Juge national et changement climatique : de la justiciabilité à la justice climatique DRT-6078
Convention on Climate Change en anglais) et dans la traduction de l'Accord de Paris. L'auteure Marie
d'Aoûst estime néanmoins que l'utilisation du pluriel doit être privilégiée dans certains cas. En effet,
l'examen des dictionnaires du Petit Robert et du Larousse démontre que le terme de « changements
climatiques » se rapporte à « l’ensemble des circonstances atmosphériques et météorologiques propres à
une région du globe » et à l'« ensemble des phénomènes météorologiques (température, humidité,
ensoleillement, pression, vent, précipitation) qui caractérisent l’état moyen de l’atmosphère en un lieu
donné »4. Autrement dit : « lorsqu’il est question d’un pays ou d’une grande région (un continent), il est
possible de parler du climat ou des climats selon que la notion est prise dans sa totalité ou non. On pourra
donc écrire le climat du Canada pour parler de celui de tout le pays ou encore écrire les climats du Canada
(climat des Prairies, des Rocheuses, etc.). »5.
Vient alors la définition de la « justice climatique » (climate justice)6. Principe d'origine éthique et
philosophique, la justice climatique ne serait que la traduction du concept de justice distributive (une
distribution géométrique des avantages entre les membres d'une société, c'est-à-dire en tenant compte de
la valeur respective des personnes et de leurs mérites inégaux) et de justice corrective (une distribution
égale, arithmétique des avantages entre les membre d'une société en ignorant leurs conditions différentes7)
dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques8. On pourrait ainsi, en se fondant sur les
travaux du docteur Néron, proposer une définition de la justice climatique comme « les principes devant
guider nos principaux arrangements sociaux, économiques et politiques face à la gestion des risques
environnementaux causés par les changements climatiques », parmi lesquels le principe de l’équité,
l'intérêt des générations futures, le principe des responsabilités communes mais différenciées et le
principe du pollueur-payeur9. La justice climatique permet dès lors de corriger les inégalités
environnementales, sociales et étatiques causées par les changements climatiques10. Or, la justice
4 Marie D’AOÛST, « Les changements climatiques, un problème singulier », L’actualité langagière, volume 6, numéro 2,
2009, page 18
5 Ibid
6 Pour la distinction du droit et de la justice, voir notamment Geneviève TREMBLAY, La théorie de la "justiciabilité" et la
doctrine des questions politiques : Les balises du pouvoir judiciaire, mémoire, Université Laval, 1998 : « Le terme «droit»
correspond à l’idée de droit positif, c’est-à-dire au droit tel qu’il est, tandis que celui de «justice» réfère d’avantage à
l’idéal de justice, c’est-à-dire au droit tel qu’il devrait être. De façon plus générale, le premier est associé au domaine
juridique, alors que le second relève davantage du domaine moral. »
7 Aristote, Éthique à Nicomaque, Livre V, p 111
8 Pierre-Yves NERON , « Penser la justice climatique », Éthique publique vol. 14, n° 1 | 2012, en ligne
<http://ethiquepublique.revues.org/937>
9 Agnès MICHELOT, L’Accord de Paris: quelle justice climatique ?, conférence du 9 juin 2016 organisée par le Centre de
droit international et transnational de la Faculté de droit de l’Université Laval, en collaboration avec la Chaire de recherche
et d’innovation Goldcorp en droit des ressources naturelles et de l’énergie, la Chaire de recherche du Canada en droit de
l’environnement et l’Institut Hydro-Québec en environnement, développement et société
10 Ibid. Pour de plus amples développements sur les inégalités liées aux changements climatiques, voir Alexandre
MAGNAN, Changement climatique : Tous vulnérables ? Repenser les inégalités, 2012, Paris : Rue d'Ulm, coll. « Sciences
durables », 66 pp
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