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Corée du Nord : une perestroïka à l’envers
Nucléaire, fusées et réformes économiques
sud-coréen de la Défense, Kim Kwan-jin, la Corée du Sud a été incapable de prévoir
la date du lancement de la fusée. La veille du lancement, la plupart des experts et
analystes affi rmaient, photos à l’appui, qu’il serait repoussé de plusieurs jours voire
de semaines. L’équipe en charge du suivi du dossier avait même été réduite. Depuis
la fi n de la politique de dialogue avec la Corée du Nord voulue par le Président Lee
Myung-bak, la Corée du Sud a perdu une grande partie de ses relais, contacts et
capacités d’analyse sur la Corée du Nord, ce qui limite ses capacités d’anticipation
et de réaction.
Le succès nord-coréen est avant tout politique. Pyongyang joue en permanence
de l’ambiguïté de son programme nucléaire et spatial. Le pays maintient toujours
ses programmes en dessous du niveau qui déclencherait des représailles sérieuses de
la communauté internationale. De même qu’en affi chant une capacité émergente
à menacer le continent nord-américain et pas seulement les forces américaines sta-
tionnées en Corée du Sud et au Japon, la Corée du Nord a réussi à réduire le poids
politique et militaire de la Chine à son égard. Les dirigeants nord-coréens avaient dé-
sormais le sentiment de pouvoir attendre sereinement la mise en place de la nouvelle
administration sud-coréenne issue de l’élection présidentielle de décembre 2012 et
ils se préparaient à entamer un nouveau cycle de négociations avec les États-Unis, le
Japon et la Corée du Sud au printemps ou à l’été 2013. La Corée du Nord n’a plus
besoin d’apporter la preuve de ses capacités spatiales. Un argument supplémentaire
dans le cadre des négociations à venir. Elle pourrait du même coup accepter de coo-
pérer dans le domaine spatial avec d’autres nations ou bien faire appel à des lanceurs
étrangers, russes ou chinois pour ses propres satellites. Ce succès y conforte indénia-
blement le pouvoir. Le sentiment de sécurité intérieure et extérieure qu’il a généré
chez les dirigeants nord-coréens pourrait laisser supposer que ces derniers feront
montre dans les mois qui viennent de plus d’audace en politique extérieure. Il n’est
pas à exclure qu’ils se sentiront suffi samment en confi ance pour amorcer une légère
ouverture internationale afi n de limiter l’extension de leur dépendance économique
à l’égard de la Chine.
À peine deux mois après avoir lancé avec succès une fusée Unha 3 dérivée du
missile balistique Taepodong -2 la Corée du Nord a procédé le 12 février 2013 à
son troisième essai nucléaire depuis 2006. Un couplage qui pourrait lui permettre
de menacer à terme directement le territoire américain. Toujours la provocation :
plusieurs clips ont été récemment diff usés par les médias nord-coréens dont l’un
présentant une ville américaine en fl ammes et un autre remerciant ironiquement
les États-Unis pour leur contribution indirecte au développement du programme
nucléaire nord-coréen par leur politique considérée comme agressive. Enfi n le 19
février, quelques jours avant la prise de fonction de la nouvelle présidente sud-co-
réenne Park Geun-hye, la Corée du Nord menaçait le Sud de « destruction totale » si
Document téléchargé depuis www.cairn.info - - Leveau Arnaud - 115.87.206.98 - 19/10/2014 05h15. © L'Esprit du temps
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