autre axe prioritaire de la Fondation est le soutien aux recherches sur
les pathologies liées au vieillissement. Avec un budget de 3 millions d’euros,
nous avons pu, en 2006, financer 16 projets sur le vieillissement neuro-
sensoriel. En 2007, nos efforts se porteront sur le vieillissement cardio-
vasculaire. Les meilleurs projets de recherche dans ce domaine seront sélec-
tionnés au printemps avec un budget dédié de 3 millions d’euros également.
Et parce que les grands programmes spécifiques lancés par la Fondation
correspondent à des financements sur trois années, nous sommes extrême-
ment attentifs à leur suivi, tant sur le plan financier que scientifique. C’est
pour cela qu’a lieu, ce mois-ci, une réunion permettant d’évaluer les progrès
de l’ensemble des projets soutenus dans le cadre du programme « Défis de
la recherche en allergologie ». Les chercheurs feront le point sur l’avance-
ment de leurs travaux et les nouveaux axes qu’ils souhaitent développer,
devant un comité d’experts.
Bien entendu cette effervescence féconde ne serait pas possible sans le
soutien fidèle de nombreux donateurs. L’action de tous est importante.
Aussi mes vœux pour cette nouvelle année vont-ils tout naturellement à
chacun d’entre vous et aux vôtres. Des vœux de santé d’abord, parce que
nous ne sommes rien sans elle. Mais aussi, pour tous ceux qui comme
moi avancent dans l’âge, le souhait d’une qualité de vie conservée le plus
longtemps possible grâce aux progrès de la recherche médicale.
Pierre Joly
Président du Conseil de surveillance
RECHERCHE
&SANTÉ
EST LA REVUE
DE LA FONDATION
RECHERCHE MÉDICALE
Directeur de la publication :
Denis Le Squer
Comité éditorial :
Denis Le Squer, Agnès Lara,
Catherine Monnier, Joëlle Finidori.
Comité de rédaction :
Membres du comité éditorial,
PrClaude Dreux, Isabelle Fleury,
Céline Guéganou, Claude Pouvreau,
Valérie Riedinger.
Ont participé au dossier :
Stéphane Oudard, Nicolas Thiounn,
Arnauld Villers, Xavier Martin,
Albert Gelet, Alexandre de la Taille,
Xavier Rébillard, Jean Revault
d’Allonnes, Olivier Cuvillier, Sylvain
Mimoun, Mathieu Silberberg.
Ont participé à la rédaction :
Aurélien Coustillac, Valérie Devillaine,
Émilie Gillet, Caroline Guignot, Anne
Lefevre-Balleydier, Adélaïde Robert-
Géraudel, Frédéric Vladyslav.
Couverture : Antonio Mo/
gettyimages.
Conception et réalisation :
41, rue Greneta, 75002 Paris.
Responsable d’édition :
Valérie Devillaine.
Direction artistique :
Marie-Laure Noel.
Maquettiste :
Abdoulaye N’Diaye.
Secrétariat de rédaction :
Véronique Boismartel, Laurence Pindat
Iconographie : Marion Ricard.
Chef de fabrication : Sylvie Esquer.
Impression : Maury.
Périodicité : trimestrielle.
Copyright : la reproduction
des textes, même partielle, est
soumise à notre autorisation sur
demande écrite préalable.
Date et dépôt légal à parution :
Janvier 2007 • ISSN 0241-0338
Dépôt légal n° 8117
Pour tous renseignements ou pour
recevoir Recherche & Santé,
adressez-vous à :
Fondation pour
la Recherche Médicale
54, rue de Varenne
75335 Paris Cedex 07
Service donateurs :
01 44 39 75 76
Information scientifique :
01 44 39 75 92
Rédaction :
01 44 39 75 68
Contribution de soutien
pour 4 numéros : 10
Chèque à l’ordre de la Fondation
pour la Recherche Médicale
Site Internet : ww.frm.org
La Fondation pour la Recherche
Médicale, établissement reconnu
d’utilité publique par décret du 14 mai
1965, est membre fondateur du
Comité de la Charte de déontologie
des associations humanitaires.
