films ont en commun de présenter la nature sous son plus beau jour (faisant pour la circonstance
du cinéma un authentique art esthétique).Chose très intéressante : ces films se doublent
souvent d'un message pédagogique et même rhétorique qui a besoin de la beauté et de cet
état de contemplation pour faire mouche. Un message trop politisé ou idéologisé aurait
tendance à briser le charme. Pour que l'art esthétique (qui a pour objet la beauté) se marie
harmonieusement avec l'art rhétorique (qui cherche à convaincre), il faut une délicatesse tout Ã
l'honneur des réalisateurs. Home, de Yann Arthus-Bertrand en 2009, est si caricatural qu'il peine
terriblement à susciter la contemplation. Faut-il y voir la grosse patte de Luc Besson, grand-prêtre
de la caricature et producteur du film ?Petite précision : contrairement à ce qu'on pourrait
penser, les films contemplatifs physiques ne sont pas forcément dépourvus de scénario, mais il
faut alors encore distinguer. Certains films scénarisés ont pour finalité première la
contemplation, tandis que d'autres font de la contemplation un repos transitoire, qui lie les scènes
ou détend le spectateur quelques instants.Dans la première catégorie, on peut citer par exemple
La clé des champs, de Claude Nuridsany (2010), dans lequel l'embryon d'amourette bucolique
scénarisée entre les deux enfants est assez accessoire : le but est bel et bien de montrer la vie
d'un étang.Dans la deuxième catégorie, on peut citer Le territoire des Loups, de Joe Carnahan
en 2012, ou encore Les chemins de la liberté, de Peter Weir en 2010, dans lesquels les superbes
plans de montagnes, de forêts, de déserts, etc. rappellent la présence d'un infini. Dans ces deux
films d'ailleurs, la contemplation est mise au service du contraste brutal entre la beauté du cadre et
la violence de ce qui s'y déroule.A côté des films de contemplation physique, il existe des films
de contemplation métaphysique. Ceux-ci interpellent directement le spectateur sur l'essentiel et
l'existentiel. En philosophie réaliste, l'essence se définit comme ce que la chose est, tandis que
l'existence, c'est que la chose est.Ne parle-t-on pas, avec un certain cynisme le plus souvent, des
questions existentielles d'un film ? Hé bien ! Assumons ici sans rigoler ce sens
d' « existentiel, » et considérons que par le truchement de la beauté, certains films
suscitent le questionnement métaphysique.Terrence Malik n'est pas un guignol... Après ses
études à Harvard et à Oxford, il a enseigné la philosophie au M.I.T. (Massachusetts Institute of
Technology) avant de traduire Le principe de raison, de Heiddeger. Il se trouve qu'il est également
réalisateur, et que ses films sont le plus souvent incompris.Ce qui caractérise en effet ce
réalisateur, c'est qu'il s'appuie souvent sur la nature pour dépasser ce degré d'abstraction
physique et s'attaquer directement au métaphysique, voire au théologique. C'est par exemple le
cas de The tree of life (2011), dans lequel, entre autres questions, il interroge l'idée de
paternité...Terrence Malik n'est pas le seul à poser ces questions. Dans l'excellent Odyssée de
Pi, de Ang Lee en 2012, la question du sens de la vie est directement posée.Dans ces deux
derniers cas, le réalisateur pose directement la question de Dieu, ce qui explique que ce soit des
films métaphysiquement contemplatifs, mais il faut bien comprendre qu'en fonction du spectateur,
n'importe quel film contemplatif invite à se poser la question d'un sens et d'un pourquoi, et donc,
fréquemment, de Dieu.Ainsi, même si un film physiquement contemplatif n'est pas, par
définition, métaphysique, il n'empêche nullement de se poser des questions métaphysiques.
Les films contemplatifs, pour toutes les raisons que je viens d'évoquer, sont des films édifiants.
Pas édifiants parce qu'ils cherchent à édifier (pitié !), mais édifiant parce qu'ils posent des
questions dont les réponses sont la clé de la compréhension du monde, et parce que
philosopher, c'est d'abord s'étonner !..
https://www.lecran.fr 26/05/2017 00:17:39 - 2