- Docteur Chien -
L’odorat du chien est d’une précision
extraordinaire. Chez cet animal, l’olfaction serait
de 200 000 à un million de fois plus puissante que
chez l’humain. Le tiers du cerveau canin est
consacré à cette fonction. Si bien que le chien
peut, par exemple, distinguer chacun des
ingrédients d’une sauce. Il arrive aussi à détecter
des cancers plus rapidement et plus précisément
que toute la technologie existante. Certains chiens
alertent leur maître de l’arrivée imminente d’une crise d’épilepsie ou d’un
coma diabétique. Une équipe d’Enjeux a voulu en savoir plus long sur les
capacités olfactives extraordinaires de nos amis canins.
Des chiens qui dépistent le cancer
Depuis une vingtaine d’années, des chercheurs
sérieux s’intéressent à la détection du cancer par
les chiens. Tout cela a commencé avec l’histoire de
Gillian Lacey. En 1978, cette jeune femme a su
très tôt qu’elle avait un mélanome, grâce à son
chien. Le dalmatien sentait avec insistance un
banal grain de beauté qu’elle avait sur la jambe.
Elle a fini par consulter un médecin, et on a
découvert qu’il s’agissait d’un dangereux
mélanome. Cette histoire et des dizaines d’autres
cas similaires ont été rapportés dans le prestigieux journal médical
britannique The Lancet en 1989.
Par la suite, les laboratoires de l’Hôpital
Amersham, en Grande-Bretagne, ont fait
l’expérience du dépistage, par les chiens, du
cancer de la vessie, une maladie souvent détectée
trop tard. Les résultats de cette étude, effectuée
en 2004, ont été spectaculaires. On a entraîné ces
chiens pendant sept mois à renifler des
échantillons d’urine, dont un provenant d’un
patient atteint du cancer de la vessie. Les toutous
ont réussi à identifier l’échantillon du malade dans 41 % des cas. Certains
ont même réussi à détecter le cancer presque deux fois sur trois.
L’expérience a été faite dans des conditions très strictes.
Gillian Lacey
Notre équipe est allée en Grande-Bretagne voir ces
chiens à l’œuvre. Bien que les recherches stagnent
en ce moment, faute d’argent frais, on continue
d’entraîner les chiens pour détecter le cancer, et
les résultats progressent toujours. Nous avons
assisté à une démonstration impressionnante, que
nous vous présentons dans ce reportage.
Les Américains s’intéressent eux aussi à la truffe
du chien. Au printemps dernier, la Pine Street
Foundation, en Californie, a mené une expérience
à partir d’échantillons d’haleine exhalée dans des
tubes. Les chiens devaient détecter les échantillons de patients atteints du
cancer du poumon ou du sein. Après plus de 12 000 essais, les chiens ont
atteint un taux de succès ahurissant: 88 % dans le cas du cancer du sein, et
99 % pour le cancer du poumon. Aucune technologie connue ne peut égaler
une telle performance.
À quoi vont mener ces recherches? Va-t-on voir, un jour, des chiens se
promener dans les hôpitaux pour détecter les cancers? Pour les scientifiques
responsables de ces études, il ne s’agit pas de se doter d’une nouvelle forme
de détection, mais plutôt de mieux comprendre le cancer et les façons de le
diagnostiquer.
Au secours des épileptiques et des
diabétiques
Au Canada, on fait aussi appel aux facultés
olfactives des chiens. La Fondation des lions du
Canada, à Oakville, en Ontario, est spécialisée
dans la formation de chiens de travail pour les
aveugles, les sourds et les quadriplégiques. Elle
forme aussi, chaque année, 15 chiens pour porter
secours aux épileptiques. Il faut de 6 à 8 mois
d’entraînement. Farley est un de ces chiens. Il vit
maintenant avec Judy, une femme qui ne pouvait
plus mener une vie normale, parce qu’elle avait trop de crises d’épilepsie. Le
labrador de deux ans a changé sa vie. Il sait porter secours à sa maîtresse
lors d’une crise d’épilepsie. Il fait aussi partie de ces chiens qui, à force de
vivre avec un épileptique, arrivent naturellement à détecter les crises avant
qu’elles surviennent. La présence du chien a fait baisser le stress lié à la
maladie, ce qui a eu pour effet de diminuer considérablement le nombre de
crises.
Carolyn Willis,
coauteure de l'étude
d'Amersham
Judy et son chien
Avant l’arrivée de Jules César, le diabète contrôlait
la vie de Sylvie Garceau. Cette femme, qui prenait
de l’insuline depuis plusieurs années, ne sentait
plus venir ses crises, et tombait régulièrement
dans le coma. Maintenant, le cocker anglais l’avise
quand elle a besoin d’insuline. Jules César a été
entraîné à détecter les variations de glycémie à la
Fondation Corazón du Québec.
Des chiens donnent confiance aux diabétiques,
protègent les épileptiques, dépistent un cancer plus rapidement que la
technologie moderne. Ces faits ne sont pas encore pris au sérieux par le
monde scientifique, et il est très difficile de trouver des fonds pour la
recherche dans ce domaine.
Journaliste: Hélène Courchesne
Réalisatrice: Nicole Messier
[Regarder le reportage (1re partie)]
[Regarder le reportage (2e partie)]
Hyperliens
Flairer la santé
Reportage présenté à l'émission Les années lumière en avril 2006
Entraînement de chiens de travail pour les épileptiques
Fondation des lions du Canada
Fondation Corazón du Québec
Diagnostic Accuracy of Canine Scent Detection of Lung and Breast
Cancers in Exhaled Breath
Étude de la Pine Street Foundation
Olfactory detection of human bladder cancer by dogs: proof of principle
study
Article paru dans le British Medical Journal en septembre 2004
Seizure-alerting and -response behaviors in dogs living with epileptic
children
Article paru dans la revue Neurology en 2004
Sylvie et son chien
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