LE MAGAZINE DE LA COMMUNAU JUIVE DE TOULOUSE ET DES PAYS DE LA GARONNE
LE CASIT FAIT PEAU NEUVE : DÉCOUVREZ SES NOUVEAUX LOCAUX
LE NOUVEAU RESTAURANT UN PROJET RASSEMBLEUR ET PARTAGÉ
PESSAH : LA FÊTE QUI NOUS AIDE À TOUT REMETTRE À NEUF !
11 AU 18 AVRIL 2017
PESSAH5777
ACIT
Association Cultuelle
Israélite de Toulouse
AVRIL 2017
211
4 €
LA KANTINE
ELLE figure au premier plan
des enseignements de la Hag-
gada que nous nous
apprêtons à réciter, à chanter, àdi-
ter en cette soirée de Pessah. Elle est
plus que ja-
mais invoquée
aujourd'hui,
en France,
dans les dis-
cours des
divers candi-
dats à une
élection prési-
dentielle à
nulle autre pa-
reille, dans
une Europe
dont l'unise
fracture et
les frontières
se hérissent,
aux Etats-
Unis dont le
45e président
se veut le nou-
veau héraut d'un agressif repli sur soi,
dans la Russie d'un Poutine habie, à
l'image de son moderne tsar, par l'am-
bition d'une grandeur, d'une puissance
et... d'un empire retrous.
Mais qu'en est-il vraiment de cette li-
berté dont le nom est si souvent
galvaudé et le sens si constamment dé-
tourné ? Qu'en est-il de cette
aspiration au dépassement, à la sup-
pression, à l'abolition de tout ce qui,
dans l'humaine condition et dans l'hu-
maine politique, enchaîne,
emprisonne, asservit ?
que nous nous tournions, le
constat, identique, s'impose. Quelles
que soient les conditions qui président
à son acquisition, ici par l'intervention
directe et miraculeuse de la transcen-
dance - "main puissante et bras tendu"
par le soulèvement d'un peuple
couronnant sa révolte en volution, la
liberté n'est pas chose que l'on pos-
sède, objet immobile se prêtant à la
mise sous clef, bien intangible et ina-
liénable. Nos ancêtres, les Hébreux,
l'expérimentèrent qui ne purent en ap-
précier le juste
prix qu'au
terme d'une as-
cèse. Celle
e par une
longue errance -
une errance tou-
tefois protégée -
dans le désert.
Et ce pour un
temps à nou-
veau limité.
Limites de l'His-
toire, limites du
temps, cette
"image mobile
de l'éternité im-
mobile", limites
de l'homme.
Héritiers des
Lumières, aspirant aujourd'hui encore
et malgtout, à cet idéal inscrit au
fronton de nos édifices publics, nous
savons, citoyens désabusés de pu-
bliques faille le principe de vertu,
si cher à Montesquieu, l'inaccessibilité
structurelle de l'utopie, mais nous ne
pouvons nous empêcher de continuer
d'esrer en son incarnation - et c'est
tout à l'honneur de l'enseignement -
publicain - de vouloir la faire advenir.
Encore faut-il veiller à ne pas se laisser
circonvenir par les faux prophètes
d'une austérité non partagée ou, à l'in-
verse, par les tenants d'une
distribution généreuse nonnancée.
Ni et surtout, se faire prendre au piège
des marchands d'illusions, prêcheurs
d'un isolationnisme économiquement,
politiquement, socialement, suicidaire.
s'entameraient encore davantage
nos libertés.
AVIVmag n°208 avril 2016
3
Le billet
d’henri
amar
Liberté chérie...
