NOUVELLES BRÈVES n°22 – ANNÉE 2011 Le coup d’œil d’O.G.E. : le Muscardin, hôte discret et remarquable de nos boisements VEILLE ÉCOLOGIQUE Guide des milieux naturels de Suisse La lettre Née dans les années 1990, l’idée de concevoir un outil permettant de caractériser les principaux milieux suisses s’est finalement concrétisée en 1998 par la publication du « Guide des milieux naturels de Suisse » de Delarze & al. Devenu la référence suisse pour l’étude, la compréhension et la description des habitats naturels ou liés à l’homme, cet ouvrage a entièrement été revu et corrigé, dans une version publiée en 2008. Photo : Benoît Toury LE POINT SUR ... l’autorité environnementale Les législations européennes et nationales prévoient que les évaluations d’impacts environnementaux des grandes opérations soient soumises à l’avis, rendu public, d’une « autorité compétente en matière d’environnement » appelée l’autorité environnementale (AE). Le rôle de l’AE est de donner un avis argumenté sur chaque volet de l’évaluation environnementale du pétitionnaire et le rendre public (dossier d’enquête publique ou autre forme de consultation du public et internet) à un stade permettant de faire évoluer le projet (en pratique : avant enquête publique). Le décret n°2009-496 du 30 avril 2009 précise le rôle de l’AE et insère un nouvel article (R. 122-1-1) dans le code de l’environnement qui soumet à l’avis de l’AE tout projet soumis à étude d’impact et désigne l’AE compétente sur la base de deux principes : L’avis de l’AE est rendu dans un délai de 2 mois (pour l’AE préfet de région/ DREAL) ou de 3 mois (pour l’AE du CGEDD). Au-delà de ce délai, l’avis est réputé favorable. • éviter les conflits d’intérêts ; • désigner l’autorité au même niveau central / local que le niveau de décision du projet. L’AE peut être le ministre chargé de l’environnement (MEEDDM), ou localement pour son compte les préfets, pour les projets ou programmes hors champ de décision du MEEDDM. Lorsque l’opération entre dans le champ de décision du MEEDDM, la fonction d’autorité environnementale ne peut être directement dépendante de lui : c’est ce qui a conduit à instituer une structure spécifique au sein du CGEDD pour avoir une garantie d’impartialité - l’AE du CGEDD. Cet avis porte sur la qualité de l’étude d’impact (conformité et qualité, proportionnalité, contexte du projet et justification) et de l’étude de danger pour les ICPE, et la manière dont l’environnement est pris en compte dans le projet. Les conséquences attendues du caractère public de l’avis de l’AE sont une meilleure prise en compte de l’environnement par les maîtres d’ouvrages, une exigence de qualité supérieure des études d’impact et un poids plus fort de l’environnement dans la décision d’autorisation du projet . Les unités typologiques décrites correspondent à des groupements végétaux au niveau de l’alliance du système phytosociologique classique. L’originalité de cet ouvrage réside dans sa prise en compte de l’habitat naturel dans son ensemble et non sous le seul angle phytosociologique. En effet, pour chaque milieu, une liste d’espèces réunies par groupes systématiques (incluant la faune) est donnée correspondant aux espèces caractéristiques au sens des phytosociologues et aux espèces typiques ou fréquentes. Ceci est complété par des informations concernant l’identification et l’écologie, les relations avec l'homme, les exigences et menaces, la phytosociologie, les valeurs biologiques ou encore le statut et la répartition (actuelle et potentielle) en Suisse. En bref, il s’agit d’une mine d’informations destinée aux professionnels comme aux amateurs, botanistes ou faunistes, soucieux de mieux connaître les milieux qu’ils rencontrent. Claude Laury A quand, le guide des milieux naturels de France ? CGEDD : Conseil général de l’environnement et du développement durable Florian Schaller AGENDA : Référence : R. DELARZE & Y. GON2008. Guides des milieux naturels de Suisse. 2ème édition revue et corrigée. Ed. Rossolis. 