De grands chantiers d’aides à
la recherche lancés grâce à vous
Alexandre Moulard/FRM
FRM109 P02_03somSR1VD 4/12/06 15:25 Page 2
Plaques amyloïdes : dépôts
de protéines qui se forment
dans le cerveau et qui, en excès,
sont toxiques pour les neurones.
Enzyme : protéine accélérant et
rendant possibles de nombreuses
réactions chimiques dans l’organisme.
ERRATUM
Dans notre numéro d’octobre p. 10,
nous avons par erreur attribué
les travaux de recherche sur
les addictions à une équipe
du Collège de France dirigée
par Jacques Glowinski, alors qu’ils
ont été dirigés par Jean-Pol Tassin,
en collaboration avec Lucas Salomon
et Christophe Lanteri. Cette équipe
n’avait pas bénéficié du soutien
de la Fondation.
EN DIRECT
LA RECHERCHE EN DIRECT
LA RECHERCHE
RECHERCHE & SANTÉ lpage 4lN° 109 • 1er trimestre 2007 RECHERCHE & SANTÉ lpage 5lN° 109 • 1er trimestre 2007
Effacer des souvenirs, puis
autoriser le cerveau à en mettre
en mémoire de nouveaux…
Ce n’est pas de la science-fiction,
mais une expérience menée avec
succès par des chercheurs américains,
en bloquant ou non une protéine,
la kinase M zêta. Cette enzyme,
que l’on trouve exclusivement
dans le cerveau, s’est récemment
révélé jouer un rôle fondamental
dans les processus cellulaires
de mémorisation et d’apprentissage.
Or on sait depuis peu l’inactiver
grâce à une molécule baptisée ZIP.
L’équipe américaine de Todd Sacktor
a voulu tester l’impact de ce blocage
sur l’apprentissage de souris.
Les rongeurs ont d’abord appris
à repérer un danger dans un espace
donné, puis ont reçu une dose de ZIP.
Que l’injection ait eu lieu 24 heures
ou un mois après l’apprentissage,
les souris étaient ensuite incapables
d’éviter ce danger. Mais si les
chercheurs attendaient que ZIP ne
fasse plus effet, les souris pouvaient
réapprendre à suivre tel ou tel
parcours. Cette expérience confirme,
d’une part, le lien entre certains
processus cellulaires et les capacités
d’apprentissage et de mémoire,
et, d’autre part, ouvre de nouvelles
pistes thérapeutiques pour augmenter
les facultés de mémorisation ou
lutter contre les pertes de mémoire.
Source : Science, août 2006
MÉLANOME
L’espoir de la thérapie génique
Les globules blancs sont
les cellules de notre système
immunitaire qui permettent
de nous défendre contre les infections,
et aussi contre les cancers. Les
chercheurs ont en effet observé
que certains globules blancs
étaient équipés d’un « système
de reconnaissance » appelé TCR,
qui les rend capables de reconnaître
et de tuer les cellules cancéreuses.
Mais ces cellules « tueuses » ne sont
pas présentes chez tous les malades.
D’où l’idée de les créer artificiellement
en prélevant des globules blancs
chez les malades, en les modifiant
génétiquement pour les rendre
capables de reconnaître les cellules
cancéreuses, puis en les réinjectant.
Tel est le protocole qu’a suivi l’équipe
américaine de Steven Rosenberg.
Chez presque tous les patients atteints
d’une forme avancée de mélanome
(avec métastases) et ayant bénéficié
de ce traitement, les nouveaux
globules blancs se sont multipliés.
Mais l’effet thérapeutique n’a été
observé que pour deux patients.
Ce qui reste un exploit à ce stade
de la maladie. L’équipe de Rosenberg
cherche donc encore à améliorer
sa technique, mais ces deux guérisons
sont déjà un formidable espoir.
Source : Science express, août 2006
Le mélanome touche 7 000 personnes par an en France. Un diagnostic précoce
est essentiel dans le traitement de ce cancer de la peau. Pensez à vous faire examiner
par un dermatologue.
Certaines enzymes présentes dans
le cerveau stimulent la mémoire,
tout comme les exercices.
