Quelles relations entre les Eglises et l`Etat en Chine populaire ?

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Quelles relations entre
les Eglises et l’Etat en Chine populaire ?
12/03/2014 - par Zhuo Xinping
Dans le système impérial chinois, l’empereur était considéré comme le «
fils du Ciel », impliquant par- que les liens que pouvaient entretenir
ses sujets avec les réalités d’en-haut étaient nécessairement médiatisés
par sa personne et que, par extension, les religions n’avaient pas
d’existence propre en Chine sauf à entretenir un lien avec l’empereur et
le système impérial. Loin d’abattre cette architecture (
政主教从
zhengzhu, jiaocong, le gouvernement est le maître et la religion le serviteur’), les dirigeants
communistes ont fait leur ce système, en mettant en place un enregistrement des religions
officiellement reconnues, en-dehors duquel toute activité religieuse est considérée comme subversive.
Aujourd’hui, du fait de l’approfondissement des réformes et de l’ouverture de la société chinoise sur
l’extérieur, le cadre institutionnel en place craque de toutes parts et l’Etat-Parti chinois a conscience
de la nécessité de réviser sa politique religieuse.
Zhuo Xinping dirige l’Institut des religions du monde, instance rattachée à l’influente Académie
chinoise des sciences sociales. Expert reconnu des questions religieuses, il siège également à
l’Assemblée nationale populaire. Spécialiste du christianisme, il est une voix influente à même de
conseiller le pouvoir en place. Dans le présent article, il explique que ni l’intégration de la religion
dans l’Etat ni la stricte séparation de la religion et de l’Etat ne sont envisageables en Chine, mais que
le seul système historiquement éprou et politiquement souhaité est celui qui voit le pouvoir politique
exercer une certaine subordination sur le pouvoir religieux. Toute la question est de définir la nature
de cette subordination et le degré de celle-ci. Il estime encore le moment présent particulièrement
propice à une discussion "ouverte et tolérante" sur ce problème, et tient pour "réaliste" la probabilité
que le gouvernement finisse par accorder plus de liberté aux religions, sans pour autant abandonner
le cadre qui lui permet d’exercer son contrôle sur la société.
Le Professeur Zhuo Xinping a donné la conférence ci-dessous lors de la XIIIe Académie annuelle du
China-Zentrum, à Sankt Augustin (Allemagne) le 11 avril 2013. L’Académie annuelle du China-
Zentrum marquait en même temps le jubilé des vingt-cinq ans de ce centre de recherches sur la Chine
lié à la société missionnaire catholique du Verbe divin (SVD). Le texte original en allemand a été
publié sous le titre « Die Beziehung zwischen Religion un Staat in der Volksrepublik China » dans
China heute 2013, n° 3, pp. 165-170.
La société chinoise se trouve aujourd’hui plongée au cœur d’un processus d’ouverture introduisant
un changement majeur dans les relations que la Chine entretient avec le reste du monde. Cette
ouverture met les Chinois face à une tension entre le monde contemporain occidental et la préservation
de leurs propres traditions. Cette tension peut être notamment ressentie dans la sphère de la religion.
Aujourd’hui se développent en République populaire à la fois une grande variété de religions et une
importante diversité d’opinions au sujet de la religion. Même si la religion est perçue dans la Chine
contemporaine d’un point de vue mondial et qu’elle est perçue positivement plus souvent que par le
passé, l’attention principale est toujours centrée sur sa relation avec l’Etat. Les Chinois ptent une
grande attention à la relation entre religions et Etat dans le monde contemporain, notamment dans les
Etats occidentaux, et discutent des différentes formes que cette relation peut prendre, telle l’intégration
ou bien la séparation. Concernant ces différentes formes, la République populaire de Chine (RPC)
insiste : le principe qui la gouverne est celui de la séparation des Eglises et de l’Etat. La religion est
une affaire privée et il n’existe aucune religion d’Etat. La chose n’est cependant pas aussi simple. Si
l’on regarde la forme actuelle de cette relation, on réalise qu’au regard des standards occidentaux, la
religion en Chine n’est pas une affaire privée et qu’il existe quelque chose de semblable à une religion
d’Etat. La théorie occidentale de la relation entre religion et Etat n’explique donc pas de manière
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adéquate l’état actuel des choses. On ne peut pas comprendre la véritable relation entre la religion et
l’Etat en Chine par les moyens de la théorie occidentale, sauf à s’enfermer dans une impasse.
