propositions page 1 sept 2014 Économie solidaire de l`art

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Économie
solidaire
de l’art
propositions
page 1
sept 2014
Au début de l’été, quatre artistes1 ont initié sur Facebook un groupe de réflexion autour d’un projet
«d’économie solidaire de l’art», visant à améliorer globalement la situation économique des artistes
plasticiens en France et les conditions de leur exercice. Deux mois plus tard, le groupe initial s’est élargi
et la page a réuni plus de deux mile personnes (artistes, critiques et journalistes, commissaires,
professionnels, associations…) venues soutenir, discuter et enrichir cette initiative, qui a été relayée
également par Le Quotidien de l’Art et Le Monde.
Le site www.economiesolidairedelart.net a pris le relais de cette page pour structurer et présenter
l’ensemble de ces propositions. Nous publions ici le manifeste du projet.
À l’origine et au centre d’une économie de l’art qui donne lieu à une intense activité, les artistes
plasticiens et certaines professions artistiques indépendantes travaillent paradoxalement, pour la
plupart d’entre eux, dans une grande précarité. Les logiques d’excellence qui régissent légitimement le
monde de l’art ne justifient ni le travail gratuit de ses acteurs, ni les décalages exponentiels entre la
production des œuvres et la distribution de la valeur qui en résulte.
Le groupe Économie solidaire de l’art vise à discuter et proposer des dispositifs permettant d’améliorer
significativement cette situation, à destination des artistes et des professionnels indépendants du
secteur, en impliquant l’ensemble des acteurs concernés, privés et publics.
En parallèle des réflexions et mouvements menés autour du régime des intermittents du spectacle, qui
questionnent plus généralement les conditions de l’emploi partiel et notamment dans la culture, les
artistes plasticiens n’ont pour leur part jamais ouvert à grande échelle un débat sur les conditions de
leur rémunération et de leur exercice.
Nous pensons aujourd’hui possible de dépasser l’individualisme et l’isolement qui prévalent souvent
dans ces professions, pour inventer de nouveaux dispositifs solidaires de soutien de l’art contemporain.
Le débat est ouvert ; ce groupe invite le plus largement possible les artistes et professionnels de l’art à
y participer, en vue de premières rencontres de travail à venir.
Objectifs et inspirations
L’objectif de ces propositions est à la fois éthique et économique. Elles visent à soutenir les artistes
plasticiens professionnels (tous médiums, hors spectacle vivant) et les professionnels indépendants de
l’art (commissaires, critiques, graphistes indépendants), soit les deux types d’acteurs les plus fragilisés
par le système actuel.
Le projet s’inspire aussi d’exemples existants. Au Canada, la charte CARFAC-RAAV garantit
les rémunérations minimales des artistes pour toute intervention depuis 1968. Le label britannique
Paying Artists et le projet américain Wage For Work militent dans ce sens. En France, on se réfèrera
à l’étude « Observation participative et partagée des arts visuels en Pays de la Loire » publiée
dans le cadre de la Conférence Régionale Consultative de la Culture en 2013, qui aborde les mêmes
problématiques. Les réflexions déjà menées par les organisations telles que le Cipac ou la Fraap
pourraient contribuer à ce projet. Enfin (dans des contextes différents) les logiques de soutien mises
en œuvre par le CNC et le CNL ont contribué de manière décisive au développement économique
des filières du cinéma et du livre.
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Pierre Beloüin, Carole Douillard, Thierry Fournier et P. Nicolas Ledoux
Économie
solidaire
de l’art
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Un projet en trois volets
1. Création d’une charte de rémunération minimale pour toute intervention artistique en France
et garantissant le respect du droit de représentation, lorsque le bénévolat n’est pas initié par les artistes
eux-mêmes. On visera également à instaurer un pourcentage pour l’artiste à chaque vente et revente
en galeries, ainsi qu’une majoration du pourcentage de droit de suite pour les artistes vivants.
2. Instauration d’une représentation des artistes dans toutes les commissions de bourse, à parts
égales avec les financeurs et des professionnels de l’art (critiques, galeristes, curateurs) lorsque
ce n’est pas déjà le cas.
3. Création d’un fonds de soutien. Un pourcentage obligatoire, réduit mais constant,
de toutes les opérations et productions artistiques en France serait consacré au développement
de l’art contemporain : productions, ateliers d’artistes, soutien des artistes et professionnels les plus
précaires, renforcement des retraites.
On entend par opérations : les créations, productions, ventes privées en galeries et salles de ventes,
foires, productions, billetteries, musées, vente d’images, reproduction d’œuvres auprès des banques
d’images privées et publiques, etc.
Le revenu des artistes eux-mêmes y contribuerait, dans l’esprit d’un dispositif de solidarité.
On considèrerait que seraient éligibles à ce dispositif tous ceux qui ont la création artistique
pour activité principale (affiliés et assujettis à la Maison des artistes Sécurité sociale et à l’Agessa)
et qui ne sont pas salariés, ainsi que les artistes enseignants, préférentiellement s’ils sont vacataires.
Moyens
La conception économique de ces dispositifs doit intégrer une notion de variabilité qui permettrait
une mise en application progressive.
Le troisième volet (fonds de solidarité) accompagnerait les artistes et professionnels indépendants
dont le ratio revenus / charges serait inférieur à un certain seuil, l’aide étant dégressive. Elle serait
proportionnelle aux recettes du fonds, sans minimum garanti, afin que le dispositif ne soit jamais
déficitaire. Ces revenus seraient imposables.
Un pourcentage serait attribué à la caisse de retraite
complémentaire afin de revaloriser le point.
La mise en œuvre d’un tel dispositif nécessiterait la création d’une instance professionnelle représentative
(ou son adossement à une structure existante), chargée de diffuser, convaincre et négocier auprès
des différents acteurs privés et publics de l’économie de l’art en France. L’incitation à participer
au fonds de soutien pourrait éventuellement s’effectuer par le biais d’une défiscalisation et d’une fondation,
exactement comme le mécénat.
Perspectives
Nous proposons l’organisation d’une rencontre publique qui permettrait de donner la parole à des
acteurs concernés et/ou spécialistes de ces questions (artistes, structures, associations, économistes,
chercheurs, journalistes, etc.), invités à contribuer au projet. Les actes de cette rencontre seraient
publiés. On visera ensuite la création d’une association ou l’adossement à une structure existante.
www.economiesolidairedelart.net / [email protected]
Page Facebook : www.facebook.com/groups/economiesolidairedelart
Etude CRCC Pays de la Loire : http://bit.ly/1rT0OHR/ Charte canadienne CARCC : www.carcc.ca/documents/PDFfre.pdf
Paying Artists (UK) : http://www.payingartists.org.uk / Wage For Work (USA) : www.wageforwork.com
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