ANNE JONAS LÉONARD DUPOND 800, 1515, 1944… LES GRANDES DATES DE L’HISTOIRE DE FRANCE © 2016, Éditions de La Martinière Jeunesse, une marque de La Martinière Groupe, Paris ISBN : 978-2-7324-7526-4 Dépôt légal : février 2016 Conforme à la loi n°49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse Achevé d’imprimer en janvier 2016 en U.E. 800 ? LE SACRE DE CHARLEMAGNE ! 1515 ? MARIGNAN ! 14 JUILLET 1789 ? LA PRISE DE LA BASTILLE ! Autant de dates de l’histoire de France qui sonnent dans nos têtes comme un refrain dont on a oublié les couplets. L es grandes dates de l'histoire de France, hélas le plus souvent écrites dans le sang, ne sont pas passées à la postérité par hasard. Elles sont autant de jalons de l’histoire de notre pays balisant le chemin des siècles passés comme celui de périodes plus proches. Aussi, peu importe que les émeutiers du 14 juillet 1789 n’aient délivré que sept prisonniers enfermés à la Bastille. Reste le plus important : ce jour-là, le peuple de Paris a mis à bas ce qui représentait alors le symbole de l’absolutisme et de l’arbitraire royal. Voilà pourquoi cette date s’est inscrite dans notre mémoire collective. Ce recueil raconte et commente quarante grandes dates. Faire un choix au fil de plus de vingt siècles d’histoire de France n’a pas été chose simple. Il faut espérer que les dates présentées ici seront comme une invitation à en découvrir d’autres, en dépassant les seuls chiffres pour comprendre comment elles expliquent et éclairent encore notre présent. Anne Jonas 52 AV. J.-C. VERCINGÉTORIX VAINCU À ALÉSIA En ce mois de juin 52 avant J.-C. Jules César, qui n’est pas encore le maître de Rome, est bien embêté… D éjà six ans que le sénat romain lui a confié la mission de soumettre entièrement la Gaule mais, malgré ses légions armées jusqu’aux dents, Jules César doit bien reconnaître qu’il n’y parvient pas. Pire encore ! Un jeune chef d’à peine vingt ans, dont le nom signifie « roi de la guerre » a réussi à réunir secrètement bon nombre de chefs gaulois contre lui. Il s’appelle Vercingétorix et il vient de lui infliger une sévère défaite à Gergovie. Quand on s’appelle César, perdre une bataille, ne veut pas dire perdre la guerre… Aussi, deux mois plus tard, le général romain contraint les quatre-vingt mille hommes de Vercingétorix à se réfugier dans l’oppidum d’Alésia et en commence le siège. Pour ce faire, il ne regarde pas à la dépense puisqu’il fait construire autour de cette place forte une double enceinte : deux immenses murs longs respectivement de dix-sept et de vingt-deux kilomètres et truffés de pièges ! Quelques semaines plus tard, les Gaulois affamés tentent en vain une dernière sortie, mais doivent rapidement rendre les armes et livrer leur chef. Alors que ses hommes sont réduits en esclavage, Vercingétorix est enchaîné, puis montré comme un trophée par Jules César les quatre années que dureront ses campagnes militaires. Une fois de retour à Rome, ce dernier le tiendra emprisonné pendant encore deux ans afin de l’exhiber lors de son grand triomphe le 26 septembre 46 avant J.-C. Le soir même, puisqu’il est désormais inutile, Vercingétorix sera étranglé dans sa cellule. 451 A LES HUNS BOUTÉS HORS DE GAULE Dès le début des années 400, des hordes de barbares venus de l’Est déferlent sur la Gaule. 12 cette période, les Wisigoths se sont installés dans le SudOuest, les Burgondes et les Alamans dans l’Est et le Centre, tandis que les Francs se cantonnent dans le Nord. Mais le pire est encore à venir… Au milieu du siècle, les Huns, redoutables guerriers nomades originaires des steppes d’Asie, pénètrent en Gaule après avoir terrorisé l’Orient. Leur royaume est alors immense puisqu’il s’étend jusqu’à la mer Baltique et englobe toute l’Europe centrale et orientale jusqu’au Caucase. Attila, dont le nom signifie « fléau de Dieu », est le chef de cette terrible armée. En avril 451, ce souverain, qui dit que « là où son cheval passe l’herbe ne repousse pas », franchit le Rhin en entraînant derrière lui quelque cinquante mille cavaliers. Heureusement, son avancée est arrêtée la même année, aux environs de