Pour expliciter la réalité de cette relation en Chine, il est nécessaire de prendre en compte les
discussions des Chinois sur la religion, sur la foi, sur la politique et sur leurs propres caractéristiques.
Avec l’ouverture de la Chine au monde exrieur, il est maintenant possible aussi de faire des
comparaisons et de poser de nouvelles questions. La résurgence rapide des religions aujourd’hui en
Chine reflète les interactions entre un monde globalisé et les réformes qui y sont en cours. Sous
l’influence de la mondialisation, les religions y sont devenues plus ouvertes et plus transparentes. Mais
cette évolution a, dans le même temps, mis en avant des questions concernant le concept et la place de
la religion dans la société chinoise. Dans ce processus, les tentatives ne manquent pas pour interpréter
de nouveau la relation entre religion et Etat, ou entre les religions et l’Etat.
Selon mon analyse, la relation complexe entre religion et Etat en Chine peut être examinée sous
quatre aspects, quatre relations : politique et religion, droit et religion, société et religion et culture et
religion. Ces quatre aspects ne sont pas statiques mais interagissent. La relation entre politique et
religion cependant est la plus importante. Quel rôle la religion devrait-elle ou pourrait-elle jouer en
RPC ? La religion en Chine peut-elle être acceptée comme un phénomène populaire normal ? Existe-t-
il une possibilipour la politique d’être liée à la religion ? Ces questions sont encore controversées
aujourd’hui. Bien entendu, tous ces problèmes peuvent être abordés de nos jours ce qui témoigne
d’une atmospre ouverte et tolérante en ce qui concerne ces questions dans la société chinoise.
Notre propos vise à montrer qu’il y a en réalité une norme totalement différente sous-tendant la
relation entre religion et Etat en RPC qui ne peut pas être expliquée par la théorie théologico-politique
occidentale mais qui devient compréhensible et acceptable si l’on considère l’arrière-plan de la
tradition chinoise. Cette relation reflète la continuité de la vieille tradition chinoise mais est aussi
influencée par les développements actuels dans un contexte globalisé. Cette situation rend possible et
permet d’espérer un changement et une amélioration dans un futur proche. Pour correctement
appréhender la relation entre religion et Etat en RPC, nous devons donc d’abord examiner cette
tradition en Chine et ensuite tourner notre attention sur ses développements et les changements qui se
produisent actuellement.
le Système de l’Etat unitaire et les religions chinoises
Le principe de l’Etat unitaire en tant que croyance culturelle a toujours cours et est soutenu par le
peuple chinois de la Chine contemporaine. Même s’il y a des changements sur la scène internationale
et que la Chine subit l’influence de systèmes politiques tels que le fédéralisme et la séparation des
pouvoirs, l’unité de l’Etat et la concentration des pouvoirs politiques demeurent la structure de base de
la société chinoise. En comparaison avec les sociétés occidentales, il semble qu’en cela le
gouvernement chinois soit plus efficace pour organiser la société. Alors que les nations occidentales,
par exemple, affrontent encore aujourd’hui la crise économique, grâce à cette structure la Chine
continue à se développer rapidement. Le système de l’Etat unitaire se traduit aussi dans une idéologie
unifiée. L’unité de l’Etat est intimement liée à l’unité de pensée. L’ordre et la stabilité sociale sont à
cet égard primordiaux ; ou dit autrement, ils sont la condition préalable pour le développement social
et doivent être par conséquent assurés.
