EN FRANÇAIS Si, durant la nuit, vous grincez des dents ou serrez les dents intempestivement, vous risquez fort de vous réveiller avec une nuque endolorie, une céphalée de tension ou une migraine. Selon de nouvelles théories, le nerf trijumeau serait impliqué dans ces processus. Les chercheurs sont parvenus à exploiter le réflexe inhibiteur du trijumeau pour réduire la contraction nocturne des dents. Un « effet secondaire » de cette méthode est une réduction de la fréquence des crises migraineuses équivalente à celle obtenue sous médicaments. Texte: Dr. phil. II Jürg Lendenmann DENT SUR DENT Du serrement des dents à la migraine Sur la piste des « serreurs de dents » Alors que des faces dentaires affûtées sont le signe d’un « grinceur de dents », les principaux critères diagnostiques chez le « serreur, de dents » sont la présence de défauts d’angulation des collets dentaires, leur répartition et morphologie, un bord aigu des collets dentaires laissant supposer un stress occlusal. D’autres indications d’un serrement nocturne des dents sont une hypertrophie des muscles masticateurs (masséters), une langue avec des bords latéraux ondu- LE TEST DU CRAYON photos: mis à disposition Un tiers des adultes – pour la plupart des femmes âgées de 30 à 45 ans – serrent par moments les dents sans but fonctionnel. La force développée dans cette « parafonction » est souvent beaucoup plus importante que dans la morsure et la mastication normales. On opère une distinction entre les sujets qui avant tout grincent des dents et ceux qui avant tout serrent les dents ; il en existe aussi qui alternent entre les deux – en fonction du schéma occlusal et de l’intensité du stress émotionnel (anxiété, tension, frustration, traumatisme des vertèbres cervicales du type « coup de lapin »). En général, ce comportement parafonctionnel s’observe durant la nuit ; il peut toutefois se produire aussi durant la journée – sans que le sujet, surtout celui qui a l’habitude de serrer les dents, ne s’en aperçoive. Le bruxisme, cette manie de grincer des dents et de les serrer (du grec bruxein = grincer des dents), provoque une contrainte excessive qui aboutit non seulement à une usure de l'émail, une abrasion des dents, une hypersensibilité, des affections parodontales, mais aussi à des troubles fonctionnels de l’appareil musculaire et des articulations temporo-mandibulaires (TMD = temporo mandibular disorders). Les « bruxomanes » se plaignent souvent de contractions des muscles de la nuque, de céphalées de tensions et de migraines. lés, des dents postérieures « courtes », une exostose (tumeur osseuse sur la mandibule) ou bien des douleurs à la palpation dans la région temporale. Nouvelle définition du bruxisme Le bruxisme s’entend avant tout comme un serrement des dents car c’est l’intensité du serrement qui détermine celle du grincement. Le bruxisme est défini comme un serrement des mâchoires l’une contre l’autre avec ou sans mouvement involontaire excentré (déplacement de la mâchoire). Tandis que la contraction des muscles temporaux est responsable du serrement des maxillaires, les muscles pterygoïdiens provoquent un mouvement latéral de la mandibule. Ce mouvement latéral permet un déplacement du condyle (partie saillante de l’articulation mandibulaire) et constitue donc un effort supplémentaire pour l’articulation. NTI – inhibition nociceptive du trijumeau Le mécanisme de protection peut être vérifié par un test simple. Serrez les dents sur un crayon positionné au niveau des molaires. Vous constaterez que vos dents ont laissé des empreintes profondes sur le crayon. Si vous placez ensuite le crayon en position centrée, au niveau incisif, et serrez de nouveau les dents avec la même intensité vous constaterez que les empreintes sont bien moins profondes. Si vous placez vos doigts sur les muscles temporaux, vous « sentirez » que la contraction est bien moindre dans le second cas. La migraine est bien plus qu’un simple phénomène vasculaire. Étant donné que chez de nombreux migraineux, les muscles péricrâniens sont sensibles, la plupart des nouvelles théories sur l’étiologie de la migraine indiquent une participation du trijumeau. Une étude a montré : les patients souffrant de céphalées présentent des valeurs des électromyogrammes (EMG) – indicateurs de l’activité du muscle temporal – 14 fois supérieures à celles des patients sans symptômes. Le trijumeau est doté de récepteurs nociceptifs qui protègent surtout les incisives inférieures plus faibles. La prise en compte de ce mécanisme naturel de protection est à la base de la conception d’un nouveau type de gouttière (attelle) ne concernant que les dents antérieures : le NTI-tss (Nociceptive Trigeminale Inhibition – tension suppression system). Le système NTI diSuite en page 37 D E N TA LW O R L D | NR.25 | DEZ. 2005 35 Suite de la page 35 foto: Thomapyrin Les acquis de l’expérience minue l’intensité de la contraction du muscle temporal dans un arc réflexe – le réflexe nociceptif d’inhibition du nerf trijumeau ou réflexe d’ouverture des mâchoires. NTI-tss