l’actuelle ville de Châlons-en-Champagne, par le général romain Aetius qui a réussi à coaliser avec lui plusieurs peuples vivant alors en Gaule. À la suite de cette défaite, les Huns se retirent en Italie où Attila mourra deux ans plus tard. Hormis la terreur que leur nom évoque encore, les Huns ont laissé un souvenir dans nos assiettes. En effet, comme ceux-ci descendaient rarement de cheval et se nourrissaient exclusivement de viande crue, ils avaient pris l’habitude d’en glisser des morceaux sous la selle de leurs chevaux afin de les attendrir. C’est ainsi, dit-on, que fut inventé le steak tartare… 13 V 498 25 DÉCEMBRE CLOVIS BAPTISÉ À REIMS En cette nuit de Noël, le roi des Francs est baptisé en compagnie de trois mille de ses soldats. 14 ingt ans après la chute de l’Empire romain en 476, un adolescent d’à peine quinze ans hérite de son père Childéric un petit royaume franc niché au bord de la mer du Nord. Ce tout jeune roi que l’on n’appelle pas encore Clovis, mais « Chlodowech », c’est-à-dire « illustre à la guerre », se révèle vite être un fin stratège doublé d’un excellent guerrier. S’alliant tout d’abord à d’autres tribus franques, il se lance peu à peu avec succès à la conquête de la Gaule. Et c’est d’ailleurs durant cette conquête qu’il fait le vœu de devenir chrétien, comme son épouse la reine Clotilde. On raconte ainsi que durant une bataille où il était en fort mauvaise posture contre les Alamans bien supérieurs en nombre, il se serait écrié : « Dieu de Clotilde, je croirai en toi si tu me donnes la victoire ! » Une fois celle-ci obtenue avec une facilité déconcertante, Clovis tient sa parole et se fait baptiser par Rémi, l’évêque de Reims, en même temps que trois mille de ses hommes. Il est indéniable que cette conversion au christianisme a, par la suite, beaucoup aidé Clovis puisqu’elle lui a permis de bénéficier du soutien de l’Église dans toutes ses entreprises. Ainsi, à sa mort, à quarante-cinq ans, son royaume s’est-il considérablement agrandi et englobe le centre et le nord de notre actuelle France, la Bretagne ainsi que l’Aquitaine. Clovis fut également le souverain qui choisira la fleur de lys comme emblème du royaume de France et qui lui offrira Paris pour capitale en donnant à l’ancienne Lutèce le nom d’un peuple franc, les Parisii. 15 A ffolé par la percée rapide des Sarrasins, le duc Eudes d’Aquitaine appelle à l’aide le maire du palais du roi franc d’Austrasie et de Neustrie. Charles, un homme très énergique, relève aussitôt le défi et fait route avec ses troupes en direction des envahisseurs. Mais alors qu’il aurait pu les attaquer rapidement, il retarde l’affrontement de plusieurs jours. A-t-il peur ? Pas du tout ! En stratège avisé, il leur permet de se livrer à de nombreux pillages afin qu’ils soient ralentis ensuite par leur lourd butin. Car il faut bien l’avouer, les Sarrasins ne sont pas venus en Gaule pour l’envahir ou la convertir à l’islam, leur religion : ils sont là pour s’enrichir. 732 CHARLES MARTEL VAINQUEUR À POITIERS Après avoir conquis l’Espagne, voilà les Sarrasins qui enjambent les Pyrénées et pénètrent en Gaule… 16 Lorsque la bataille s’engage enfin, Charles leur oppose une résistance sans faille comme en témoignent les récits de l’époque : les Francs sont « immobiles comme un mur, l’épée au poing, comme un rempart de glace ». Très rapidement, les ennemis sont mis en déroute et préfèrent fuir vers les Pyrénées. Charles sort doublement triomphant de cette bataille : non seulement le monde chrétien voit en lui le héros qui a stoppé l’avancée des musulmans en Europe, mais il a aussi récupéré le territoire de l’Aquitaine, cédé par son allié le duc Eudes. Et ce n’est pas tout ! Il a également gagné un surnom qui traversera les siècles. Il est désormais Charles Martel, « celui qui frappe comme un marteau »… P etit-fils de Charles Martel, Charlemagne régnera à la fin de sa vie sur un royaume de plus de un million de kilomètres carrés, s’étendant de la mer du Nord à l’Italie et de l’Atlantique aux Carpates. Ce souverain ne parlant que le francique, la langue des Francs, fait preuve d’un féroce