Dans ce contexte, de nombreuses réflexions ont émergé concernant la signification et la fonction de
la religion dans la société. La religion n’est en aucune manière une réalité mineure. Ceci est valable
pour toutes les religions chinoises. Elles ont leurs propres positions dans la structure sociale et doivent
par conséquent jouer leur rôle politique, sociétal, culturel et conceptuel. Dans l’histoire de la Chine, il
n’y a jamais eu ni une intégration de l’Etat et de la religion dans laquelle la religion jouerait un rôle de
guide, ni une soi-disant séparation de l’Etat et de la religion. La seule relation entre Etat et religion qui
ait toujours existé en Chine a été celle de la primauté de l’Etat et la subordination de la religion. Cela
n’a jamais été l’inverse. La religion doit être une aide pour l’Etat. C’est là le secret de l’harmonie entre
l’Etat et la religion. La structure religieuse est subordonnée à celle de l’Etat. En réalité même, elles ne
forment pas deux structures mais une seule. La structure religieuse est une partie de la structure de
l’Etat. Patriotisme et liberté religieuse doivent être compris à l’intérieur de cette structure. La loyauté
envers l’Etat venait et vient toujours en première place, ensuite seulement vient la loyauté envers une
religion spécifique. Les organisations religieuses étaient et sont encore aujourd’hui en la matière
sous le contrôle de l’Etat et de nombreux responsables religieux étaient et sont en même temps des
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représentants de l’Etat. Le chef de l’Etat cependant a toujours été un souverain séculier, qu’il soit
empereur ou roi ; il n’a jamais été le prêtre d’une religion.
Le contrôle étatique de la religion était et est encore exercé aujourd’hui par les autorités de
supervisions compétentes dans l’administration d’Etat, comme par exemple le Fanfang 番坊 (Bureau
pour l’administration des étrangers) sous la dynastie Tang, le Xuanzhengyuan 宣政院 (Bureau pour le
bouddhisme), le Jixianyuan 贤院 (Bureau pour le taoïsme), le Chongfusi 崇福司 (Département pour
le christianisme) et le Huihuihadisi 回回哈的司 (Département pour l’islam) sous la dynastie Yuan ; le
Libu 礼部 (Ministère des rites pour le bouddhisme et le taoïsme) et le Siyiguan 四夷 (Office
gouvernemental pour les religions minoritaires) sous la dynastie Ming ; le Lifanyuan 理藩院 (Office
gouvernemental pour les religions minoritaires) sous la dynastie Qing ; le Meng-Zang weiyuanhui
蒙藏委员会 (Commission pour les affaires mongoles et tibétaines) sous la République de Chine et le
Zongjiaoju 宗教局 (Bureau des affaires religieuses) sous le pouvoir communiste. Au vu de ce
patrimoine administratif, on comprend aisément pourquoi, quand le Vatican parle de liberté de religion
concernant la nomination des évêques dans l’Eglise catholique de Chine, le gouvernement chinois lui
défend la nomination des évêques comme un droit souverain de l’Etat.
le Marxisme et l’influence du confucianisme
Au cours des cent dernières années, le marxisme a supplanté le confucianisme dans la société
chinoise. A ce jour, le marxisme demeure le principe idéologique de la Chine. Ce rôle prépondérant du
marxisme signifie que le confucianisme n’est plus la théorie politique ou culturelle dominante pour le
peuple chinois. Cela d’autant plus qu’il leur est indifférent de savoir si le confucianisme est une
religion ou pas. Des portraits de Marx et Engels par exemple ont été exposés pendant plus de soixante
ans place Tiananmen, à kin, sans causer aucun problème, mais une statue de Confucius en face du
Musée d’Histoire de la Chine dans le voisinage immédiat de la place Tiananmen a été retirée après
seulement cent jours en raison d’importantes protestations.