En manipulant les gènes de nos propres cellules de défense,
il est possible de leur apprendre à mieux reconnaître les cellules cancéreuses
Testée sur 17 patients, la méthode a permis de sauver deux d’entre eux.
EN CLAIR :
En cas de maladie d’Alzheimer, l’enzyme Uch-L1 norma-
lement présente dans le cerveau voit son taux baisser En le faisant aug-
menter chez la souris, des chercheurs sont parvenus à restaurer leur mémoire.
EN CLAIR :
BSIP/Mendil
MÉMOIRE
ZIP… et elle s’efface
Deux chercheurs anglais viennent
de montrer qu’un traitement
local pourrait faire échec
au virus responsable du cancer
du col de l’utérus. Les Drs Ian et
Lynne Hampson ont en effet révélé
qu’une molécule, le lopinavir, est
capable d’induire la mort de cellules
infectées par le papillomavirus humain
le plus fréquent dans les cancers
du col de l’utérus, le HPV16.
Et les deux scientifiques pensent
qu’elle sera sans doute aussi efficace
sur les autres papillomavirus en cause.
Ce médicament était jusqu’ici utilisé
contre le sida. Cette découverte d’une
efficacité contre le cancer met en
évidence l’importance de passerelles
entre les recherches sur différentes
maladies. Le traitement, appliqué en
crème sur les lésions précancéreuses,
pourrait constituer une alternative
à la chirurgie et sauver des dizaines de
milliers de femmes, notamment dans
les pays en voie de développement
où la chirurgie est moins accessible.
Source : Anti-viral Therapy,
septembre 2006
Vers un meilleur
dépistage
du cancer colorectal
Actuellement le dépistage du
cancer colorectal est basé sur
le test Hemoccult qui détecte la
présence de sang dans les selles.
Mais cette méthode n'est pas
suffisamment sensible pour déceler
nombre de tumeurs et peut aussi
donner des résultats positifs en
l'absence de tumeur. Un nouveau
test de dépistage immunologique
du sang dans les selles plus fiable
a donc été proposé. Cette méthode
très sensible (presque trop) permet
de détecter des quantités infimes
de sang qui ne traduisent pas
nécessairement un risque de
cancer. Il fallait donc déterminer
le seuil de sensibilité de ce test.
C'est chose faite grâce à une
procédure de lecture automatisée
des résultats et à une analyse
réalisée sur une cohorte de
10 000 personnes. Cela permettra
d'identifier les patients ayant un
véritable risque de cancer
colorectal et qui doivent passer
une coloscopie pour confirmation
du diagnostic. Ces résultats
devraient favoriser la généralisation
du dépistage et faire ainsi baisser
la mortalité de ce cancer.
Source : Gut, septembre 2006
CANCER DU COL DE L’UTÉRUS
Une alternative à la chirurgie ?
MALADIE D’ALZHEIMER
Des souris retrouvent la mémoire
Pour trouver une parade
à la maladie d’Alzheimer,
les chercheurs ont jusqu’alors
concentré leurs efforts sur les plaques
amyloïdes qui s’accumulent autour
des neurones. Les travaux récents
de scientifiques américains ouvrent
néanmoins une autre piste, en
démontrant le rôle clé d’une enzyme
(Uch-L1) dans cette pathologie :
en stimulant son activité, ils ont
réussi à restaurer la mémoire
de souris présentant des symptômes
d’Alzheimer.
Voici deux ans, il a été montré un
déficit de l’enzyme Uch-L1 chez les
personnes atteintes de maladie
d’Alzheimer. D’autres études ont
révélé que cette enzyme intervenait
dans le processus cellulaire de
mémorisation et d’apprentissage.
L’équipe de Michael Shelanski a
donc voulu tester le rôle d’Uch-L1
sur la mémoire de la souris, en pariant
qu’elle était impliquée dans la maladie
d’Alzheimer. Les chercheurs ont
d’abord traité des coupes de cerveau
de souris non malades avec une
molécule bloquant l’action de
l’enzyme. Ils ont observé que les
processus cellulaires de mémorisation
étaient moins bons, mais ils
redevenaient normaux lorsque
l’activité de l’enzyme était restaurée.