Sommaire
du N° 211
PRINTEMPS 2017 - Nissan 5777
Après une longue fermeture, le restaurant de
l’EDJ rouvre enfin ses portes à une communau
qui souhaitait un lieu de convivialité. Une belle
réussite collective ! Lire page 10
Le billet d’Henri Amar 3
La page du président Yves Bounan 5
Actualité religieuse :
Pessah en pratique, les consignes 6
La communauté en action
La Kantine, un nouveau restaurant 10
Pourim fêté comme jamais 11
ACIT : vos rendez-vous 14
Les synagogues, 15
Table ronde sur le don d’organes 17
Le 19 mars à Ohr Torah 18
Radio : demandez le programme ! 19
Maurice Benlolo : portrait 20
Mémoire:
Quand le Crown Plaza cachait des Juifs 21
Un lm sur la communauté 21
Les associations : ACIT, CRIF, Club
de l’amitié, Casit, Bnai Brith, EDJ,
Hebraïca jeunesse, Chabbat teens, AUJF 22
Brèves communautaires 30
Enseignement, l’actualité 32
50 ans de culture juive à Toulouse : de la
maison communautaire à Hebraïca 34
Culture 35
Carnet communautaire 39
Aviv mag est une publication de l’ACIT
Association Cultuelle Israélite de Toulouse,
2 place Riquet, 31000 Toulouse. Tél. 05 62 73 46 46
Directeur de la publication : Yves Bounan
Directeur de la rédaction : Pierre Lasry
Rédaction et coordination : Yaël Rueff-Salama
Transcriptions : Françoise Oracz
Crédit photo : LSP, Bernard Aiach
Design, production : LSP, 11 rue Adonis, 31200
Toulouse, tél. 05 61 13 18 18, lspedito@wanadoo.fr
Régie publicitaire : Midi-Pyrénées Communication :
05 61 23 81 68 - Impression Graphitti
de commission paritaire : 0421 G 88068 Dépôt gal à parution
Ont contribué à ce numéro : Henri Amar, Julie Akouka, Jacques
Asseraf, Anny Beck, Yves Bounan, Sophie Castiel, Ines Elkaim,
Patricia Dassa, Claude Denjean, Haya Gurary, Frédéric Kélif,
Dominique Khalifa, Pierre Lasry, Maurice Lugassy, Yoseph
Ytzrak Matusof, Jean-Claude Nabet, Katia Nakache,
Micheline Pinhas, Yl Rueff-Salama, Laurent Teb, Harold
Avraham Weill
La liberté guidant le peuple (Eugène Delacroix 1830),
Le Louvre (mars 2017)
AVIVmag n°208 avril 2016
5
Avril 2015 - avril 2017, après deux
années de mandat, est-il
pertinent de faire un point
d’étape ?
Il est toujours intéressant de prendre le
temps de regarder derrière soi pour mieux
appréhender l’avenir.
Déjà, ce magazine nous y aide ! J’ai plaisir
à le feuilleter pour me plonger dans la
richesse de notre vie communautaire, suivre
au fil des articles, dont la densité et la
diversité me réjouissent, ces moments de
liesse et de rassemblement, tels que
Toubichvat et particulièrement Pourim, qui
a vu se rassembler plus de 700 personnes à
l’EDJ, venus de toutes nos synagogues,
pour faire la fête et se déguiser après la
lecture de la Meguilah.
J’y vois aussi le récit en images et en
équipe, d’un grand moment : celui de
l’ouverture tant attendue de notre
restaurant communautaire “La Kantine”,
qui connait (et je la souhaite durable) une
fréquentation déjà forte et régulière.
Ces bonnes tendances sont pour vous le
fruit du travail des derniers mois ?
Evidemment, le travail que nous menons
avec les administrateurs, et la force de
propositions que nous apportons jour après
jour au public, finissent par avoir des
résultats tangibles.
Toutes les personnes de la communauté ont
besoin de savoir qu’elles peuvent compter
sur leurs institutions, et je peux affirmer
qu’aucune n’a failli dans sa mission, qu’elle
soit cultuelle, sociale ou culturelle.
Mais je pense aussi qu’il y aussi une
dimension plus profonde. J’observe que
l’attentat à l’école Ohr Torah est maintenant
derrière nous depuis 5 ans, c’est une période
charnière que nous vivons, et si pendant
longtemps nos amis, nos familles, avaient
freiné leurs sorties et leurs occasions de
faire la fête, il me semble qu’aujourd’hui, on
assiste à un changement : le temps aidant,
les gens reprennent le chemin de la vie.