Dans leur analyse de la religion, les communistes chinois sont toujours très allemands et parlent
volontiers de l’interprétation marxiste de la religion en Europe. Citer cependant le jugement de Marx
sur la religion comme « opium du peuple » n’est pas bien vu dans le contexte chinois. Pour cette
raison, dans les années 1980, il y a eu comme une "guerre de l’opium" en Chine concernant le
jugement à porter sur la religion. Marx, lui, parlait principalement de la religion en Europe au XIXe
siècle. Le phénomène religieux dans la Chine contemporaine ne peut pas pour cette raison s’interpréter
à cette à cette aune.
De nos jours, lorsqu’on parle de l’identité chinoise, on en vient très souvent au problème de
l’occidentalisation par le marxisme. Si, dans la réforme et l’ouverture actuelles cependant, le Parti
communiste chinois (PCC) souhaite assurer qu’il représente la culture chinoise, il doit retourner à la
tradition chinoise. Cette évolution donne au confucianisme une confortable opportunité de
renaissance. Dans la discussion concernant la nécessité d’une théorie politique pour le développement
de la Chine, l’attention s’est aujourd’hui portée sur la possibilité d’un dialogue entre le marxisme et le
confucianisme. Contrairement au confucianisme, le marxisme en effet ne trouve pas son origine dans
la culture chinoise ce qui constitue un désavantage fondamental pour l’amour-propre chinois.
Afin de demeurer l’idéologie dominante en Chine, le PCC parle maintenant de "sinisation du
marxisme". Le marxisme, cependant, est fondamentalement conçu pour la lutte des classes, il est donc
par nature une "philosophie du combat". Cela induit des difficultés spécifiques. D’après la théorie
marxiste, la religion est un reflet de la société. L’évaluation négative de la religion par Marx trouvait
son origine dans son évaluation, elle-même négative, de la société de son temps. Sa critique de la
religion est par nature une critique de la société. Aujourd’hui, si les Chinois critiquent leur religion et
en même temps évaluent positivement leur société, c’est en termes marxistes une contradiction. Et
nous ne devrions pas oublier non plus que quand Marx critiquait la religion et appelait à la lutte des
classes, le parti communiste représentait l’opposition au pouvoir de l’Etat et du gouvernement. Le
PCC cependant est devenu à son tour un parti de gouvernement. Cette contradiction soulevée par la
critique idéologique de la religion en Chine n’a toujours pas été résolue. Par conséquent, il n’y a pas
d’autre issue : les Chinois doivent interpréter la relation entre la religion et la société d’une manière
nouvelle. Dans le processus, ils maintiennent le principe et la méthode de l’analyse marxiste de la
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religion et sa relation à la société : si une société est bonne, logiquement sa religion doit être bonne
aussi.
La tendance principale en Chine aujourd’hui est celle du développement d’une société
harmonieuse. L’élaboration d’une culture harmonieuse est par conquent nécessaire et l’espace pour
la lutte des classes se trouvent dès lors contraint. La transformation à partir du marxisme, classique en
Europe, vers une culture harmonieuse devient graduellement visible en Chine. Pour conserver
néanmoins la sacralité du marxisme et du communisme, on observe d’une part une volonté de
"sinisation du marxisme" et d’autre part une insistance sur une "théorie socialiste avec des
caractéristiques chinoises ». Le but reste l’élaboration d’une société harmonieuse en Chine. Par
conséquent, si une "philosophie de l’harmonie" forme l’âme de la société, c’est après tout équivalent à
un retour du confucianisme, lequel poursuit essentiellement de l’harmonie. Bien que le PCC et le
gouvernement chinois s’accrochent toujours au marxisme, parmi le peuple on assiste à une
impressionnante renaissance du confucianisme. Où allons-nous ? La Chine est aujourd’hui à un
carrefour. Peut-être la meilleure solution est-elle une union possible et idéale du marxisme avec le
confucianisme. Cela pourrait devenir la meilleure harmonie possible pour la Chine. Les deux,
cependant, doivent opérer leur autocritique pour être capable de proposer quelque chose de nouveau.