Le même effet était relevé sur des
coupes de cerveaux de souris
présentant des plaques amyloïdes.
Un test d’apprentissage a montré que
des souris traitées de la même façon
retrouvaient la mémoire. Cette
enzyme est donc l’espoir d’un nouveau
traitement pour les personnes
souffrant de la maladie d’Alzheimer.
Source : Cell, août 2006
Métastases : dissémination de cellules
cancéreuses vers des organes distants
de la tumeur d’origine.
BSIP/Mendil
FRM109 P04-12SR1VD 4/12/06 14:53 Page 4
EN DIRECT
LA RECHERCHE EN DIRECT
LA RECHERCHE
RECHERCHE & SANTÉ lpage 6lN° 109 • 1er trimestre 2007 RECHERCHE & SANTÉ lpage 7lN° 109 • 1er trimestre 2007
VOS
DONS
en action
INFECTIONS NOSOCOMIALES
Une nouvelle arme préventive
En se collant aux surfaces, et les unes aux autres, les bactéries forment des biofilms qui résistent aux antibio-
tiques et favorisent les infections nosocomiales. Bonne nouvelle : un produit capable de s’opposer à leur formation
vient d’être caractérisé par l’équipe de Jean-Marc Ghigo (Institut Pasteur, CNRS). Explications du chercheur.
Toxine : poison toxique élaboré et sécrété
par un organisme vivant.
Capsule : gangue extérieure qui entoure certaines bactéries.
Infection nosocomiale : infection contractée en milieu hospitalier.
Candidat-vaccin : vaccin devant encore faire la preuve de son
efficacité dans le cadre d’essais cliniques.
Comment avez-vous trouvé
une parade aux biofilms ?
On sait que dans la nature les bactéries
vivent essentiellement au sein de biofilms
hébergeant plusieurs espèces. En
tentant de modéliser leurs interactions,
nous avons observé qu’une bactérie
particulière pouvait inhiber la formation
de biofilm. Nous avons d’abord pensé
qu’elle sécrétait une toxine, mais il s’est
révélé qu’elle n’avait aucun effet nocif
sur les autres bactéries : elle empêchait
seulement leur adhésion. En recherchant
les gènes responsables de cet effet,
nous avons identifié la molécule en
cause : un sucre complexe composant
la capsule de la bactérie pathogène.
Quelles perspectives
ouvre cette découverte ?
Nous avons testé l’efficacité de cette
molécule sur différents matériaux : du
verre, divers plastiques… Elle limite
pour chacun la capacité des bactéries
à adhérer au support, puis à former
des biofilms. Cet effet est obser
pour différentes bactéries responsables
d’infections nosocomiales, et il persiste
même quand le support est stérilisé
à haute température ! On peut donc
envisager d’utiliser cette molécule sur
du matériel médical – cathéters, pro-
thèses, filtres de dialyse, etc. – ou pour
le traitement de surfaces industrielles
telles que les canalisations ou conduits
de tours aéroréfrigérées. Reste à tester
la persistance de son effet et son inno-
cuité en conditions réelles.
Source : PNAS, août 2006
L’équipe du DrJean-Marc Ghigo
a reçu 15 000 de la Fondation
pour la Recherche Médicale en
2005 en soutien aux travaux d’une
jeune chercheuse sur ce projet.
15 000
LE DON UTILE
Pour l’heure, il n’existe aucun trai-
tement spécifique pour la maladie
héréditaire du tremblement essen-
tiel, qui touche 300 000 Français. Mais
en montrant qu’elle est associée à une
anomalie génétique (mutation) touchant
le récepteur D3 de la dopamine, l’équipe
de Pierre Sokoloff (CNRS/Inserm) vient
d’ouvrir une piste. Les chercheurs ont
examiné de près cette mutation chez
trente familles de malades. Résultat :
chez vingt-trois familles, la maladie est
cotransmise avec la mutation, les symp-
tômes étant plus précoces quand elle a
été héritée à la fois du père et de la mère.