appétit de savoirs et apprend rapidement le latin, organise des écoles auprès des monastères et s’entoure d’intellectuels. Infatigable homme d’État, il passe également son temps à guerroyer, à inspecter ses terres et à rédiger des lois. 25 DÉCEMBRE 800 CHARLEMAGNE COURONNÉ EMPEREUR En sortant de la basilique Saint-Pierre de Rome, où le pape Léon III vient de le sacrer empereur, Charlemagne est furieux… Alors pourquoi ce souverain puissant et respecté est-il si mécontent à l’issu de la cérémonie qui vient de faire de lui l’empereur d’Occident ? Tout simplement parce que les choses ne se sont pas déroulées comme il le souhaitait. Lui qui voulait être sacré à la manière des empereurs romains, c’est-àdire d’abord acclamé par la foule, a été pris de court par le pape qui a déposé par surprise la couronne sur sa tête alors qu’il priait. Par ce geste, Léon III a voulu prouver que c’était lui, le représentant de Dieu sur terre, et nul autre, qui faisait de lui un empereur. Il faudra attendre plus de mille ans pour qu’un second Français soit à nouveau sacré empereur. Il s’agit de Napoléon qui, gardant la déconvenue de Charlemagne en mémoire, prendra la couronne des mains du pape pour la déposer lui-même sur sa tête ! 19 A LE PARTAGE DE VERDUN Après des années de guerres, les petitsfils de Charlemagne signent le traité de Verdun et posent les bases de la future Europe. 20 sa mort, en 814, Charlemagne laisse derrière lui un immense empire de plus de un million de kilomètres carrés. Pour préserver ce fabuleux héritage, son fils, Louis le Pieux, partage le territoire entre ses trois descendants. Hélas, la naissance sur le tard de Charles, un quatrième garçon né d’un second mariage, vient tout remettre en cause. Lothaire, Pépin et Louis, les aînés, refusent tout net de céder une partie de leurs terres à ce demi-frère ! En 838, Pépin meurt, suivi deux ans plus tard par son père. Ne restent alors plus que Lothaire, Louis et Charles qui, après des années de conflit, se mettent d’accord sous la menace grandissante des invasions vikings. Cet accord, connu sous le nom de « traité de Verdun », règle enfin le partage de l’empire franc entre les trois frères. Lothaire garde le titre d’empereur et règne sur les territoires situés entre la mer du Nord et le sud de l’Italie dont font partie les deux capitales, Aix-la-Chapelle et Rome. Louis devient roi de Germanie. Quant à celui que l’on appellera bientôt « Charles le Chauve » il hérite des territoires à l’ouest de l’Escaut, de la Meuse, de la Saône et du Rhône, territoires qui deviendront au fil des siècles notre actuelle France. 843 885 C PARIS ASSIÉGÉ PAR LES VIKINGS En 793, les Vikings commencent à faire parler d’eux en pillant le monastère d’une petite île anglaise. Désormais, plus rien ne les arrêtera… 22 es envahisseurs d’un genre nouveau, dont le nom signifie « guerriers de la mer », viennent du Danemark, de Suède et de Norvège. À partir de l’an 814, ils multiplient les raids sur les côtes d’Occident. Mais ils n’en restent pas là. Comme leurs bateaux sont à fond plat, il leur est facile de remonter le cours des fleuves pour se livrer aux pillages et ils ne s’en privent pas ! Voilà comment, en remontant la Seine, ils parviennent jusqu’à Paris en 885. Cette année-là, les Vikings n’en sont pas à leur coup d’essai puisque c’est la cinquième fois qu’ils s’en prennent à la cité. Mais cette fois-ci, la situation est bien plus grave que lors des précédents assauts. Ils sont maintenant quarante mille embarqués à bord de sept cents drakkars massés sous les murs de Paris ! Sigfrid, leur chef, tente de négocier son départ en échange d’une forte rançon et de l’autorisation de remonter la Seine jusqu’en Bourgogne, mais les Parisiens refusent et soutiennent le siège toute une année. S’ils finissent par réclamer son aide, l’empereur Charles le Gros refuse finalement de combattre et paie la rançon demandée. Les Vikings s’en vont pour ne plus jamais revenir. Vingt-cinq ans plus tard, afin d’obtenir une paix durable, une vaste terre leur sera donnée. Il s’agit de la future Normandie, la « terre des hommes du Nord ». 23