Conscience culturelle et religion
La conscience culturelle du peuple chinois reprend vie lentement aujourd’hui. Cela conduit
inévitablement à une tension entre la poursuite du marxisme et la promotion d’un nationalisme
culturel. Pour échapper à ce dilemme, la Chine cherche d’une part à mettre en avant de nouvelles
recherches sur le marxisme. Elle soutient notamment l’ambitieux projet d’une nouvelle traduction des
œuvres complètes de Marx et Engels de l’allemand au chinois. D’autre part, la Chine entend
promouvoir les Guoxue (国学, études chinoises) et établir plus d’une centaine d’Instituts Confucius à
travers le monde. Ces deux actions n’ont cependant pas la même signification.
Alors que la recherche marxiste a été approuvée comme un sujet académique de première classe, la
proposition faite et soutenue par quelques présidents d’université et par quelques professeurs réputés
de reconnaître les Guoxue comme un sujet académique de première classe a été rejetée et même
qualifiée de "conservatisme culturel". Néanmoins, les Guoxue ont une influence très sensible sur la
société chinoise, ils représentent en effet la conscience culturelle du peuple chinois. En ce qui
concerne leur contenu, les Guoxue couvrent essentiellement des recherches sur le confucianisme, le
bouddhisme et le taoïsme, en d’autres termes sur les plus typiques et les plus traditionnelles des
religions chinoises.
Tous les Chinois sont naturellement bien conscients de la signification culturelle de ces trois
traditions mais leur signification religieuse est dans une grande mesure méconnue. Le confucianisme
en particulier n’est pas encore considéré par les Chinois de nos jours comme une religion. Si le
confucianisme était accepté comme une religion en Chine, nous aurions à décrire le peuple chinois
comme très religieux. D’un point de vue historique, l’acceptation du marxisme et le rejet du
confucianisme se sont produits presque simultanément au début du XXe siècle à travers le "Nouveau
Mouvement culturel". Avec la disparition du système féodal, le confucianisme a perdu son statut de
principe idéologique de la Chine et n’a plus été considéré comme une religion. Plusieurs grands
intellectuels de cette époque, comme Liang Qichao, Cai Yuanpei et Liang Shuming, avaient accepté la
proposition de Matteo Ricci, à savoir que le confucianisme n’est pas une religion, ils ont même
maintenu que la Chine n’avait pas de religion en soi. Depuis lors, de nombreux Chinois ne connaissent
plus leur identité et ont des problèmes importants avec leur propre conscience culturelle. En ce sens, la
restauration du confucianisme est porteuse de sens.
Structure politique et religion
La structure politique en RPC comprend plus ou moins les quatre niveaux suivants : le Parti
communiste chinois (PCC) comme unique parti de gouvernement, le gouvernement, l’Assemblée
nationale populaire et la Conférence politique consultative du peuple chinois. On peut observer la
relation compliquée entre structure politique et religion à ces quatre niveaux.
Premièrement, les documents du PCC et la discipline du parti requièrent que ses membres soient
athées et ne croient en aucune religion. Il est cependant difficile de mettre cela en place dans la réalité.
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Théoriquement, le marxisme classique ne requérait pas cette position. Marx lui-même était chrétien au
début de sa vie. Lénine a clairement montré que le parti communiste pouvait admettre des croyants et
même des prêtres dans ses rangs. Ces croyants peuvent toujours continuer à croire tout en étant dans le
parti, à la condition qu’ils ne contreviennent pas au programme du parti. Si le parti peut admettre et
garder de tels croyants, cela signifie après tout que ses membres sont autorisés à être croyants. Dans le
monde actuel, le parti communiste de Cuba autorise ses membres à adhérer au catholicisme. Le parti
communiste au Vietnam autorise aussi ses membres à adhérer à une de leurs religions nationales
traditionnelles. Dans le passé en Chine aussi, plusieurs dirigeants religieux devinrent membres du PCC
grâce à la théorie et à la pratique du "Front Uni" (Alliance momentae dans les années 1920 puis
dans les années 1930, du Kuoomintang et du PCC. Aujourd’hui, instance qui réunit les instances de la
société civile qui ne sont pas directement le PCC. NdT). Ce secret s’est d’ailleurs vite ébruité. Dans les
régions vivent des minorités, comme celles du Tibet ou du Xinjiang, il est très difficile pour les
membres du Parti de ne pas adhérer à leur religion, parce que la religion n’est pas -bas simplement
un "opium du peuple" mais en réalité la "vie du peuple". Ce problème suscite des débats animés
aujourd’hui. De mon point de vue, les croyances politiques et les croyances religieuses devraient être
vues séparément parce qu’elles sont de types différents. On peut maintenir les deux croyances en
même temps parce qu’elles ne sont pas nécessairement en contradiction ou en opposition l’une vis-à-
vis de l’autre.