Autre constat : le récepteur muté est
plus sensible à la dopamine. En norma-
lisant la fonction du récepteur D3, avec
des molécules s’y fixant, on peut donc
espérer soigner la maladie. Reste à le
vérifier par des essais cliniques.
Source : PNAS, juillet 20
Deux tremblements
différents
Le tremblement essentiel ne doit
pas être confondu avec la maladie
de Parkinson. Dans le premier cas,
le tremblement est surtout présent
lors de l’exécution d’une action,
qu’il s’agisse de bouger les mains,
les jambes, la tête ou encore
de parler. Alors que dans le second,
le tremblement se manifeste
le plus souvent au repos et peut
être associé à une rigidité et à
un ralentissement des mouvements.
TREMBLEMENT ESSENTIEL
Un premier gène identifié
Pourquoi, dans la maladie de Parkin-
son, les neurones fabriquant de la
dopamine disparaissent-ils ? Voici
trois ans, les chercheurs avaient déjà
partiellement répondu à la question :
d’après leurs résultats, la disparition
des neurones à dopamine était liée à
l’accumulation anormale d’une protéine
appelée alpha-synucléine. Il restait néan-
moins à comprendre pourquoi. Pour
répondre à cette question, l’équipe de
Susan Lindquist a utilisé la levure comme
modèle d’étude. Elle a ainsi montré
qu’une surproduction d’alpha-synucléine
bloquait le transport des protéines au
sein de la levue.
Mais il y a mieux : le génome de la levure
étant connu, les chercheurs ont pu
identifier un gène particulièrement
actif, capable de restaurer le transport
des protéines, même en présence d’un
excès d’alpha-synucléine. L’effet théra-
peutique de ce gène a été confirmé sur
d’autres modèles animaux (drosophile,
ver, rat), les scientifiques ayant à chaque
fois réussi à « guérir » les cellules
MALADIE DE PARKINSON
Un nouveau pas vers un traitement
mine qui pourrait être toxique pour les
neurones. À terme, ces travaux pour-
raient donc déboucher sur la mise au
point de molécules thérapeutiques. Un
enjeu important, quand on sait que la
maladie de Parkinson, qui survient vers
la soixantaine et touche en France
environ 100 000 personnes, reste pour
l’heure incurable.
Source : Science, juillet 2006
La maladie de Parkinson témoigne d’une disparition de
certains neurones Celle-ci serait liée à l’action d’une molécule, l’alpha-
synucléine, qui agit en bloquant le transport de protéines dans les neurones.
EN CLAIR :
atteintes par un excès de synucléine.
Quel lien avec les neurones à dopamine
détruits au cours de la maladie de Par-
kinson ? L’hypothèse est que le blocage
du trafic des protéines dans la cellule
entraînerait une accumulation de dopa-
Dopamine : substance chimique
très impliquée dans le contrôle du
mouvement, et jouant dans le cerveau le
rôle de messager entre cellules nerveuses.
Récepteur D3 : protéine située à la
surface des neurones, capable de fixer
la dopamine et de transmettre un ordre
chimique au neurone qui le porte.
BSIP/Mendil
DR
MÉNINGITE
Le méningocoque B
vaincu
La bactérie Neisseria meningitidis
(ou méningocoque) compte plusieurs
groupes, dont cinq connus pour in-
duire des méningites. Jusqu’alors on ne
disposait d’un vaccin que pour quatre
d’entre eux. Ce manque pourrait être bien-
tôt comblé, grâce à une équipe italienne
parvenue à mettre au point un vaccin
efficace chez la souris contre le groupe B.
Testé chez l’animal, il a immunisé les souris
contre 78 % de souches bactériennes
issues des quatre coins du monde, et les
chercheurs pensent pouvoir étendre cette
protection vaccinale à plus de 95 % des sou-
ches. Reste à mener des essais cliniques
chez l’homme. L’enjeu est important : bien
que rares en France, ces méningites sont
en Afrique à l’origine d’épidémies pouvant
toucher des milliers de personnes.
