Pressions existantes - Les milieux naturels de la Martinique sont fortement dégradés. Aux
catastrophes naturelles récurrentes dans cette collectivité, telles que le volcanisme intense et les
cyclones répétés, s’est ajoutée une pression humaine importante sur les habitats naturels. Le
tourisme et la démographie croissante sont à l’origine de la destruction directe de nombreux habitats
au cours des 20 dernières années. Plusieurs mangroves, véritables nurseries pour de nombreuses
espèces de poissons, ont été massivement remblayées. Ces zones sont également affectées par la
pollution due aux activités terrestres. Sur l’étang des Salines, on constate des concentrations
préoccupantes de certains métaux lourds dans les sédiments. La baie de Fort-de-France, très polluée,
fait l’objet d’un programme de réhabilitation. Certaines ressources marines comme les langoustes, les
oursins blancs (Tripneustes esculentus) et les lambis (Strombus gigas) sont surexploitées, et le
braconnage des tortues marines reste élevé.
Impact du changement climatique sur les écosystèmes terrestres - L’augmentation potentielle de
la fréquence des cyclones et l’élévation du niveau de la mer auront un impact sur les grandes surfaces
de mangroves encore intactes de Martinique. Cependant, il n’existe pas de données scientifiques
précises sur la vulnérabilité de ces écosystèmes en Martinique. Les variations de température
attendues pourraient également affecter les dernières forêts d’altitude préservées des massifs
martiniquais (cf. encadré 2.3).
Encadré 2.3 : Les forêts d’altitude de Martinique menacée
Les forêts d’altitude sont souvent les milieux insulaires les mieux préservés car ils sont relativement
inaccessibles, et donc moins perturbés par les activités humaines et les espèces envahissantes que
les écosystèmes du littoral. Une équipe de l’Université Antilles-Guyane a exploré les modifications
possibles dues au changement climatique sur les forêts d’altitude des petites Antilles. En Martinique,
comme dans toutes les « îles montagnes » des Antilles, la multiplicité des biotopes offre un véritable
laboratoire pour l’étude de la dynamique végétale. Les conditions climatiques de ces îles sont très
différentes d’un versant montagneux à l’autre, se découpant en de multiples « micro-régions
bioclimatiques » en fonction de l’orientation et de l’altitude. La fréquence et l’abondance des
précipitations sont les principaux facteurs qui différencient un bioclimat d’un autre. La répartition
géographique des espèces ainsi que la dynamique spatiale et temporelle des étages végétaux sont
essentiellement conditionnées par le régime des pluies. En Martinique, du littoral aux sommets, on
retrouve un gradient bioclimatique s’échelonnant du bioclimat sec à un bioclimat hyper-humide (cf.
graphique). De cet étagement bioclimatique, dépend un étagement végétal qui s’échelonne de la forêt
sempervirente aux forêts ombrophiles montagnardes. Le changement climatique entraînera
probablement des saisons sèches plus longues et une diminution progressive des précipitations en
zone de montagne. S’ensuivraient alors une migration du bioclimat sec en altitude et une disparition
progressive des bioclimats humides de montagne. Ces milieux naturels pourraient tendre vers une
xéricité (adaptation à la sécheresse) des écosystèmes forestiers avec une migration de la forêt
sempervirente en altitude et une disparition des forêts ombrophiles montagnardes (Joseph 2006). La
migration altitudinale des espèces et la perturbation des équilibres existants risque d’offrir des
conditions de développement favorables aux espèces exotiques opportunistes envahissantes, qui
finiraient par appauvrir et banaliser ces milieux et paysages jusqu'alors préservés.
Impact du changement climatique sur les écosystèmes marins - En 2005, l’Observatoire du Milieu
Marin Martiniquais (OMMM) a constaté un blanchissement massif de l’ensemble des récifs coralliens
de la Martinique. Le pourcentage de coraux blanchis était de 70 % en moyenne. La mortalité relative à
cet épisode de blanchissement a été estimée à 13 % en 2006 (OMMM 2005). Dans le cadre de
l’IFRECOR (Initiative française pour les récifs coralliens), un suivi qualitatif des récifs et des
peuplements de poissons a été mis en place au niveau de 4 stations. Ce dispositif est géré par
l’OMMM. Par ailleurs, une recrudescence de l’activité cyclonique pourrait aussi avoir des incidences
majeures sur la biodiversité marine du territoire. En août 2007, le cyclone Dean a ravagé certains
secteurs du récif sud de l’île et a eu un impact important sur les forêts littorales et les plages où
pondent les tortues imbriquées. Les femelles de cette espèce reviennent généralement pondre sur les
plages où elles sont nées. Si une plage disparaît, sa population de tortue inféodée risque de
disparaître également, ou de se trouver très fragilisée. Un suivi des populations de tortues marines est
assuré par l’association Sepanmar (Société pour l’étude, la protection et l’aménagement de la nature
en Martinique). Chaque année, trois plages sont suivies pendant 15 nuits d’affilée pour évaluer
l’évolution des populations.