Deuxièmement, le gouvernement a la tâche directe de prendre les affaires religieuses sous son
administration. Pour cela, il existe des divisions du Bureau des Affaires religieuses à des niveaux
variés à travers l’ensemble de la Chine. De manière intéressante, l’administration politique et
religieuse est parfois combinée. De nombreux officiels gouvernementaux responsables des affaires
religieuses sont devenus finalement des responsables religieux, vice-président ou secrétaire général
d’associations religieuses par exemple. Ils sont membres du Parti et maintenant aussi croyants. Ceci
encore n’est pas un secret et est devenu assez normal. On constate ici, cependant, une contradiction
entre la théorie et la praxis de la politique religieuse.
Troisièmement, nous découvrons des représentants des religions aussi au sein de l’Assemblée
nationale du peuple. Le cas de Mgr Fu Tieshan, évêque du diocèse catholique de Pékin peut être ici
mentionné. Cet évêque a en effet exercé la fonction de vice-président de l’Assemblée nationale du
peuple, ce qui faisait de lui une personnalité d’Etat importante issue des cercles religieux. Autre
exemple, un "Bouddha vivant" est en ce moment vice-directeur du Comité pour les nationalités de
l’Assemblée nationale populaire.
Quatrièmement, nombreux sont les représentants des cercles religieux à siéger au sein de la
Conférence politique consultative du peuple chinois. On y trouve notamment les dirigeants des
différentes associations religieuses dans son Comité pour les affaires ethniques et religieuses. Le
directeur du Comité est un ancien vice-ministre pour le Travail du Front Uni dans le Parti et presque
tous les vice-directeurs sont des personnalités dirigeantes des religions chinoises. Zhao Puchu, un
bouddhiste, et Mgr Ting (Ding Guangxun), de l’Eglise protestante en Chine, étaient même vice-
président de la Conférence politique consultative. Là encore donc, les personnalités dirigeantes de
l’Etat sont issues des cercles religieux.
Dans cette structure politique, on constate donc une participation claire de la religion. De la même
manière, on retrouve aussi une participation du Parti et du gouvernement dans les organisations
religieuses. Comme le PCC maintient qu’il est un parti athée, la relation entre la religion et l’Etat en
RPC n’est ni une intégration ni une séparation. Cette relation en Chine ne peut pas être expliquée par
la théorie occidentale de la religion et de l’Etat.
Mondialisation et religions mondiales
A l’ère de la mondialisation, la Chine ne peut plus éviter l’influence étrangère qui s’exerce à
travers la religion. Il en résulte des tensions politiques entre les activités complexes des religions
mondiales et le principe de base de l’administration des affaires religieuses en Chine. Mais, dans une
société ouverte, à l’âge de l’information, il est difficile d’administrer et de contrôler les religions en
Chine sans influence extérieure. D’une part, la Chine essaye de rejeter et de critiquer une telle
influence la qualifiant "d’ingérence étrangère dans les affaires internes de la Chine" visant à mettre en
difficulté l’indépendance et l’autonomie des religions y existant. D’autre part, la Chine se doit de
participer à la communauté internationale et de s’engager dans un dialogue sur la liberté religieuse et
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