Source : PNAS, juillet 2006
Un vaccin contre la coqueluche,
administrable par voie nasale et en
une seule dose, a prouvé son efficacité
chez les bébés souris. Pathologie
très contagieuse, la coqueluche est en
recrudescence chez les jeunes adultes
qui peuvent contaminer des nourrissons
trop jeunes pour être suffisamment
protégés par une vaccination classique.
D’où l’intérêt de ce candidat-vaccin
mis au point par l’équipe de
Camille Locht (Institut Pasteur de Lille).
Source : PLos Pathogens, juillet 2006
Le laboratoire de
Camille Locht a bénéficié
de l’aide de la Fondation
pour la Recherche Médicale à
hauteur de 8 750
en 2006, pour financer
les recherches d’une jeune
scientifique sur ce sujet.
8 750
LE DON UTILE
Les nourrissons enfin
protégés contre la coqueluche ?
Fatigue, tremblements, rigidité et difficulté
à bouger. Peu à peu les symptômes de la
maladie de Parkinson se font plus handicapants.
FRM109 P04-12SR1VD 4/12/06 14:53 Page 6
Vous avez choisi de travailler
sur la leucémie lymphoïde
chronique (LLC), pourquoi ?
La LLC est un cancer du sang
qui survient généralement autour
de la soixantaine. Le mécanisme
causal de cette maladie est mal connu,
probablement complexe, et pourrait
être favorisé par l’âge. De fait, la LLC
pourrait trouver son origine dans
des problèmes dits épigénétiques,
c’est-à-dire qui contrôlent l’expression
des gènes.
Qu’avez-vous mis en évidence ?
On sait que certains mécanismes
d’organisation de la chromatine
sont perturbés au cours de la LLC.
Par ailleurs, dans près de la moitié des
cas, une portion du chromosome 13 est
absente. Nous avons cherché le lien
entre les deux, en étudiant les produits
de gènes affectés par la cassure :
c’est le cas, notamment, d’une
protéine appelée CLLD8. Nos résultats
montrent qu’elle est impliquée dans
une modification chimique appelée
méthylation, et que si CLLD8 vient
à manquer, le cycle de vie de la cellule
est gravement perturbé. Si une
dérégulation de la fonction de CLLD8
est confirmée au cours de la LLC,
la protéine pourrait devenir la cible
de nouveaux traitements...
INTERVIEW
T
rès souvent, on la découvre par
hasard, lors d’un bilan sanguin
prescrit pour une autre raison.
Signe particulier : un taux anor-
malement élevé de globules
blancs appelés lymphocytes dans le sang.
Un examen plus poussé permet alors de
confirmer le diagnostic de leucémie lym-
phoïde chronique (LLC). Un diagnostic
qui a toutes les chances d’effrayer le
patient. Pourtant, cette leucémie, qui
compte chaque année plus de 2 000 nou-
veaux cas en France, est une pathologie
de la personne âgée dont l’évolution est
souvent si lente qu’elle ne justifie aucun
traitement. Car comme l’explique le
P
r
Brunot Varet, directeur du service d’hé-
matologie pour adultes de l’hôpital Necker :
« On regroupe sous le terme de LLC de
vraies pathologies qu’il faut soigner,
mais aussi des anomalies biologiques
qui n’ont finalement aucune incidence
sur l’espérance de vie. » Comme pour
beaucoup d’autres cancers, ses origines
restent inconnues. L’existence d’antécé-
dents familiaux n’est avérée que dans 5 %
des cas. Les recherches ont en revanche
permis de mieux prédire son évolution,
une fois le diagnostic posé. Ce pronostic
s’appuie sur la classification de Binet, qui
distingue trois stades de gravité et de
prise en charge (voir encadré). Mais il
s’est beaucoup affiné, en tenant compte
d’un certain nombre de marqueurs biolo-
giques de la maladie.
LA SURVEILLANCE
AVANT LE TRAITEMENT
« On surveille notamment l’évolution
du taux de lymphocytes : s’il est
supérieur à 15 000 par mm
3
de sang,
et s’il double en moins d’un an, on sait
maintenant qu’il faut mettre en route
un traitement, même en stade A. » De
même, la présence d’anomalies bien
précises sur les chromosomes 11 et 17,
celle d’une molécule particulière (CD38)
à la surface de certains globules blancs,
ou l’abondance d’une protéine (ZAP 70)
impliquée dans l’activation de certains
lymphocytes, sont le signe que la maladie
risque d’évoluer plus rapidement et qu’il
faut la traiter.
