autonomes en 1978, de nombreux anthropologues espagnols se sont également intéressés au
flamenco comme vecteur d’une identité andalouse régionale. Hors des frontières andalouses,
la problématique de l’identité a fait l’objet de travaux sur les relations entre Gitans et
flamenco dans le Midi français. En revanche, dans le sud-ouest, la participation de cette danse
aux stratégies identitaires des Espagnols n’a pas encore été étudiée. Or, dans un premier
temps, on verra qu’à Toulouse la danse flamenca actuelle, en tant que fruit de différentes
immigrations espagnoles, offre aux dernières générations une occasion de s’approprier un
fragment de leur « culture d’origine » - fragment particulièrement emblématique de
l’Espagne. Je montrerai ensuite en quoi la différenciation culturelle mise en place par cette
pratique participe à la construction identitaire des jeunes espagnols, et des moins jeunes ; mais
également quelles en sont ses limites.
C’est en prenant moi-même des cours de flamenco depuis deux ans, que j’ai pu
constater certaines spécificités justifiant l’étude de l’enjeu identitaire présent dans cette
pratique. J’ai alors approfondi mon travail de terrain, pendant sept mois, entre 2006 et 2007,
en assistant aux cours d’autres écoles et en m’entretenant avec un certain nombre de danseurs
et de musiciens.
La première particularité constatée réside dans l’organisation des cours au sein
d’ « académies » flamencas. Qu’entend-on par « académie » ? Il s’agit d’écoles de danse
flamenca avec un fonctionnement strictement structuré : deux à trois cours quotidiennement
assurés dans lesquels sont répartis selon le niveau (débutant, moyen, avancé) une centaine
d’élèves en moyenne. Or, si Toulouse n’est peut-être pas la ville française qui compte le plus
grand nombre de cours de danse flamenca, elle est celle qui compte le plus grand nombre
d’académies : sept d’après mon recensement. A Paris par exemple, les cours de flamenco sont
nombreux mais ils prennent place dans des centres de danse, à côté des cours de salsa, de hip-
hop, de modern’ jazz… A Nîmes, où les cours de flamenco sont également nombreux, ils se
font soit dans des centres comme à Paris, soit au sein d’associations. Mais, si à Toulouse, les
académies ont une résonance particulière, d’autres cours de flamenco ont également lieu au
sein de structures telles que l’université du Mirail, le centre de danse James Carlès ou encore
des associations espagnoles telles que Casa de España ou ¡Animo!, chacun ayant une
vingtaine d’élèves. Ces différentes formes donnent lieu à deux courants distincts : d’un côté
celui, dominant, des académies, et de l’autre celui, plus marginal, des « détracteurs » du
modèle académique. Comme le montre la carte de Toulouse ci-après, ces deux courants
conduisent à la multiplication des lieux de danse flamenca (indiqués par des points rouges sur
le plan) offrant à tous les quartiers de la ville sa « place flamenca ».