424 p. SETH, O.G.E. est partenaire de l’exposition « Entre ciel, terre et mer ou le mythe revisité » de l’artiste aborigène Dennis Nona qui se tiendra du 27 janvier au 20 mai 2011 à l’ambassade d’Australie à Paris. de l'Office de Génie Écologique ÉDITO Concevoir et Appliquer... Bonjour, Nous vous présentons dans ce numéro un exemple d’assistance à maître d’ouvrage pour la gestion d’une Réserve Naturelle Régionale. Sur cette réserve nous faisons évoluer le plan de gestion en fonction des conditions rencontrées sur le terrain. Nous devons être très pratique de façon à ce que les actions de gestion soient applicables et que la nature en soit la bénéficiaire. En effet si les mesures restent à l'état de schéma de principe, comment communiquer avec les entreprises ou le personnel de la réserve ? Comment expliquer au conducteur de la pelle la façon d’obtenir le bon profil pour la mare? Pour cela il faut rester proche du terrain, employer un langage que comprennent les différents corps de métier, on ne communique pas de la même façon avec un géomètre, un débardeur, ou bien un scientifique. Il en est de même pour les mesures de réduction d’impact comme dans le cas du ballon d’Alsace que nous vous présentons, ainsi que pour tous les projets d’infrastructure de transport. Pour concevoir un plan de gestion ou concevoir des mesures de réduction d’impact, il faut impérativement que le diagnostic faune, flore, et milieu naturel soit de très bonne qualité, et que tous les groupes taxonomiques soient étudiés, qui plus est, à la bonne période. Par exemple il faut impérativement étudier les Chauves souris pour identifier leur couloir de vol, ainsi nous nous entourons de spécialistes reconnus. Une de ces collaborations est celle que nous avons avec Eric Bas et son équipe du CPIE des Pays de l’Oise pour les Chiroptères. Ainsi nous essayons de nouer des partenariats sur le long terme. Enfin en cette période de fête je vous invite à découvrir la recette de la confiture de Cynorrhodon et à la mettre en pratique. Bonne dégustation ! Je vous souhaite une Bonne Lecture ! Jean François Asmodé La lettre d'O.G.E. Ce document est réalisé par la société O.G.E. à destination de ses partenaires professionnels exclusivement. O.G.E. – 5, boulevard de Créteil – F-94100 Saint-Maur-des-Fossés – Tél. 01 42 83 21 21 – Fax 01 42 83 92 13 – mél : [email protected] Directeur de la publication : J.-F. Asmodé – Rédaction : J.-F. Asmodé, V. Vignon, C. Laury, F. Schaller, P. Thévenin, O. Labbaye & B. Toury © O.G.E., 2010 Textes et photos : tous droits de reproduction intégrale ou partielle réservés. BALLON D’ALSACE : EXEMPLE D’AMÉNAGEMENT D’UN SITE À FORT ENJEU PAYSAGER ET ÉCOLOGIQUE Le Syndicat Mixte Interdépartemental du Ballon d’Alsace (SMIBA) a confié à O.G.E. et au cabinet de paysagistes Complémenterre la réalisation des études réglementaires pour le programme de réaménagement touristique été-hiver du Ballon d’Alsace. Ce programme d’aménagement comprend deux volets complémentaires et indissociables : l’aménagement du sommet et du col du Ballon tant en été qu’en hiver et la restructuration et la modernisation du domaine de ski alpin. Du point de vue des paysages et de l’histoire, le Ballon d’Alsace représente un site emblématique, d’où son classement en 1982. Composé de chaumes et de hêtraies remarquables, sa faune et sa flore caractéristiques de l’étage montagnard lui ont valu d’intégrer le réseau Natura 2000 et la création de la réserve naturelle des Ballons Comtois. Les enjeux du projet reposent sur l’équilibre entre fréquentation touristique de masse et préservation de la beauté et de la richesse naturelle du site. Ceci s’est traduit dans l’élaboration du programme définitif qui a limité au maximum la destruction d’habitats naturels. Des mesures ont été prises pour atténuer les impacts : évitement et balisage des stations de plantes protégées, capture d’espèces protégées avant les travaux. Pour limiter et compenser la destruction d’habitat naturel ; 4,5 ha de pelouses montagnardes (un habitat rare sur le site) ont été reconstitués en utilisant la technique du décapage - replacage du sol. Les travaux de terrassement des pistes de ski alpin ont eu lieu en été 2009. Les autres travaux (parkings, bâtiments d’accueil du public, domaine nordique) se sont déroulés pendant l’été 2010 pour être prêts à accueillir le public dès l’arrivée des premières neiges. Claude Laury SOMMAIRE Page 2 LES DOSSIERS D’O.G.E. Page 3 ENTRETIEN AVEC ... Éric BAS, spécialiste des chauves-souris INITIATIVE : Cynorrhodon, de la baie sauvage à sa transformation Page 4 LE POINT SUR… L’autorité environnementale VEILLE ECOLOGIQUE Guide des milieux naturels de Suisse LES DOSSIERS PARLONS EN... RÉSERVE NATURELLE RÉGIONALE (RNR) DU MARAIS DE LARCHANT (77) : ENTRETIEN AVEC : Éric BAS, spécialiste des chauves-souris Assistance à la gestion et participation aux suivis écologiques Depuis 2006, O.G.E. assiste l’Association de