Outre le traitement des complications
(infections bactériennes, virales ou à cham-
pignons), deux grandes stratégies théra-
Touchant les personnes âgées, la leucémie
lymphoïde chronique est une maladie du sang
qui a vu apparaître ces dernières années plusieurs
traitements efficaces. Mais aucun ne parvient
à éliminer les rechutes…
EN DIRECT
LA RECHERCHE EN DIRECT
LA RECHERCHE
RECHERCHE & SANTÉ lpage 8lN° 109 • 1er trimestre 2007 RECHERCHE & SANTÉ lpage 9lN° 109 • 1er trimestre 2007
DrClaire Léger-Falandry
Médecin, étudiante en thèse de science dans le laboratoire de Biologie moléculaire
de la cellule (CNRS/ENSL), elle collabore avec le service d’Hématologie
du PrCoiffier (centre hospitalier Lyon-Sud).
Parmi les nombreux projets
de recherche sur les leucémies
que soutient la Fondation, celui
de Claire Léger-Falandry sur
les leucémies lymphoïdes chroniques
a bénéficié d’une aide de 16 800 .
16 800
LE DON UTILE
Dans le cas de la LLC, l’organisation
de l’ADN dans la cellule serait en cause, c’est
l’objet des travaux de Claire Léger-falandry.
le point sur…
LA LEUCÉMIE LYMPHOÏDE CHRONIQUE
Une maladie
à plusieurs visages
L’ABC de la LLC
Dans la classification de Binet, on
distingue trois stades : A, B, C, de
gravité croissante. Le stade A est
asymptomatique. Au stade B, au
moins trois ganglions sont atteints et
le risque infectieux apparaît. Au stade
C, le nombre de globules rouges et
de plaquettes chute. Sauf facteur
particulier de mauvais pronostic, les
patients en stade A (environ deux
tiers des cas) ne sont que surveillés.
Aux stades suivants, il faut lutter
contre les complications infectieuses,
faire régresser les ganglions, puis
améliorer la production de globules
rouges et de plaquettes. L’espérance
de vie au stade A n’est pas différente
de celle de la population générale
de même âge.
Anticorps monoclonaux : anticorps tous identiques produits par une même lignée
de cellules du système immunitaire. Ils sont produits pour reconnaître spécifiquement
certaines cellules cancéreuses et entraîner leur destruction.
Allogreffe : greffe d’un organe ou de cellules issues d’une autre personne que le malade.
Chromatine : ensemble des protéines
associées à l’ADN dans le noyau
des cellules et participant à la structure
des chromosomes.
Méthylation : ajout d’un groupement
chimique « méthyle » sur l’ADN.
Il permet de réguler (négativement)
l’activité des gènes.
DrClaire Léger-Falandry,
médecin, étudiante en thèse
dans le laboratoire
de Biologie moléculaire
de la cellule (CNRS/ENSL).
Photos : Sébastien Erome
peutiques sont aujourd’hui proposées :
la chimiothérapie et les
anticorps mono-
clonaux
. Tous deux ont profité des avan-
cées de la recherche, et leurs molécules,
souvent associées, sont désormais très
efficaces pour faire baisser le nombre de
lymphocytes. Pourtant, elles n’empêchent
pas les rechutes, et seule l’
allogreffe
de
moelle permet d’obtenir une vraie guéri-
son : mais plus on progresse en âge, plus
elle est risquée. De plus, il faut trouver un
donneur compatible. Les espoirs reposent
donc sur la recherche des mécanismes
en cause : comme dans toutes les maladies
malignes, des anomalies génétiques
acquises sont certainement impliquées.
La fin du « tout générique »
a sonné. Les chercheurs
savent maintenant que
certaines maladies
trouvent leur origine
dans des phénomènes
annexes, dits épigénétiques.
FRM109 P04-12SR1VD 4/12/06 14:53 Page 8
1 / 22 100%