Un autre facteur m’apparait porteur et
décisif pour notre avenir, c’est le
renouvellement des responsables
communautaires : avec Franck Touboul, à
la présidence du CRIF
depuis un an maintenant,
Karine Bendayan à
l’AUJF, à qui elle a
apporté sa personnalité
chaleureuse et dynamique,
qu’on a pu apprécier lors
de la récente soirée de gala.
Je pense aussi à Alain
Azuelos, le nouveau
président du Gan Rachi qui, par son
expertise et sa projection vers l’avenir, met
en place une véritable transition numérique.
Les tendances que vous profilez pour
notre communauté sont-elles les mêmes
sur l’ensemble de la communauté
française ?
La communauté française est en crise
depuis une quinzaine d’années. Même si
certains indicateurs indiquent des éléments
de fragilité, nous nous en sortons
incontestablement mieux à Toulouse
qu’ailleurs. La raison ? C’est cette unité
indéfectible qui rassemble nos associations,
cette manière unique de se parler, de
communiquer, d’avancer ensemble sur tous
nos projets et que l’on ne retrouve pas
ailleurs.
Quelles sont vos préoccupations ou vos
inquiétudes?
Nos écoles, qui sont une préoccupation
constante, fonctionnent remarquablement
bien mais je déplore que les effectifs ne
soient pas à la hauteur de ce que je souhaite
pour Toulouse.
Ce que j’appelle de mes vœux c’est que nous
parvenions à inverser la tendance à la baisse
car une communauté sans école est une
communauté qui n’a pas d’avenir.
Quant à mes inquiétudes, elles se résument
à ce que j’ai formulé le jour
de Pourim : mon ennemi
n’est pas la finance, mais
c’est l’indifférence !
Le pire qui pourrait nous
arriver ce serait que nous
n’ayons plus le souci de
l’autre. Mais je sais que ce
n’est pas dans nos gènes, ni
dans notre communauté...
Avec tous les administrateurs, je vous
souhaite, à toutes et à tous, de passer de très
belles fêtes de Pessah.
Hag Pessah Cacher Vessameah
Yves Bounan
Président de la communau juive de Toulouse
Questions au président
La page
d’yves
bounan
LE SENTIMENT
QUE NOUS
COMMEONS
À RETROUVER
LE CHEMIN
DE LA VIE
4AVIVmag n°208
Un optimisme
à toute épreuve
LA SOIRÉE BAT SON PLEIN. Les
échanges entre les convives se font de
plus en plus intenses. Le goût de la li-
bernous envahit peu à peu. C’est pourtant à
ce moment que nous venons montrer du doigt
les herbes amères qui occupent une place de
choix sur le plateau du seder. Et on ne peut
s’emcher de se demander pour quelle raison,
ce maror, qui rappelle les moments les plus
douloureux de notre histoire, fait-il subitement
irruption au beau milieu de la
fête, relativisant quelque peu
notre statut d’êtres affranchis.
Le Rav Asher Weiss y voit un
message subliminal. Il ne s’agit
en aucun cas de gâcher la te.
Bien au contraire. Les herbes
amères, associées à la matsa et
au vin, viennent ancrer en
nous l’idée que même ce que nous percevons
comme un mal ne peut s’inscrire que dans le
bien.
A l’instar de Rabbi Akiva, optimiste parmi les
optimistes, qui avait une propension tout à fait
extraordinaire à transformer sa lecture des
évènements.
Prendre du recul par rapport aux situations
auxquelles nous sommes confrontées an de
les inscrire dans un projet éternel et de leur
donner plus de sens.
C’est également de cette manière que le Rabbi
de Tsantz interprétait l’obligation de mettre sa
main devant les yeux lorsque nous récitons le
Chéma.