la réserve naturelle du marais de Larchant (ARNML), le gestionnaire de la RNR ainsi que la société SOMALA, propriétaire du marais de Larchant. Suite à la réalisation du plan de gestion en 2007 (voir Lettre N°19), notre mission depuis lors est d’effectuer une assistance à maîtrise d’ouvrage pour la mise en place du plan de gestion, ainsi qu’une partie du suivi de la faune et de la flore du marais. La baisse du niveau des eaux permet de faire d’autres actions comme la mise en pâturage extensif de 32 hectares du marais avec des juments de race camarguaise, et des bœufs de race écossaise High Land, de façon à lutter contre la fermeture du marais par la pousse des saules, qui reprennent leur croissance lorsque le niveau est bas. Une variation du niveau d’eau unique en Île-de-France Le Marais de Larchant est unique par la nature de ses niveaux d’eau. En effet, le marais est une véritable fenêtre sur une nappe phréatique profonde, sans doute celle de Beauce. De ce fait, le niveau est haut pendant quelques années (7 ans pour la dernière montée des eaux) puis il baisse en deux ou trois ans et reste bas pendant quelques années, avant de remonter. Une des premières actions a été relever le niveau d’eau du marais de façon hebdomadaire à plusieurs endroits. Ainsi en 2008, sur un des points la cote 64,60 a été atteinte, puis le niveau a baissé pour atteindre un niveau assez bas en 2010 (à la cote 63,30) découvrant une grande partie du marais. Actuellement 32 ha du marais sont pâturés de façon extensive, ici une jument de race Camarguaise Ces variations de niveau d’eau ont aussi un impact sur la faune et la flore du marais. Ainsi, en 2009 lors de la baisse du niveau d’eau, il y a eu une explosion des populations de deux libellules protégées : la Leucorrhine à large queue (Leucorrhinia caudalis) et la Leucorrhine à gros thorax (Leucorrhinia pectoralis) ; le niveau beaucoup plus bas de la saison 2010 n’a pas permis de retrouver ces espèces. longeant le marais, opération réalisée par la commune de Larchant et le parc naturel régional (PNR) du Gâtinais, et sera fonctionnel pour la saison de reproduction 2011. L’éducation à la conservation des milieux naturels Un sentier d’interprétation ainsi qu’une « cabane de la réserve » ont été réalisés de façon à pouvoir accueillir les scolaires. En effet, l’éducation à l’environnement et à la conservation du milieu naturel est une des priorités de la RNR. Un partenariat avec le PNR du Gâtinais devrait permettre d’accueillir beaucoup plus de classes dans un avenir proche. L’accueil du public se fait sur rendezvous et en petits groupes de façon à déranger le moins possible les espèces qui fréquentent le marais. La tranquillité du site permet aux espèces d’oiseaux comme le Busard des roseaux (Circus aeruginosus) ou le Blongios nain (Ixobrychus minutus) d’y nicher. La lettre : Pourquoi l’intérêt porté aux chauves-souris est-il croissant ? La lettre : Nous travaillons ensemble sur plusieurs projets. En quoi consiste cette collaboration ? Dans les années 1980, les naturalistes se sont rendu compte de l’effroyable déclin de la plupart des espèces en Europe. L’utilisation massive de pesticides et de certains produits de traitement des charpentes, la destruction des haies et des habitats ont eu un impact considérable sur les populations de chauvessouris. On a commencé à mieux les connaître en même temps qu’on constatait leur déclin. Certaines espèces menacées de disparition à l’échelle de l’Europe ont été inscrites dans diverses directives européennes visant à les protéger. Je réalise les inventaires de terrain des chauves-souris à l’aide d’un détecteur d’ultrasons pour divers projets d’infrastructures notamment. Il s’agit aussi de cartographier les données : la présence des espèces, les axes de déplacements, les zones de nourrissage, les gîtes potentiels, les sites d’essaimage, etc. puis d’interpréter ces informations de manière à ce que les impacts soient limités et que des mesures compensatoires puissent être mises en place. Nous travaillons donc au quotidien en étroite collaboration avec les ingénieurs de l’O.G.E.. La disparition des chauves-souris traduisait bien la dégradation générale de l’environnement et la pollution. Il s’agit de prédateurs, insectivores, situés en haut des réseaux trophiques, donc particulièrement sensibles à ces paramètres. La lettre : Comment en êtes-vous venu à étudier les chauves-souris ? J’ai commencé à étudier les chauves souris il y a 25 ans