Fiche synthèse Portrait des traitements de substitution au Québec Les progrès accomplis en matière de traitements de la dépendance aux opioïdes (TDO) depuis les quarante dernières années au Québec sont indéniables. Cependant, l’accessibilité et la précarité de ces services demeurent des enjeux de taille. Des efforts restent à faire afin de rendre cette offre de service conforme à la vision du MSSS, et ce, de façon équitable dans toutes les régions. La version 2011 du portrait des TDO au Québec permet de faire le point sur l’évolution de l’offre de service depuis 2008. Le portrait repose sur des données en provenance des centres de réadaptation en dépendance (CRD), des ressources spécialisées en TDO, de médecins prescripteurs en première ligne, d’organismes professionnels tels que le Collège des médecins du Québec (CMQ) et l’Ordre des pharmaciens du Québec (OPQ) ainsi que d’instances gouvernementales telles que le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS), l’Agence de la santé publique de Montréal et le Bureau du coroner en chef. FAITS SAILLANTS SUR L’ACCESSIBILITÉ En 2011, les TDO en CRD sont offerts dans 11 régions sur 16 seulement. Quatre régions sur 16 offrent ces services uniquement en première ligne. Une région n’offre aucun service : il s’agit de la Côte-Nord qui connaîtra le développement du Plan Nord. Les délais d’attente pour les nouveaux patients varient selon les régions de moins de 3 mois à plus d’un an. Pour les personnes se trouvant déjà en traitement et souhaitant résider à nouveau dans leur région, ce délai peut atteindre deux ans; Les pratiques médicales qui varient d’un médecin à l’autre ont aussi un impact négatif sur l’accès au traitement et la continuité des services. Les médecins de la communauté travaillent souvent de manière isolée, ce qui restreint l’accès à des services adaptés à la situation des patients et affecte le continuum de services à assurer pour ces patients. FAITS SAILLANTS SUR LA PRÉCARITÉ Pour plus de la moitié des CRD (9/15), l’offre de service en TDO demeure aussi précaire qu’en 2008; o La majorité des centres affirment que leur offre de service est précaire en raison de la difficulté à recruter des médecins souhaitant s’engager auprès de cette clientèle; o Quatre CRD prévoient rencontrer des problèmes dans le recrutement de nouveaux médecins à la suite de départs de médecins pour une retraite prévue ou anticipée, ou pour des raisons d’ordre personnel; 1 12 régions du Québec sont précaires pour les services offerts en 1ère ligne : soit que l’offre de service est inexistante ou qu’elle repose sur un ou quelques médecins isolés et sans appui. FAITS SAILLANTS SUR L’ÉQUITÉ DE L’OFFRE DE SERVICE Un seul des 12 centres de santé et de services sociaux (CSSS) de la région de Montréal assure le suivi psychosocial et médical de substitution tel que défini dans l’offre de service en dépendance du MSSS et en ce qui touche le transfert de patients stabilisés en provenance des centres spécialisés vers la première ligne; Une majorité de médecins hors CRD exerce en solo, sans l’appui ou la contribution de ressources infirmières, psychosociales ou d’un collègue médecin. Cette situation demeure même si ces médecins sont rattachés à un CSSS ou à une polyclinique médicale; En raison de l’étalement géographique et du manque de points de service à proximité des populations, l’offre des TDO est inégalement répartie sur le territoire d’au moins trois régions administratives, soit le Bas-Saint-Laurent, la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine et l’Abitibi-Témiscamingue. Cette situation crée une iniquité et limite l’accès aux services; Bien que la buprénorphine soit un médicament sécuritaire et facilement accessible sur le territoire québécois, elle est surtout prescrite par les médecins des CRD et très peu par les médecins de première ligne. En ce sens, elle a peu d’impact sur l’amélioration de la qualité et de l’équité de l’offre de service en TDO. ENJEUX PROVINCIAUX PERÇUS ET PISTES DE SOLUTION AUGMENTER L’ACCESSIBILITÉ ET DIMINUER LA PRÉCARITÉ DE L’OFFRE DE SERVICE EN MISANT SUR : Le recrutement médical : la rétention en poste, l’investissement dans le recrutement et les conditions de rémunération se trouvent au cœur du développement de l’accessibilité et de la consolidation des services. Des actions de sensibilisation et des mesures incitatives doivent être considérées afin d’intéresser les médecins à cette pratique et au suivi de ces clientèles; L’exposition des médecins résidents à la pratique liée aux TDO et auprès des clientèles vulnérables tant en UMF, GMF que dans les cliniques d’enseignement; Le développement de partenariats entre les première et deuxième lignes pour offrir le niveau de services requis; La valorisation de la pratique infirmière en CSSS et CRD pour les traitements de la dépendance aux opioïdes; 2 L’harmonisation des pratiques médicales selon le cadre de référence et les bonnes pratiques, de manière à améliorer la qualité, l’accessibilité et l’équité des services et à réduire les différences régionales préjudiciables aux clientèles; La création de corridors de services intrarégionaux regroupant les services médicaux (incluant ceux liés à la santé mentale), correctionnels, de périnatalité, hospitaliers et communautaires, afin d’assurer un continuum de services et augmenter l’accessibilité; Le soutien infirmier et psychosocial aux médecins de première ligne travaillant en solo que ce soit en CSSS, GMF, polycliniques ou cabinets privés par l’octroi de ressources infirmières et psychosociales. DIVERSIFIER LA MÉDICATION POUR LES TDO SELON LES PARAMÈTRES SUIVANTS : Des médications de substitution disponibles, connues et intégrées dans la pratique médicale en première et deuxième ligne. Des modalités de traitement de la dépendance aux opioïdes adaptées aux différents besoins des personnes dépendantes. Ceci comprend la prescription de buprénorphine sans restriction d’exceptions et la prescription médicale d’opiacés injectables. Rappelons que les TDO sont d’abord et avant tout un traitement médical dont les ressources se trouvent en première ligne. Ce traitement médical nécessite au quotidien l’appui de professionnels infirmiers et psychosociaux formés en dépendance sans négliger l’apport des pharmaciens, collaborateurs indispensables à la bonne marche des suivis cliniques. QUELQUES CHIFFRES 1 Une étude de Santé Canada affirme qu’il en coûte 44 600 $ annuellement à la société pour une personne non traitée alors qu’un patient en traitement de maintien à la méthadone coûte moins de 4 000 $ par année. Approximativement 18 % (environ 2 200) de l’ensemble des personnes dépendantes des opioïdes sont rejoints par un programme de substitution avec la méthadone. La majorité d’entre elles sont dans la région de Montréal (60 %), suivie des régions de la Montérégie 2 (10 %) et de Québec (7 %). Selon les données du Bureau du coroner en chef du Québec, treize personnes par mois sont décédées par intoxication aux opioïdes en 2008 et les régions les plus touchées sont Montréal (56), la Montérégie (26) et la Capitale nationale (22). _____________ 1 Wall R., Rehm J., Fisher B., Gliksman L., Stewart J., Melved W., Blake J., (2000) Social Costs of Untreated Opioid Dependence, Journal of Urban Health. 77 (4); 688-722. 2 Institut national de santé publique du Québec (2003). Développement d’un système de surveillance sur l’utilisation de la méthadone : rapport sur la faisabilité de produire des indicateurs de suivi, document de travail, Direction des systèmes de soins et des services, Québec, Gouvernement du Québec. . 3