L’acceptation du joug divin se fait en mention-
nant les deux noms de Dieu « Hashem
Elokeinou », qui nous renvoient aux dimen-
sions de la miséricorde et à celle de la rigueur.
Le fait de terminer la profession de foi par
« Hashem E’had » nous invite à connecter ces
deux dimensions. Elles sont les deux faces
d’une même pièce. La rigueur fonctionne tou-
jours de concert avec la miséricorde. Et c’est
parce que nos yeux ont parfois beaucoup de
mal à percevoir cette manstude que nous les
couvrons de notre main et professons avec
conviction : « l’Eternel notre Dieu est Un ». Il
ne s’agit pas de se voiler la face mais bien au
contraire, de voir plus loin, notre champ de vi-
sion étant naturellement
limité.
Le Seder joue donc pleine-
ment son rôle en nous
délivrant la recette du bon-
heur.
On se demande souvent s’il
n’est pas quelque peu hypo-
crite de célébrer notre liberté
alors que nous ressentons plus que jamais les
affres de l’exil.
Ne nous berçons pas d’illusions, nous aurons
encore beaucoup d’épreuves à affronter
jusqu’à la venue du Mashia’h, symbole de la
délivrance ultime, que nous espérons immi-
nente. Mais savoir transformer les épreuves,
les décrypter avec optimisme et conance, est
déjà en soi une certaine forme de liberté.
Notre destin ne dépend pas des hommes. Il -
pend de Dieu et de notre faculté à en être
pleinement convaincu.
L’histoire a un sens. Elle a un but. Nous en
sommes les acteurs. Nous pouvons égale-
ment en être les catalyseurs !
Pessah Casher Vesameah
Avraham Weill, rabbin de Toulouse
Judaïsme
AVIVmag n°208 avril 2016
7
SAVOIR
TRANSFORMER LES
ÉPREUVES EST
DÉJÀ EN SOI UNE
CERTAINE FORME
DE LIBER
Existe-t-il une
ambiance semblable à
celle de Pessah ?
Le seder représente
sans aucun doute la
quintessence du
calendrier juif. Trois,
voire quatre ou cinq
générations réunies
autour de la même
table pour partager
bien plus qu’un repas :
une histoire et une
identité communes.
Seder de Pessah
Crédit : commons.wikimedia
6AVIVmag n°208
Chabbat
Tsav-Hagadol
Vendredi 7 avril 2017
Allumage des bougies :
entre 19h06 et 20h00
Minha suivi de Kabbalat
chabbat: 19h30
Adath Yéchouroun : 20h00
Samedi 8 avril 2017
Chahrit : 8h30
Adath Yéchouroun : 10h00
Cours de Chabbat Haga-
dol:19h00
Minha : 19h45
Arvit et n de Chabbat :
21h13
Vente du Hamets
Vendredi 7 avril 2017
Vous pouvez vous procurer
le pouvoir de vente du Ha-
mets à l'ACIT, ou dans les
défférents lieux communau-
taires (commerces cachers,
écoles, synagogues …), le té-
lécharger sur le site internet
www.edjt.org ou sur
www.acit31.com ; et le re-
tourner, après lavoir com-
plété, daté et signé, à : ACIT,
2 place Riquet 31000 Tou-
louse,
ou par fax au 05 62 73 46 47
ou par email à l'adresse
au plus tard avant vendredi 7
avril 2017 à 12h00, heure de
fermeture des bureaux de
l'ACIT
Bedikat Hamets
(recherche du Hamets) :
Dimanche 9 avril 2017
Recherche du hamets à la tom-
bée de la nuit, après 21h05
Veille De Pessah
Vendredi 10 avril 2017
(jeûne des premiers nés –
Siyoum) Chahrit : 6h45