en Picardie et en région Centre avec des amis mammalogistes. Nous avions en projet la réalisation d’un atlas des mammifères sauvages de l’Oise. Il n’y avait que très peu de données sur les chiroptères de Picardie à cette époque et nous allions de découverte en découverte. Nous utilisions aussi l’un des premiers détecteurs hétérodynes du marché. Aujourd’hui les chiroptères m’intéressent comme indicateur de biodiversité. Certaines espèces sont liées aux vieux peuplements forestiers et sont indicatrices du degré de naturalité de la forêt. Nous pouvons démontrer aujourd’hui qu’en forêt, le bois mort qui est une lacune des forêts gérées, semble influer sur la richesse spécifique en chiroptères… INITIATIVES : CYNORRHODON, de la baie sauvage à sa transformation Pour se faire, armez vous de patience et de gants pour la cueillette. Les fruits sont ainsi récoltés après les premières gelées puis mis à cuire à feux doux dans une bassine en cuivre avec un tiers de leur volume en pommes coupées en morceaux. Cela cuira 1/2 heure et le tout sera passé au moulin à légumes une ou deux fois. La pulpe ainsi obtenue est ensuite tamisée pour éliminer les derniers poils. Enfin, le peu de jus restant est cuit avec 750 g de sucre par kilo jusqu’à ce que la confiture prenne (cuisson rapide), puis mis en pot. Il est temps pour nous, écologues de terrain, de retrouver la chaleur du bureau et les ordinateurs devenus nos nouveaux bourreaux, c’est l’hiver ! Des opérations de génie écologique Un aspect de la colonisation des vases avec nombreuses rosettes de Laîches faux souchet © O.G.E. - A. Beigenger Ces variations de niveau d’eau permettent de faire certaines opérations lorsque le niveau est haut. Comme par exemple faire flotter les fûts des peupliers dans les canaux pour pouvoir les sortir du marais sans abîmer les berges, comme cela a été les cas en 2007. Une opération de réhabilitation de la végétation de la dune fossile du Chalumeau, située en bordure du marais, a été entreprise. Le but de cette opération est de reconstituer une pelouse à Canche blanchâtre (Corynephorus canescens). Les travaux ont eu lieu en 2008. Le premier résultat a été la réapparition en 2009 de la Spargoute printanière (Spergula morisonii), espèce très rare, qui n’avait pas été observée depuis le XIXème siècle sur le marais de Larchant. En 2010, la pelouse à Canche blanchâtre est en progression. Un crapauduc pour les amphibiens qui se reproduisent dans le marais est actuellement en construction sur la route Il est donc plus que nécessaire aujourd’hui de mettre tout en œuvre pour non seulement les protéger, mais aussi protéger leurs habitats. C’est là que notre collaboration avec l’O.G.E. prend tout son sens. Chasse aux insectes – école de Larchant, juin 2009 © ARNML Des réunions régulières avec les bailleurs de fonds de la RNR (la Région Îlede-France, Natura 2000, l’Agence de l’Eau Seine Normandie) ont lieu afin de leur présenter le bilan des activités de la Réserve. Parmi les projets de 2011 figure la création d’un observatoire du marais en collaboration avec les Universités ParisSud et Paris Descartes de façon à compiler toutes les données connues sur le marais. Le but de cet observatoire est d’aider le gestionnaire dans sa prise de décision. Jean-François Asmodé Lorsqu’il nous arrive de fuir nos rapports pour nous retrouver dehors, l’églantier (Rosa canina et autres Rosa sp.), nous apportent un soutien inestimable pour affronter la rigueur du climat. En effet, ramollis par les gelées, les cynorrhodons ou faux-fruits de l’églantier, sont consommables et surtout fort appréciables avec leur goût fruité, acidulé et fortement vitaminé (plus de vitamine C que dans les agrumes). La dégustation « in situ » se fait alors en pressant délicatement le fruit entre deux doigts, ceci suffisant à faire sortir la pulpe fraîche et stimulante sans les poils et graines du centre (à réserver aux farceurs), à la manière d’un tube de dentifrice. Ce fruit n’est bien entendu pas seulement connu des écologues de terrain, il est traditionnellement utilisé pour ses propriétés médicinales et ses qualités culinaires dans de nombreuses contrées. Sa dégustation quotidienne vous préservera des grippes porcine, aviaire, espagnole ou asiatique en renforçant vos défenses naturelles ! Bonne dégustation ! En Alsace par exemple, la pulpe est utilisée pour faire une délicieuse confiture ou « buttemüss » en alsacien, permettant de faire le stock de vitamine C. Florian Schaller