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Théoriquement, le marxisme classique ne requérait pas cette position. Marx lui-même était chrétien au
début de sa vie. Lénine a clairement montré que le parti communiste pouvait admettre des croyants et
même des prêtres dans ses rangs. Ces croyants peuvent toujours continuer à croire tout en étant dans le
parti, à la condition qu’ils ne contreviennent pas au programme du parti. Si le parti peut admettre et
garder de tels croyants, cela signifie après tout que ses membres sont autorisés à être croyants. Dans le
monde actuel, le parti communiste de Cuba autorise ses membres à adhérer au catholicisme. Le parti
communiste au Vietnam autorise aussi ses membres à adhérer à une de leurs religions nationales
traditionnelles. Dans le passé en Chine aussi, plusieurs dirigeants religieux devinrent membres du PCC
grâce à la théorie et à la pratique du "Front Uni" (Alliance momentanée dans les années 1920 puis
dans les années 1930, du Kuoomintang et du PCC. Aujourd’hui, instance qui réunit les instances de la
société civile qui ne sont pas directement le PCC. NdT). Ce secret s’est d’ailleurs vite ébruité. Dans les
régions où vivent des minorités, comme celles du Tibet ou du Xinjiang, il est très difficile pour les
membres du Parti de ne pas adhérer à leur religion, parce que la religion n’est pas là-bas simplement
un "opium du peuple" mais en réalité la "vie du peuple". Ce problème suscite des débats animés
aujourd’hui. De mon point de vue, les croyances politiques et les croyances religieuses devraient être
vues séparément parce qu’elles sont de types différents. On peut maintenir les deux croyances en
même temps parce qu’elles ne sont pas nécessairement en contradiction ou en opposition l’une vis-à-
vis de l’autre.
Deuxièmement, le gouvernement a la tâche directe de prendre les affaires religieuses sous son
administration. Pour cela, il existe des divisions du Bureau des Affaires religieuses à des niveaux
variés à travers l’ensemble de la Chine. De manière intéressante, l’administration politique et
religieuse est parfois combinée. De nombreux officiels gouvernementaux responsables des affaires
religieuses sont devenus finalement des responsables religieux, vice-président ou secrétaire général
d’associations religieuses par exemple. Ils sont membres du Parti et maintenant aussi croyants. Ceci
encore n’est pas un secret et est devenu assez normal. On constate ici, cependant, une contradiction
entre la théorie et la praxis de la politique religieuse.
Troisièmement, nous découvrons des représentants des religions aussi au sein de l’Assemblée
nationale du peuple. Le cas de Mgr Fu Tieshan, évêque du diocèse catholique de Pékin peut être ici
mentionné. Cet évêque a en effet exercé la fonction de vice-président de l’Assemblée nationale du
peuple, ce qui faisait de lui une personnalité d’Etat importante issue des cercles religieux. Autre
exemple, un "Bouddha vivant" est en ce moment vice-directeur du Comité pour les nationalités de
l’Assemblée nationale populaire.
Quatrièmement, nombreux sont les représentants des cercles religieux à siéger au sein de la
Conférence politique consultative du peuple chinois. On y trouve notamment les dirigeants des
différentes associations religieuses dans son Comité pour les affaires ethniques et religieuses. Le
directeur du Comité est un ancien vice-ministre pour le Travail du Front Uni dans le Parti et presque
tous les vice-directeurs sont des personnalités dirigeantes des religions chinoises. Zhao Puchu, un
bouddhiste, et Mgr Ting (Ding Guangxun), de l’Eglise protestante en Chine, étaient même vice-
président de la Conférence politique consultative. Là encore donc, les personnalités dirigeantes de
l’Etat sont issues des cercles religieux.
Dans cette structure politique, on constate donc une participation claire de la religion. De la même
manière, on retrouve aussi une participation du Parti et du gouvernement dans les organisations
religieuses. Comme le PCC maintient qu’il est un parti athée, la relation entre la religion et l’Etat en
RPC n’est ni une intégration ni une séparation. Cette relation en Chine ne peut pas être expliquée par
la théorie occidentale de la religion et de l’Etat.
Mondialisation et religions mondiales
A l’ère de la mondialisation, la Chine ne peut plus éviter l’influence étrangère qui s’exerce à
travers la religion. Il en résulte des tensions politiques entre les activités complexes des religions
mondiales et le principe de base de l’administration des affaires religieuses en Chine. Mais, dans une
société ouverte, à l’âge de l’information, il est difficile d’administrer et de contrôler les religions en
Chine sans influence extérieure. D’une part, la Chine essaye de rejeter et de critiquer une telle
influence la qualifiant "d’ingérence étrangère dans les affaires internes de la Chine" visant à mettre en
difficulté l’indépendance et l’autonomie des religions y existant. D’autre part, la Chine se doit de
participer à la communauté internationale et de s’engager dans un dialogue sur la liberté religieuse et