Interdiction de consommer le
'hamets : 10h56
Biour 'hamets (bler le 'ha-
mets) / Elimination du 'ha-
mets : avant 12h12
1er SOIR DE PESSAH :
1er soir du Séder
Allumage des bougies : entre
19h09 et 20h00
Minha suivi dArvit : 19h30
Adath Yéchouroun : 20h00
but du der : après 21h07
1er jour de Pessah
(1er soir du omer)
Mardi 11 avril 2017:
Chahrit (Tikoun Hatal) 8h30
Adath Yéchouroun 10h00
2e SOIR DE PESSAH
2e soir du Séder
Minha : 20h00 suivi d’Arvit
(suputation du Omer)
Adath Yéchouroun : 21h30
Allumage des bougies :
après 21h07
Début du Séder : après 21h07
2ejour de Pessah
(2esoir du omer)
Mercredi 12 avril 2017
Chahrit : 8h30
Minha : 20h00
Arvit et n des 1es fêtes : 21h15
Hol hamoed
(demi-fête) (pas de
mise de téphilines)
Du jeudi 13 avril au
dimanche 16 avril 2017
Chahrit : jeudi : 6h45
vendredi : 7h00
dimanche : 7h30
Adath Yéchouroun au Gan
Rachi :7h30
Minha suivi d’Arvit : 18h45
Adath Yéchouroun (Alsace
Lorraine) : 20h15
Chabbat Hol
hamoed Pessah
Vendredi 14 avril 2017
Allumage des bougies : entre
19h12 et 20h00
Minha suivi dArvit : 19h30
Adath Yéchouroun : 20h00
Samedi 15 avril 2017
Chahrit : 8h30
Adath Yéchouroun : 10h00
Minha : 20h00
Arvit et n de chabbat:
21h23
Veille des
dernières fêtes
Dimanche 16 avril
2017
Allumage des bougies : entre
19h14 et 20h00
Minha suivi de lentrée de la
fête : 19h30
Adath Yéchouroun : 20h00
7ejour de Pessah
Lundi 17 avril 2017
Chahrit : 8h30
Adath Yéchouroun : 10h00
Allumage des bougies : après
21h16
Minha suivi d’Arvit de la
fête : 19h30
Adath Yéchouroun : 20h00
8ejour de Pessah
Mardi 18 avril 2017
Chahrit : 8h30
Adath Yéchouroun : 10h00
(YIZKOR)
Minha : 20h15
Adath Yéchouroun : Minha
et Séoudat Machia’h à 18h30
Arvit et n des fêtes : 21h27
Mimouna :
interdiction de faire
entrer le hamets le
mardi 18 avril avant
21h27
Il est bon dattendre au
moins 15 minutes, an
de laisser le temps au
rabbin de racheter le
hamets.
Chabbat
Chémini
Vendredi 21 avril 2017
Allumage des bougies : entre
19h19 et 20h15
Minha suivi de lentrée de
Chabbat : 19h30
Adath Yéchouroun : 20h00
Samedi 22 avril 2017
Chahrit : 8h30
Adath Yéchouroun : 10h00
Cours : 19h15
Adath Yéchouroun : 19h00
(Siha sur paracha par Rav
G. Sebag suivi de Pirké Avot
par Rav Y. Y. Matusof)
Minha : 20h00
Fin de Chabbat : 21h32
Pessah mode d’emploi
Judaïsme
pratique
Ne nous y trompons pas! Le rituel du Seder auquel nous assigne annuellement la
Tradition n’est pas simplement la répétition folklorique de la sortie d’Egypte. Il traduit
également l’affirmation de notre engagement à saisir une dimension inédite du temps.
ÀÉCOUTER LA PENSÉE
DOMINANTE, l’histoire se
répète et ressert les plats. Le
temps ne serait que recommence-
ment, éternel et cyclique, sanctionné,
pour l’individu, par sa fin inélucta-
ble.
Le judaïsme ne l’entend pas de cette
oreille. Il récuse avec force cette
approche d’une existence à l’issue
tragique. Résolument, il propose une
nouvelle lecture de la vie. La chrono-
logie des jours serait progression
pour aboutir à des temps meilleurs.