vs. gouttière occlusale conventionnelle Le système NTI-tss est le premier produit autorisé par la FDA pour traiter les migraines, les céphalées de tension et les troubles de l’articulation temporo-mandibulaire diagnostiqués médicalement. Une étude comparative randomisée (NTI vs. gouttière occlusale conventionnelle) menée auprès de patients migraineux a montré: 82% des patients NTI ont eu en moyenne 77 % moins de migraines. Dans le groupe de patients porteurs d’une gouttière conventionnelle, 27% ont fait état d’une augmentation de 46% de la fréquence des migraines. L’action du système NTI est donc comparable à celle de médicaments « préventifs » – toutefois sans effets secondaires. Les gouttières traditionnelles recouvrent toute la rangée de dents et ne sont pas efficaces chez tous les patients ; au moins chez 50% d’entre eux, les symptômes demeurent inchangés, voire s’aggravent. Les résultats sont si peu satisfaisants en raison du fait que les gouttières occlusales permettent les contacts réguliers des dents latérales lors du serrement des dents, ainsi que des contacts entre les canines avec une intensité de contraction presque maximale des muscles temporaux. Une gouttière n’autorisant que le contact des dents antérieures réduit à environ un tiers l’intensité des contractions musculaires. Les gouttières de ce type, connues sous le terme de « déprogrammeurs », accroissent les chances de guérison. Le système NTI a été conçu de manière à créer un élément modifié de désocclusion sur la ligne médiane antérieure (Anterior Midline Point Stopp, AMPS). L’AMPS ainsi modifié permet de supprimer les contractions dans tous les mouvements mandibulaires. Un cours de formation impressionnant Lors du cours de formation continue NTI-tss qui s’est tenu le 8 septembre 2005 au Technopark de Zurich, Gary L. Unterbrink, B.S., D.D.S., a démontré combien il était facile à un médecin expérimenté de confectionner et d’ajuster rapidement un NTI : Une préforme du système NTI est placée sur les incisives supérieures (généralement) et centrée par rapport au point inter-incisif mandibulaire. Mélanger le Snap (méthacrylate d'éthyle), en remplir la préforme et laisser polymériser pendant deux minutes dans la bouche. Désinsérer le NTI et retirer les excès de matériau à l’aide d’une paire de ciseaux. Déposer le NTI dans un bain d’eau chaude pour achever la polymérisation et réinsérer le NTI pendant 30 secondes dans la bouche. Fraiser ensuite le NTI et ajuster les angles. « Il faut avoir du contact sur les deux incisives ; un glissement doit être possible, mais il ne doit pas y avoir d’accrochage » a expliqué Gary L. Unterbrink pendant qu’il procédait adroitement aux derniers polissages. Il faut compter en moyenne trois nuits jusqu’à ce que les patientes et les patients s’habituent à dormir avec le NTI. Le Dr. med. dent. Arwed E. Boitel – qui essaya sur lui-même le NTI avant de le prescrire à ses patients – a puisé dans son expérience nombre d’« affirmations et suppositions » intéressantes. ❙ Un NTI porté durant la nuit agit aussi durant la journée : Le modèle de comportement obtenu par le port du NTI subsiste même après le retrait du système. Les patients font état d’une modification de leur perception dentaire et se disent mieux conscientisés par rapport aux problèmes dentaires. ❙ Le concept occlusal optimal est une gouttière limitée aux dents antérieures : elle empêche le grincement des dents, mais permet le serrements des dents (moins dangereux). ❙ Un traumatisme occlusal entraîne une destruction du parodonte. ❙ Des obstacles évidents au glissement, qui provoquent des parafonctions, doivent être limés. ❙ Les craquements de l’articulation temporomandibulaire sont dus à des parafonctions sur les canines durant la journée. Des critiques issues du milieu universitaire mettaient en cause la contrainte – théoriquement – accrue des articulations temporo-mandibulaires. Certes, on ne peut guère affirmer que le système NTI-tss n’affecte pas ces articulations. Toutefois, selon le Dr Boitel, les forces agissantes sont minimes. En enduisant la gouttière de vernis à ongles ou en passant un feutre résistant à l’eau sur la gouttière avant son insertion, on pourra déterminer facilement l’intensité de la pression sur le NTI et vérifier si les dents provoquent un limage. Ces traces montrent généralement que la contrainte est très faible. De plus, le feutre n’est habituellement limé que sur le tiers postérieur du NTI. Le NTI a fait à ce jour ses preuves chez environ 9000 patientes et patients en Suisse. Les premières études en provenance des cliniques universitaires suisses ne devraient pas tarder à être publiées. ■ Informations complémentaires www.nti-tss.com Sources: Cours de perfectionnement « Bruxisme et migraine ». Approfondissement et techniques NTI-tss avancées, le 8 septembre 2005 au Technopark de Zurich. Boyd JP, et al. Bezähmung der Muskelkräfte, die die tägliche Zahnmedizin bedrohen. Postgraduate Dentistry (Peer Review), Nov 2000. www.karrdental.ch >> NTI-tts D E N TA LW O R L D | NR.25 | DEZ. 2005 37