Demain doit être mieux vécu qu’au-
jourd’hui, par l’exigence du Bien
auquel nous devons nous astreindre
dans notre quotidien.
Le couplet de la Sortie d’Egypte,
servi à l’envi par le Texte biblique, en
recèle les fondements. En même
temps qu’il s’affranchissait de la ser-
vitude, le peuple juif intégrait ce
concept du temps et s’engageait sur
un chemin balisé par les préceptes
moraux et les lois religieuses qu’il a
fait siennes. Puis, sa liberté recou-
vrée, il va prendre son destin en
main ; avec l’aide du Ciel que la
Révélation et le don de la Torah vont
sceller trois mois plus tard. Voie
sinueuse et semée d’embûches qui le
mènera à la Terre Promise. Cepen-
dant cet établissement ne sonnera
pas la fin du parcours et le mouve-
ment s’inscrira désormais dans le
temps. Il s’agit alors de parvenir col-
lectivement, dans une quête sans fin,
à l’édification d’une société de justice
et d’entraide ; en somme la réalisa-
tion d’un idéal éthique.
Telle est la vocation d’Israël entamée
dès sa sortie d’Egypte. Les exils suc-
cessifs qui ont jalonné son histoire
seraient, par les épreuves qu’elles
imposèrent, le tribut à payer pour
s’armer en vue de cette mission labo-
rieuse.
La renaissance, aujourd’hui, d’Israël-
nation, étape pénultième de cette
trajectoire s’inscrirait dans cette
perspective. Ce pays offre le cadre
pourra se déployer dans toute sa
plénitude et son authenticité l’iden-
tité juive. Miracle pour les uns ou
libération nationale pour les autres,
quand ce n’est pas hérésie pour les
ultra-orthodoxes, l’émergence de ce
pays apparait comme un fait histo-
rique considérable du XXème siècle.
Un pays de juif pour les juifs. Un
rêve enfin réalisé.
A-t-on suffisamment pris, au sein du
peuple juif, la mesure de cet événe-
ment à nul autre pareil ? A-t-on pris
conscience que l’identité et la digni
de chacun d’entre nous se sont enri-
chies d’une dimension nouvelle ?
Que les perspectives étriquées et
dramatiques offertes hier à nos pères
se sont muées en une vision claire et
réconfortante d’un havre accueillant
pour tout juif ? Certains, de bonne
foi, objecteront, que la vie en dias-
pora a toujours accompagné notre
peuple dans son histoire et que celle-
ci serait même inhérente à la
condition juive ! C’est figer notre
destin collectif dans un passé obso-
lète et faire fi de sa capacité à
évoluer.
Et puis l’antisémitisme est toujours
là, prêt à montrer son visage hideux.
Comme ces mauvaises herbes impos-
sibles à éradiquer du terreau qui les
abrite, il continuera à sévir au gré de
l’actualité.
L’existence d’Israël-Etat qui allait,
pensait-on, mettre un terme à cette
hostilité ancestrale n’a fait que dévier
la trajectoire de l’antisémitisme vers
ce petit pays devenu, au fil des ans, le
juif des nations. Sans s’en accommo-
der, il faut en faire l’amer constat.
Quand ce n’est pas de notre sort de
citoyen juif qu’il se nourrit, l’antisé-
mitisme jettera son dévolu sur Israël
toujours en butte à l’inimitié de ses
voisins.
L’intranquillité continue donc de
nous poursuivre. Constitutive sem-
ble-t-il, de notre identité. Jusqu’à
l’avènement d’une ère nouvelle dont
la sortie d’Egypte fut annonciatrice.
Jacques ASSERAF
CYKYpdj qê319 dyulo 3127
:
JUDAÏSME
Par Jacques Asseraf
Le départ d’une Odyssée
Passage de la Mer rouge. Fresque de la Catacombe de Via Latina a Rome. 4e siècle.
LE PREMIER “Grand Chabat “
du peuple d’Israël fut celui qui
précéda la sortie d’Egypte.
Cette année-là, la néoménie de Nissan
tomba un jeudi, et le chabbat avant
Pessah ce fut le 10 Nissan. Or ce 10
Nissan, nos ancêtres devaient choisir,
dans chaque famille, un agneau destiné
à être sacrifié le 14 du même mois,
dans l’après-midi (Exode 12,3). Ce fut
la première mitsva confiée à chaque
chef de famille en Israël. Et ce chabbat
fut en effet un jour inoubliable : dans
chaque foyer, on amena un agneau que
l’on prit soin d’attacher au pied du lit.
Les voisins égyptiens, étonnés,
demandèrent alors : que signifient ces
préparatifs ? A quoi le Juif répondit :
d’ici 4 jours, sur l’ordre de notre Dieu,
nous devons immoler cette brebis. Mais
les Egyptiens n’osèrent pas protester
contre ce qu’ils devaient considérer
comme un acte sacrilège ! Ce fut donc
en riun grand chabat, pparant
des lendemains plus grandioses
encore !
En effet, un grand miracle eut lieu ce
jour. Voyant leurs voisins juifs choisir
solennellement un agneau par famille,
les premiers-nés Egyptiens
demandèrent aux Juifs la raison de ces
préparatifs : ceux-ci leur répondirent :
c’est un sacrifice pascal pour l’Eternel,
qui fera mourir vos premiers-nés d’ici
quelques jours ! Aussitôt les premiers-
nés se précipitèrent chez Pharaon afin
de le supplier de laisser partir les Juifs
immédiatement ! Pharaon et ses
serviteurs ayant refusé, les premiers-
nés se battirent contre leurs propres
frères, et firent de nombreuses
victimes. C’est ainsi qu’on peut
comprendre le verset du psaume 136 :
celui qui frappa les Egyptiens par leurs
premiers-nés !
Avant même notre Délivrance, le
grand miracle est que le Mal se
transforme, contribue au Bien et
prépare la Libération.
La libération de l’Egypte =
« Mitsraïm » est non seulement une
libération de l’esclavage physique,
mais également une libération de la
culture et du mode de pensée
égyptienne, divinisation de la Nature,
du Nil, de l’Agneau (Bélier = mois du
printemps)…
Après 210 ans d’Esclavage et
d’Intégration, d’Assimilation à la
culture et de Divinité environnante,
Dieu délivre le peuple d’Israël avec
l’ordre et la condition préalable du
sacrifice de l’Agneau, au mois du
printemps afin d’exprimer la
suprématie du pouvoir surnaturel de
Dieu transcendant la nature.
En effet, nous disons dans la
Haggadah : « à chaque génération et
chaque jour, nous devons nous considérer être
sortis de mitsraïm ».
Avec l’élimination du HAMETZ
(= Vanité, Orgueil, Egocentrisme…),
en consommant la MATSA (=
Humilité, Abnégation, Modestie…)
nous pouvons et nous devons avancer
dans la trajectoire de notre liberté
individuelle et collective. C’est le sens
de « Sefirat Haomer » c’est-à-dire le
compte des jours de Pessah à
Chavouot, fête du don de la Torah.
« N’est vraiment libre que celui qui
s’occupe de la Torah » dit le Pirkei
Avot.
Ceci nous mènera à la liberté ultime, la
Venue Imminente de Machia’h.
« Afin que tu te rappelles du jour de Ta
Sortie d’Egypte TOUS les jours de ta
vie. »
« Tous » introduit les temps
messianiques (Haggadah).
Autour de la table du Seder, en famille
ou en communauté, célébrons Pessah
avec joie et réflexion (Ari-zal), afin
d’atteindre notre liberté ultime.
Lechana habaa Birouchalaim.
Pessa’h Cacher Vessamea’h
Rav YY Matusof
Chabbat hagadol, le grand !
Prémice de liberté
8AVIVmag n°208
Judaïsme
Par Yossef Matusof
Célébration pascale. Lubok (estampe populaire russe
gravée sur bois), XIXe siècle
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